LA FÉMINISATION DES ARMÉES - ECPAD Archives
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LA FÉMINISATION DES ARMÉES La féminisation de la population active, évolution majeure de la société française au vingtième siècle, s’est propagée dans la sphère militaire. Les femmes sont aujourd’hui plus de 48 000 à servir dans les armées. Leur recrutement représente 18,9 % de l’ensemble du recrutement militaire. Avec un taux de féminisation proche de 14 %, la France est au premier rang des armées européennes et approche le niveau des Etats-Unis (15,5%).Une clé du succès de la féminisation et de l'intégration des femmes dans les armées françaises a résidé dans leur progressivité. La place des femmes dans la Défense nationale était traditionnellement limitée, les armées étant, il y a peu de temps encore, quasiment fermées à tout ce qui était féminin. L’apparition des premières femmes servant sous l’uniforme date de la Première Guerre mondiale, mais c’est à partir du deuxième conflit mondial qu’elles ont pu s’engager sous statut militaire. Le service national, qui fournissait une grande part des effectifs militaires, concernait ainsi essentiellement la moitié masculine d'une génération. La féminisation a progressé lentement, notamment dans les années soixante-dix et quatre-vingt, pour s'accentuer à la fin des années quatre-vingt-dix. Trois temps forts distinguent la féminisation des armées françaises. La loi du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires a instauré le principe d’égalité entre les hommes et femmes au sein des armées en supprimant les distinctions statutaires entre militaires des deux sexes. Désormais, ils servent sous le même régime avec les mêmes garanties. Ayant les mêmes droits et les mêmes devoirs, les femmes peuvent accéder à tous les grades de la hiérarchie et ont vocation à occuper les mêmes emplois que leurs camarades masculins. Puis la loi du 28 octobre 1997, marquant l'engagement de la France dans la professionnalisation totale de ses armées, a permis un renouvellement profond de la population militaire et a entraîné le recrutement d’un nombre important de femmes dans toutes les catégories hiérarchiques et toutes les spécialités, accroissant sensiblement la place des femmes en leur sein. Enfin, la suppression en 1998 des quotas limitant l’accès des femmes à certains postes a donné aux militaires féminins la possibilité de servir dans la quasi-totalité des emplois. Le principe de l’égalité entre hommes et femmes pour l’accès aux différents corps militaires ne connaît d’exceptions que pour certains emplois très spécifiques de par leur nature ou leurs conditions d’exercice. Désormais, les armées se sont complètement engagées dans la féminisation qui s’affiche, avec ses avancées et ses blocages liés aux mentalités, qui peinent parfois à suivre, ou à des difficultés de gestion. À l’image du reste de la société, l’accession des femmes aux emplois de responsabilité reste problématique, même si en peu de temps les femmes ont pris toute leur place aux armées. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010
I / Les rôles traditionnels féminins et les femmes pionnières dans les armées A / La Première Guerre mondiale La notion de métiers féminins s’est construite au long du dix-neuvième siècle comme la prolongation de tâches « naturelles » ou maternelles : infirmière, institutrice ou sage-femme, excluant dans le même mouvement les femmes de professions réservées aux hommes, même si celles-ci étaient présentes dans les activités d’industrie ou de service. Les professions paramédicales sont ainsi de longue date très fortement féminisées par héritage d’une fonction dévolue à certaines congrégations de religieuses. Pendant la période 1914-1918, des volontaires ont servi en tant qu’infirmières ou aides- soignantes dans les hôpitaux militaires, un corps d'infirmières laïques des hôpitaux militaires existant depuis 1909. Le service de Santé des armées recrute en 1914 les premières femmes sous réserve qu'elles servent pour toute la durée de la guerre. Les infirmières de la Croix Rouge sont affectées à des formations sanitaires militaires. Le service de Santé crée ensuite en 1916 le corps des infirmières temporaires. Les femmes doivent avoir au moins vingt-six ans, justifier d’aptitudes et de connaissances professionnelles et s’engager à servir durant la durée de la guerre augmentée de six mois. Elles perçoivent un traitement équivalent à celui des infirmières laïques des hôpitaux militaires. 1/ Référence : SPA 205 M 3988 Paris, affiche de l'Automobile Club de France appelant à l’enrôlement de dames automobilistes. La société d'encouragement de l'Automobile Club lance un appel aux volontaires féminines qui souhaiteraient conduire des véhicules sanitaires sur le front. Du 15 au 23 mai 1917, Albert Moreau La Première Guerre mondiale a en fait interrompu le mouvement de fond d’augmentation du travail féminin. La mobilisation des femmes a été visible dans l’espace public. Mais elle a été suivie d’une rapide démobilisation accompagnée d’un retour au foyer souvent subi. Le décret du 6 août 1926 instaure le cadre des « infirmières civiles des hôpitaux militaires ». Leur recrutement s’effectue par concours parmi les titulaires des diplômes professionnels. Ainsi jusqu'au second conflit mondial, les femmes ne sont chargées que de tâches annexes (cantinières, ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 2
