Enigme du travail et aporie de l'évaluation - Philippe Davezies " Repenser l'évaluation des salariés "

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Enigme du travail et aporie de l'évaluation - Philippe Davezies " Repenser l'évaluation des salariés "
Enigme du travail
                        et
               aporie de l’évaluation

                             Philippe Davezies

« Repenser l’évaluation des salariés »
       OCE Research Center
     EML Lyon Business Cchool
             15 mai 2013
L’héritage de l’ergonomie :
      le travail réel est toujours au-delà.

« Contrairement à l'idée qui prévaut dans l'entreprise, le
  travail de cet opérateur ne se réduit pas à réaliser A, B
  et C…
… mais à faire W, X, Y, Z, sans quoi les résultats ne
  seraient pas ce qu'ils sont.
C’est ce qui explique que telles et telles mesures prises
  par la direction soient inadaptées… ».

Le travail : la mobilisation face à ce qui n’est pas réglé par
  l’organisation du travail.
Un écart accru
           par les évolutions du travail.
q   Evolution vers le pilotage par l’aval :
     Proportion de salariés dont le rythme de travail dépend
     d’une demande extérieure obligeant à une réponse
     immédiate :
                28 % en 1984 (France),
                      54 % en 1998 (France),
                67% en 2010 (Europe).

qDésengagement   des hiérarchies vis-à-vis des modalités
d’exécution du travail ; montée en puissance des
critères statistiques, comptables, financiers.
q   Travailler correctement implique (à tout niveau hiérarchique)

     § de prendre en considération tout un ensemble de
        particularités que la hiérarchie n’est pas en mesure
        de percevoir,
     § d’affronter une quantité de dilemmes éthiques qui ne
        sont pas réglés par les consignes,
     § de mobiliser ses compétences, mais aussi sa
        sensibilité,
     § d’orienter l’activité conformément à ses propres
        valeurs,
     § d’affirmer sa responsabilité sur le fragment du
        monde que l’on met en forme.

                                (Idem pour le travail d’évaluation)
Intensification et individualisation
q   La pression impose de se focaliser sur les objectifs que
     l’on juge prioritaires. Travailler, c’est trier.
q   Réduction des espaces permettant d’arbitrer
     collectivement les façons de trier.

q   Individualisation du rapport au travail.

q   Tendance à la dissolution des critères communs
     définissant un bon travail. Multiplicité conflictuelle des
     critères de tri. (En 2003, 17% des salariés déclarent être l’objet d’un
     comportement systématiquement hostile de la part d’une ou plusieurs
     personnes dans leur travail - SUMER).

         →   Exigence ++ de discussion sur le travail.
Un obstacle majeur : l’obscurité de l’activité
     aux yeux mêmes de celui qui la déploie
 q   L’action n’est pas l’application d’une idée, mais la
      mobilisation
       § sous l’effet des sollicitations de la situation,
       § des dispositions à l’action, incorporées au fil de
          l’expérience.

 q   Les sollicitations qui déclenchent la mobilisation ne
      sont que partiellement conscientes.

 q   La capacité d’intégration des mémoires émotionnelles
      est beaucoup plus puissante que celle de la réflexion
      consciente (Cf. Deciding Advantageously Before Knowing the
      Advantageous Strategy. Bechara, Damasio).
Situation

    Stratégies de raisonnement
                                              Faits

                                            Options
                                          offertes à la
Décision
                                            décision

                                          Représentation
                                        des résultats futurs
               Activation à couvert
               des biais liés à des
           expériences émotionnelles
            antérieures de situations
                  comparables

                                                (A. R. Damasio, 1997)
L’importance du retour réflexif
              sur l’activité.
qL’activité    est en avance sur la conscience.
     C’est dans l’après-coup que se manifestent la subjectivité et la
     responsabilité.

q   Problème : nous sommes beaucoup plus conscients de
     ce qui se passe mal que de ce qui se passe bien.
     C’est dans la confrontation avec l’activité d’autrui que je
     prends conscience des dimensions affirmatives particulières de
     ma propre activité.

q   Une dynamique entre activité et expression
     langagière : l’exemple du vin.

q   Elaboration et développement de l’activité.
Faute d’espaces d’élaboration,
          des conflits sans issue
q   Norme formelle contre mode d’engagement de la
     personnalité : la relation est vécue sur le mode
     persécutoire.
q   Les salariés s’emparent des éléments de discours
     préfabriqués : succès du harcèlement moral,
     dénonciation idéologique...
q   Ces discours occultent les conflits de normes sous-
     jacents et s’opposent à leur élaboration.
q   Conflits sans issue, stress chronique, pathologies.
Un phénomène de grande ampleur
qProduire   un discours sur le travail ne va pas de soi.
qLesrecherches en entreprise montrent des distances
majeures entre les dilemmes que les salariés affrontent
dans leur activité et les discours communs auxquels ils
ont recours pour rendre compte de leur situation.
  →Des  discussions et négociations avec les directions
   à grande distance des questions vives de l’activité.
                →Des  salariés qui affrontent
              comme des affaires personnelles
              les contradictions non discutées
                 de l’organisation du travail.
          → Un encadrement mis en accusation.
La nécessité d’espaces
               d’élaboration autonome
q   Il ne suffit pas de mettre les salariés autour d’une
     table pour qu’ils parlent du travail.

q   Nécessité, bien souvent, d’un accompagnement
     (travail sur cas).

q   Les salariés se découvrent alors en position
     d’apprendre les uns des autres.

q   Les recherches-actions sur le travail syndical ont
     montré l’importance du potentiel de renouvellement
     du débat social à partir du moment où il est nourri de
     la réflexion sur le travail.
Une chance pour l’encadrement ?

q   L’élaboration de l’expérience du travail par les
     salariés ouvre des espaces à l’encadrement pour la
     reconquête d’une position autonome (moins de gestion
     et plus de management ?)

q   Sortir de l’aporie : affirmer un point de vue
     dynamique :
     d’une approche en termes de conformité des résultats
     à une approche en terme de développement de l’activité.

q   La question de l’autorité (Cf Arendt : autorité du
     latin augere : augmenter).
Pour un complément sur les éléments auxquels il est fait
référence dans cette présentation, voir un article publié
dans la revue PISTES (Perspectives interdisciplinaires
en santé au travail) :
             http://pistes.revues.org/2566

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