RETOUR D'EXPERIENCE DE PREMIERES ETUDES DE DANGERS
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Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers RETOUR D’EXPERIENCE DE PREMIERES ETUDES DE DANGERS Feedback from first Dam and Levees Hazard studies Luc DEROO ISL Ingénierie deroo@isl.fr Jérémy SAVATIER ISL Ingénierie savatier@isl.fr MOTS CLES Etudes de dangers, probabilité, crue, barrages, digues, évacuateurs de crues, déversoirs, érosion interne RESUME Retour d'expérience de premières études de dangers Les études de dangers sont une nouveauté en matière d'ingénierie des barrages, et encore davantage en matière d'ingénierie des digues. Le cadre règlementaire impose une méthodologie d'étude au contenu vaste et diversifié, qui tend vers une caractérisation des Probabilités d'accident, de la Gravité de ces accidents, et des barrières de sécurité qui permettent de les éviter ou d'en réduire les conséquences. D'une manière générale, cette première expérience souligne les apports des études de dangers : pour de nombreux ouvrages, c'est un diagnostic d'ensemble qui n'existait pas et qui met en lumière leurs faiblesses ; c'est aussi un cadre utile pour évaluer les sécurités ultimes d'un ouvrage, au-delà des conditions de fonctionnement habituelles : crue supérieure à la crue de projet, amorce d'instabilité, … Cependant, la mise en pratique de cette méthodologie soulève des difficultés ; en particulier : comment quantifier la probabilité d'accident pour les barrages et pour les digues, en crue ou par érosion interne? Des esquisses de solutions sont proposées, qui ont commencé d'être testées. Par ailleurs, le retour d'expérience montre que des progrès sont souhaitables : certaines dispositions des circulaires "guide de lecture" pourraient être améliorées, et certains sujets techniques méritent réflexion : évaluation quantitative de la fiabilité des évacuateurs, amélioration des connaissances en matière d'érosion interne, intérêt des mesures de réduction de la gravité. ABSTRACT Feedback from first dam and levees hazard studies Hazard studies have recenlty been enforced by law in France ; they lead to fairly new approaches regarding dam safety, and the safety of levees. The regulatory framework requires a thorough methodology to be set up, that addresses the probability of failure, the consequences of failure and the safety barriers that may avoid or minimize the consequences. Our feedback from first studies is as follows. The risk assessment is a very useful tool when dealing with dams or levees that have not been recently re-assessed ; it highlights their possible weaknesses. It is also a framework that makes it possible to investigate the ultimate safety barriers of a hydraulic retaining structure when exposed to situations it was not designed to withstand : flood exceeding the design flood, initiation of a failure mode, ... Though, it is not deemed easy to proceed through the complete risk assessment methodology. How for instance evaluate the failure probability of a dam or levee in case of a flood ? or because of internal erosion ? Some cautious steps forward are proposed, that have started being investigated. The risk assessment studies also underlines how it would be useful to get a deeper understanding of at least two of the phenomenon that may directly or incidentally lead to failure : spillway blockage during floods (with special focus on the issue of floating debris) and a better understanding of internal erosion. Eventually, hazard studies could lead to a trend toward downstream consequences mitigation measures. These are not easy to implement.
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers 1 CONTENU DU RETOUR D’EXPERIENCE Le retour d’expérience exposé dans cet article concerne des ouvrages variés : - 2 barrages-poids (un barrage concédé et un barrage autorisé), - 3 barrages en remblais (autorisés), - 1 digue en service, - 1 projet de système de protection contre les inondations (désormais en cours de construction), - 1 projet de barrage. Ce retour d’expérience a pour objet de pointer les difficultés particulières auxquelles les rédacteurs des études ont été confrontés, et de montrer ce qui a été utilisé pour essayer d’y répondre. Les études de dangers ont été conduites en référence aux textes règlementaires (décret n°2007-1735 du 11 décembre 2007 relatif à la sécurité des ouvrages hydrauliques et arrêté du 12 juin 2008 définissant le plan de l’étude de dangers des barrages et des digues et en précisant le contenu), et également en tenant compte du contenu exposé par les circulaires « Guide de lecture » (circulaire du 31 octobre 2008 relative aux études de dangers des barrages et circulaire du 16 avril 2010 relative aux études de dangers des digues de protection contre les inondations fluviales). Cet article utilise en particulier les notions suivantes, exposées dans les circulaires : le Risque (ou la criticité) associé à un accident est le croisement de sa Probabilité d’occurrence et des Gravités des conséquences. Les circulaires écrivent d’ailleurs : Risque = Probabilité * Gravité. Les sujets abordés par ce retour d’expérience sont les suivants : - Evaluation de la probabilité d’accident en crue pour les barrages - Risques en crue pour les digues - Prise en compte des phénomènes d’érosion interne - Apports des Etudes de dangers 2 