infirmières, etc.), servant en tant que personnel auxiliaire sans véritable statut militaire et ne sont donc pas considérées comme « membres à part entière » des forces armées. 2/ Référence : SPA 50 X 1875D Juliette Perdou, infirmière décorée de la Croix de guerre à Bergues (Nord), secteur de la 1re armée. L'état-major anglais prépare une offensive en Flandre (bataille de Passchendaele, 31 juillet au 6 novembre 1917). La 1re armée du général Anthoine et le 1er corps d'armée du général Lacapelle vont y participer en s'intercalant entre l'armée belge et la 5e armée du général britannique Gough. Du 12 au 15 juillet 1917, Jacques Agié. B / La Seconde Guerre mondiale et la période de la décolonisation Au début de la Seconde Guerre mondiale, les femmes sont admises dans les forces armées. La loi du 11 juillet 1938 dite Paul Boncour, portant sur l'organisation de la Nation en temps de guerre, permet le premier engagement féminin dans les armées, voire un recrutement. Les premières femmes servent dans l'armée sous statut civil. Après la défaite, ces formations de femmes sont dissoutes par les forces d’occupation. Leur contribution à la Résistance marque vraiment l’entrée des femmes dans les forces armées. Une unité de cent volontaires, composée de jeunes femmes ayant rejoint les forces françaises libres, est créée à Londres en 1940. Maryse Bastié et Maryse Hilsz ou encore Elisabeth Boselli ouvrent la voie des femmes dans la plus jeune des armées et font partie des premiers pilotes féminins à faire carrière militaire. Elles convoient des avions militaires vers les escadrilles du front. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 3
3/ Référence : TERRE 294-7013 Volontaires féminines de la France Libre, accueillies gare de Lyon à Paris, dans un bus de la CMP. Novembre à décembre 1944, Agence LAPI (Les actualités photographiques internationales). Arrivées en train à Paris, les Volontaires sont prises en charge par le centre d'accueil de Paris, marqué de l'insigne de la croix de Lorraine, qui leur offre un repas puis embarquent dans des autobus Renault TN6 de la CMP (Compagnie du chemin de fer métropolitain de Paris). Appartenant peut-être à la 9e DIC (Division d'infanterie coloniale), elles sont probablement venues pour participer à une cérémonie militaire nationale ou à une commémoration telle que le 11 novembre. 4/ Référence : TERRE 10261-L50 Geneviève Kanova du SCA photographie le général de Gaulle décorant des soldats de l'infanterie coloniale à Karlsruhe. Il s’est rendu en Allemagne début avril 1945 pour féliciter les troupes françaises qui viennent de franchir le Rhin et d'entrer dans le pays. 4 au 7 avril 1945, Ernest Staché. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 4
En mai 1941, le chef d’état-major de l’armée de l’Air crée un corps indépendant de volontaires féminines, baptisé les « Filles de l’air », pour occuper des fonctions de radios, interprètes, ambulancières ou infirmières. Des femmes tiennent des postes jusque-là réservés aux hommes et sont alors intégrées dans la hiérarchie militaire. Pour l’armée de l’Air, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, Charles Tillon, ministre de l’Air communiste, décide de créer un corps de pilotes militaires féminins. Son départ met un terme brutal à cette expérience : en juillet 1946, le recrutement de pilotes féminins dans l'armée de l'Air s’arrête pour ne reprendre qu'en 1982. Les Ipsa (Infirmières, pilotes, parachutistes et secouristes de l’Air), regroupant les anciennes infirmières de l’Air, deviennent en 1946 les Convoyeuses de l’Air au sein des FFA (Forces féminines de l’air). Le concours d’entrée des Ipsa est ouvert aux hommes en 1970. 5/ Référence : D222-46 Accompagnée d'autres aviatrices, Elisabeth Boselli en combinaison de vol ajuste son casque pour rejoindre son avion. Non daté (1911 à 1966), Don Petit et Fleurquin, Photographe inconnu. Elisabeth Boselli (1914 – 2005) est une pionnière de l'aviation. Ayant passé son brevet de pilote en 1938 puis brevetée pilote militaire en 1945, elle fut la première femme pilote de l'armée française. Ayant quitté l'armée de l'Air en 1946, elle bat les records d'altitude pour planeurs monoplaces en 1947 et pour avions légers en 1949. Brevetée pilote sur hydravion en 1951, elle fit un retour dans l'armée de l'Air en 1953. Après un nouveau record international de vitesse en 1955, elle a quitté l'armée de l'Air au début des années soixante-dix avec le grade de capitaine. Au cours de la Deuxième Guerre mondiale est créé un bataillon de conductrices ambulancières. Un décret du 11 janvier 1944, soit la même année que l’obtention du droit de vote pour les femmes, prévoit la formation d’auxiliaires féminins pour les forces terrestres, navales et aériennes. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 5
6/ Référence : TERRE 109-2176 Elèves de l'école des conductrices de Marengo (Algérie) près de leur voiture de liaison. Ces élèves du 27e escadron du Train se tiennent debout près de leur voiture, le véhicule au premier plan est une Renault Vivaquatre. Octobre 1943, Photographe inconnu. 7/ Référence : TERRE 10920-G3 Stand des Afat (auxiliaires féminins de l'armée de Terre), lors de l'exposition la France d'outre-mer dans la guerre au Grand Palais. Du 1er au 15 octobre 1945, Jean Leroy. En ce qui concerne l’armée de Terre, le premier sous-lieutenant féminin est promu dans l'armée française lors de la création des Afat (Auxiliaires féminines de l'armée de terre) en 1944 regroupant sous un statut provisoire l'ensemble des engagées féminines servant dans les armées françaises. Jusqu'en 1975, les femmes ne peuvent s'engager dans l'armée de Terre qu'au sein de ce ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 6
