La fiction pour interroger le réel - THÈME 3 - Magnard
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THÈME 3 La fiction pour interroger le réel Que ce soit au cycle 3 ou en 5e, la fiction est avant tout considérée sous l’angle de l’imaginaire, on pourrait presque dire de l’évasion du réel. Qu’il s’agisse des récits mythologiques, fondateurs, merveilleux, créateurs d’utopies, la littérature révèle aux jeunes lecteurs des mondes inconnus, insoupçonnés dans la réalité habituelle ; elle assure sa fonction principale pour donner le goût de lire : permettre l’évasion du réel. Pourtant, étroits sont les liens entre la réalité qui constitue le tissu du quotidien et la création d’un univers littéraire. Nous avons voulu montrer, dans la manière d’aborder ce thème, que la dichotomie souvent opérée entre réalisme et fantastique donnait aux élèves l’impression que le réalisme s’attachait à reproduire la réalité, et que le fantastique plongeait dans un univers étrange éloigné du quotidien. D’une part, ces deux interprétations sont inexactes, d’autre part, elles ne permettent pas de comprendre que ces deux directions littéraires, si elles semblent diamétralement opposées, partent en fait toutes deux du réel mais en le traitant différemment. ▶▶ Le réalisme se veut un miroir de la réalité, mais c’est en donnant l’impression du vrai, non en le reproduisant comme une copie qu’il y parvient. Tout récit réaliste s’ancre dans une histoire, nous fait partager le destin des personnages qui, quelles que soient les sources puisées dans la réalité, doivent exister de leur vie propre au cœur de la fiction. Si la nouvelle « Deux amis » de Maupassant nous touche autant, c’est que les deux compagnons de pêche existent devant nous, ont une histoire que l’auteur leur a donnée, et qui les font échapper au seul témoignage d’un écrivain sur la barbarie de la guerre. Lorsque Flaubert dresse le portrait de Félicité dans « Un cœur simple », il décrit sans doute le sort de milliers de servantes anonymes mais son personnage acquiert une dimension unique qui la transfigure à la fin. ▶▶ Dans sa fresque des Rougon-Macquart, Zola ne cherche pas seulement à faire exister une famille, il construit une réalité qui va au-delà de ce qui est visible dans la société. Il cherche à puiser dans les racines de l’être pour comprendre les mécanismes de la nature humaine. D’une observation acharnée du réel – comme en témoignent ses carnets – Zola arrive à une œuvre romanesque où certaines scènes marquantes, au lyrisme parfois tragique, dépassent largement le simple constat. Le réalisme ou le naturalisme en littérature sont avant tout une re-construction du réel, dans laquelle prennent vie des personnages faits de multiples éléments de la vie réelle, mais qui gagnent leur autonomie par le pouvoir de l’écriture. Les descriptions d’empoisonnement consignées dans les archives médicales ne suffisent pas à faire exister Emma Bovary. C’est encore le pouvoir visionnaire de l’auteur qui donne à son œuvre le souffle suffisant pour que le cinéma s’en empare. La Bête humaine est avant tout une immense métaphore, aussi puissante que la machine qu’elle décrit. ▶▶ Or, si même un regard « réaliste » ne reproduit pas le réel mais l’adapte, le recrée pour en donner une construction fictive vraisemblable, encore plus révélatrice que si elle cherchait à être une pâle copie, le fantastique, lui, procède différemment tout en partant aussi du réel. Il le prend au départ dans sa banalité rassurante et, peu à peu, opère des glissements vers des perceptions inquiétantes, semant le doute chez le lecteur, effaçant les repères qui pourraient le raccrocher à ce qu’il connait. Autant le réalisme prend de la distance pour mieux faire voir le réel, autant le fantastique s’éloigne subrepticement pour emmener dans un univers qui brouille les pistes et fait perdre tout repère. Et c’est bien cet effacement des lignes entre raison et folie, entre familier et étrange, qui donne prise au fantastique et fait frissonner le lecteur. À cet égard, il importe de dire que tout univers qui, d’emblée, plonge, tel un film d’horreur, dans un univers effrayant peuplé de créatures horribles, ne relève pas du fantastique mais plus du roman noir. C’est l’incertitude, le doute, l’impossibilité de trancher qui donnent au fantastique sa saveur. Entre une fiction qui « fait comme si c’était vrai » et qui donne l’impression d’être encore plus vraie que la vie réelle, et une autre qui fait s’éloigner la réalité aux confins de l’irrationnel, le réel ne cesse d’être mis en question, afin, sans doute, de mieux livrer une part de sa vérité. © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 4e – Livre Ressources 71