PROBABILITE D’ACCIDENT EN CRUE POUR LES BARRAGES Pour les barrages, les études de dangers amènent plusieurs nouveautés : - selon certaines interprétations, travailler à Risque constant, et donc ajuster la Probabilité d’accident acceptable aux Enjeux aval : la Probabilité acceptable est inversement proportionnelle aux Enjeux , - prendre en compte explicitement et, comprend-on, quantitativement les scénarios de défaillance des dispositifs d’évacuation des crues : vannes non manœuvrables, accès impossibles, embâcles, … - évaluer la résistance ultime en crue « Cote de danger ». Ces nouveautés sont à relier à un autre mouvement en matière de crues, avec une tendance à un renforcement des exigences en matière d’études hydrologiques : croisement des méthodes, évaluation des incertitudes, crues successives, hydrogrammes variés. 2.1 Faut-il ajuster la Probabilité d’accident acceptable aux Enjeux aval ? Les textes contiennent quelques indications pouvant être contradictoires sur l'ajustement de la Probabilité acceptable à la Gravité. Ces contradictions ne portent que sur le Risque de rupture en crue. De manière générale, l'arrêté de juin 2008 et la circulaire « Guide de lecture Barrages » demandent d'ajuster les probabilités et les enjeux. Selon l'arrêté, « les différents scénarios d’accident sont positionnés les uns par rapport aux autres en fonction de leur probabilité d’occurrence et de la gravité des conséquences, évaluée en termes de victimes humaines potentielles et de dégâts aux biens, en mettant en évidence les scénarios les plus critiques ». La circulaire précise cet attendu, avec deux diagrammes :
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers Le risque de rupture en crue peut sembler déroger à ce principe. Selon l'arrêté, au §6 (aléas), « Les cotes atteintes sont déterminées, dans le cas des barrages en remblais, pour les crues de période de retour 10 000 ans et, dans le cas des autres barrages, pour les crues de période de retour 1 000 ans et 5 000 ans. ». Cette rédaction ne contredit pas formellement la nécessité d'ajuster la Probabilité à la Gravité : cette règle peut être comprise comme une règle minimale, qui ne dispense pas d'évaluer le comportement pour d'autres crues. La circulaire est plus explicite : « L’étude évaluera la cote de dangers […]. Pour un barrage en remblais, lorsque la probabilité d’occurrence annuelle de ce scénario sera significativement inférieure à 1/10 000, le barrage, au regard de ce scénario, sera réputé dans la « zone verte ». Ce barrage sera réputé en « zone orange » si la probabilité d’occurrence annuelle du scénario est de l’ordre de l/10 000. Enfin, ce barrage sera en « zone rouge » si la probabilité d’occurrence annuelle est sensiblement supérieure à 1/10 000. » Dans ce cas, pour le risque de rupture en crue, cela revient à remplacer le diagramme précédent par un diagramme plus simple. Le risque de rupture en crue est pour beaucoup de barrages en service le risque principal. Opter pour un diagramme sans proportion Probabilité – Gravité pour les crues peut faire perdre du sens à la démarche. Si la circulaire est utilisée non pas en conception des études de dangers, mais en appui au jugement sur le risque, uniquement comme un guide de lecture, le commentaire précédent est sans objet. Les règles de la circulaire (ici la probabilité 1/10 000) auraient alors pour fonction d'assurer la continuité avec des pratiques éprouvées. Notre parti a été de combiner les deux démarches : - dans la suite de l’approche traditionnelle, vérifier le passage des crues pour une crue de période de retour 1000 à 10000 ans selon les cas ; approche complétée par une évaluation de la cote de danger, - conformément aux textes de l'arrêté, évaluer une probabilité de rupture en crue, et évaluer l’acceptabilité du risque. Cela a nécessité dans certains cas (forts enjeux aval) d’examiner des scénarios de rupture de probabilité annuelle très faible (moins de 10-4 par an). Cette deuxième approche est plus complète et plus riche. Elle fait examiner tous les modes de rupture en situation ultime, au-delà des PHE (ce qui est également vrai, dans le cas de la première approche, avec le calcul de la Cote de danger). Elle permet de combiner les probabilités de crue et de dysfonctionnement des évacuateurs, et de les proportionner aux enjeux aval (Gravité). Elle permet également d’évaluer le gain apporté par les dispositions de réduction des risques. 2.2 Prise en compte des scénarios d'indisponibilité des évacuateurs de crues Ce thème est un sujet central des études de dangers. Comme le mentionne la circulaire barrage : « Bien évidemment, cela ne préjuge pas de l’existence d'autres scénarios également critiques comme, par exemple, la rupture du barrage suite à une crue d'intensité moins forte mais se combinant avec la panne partielle ou totale d'un organe de sécurité, ou l’obstruction d’une ou plusieurs passes de l’évacuateur. » Le principe est simple à établir, mais difficile à mettre en pratique. Il y a au moins trois exigenes particulières : 1. évaluer la probabilité de défaillances des vannes placées sur les évacuateurs de crues 2. évaluer le risque d’obstruction d’un évacuateur par des corps flottants 3. mettre en place un outil d’analyse qui rende compte du caractère conjoint (et non indépendant) des scénarios de crues et des risques de dysfonctionnement.
