Ema - Les Fiches du Cinéma
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LE MENSUEL Ema SEPTEMBRE 2020 de Pablo Larraín Adolescentes de Sébastien Lifshitz À ma place de Jeanne Dressen Antoinette dans les Cévennes de Caroline Vignal Les Apparences de Marc Fitoussi • Kajillionaire de Miranda July Un pays qui se tient sage de David Dufresne #18 rencontre avec Christian Petzold pour Ondine
SOMMAIRE FILMS DU 2 SEPTEMBRE 2020 Antigone de Sophie Deraspe HHH Ema de Pablo Larraín HHHH La Jeune fille à l’écho de Arunas Zebriunas HHH Poissonsexe de Olivier Babinet HH Police de Anne Fontaine HHH FILMS DU 9 SEPTEMBRE 2020 Adolescentes de Sébastien Lifshitz HHHH À ma place de Jeanne Dressen HHH Le Bonheur des un... de Daniel Cohen H Cyril contre Goliath de Thomas Bornot HHH La Daronne de Jean-Paul Salomé HH Le Fantôme de Laurent Terzieff de Jacques Richard HHH Les Joueuses de Stéphanie Gillard H Les Nouvelles aventures de Rita et Machin de Pon Kozutsumi et Jun Takagi HHH Remember Me de Martín Rosete HH Rocks de Sarah Gavron HHH Sole de Carlo Sironi HH Sur la route de Compostelle de Fergus Grady et Noel Smyth HH Un soupçon d’amour de Paul Vecchiali HHH Yuki de Tadashi Imai HH FILMS DU 16 SEPTEMBRE 2020 Africa mia de Richard Minier et Édouard Salier H Antoinette dans les Cévennes de Caroline Vignal HHH Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait de Emmanuel Mouret HH Honeyland de Tamara Kotevska et Ljubomir Stefanov HH J’irai mourir dans les Carpates de Antoine de Maximy m Les Mal-aimés de Hélène Ducrocq HHH La Maquisarde de Nora Hamdi H Trio de Ana Dumitrescu H
FILMS DU 23 SEPTEMBRE 2020 Ailleurs de Gints Zilbalodis HHH Les Apparences de Marc Fitoussi HHH Balades sous les étoiles Film collectif HHH Blackbird de Roger Michell HHH Éléonore de Amro Hamzawi H Fin de siècle de Lucio Castro HH Lux Æterna de Gaspar Noé HH Ondine de Christian Petzold HHH Rencontre avec Christian Petzold Pierre Cardin de P. David Ebersole et Todd Hughes HHH Sing Me a Song de Thomas Balmès HH Stripped de Yaron Shani HHH Youpi ! C’est mercredi de Siri Melchior HHH FILMS DU 30 SEPTEMBRE 2020 À cœur battant de Keren Ben Rafael HHH Autonomes de François Bégaudeau HH Billie de James Erskine HHH La Femme qui s’est enfuie de Hong Sangsoo HH Les Héros ne meurent jamais de Aude Léa Rapin HH Josep de Aurel HHH Kajillionaire de Miranda July HHH L’Ordre moral de Mario Barroso HHH Un pays qui se tient sage de David Dufresne HHH
ÉDITO Disney veut-il vraiment tuer le cinéma ? C’était le 11 mars dernier, dans une grande salle des Champs- LES FICHES DU CINÉMA Élysées. Devant le petit monde de la critique de cinéma française, 26, rue Pradier venu assister à la projection de Mulan, l’attaché de presse de Disney 75019 Paris se voulait rassurant. “Pour l’instant, la sortie du film est toujours Administration & Rédaction : programmée le 25 mars.” Deux semaines plus tard. Une éternité. 01.42.36.20.70 Fax : 09.55.63.49.46 Le Covid-19, le confinement, les règles sanitaires ont terrassé les .............................................................. exploitants de salles. Disney a donné le coup de grâce le 5 août RÉDACTEUR EN CHEF en annonçant que l’adaptation live du dessin animé de 1998, Nicolas Marcadé reportée au 19 août après avoir été annoncée le 22 juillet quelques redaction@fichesducinema.com RÉDACTEUR EN CHEF ADJOINT semaines plus tôt (vous suivez toujours ?), rejoindrait directement Michael Ghennam sa plateforme Disney+. Et ce partout sauf... en Chine, où le film aura michael@fichesducinema.com les honneurs du grand écran. SECRÉTAIRE DE RÉDACTION La FNCF (Fédération nationale des cinémas français) s’est donc Thomas Fouet thomas@fichesducinema.com fendue le 5 août d’un communiqué dans lequel, sans jamais citer .............................................................. Disney, elle regrettait “profondément que certains films, notamment ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO à potentiel mondial, ne puissent sortir en salle en France”. François Barge-Prieur, Adèle Remerciant au passage les distributeurs “qui ont confirmé la sortie Bossard-Giannesini, Isabelle Boudet, Jef Costello, Marguerite Debiesse, en salle pour leurs films faisant ainsi le meilleur choix pour leur film Clément Deleschaud, Paul Fabreuil, et pour le public” - sans citer de nom là non plus. Pas dur d’imaginer Florian Fessenmeyer,Thomas à qui songeaient les exploitants : le 27 juillet, Warner avait annoncé Fouet, Margherita Gera, Michael très officiellement la sortie fin août de Tenet, le blockbuster de Ghennam, (Pierre-)Simon Gutman, Roland Hélié, Simon Hoareau, Astrid Christopher Nolan, passé du statut de bon cinéaste hollywoodien Jansen, Amélie Leray, Keiko Masuda, amoureux de la pellicule à celui de sauveur providentiel de Sulamythe Mokounkolo, Julien Nève, l’exception culturelle française. Marine Quinchon, David Speranski, Le feuilleton aura abondamment alimenté la presse et déchaîné les Gilles Tourman, Nathalie Zimra. Les commentaires des «Fiches» réseaux sociaux qui ont partagé en masse la vidéo de cet exploitant reflètent l’avis général du comité de Palaiseau (Essonne) massacrant le visuel en carton de Mulan .............................................................. pour poser devant l’affiche de Tenet. Il n’était plus question de faire PRÉSIDENT dans la demi-mesure. L’été est traditionnellement une saison pas François Barge-Prieur ADMINISTRATION forcément riche en films mais qui déroule les grosses productions administration@fichesducinema.com américaines. En 2019, Toy Story 4 et Le Roi Lion - deux films TRÉSORIER estampillés Disney - avaient raflé la mise. Le premier avait attiré Guillaume de Lagasnerie 1 505 679 spectateurs la semaine du 26 juin, le second 3 253 000 la Conception Graphique 5h55 semaine du 17 ! À titre de comparaison, les films qui ont assuré le www.5h55.net plus d’entrées cette année à la même période, La Bonne épouse .............................................................. (sorti le 11 mars, stoppé net et ressorti après le confinement) et «Les Fiches du Cinéma». Divorce Club, la comédie de Michaël Youn, n’ont suscité péniblement Tous droits réservés. Toute reproduction même partielle des que 167 748 et 218 282 entrées. textes est soumise à autorisation. Un marasme dont il semble que les salles se sortent petit à petit. Photo de couverture : En août, la fréquentation est repartie à la hausse avec plus d’un Ema (Potemkine Films) million de spectateurs par semaine et plusieurs films sortis juste © Fabula WWW.FICHESDUCINEMA.COM après le confinement ont globalement réussi leur pari : La Bonne
