GUIDE DE L'ÉLECTEUR Première partie - Pierre Labrousse - Liberté politique
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Préambule Les élections françaises du printemps prochain revêtent une impor- tance telle que certains candidats n’hésitent plus à parler d’élections « de la dernière chance », ou d’élections qui permettront de « sauver la France ». Or, nombre d’électeurs semblent hésiter : faut-il voter, puisque tous ceux qui ont été élus depuis un demi-siècle n’ont eu de cesse que de déconstruire la France ? Et s’il faut voter, pour qui voter, puisque le mensonge et la dissimulation semblent être le mode opératoire des élus ? Notre ami Pierre Labrousse, professeur agrégé de philosophie, diplô- mé de l’IPC, bien connu des lecteurs de Liberté politique, donne une réponse à ces questions dans ce petit Guide de l’électeur, que nous allons publier en trois parties, au cours des trois semaines à venir. Puisse ce guide contribuer à éclairer puissamment les principaux enjeux du vote à venir ! François Billot de Lochner Président de Liberté politique 2
Introduction Goscinny, fils d’immigré juif, refusait dans les années 50 le « nationalisme » qui avait sévi dans les années 30 et 40. On peut comprendre. Mais chaque album se félicite qu’« un village peuplé d’irréductibles Gaulois résiste encore et toujours à l’en- vahisseur ». Dans l’analyse que nous faisons, nous nous sommes efforcés de conserver la finesse et l’humour que nous suggèrent les réflexions politiques de Goscinny. Un guide pour qui ? Pourquoi ? Comment ? Alors pour qui voterait Astérix ? Pourquoi hésiter ? Pas par manque de connaissance : partout, on ne vous parle que de ça. Plutôt par excès d’infor- mations contradictoires. Comment faire le tri et hiérarchiser ? En reprenant tout par le début, en reprenant les principes fondamentaux de la politique : rôle et pouvoir du jugement personnel et de la raison, bien commun, etc. (premier épisode). À partir de là on pourra appréhender les particularités de cette élection de 2022 (deuxième épisode) en gardant pour la fin les ajustements de dernière minute. La situation est complexe, le choix difficile. Mais on va y arriver. 3
Première partie : le pari de la raison et les principes généraux Que suis-je pour discerner celui qui sera le plus apte à nous gou- verner ? Le mieux serait de n’avoir pas à choisir1. Ne pas voter ? Comme si tous les candidats se valaient. « Tous pourris ! » Est-il équivalent de continuer ou non la désintégration de la souveraineté, la destruction de l’anthropologie traditionnelle (différenciation entre homme et femme, légitimité de l’hétérosexualité) ou la submersion migratoire ? Il n’est peut-être pas raisonnable de croire qu’un des candidats pourrait résoudre tous nos problèmes. Il est encore plus déraisonnable de croire qu’ils soient tous équivalents. J’ai donc !"T#$# le devoir d’avantager les politiques les moins nocifs pour l’avenir de mon pays. mesqver Patrie ou fédéralisme ? Comment échapper gergovie à l’Empire ? pen lan La direction la plus propre n’est pas forcément celle qui nous sera la plus propre. 1. C’est pour cela que Pascal jugeait la monarchie comme absurde et pourtant nécessaire : elle avait au moins le mérite de ne pas nous plonger dans les divisions. Lafuma 977, Sel. 786 : « Les choses du monde les plus dérai- sonnables deviennent les plus raisonnables à cause du dérèglement des hommes. Qu’y a-t-il de moins raison- nable que de choisir, pour gouverner un État, le premier fils d’une reine ? L’on ne choisit pas pour gouverner un bateau celui des voyageurs qui est de meilleure maison. Cette loi serait ridicule et injuste ; mais parce qu’ils le sont et le seront toujours, elle devient raisonnable et juste, car qui choisira-t-on ? Le plus vertueux et le plus habile ? Nous voilà incontinent aux mains, chacun prétend être ce plus vertueux et ce plus habile. Attachons donc cette qualité à quelque chose d’incontestable. C’est le fils aîné du roi ; cela est net ; il n’y a point de dispute. La raison ne peut mieux faire car la guerre civile est le plus grand des maux. » 4