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers 2.2.1 Probabilité d'indisponibilité des vannes En pratique, nous avons eu à considérer ce risque sur un seul ouvrage étudié. Dans les autres cas, tout ou l’essentiel de la capacité d’évacuation était formé de seuils libres. Pour l’ouvrage étudié, les probabilités de défaillance des organes ont été évaluées avec l’exploitant, sur la base de son retour d’expérience sur l’ouvrage (ces vannes fonctionnent régulièrement). Un effort particulier a été placé dans l’évaluation d’un risque de défaillance simultanée de deux vannes (mode commun). La bibliographie des risques industriels et des assureurs donne des indications sur les fréquences de dysfonctionnement de vannes ou de dispositifs d’alimentation électriques. Mais elle n’est d’aucune utilité pour mesurer les spécificités des ouvrages les plus sensibles : fiabilité des équipements anciens, fiabilité des équipements rarement manœuvrés, … Les bases de données d'incidents pourraient, si elles étaient partagées, fournir à l'avenir des informations quantifiées. 2.2.2 Risques d’obstruction de l’évacuateur La problématique du risque d’obstruction de l’évacuateur est posée sur la plupart des études que nous avons menées, soit parce que l’ouverture des passes ou le tirant d’air est inférieur à ce qui est recommandé par les rares publications qui traitent du sujet, soit parce que la lame d’eau sur l’évacuateur est faible. Le risque d’obstruction a été évalué en considérant, dans les différents cas : - la taille de la retenue, comparée au volume de la crue ; il est probable qu’une retenue de grand volume par rapport à celui de la crue (ce qui reste à caractériser en pratique) soit en pratique insensible à ce risque, - la disponibilité en corps flottants potentiels, souvent des arbres (bassin versant, rives) ; il y a probablement une diminution du risque lorsque les rives de la retenue sont bien entretenues, - le retour d’expérience sur la retenue : le comportement des retenues lors de certaines circonstances exceptionnelles (très fortes crues passées, tempête de 1999-2000) donne des indications utiles. Dans les analyses, nous considérons deux situations d’obstruction : une situation d’obstruction partielle, et, lorsque cela paraît pouvoir se produire, une situation d’obstruction totale (telle que celle qui a obstrué l’évacuateur du barrage de Palagnedra). Des probabilités sont affectées à ces deux situations ; elles sont évaluées à dire d’expert, en tenant compte des facteurs de risque cités ci-dessus. La difficulté de l’exercice est d’autant plus grande que les solutions à un risque d’obstruction par les flottants ne sont pas évidentes. Le dégagement d’un gabarit de passage suffisant n’est pas toujours possible. L’installation de grilles ou drômes présente des inconvénients : on ne peut pas toujours garantir que la situation sera meilleure après qu’avant. Il y aurait un réel intérêt à mettre au point et diffuser des règles générales de conception de dispositifs pare-embâcles. 2.3 Résistance ultime – cote de danger Selon la circulaire barrage, « L’étude évaluera la cote de dangers, c’est-à-dire la cote de la retenue qui pourrait être à l’origine d’un scénario de rupture du barrage lors d’une crue exceptionnelle ou tout au moins la cote au dessus de laquelle la stabilité de l’ouvrage n’est plus garantie, ainsi que l’ordre de grandeur de la probabilité d’occurrence de ce scénario » . La notion de « cote de danger » n’est pas explicite dans la définition de la circulaire. S’agit-il de la cote au-delà de laquelle la probabilité de rupture est 1% (rupture peu probable mais stabilité non garantie) ? 10% (rupture possible) ? 50 % (rupture probable) ? Il serait utile d’éclaircir cette notion, car les écarts introduits peuvent être importants. La théorie voudrait qu’on regarde tout ces cas avec les probabilités associées ; la pratique montre qu'il est peut-être difficile de faire autrement. En effet, à l’usage, il n’y a pas une définition qui apparaisse plus utile qu’une autre ; selon les cas, la cote de danger qui contribue le plus à la probabilité globale (et donc la cote la plus utile) est la cote 1%, 10%, 50% ou 90%. Un exemple est donné pour illustrer ce propos.