épouse (qui a eu la bonne idée de revenir dès (mais c’est aussi le cas de Warner et de son la réouverture des salles), Tout simplement très lucratif parc Harry Potter à Londres), noir, Scooby (8 juillet), Divorce Club (14 juillet) Disney a rongé son frein en mars. Sommé ont attiré en salle plus de 500 000 spectateurs, par l’État français de reporter la mise en plus de 600 000 pour les trois premiers. ligne de sa plateforme pour des soucis de D’autres ont souffert, comme le très drôle bande passante, il a vu ses concurrents rafler Terrible jungle, pourtant porté par un casting les films initialement prévus au cinéma, de choix. Autant dire que Tenet, qui a reçu des comme le Pinocchio de Matteo Garrone, parti premières critiques globalement élogieuses directement sur Amazon Prime Video. Du et qui a savamment entretenu sa promo en coup, la plateforme s’alimente de films qui amont (pubs à la télé, effets de teasing sur les devaient initialement sortir en salle, comme réseaux sociaux), aura un boulevard devant lui. Le Seul et Unique Ivan ou Artemis Fowl. En quatre jours, le film, sorti dans les salles Kenneth Branagh, le réalisateur de ce dernier, de 43 pays, aurait déjà rapporté, selon Variety, actuellement à l’écran dans... Tenet, doit 53 millions de dollars, dont 6,7 en France encore l’avoir en travers de la gorge. où Tenet aurait enregistré près de 850 000 Autre problème : la stratégie du rouleau entrées. Mieux que Dunkerque et Interstellar à compresseur déployée depuis plusieurs leur démarrage ! années. Il est bien loin le temps où on allait Il y a clairement de la place pour les grosses voir “le Disney de l’année”. Aujourd’hui, il productions américaines tant attendues par y a Disney, Pixar, Marvel, Star Wars, les des spectateurs qui, donc, se risquent quand films de la Fox, Blue Sky... En 2020, la firme même en salle, et notamment pour des films annonçait pas moins de 22 films au cinéma ! très familiaux comme Les Blagues de Toto. L’offre pléthorique ne permet plus de “créer Alors, c’est quoi le problème de Disney ? l’événement”. Du coup, il est probable que L’affaire a même des allures de punition : Disney ait choisi de miser plutôt sur le Marvel Mulan sort en salles dans “les pays où Black Widow que sur Mulan. Malgré tout, il Disney+ n’est pas disponible” (la Chine donc) était urgent de sortir le film de Niki Caro, et ce mais en SVOD partout ailleurs... et pas à sur n’importe quel support. Car à la différence n’importe quel prix. Les studios hollywoodiens d’un Tenet, un film Disney rapporte au moins ont déclenché un tollé en annonçant début autant en produits dérivés qu’en salles. Et il août que pour visionner le film sur Disney+ les téléspectateurs américains devraient suffit d’aller faire un tour à la Fnac ou dans s’acquitter de la somme de 29,99 dollars des magasins de jouets : albums de films, (environ 25 euros). En France, le film romans, poupées... Mulan est de retour. Ce sera probablement disponible sans frais n’est pas un Star Wars, mais on imagine que supplémentaires - même si Disney France Disney avait pris avec les fournisseurs des n’a pour l’heure pas confirmé l’information de engagements qu’il fallait bien honorer. Variety. Ce qui est sûr, c’est que le film ne sera Enfin, il y a peut-être une autre raison. pas disponible sur la plateforme le 4 septembre Oui, Mulan est un film spectaculaire qui comme ce sera le cas aux États-Unis. Il s’agit méritait un écran de cinéma. Mais est-ce de limiter la casse. Toujours selon Variety, un chef-d’œuvre ? Loin de là. Les spectateurs Disney compte grâce à cette stratégie récolter iront voir Tenet, et ils y retourneront. grâce à Mulan environ 375 millions de dollars Seraient-ils retournés voir Mulan, dans de recettes (317 millions d’euros) - moins les conditions sanitaires actuelles ? On en qu’attendu, mais largement de quoi amortir le doute. Si la France choisit d’adopter la même budget du film, estimé à 70 millions de dollars stratégie que les États-Unis, on ne saurait que (59 millions d’euros). trop conseiller au public de bouder cet ersatz On sent que la firme de Mickey ne sait plus de Tigre et Dragon pour lui préférer la version, sur quel pied danser. Plombé par la fermeture bien plus drôle, de 1998. Une époque où on des cinémas et celle de ses parcs d’attraction allait voir “le Disney de l’année”. MARINE QUINCHON
Antigone de Sophie Deraspe Cette adaptation réussie de la pièce antique transpose DRAME Adultes / Adolescents les ressorts du théâtre grec au monde contemporain et à ses problématiques (l’immigration, les réseaux u GÉNÉRIQUE sociaux). La qualité de l’interprétation du rôle Avec : Nahéma Ricci (Antigone), Rachida Oussaada (Ménécée), d’Antigone mérite également d’être signalée. Nour Belkhiria (Ismène), Rawad El-Zein (Polynice), Hakim Brahimi (Étéocle), Paul Doucet (Christian), Antoine Desrochers (Hémon), Benoît Gouin (l’enquêteur), Jean-Sébastien Courchesne (Maître O’Neil), Lise Castonguay (le psychiatre oracle), Nathalie Tannous (la juge), Catherine Larochelle (Maître Julie Édouin), Zalfa Chelhot (la policière), Sébastien Beaulac (le gardien de prison), L. Fernando Becerra Sánchez (l’ami d’Étéocle), Eric Clark (l’agent du CBSA). Scénario : Sophie Deraspe Images : Sophie Deraspe Montage : Geoffrey Boulangé et Sophie Deraspe 1er