A. Bien commun : bonheur et prospérité, justice, paix et sécurité 1. Le bien commun c’est d’abord le bonheur du plus grand nombre Or le bonheur s’obtient par la pratique de la vertu2 et par l’intelli- gence pratique, la prudence qui suppose du bon sens. Pour autant qu’ils sont une autorité morale, les évêques de France viennent de publier un guide électoral. Un des principes doit orienter l’électeur chrétien, le « respect inconditionnel de toute vie hu- maine ». Ceci exclut absolument Pécresse et Macron qui veulent faire de l’IVG une valeur fondamentale de l’Europe. Pour ces deux candidats, la question est tranchée : un catholique n’a pas le droit de voter pour eux. Voilà un premier principe. Par ailleurs, quel est le candidat qui valorise la morale ? Y a-t-il un candidat qui dénonce la confusion des genres, la décadence, l’idéo- logie LGBT ? Qui veut renforcer la formation de l’intelligence par l’acquisition des savoirs fondamentaux ? Puis-je compter sur Mélen- chon ou Jadot pour valoriser la famille traditionnelle, la natalité, réaffirmer les origines chrétiennes de la France ? Or la morale pu- blique prime sur les éventuelles projections climatologiques. 2. Aristote et les Anciens jusqu’à Mill considéraient que la morale (et la politique qui en est un prolongement) doit nous rendre plus heureux et, inversement, qu’on ne peut pas être heureux si on se sait vicieux. Aristote conclut logiquement sa Politique par un traité sur l’éducation à la vertu. 5
Le bien commun c’est aussi une certaine vie partagée, une culture commune, la joie d’être ensemble. Sans cette joie notre pays ne serait plus qu’un supermarché. Qu’arrive-t-il quand la culture est dévoyée en attraction touristique ? 2. Une digne prospérité économique respectueuse de la propriété privée « Par le travail, l’homme, utilisant son intelligence, parvient à dominer la terre et à en faire sa digne demeure : “Il s’approprie ainsi une partie de la terre, celle qu’il s’est acquise par son travail. C’est là l’origine de la propriété individuelle3.” » 3. Compendium de la doctrine sociale, § 176. 6
Aucun candidat ne prétend abolir la propriété privée. Néanmoins, à partir d’un certain seuil, une fiscalité spoliatrice finit par en être une négation. Quel candidat veut alourdir encore la pression fiscale ? Et l’alléger au bénéfice de qui ? Le plus équitable est-il de supprimer l’ISF ou de supprimer les « droits de succession4 » ? Accroître la dette publique constitue aussi un affaiblissement de la propriété privée. Ce que nous devons collectivement, c’est bien ce que nous ne possédons plus, un argent qu’on viendra nous réclamer. Demandez aux Grecs5. Sous Macron, la dette a bondi de 100 % du PIB à 115 %. Si les taux d’intérêt remontent, vous verrez combien se paye le « quoi qu’il en coûte ». Est-il juste de surtaxer le diesel, l’outil de déplacement du banlieu- sard, du provincial, du paysan ? Saviez-vous que votre essence est taxée à près de 60 % (40 % pour la TICPE + 20 % de TVA6) tandis que le kérosène des avions n’est soumis à aucune taxe ? Le smicard qui fait son plein paye 50 euros de taxes que ne payent aucunement les copains d’Attali partant à New York pour un week end. L’UE envisage 4. Petite remarque en passant : il est assez drôle de parler de « droits de succession » quand une sorte d’impôt sur la mort vient précisément nous priver de ce droit. 5. « Le FMI a reconnu en 2013 qu’il avait plongé la Grèce dans une crise bien plus grave en sous-estimant l’impact des premières mesures de restrictions budgétaires. Pour remplir les caisses de l’État, les impôts ont explosé, du moins pour les salariés et les retraités, et la TVA n’a cessé d’augmenter (24 % actuellement pour le taux principal) au point que la pression fiscale en Grèce se rapproche désormais de celle de la Suède ou du Danemark. Les taxes sur l’immobilier ont frappé tous ceux qui échappaient à l’impôt sur le revenu, à commencer par les profes- sions libérales. Il serait surprenant qu’avec ce traitement de cheval, la « culture de l’impôt » ait beaucoup progressé dans le pays. La Carte Bleue est encore très souvent en panne dans les magasins et les restaurants… » https://www.lesechos.fr/monde/europe/grece-une-cure-dausterite-au-cout-economique-et-social-eleve-1369246 6. https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2022/01/26/les-taxes-sur-les-carburants-ont-elles-augmente massivement-sous-macron_6111080_4355770.html 7