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers Exemple : barrage en remblai équipé d’un seuil libre (grande longueur déversante ou petite longueur déversante). On examine, pour différentes cotes de retenue au-delà des PHE, la probabilité que la cote soit atteinte et la probabilité de rupture à cette cote. Dans le premier cas (grande longueur déversante), la probabilité de rupture est constituée par les cotes basses (« cote 1% ») ; la probabilité de rupture est pilotée par les incertitudes de fonctionnement aux cotes de retenue entre PHE et crête. Dans le second cas, la probabilité de rupture provient plutôt des cotes hautes (« cote 50% » et plus). seuil large ; revanche modeste ; Probabilité Probabilité de Contribution à la probabilité 1/1000 d’atteindre cote d’atteindre la cote rupture à cette cote probabilité annuelle de crête – 0,50 m rupture Cote crête – 0,30 10 -4 0,001 10 -6 Cote crête 3 10 -6 0,01 3 10 -7 Cote crête + 0,30 < 10 -6 0,05 < 10 -7 Cote crête + 0,70 < 10 -6 0,9 < 10 -7 Probabilité annuelle de rupture 10 -6 seuil étroit ; revanche modeste ; Probabilité Probabilité de Contribution à la probabilité 1/1000 d’atteindre cote d’atteindre la cote rupture à cette cote probabilité annuelle de crête – 1 m rupture Cote crête – 0,30 2 10 -4 0,01 1 10 -6 Cote crête 1 10 -4 0,1 6 10 -6 Cote crête + 0,30 6 10 -5 0,5 2 10 -5 Cote crête + 0,70 2 10 -5 0,9 2 10 -5 Probabilité annuelle de rupture 5 10 -5 Tableau 1 : exemple de calcul de la probabilité de rupture pour des barrages en remblai. Mise en évidence de la difficulté à définir une "cote de danger". Difficulté supplémentaire : il est souvent difficile de déterminer une cote de danger. Dans le cas des barrage-poids, la cote de danger dépend de mécanismes que l’on ne sait pas bien calculer (et pour lesquels on a peu de retour d’expérience …), et ce d’autant moins que les barrages sont de hauteur modeste : - mécanismes provoqués par des écoulements significatifs qui surversent par-dessus la crête (érosion pied aval, circulations d’eau sur les rives, …), - calculs de stabilité tenant compte de la cohésion et la résistance à la traction aux interfaces, deux paramètres difficiles à estimer ; et calculs qui reposent sur des modèles simplifiés, qui ne sont pas nécessairement aptes à bien représenter les conditions d’une rupture. Dans le cas des barrages en remblai, la cote de danger dépend beaucoup des arrangements faits en crête, qui contribuent à contenir l’eau de la retenue au-delà des PHE (étanchéité, parapet), et à ralentir l’érosion du remblai. Là encore, le retour d’expérience fait défaut ; il y a de surcroît les sollicitations spécifiques des vagues. En définitive, la cote de danger est une notion qui ne paraît pas clairement établie, et qui ne paraît pas non plus toujours utile. Il vaut peut être mieux poser la question dans l’autre sens ; à crue (ou cote) donnée, pense- t-on que le barrage résiste ? 2.4 Outils pour l'évaluation de la probabilité d'accident en crue Approcher une probabilité de rupture en crue nécessite les étapes suivantes : Etude Crues de période Cote de période Probabilité de hydrologique de retour T ; de retour T ; rupture classique crues cote Crue de projet « horsains » « horsains » Vagues horsains ; incertitudes type évacuateur et débitance ; revanche ; hydraulique évacuateur disponibilité ; laminage ; résistance ultime Tableau 2 : démarche de calcul Probabilité de rupture en crue
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers Pour traiter ce problème, il nous a paru nécessaire de développer un outil adapté, qui permette d'intégrer la formulation des combinaisons de probabilité. La démarche est la suivante : Etape 1 : définition (classique) des hydrogrammes et des organes d'évacuation des crues. Etape 2 : définition de "configurations" ; chaque configuration correspond à un état de disponibilité des évacuateurs. Cet état de disponibilité est défini sous la forme d'un abattement sur le débit évacué. Il est possible de calculer une loi de la cote (probabilité d'atteindre une cote donnée) pour chacune des configurations. Etape 3 : définition du scénario : le scénario définit la probabilité de chacune des configurations ; cette probabilité peut dépendre du débit de crue considéré (risques de dysfonctionnements plus forts pour des crues plus rares). Le scénario permet de déterminer la loi de probabilité de la cote, tenant compte de la disponibilité des évacuateurs.
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers Etape 4 : définition des modes de rupture, et des lois de probabilité associées. Pour chaque mode de rupture, on définit non pas une cote de danger unique, mais une probabilité de rupture pour diverses cotes. Le logiciel interpole entre les probabilités données. Etape 5 : calcul de la probabilité de rupture pour chacun des modes ; puis sommation La probabilité de rupture résulte de la combinaison entre d'une part la probabilité de la cote (crues, disponibilité des évacuateurs) et d'autre part les modes de rupture. Dans l'exemple ci-dessous, trois modes de rupture sont calculés : surverse par dessus la crête, rupture d'un mur de rive, et surverse dans le coursier de l'évacuateur. C'est ce dernier mode (débordement dans le coursier) qui domine. Nota : chaque mode de rupture est associé à une cote de rupture et donc des conséquences différentes ; en théorie il faudrait mener une sommation probabiliste des conséquences. En première approximation, nous avons considéré que la variété des conséquences était du second ordre. Ça n'est pas toujours vrai : par exemple, dans le cas du barrage Alain Cami ([4]), la gravité d'une rupture à RN est moins grande qu'une rupture à PHE. Il y a là une amélioration possible de la méthode.