assistant réal. : Pascal Elissalde Scripte : Lorette Leblanc Musique : Jean Massicotte et Jad Orphée Chami Son : Frédéric Cloutier et Stéphane Bergeron Costumes : Caroline Bodson Effets visuels : Guillaume Chaboud Dir. artistique : Yola van Leeuwenkamp Maquillage : Joan-Patricia Parris Production : ACPAV Producteur : Marc Daigle Producteurs associés : Isabelle Couture, Robert Lacerte et Bernadette Payeur Dir. de production : François Bonneau Distributeur : © ACPAV Les Alchimistes. HHH Antigone est une adaptation réussie de la pièce antique de Sophocle. La réalisatrice québécoise Sophie Deraspe en a cependant largement remanié la structure pour la transposer de nos jours et dans le cadre 109 minutes. Canada (Québec), 2019 d’une famille réfugiée. Seul demeure l’essentiel, notamment Sortie France : 2 septembre 2020 la problématique de la justice : l’opposition entre la loi u RÉSUMÉ humaine et la loi divine. C’est ici une jeune fille de 16 ans Antigone est une jeune fille aux résultats scolaires qui va s’opposer à la justice canadienne, représentation de brillants dont la famille, ses quatre frères et sa grand-mère, la loi et des conventions collectives. Antigone est intelligente, est venue se réfugier à Québec quand elle était petite. mais elle reste une adolescente immature. Malgré Un jour, son frère aîné Étéocle est abattu lors la précarité de sa situation, elle fait s’évader son frère et d’une intervention policière. Son autre frère, Polynice, se présente devant la justice avec pour seule arme sa foi est arrêté. En raison de ses antécédents judiciaires, dans l’action qu’elle mène pour protéger sa famille. La jeune et malgré la circulation d’une vidéo prouvant son actrice Naéma Ricci incarne Antigone avec conviction, innocence, il n’est pas libéré. Antigone décide alors de le sauver en prenant sa place en prison pendant un personnage alliant à la fois sang froid et émotion. qu’il s’évadera. Comme elle l’avait prévu, elle est arrêtée Elle reste au début dans le stéréotype de la lycéenne et jugée. brillante un peu solitaire, mais se transforme en personnage SUITE... Cependant la procédure se déroule mal, mythologique dès lors qu’elle coupe très court ses cheveux car elle refuse l’aide d’un avocat tout en reconnaissant pour prendre la place de son frère. Ses yeux olive affrontent sa culpabilité. De plus, les faits qui lui sont reprochés alors la réalité - une frontalité que l’on retrouve d’ailleurs sont plus graves que ce à quoi elle s’attendait. Sur dans son visage qui, régulièrement, fait face à la caméra. le conseil insistant des juges, Antigone rencontre un avocat, Ce visage se retrouve aussi dans les graffs réalisés par O’Neil, qui lui ouvre les yeux sur la réalité du procès. le petit ami d’Antigone qui publie également des photos sur Son petit ami Hémon fait son possible pour gagner les réseaux sociaux. De la pièce originale, la réalisatrice la sympathie du public, notamment sur les réseaux a aussi conservé le chœur, ici composé de l’ensemble sociaux. Le procès semble tourner en sa faveur quand Polynice, qui a été arrêté dans un bar du quartier, des fragments de vidéos “hashtaguées” sur les réseaux est convoqué. Cela bouleverse Antigone qui s’est sociaux et que les jeunes utilisent pour attirer l’attention sacrifiée pour lui. Le père de Hémon, un homme politique du public. Se plaçant dans une position ambiguë, le chœur local, propose à la jeune fille de la faire sortir de prison de l’ère numérique joue un rôle de tierce partie et de devenir son tuteur. Elle refuse et retourne dans incontournable. _K.M. son village natal avec Polynice et Méni. Visa d’exploitation : 152612. Format : 1,85 - Couleur - Son : Dolby SRD. © les Fiches du Cinéma 2020
Ema (Ema) de Pablo Larraín En mettant au cœur de son dernier film une danseuse DRAME PSYCHOLOGIQUE Adultes / Adolescents prise dans une cruelle tragédie de la maternité, Larraín confronte son cinéma au renouvellement des u GÉNÉRIQUE corps et des générations, tout en retrouvant, après Avec : Mariana Di Girólamo (Ema), Gael García Bernal (Gastón), avoir signé coup sur coup deux biopics, son essence. Santiago Cabrera (Aníbal), Paola Giannini (Raquel), Cristián Suárez (Polo), Giannina Fruttero (Sonia), Josefina Fiebelkorn (Perla), Mariana Loyola (Sara), Catalina Saavedra (Marcela), Paula Luchsinger (María), Paula Hofmann (Laura), Antonia Giesen (Renata), Susana Hidalgo (Paulina), Eduardo Paxeco (Carlos), Natalia Bakulic (Lisa), Amparo Noguera (la directrice du nouveau collège), Diego Muñoz (Facundo), Claudia Cabezas (la professeure Pancha), Paula Zúñiga (la professeure Delia), Trinidad González (la professeure Claudia), Claudio Arredondo (le directeur du collège), Gastón Salgado (le professeur Apoyo), Josué Rojas, Maykol Lara, Francisco Martínez, Emilio Edwards. Scénario : Guillermo Calderón, Pablo Larraín et Alejandro Moreno Images : Sergio Armstrong Montage : Sebastián Sepúlveda 1er assistant réal. : Oscar Godoy Musique : Nicolas Jaar Son : Roberto Espinoza Chorégraphies : José Luís Vidal Décors : Estefanía Larraín Costumes : Muriel Parra et Felipe Criado Quiroz © Fabula Maquillage : Margarita Marchi Production : Fabula Producteur : Juan De Dios Larraín Productrices déléguées : Rocío Jadue, HHHH L’étonnante carrière de Pablo Larraín est Mariane Hartard et Andrea Undurraga Producteurs associés : Paula kraushaar, Catalina Adoni et Alfredo Adoni Distributeur : en train de ressembler à une forme de zigzag : un pour Potemkine Films. eux et un pour lui, les œuvres plus accessibles (mais pas moins fascinantes) telles No ou Jackie se mêlant 102 minutes. Chili, 2019 aux opus plus arides et personnels comme Neruda ou Sortie France : 2 septembre 2020 Ema, donc. Dans ce film, où l’on retrouve Gael García u RÉSUMÉ Bernal, en train de devenir son acteur fétiche, Larraín tente Les répétitions pour le dernier spectacle de danse mis une démarche presque paradoxale. Il semble en effet en scène par Gastón se passent