Flash Zoosanitaire International " Mai 2022 "
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Flash Zoosanitaire International « Mai 2022 » Naouel FATNASSI1, Salma FERCHICHI1, Fatma ARFAOUI2, Iheb BANNOURI3, Anissa DHAOUADI1, Chédia SEGHAIER1 1 : Centre National de Veille Zoosanitaire, 2 : Direction Générale des Services Vétérinaires, 3 : Commissariat Régional de Développement Agricole de Tunis Variole du singe : Un virus qui inquiète les autorités sanitaires dans le monde Monkeypox a récemment attiré l'attention des virus dans ces pays a eu lieu suite à des cas scientifiques, des médias et des politiciens à humains importés ou suite à l’importation l’échelle mondiale après la détection de cas de d’animaux infectés (1), (2) (8). variole du singe dans différents pays et Depuis le 13 mai 2022, des cas humains de VS continents. Ce numéro de flash portera sur les ont été enregistrés dans 22 pays non différents aspects épidémiologiques et endémiques à la maladie. Au total, 229 cas cliniques afin d’avoir une idée claire sur cette confirmés et 89 cas suspects ont été recensés maladie ainsi que les mesures prises par les au 25 mai 2022 à 17h30 (UTC) (9) (Figure 1). autorités vétérinaires en cas d’importation de Selon l’Organisation Mondiale de la Santé tout animal sauvage, entre autres les singes et (OMS), les pays endémiques à la maladie les rongeurs. sont : Bénin, Cameroun, République Etiologie : Le virus de la variole du singe (VS) Centrafricaine, République Démocratique du est un virus de la famille des Poxviridae, genre Congo, Gabon, Ghana (maladie identifiée orthopoxvirus du même genre que le virus de uniquement chez les animaux), Côte d’Ivoire, la variole de la vache (cowpox) et de la variole Libéria, Nigeria, Sierra Leone, République du chez l’Homme (smallpox) (1), (2). Congo et le Soudan du Sud (10). Entre le 15 La variole du singe, appelée également, décembre 2021 et le 01 mai 2022, des cas orthopoxvirose simienne est une zoonose rare humains ont été déclarés au Cameroun, (3). Les isolats de monkeypoxvirus sont République Centrafricaine, République subdivisés en deux clades en fonction des Démocratique du Congo et le Nigéria avec différences génétiques et phénotypiques ; les enregistrement de mortalités (10). clades d'Afrique de l'Ouest et celui du bassin Réservoirs et hôtes : Actuellement, plusieurs du Congo (Clade d’Afrique Centrale). Ce incertitudes subsistent quant au réservoir du dernier est considéré le clade le plus virulent virus de la VS. Ce dernier n’est toujours pas (4). identifié (3), (11). Distribution géographique : Des épidémies Le virus de la VS peut infecter un large éventail de type Pox, précédemment rapportées depuis d'hôtes ; les humains, les primates non 1936 chez des primates non humains, peuvent humains et les rongeurs (12) (Tableau I). être probablement associées au virus de la VS Cependant, les informations sur les hôtes (5). Cependant, c’est en Aout 1958 que le virus primaires de la maladie restent jusqu’à a été isolé pour la première fois à Copenhague maintenant limitées. A ce jour, les chercheurs au Danemark dans un laboratoire de recherche admettent que les rongeurs, en particulier, les (1) chez un singe Macaca cynomolgus amené écureuils arboricoles (Funisciurus ; à partir de l’Afrique à des fins de recherche (6). Heliosciurus), les cricétomes (connus sous les Le premier cas humain a été rapporté dans le noms impropres de rats de Gambie ou rats village de Bukenda de la république géants) (Cricetomys) et les loirs africains Démocratique du Congo (Ex Zaïre), en Aout (Graphiurus), ont été impliqués comme hôtes 1970, chez un enfant âgé de 9 ans atteint d'une primaires en Amérique Centrale et en Afrique maladie vésiculeuse avec des lésions de l'Ouest (12). Les primates non humains et cutanées similaires à la variole (7). Entre 1970- les humains pourraient être des hôtes 1971 la maladie a été également rapportée accidentels du virus de la VS (11). chez des humains en Côte d'Ivoire, Liberia, Des études antérieures menées lors des Nigeria et Sierra Leone (6). La maladie épidémies dans les années 80 ont démontré apparait généralement de façon sporadique qu’entre 72% à 78,1% des cas de variole de dans le centre et l'ouest de l'Afrique à proximité singe avaient un contact avec la faune des forêts tropicales humides. A partir de 2003, sauvage. Toutefois, le rôle de cette dernière la maladie a été signalée en dehors de dans le maintien et la transmission à la l’Afrique ; aux Etats Unis d’Amérique, population humaine reste jusqu’à maintenant Singapore, Royaume Uni, … L’introduction du non définis (14), (15). 1 Veuillez cliquer sur les liens hypertextes pour accéder aux références