de taxer le kérosène mais unique- ment pour les vols commerciaux. Toujours aucune taxe sur le kéro- sène des jets privés7… Privilégier les plus riches, c’est non seulement produire de l’injustice mais aussi nous jeter dans la décadence. La propriété privée, c’est aussi l’alliance d’une terre et du peuple qui l’a façonnée par son travail renouvelé de génération en génération. Quel candidat protège cet héritage ? Qui protège notre patrimoine, notre identité de peuple ? 7. « L’ONG Belge “Transport & Environment” (T&E) a dévoilé une étude au sujet des émissions de CO2 du trafic aérien. Dans son rapport, on observe la mise en place d’une taxe kérosène pour les vols commerciaux. Cette application se ferait petit à petit sur ces vols dans l’Union européenne. Mi-juillet 2021, la Commission européenne a suggéré de préserver les jets d’affaires (ainsi que les frets aériens, vols cargo) sur cette taxe. https://aeroaffaires.fr/jets-prives-taxe-kerosene/ 8
3. Pas de bien commun sans sécurité intérieure et extérieure La sécurité d’un peuple commence par sa pérennité démogra- phique. Pendant des siècles les Français ont affronté les aléas de la politique, les guerres et les famines en songeant qu’il faudrait sauver cette terre afin de la transmettre à leurs enfants. Jamais ils n’ont eu à se dire qu’en deux générations leurs enfants seraient remplacés par d’autres, leur peuple par un autre, leurs coutumes, leur culture leur art de vivre brutalement évincés. Ce que subissent les peuples européens, tous trahis par leurs gouvernants, est d’une violence inouïe. Seuls la muselière mé- diatique et le tabou du politi- quement correct ont la force d’étouffer leurs cris. Sur ce sujet une partie du clergé – jusqu’au souverain pontife – se vautre dans le piège d’une fausse bienveillance qui transforme l’accueil de l’étranger en abandon de son frère et de ses pères. 9
Si le Christ donne aux personnes l’obligation morale de secourir l’étranger, c’est bien parce que la loi politique des nations fait qu’il y a des étrangers. Le Christ n’a jamais dit qu’il ne devait plus y avoir d’étrangers ! Au contraire, il parle des nations. Dieu a défendu Israël contre les Philistins, contre les Égyptiens, et la France contre l’occu- pant anglais. « Honore ton père et ta mère, afin que tes jours se prolongent dans le pays que l’Eternel, ton Dieu, te donne. » Exode 20, 12 Le patriotisme procède directement du devoir envers son père : si tu honores tes parents ALORS tu garderas la terre que Dieu te donne. Dieu nous donne un pays : Dieu dessine des frontières. Qu’on arrête de proclamer que les frontières expriment une sorte de méchanceté. Nos pères ont façonné une terre par leur travail, elle est devenue leur possession : privée pour les individus, nationale pour les peuples. L’histoire enracine un peuple sur une terre. Quel candidat veut redresser notre démographie et clairement stopper le submersion migratoire ? Recherchons un programme qui incite les Français à avoir des enfants. Sécurité hospitalière. Comment Macron peut-il oser barricader la France entière, nous enfermer, nous museler afin de « ne pas engor- ger les hôpitaux » et « en même temps », c’est-à-dire durant chacune des deux années COVID, fermer plus de 5 000 lits d’hôpitaux par an ? Laisser filer la dette, c’est aussi prendre le risque d’amputer notre sécurité sociale : soins et médicaments déremboursés, urgences payantes, spécialistes inaccessibles avant un an. 10
Lutte contre l’insécurité, les agressions, les viols qui ont doublé en quelques années. Quand les Français se laissaient docilement enfermer, quand les policiers surveillaient les forêts et les plages avec des drones, pour arrêter les promeneurs, les zones de non-droit se multipliaient. J’ai vu cela à Bordeaux au cours de l’été 2020. En régime de dictature sanitaire, la police s’épuise à vérifier que les gens boivent bien leur café assis mais elle déserte les banlieues. Sur ce sujet il est criminel de s’occuper de la multiplication des agressions sexuelles en omettant de voir qu’elles émanent très majoritairement des mâles réfugiés, immigrés ou issus de l’immigration et qui représentent aussi 80 % de la population carcérale. Si la sécurisation intérieure passe donc par le contrôle de sa popula- tion et de ses frontières, cela pose le problème de la souveraineté. B. État, souveraineté, souverainisme La sécurité extérieure passe par la souveraineté. Depuis Aristote, la souveraineté de l’État correspond à une certaine dimension de la nation : atteindre l’autarcie. Autarcie : capacité pour un peuple de produire par lui-même ce dont il a besoin pour vivre et si possible pour bien vivre. Une autarcie totale est aujourd’hui impossible et pas même souhaitable. Néanmoins cette notion peut se traduire aujour- d’hui par la résistance politique à la désindustrialisation. Qui semble apte à développer notre industrie ? Pas Macron qui a bradé Alsthom à General Electric ! Comment conservons-nous l’autonomie énergé- tique ? Pas en tournant le dos au nucléaire, ou en nous enfonçant dans le drame de l’éolien. 11