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers Deux difficultés particulières méritent d'approfondir la réflexion. Sur certaines études, il est apparu qu'un enjeu particulier est constitué par les parapets en sommet de barrages en remblai. Les parapets peuvent constituer une défense ultime pour les très hautes cotes de retenue, mais leur stabilité doit être vérifiée en conséquence. Un parapet fragile peut d'ailleurs être plus dangereux qu'utile (concentration des écoulements de surverse après rupture locale). L'étude des mécanismes de rupture des parapets impose de considérer simultanément la problématique des vagues, avec la difficulté de définir la probabilité conjointe d'une crue et d'un vent fort. Les horsains (événements hydrologiques qui sortent des statistiques, et pour lesquels l'hydrologie ne donne pas toujours de probabilité associée) ne sont pas bien pris en charge, à ce stade, par la méthode. 3 RISQUE EN CRUES DES DIGUES FLUVIALES 3.1 Interprétation des textes En matière de crues, l'arrêté distingue peu Barrages et Digues. Concernant les Potentiels de dangers, il est mentionné la nécessité d’évaluer la surverse pour les Digues. Concernant l’évaluation des aléas, des périodes de retour sont fixées pour les barrages, et pas pour les digues. En revanche, la circulaire Digues diffère fortement de la circulaire Barrage. La grille de criticité proposée pour les digues, reproduite ci-dessous, prend en effet des partis : - contrairement au cas des Barrages (et, nous semble-t-il, en décalage avec le texte de l'arrêté), la Probabilité de l’accident n’intervient pas et, si la Gravité intervient, c’est de manière marginale, - le point central de la sécurité des digues fluviales est la capacité à permettre les premiers débordements avant la rupture proprement dite. Une digue est classée verte si la rupture survient après les premiers débordements. De facto, une digue est classée verte si elle possède un déversoir, ou si elle résiste à une certaine lame de surverse. Tableau 3 : criticité des digues, circulaire d'avril 2010 On comprend donc que la circulaire recommande essentiellement la mise en œuvre de déversoirs, et fait reposer la sécurité uniquement sur un critère : les premiers débordements ne doivent pas être dangereux, ce qui permet d'alerter puis d'évacuer les populations. A l’usage, cet unique point paraît donner une vision pertinente, mais incomplète, de la sécurité des digues fluviales. Pertinente car, en effet, une digue qui s’effacerait au-delà de la crue de protection, sans mettre en danger les populations, remplit entièrement son rôle : il n’y a pas besoin (et il est peut être même néfaste) de vouloir protéger la digue contre des crues très rare. Incomplète car (1) un déversoir ne peut pas toujours remplir la fonction qui lui est dévolue, de remplissage contrôlé de la zone protégée et (2) la grille postule la
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers possibilité de calculer une « cote de danger », ce qui est en réalité difficile. On note également que la sécurité repose sur le mot "Après", qui reste à interpréter au cas par cas. 3.2 Nécessaire raffinement de la grille 3.2.1 Cinétique de l’inondation Pour caricaturer, la conception du dessin ci-dessous serait faussement excellente à tous points de vue : le déversoir permet le classement en « vert » ; sa petite dimension et son éloignement des zones habitées garantissent que sa mise en service n’inondera pas les riverains pour les débits compris entre la crue de protection et la crue de surverse. terrain naturel crête de digue déversoir enjeux ligne d'eau Figure 1 : une digue "verte" selon la circulaire, mais probablement peu sûre (déversoir de petite longueur déversante, mal positionné sur le profil en long, et cote de crête de digue qui ne suit pas la pente de la ligne d'eau) Notre premier retour d’expérience sur les études de danger des digues nous conduit à examiner plus en détail la dangerosité des digues, en examinant la cinétique des crues de référence et en valorisant les informations produites par les calculs d’onde de rupture. Par exemple, dans le cas d'un système de protection neuf, comportant plusieurs digues classe C, de classe de gravité "2 à 3", l'examen de la sécurité de l'ouvrage a amené à prendre les dispositions suivantes : - les digues sont équipées de déversoirs, avec premiers déversements pour la crue décennale (ce qui est un choix de niveau de protection, accepté par le Maître d'ouvrage et les riverains), - les premiers déversements sur la crête des digues se produisent pour des périodes de retour 30 à 100 ans, - le fonctionnement du système a été simulé pour plusieurs hydrogrammes caractérisant des crues de période de retour 100 et 1000 ans ; au moment de la rupture éventuelle des digues, la zone protégée est déjà entièrement inondée ; les déversements jouent effectivement le rôle d'alerte pour l'ensemble de la zone protégée, - les digues sont conçues en argile enherbées avec une crête large et revêtue, elles devraient pouvoir résister à la surverse y compris pour les crues centennales ou plus rares : avec le remplissage des casiers, les vitesses et différences de hauteur amont-aval restent modestes. Dans ce projet, selon la circulaire, il aurait été admis de laisser les digues se rompre pour des crues de période de retour supérieures à 10 ans. Le parti du concepteur a été différent ; les digues sont conçues pour ne pas se rompre y compris pour les crues centennales et plus rares, en les faisant résister à la surverse. Ce parti vient à la fois de vieux réflexes (ne pas construire d'ouvrages trop fusibles), et de la confiance incomplète accordée à la modélisation hydraulique : les incertitudes sur la ligne d'eau ou les embâcles peuvent rendre les déversoirs moins efficaces. Dans ce projet, la situation la plus dangereuse est causée par les déversements contrôlés : la nécessaire débitance des déversoirs amène à un remplissage relativement rapide des casiers (1,50 m d'eau en quelques heures). 