Figure 1 : Situation mondiale de la Variole du Singe (9) (Carte élaborée par le CNVZ) Tableau I : Hôtes et sensibilité au monkeypox virus (13) Associée à Ordre/Famille Espèces Méthode d’investigation une infection humaine Humains (Homo sapiens) Isolement du virus oui Orangs-outans (Pongo Isolement du virus Primates /Hominidae oui pygmaeus Chimpanzés (Pan troglodytes) Isolement du virus non Mangabey enfumé PCR/Isolement du virus non Primates/ (Cercocebus atys) Cercopithecidae Le macaque crabier (Macaca Isolement du virus oui fascicularis) Ouistiti commun (Callithrix Primates/Callithrichidae Infection au laboratoire non jacchus) Rodentia/Chinchillidae Lapins (Oryctolagus cuniculus) Infection au laboratoire non Souris domestique (Mus Rodentia/Muridae Infection au laboratoire non musculus) Rodentia/Cricetidae Hamsters Infection au laboratoire non Rodentia/Nesomyidae cricétomes (Cricetomys sp.) PCR/ isolement virale non Rodentia/Gliridae Loirs africains (Graphiurus sp.) PCR/ isolement virale non Écureuils (Funisciurus sp.) PCR/ isolement virale oui Chien de prairie à queue noire PCR oui Rodentia/Sciuridae (Cynomys ludovicianus) Marmotte commune (Marmota PCR/ isolement virale non monax) Rodentia/Dipodidae gerboises (Jaculus sp.) PCR/ isolement virale non Athérure africain (Atherurus Rodentia/Hystricidae PCR/ isolement virale non africanus) tamanoir (Myrmecophaga Pilosa/Macroscelididae Isolement virale non tridactyla) Opossum commun (Didelphis Didelphimorphia/ PCR/ isolement virale non marsupialis) Didelphidae Monodelphis domestica PCR/ isolement virale non Erinaceomorpha/ Hérisson (Atelerix sp.) PCR/ isolement virale non Erinaceidae 2 Veuillez cliquer sur les liens hypertextes pour accéder aux références
Transmission : D’une façon générale, la Symptômes chez l’Homme : La période transmission du virus de la VS se produit d'incubation de la VS est généralement de lorsqu'une personne entre en contact avec 6 à 13 jours, mais peut aller de 5 à 21 le virus provenant d'un animal, d'un être jours(3). Selon l’OMS, chez les humains, humain ou de matériaux contaminés par le la maladie évolue sur deux périodes (3) : virus qui pénètre dans l'organisme par une -Une phase d'invasion : dure entre 0 et 5 lésion de la peau (même non visible), par jours et se caractérise par de la fièvre, des les voies respiratoires ou par les maux de tête intenses, des muqueuses (yeux, nez ou bouche) (16). lymphadénopathies, des douleurs Transmission de l'animal à l'Homme : Peut dorsales, des myalgies et une asthénie se faire par morsure ou griffure, au moment intense ; de la préparation de la viande de brousse, -Une phase d’éruption cutanée : par contact direct avec des fluides commence généralement dans les 1 à 3 corporels ou de lésions ou par contact jours suivant l'apparition de la fièvre. indirect, par exemple via une literie L'éruption évolue de façon progressive contaminée (16). En Afrique, il a été passant de macules aux papules, aux documenté que des infections humaines vésicules, aux pustules et aux croûtes qui ont eu lieu à la suite d’une manipulation de se dessèchent et tombent. Le nombre de singes, de rats géants de Gambie et lésions varie de quelques-unes à plusieurs d’écureuils infectés (17). milliers. Dans les cas graves, les lésions La consommation de viande d’animaux peuvent coalescer jusqu'à ce que de sensibles infectés pas suffisamment cuite grandes parties de la peau se détachent. est un facteur de risque possible (3). Cette éruption tend à être plus concentrée Transmission interhumaine : Selon l’OMS, sur le visage (dans 95 % des cas) et les elle se fait principalement par de grosses extrémités (paume des mains et la plante gouttelettes respiratoires. Les