mal. Une tension de revenir aux sources de son cinéma, loin des grosses moins en moins sourde se crée entre le chorégraphe et machines, avec une production légère et peu onéreuse, les plus jeunes danseurs de sa troupe, dont sa propre tout en pratiquant le renouvellement, par la rencontre compagne, Ema. Les disputes entre cette dernière et son avec d’autres formes, d’autres disciplines, d’autres corps. mari sont nombreuses et se concentrent sur le sujet de Plus précisément celui de l’actrice principale, Mariana Polo, l’enfant qu’ils avaient adopté puis rendu après que Di Girólamo. Une comédienne et danseuse dont celui-ci avait accidentellement brûlé sa tante. Ema tente de revoir Polo, mais la responsable de l’adoption refuse les mouvements, l’art, constituent le cœur du film, vigoureusement, jugeant très sévèrement la décision prise les nombreuses scènes de danse apparaissant comme par Ema et Gastón. l’armature du récit. Elle est vue à travers les yeux SUITE... Les ressentiments s’accumulent et Ema multiplie d’un García Bernal que l’on devine alter ego du réalisateur, les liaisons. Elle vit ainsi en parallèle deux aventures, l’une contemplant cette jeune femme et sa danse sans toujours avec une femme mariée, Sara, l’autre avec un beau barman, savoir comment justement la regarder, ou l’intégrer, Anibal. Gaston finit aussi par tromper Ema, ce qui provoque à ses propres chorégraphies. Ce choc entre deux univers la fureur de cette dernière. Les disputes sont fréquentes artistiques, entre la jeunesse et une forme de maturité, et finissent toujours par revenir vers Polo et l’amour trahi se double d’une intrigue très larraínienne, sur l’abandon qu’il avait pour “maman Ema”. La danseuse multiplie par Ema d’un petit garçon adopté, et les efforts déployés les chorégraphies avec ses amies, remettant ainsi en cause par l’héroïne pour tordre le monde, la réalité, vers les choix artistiques de Gastón. Elle prend un travail de professeur de danse dans une école. Lors de son premier ses souhaits. Les démiurges du cinéma de l’auteur changent cours apparaît, parmi les élèves, Polo. Ce hasard n’en est pas de camp : ils sont désormais observés, mais la fascination un : les parents qui l’ont adopté ne sont autres que Sara et ainsi créée remplace fort bien l’identification, et font de Annibal. Ema surgit dans leur maison, où elle conduit Gastón, Ema une belle nouvelle pierre dans la filmographie de l’un et propose ainsi, sans paroles, une existence où tous des plus passionnants cinéastes contemporains. _S.G. les quatre pourraient cohabiter et s’aimer tout en élevant Polo. Visa d’exploitation : 152669. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD Atmos. © les Fiches du Cinéma 2020
La Jeune fille à l’écho (Paskutine atostogu diena) de Arunas Zebriunas En vacances chez son grand-père près de la mer, Vika, CHRONIQUE INITIATIQUE Adultes / Adolescents 12 ans, se lie d’amitié avec Romas, venu de Moscou. Elle lui révèle le secret d’un rocher porteur d’écho. u GÉNÉRIQUE Mais Romas la trahit... Une revisitation magique Avec : Lina Braknyté (Vika), Valeri Zoubarev (Romas), Bronius du mythe d’Écho et de Narcisse. Babkauskas (le père de Vika), Kalju Karmas (le grand-père de Vika). Scénario : Youri Naguibine, Arunas Zebriunas et Anatolijus Cercenko D’après : la nouvelle Ekho de Youri Naguibine Images : µ Jonas Gricius Montage : Izabele Pinaityte Musique : Algimantas Brazinskas Son : Stasis Vilkiavicus et Piatras Lipeika Décors : Algirdas Nicius Production : Lietuvos Kino Studija Distributeur : E.D. Distribution. © E.D. Dist. HHH “ Les crabes passent leur vie à ramper. À quoi servent-ils ? Essaie d’attraper l’écho”. Cette phrase de Vika à Romas clôt à merveille ce quasi conte, prix du jury à Locarno en 1965, sensible et touchante 66 minutes. Lituanie, 1964 réinterprétation du mythe d’Écho et de Narcisse Sortie France : 2 septembre 2020 qu’il nous donne, qui plus est, l’impérieux désir de u RÉSUMÉ redécouvrir. D’un côté la fillette aérienne, indépendante, Dernier jour de vacances pour Vika, 12 ans, qui aime jouer généreuse, gaie comme ce rire qui fuse dans la cabine du cor de chasse sur la plage, écouter le vent et la mer et téléphonique, attentive aux traces, au vent, aux bruits guetter les dauphins. Son grand-père part pêcher. Le temps et libérant tout ce qu’elle touche ou appelle (écho, que son père vienne la chercher, elle rencontre, sur la grève, bouée, pierres, etc.)... De l’autre l’univers terrien un groupe de garçons. Leur chef défie un challenger de voire trivial, des garçons animés par l’envie de commander, ramener un crabe peint d’une croix qu’il a jeté à l’eau. En le sentiment grégaire, le plaisir d’humilier, notamment réalité, il a triché. Vika dénonce son stratagème. Tous partent, les filles, en cette période de la vie où la sexualité sauf Romas, qui rêve de s’intégrer au clan. Il confie à Vika arriver de Moscou avec ses parents. Lui ayant fait prêter commence à affleurer et à provoquer de la gêne serment de nager sous l’eau 20 secondes, elle l’emmène chez beaucoup d’entre eux. À ce titre, Vika est bel et en un endroit secret : le Doigt du Diable, piton rocheux où bien l’incarnation du dauphin que l’on entraperçoit, un soldat tint tête aux nazis et d’où reste un écho qui lui médiateur entre les deux mondes : céleste (où il convient répond quand elle l’appelle. Ils passent la journée ensemble. d’inclure le grand-père, porteur de traditions) et terrestre, SUITE... Le groupe revient alors qu’elle se baigne nue. Pour regroupant le père à travers sa vision rationnelle de plaire au chef, Romas ne lui rend pas ses habits. Humiliée, l’écho ou bien encore la montre qu’il offre à sa fille. elle les récupère et s’en va. Elle retrouve sa joie dans Les garçons se muant quant à eux en avatars une cabine téléphonique en appelant des gens au hasard. des forces chtoniennes, à l’image des crustacés qu’ils Romas conduit le groupe au rocher. L’écho ne répondant