corps particulier des Afat, devenu en 1946 le service des femmes des forces armées comptant un effectif de quatre mille femmes. En 1973 il donne naissance au corps des Sofat (Sous-officiers féminins de l’armée de Terre). De 1944 à 1976, les officiers féminins de l'armée de Terre sont gérés dans le cadre d'un statut particulier. Leurs perspectives de carrière sont sensiblement inférieures à celles des hommes. Leur emploi est limité aux états-majors et aux services. Leur effectif n'excède pas deux cent pendant toute cette période, c'est-à-dire à peine 1% de l'effectif des officiers. L'École polytechnique ouvre ses portes aux femmes en 1970. Les SFF (Sections féminines de la flotte) constituent en 1944 le pendant des Afat pour la Marine. Le corps des personnels civils spécialistes du service de Santé des armées se constitue en 1943. Il réunit en un seul statut les volontaires liés aux armées pour la durée de la guerre, les infirmières de la Croix-Rouge d’Afrique du Nord et les infirmières civiles des hôpitaux militaires. En 1952 est créé le corps de santé militaire féminin doté en 1969 du statut de PMFSSA (Personnels militaires féminins du service de Santé des armées). Des élèves officiers féminins sont recrutés à l'École du service de santé militaire de Lyon de 1953 à 1956. Les officiers féminins sont intégrés dans le corps interarmées des médecins et pharmaciens des armées en 1968. A partir de 1951, le statut militaire permet aux femmes de s'enrôler en temps de paix avec l’institution, dans chaque armée, d'un corps de personnel féminin comportant un statut proche de celui des autres corps militaires, la gestion du corps et des carrières étant distincte de celle des hommes. Avec le statut interarmées des PCMF (Personnels des cadres militaires féminins), pour la première fois, l’état de militaire à caractère définitif est reconnu aux femmes. Mais le texte exclut toute assimilation de grade et ces femmes militaires ne servent que sous contrat. En effet, le décret du 15 octobre 1951 régit le statut des femmes officiers et sous-officiers en établissant une structure hiérarchique limitée. 8/ Référence : TONK 52-144 R5 Évacuation sanitaire d'un blessé en hélicoptère Hiller M360 par le pilote Valérie André au Tonkin en Indochine française. Capitaine féminin de l'armée de l'Air, Valérie André est docteur en médecine, chirurgien, parachutiste et pilote d'hélicoptère. Elle a effectué de 1949 à 1953 un nombre considérable de missions avec son hélicoptère Hiller M-360. Du 1er au 10 juillet 1952, Photographe inconnu. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 7
9/ Référence : HA 54-36 R24 À Hanoï en Indochine française, les Ipsa (infirmières, pilotes, parachutistes et secouristes de l'Air) sont venues nombreuses accueillir leur camarade Geneviève de Galard après sa libération. A sa descente d’avion, Margaret Higgins (à droite) voudrait l'interviewer. 24 mai 1954, René Adrian; Fernand Jentile. Geneviève de Galard, assurant l'évacuation des blessés en tant qu’Ipsa, s'est trouvée bloquée dans le camp retranché de Diên Biên Phu pendant deux mois jusqu'à sa chute. Elle y soigna inlassablement les blessés, dans des conditions très difficiles. Elle fut emmenée en captivité par les Viêt-Minhs. Enfin libérée, elle arriva le 24 mai à Luang Prabang et repartit le soir même pour rejoindre Hanoï où l'attendaient le général Cogny, général de division commandant les FTNV (Forces Terrestres du Nord Viêt-Nam) et le général Dechaux, commandant du Gatac Nord (Groupement aérien tactique, basé à Hanoi). 10/ Référence : ALG 56-147 R7 Des personnels féminins à leur poste au centre de transmissions d'Alger, qui représente un important réseau de communication et de transmissions des informations au coeur de l'Algérie. 4 juillet 1956, Photographe inconnu. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 8
La France adhère à cette époque à un certain nombre de conventions internationales, telles que la convention sur les droits politiques de la femme du 31 mars 1953, interdisant toute forme de discriminations à l’égard des femmes, notamment en matière d’accès aux emplois publics. En 1971, le SNV (Service national volontaire) est ouvert aux jeunes filles conformément à la loi du 9 juin 1970. Cette forme de service est définitivement institutionnalisée en 1983. En 1975 c’est le service national volontaire féminin qui est institué, offrant aux femmes une évolution dans les spécialités parallèle à celle des hommes officiers, sous-officiers et engagés. L'accès au VSL (Volontariat service long) est aussi autorisé aux femmes. Les jeunes filles volontaires sont recrutées avec les mêmes possibilités d'emploi, de formation et d'avancement que leurs camarades masculins, même si elles sont orientées prioritairement vers des emplois administratifs, médicaux ou techniques (550 VMF ou Volontaires militaires féminines sont recrutées en moyenne par an dans l'armée de Terre, 430 dans l'armée de l’Air et 25 dans la Gendarmerie). 11/ Référence : MO 56-137A R33 Assistante sociale de la Force A (Forces terrestres françaises engagées) distribuant des pommes de terre à la population civile de Port- Saïd et de Port-Fouad, avant le départ d’Égypte de l'armée française, au terme de l'expédition de Suez. La foule se presse ainsi devant un immeuble à l'intérieur duquel s'effectue la distribution des vivres (plusieurs tonnes de pain, farine et pommes de terre), en présence de parachutistes. 19 décembre 1956, Pierre Ferrari. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 9
II / Une féminisation très progressive de la sphère militaire A / Les bases juridiques de la féminisation Le cadre juridique général applicable à l'accès des femmes à la fonction militaire prend sa source dans le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel se réfère la Constitution du 4 octobre 1958. Il dispose que : « La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme ». La loi 72-662 du 13 juillet 1972 supprime toute discrimination statutaire entre les hommes et les femmes s'engageant dans les armées (les corps des armes demeurent fermés). Par ce statut militaire, les femmes militaires obéissent aux mêmes règles que leurs homologues masculins. Elles ont les mêmes droits et les mêmes devoirs. 