Le récit réaliste, PARCOURS UN GENRE miroir de la réalité p. 118 à 139 Objectifs et démarches du parcours Problématique : Comment le récit réaliste, en posant un regard neuf sur la société et les individus de son temps, atteint-il une forme de poésie ? ▶▶ Ce parcours propose un aperçu des principales intentions réalistes : démythifier des topoï romantiques, retranscrire la violence et l’injustice d’une société contemporaine de l’écriture, évoquer la vie des plus humbles. C’est que le récit réaliste se veut « miroir de la réalité » en proposant un regard sans concession sur son temps. Or – et c’est l’objet de la préface de Pierre et Jean en 1887 –, écrire la réalité, c’est faire des choix d’écriture relevant d’une vision personnelle : plus qu’un miroir, le récit réaliste serait donc avant tout un prisme. Ce parcours a ainsi pour objectif de sensibiliser les élèves aux dimensions sociale, mais aussi poétique, d’un mouvement dont on ne peut comprendre les subtilités que si on le relie au contexte historique et économique de la seconde moitié du xixe siècle. ▶▶ En ce sens, il nous a semblé important de donner à lire un corpus varié. À travers la double page d’accueil ayant pour thème l’enfance, les élèves pourront se familiariser avec la dimension à la fois humaine et sociale du mouvement. Dire la réalité nue pour en espérer le changement est, en effet, au cœur des quatre nouvelles de Guy de Maupassant proposées à la lecture. Enfin, des extraits de Madame Bovary ou encore d’« Un cœur simple » choisis, aussi bien pour leur accessibilité que pour leur représentativité, permettront à la classe de ressentir, puis d’étudier, la beauté de cette écriture réaliste, jugée parfois, à tort, trop sèche. ▶▶ Ce parcours, adapté à des élèves de 4e, vise à permettre de : – comprendre les origines littéraires et sociales du mouvement réaliste ; – cerner les principales caractéristiques des récits qui lui sont associés ; – donner à lire, mais aussi à voir et entendre, par une iconographie riche et des lectures audio nombreuses, quelques aspects de la société française du xixe siècle ; – étudier, à partir des questionnaires proposés, comment l’écriture réaliste diffracte à la fois fidèlement et poétiquement la réalité. Organisation du parcours et choix des axes de lecture 1. Le réalisme et l’enfance 2. Aux origines, le refus du romantisme p. 120-121 G. Courbet, G. de Maupassant, Une vie Pierre-Joseph Proudhon et ses enfants en 1853 F.-R. de Chateaubriand, C. Nègre, Les Ramoneurs en marche Mémoires d’outre-tombe p. 120-121 E. et J. Goncourt, Germinie Lacerteux p. 118-119 ●● Pistes didactiques ●● Pistes didactiques En comparant un texte de Guy de Maupassant et un texte de Cette double page ouvre le parcours à travers une théma- François-René de Chateaubriand sur un même sujet – la vie tique traditionnellement peu associée au mouvement réa- des marins –, les élèves saisissent la distance prise par le réa- liste, celle de l’enfance. Les élèves sont invités à mesurer com- lisme vis-à-vis de la vision du monde romantique. Ce travail bien les réalistes s’intéressaient au sort des plus faibles – ceux est prolongé par la comparaison de deux toiles, l’une réaliste qui n’avaient pas la parole –, ici, les enfants. (G. Courbet, La Vague), l’autre romantique (J. M. W. Turner, Pêcheurs en mer) sur le même sujet, permettant aux élèves de ●● Proposition d’hypothèse de lecture réinvestir leur découverte et de continuer leurs hypothèses Comment chaque genre (peinture, photographie, roman) de définition du réalisme. représente-t-il l’enfant pour mieux défendre son droit à l’ins- truction et au bonheur ? ●● Proposition d’hypothèse de lecture Comment la représentation fidèle de la réalité s’oppose-t-elle à sa représentation idéalisée ? 72 © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 4e – Livre Ressources