pourchassent... On l’aura compris, avec ses noirs et blancs pas, il s’enfuit par peur de leurs représailles. Le père de (le pluriel s’impose) frôlant l’onirisme, ses images Vika arrive, rencontre Romas hélant Vika et l’aide à appeler l’écho. En vain. Seul son chien y parvient. Le grand-père en perpétuel mouvement (zooms, travellings, personnages fait ses adieux à Vika : c’est la fin des vacances... Romas courant et marchant...), ce film n’est pas à regarder défie le chef et ramène le crabe. Il retrouve Vika au car avec passivement. Car si son récit sur la confiance trahie son père. Il lui montre le crabe qui l’a fait chef. Elle l’invite et la volonté de reconnaissance est ténu, l’espace ouvert à plutôt attraper l’écho et part. Romas tente d’attraper... à l’imaginaire est, quant à lui, infini. _G.To. un camion pour la suivre. Visa d’exploitation : 153202. Format : 1,37 - Noir & Blanc - Son : Mono. © les Fiches du Cinéma 2020
Poissonsexe de Olivier Babinet Film-valise (à l’image de son titre), Poissonsexe FANTAISIE Adultes / Adolescents hésite entre la comédie romantique, la sotie écolo et le film de déprime péri-urbain. Si cette indécision u GÉNÉRIQUE séduit, elle confère aussi au film une légère forme Avec : Gustave Kervern (Daniel Luxet), India Hair (Lucie), Ellen d’inconséquence - Poissonsexe tire à vue, mais à blanc. Dorrit Petersen (Eeva Kukkola), Okinawa Valérie Guérard (Bao), Alexis Manenti (Éric), Sofian Khammes (Alaïde), Jean-Benoît Ugeux (Georges), Edson Anibal (Abou), Justin Eng (Jérémie), Jerry Di Giacomo (Thomas Von Bagh), Masa Sawada (le docteur Shimura), Alain Guillo (le père de Lucie), Clément Fasquel, Mariana Giani et Yves Van (les journalistes), Charles-Hubert Morin (le JRI), la voix de Giv Anquetil (le traducteur de Von Bagh), David Fouqueray et Maja Neskovic (les journalistes TV), et Albertine Lastera (Miranda.org). Scénario : Olivier Babinet et David Elkaïm, avec la collaboration de Julie Peyr, d’après une idée de Olivier Babinet Images : Timo Salminen Montage : Albertine Lastera 1er assistant réal. : Clément Comet Scripte : Élise Van Durme Musique : JB Dunckel Son : Paul Maernoudt, François Aubinet et Franco Piscopo Décors : Pierre Pell Costumes : Fred Cambier Effets visuels : Guillaume Pondard et Stéphane Thibert Maquillage : Laetitia © Comme des Cinémas - Tarantula Bille Casting : Lan Hoang-xuan Production : Comme des Cinémas Production associée : NBN Coproduction : Tarantula, VOO et BeTV HH Ce qui surprend en premier lieu dans Poissonsexe, Producteurs délégués : Masa Sawada et Anne Pernod-Sawada Producteur exécutif : Karim Cham Coproducteurs : Valérie le nouveau film d’Olivier Babinet (Swagger), ne relève pas tant Bournonville et Joseph Rouschop Distributeur : Rezo Films. du scénario ou des acteurs que du paysage : la formidable construction d’espaces qu’habite le film, entre bandes 89 minutes. France - Belgique, 2019 côtières indéchiffrables, péri-zones d’ennui et laboratoires à Sortie France : 2 septembre 2020 l’aménité toute relative, permet le déploiement facile pour u RÉSUMÉ le spectateur de cet imaginaire de science-fiction agressivement Daniel, physicien, regarde la télévision et découvre que pastel et réaliste. Car Poissonsexe est un récit d’anticipation, la dernière baleine au monde, traquée par GPS, s’approche du genre qui ne déplace qu’un bibelot du présent pour en créer des côtes françaises. Un scientifique américain est interviewé, un nouveau, invivable. Dans un monde où l’on ne procrée plus ce qui l’énerve. De retour à son labo, Daniel essaye de et où les poissons manquent, un scientifique, qui cherche à réintroduire des œstrogènes aux poissons pour qu’ils puissent réintroduire le désir dans les fonds marins, échoue aussi, sur procréer de nouveau. Daniel aimerait avoir un enfant. Lucie la terre ferme, à trouver l’amour et concevoir un enfant. Tout revient dans son village natal après un passage par Paris. autour de ce personnage désenchanté et lunaire (interprété Daniel, qui avait un rendez-vous sur une application de rencontre, se soûle au parfum et a un accident de voiture. par le désenchanté et lunaire Gustave Kervern) gravite Le lendemain, Lucie vient à sa rencontre, et ils trouvent une société comme un petit précis de décomposition sociale ultra échoué un poisson amphibien : un axolotl. Daniel le ramène moderne : la locale revenue de Paris des rêves en lambeaux, et se pique avec une aiguille qui sert à ses expériences. la tyrannique et sculpturale cheffe de labo nordique elle aussi SUITE... Peu après, il entend le poisson, baptisé Nietzsche, en déficit de tendresse... On le comprend vite, Poissonsexe lui parler. Persuadé que la fille de l’application est Lucie, essaime à tout-va et dans toutes directions. Si le scénario, qui il l’invite à boire un verre. Ils se confient : Daniel a vécu en fonctionne par bribes collées les unes aux autres, se révèle Californie mais a sombré dans l’alcool quand son ex-femme être suffisamment touchant et sardonique pour apparaître est partie avec le scientifique américain, tandis que Lucie a comme une farce très solidement menée, il n’en reste pas perdu son enfant. Daniel considère maintenant Nietzsche moins que cette fantaisie intello provoque bien plus un rire comme son enfant, ce qui agace Eeva, sa cheffe. Daniel a de connivence que de communion. Mais malgré la légère enfin un rendez-vous avec la fille de l’application : Eeva, qui ne veut de Daniel que son sperme - celui-ci s’exécute déception, la très belle fin, explicitée par une baleine unique et Eeva le conserve dans une fiole. Le lendemain, il engage au funeste destin, agit comme un beau révélateur de l’âme du une amie et ses drones pour la détruire. La baleine film et de notre époque au seuil de la maladie : (s’)échouer, s’échoue sur la plage. Daniel relâche Nietzsche, qui doit c’est avant tout exposer sa passion au regard de l’autre aller féconder une femelle en Antarctique. Daniel et Lucie - et dans l’échec, une réussite ailleurs retrouvée. _C.D. acceptent de faire confiance à l’amour - sans enfants. Visa d’exploitation : 139857. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. © les Fiches du Cinéma 2020