12/ Référence : F 82-471 L533 Auxiliaire médicale du 11e DIPF (Détachement d'intervention parachutiste féminin), appartenant à la FMSB (Force multinationale de sécurité à Beyrouth), discutant avec des femmes palestiniennes du camp de réfugiés de Sabra, après les massacres de réfugiés palestiniens dans les camps de Sabra et Chatila le 17 septembre. Du 22 septembre au 6 octobre 1982, François-Xavier Roch Par décret d’application du 23 mars 1973 les femmes ont possibilité d’accès à tous les grades jusqu'au premier grade d’officier général. La loi mentionne une formation de base dispensée dans une école de sous-officiers et la possibilité d’obtenir le statut de militaire de carrière dans les mêmes conditions que les hommes. Tout en ne faisant aucune distinction entre les hommes et les femmes, les statuts particuliers des différents corps réglementent leur accès soit en instaurant des pourcentages maximum soit en répartissant dans les arrêtés annuels de recrutement la proportion d’hommes et de femmes à admettre. C’est le système des quotas. Des arrêtés règlent aussi des questions ponctuelles et techniques liées aux conditions d’emploi du personnel et de certains matériels. Cependant en 1976, le statut particulier des officiers féminins est mis en extinction. Les officiers féminins sont intégrés dans des corps mixtes avec un statut et des perspectives de carrière identiques à leurs homologues masculins. La mixité dans les écoles de formation des sous-officiers devient un fait en 1983 à la suite de la fermeture de l’École interarmées du personnel militaire féminin. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 10
13/ Référence : 07 93 147 02 Un sergent (spécialité équipement de bord), mécanicien de l'armée de l'Air au Germas (groupe d'entretien et de réparation des matériels spécialisés) dans le poste de pilotage d’un avion Transall C-160 en visite périodique sous hangar de la BA 123(base aérienne) d'Orléans. 16 juin 1993, Yann Le Jamtel. La directive communautaire de 1976 relative à la mise en œuvre du principe d’égalité de traitement entre hommes et femmes évoquant les activités professionnelles pour lesquelles, « en raison de leur nature ou des conditions d’exercice, le sexe constitue une condition déterminante » est modifiée en 2002 et autorise donc « les États membres à prévoir qu’une différence de traitement fondée par une caractéristique liée au sexe ne constitue pas une discrimination lorsque, en raison de la nature des activités professionnelles particulières concernées ou du cadre dans lequel elles se déroulent, une telle caractéristique constitue une exigence professionnelle véritable et déterminante pour autant que l’objectif soit légitime et que l’exigence soit proportionnée ». B / L’occupation des nouveaux espaces ouverts aux femmes De 1972 à 1987, le nombre de militaires féminins passe de moins de dix mille à dix-huit mille. Le statut issu de la loi 75-1000 du 30 octobre 1975 autorise l'accès des femmes aux emplois de sous- officiers des Armes dans l'armée de Terre. On trouve pour la première fois des femmes pilotes d’hélicoptères dans l’Alat (Aviation légère de l’armée de Terre) en 1982, deux femmes admises au concours d’entrée à l'Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr en 1983, et en 1988 une femme nommée général. Dans l’armée de Terre, le nombre de places maximum proposé aux femmes est fixé tous les ans par un arrêté ministériel sur une base de 5% environ par concours. Le corps des officiers des Armes n’est ouvert aux officiers féminins qu'en 1984. Une large palette d’emplois est ouverte aux femmes en soutien, logistique, commandement et renseignement. La part restante concerne les métiers de combat dans l’Infanterie, les blindés, le Génie et l’Artillerie sol-sol qui impliquent un risque de « combat direct et prolongé avec des forces hostiles ». ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 11
14/ Référence : 1 990 192 15 29 Un enseigne de vaisseau pilote d’hélicoptère Dauphin, embarqué sur le porte-avions Clemenceau dans le Golfe arabo-persique, lors de l’opération Salamandre déclenchée après l'invasion du Koweït par les troupes irakiennes. Du 3 au 22 septembre 1990, Michel Riehl. Jusqu’en 1975, les officiers féminins de l’armée de l’Air étaient surtout employés comme rédacteurs, tandis que les femmes sous-officiers et engagées étaient limitées aux spécialités de secrétariat, comptabilité, mécanographe et transmissions. Les concours de l'École de l’Air et de l'École militaire de l’Air sont ouverts aux femmes à partir de1976 pour les deux corps d’officiers des armes non navigant (mécaniciens et bases de l’Air) sauf la spécialité de fusilier commando de l’Air. Les femmes peuvent faire carrière comme pilotes d'avions de transport ou d'hélicoptères avec un statut d'Orsa (Officiers de réserve en situation d’activité). Les travaux de la commission d’étude prospective de la femme militaire constituée en 1982 permettent l’ouverture aux femmes de l’accès aux emplois de pilotes de l’armée de l’Air, sauf la spécialité de pilote de chasse. A partir de 1984 les femmes peuvent se qualifier au pilotage d’autres types d’appareils que les unités de liaison, tels que les appareils de transport logistique et tactique ou les hélicoptères légers. En 1993 quatre candidates sont recrutées comme ÉOPN (Élèves officiers du personnel navigant), spécialité pilote de transport. En 1994 la première femme devient chef de corps dans l'armée de l’Air. Le 23 août 1995, le chef d’état-major de l’armée de l’Air annonce la levée de toute restriction concernant l’emploi des femmes parmi le personnel navigant et notamment dans la spécialité de pilote de chasse. Le corps des officiers de l’Air à l’École de l’Air est ouvert aux femmes en 1996, en conséquence de l'arrêt Martel. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 12
