FAUT-IL VRAIMENT PARLER DE LOW COST POUR LE LONG-COURRIER ? - Wavestone
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FAUT-IL VRAIMENT PARLER DE LOW COST POUR LE LONG- COURRIER ? ÉCLAIRAGE SUR LES DIFFÉRENTS MODÈLES ET TENDANCES Avec l’arrivée tonitruante de French Blue sur les vols Paris Orly-Punta Cana à des prix d’appel très bas et la multiplication des offres sur le segment low cost long-courrier (notamment Eurowings au départ de CONTACTS Cologne vers Dubaï, Cuba ou B angkok à prix cassés), la question du low cost long-courrier (LCLC) revient au cœur de l’actualité, d’autant plus après l’annonce du plan stratégique d’Air France « Trust Together ». JEAN-BAPTISTE NAU, Senior Manager jean-baptiste.nau@wavestone.com MORGANE THURET, Senior Consultant morgane.thuret@wavestone.com Cette publication a été réalisée avec la contribution des consultants de la communauté Air & Beyond by Wavestone.
La formule s’inspire des ingrédients qui ont la proposition de valeur « low cost » au Une simple transposition du modèle fait le succès du low cost « classique », en long-courrier pose un certain nombre de au long-courrier ? les adaptant aux contraintes spécifiques questions. Le modèle LCLC cherche, a priori, à des vols long-courriers : certains acteurs, s’appuyer sur les cinq facteurs clés qui ont comme Air Asia X ou Norwegian, semblent Afin de rappeler le positionnement fait le succès du low cost et lui ont permis bel et bien y parvenir. Cependant, malgré respectif des compagnies aériennes de capter une part croissante du marché cette appellation générique, le modèle du mentionnées dans une perspective compa- en affichant des taux de rentabilité élevés. LCLC n’est en rien figé : des évolutions rative, le schéma ci-dessous représente le Par exemple, les marges opérationnelles significatives sont en cours et modifient positionnement de certaines compagnies de Ryanair, AirAsia et Southwest Airlines sensiblement le modèle d’origine. Une aériennes autour de deux axes : le marché étaient deux à trois fois supérieures à la analyse fine de ces évolutions permet couvert par les compagnies aériennes – du moyenne du secteur en 20141. même de tracer les contours d’une recom- court-courrier au long-courrier – et leur position globale du paysage aérien et d’un positionnement selon le service offert. Facteu rs c l és d e su cc ès d u m od èl e low cost rapprochement des offres. Une nouvelle « c l assi q u e » orientation émerge autour de concepts M at ri ce p o siti on n em ent/m arc h é d’expérience client différents avec des d e s co m p a g ni es aér i en n es étu d i ées Efficacité opérationnelle améliorée services à la carte, une offre plus ou moins flexible et une perception de valeur diffé- • Maximisation des temps de vol et réduction des temps d’escale TRADITIONNEL • Rationalisation des achats rente entre la recherche de « statut » offert Singapore Silk Air • Homogénéité des flottes - optimisation des coûts de par les meilleurs acteurs traditionnels et Air France KLM Airlines maintenance et de formation du personnel navigant technique celle de la « bonne affaire » qu’un modèle Lufthansa Qantas et commercial (PN) low cost peut laisser imaginer. Hop ! Coûts optimisés POSITIONNEMENT Air Caraïbes DE L’ADAPTATIO N D U MOD È LE Low cost Long-courriers • Durée annuelle du travail des PN plus élevée, prise en compte du temps de vol uniquement LOW COST AU LO NG- COU RRIE R easyJet Norwegian French Blue • Retour à la base chaque nuit évitant ainsi les coûts de découché Air Asia Wow et autres primes (éloignement, repas …) Comme illustré plus loin, plusieurs Jetstar Air Asia X • Coûts de distribution limités (pas de système de réservation Southwest acteurs se sont lancés dans l’aventure Scoot informatique type « GDS »), programme de fidélité inexistant Ryanair Eurowings ou simplifié et commencent à obtenir des résul- LOW COST • Flotte de dernière génération (moindre consommation et tats probants, même si l’adaptation de RÉGIONAL MARCHÉ LONG-COURRIER maintenance) © Wavestone (analyse des activités des compagnies aériennes étudiées) Structure allégée • Externalisation de nombreuses activités (traitement passagers et pistes, maintenance avions …) • Simplification des circuits de décision • Accords d’entreprises moins contraignants pour la compagnie Simplification des offres et « ancillaries » • Classe unique, densification des cabines, services et options supplémentaires payants Stratégie commerciale ciblée • Stratégie essentiellement de « point à point » • Choix des lignes les plus rentables • Choix d’aéroports compétitifs … 1- Market Analysis – 2015-2018 Trends – Corporate Strategies