gouttelettes des pieds (75% des cas). Elle peut respiratoires ne peuvent généralement pas également être observée sur les se déplacer à plus de quelques mètres, ce muqueuses buccales (70 % des cas), les qui nécessite un contact prolongé en face à organes génitaux (30 % des cas) et les face. Les autres méthodes de transmission conjonctives (20 % des cas), ainsi que la interhumaine comprennent le contact direct cornée. avec les liquides organiques ou le matériel Les symptômes durent de 2 à 4 semaines. de la lésion et le contact indirect avec le L'ampleur de l'exposition au virus, l'état de matériel de la lésion, par exemple par des santé du patient et les déficiences vêtements ou du linge de la maison immunitaires peuvent entraîner une contaminés (3). aggravation de la situation (3). Dans l'épidémie actuelle, des cas humains Symptômes chez les animaux : Le virus ont été principalement diagnostiqués, mais de la VS n'a été, historiquement, isolé que non exclusivement, chez des hommes deux fois chez un animal symptomatique ayant des relations sexuelles avec d'autres dans la nature : hommes. Aussi, la nature des lésions -En 1985, le virus a été retrouvé, pour la présentes dans certains cas, suggèrent première fois, chez un rongeur africain que la transmission a eu lieu lors de (Funisciurus anerythrus) apparemment rapports sexuels (18). malade dans la région de l'Équateur, en Transmission d'un animal à l'autre : La République Démocratique du Congo. transmission peut se faire par des -En 2012, le virus a été isolé pour la gouttelettes respiratoires, par l'inhalation deuxième fois sur un bébé Mangabey de virus en aérosol ou de matières trouvé mort dans le parc national de Tai, en organiques contenant des particules virales Côte d'Ivoire (20). (par exemple, par la perturbation du virus Toutefois, le virus est hautement dans une litière contaminée), par des pathogène pour une variété d'animaux de abrasions cutanées, par les yeux ou par laboratoire. En effet, nombreux modèles l'ingestion de tissus d’animaux infectés animaux ont été développés en utilisant (19). différentes espèces et différentes voies d'exposition (Tableau II) (21). 3 Veuillez cliquer sur les liens hypertextes pour accéder aux références
La présentation de la maladie peut varier Mesures sanitaires et réglementaires en selon les espèces animales. Certains Tunisie en cas d’importation d’animaux animaux peuvent présenter une forme plus sauvages : L’importation de singes ou de légère de la maladie avec moins de rongeurs en Tunisie comme tout autre symptômes (23). animal sauvage est soumise au contrôle Symptômes chez les primates non sanitaire vétérinaire aux frontières, Humains : Chez les primates non humains, conformément aux textes législatifs et la VS se manifeste généralement par des réglementaires tunisiens en vigueur, éruptions cutanées sur tout le corps, mais principalement la loi N° 99-24 du 9 Mars sont plus fréquentes sur le visage, les 1999 relative au contrôle sanitaire membres, les paumes, la plante des pieds vétérinaire à l’importation et à l’exportation et la queue. Les croûtes qui recouvrent les et le décret n° 2002-668 du 26 mars 2002 pustules finissent par tomber, laissant de réglementant l'intervention des vétérinaires petites cicatrices (24). et des agents chargés du contrôle sanitaire Dans les cas les plus graves, le tableau vétérinaire à l'importation et à l'exportation. clinique peut comprendre : une toux, un L’article 5 de la loi, sus-indiquée, stipule écoulement nasal, une dyspnée, une que les animaux importés doivent être anorexie, un œdème facial, des ulcères accompagnés de documents sanitaires oraux ou une lymphadénopathie. La délivrés par les autorités vétérinaires maladie disséminée, avec des lésions officielles du pays exportateur attestant leur viscérales, est rare dans les infections bonne santé ainsi que leur conformité aux naturelles. La pneumonie n'est fréquente exigences sanitaires et hygiéniques en que chez les singes infectés vigueur en Tunisie. expérimentalement par aérosol (Tableau II) L’article 6 de la même loi indique que le (21), (22), (24). contrôle sanitaire vétérinaire à l'importation Certains animaux ne présentent que