Police de Anne Fontaine Trois policiers escortent un immigré clandestin à DRAME POLICIER Adultes / Adolescents l’aéroport. Mettant en scène trois pointures - Virginie Efira, Omar Sy et Grégory Gadebois -, Anne Fontaine u GÉNÉRIQUE détourne le genre du film policier pour l’engager Avec : Virginie Efira (Virginie), Omar Sy (Aristide), Grégory intelligemment dans une voie intime et humaniste. Gadebois (Erik), Payman Maadi (Asomidin Tohirov), Elisa Lasowski (Sonia), Emmanuel Barrouyer (l’homme violent), Anne- Pascale Clairembourg (Martine), Anne-Gaëlle Jourdain (la mère maltraitante), Cécile Rebboah (l’assistante sociale), Cédric Vieira (le mari de Virginie), Thierry Levaret (Hervé), Aurore Broutin (la psychologue), Gwenaël Clause (le préposé du centre de rétention), Damien Abysique (le policier du centre de rétention), Tadrina Hocking (la gynécologue), Keyvan Khojandi (le commandant de bord), Saïd Benchnafa, Thomas Spychala, Yeelem Jappain, Harmandeep Palminder, Chahin Hamlaoui, Pierre Alloggia, Sébastien Bonnet, Billie Dieoune, Nagisa Morimoto, Mariam Kaba. Scénario : Anne Fontaine et Claire Barré D’après : le roman de Hugo Boris (2016) Images : Yves Angelo Montage : Fabrice Rouaud 1re assistante réal. : Laure Prévost-Guarino Scripte : Josiane Morand Son : Brigitte Taillandier, Nicolas Moreau et Jean-Pierre Laforce Décors : Arnaud de Moléron Costumes : Emmanuelle © Thibault Grabherr / F Comme Film - CIné-@ Youchnovski Effets spéciaux : Mathias Canard Dir. artistique : Bruno Via Casting : Pascale Béraud Production : F Comme Film HHH À la télévision, le genre rencontre un franc succès : et Ciné-@ Coproduction : StudioCanal, France 2 Cinéma, France 3 Cinéma, Scope Pictures et Korokoro Producteurs : Jean-Louis “l’info-divertissement”, qui peut consister, par exemple, Livi et Philippe Carcassonne Distributeur : StudioCanal. à suivre des policiers, des pompiers ou des urgentistes sur le terrain. Le public veut du graveleux, du choc ! Presque 98 minutes. France - Belgique, 2020 à la manière d’un “documenteur” - mais bien sûr ça n’en Sortie France : 2 septembre 2020 est pas un -, Anne Fontaine dévoile elle aussi les coulisses u RÉSUMÉ de la police parisienne. Cependant, ici, rien d’extravagant : Virginie, jeune mère et agent de police, se dispute avec son le scénario nous fait revivre plusieurs moments du quotidien mari. Au travail, elle semble soucieuse. Lors d’une intervention selon les points de vue de trois policiers, avant de les faire musclée, son collègue Aristide lui fait part de son inquiétude. converger à l’occasion d’une scène finale. Des policiers Elle répond qu’elle est enceinte de lui et qu’elle compte avorter. censés, de nuit, conduire un réfugié politique à l’aéroport, En fin de journée, leur supérieur demande deux volontaires d’où il sera expulsé vers son pays d’origine. Une situation qui pour une intervention spéciale. Virginie, qui doit pourtant dîner verra leurs convictions intimes se heurter aux ordres reçus... dans sa belle-famille, se propose, ainsi qu’Éric. Plus tôt dans Avec cette adaptation du roman à succès de l’auteur français la journée. Éric et Virginie accompagnent chez elle Sonia, une femme battue, pour qu’elle récupère des affaires. Hugo Boris, Anne Fontaine signe un polar qui vaut - outre Dans un bar, Virginie et Aristide se rapprochent et dansent. le jeu de ses acteurs - pour sa faculté à se tenir au plus près Il la raccompagne chez elle et l’embrasse. Éric se dispute de ses personnages. En prenant le pouls sentimental de avec sa femme. Aristide se porte à son tour volontaire pour ses trois héros, Anne Fontaine nous pousse “en dedans”, l’intervention du soir : il s’agira de conduire un réfugié c’est-à-dire au-delà de l’anecdote - le film réserve ainsi, avec à l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle. une douceur exceptionnelle, quelques accents romantiques. SUITE... Aristide et Virginie font l’amour. Plus tard, les trois Mais son point fort réside avant tout dans la dynamique agents récupèrent le réfugié : Tohirov. Virginie lit son dossier. créée entre les trois fonctionnaires, dont le travail n’invite Puis le détache et l’invite du regard à s’évader. Ce qu’il habituellement pas à réfléchir. Une dynamique ébranlée par ne fait pas. Virginie convainc Aristide que Tohirov doit le personnage féminin, Virginie, sensible et courageuse, et dont fuir. Tous deux en persuadent Éric. Mais Tohirov refuse le propre état de fragilité l’exhorte à se poser des questions encore. Une fois à l’aéroport, celui-ci refuse de coopérer. Sur le chemin du retour, Virginie demande à Éric de s’arrêter. sur le bien-fondé de sa mission. Sans que jamais l’on se sente Elle court à l’aéroport et convainc la brigade en charge de perdu entre deux histoires a priori déconnectées, Fontaine Tohirov de retarder son départ. Aristide lui dit que sans elle, parvient à émouvoir avec une intrigue amoureuse et, dans la vie est ennuyeuse. Plus tard. Dans le centre de santé où le même temps, à montrer l’absurdité et le manque d’humanité elle est venue avorter, Aristide attend Virginie. Ils s’en vont d’une tâche souvent exigée des forces de l’ordre. _A.J. main dans la main. Visa d’exploitation : 148154. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. © les Fiches du Cinéma 2020