Posons le problème que soulève la souveraineté. D’une part, plus une nation est étendue et nombreuse et plus elle est capable d’assurer son autarcie. D’autre part, quand elle rassemble trop de monde elle prend le risque de regrouper des traditions voire des nations diffé- rentes. C’est le problème de tous les empires : soit ils assimilent des peuples différents en détruisant leur identité, soit ces divergences résistent voire s’amplifient et finissent par les diviser et les dissoudre. L’Union européenne est à la croisée de ces deux chemins qui seront tous les deux néfastes à notre pays. Surtout si l’UE se révèle être un pseudo empire dans un autre empire états-unien. France Grèce Portugal Allemagne s Italie Pays-Ba 12
Au fait, quels sont les deux aspects de la lâcheté face à l’occupation : soit ne pas se battre, compter sur la gentillesse des puissants (raison- nement d’esclave, dirait Nietzsche) ; soit se diviser et donc disparaître, s’asseoir, faire comme les autres, c’est-à-dire dormir. Comment sauver notre souveraineté ? Ici les options politiques se partagent entre réalisme du court terme et perspective à long terme. L’on n’est peut-être pas crédible si on annonce une volonté de quitter l’UE. Mais si un candidat annonce qu’il va renégocier certains traités en partant du principe que l’UE ne pourrait pas se passer de la France, alors cela signifie bel et bien qu’une négociation n’est possible qu’en envisageant la possibilité de partir. Que proposent les souve- rainistes sur ce point ? C. Les personnalités Quelle qualité morale exiger d’un candidat ? Qu’il ne soit pas ivre pour un débat politique crucial, par exemple. Du sérieux, de l’humi- lité. Bien sûr le gouvernement exige parfois des ajustements, parfois des reniements. Mais qu’au moins on ne se renie pas soi-même avant même de gouverner. Sur ce thème de la constance, les candidats mâles semblent plus solides. De la PMA sans père au rallongement du délai de l’IVG en passant par son fédéralisme européen, Macron se montre d’une terrifiante constance. À l’opposé, Zemmour aussi dit invariablement la même chose depuis des années : ses adversaires ne cessent de le renvoyer à ses anciennes déclarations qu’il assume avec un courage remarquable. 13
Même constance chez les plus petits candidats, pour le meilleur et pour le pire. « Les femmes ressemblent aux girouettes, elles se fixent quand elles se rouillent. » Voltaire En revanche nos deux principales8 candidates donnent raison à Voltaire : elles tournent en fonction du vent : sans doute par peur de rouiller. Marine Le Pen a éliminé de son programme la possible sortie de l’Euro, la retraite à 62 ans ainsi que l’abrogation de la double natio- nalité. Quant à Pécresse, sa vitesse de rotation la met en état de physique quantique : elle parvient à être, à la fois, « 100 % à droite » et « totalement compatible avec le Centre9 ». Elle affirme vouloir être « le pire cauchemar de Macron » et « en même temps » partage toutes ses orientations : sur la vaccination, sur le fédéralisme européen, sur l’IVG dont ils veulent, tous deux, faire un des principes fonda- mentaux de l’Union européenne. Amusons-nous : un beau jour, elle convoque le « grand remplacement », et le lendemain se présente comme un rempart contre cette notion ! 8. J’allais oublier la lilliputienne Hidalgo et l’ex-terroriste Taubira. Gageons que votre hésitation ne parte sur aucune des deux et remercions Hollande d’avoir aussi définitivement atomisé le PS. 9. Rappel : Jean-Christophe Lagarde a maintes fois soutenu Macron avec qui il se disait « d’accord à 100 % », et hurle systématiquement contre Ciotti et Bellamy au point qu’on se demande comment ces derniers peuvent encore rester auprès de Pécresse. CRÉDITS IMAGES P. 3 haut : © Wikimedia.org (Römermuseum, Haltern am See) P. 3 bas : © Asya - Adobe Stock P. 4 : © MicroOne - Adobe Stock P. 6 : © Veronika - Adobe Stock P. 8 : © Ivan Nikulin - Adobe Stock P. 9 bas : © Rudzhan - Adobe Stock P. 12 : © Oksana Stepova - Adobe Stock
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