15/ Référence : 01 95 190 20 08 Dans la banlieue de Mostar (Bosnie-Herzégovine), deux brigadiers-chefs, équipés de leurs gilets pare-balles, sont en séance d’instruction sur le fonctionnement de la mitrailleuse sur le toit d’un VBL (véhicule blindé léger). L’opération Hermine en ex- Yougoslavie est menée par la brigade multinationale ou brigade Aquila, composante de la FRR (force de réaction rapide). Du 1er septembre au 31 octobre 1995, Janick Marcès. 16/ Référence : 01 94 196 152 32 Enquête sanitaire nutritionnelle de la Bioforce sous la protection de la 13e DBLE (demi- brigade de Légion Etrangère) à Nyamasheke (opération Turquoise au Rwanda). Du 8 au 9 août 1994, Xavier Pellizzari, Claude Savriacouty. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 13
La Marine, arme de fortes traditions, connaît de longue date une présence féminine, servant à terre dans son administration, dans les transmissions ou dans la maintenance des avions. En 1986, une première femme est pilote d’hélicoptère. L’École mixte de Maistrance est créée en 1988. Le groupe de travail de 1992 sur la féminisation de la Marine ouvre la presque totalité des spécialités d'équipage aux femmes ainsi que tous ses concours de recrutement d'officiers. Seules trois spécialités restent exclusivement masculines : sous-marins, fusiliers commandos et équipages d'avions embarqués. L’ouverture progressive des postes dans les unités embarquées est régie selon trois règles : le taux de féminisation sur un bâtiment est fixé à 15 %, les femmes sont réparties dans toute la hiérarchie de l’équipage et les lieux de vie doivent être totalement distincts. En 1993, un premier bâtiment de surface est commandé par une femme. L’embarquement sur la base du volontariat pour les seules mères de famille devient une règle d’exception. La reprise du recrutement d'élèves officiers féminins dans les deux écoles de formation du service de Santé s’effectue en 1973. En 1976, le médecin-chef Valérie André est la première femme nommée médecin général, après avoir accompli une brillante carrière opérationnelle (évacuation des blessés avec un hélicoptère piloté par elle-même en Indochine). Elle sera promue médecin général inspecteur ayant rang de général de division en 1981. Le statut de Mitha (Militaire infirmier et technicien des hôpitaux des armées) date de 1980. Si en 1999, plus de 80 % des Mitha sont des femmes, ce statut est aussi conçu pour accueillir des hommes. 17/ Référence : 01 98 102 11 34 Opération Malachite au Congo-Brazzaville : entraînement des militaires français et évacuation des ressortissants français. Du 16 août au 20 septembre 1998, Janick Marcès. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 14
18/ Référence : 01 99 087 01 32 Sergent-chef en communication talkie- walkie pendant sa vigie dans la tour de contrôle mobile de l'aéroport de Sarajevo, tenu par les militaires français dans la cadre de leur mandat de la SFOR (force de stabilisation), lors de l’escale de deux avions chasseurs Eagle F15 de l'US Air Force. Du 25 au 28 mars 1999, Pierre Laurens. En 1972, pour entrer dans la Gendarmerie dans des emplois administratifs, les femmes utilisent la voie du détachement du corps des EAÉM (Emplois administratifs et d’état-major) de l'armée de Terre ou à partir de 1977, l’engagement comme militaire féminin du rang (150 femmes en 1979). En effet, la loi de 1975 relative aux statuts particuliers des corps des officiers et des sous- officiers de Gendarmerie précisait « qu'en raison des conditions de mise en œuvre et d'intervention des formations de gendarmerie et des sujétions du service, les emplois des sous-officiers et des officiers de l'arme de la Gendarmerie ne sont ouverts qu'aux hommes ». L'accès des femmes au corps des officiers et des sous-officiers de Gendarmerie est autorisé en 1983 avec un quota de 5%. Leur emploi est limité aux grandes unités territoriales de la gendarmerie départementale. L’emploi des gendarmes auxiliaires féminins reste administratif. En 1988, le recrutement des personnels féminins de Gendarmerie atteint 7,5 % du volume total. Le retard se résorbera à partir de 1998 avec la suppression des quotas de recrutement. La part des femmes progresse dans les effectifs de Gendarmerie jusqu’à 5 % en 1999. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 15
III / Une politique affirmée pour l’accélération de la féminisation A / La professionnalisation des armées et la suppression des quotas Dans les années quatre-vingt dix, la féminisation est favorisée par la progression du travail féminin, par un nouveau type de conflits où il s'agit souvent autant de prévenir la guerre que de combattre et par la perspective démographique du « papy boom » qui plaide pour élargir le vivier de recrutement. La loi du 28 octobre 1997 portant réforme du service national engage la professionnalisation totale des armées et accélère le processus de féminisation des effectifs. La loi de programmation militaire pour 1997-2002 provoque donc un « appel d'air », les armées recrutant pour pallier la disparition progressive des conscrits. A compter de juin 1997, concernant l'armée de Terre, le recrutement des militaires du rang sous contrat est ouvert aux jeunes filles directement à partir du civil. Ne pas écarter la moitié de la jeunesse française représente un enjeu essentiel de la professionnalisation de la Défense. Alors que la féminisation restait à 7 % entre 1992 et 1998, elle s'accélère à partir de 1999 jusqu’à 12,7 % fin 2003 : sur 350 000 militaires de carrière, sous contrat et volontaires, plus de 44 000 sont des femmes. Le ministre de la Défense en juillet 1998 enjoignait aux jeunes officiers de Coëtquidan de « permettre, par leur manière d’agir dans leur service que la mixité ne reste pas un principe décoratif mais soit une réalité offrant un surcroît de talents à la communauté militaire ». La part des femmes dans les recrutements directs est encore supérieure, atteignant 24 % en 2002 (26 % pour les officiers et sous-officiers, 16,6 % pour les militaires du rang, et 31,4 % des volontaires), conformément à l’estimation du ministère de la Défense dans sa contribution à la Charte de l'égalité entre hommes et femmes : « la place des femmes dans les armées ne cessera de progresser dans les prochaines années pour atteindre un taux de féminisation a priori proche de 20 %, voire supérieur... ». 19/ Référence : N1999-070J31-0012 Un lieutenant réconforte une jeune femme qu’elle visite dans sa tente au camp de réfugiés de Stenkovac en Erym (ex-république yougoslave de Macédoine). 8 avril 1999, Vincent Begon. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 16