3. L’amour, victime de la réalité sociale d’évènements historiques relativement contemporains, ici, la guerre franco-prussienne de 1870. G. de Maupassant, « La rempailleuse » p. 122-125 ●● Proposition d’hypothèse de lecture ●● Pistes didactiques Comment ce récit témoigne-t-il de la violente réalité de la Cette nouvelle de G. de Maupassant prolonge la réflexion ini- guerre ? tiée par l’extrait d’Une vie de la double page précédente. Le narrateur s’y applique à démythifier l’amour idéal et élitiste 7. Dire la réalité des humbles véhiculé par le romantisme pour privilégier une vision réaliste de l’amour miné par l’argent, nouvelle valeur-phare d’une G. de Maupassant, société en plein essor du fait de la révolution industrielle. « Le donneur d’eau bénite » p. 132-135 ●● Proposition d’hypothèse de lecture ●● Pistes didactiques Comment ce récit, témoignant des inégalités sociales de son temps, met-il en scène le contraste entre la cupidité des fortu- Cette nouvelle de G. de Maupassant, accompagnée de la nés et la générosité de celle qui n’a rien ? nouvelle « Aux champs » proposée en ressource numérique, permet aux élèves de cerner l’intérêt que portaient les écri- vains réalistes aux franges les plus défavorisées de la société 4-5. Le mariage dans le viseur des réalistes - du xixe siècle en évoquant leur misère sociale et affective. Si L’objet révélateur les derniers mots de la célèbre nouvelle « Aux champs » sont très noirs, « Le donneur d’eau bénite » offre, au contraire, une P. A. J. Dagnan-Bouveret, fin digne des contes de fée. Cette différence majeure peut Une noce chez le photographe faire l’objet d’une réflexion en classe. G. Flaubert, Madame Bovary ●● Proposition d’hypothèse de lecture G. de Maupassant, « Première neige » p. 126-127 Lire le récit de cette vingtaine d’années de labeur déses- péré comme une sorte de conte de fée réaliste qui, s’il se ●● Pistes didactiques termine bien, ne dresse pas moins le tableau d’une société Cette double page a pour thème le mariage vu par un peintre où l’argent décide de tout, aussi bien du malheur que de la et des écrivains réalistes tels que Gustave Flaubert et Guy de réussite. Maupassant (« Première neige », nouvelle proposée en res- source numérique). Là encore, l’idéal amoureux est dépassé par une vision sans concession dévoilant la vanité de la 8. Le réalisme poétique d’« Un cœur simple » société mais aussi l’hypocrisie des sentiments. G. Flaubert, ●● Proposition d’hypothèse de lecture « Un cœur simple » p. 136-137 Comment tableau et roman dévoilent-ils l’envers du décor par l’intermédiaire des objets que le réalisme est toujours très ●● Pistes didactiques soucieux de représenter avec fidélité ? Ces quatre extraits (dont un audio) du célèbre « conte » de G. Flaubert permettent d’apprécier l’écriture à la fois réaliste 6. Le réalisme, témoin de la réalité de la guerre et poétique de cet écrivain, considéré, malgré lui, comme le chef de file du réalisme en littérature. G. de Maupassant, « Deux amis » p. 128-131 ●● Proposition d’hypothèse de lecture ●● Pistes didactiques Comment, au fil d’une écriture réaliste de plus en plus Cette nouvelle de G. de Maupassant permet d’aborder une lyrique, le personnage de Félicité acquiert-il une nouvelle autre caractéristique du réalisme, sa capacité à témoigner dimension ? Corrigé des questionnaires et des exercices Dans l’ensemble du parcours, les éléments surlignés visent à gui- d’apprendre l’alphabet, la plus jeune, en train de jouer. Belle der les élèves en facilitant le repérage des passages dont ils ont représentation de l’otium, ce temps de loisir où activité rime besoin pour répondre aux questions. avec enrichissement de l’esprit. 2. Loin de son cabinet de travail, l’homme politique est repré- 1. Le réalisme et l’enfance senté dans son intimité. C’est le père et le penseur qui sont célébrés ; principe très novateur pour l’époque, l’individu est Gustave Courbet, considéré dans sa globalité. Pierre-Joseph Proudhon et ses enfants en 1853 p. 118 3. Les vêtements et les souliers modestes de Proudhon rap- pellent ses origines populaires. La couleur bleue du pantalon, Peindre un penseur et défendre l’instruction au centre de la toile, évoque le bleu de travail des ouvriers. des enfants 4. Le feuillage des arbustes, le petit pan de ciel bleu à l’arrière- 1. Proudhon est dans son jardin. Pensif, face au spectateur, plan évoquent une scène printanière pouvant symboliser un il est entouré de livres et de ses deux filles, l’ainée, en train renouveau, celui d’une société où les filles sont en droit d’ap- © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 4e – Livre Ressources 73