Adolescentes de Sébastien Lifshitz Chef-d’œuvre au long cours, Adolescentes capture DOCUMENTAIRE Adultes / Adolescents la lente fanaison de l’adolescence de deux amies, Emma et Anaïs, dont la complicité, sublimement u GÉNÉRIQUE labile, n’a vocation qu’à être une parenthèse de clarté Avec : Emma et Anaïs. vers le monde adulte et sa matité monstrueuse. Images : Antoine Parouty et Paul Guilhaume Montage : Tina Baz Musique : Tindersticks Son : Yolande Decarsin et Clément Laforce Production : AGAT Films & Cie Coproduction : ARTE France Cinéma et les Productions Chaocorp Productrice : Muriel Meynard Distributeur : Ad Vitam. © AGAT Films & Cie 135 minutes. France, 2019 HHHH Amis lecteurs, amies lectrices, laissez ici toute Sortie France : 9 septembre 2020 espérance : Adolescentes est une plongée. Adolescentes est une violence (mais existe-t-il une métamorphose le même fil de vie mais ne s’en rendent pas compte, qui puisse se faire sans cicatrices, un état transitionnel trop occupées à compter leurs points communs : sans vestiges, une guerre sans ruines ?), Adolescentes des parents écrasants, le doute de la première fois, est un vertige, une gêne diffuse, une blague, une douleur, les garçons, tout ces points aveugles éducationnels un amour. Adolescentes est un pays car l’adolescence est qui les font se soustraire momentanément à un monde, pour autant qu’il soit possible de circonscrire leur milieu. Lifshitz ne relativise pourtant pas : l’invisible : où est l’adolescence quand on veut la faire le déterminisme existe, saupoudrant aigrement témoigner, quand elle se dérobe en ne laissant, soyons chaque conversation futile (car elles le savent, leurs honnêtes, qu’un âcre goût rétrospectif dans la bouche ? futures mues seront parallèles), ou couvant, chacun Adolescentes prend le pari, réussi, d’embrasser dans à sa manière, dans l’espace politique (ennui du débat le même élan l’adolescence-témoignage, avec ce qu’elle démocratique sacerdotal chez Emma, haine des élites implique de butée, de bouillante, l’adolescence en tant chez une Anaïs pourtant bouleversante d’humanité qu’expérience du soi et de l’autre, et l’adolescence- aux lendemains de l’attentat contre la rédaction pratique, élève, apprenti, machine déréglée que l’on oblige de Charlie Hebdo mais, en 2017, farouchement à d’ogresques orgies de savoir, gavage qui fait de l’ado - du “pro-Marine” - manière de dire que l’adolescence moins le pense-t-il - un “monstre que les adultes fabriquent a, elle aussi, horreur du vide). Adolescentes, dans avec leurs regrets” (Sartre). Emma, famille bourgeoise, son propos foisonnant, ne nous invite donc pas à père absent, mère autoritaire - question d’échelle de conflit, un regard analeptique de procuration (qu’ai-je fait où la castratrice-montagne accouche d’une mère-souris -, de mon adolescence au regard de la leur ?), mais s’ennuie, bovaryse en vacances, bachote à l’école ; contre nous encourage à nous recueillir sur ces connexions elle, tout contre elle, Anaïs, famille prolétaire, peu instruite, souterraines, ces tumulus ennuyeux ou exaltés où, en surpoids, à l’intelligence perçante mais au cerveau sans bien vivante, repose une de nos deux vies, la vraie, cesse encombré de nécessités matérielles - l’adolescence celle que l’on aura rêvée ; la fausse, celle qui nous dans une famille difficile revenant à faire une croix sur frappe au visage à la sortie de la salle de cinéma, cet art bourgeois, garant de réussite même si lent poison celle où l’on finit dans la vie active jusqu’au cercueil, vers la maladie de l’oisiveté, qui s’appelle le temps libre. une valise à la main, ne vous inquiétez pas : elles Anaïs et Emma sont pourtant amies, car leur état de jeunesse la connaîtront ou la connaissent déjà - l’adolescence est une parenthèse de concorde ; elles ne suivent pas se reconnaît au fracas qu’elle fait en se retirant. _C.D. Visa d’exploitation : 140578. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. © les Fiches du Cinéma 2020
À ma place de Jeanne Dressen Qu’importe sa forme artisanale : en dressant le portrait DOCUMENTAIRE Adultes / Adolescents d’une militante passionnée, le documentaire de Jeanne Dressen pose moult questions essentielles qui u GÉNÉRIQUE dépassent le cadre de Nuit debout pour porter le fer Avec : Savannah Anselme. au cœur des mécanismes de la reproduction sociale. Scénario : Jeanne Dressen Images : Jeanne Dressen Montage : Delphine Dumont Musique : Théo Hakola Son : Jeanne Dressen Production : Filles de la Jungle Productrice : Jeanne Dressen Distributeurs : DHR / À Vif Cinéma. © Filles de la Jungle 64 minutes. France, 2020 HHH Nous sommes en 2016, les assemblées Sortie France : 9 septembre 2020 citoyennes fleurissent au milieu des places. À l’ombre des CRS en faction, les débatteurs essayent de s’entendre désormais trop éloignée de sa représentation du pour inventer de nouvelles pratiques politiques. bien-être. Les quinze premières minutes du film Frêle mais déterminée agitatrice de ce mouvement laissent perplexe. Va-t-on subir, sur le mode caméra social que d’aucuns ont nommé “Nuit Debout”, Savannah à l’épaule, une heure de débats “Nuit Debout” ? se révèle une modératrice de débat hors pair. Mais La réalisatrice a heureusement la bonne idée de les nombreuses sollicitations du monde militant ne pas s’attarder sur cet épisode contestataire que s’accordent difficilement avec la préparation de son le mouvement des gilets jaunes a très vite ringardisé. concours d’entrée à l’École Normale Supérieure. Jonglant Jeanne Dressen - dont c’est le premier film à sortir avec le temps, Savannah est sur les rotules. Elle trouvera en salle - préfère s’attacher à dessiner le portrait toutefois l’énergie suffisante pour réussir à gagner d’une jeune femme qui cherche à tracer sa route, sa place au sein de l’élite, à l’endroit même où Bourdieu rêvant de rejoindre aussi bien les cimes de - modèle intellectuel pour Savannah - entreprit de l’intelligentsia parisienne que l’avant-garde disséquer les logiques de la reproduction sociale. contestataire. Mais comment faire en sorte que Fille d’ouvriers, Savannah est ô combien consciente ces deux désirs coïncident ? Un pari rendu d’autant du paradoxe qu’elle incarne. Elle portera tel un blason plus périlleux pour l’âme de Savannah que son statut de “ fille d’alcoolique au chômage ”, fière son territoire intime - auquel elle voue une indéfectible de pouvoir se