FAUT-IL VRAIMENT PARLER DE LOW COST POUR LE LONG-COURRIER ? L’application stricte de ces leviers a eu Malgré ces difficultés, certaines compa- Bien que reposant sur les mêmes fondamen- pour effet de bouleverser la configuration gnies semblent avoir obtenu des résul- taux, ces quatre modèles ne bénéficient pas du marché aérien court et moyen-courrier, tats opérationnels et financiers probants. nécessairement des mêmes avantages dans d’autant que l’attractivité des prix a encou- Quatre modèles de compagnies low cost la dynamique de recomposition actuelle, ragé une demande jusque-là latente de long-courriers peuvent être identifiés. notamment par rapport aux majors. courts séjours en Europe. Le développement de certaines compagnies LCLC Le s q u at re mod èl es d e com p ag n i es l ow cost l on g - cou r r i ers Si le low cost moyen-courrier s’est déve- loppé autour de tarifs plus avantageux que ceux des compagnies traditionnelles, « PURE » « NATIVE » dégager un différentiel équivalent sur le Les compagnies aériennes LCLC ayant une Les compagnies aériennes créées en tant que LCLC long-courrier se révèle plus compliqué, du maison mère low cost Exemple probant non existant lors de la rédaction fait de contraintes spécifiques : Air Asia et Air Asia X de l’article mais qui pourrait émerger « PURE » « NATIVE » Un potentiel d’optimisation opérationnelle limité « DAUGHTER » « MUTANT » Les appareils long-courriers passent déjà la plus grande partie Les compagnies aériennes LCLC ayant une Certaines compagnies aériennes se transformant en LCLC de leur temps en vol et ont des temps d’escale faiblement maison mère traditionnelle Norwegian Air Shuttle devient LC en 2002 puis crée compressibles du fait de la nature des opérations, par exemple Lufthansa (Eurowings) Norwegian Long Haul et NAI de nettoyage ou d’avitaillement, à réaliser Air Caraïbes (French Blue) LATAM en voie de transformation « DAUGHTER » « MUTANT » Singapore Airlines (Scoot) Une plus grande importance du confort Les attentes des passagers sont en général plus importantes sur les vols longs (espace pour les jambes, restauration, divertissement …) Le s ava nt a g es d es comp ag n i es l ow cost l on g - cou r r i ers L’importance des revenus premium La densification des cabines peut avoir pour conséquence de limiter l’offre premium, pourtant très contributive sur le long-courrier « MAJOR » © Wavestone (analyse des activités des compagnies aériennes étudiées) Notation indicative ne prenant pas en compte les considérations locales La taille des avions « PURE » « NATIVE » « DAUGHTER » « MUTANT » Les appareils long-courriers emportent davantage de passagers et Remplissage des vols sont plus difficiles à remplir que les moyen-courriers, d’autant plus Réseau / alliances au départ d’aéroports secondaires moins attractifs (en particulier sur le segment business) Stratégie de hub + –– ++ – +++ Capacité de distribution (ex : règlementation, léglisation du travail, etc.) Services (ex : lounge) Optimisation des process Low cost mindset* Innovation / adaptation ++ +++ + – – Synergies Structure de coûts masse salariale sous-traitance +++ +++ + + – synergies possibles *recherche de gain permanent, circuit de décision rapide, simplification des processus 3