20/ Référence : 01 2001 233 26 27 Affiche publicitaire militaire sur les Champs-Elysées, lors de la cérémonie militaire du 14 juillet 2001 dont la garde royale espagnole est invitée d'honneur, devant le public venu assister au défilé. 14 juillet 2001, Jean-Luc Brunet. Les limitations quantitatives représentaient le dernier obstacle juridique pour l’accès des femmes aux carrières militaires. Le Conseil d’État a rappelé en plusieurs occasions le principe d’égalité d’accès aux emplois publics. Le décret 75-1208 du 22 décembre 1975 est modifié afin que dans la fonction publique, il n’existe plus aucune distinction liée au sexe au niveau du recrutement. Jusqu'en 1998, les décrets portant statuts particuliers des différents corps d'officiers, de sous-officiers et d'officiers mariniers réglementaient l'accès à ces corps, soit par des mentions de pourcentage dans les recrutements annuels soit par la référence à un arrêté ministériel annuel de recrutement fixant un nombre de places offertes aux unes et aux autres. Le décret 98-86 du 16 février 1998 modifiant seize décrets portant statuts particuliers de certains corps d'officiers et de sous-officiers a supprimé tous les quotas ou dispositifs restreignant l'accès des femmes aux carrières militaires. Désormais, le principe retenu au sein du ministère de la Défense est celui de l'égalité entre hommes et femmes pour l'accès aux différents corps militaires. Ce n'est « qu'à titre d'exception que la nature des emplois ou leurs conditions d'exercice peuvent justifier d'en exclure l'affectation de militaires féminins ». Dans les arrêtés ministériels fixant les emplois dont l’accès est interdit aux femmes, deux groupes se distinguent : 1. les emplois impliquant la possibilité d'un contact direct et prolongé avec des forces hostiles ; 2. les emplois s'exerçant dans des conditions particulières, notamment de promiscuité. L'arrêté du 29 avril 1998 fixe les emplois qui, dans les armées et la gendarmerie, ne peuvent être tenus que par des militaires masculins. La liste des restrictions d'emploi faites aux femmes militaires fait l'objet d'un réexamen périodique afin d'apprécier s'il est justifié de maintenir les restrictions en cause et connaît un allégement progressif. La situation a depuis évolué vers une ouverture totale. Après la suppression des quotas les derniers obstacles résident dans les mentalités et sont liés à une méconnaissance des métiers et à des préférences pour des spécialités classiquement féminisées de la part des jeunes filles. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 17
21/ Référence : N2007-196R01-0107 Élève-officier féminin de la gendarmerie nationale participant au défilé militaire du 14 juillet à Paris. 14 juillet 2007, Vincent Larue. En 1998, pour la première fois, une femme atteint le grade de général dans l'armée de l’Air, une autre reçoit son brevet de pilote de chasse et enfin neuf femmes deviennent commandos de l’Air. Cette même année, le recrutement d'engagés volontaires féminins s'élève à six cent postes. La seule restriction d’accès est de remplir les conditions particulières d’aptitude physique et de projetabilité inhérentes à l'emploi. La suppression des quotas concerne aussi les concours d’admission aux Écoles du service de Santé des armées. Le service le plus féminisé des armées réalise la parité, à l’image de la situation en milieu médical civil : plus de la moitié des candidats en médecine et pharmacie sont des femmes. En 1999, un arrêté lève la restriction d'emploi des femmes dans les équipages d'avions embarqués, dans l'ensemble de la Garde républicaine et dans le GSIGN (Groupement de sécurité et d'intervention de la Gendarmerie nationale). Dans la Marine nationale, les mères de famille deviennent susceptibles d'embarquer même si elles ne sont pas volontaires. En 2000 le porte-avions Charles De Gaulle se féminise. En 2001, la filière fusilier-commando s’ouvre aux femmes - malgré les difficultés des conditions d’emploi et du niveau d’aptitude physique requis. En 2005 le premier major féminin dans la Gendarmerie est aussi le premier commandant féminin d’une communauté de brigade. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 18
22/ Référence : N2005-279E22-0004 Opération Pamir en Afghanistan - À Kaboul, un militaire français du Cato Pax (Combined air terminal operations) note sur un tableau les départs. 31 août 2005, Alban Battestini. Au final, l’arrêté du 12 décembre 2002, modifiant l'arrêté du 29 avril 1998, limite les restrictions d’emploi des femmes militaires : 1. pour la Marine : aux emplois à bord des sous-marins (pour exiguïté des locaux et impossibilité d’aménagement) ; 2. pour la Gendarmerie : aux emplois de sous-officiers relevant des branches et des unités de la subdivision d'arme de la gendarmerie mobile à l'exception de la Garde républicaine, du GSIGN (Groupement de sécurité et d'intervention de la Gendarmerie nationale) et de la Musique de la Gendarmerie mobile ; 3. pour le service de Santé des armées : les restrictions énumérées précédemment s'appliquent au personnel affecté dans la Marine et dans la Gendarmerie. On trouve aussi une exception pour les emplois opérationnels de la Légion étrangère. Michèle Alliot-Marie, ministre de la Défense, déclarait en 2004 devant le Conseil économique et social, que « l’intégration des femmes dans les armées passe ainsi non par des mesures de discrimination positive, mais par une politique de stricte égalité visant à atténuer les effets des sujétions inhérentes à l’état de militaire ». Les deux grandes orientations retenues depuis la professionnalisation des armées consistent premièrement à atteindre les objectifs de recrutement, notamment pour l'armée de Terre, en ouvrant le plus largement les emplois des armées aux femmes. En second lieu, il s’agit de poursuivre la féminisation du recrutement d’officiers sur concours externes, pour lesquels les femmes représentent un tiers des admissions. Ainsi, la représentation des femmes aux postes à responsabilité et aux emplois supérieurs est-elle appelée à progresser dans les années à venir, confortée par leur niveau moyen d'études supérieur à celui des hommes dans les catégories militaires du rang et volontaires. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 19