3.2.2 Probabilités d’accident La sécurité visée par la circulaire est exprimée par cote (crue) de danger > cote (crue) des premiers déversements. Or, la cote (crue) de danger n’est pas connue. Pour de nombreuses digues fluviales, l’incertitude est même très forte. - vis-à-vis de l’érosion interne ou des autres instabilités mécaniques, la cote de danger peut être inférieure à la cote de crête des digues ou à la cote de déversoirs ; il est généralement impossible de garantir que la stabilité à l’érosion interne est entièrement acquise pour les cotes sous la cote des déversoirs,
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers - vis-à-vis de la surverse, la cote n’est pas une notion très claire, puisqu’elle dépend de la ligne d’eau et de ses fluctuations ; la crue non plus, car il n’y a pas de relation univoque entre crue et cote (déversoir obstrué / évolution morphodynamique pendant la crue / ou plus simplement : pente de la ligne d’eau réelle différente de la pente de la ligne d’eau calculée). Une étude très détaillée sur une digue du Rhône a conduit à une prise en considération différente de la Criticité : - évaluation des différents modes de rupture (érosion interne, instabilités, surverse) et probabilisation de chacun ; calcul d’une probabilité de rupture de la digue dans l’état actuel, - évaluation des moyens qui permettraient d’améliorer la sécurité en crue de la digue : projet d'équipement en section résistant à la surverse (période de retour 50 – 100 ans) ; le reste de la digue (non résistant à la surverse) est calé au niveau crue millénale + 50 cm ; mise en sécurité des parties d’ouvrages où la sensibilité à l’érosion interne amène à une probabilité de rupture excessive, - vérification que cette conception permet d'atteindre des niveaux de probabilité de rupture acceptable (en l'espèce 10-5 par an, tous modes de rupture confondus). Dans ce dernier cas, l’équipement par déversoir n’est qu’un aspect du problème. La fonction première du déversoir n’est pas d’alerter les populations, mais de contrôler l’élévation de la ligne d’eau. Le concept de sécurité ressemble à celui adopté pour les barrages, avec un évacuateur de crues et une crête calée au-delà de la crue de projet. 3.2.3 Conclusion sur les digues L’équipement systématique des digues en déversoirs est certainement un progrès important confirmé par les études de dangers. Cependant, ce premier retour d’expérience nous laisse penser que la seule application de la circulaire peut ne pas suffire. En particulier dans le cas où les premiers débordements ne constituent pas une alerte efficace : premiers débordement qui ne concernent qu'une partie de la zone protégée, et donc n'alertent pas ailleurs, chronologie de la crue qui ne laisse pas suffisamment de temps entre premiers débordements et rupture éventuelle des digues. La sécurité de l'ouvrage repose selon nous sur les aspects suivants : - les premiers débordements ne doivent pas être dangereux, ce qui donne une opportunité d'alerter puis d'évacuer les populations ; - les calculs de cinétique du déroulement des crues, les calculs d’onde de rupture et l’examen des conditions d’inondation de la zone protégée permettent de porter un jugement sur la réalité de l’alerte et les possibilités d’évacuation ; tenir compte ici des incertitudes de modélisation (pente de la ligne d’eau) et de la variété des hydrogrammes de crue ; - la rupture par d’autres mécanismes que la surverse doit être suffisamment peu probable pour que la criticité soit acceptable ; - les débordements "dangereux" (susceptibles de rompre la digue) doivent se produire pour une fréquence suffisamment faible, proportionnée aux enjeux aval ; en effet, malgré les premiers déversements, le risque résiduel causé par une rupture n’est certainement pas nul (évacuation pas toujours aisée, surtout la nuit), et les effets sur les infrastructures et la vie économique (importance de l’inondation + durée de ressuyage) pas toujours négligeable. 4 PRISE EN COMPTE DE L'EROSION INTERNE L'érosion interne est apparue comme étant un des aspects déterminants dans l'évaluation de la sécurité (hors crues) des ouvrages en remblai : les digues, les barrages en remblai de conception ancienne, sièges d'écoulements non filtrés, les "petites" parties d'ouvrages qui assurent les fermetures hydrauliques : parapets, murs anti-crue, voile de fermeture en rive, … Il est difficile, en la matière, d'aboutir à des résultats quantifiés. En pratique, un diagnostic peut résulter d'un croisement de plusieurs méthodes. 4.1 Utilisation de démarches formalisées Les différents travaux publiés dans le cadre des recherches récemment menées sur l'érosion interne (France, Australie, Etats-Unis, Pays-Bas, Royaume-Uni, …) apparaissent tout à fait utiles pour un examen des