des comprend trois étapes : lésions cutanées. La plupart des animaux 1. Contrôle documentaire : Vérification des infectés naturellement se rétablissent, mais documents requis accompagnant des mortalités sont parfois observées, en l'animal, particulier chez les jeunes singes. Des 2. Contrôle d'identité : Vérification de la infections asymptomatiques se produisent description de l'animal inscrit dans les également (24). documents et de son identité. Symptômes chez les rongeurs : Chez les 3. Contrôle physique : Vérification de la rongeurs, les premiers signes peuvent santé et de la sécurité de l'animal vis-à- comprendre de la fièvre, une conjonctivite, vis des maladies et pouvant comporter un écoulement nasal, une toux, une un prélèvement d’échantillons et un lymphadénopathie, une anorexie et une examen en laboratoire. léthargie. Les animaux peuvent ensuite La mise en quarantaine en cas de besoin développer des éruptions cutanées est indiquée dans l’article 7 avec possibilité nodulaires, des pustules ou une alopécie d’abattage en cas de risque de contagion. par plaques. Une pneumonie a également Il importe de souligner que tous les singes été observée (24). Lors de l'épidémie de sont protégés par la Convention sur le 2003 aux États-Unis, les symptômes commerce international des espèces de observés chez les chiens de prairie faune et de flore sauvages menacées (Cynomys), contaminés suite à un contact d'extinction, connue par son sigle CITES ou étroit avec des petits mammifères infectés encore comme Convention de Washington (Gliridés (Gliridae)) et Cricétome des qui a pour but de veiller à ce que le savanes (Cricetomys gambianus)) par le commerce international des spécimens virus du monkeypox importés du Ghana d'animaux et de plantes sauvages ne (25), étaient les suivants : toux, menace pas la survie des espèces antécédents de fièvre, conjonctivite, auxquelles ils appartiennent. L'autorisation manque d'appétit, signes respiratoires et d'importation CITES de l'animal ne peut éruption cutanée (23). être délivrée par la Direction Générale des Forêts (DGF) que sous réserve de la présentation de l'autorisation CITES 4 Veuillez cliquer sur les liens hypertextes pour accéder aux références
d'exportation de l'animal délivrée par Enfin, il convient, également, de noter que l'autorité compétente du pays exportateur. conformément à l’article 212 du Code Dans ce cadre, les services vétérinaires Forestier, tout établissement détenant des officiels collaborent avec les services animaux sauvages, entres autres les compétents de la DGF lors de la primates non humains est soumis à un soumission des animaux sauvages au contrôle sanitaire de l'autorité contrôle sanitaire vétérinaire à la frontière administrative compétente en la matière. pour vérifier qu'ils sont bien inscrits sur la Toutefois, depuis l’épidémie du virus Ébola liste des animaux autorisés à faire l’objet de en 2014, la Tunisie a interdit l’importation commerce. de tous les primates jusqu’à l’heure actuelle. Tableau II : Les principaux symptômes observés chez des animaux infectés par le virus de la variole du singe (21), (22). Modèle animale Voie d’infection Symptômes cliniques Intranasale Perte de poids, virémie, mortalité Souris Intrapéritoniale Perte de poids, virémie, mortalité Intrapéritonéale Éruption cutanée, virémie, mortalité Chiens de prairie Intranasale Éruption cutanée, virémie Intradermique Éruption cutanée, virémie Intrapéritonéale Anorexie, léthargie, virémie, mortalité Écureuils terrestres Intranasale Anorexie, léthargie, virémie, mortalité Sous cutanée Anorexie, léthargie, virémie, mortalité Perte de poids, virémie, Hémorragie des Loirs Intranasale organes internes Fièvre, lymphadénopathie, éruption Aérosol cutanée (+ /-), bronchopneumonie, virémie Fièvre, lymphadénopathie, éruption Intraveineuse vésiculopustuleuse, virémie Primates non humains Fièvre, perte de poids, éruption cutanée, Intranasale virémie Fièvre, lymphadénopathie, perte de poids, Intratrachéale éruption cutanée, virémie Intrabronchiale Fièvre, éruption cutanée, virémie 5 Veuillez cliquer sur les liens hypertextes pour accéder aux références
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