jouer des codes institués. Mais dans loyauté - se confond avec le monde ouvrier. À ma place le même temps, la contestation sociale se durcit à donne une lecture tout en nuances de ces tourments l’occasion de l’adoption de la loi Travail, ou loi El Khomri, intérieurs, laissant à Savannah seule le soin de du nom de la ministre qui, pour le gouvernement poser les questions et d’apporter les réponses. de Manuel Valls, en porte le projet. On évoque un œil On s’inclinera dès lors devant sa décision finale de arraché, le premier d’une longue série. Profondément ne pas poursuivre son cursus car il lui est impossible marquée par les excès de la répression policière, Savannah de combler le profond hiatus entre ce qui constitue se dit épuisée. Elle supporte de plus en plus difficilement son identité et ce vers quoi la portent ses aspirations. la comédie sociale des grands bourgeois qu’elle Ce refus est un choix, nous explique-t-elle. Difficile côtoie rue d’Ulm, y décelant, sous les oripeaux pourtant de ne pas y voir une confirmation des du raffinement intellectuel, rien de moins que la violence thèses bourdieusiennes. Le savoir et donc le pouvoir de classe. Bientôt mère, elle fait le choix de quitter l’ENS, se partagent peu. _J.N. Visa d’exploitation : en cours. Format : 1,77 - Couleur - Son : Dolby SR. © les Fiches du Cinéma 2020
Le Bonheur des uns... de Daniel Cohen L’équilibre d’une amitié entre deux couples est mise à COMÉDIE DE MŒURS Adultes / Adolescents mal lorsque Léa, jusqu’ici la plus discrète du groupe, publie avec succès son premier roman. Le naturel u GÉNÉRIQUE comique de Florence Foresti et François Damiens Avec : Bérénice Bejo (Léa), Florence Foresti (Karine), Vincent ne compensent pas un scénario épais et routinier. Cassel (Marc), François Damiens (Francis), François-Éric Gendron (l’éditeur), Stephen Manas (Thierry), Caroline Piette (la cliente de la librairie). Scénario : Daniel Cohen et Olivier Dazat D’après : la pièce L’Île flottante de Daniel Cohen Images : Stéphan Massis Montage : Virginie Seguin 1er assistant réal. : Alain Braconnier Scripte : Véronique Garbarini Musique : Michael Tordjman et Maxime Desprez Son : Samuel Cohen Décors : François Emmanuelli Costumes : Virginie Montel Effets visuels : Philippe Aubry Maquillage : Faustine-Léa Violleau Casting : Emmanuelle Prévost Production déléguée : CinéFrance Studios Coproduction : Artémis Productions, SND et Shelter Prod Producteurs délégués : David Gauquié et Julien Deris Distributeur : SND. © SND H Léa, Marc, Karine et Francis se connaissent depuis toujours. Ils vivent une amitié tranquille, dans laquelle chacun tient un rôle précisément déterminé, et dont dépend l’équilibre collectif. Celui de Léa (Bérénice Bejo) est d’être 102 minutes. France - Belgique, 2020 dans la discrétion. Léa, elle est “indécise et sans ambition”, Sortie France : 9 septembre 2020 et c’est comme ça qu’on l’aime ! Elle est protégée par u RÉSUMÉ son amie, sa “grande sœur”, Karine (Florence Foresti) et Au restaurant, deux couples d’amis - Léa et Marc ; Karine par son mari, son “capitaine” (Vincent Cassel) - un gros et Francis - se demandent ce qu’est pour eux “la réussite”. macho en réalité. Bref, le train-train quotidien. Il suffit Léa, vendeuse dans un magasin de vêtements, est la seule à pourtant que Léa donne les signes d’une émancipation se dire contente de sa vie. Quand arrive le moment du dessert, en publiant un roman - à succès qui plus est - pour que tout Léa est indécise et ses amis, ainsi que Marc, lui rappellent bascule. Son mari, comme sa meilleure amie, par jalousie, son indécision maladive et son manque d’ambition. Ce à quoi par manque de confiance en eux, par médiocrité peut- elle répond qu’elle est en train d’écrire un livre. Chez eux, être, ne peuvent dès lors pas supporter la réussite de Léa. Karine et Francis décident de se lancer eux aussi dans un projet : elle, dans l’écriture, lui, dans la musique. Dans Seul Francis (François Damiens), l’époux de Karine, trouve le métro, Marc reproche à Léa de la contredire devant les gens. dans cet évènement l’énergie pour se découvrir à son De plus, il a commencé à lire le livre de Léa, mais trouve que tour des passions... Daniel Cohen (réalisateur du curieux le personnage du mari y évoque un portrait erroné de lui. Les Deux mondes, puis du nettement moins heureux SUITE... Publié, le livre de Léa se vend à 250 000 Comme un chef) porte ici à l’écran la pièce de théâtre dont exemplaires. Elle donne son préavis et se lance dans il est l’auteur, L’Île flottante. Le résultat, malheureusement, l’écriture d’un second roman. Karine, qui n’arrive pas est pour le moins inégal, le talent comique de Florence à écrire, se lance dans la course à pied, et Francis s’essaie Foresti et François Damiens - plutôt un ton au-dessus à la cuisine après avoir abandonné, entre autres, la musique du couple de fiction auquel ils donnent la réplique - et la sculpture... Léa offre à son mari une moto et une nuit ne parvenant pas toujours à pallier le manque de subtilité à l’hôtel. Celui-ci le prend mal et la quitte. Mais, lors et l’absence de rebondissements du scénario. L’histoire d’une séance de dédicaces, Marc dit à Léa qu’il est fier d’elle. Elle est heureuse de le retrouver. Léa et Marc invitent tourne en rond, et Daniel Cohen semble alors réaliser Karine et Francis dans leur nouvel appartement luxueux, en parallèle deux films distincts, l’un plan-plan et ennuyeux, mais ces derniers ne s’attardent pas, et Karine reproche et l’autre plus amusant dans lequel Foresti et Damiens à Léa son succès. Quelques mois plus tard. Marc est laissent libre cours à leur naturel comique. Difficile, en couple avec son assistante. En signe de réconciliation, en l’état, de s’attacher à l’ensemble. _A.J. Karine envoie une photo à Léa. Visa d’exploitation : 150559. Format : Scope - Couleur - Son : Dolby SRD. © les Fiches du Cinéma 2020
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