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers mécanismes et une identification des phénomènes en jeu, et une première quantification. On pourra par exemple se référer à [3]. Ces travaux proposent une approche analytique, en identifiant les chemins d'érosion interne, et pour chacun d'eux en évaluant les différentes étapes d'un mécanisme d'érosion (défaut initial, initiation, continuation, progression, rupture). Pour chacune des étapes, on peut alors tenter une expertise sur les phénomènes possibles et leur degré de probabilité. L'expertise s'appuie, autant que possible, sur des éléments de quantification. Chemin de percolation "3" : Retenue → Remblai initial → Géotextile d’interface → Recharge aval Processus Description des éléments du processus Probabilité choisie et commentaires d’érosion Inititiation P1 : Probabilité qu’un chemin de 1 (venue d'eau visible) percolation « 3 » existe P2 : Probabilité que ce chemin génère des 0,1 (peu probable : pas de symptôme d’érosion interne gradients et vitesses suffisants pour éroder avant 1986, date de mise en service du géotextile ; l’arène du corps du barrage cependant, pas de certitude, car incident sur perré amont peut changer les gradients) Continuation P3 : Géotextile déchiré 0,1 (déchirure à la mise en service peu probable – mais pas de certitude) P4 : Le matériau de remblai est entraîné à 1 si P2 est vraie travers la déchirure du géotextile Progression P5 : une érosion régressive se forme 0,01 très peu probable le gradient moyen est de l’ordre de 0,25 ; matériau : sables très silteux et à granulométrie étalée (Cu = d60/d10 > 50 : selon Schmertmann, il faut des gradients moyens nettement supérieurs à 1 pour éroder ce type de matériau) l'auscultation ne décèle pas d'augmentation du débit ni d'arrivée de particules. donc 0,1 si P2 est vraie (P2*P5 = 0,01) P6 : le conduit d’érosion régressive 1 (pas d’obstacle à la progression vers l’amont : l’arène progresse vers l’amont possède suffisamment de cohésion pour tenir le conduit) Rupture P7 : pas d’intervention humaine avant 0,1 (le phénomène génère, dans ses phases initiales, des rupture augmentations de débit, puis des désordres, visibles ; une intervention est possible, par ouverture des vannes. Tableau 4 : exemple d'une application simple de l'examen par étapes des mécanismes d'érosion interne. 4.2 Valorisation de l'accidentologie Il est apparu utile d'utiliser une échelle des symptômes observés, notamment pour les digues en raison de leurs grands linéaires, mais aussi pour les barrages en remblai. L'échelle est ensuite valorisée en examinant ce qui pourrait, à l'avenir, réactiver ou aggraver les phénomènes : cotes maximales atteintes en crue qui pourraient être dépassées, vieillissement ou modification des ouvrages, ... Une première version, ci-dessous, a été utilisée dans certaines de nos études de dangers.
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers Terminologie Echelle Intitulé Quantité érodée Symptômes selon Fell&Fry 0 Pas d'écoulement 0 1 Ecoulement diffus 0 Auscultation, humidité 2 Ecoulement concentré < 1 kg Ecoulement localisé visible 3 Ecoulement évolutif 1 - 10 kg Piézométrie ou débits de fuites non stabilisés Initiation avérée Fontis, cavités, affaissements. 4 Preuve d'érosion 10 - 100 kg Recueil de matériaux dans la zone des fuites Colmatage de drains 5 Erosion significative 100 - 1000 kg idem, volume de l'ordre de 1 dm3 Continuation avérée 6 Erosion métrique 1 t - 10 t idem, volume de l'ordre de 1 m3 Rupture évitée par action Abaissement de la retenue ou travaux de confortements 7 10 t - 100 t volontaire provoqués par l'incident Progression avérée 8 Rupture > 100 t Rupture avec diagnostic d'érosion interne avéré Echelle ISL des symptômes d'érosion (version provisoire) Tableau 5 : échelle des symptômes d'érosion 4.3 Approfondissement par reconnaissances adaptées Dans certains cas, nous avons été conduit à approfondir le diagnostic par la mise en œuvre d'un programme de reconnaissances adapté, faisant appel aux technologiques classiques d'identification des sols (avec focus sur granulométrie, densité en place, caractérisation des sols fins), à la géophysique, et dans un cas, aux essais développés récemment pour évaluer la résistance des sols (HET, JET). Ce type d'approfondissement est difficilement évitable dans le cas d'ouvrages pour lesquels le risque existe et pour lesquels il y a eu peu de mises en charge. C'est généralement le cas des digues fluviales. 4.4 Commentaires Notre expérience est que cette approche de l'érosion interne est intéressante à plusieurs égards. La définition des chemins d'érosion et des mécanismes associés impose explicitement de rechercher les zones de faiblesse eu égard à ces phénomènes ; cette recherche est intéressante, et est utilement complétée par la synthèse de l'accidentologie et de l'auscultation dans ces zones de faiblesse, L'exercice impose de décrire la succession des phases d'érosion (défaut initial, initiation, continuation, progression, rupture) ; il est possible, pour chaque phase, d'évaluer, au moins à dire d'expert, les phénomènes en jeu. Même si l'exercice est un peu théorique cela permet de classer les probabilités des mécanismes, et de tester l'efficacité d'éventuelles mesures de limitation des risques. Même si l'exercice est criticable, faute d'une connaissance suffisante des mécanismes d'érosion, il a le mérite de s'attaquer au risque principal de rupture hors surverse (pour les remblais). Il conduit à rechercher une caractérisation des matériaux de construction (densité, granulométrie, propriétés des sols fins), qui est toujours utile. La part de jugement reste forte, car ni les méthodes standards de mécanique des sols, ni les essais en cours de développement pour quantifier l'érosion interne ne peuvent aujourd'hui apporter de caractérisation quantitative de la résistance d'un sol à l'érosion interne.