Dans ce contexte, la « New Co » proposée nécessaire que les LCLC doivent remplir passager en 2015) 2, et Norwegian 15% 3. par Air France forme à elle seule un des appareils de plus grande capacité. Pour compléter ce relai majeur de modèle particulier encore non identifié : Une nouvelle forme de hub permettant croissance, les compagnies low cost une compagnie parallèle, moins chère au low cost moyen-courrier d’alimenter le long-courriers s’orientent vers une diffé- sans être low cost, visant une autre caté- low cost long-courrier pourrait ainsi faire rentiation de leurs offres : gorie de clientèle et envisagée également son apparition et impacter les modèles // la densification des sièges en classe comme un laboratoire d’innovation pour aéroportuaires actuels, en matière par économique est complétée par des le groupe. exemple d’affectation des compagnies, de classes de type « premium » permet- traitement des bagages ou de circuits de tant de dégager des revenus supplé- correspondance. UN BU S INES S MO DEL E N mentaires (ex. : Frenchblue propose une prestation améliorée sur 28 des A DAPTATIO N P ERMA N E N T E Dans ce contexte le modèle « Daughter » 378 sièges de son A330-300) et, à moindre mesure, le modèle « Pure » Le modèle « low cost » a connu des bénéficieront d’un avantage théorique // les compagnies low cost « Daugh- évolutions depuis ses débuts, aujourd’hui en ayant la capacité à s’appuyer sur ter » s’appuient sur les programmes reprises par les différents modèles de low les alliances, le réseau et le hub de sa de fidélité de leurs maison-mères cost long-courrier. compagnie-mère pour optimiser ses pour être encore plus attractives remplissages. (ex. : JetStar/Quantas Frequent Une tendance à opérer de plus Flyers, Air Asia X/BIG de Air Asia), en plus à partir des aéroports La différenciation et l’extension des certaines en développant même de principaux et des hubs services et options leur côté (ex. : Westjet Rewards). Si les premiers modèles low cost privilé- Les « ancillaries » (options payantes) De même que la tendance à migrer vers giaient les aéroports secondaires pour des représentent un facteur clé du modèle des aéroports principaux, cette dynamique raisons économiques, on assiste de plus en économique des low cost. Par exemple, pourrait favoriser les acteurs ayant la capa- plus à un recentrage des opérateurs sur Ryanair tire 25% de ses revenus des cité de s’appuyer sur leur maison-mère. les aéroports principaux, d’autant plus options (soit ~15€ en moyenne par 2- Ryanair, Annual report 2015 3- Norwegian, Annual report 2015
FAUT-IL VRAIMENT PARLER DE LOW COST POUR LE LONG-COURRIER ? La formation d’alliances F i g u re 1 . L a n ou vel l e ten d an ce : l a for m ati on d es al l i an ces l ow cost Les compagnies aériennes traditionnelles ont commencé à créer des alliances dans Compagnies traditionnelles les années 90 afin d’offrir à leurs clients un réseau élargi et optimiser le remplis- sage de capacités importantes dans un Thai Singapore ANA Airlines environnement de plus en plus concur- rentiel. Les principales alliances, telles Star Alliance, One World et SkyTeam, se sont livrées une compétition féroce en essayant Nok Air Scoot Vanilla Cebu Alliance low cost Air Pacific (Value Alliance d’offrir à leurs clients les programmes de Nokscoot Partnership) fidélité les plus avantageux possibles en termes de miles et de services. Disposant Compagnie low cost Compagnies low cost filialisées (sélection) indépendante d’un autre type d’avantage concurrentiel, les compagnies low cost ne se sont pas, Compagnies low cost au départ, investies dans des alliances ou programmes de fidélité coûteux mais la recomposition du paysage aérien pourrait aujourd’hui les y inciter. Ainsi en 2016 deux F i g u re 2 . L’hyb r i d ati on d es m od èl es alliances low cost ont vu le jour en Asie, U-FLY en janvier regroupant Hong Kong Express, Lucky Air, Urumqi Air et West Air, et surtout Value Alliance Partnership Legacy carriers ou compagnies traditionnelles Compagnies low-cost en mai 2016 qui regroupe pour la plupart des filiales low cost de compagnies asia- Recherche accrue d’efficacité opérationnelle tiques majeures comme l’illustre le schéma Réduction des coûts ci-contre (figure 1). Migration vers des aéroports de 1er rang Les low cost tentent donc elles-aussi Segmentation des passagers de tirer parti de la complémentarité des réseaux et du partage de codes pour améliorer leur couverture géographique et optimiser leur remplissage.