23/ Référence : N2005-209V04-0038 Personnel de l'armée de l'Air et du RTP (régiment du train parachutiste) consultant les formulaires de vol à Abidjan (Côte d'Ivoire) pour la rotation ATT (avion tactique de type Transall) lors de la relève des personnels. 16 juin 2005, Ludovic Fronteau. 24/ Référence : N2005-209V04-0010 Mécanicien de l'armée de l'Air mettant de l'huile dans le moteur d'un Transall C-160 en réparation dans le hangar à l'aéroport de Lomé (Togo) pour la rotation ATT (avion tactique de transport). 16 juin 2005, Ludovic Fronteau. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 20
B / Le nouveau visage des armées Le taux global de féminisation est en hausse constante depuis 1995. En 2008, quinze militaires sur cent sont des femmes, soit deux fois plus qu'il y a dix ans (10 % en 2000). La féminisation de l'ensemble des fonctions et des niveaux de responsabilités des armées représente l'une des réussites de la professionnalisation, mais elle varie selon les armées. Pour son taux de féminisation, le service de Santé des armées est en tête car les femmes y occupent la moitié des effectifs (pour deux tiers d'entre elles en tant que Mitha). Dans l'armée de Terre dont le taux global dépasse les 10 %, la spécialité comportant le plus de femmes est la gestion des ressources humaines avec plus d’un tiers de personnel féminin. Dans l'armée de l'Air, traditionnellement favorable à la féminisation et qui compte plus de 20 % de femmes dans ses effectifs, il s'agit de la spécialité gestion et administration. La Marine suit aussi cette tendance avec un taux de féminisation de près de 13 %, surtout dans la spécialité du secrétariat. La Gendarmerie dispose de personnels féminins à hauteur de 14 % de ses effectifs où ils constituent un atout pour certaines missions de filatures ou de protection juvénile et ont contribué à moderniser son image. Le taux de féminisation pour les OPEX (Opérations extérieures) ou dans les unités embarquées ne connait pas d'évolution majeure avec un taux de 5,4 % fin 2008. Un nombre restreint d'activités (administration, gestion des ressources humaines, santé, électronique, informatique et des télécommunications) accueille donc encore la majorité des militaires féminins car ces emplois sont perçus comme mieux adaptés à leurs aspirations et leur permettant de préserver un équilibre entre leur vie familiale et leur vie professionnelle. Mais aujourd’hui, les femmes sont de plus en plus nombreuses à tenir des fonctions opérationnelles et combattantes qui leur ont été ouvertes récemment, de jeunes femmes servant en unité d'infanterie, dans les chars ou comme pilotes. Ainsi, le service de Santé et l’armée de l’Air ont un taux de féminisation supérieur à celui des autres armées, les femmes y ayant été recrutées plus tôt et en plus grand nombre. Leurs spécificités (santé, technologie) ont permis et permettent encore d’attirer et d’intégrer proportionnellement plus de femmes que dans les armées traditionnellement plus combattantes. La participation aux opérations extérieures y constitue même une motivation à l’engagement. 25/ Référence : N2006-226E22-0008 Élèves du 13e bataillon de chasseurs alpins défilant le 14 juillet à Paris. 14 juillet 2006, Alban Battestini. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 21
26/ Référence : N2006-349A08-0044 À Khirbat-Silim, un caporal féminin est intégrée à une équipe de déminage du 13e RG (régiment de Génie) au sein de la Finul 2 (force intérimaire des Nations unies au Liban) Du 14 novembre au 12 décembre 2006, Antoine Deluc. La féminisation est d'autant plus faible que le niveau hiérarchique s'élève, avec une part très faible de femmes généraux et officiers supérieurs. Fin 2008, elles représentent environ 14 % des militaires du rang et des sous-officiers, mais seulement 10 % de l’ensemble des officiers et 5 % seulement des officiers supérieurs. Si les quotas ont été supprimés, l’accès aux emplois de responsabilités de haut niveau reste limité pour des raisons quantitatives et de déroulement des carrières. En effet la progression dans la carrière respecte largement le principe d’ancienneté. En raison du caractère récent de l'augmentation de la féminisation, les femmes n’ont pas encore eu le temps de gravir en nombre significatif tous les échelons de la hiérarchie militaire et l’on compte peu de femmes parmi les anciens élèves des grandes écoles militaires. La suppression récente des limites quantitatives se révèle cependant déjà prometteuse pour le recrutement d’officiers féminins par la voie de ces grandes écoles. D’autre part, l’exclusion des postes de combat engendre l’exclusion des promotions de haut rang dans un système qui valorise plus les performances de combat que les rôles de soutien logistique. Et pour accéder aux responsabilités supérieures, les militaires doivent non seulement franchir les différents échelons subalternes, mais aussi détenir des brevets de l’enseignement militaire supérieur. Or, peu de femmes à ce jour sont brevetées ou même diplômées. Une théorie féministe insiste sur l'existence d'un plafond de verre qui empêche la plupart des femmes d’accéder à des promotions au-delà de certains rangs. Par ailleurs, les femmes ont tendance à quitter l’institution plus tôt que les hommes et ce en cours de carrière. Les femmes sont surreprésentées dans les emplois les moins stables : une part importante des officiers féminins est recrutée sous contrat et les femmes représentent le tiers des volontaires (engagées sur des contrats d'un an, renouvelables quatre fois), ce qui contribue à rajeunir la pyramide des grades et à créer un renouvellement plus rapide de la population féminine. Les femmes sont également plus jeunes. Près de 80 % d’entre elles ont moins de 35 ans contre 60 % des hommes. Les femmes n’ont donc pas encore atteint en nombre les catégories hiérarchiques les plus élevées au sein desquelles se trouvent les militaires les plus âgés. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 22
27/ Référence : N2007-041M01-0035 Michèle Alliot-Marie, ministre de la Défense, rencontre les élèves d’une classe du lycée militaire préparatoire d'Autun. 16 février 2007, Roland Pellegrino. 28/ Référence : N2007-141X19-0001 À Kaboul (Afghanistan), un pilote de Caracal se dirige vers son appareil. Depuis décembre 2006, un détachement de quarante-cinq militaires, servant deux EC 725 Caracal (hélicoptère pour unités spéciales), est en alerte permanente, déployé au sein des forces françaises participant à la Fias (force internationale d'assistance à la sécurité). 6 juillet 2007, Evrard Taquet. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 23
29/ Référence : N2008-111N03-0019 À Chennai (Inde), un maître du BPC Mistral (bâtiment de projection et de commandement) et le riceman s'entretiennent avec le fournisseur concernant la mise en palette du riz dans le cadre de l’opération Orcaella (nom d’un dauphin de l’Irrawaddy) d’aide humanitaire en Birmanie. 13 mai 2008, Richard Nicolas-Nelson. 30/ Référence : N2008-111N07-0041 Opération Orcaella - Un marin attache un filet contenant des sacs de gamelles au crochet de la grue du BPC Mistral. Le chargement du frêt dans les hangars du Mistral a lieu de jour comme de nuit, afin de minimiser la présence du BPC au port de Chennai (Inde). 14 mai 2008, Richard Nicolas-Nelson ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 24
Conclusion La politique de stricte égalité entre hommes et femmes menée par le ministère de la Défense et l’évolution rapide de la féminisation depuis la professionnalisation de 1997 n’empêchent pas les femmes de d’occuper une position particulière. La prise en compte des paramètres historiques, sociologiques et démographiques évoqués permet de mieux comprendre leurs spécificités au sein de l’institution militaire. Obligées de s’adapter ou de faire des concessions, elles intègrent la culture militaire davantage qu'elles ne parviennent à apporter une nouvelle culture aux armées (malgré certaines évolutions comme les congés de paternité). La féminisation des armées s’effectue souvent sous pression extérieure, par une volonté politique, l’opinion publique ou le déficit du recrutement engendré par la professionnalisation, davantage qu'à l'issue d'une réelle volonté interne à l'institution. L’intégration des femmes peut se concevoir non comme une féminisation de l’armée mais plutôt comme une diversification et une apparition de nouveaux rôles dans un contexte militaire en mutation. La conciliation des sphères privée et professionnelle semble plus délicate pour les femmes dans la durée, avec des difficultés pour faire garder leurs enfants ou une interruption de carrière, principalement pour assurer l'éducation des enfants ou suivre un conjoint muté. Si certaines caractéristiques féminines comme la maternité sont encore vécues comme des perturbations, la féminisation des armées pourrait impulser une modernisation et permettre une diversification des statuts et des régimes de carrière, sous réserve de la mise en œuvre de dispositions permettant d'améliorer la concordance entre vie professionnelle et vie privée. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 25
Sources - Dossier « Les femmes au ministère de la défense », in Armées d’aujourd’hui, n° 240, mai 1999. - Michèle Monrique, « Place des femmes dans la professionnalisation des armées », Notes d’Iéna, Informations du Conseil économique et social, n° 184, 05/07/2004. - Fanny Gazagne, « La féminisation des armées », Les fiches du CSSD, Centre d’études en sciences sociales de la Défense, n° 2004-02. - « Femmes militaires, données de synthèse », Observatoire social de la Défense, Observatoire de la féminisation, SGA / DFMPC, octobre 2006. Références des films dont sont extraites les différentes séquences du montage vidéo : 14.18 A 975 - La femme française pendant la guerre, Alexandre Devarennes, 1918. 14.18 A 11.59 - Réparation de camions par des femmes, réalisateur inconnu, 1918. 14.18 B 731 - Ambulancières, réalisateur inconnu, 1918. FT 7 OFIC - Filles de France, OFIC, 1944. MAG 204 SCA - Nouveau magazine du SCA n° 4, 1944. FT 36 SCA - A l’assaut de la ligne Gustav, 1944. SCA 305 - Magazine du SCA n° 5, Jean Goreaud, 1947. ACT 2617 SCA - Retour des blessés de Dien Bien Phu, Lucien Millet, 1953. SCA 68 - Regard sur l’Indochine, René Rouy, 1953. SCA 129 - Reviens vite Toubiba, SCA Algérie, 1957. 80.2.08 - L’armée des hommes et des femmes, Daniel Verdier, 1980. 93.7.042 - Etre femme et militaire, magazine Top Défense n° 36, 1993. 92.7.001 - Les femmes dans les armées, magazine Top Défense n °18, 1992. 05.7.008 - De Korhogo à Paris, les pistes de l’urgence, David Bonnefoy, 2005. V 2063083 V-4 - Journal de la Défense n° 4, ECPAD, janvier 2007. V 2064497 V-8 - Journal de la Défense n° 8, ECPAD, mai 2007. Chantal ALEXIS et ADC Daniel DUBOIS, documentalistes, fonds contemporain et fonds Actualités. ECPAD – Pôle des Archives – mars 2010 26
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