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers 5 APPORTS DE LA DEMARCHE ETUDES DE DANGERS 5.1 Echelle des risques (probabilités et gravités) 5.1.1 Généralités L'arrêté demande que l'étude conclue sur les "scénarios critiques", et présente la démarche de réduction des risques. La criticité est présentée comme un croisement entre probabilité des accidents et gravité des conséquences. Les circulaires écrivent : R(isque) = P(robabilité) * G(ravité). Il est classique de considérer des classes de Probabilités et de Gravité. On passe d’une classe à la classe supérieure lorsque la Probabilité ou la Gravité est multipliée par 10 (échelle exponentielle). En termes de classes, on peut alors écrire : Classe de Risque = Classe de Probabilité + Classe de Gravité. L'article [4] décrit la démarche adoptée. 5.1.2 Quel niveau de risque acceptable ? Les circulaires donnent des indications sur la Gravité. On peut également fixer des classes de Probabilité. Nombre de personnes exposées Classe de Gravité (cinétique rapide / lente) Négligeable 0 Modéré 1 / 1 à 10 Sérieux 2 1 à 10 / 10 à 100 Important 3 10 à 100 / 100 à 1000 Catastrophique 4 100 à 1000 / plus de 1000 Désastreux 5 plus de 1000 / plus de 10 000 Tableau 6 : classes de Gravité Probabilité annuelle d’occurrence Classe de probabilité associée Evénement possible mais -1 Inférieure à 10-6 extrêmement peu probable 0 10-5 à 10-6 Evènement très improbable 1 Entre 1/100 000 et 1/10 000 Evénement improbable 2 Entre 1/10 000 et 1/1000 Evènement probable 3 Entre 1/1000 et 1/100 Evènement courant 4 Entre 1/100 et 1/10 Evènement fréquent 5 Entre 1/10 et 1 Tableau 7 : classes de Probabilités Une classe de risque correspond alors à une probabilité annuelle du nombre de personnes exposées, en zones à cinétiques rapide ou lente. Par exemple, une classe de Risque 5 correspond, en valeur centrale, à exposer, en "moyenne annuelle", 10-2 personnes en cinétique rapide et 10-1 personnes en cinétique lente. La question qui subsiste alors est : quel est le niveau de Risque acceptable ? La définition du niveau de Risque acceptable revient au Maître d’Ouvrage et à l’Etat. L’ingénierie ne peut que donner des conseils. Mais la réalisation d’études de dangers l’oblige à formuler ces conseils. Les références existantes sont rares. Deux sources sont discutées ci-dessous.
Colloque CFBR-AFEID: «Sécurité des barrages et nouvelle réglementation française Partage des méthodes et expériences», 9 Novembre 2010,Lyon – Luc Deroo, Jérémy Savatier – Retour d'expérience de premières études de dangers En matière de barrages, les publications du Comité International des Grands Barrages font référence à des critères utilisés dans certains pays anglo-saxons (Australie notamment). Ces critères proposent : Risque acceptable (zone verte) = 10-4 victimes par an et Risque tolérable (zone rouge) = 10-3 victimes par an. F-N Chart (ANCOLD, USBR) 1.E-02 Annual Exceedance Probability of Number of Fatalities 1.E-03 1.E-04 1.E-05 1.E-06 1.E-07 1.E-08 0.1 1 10 100 1000 10000 Potential Number of Fatalities ANCOLD 1998 : Limit ANCOLD 1998 : Objective USBR 2009 : Risk Guideline for Existing Dams USBR 2009 : Risk Guideline for New Dams and Major Modifications Figure 2 : Risque Tolérable, selon ANCOLD et USBR Les Eurocodes fournissent, dans les annexes du tome « 0 » [2], des indications sur les probabilités de rupture acceptables pour les ouvrages de génie-civil et de bâtiments. La probabilité annuelle de rupture acceptable est 10-6 pour un ouvrage standard (pont ou bâtiment par exemple), et 10-7 pour un ouvrage à « Classe de conséquence élevée » (stade, hôpital, caserne, …). Classe Description Exemples de bâtiments Classe de Proba annuelle de et de travaux de génie civil Fiabilité défaillance visée Conséquence élevée en termes de perte Tribunes, bâtiments publics où CC3 de vie humaine, ou conséquences les conséquences de la RC3 10-7 économiques, sociales ou défaillance seraient élevées (par d'environnement très importantes exemple salle de concert) Conséquence moyenne en termes de Bâtiments résidentiels et de CC2 perte de vie humaine, conséquences bureaux, bâtiments publics où RC2 10-6 économiques, sociales ou les conséquences de la d'environnement considérables défaillance seraient moyennes Conséquence faible en termes de perte Bâtiments agricoles CC1 de vie humaine, et conséquences normalement inoccupés, serres RC1 10-5 économiques, sociales ou d'environnement faibles ou négligeables Tableau 8 : Extraits Eurocode 0 Le tableau ci-dessous propose une interprétation de ces deux sources.
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