VE R S LE « MEILLEUR // Le développement de lignes vers des À l’instar de la ville, de l’aéroport ou aéroports-hubs et la création d’al- même d’autres moyens de transport, DE S DEUX MO NDES » ? liances nous pensons que les services liés à la DE « L’HY BRIDATIO N » digitalisation des comportements devien- // La dynamique de consolidation et DE S MO DÈLES À LA S EG ME N TAT ION d’accords pourrait brouiller davan- dront rapidement une « commodity » et devront faire partie du « package » PAR L’EXP ÉRIENC E C LIE N T tage encore la distinction « low cost » de base proposé par les compagnies (court, moyen et long-courrier)/ L’hybridation des modèles : « legacy » et permettre aux compa- aériennes (ex. : WIFI à bord). Les frontières la « legacisation » des low cost et la gnies de couvrir l’ensemble des seg- actuelles s’en trouveront alors modifiées et « lowcostisation » des legacy carriers ments (loisirs/business/VFR4). tout l’enjeu pour les compagnies résidera dans leur capacité à en tirer profit pour On peut aujourd’hui parler d’hybridation Cette convergence des offres pourrait se proposer de nouveaux services payants des modèles : comme la figure 2 l’illustre traduire à moyen terme par une conver- (ex. : inflight retail, inflight entertainment), précédemment, le low cost se « legacise » gence des prix à service équivalent, dyna- permettant de compenser la baisse des et les legacy carriers se « lowcostisent ». mique déjà plus ou moins enclenchée prix des billets et de rémunérer les inves- par les pratiques répandues de Yield tissements consentis. Cette dynamique, qui s’observe déjà dans Management et l’adaptation quasi temps le low cost moyen-courrier, laisse augurer La capacité des compagnies à créer un réel des tarifs à la demande et à la concur- d’une recomposition du secteur autour de véritable univers de marque répondant rence (ex. : Air France a immédiatement plusieurs axes majeurs : aux aspirations diverses des clients consti- répliqué à l’agressivité tarifaire de French Blue sur Punta Cana, la question étant tuera également un axe majeur de leur // La recherche accrue d’efficacité plus de savoir combien de temps les deux développement : un parcours passager opérationnelle par les compagnies acteurs pourront tenir sans dégrader à standard, simple et fluide pour les clients traditionnelles, qui se renforcera long terme leur rentabilité). en recherche d’efficacité, une expérience davantage encore lorsque le prix du baril remontera : elles s’inspirent des plus marquée, empreinte de services méthodes du low cost pour optimiser L’expérience client comme facteur personnalisés et innovants pour les clients leur efficacité différenciant en recherche de plus d’émotion pour un souvenir mémorable. Certainement une // Les low cost offrent en réalité des De tout temps, l’acte d’achat a été le belle opportunité pour le transport aérien services « à la carte » et deviennent résultat d’un processus psychologique de nous faire à nouveau rêver ! des « value carriers » : segmentation propre à chaque individu, certains animés fine des services fournis, il s’agit en par la recherche du « juste prix » et d’autres 4- Visiting Friends and Relatives réalité plus d’une offre « dépacka- gée » et personnalisable que stric- de l’importance accordée au « service » ou tement low cost, avec parfois leurs au « statut ». Au-delà de la convergence programmes de fidélité des modèles et des prix, il existe donc pour les compagnies un potentiel important // Un nouveau segment « Access Pre- de différentiation sur la dimension plus mium » porté par des acteurs indé- subjective de la perception et de l’expé- pendants comme La Compagnie ou rience client. des compagnies dites low cost telles que JetBlue et sa classe « Mint » ou Frenchblue et sa classe premium 6
www.wavestone.com Wavestone est un cabinet de conseil, issu du rapprochement de Solucom et des activités européennes de Kurt Salmon (hors consulting dans les secteurs retail & consumer goods). Il figure parmi les leaders indépendants du conseil en Europe. La mission de Wavestone est d’éclairer et guider ses clients dans leurs décisions les plus stratégiques en s’appuyant sur une triple expertise fonctionnelle, sectorielle et technologique. 8 2016 I © WAVESTONE
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