prendre et de jouer avec sérénité. Notons que Victor Hugo (« C’est terrible et beau », l. 23-24). La réalité des pêcheurs est écrit « Melancholia » (p. 92) en 1856... La gravité du regard de embellie, plus abstraite. Proudhon semble refléter ce combat social. 3. Le texte réaliste est beaucoup plus documenté : précisions sur le vêtement des pêcheurs et de leurs femmes (bottes, laine, Charles Nègre, robes minces), sur leurs instruments de travail et leurs affaires Les Ramoneurs en marche p. 119 (filets, bouées, aliments, bouteilles d’alcool). Tout semble évo- quer la violence de leur réalité quotidienne (« si misérables Photographier le travail des enfants au xixe siècle cependant qu’ils ne mangeaient jamais de viande », l. 21-22). 1. Un ramoneur est un ouvrier chargé de nettoyer le conduit Le registre familier dit leur pauvreté : « carcasses », l. 15, « pour des cheminées. ne point crever de faim », l. 21 et contraste avec les propos du 2. Il s’agit d’un enfant d’une dizaine d’années à peine. baron. Or, si le texte romantique évoque des métiers de marin Aujourd’hui, l'instruction est obligatoire jusqu’à 16 ans. (pilotes, charpentiers, cordiers, mousses), c’est parce qu’il sont 3. G. Courbet peint l’enfance instruite, heureuse, dont l’ave- propices à la rêverie : « mon imagination se jouait dans ces nir, représenté par la figure paternelle, est celui de la culture ; espaces », l. 3-4. C. Nègre photographie un enfant sur le chemin du travail suivi Bilan 4. a. Un témoignage de la réalité brute ➝ texte réaliste de deux ramoneurs, dont l’un a les mains dans les poches, les (comparaison des barques à de « vastes poissons morts », l. 4). yeux rivés vers le sol, l’autre, un sac lourd sur le dos. L’élan de b. Une vision idéalisée de la vie en mer ➝ texte romantique l’enfant contraste avec l’attitude résignée des adultes, ce qui (oxymore « saine odeur du goudron », l. 10). laisse présager un futur bien triste pour le jeune garçon. En ce sens, C. Nègre et G. Courbet défendent la même cause : l’ins- Gustave Courbet, La Vague truction est gage de bonheur, la place de l’enfant est à l’école. William Turner, Pêcheurs en mer p. 121 Edmond et Jules Goncourt, Comparer deux tableaux sur un même sujet : la mer Germinie Lacerteux p. 118-119 houleuse 1. Les barques sont sur le perret, nous ne voyons aucune trace Le bonheur de petites écolières des pêcheurs, si ce n’est un voilier au loin, très certainement 1. Les écolières sont assimilées, par métaphore ou par compa- car une tempête se prépare. raison, à des abeilles (« un essaim », l. 2, « un bourdonnement », 2. La toile de G. Courbet offre la représentation de la réalité la l. 3) puis à des oiseaux (« une envolée », l. 3, « gazouiller », l. 4, plus vraisemblable, même s’il arrivait que malheureusement « comme d’une cage ouverte », l. 5). Ce qui permet l’analogie des pêcheurs soient victimes de tempêtes. La toile du peintre est le nombre, la vivacité de ces petites filles (énumération de romantique J. M. W. Turner, à travers le clair-obscur, théâtralise verbes d’action, l. 5 à 7). Les auteurs font ainsi le tableau d’éco- ce danger. lières heureuses, libres (« en musardant », l. 12, « s’amusaient », l. 15, « riait », l. 18), ce qui rejoint le propos des deux autres ▶▶À l’oral : Exprimer un avis documents de la double page. Ce travail oral peut faire l’objet d’un travail préparatoire au 2. Cette vitalité contraste avec le deuil de Germinie qui brouillon. Les élèves notent les éléments qu’ils apprécient semble regarder le groupe avec envie : verbe de perception dans le tableau de leur choix (atmosphère, jeu des couleurs...). « regardait » (l. 19), expressions « elle ne pouvait quitter des yeux » (l. 20-21), « il y avait pour elle comme un jour divin » 3. L’amour, victime de la réalité sociale (l. 23). Le narrateur ne fait pas une description objective mais, en retranscrivant la sensation du personnage à la vue des éco- lières grâce au point de vue interne, il est fidèle à la réalité Guy de Maupassant, subjective de cette mère ayant perdu sa fille. Ceci est une pre- « La rempailleuse » p. 122-125 mière approche de ce que peut être la représentation réaliste. Une remise en cause de l’amour idéal 2. Aux origines, le refus du romantisme 1. Les convives débattent du grand amour (l. 6-9). Les hommes pensent que l’on peut aimer plusieurs fois (l. 12-15), les femmes, plus idéalistes, affirment qu’un vrai amour est Guy de Maupassant, Une vie unique et éternel (l. 17-21). François-René de Chateaubriand, 2. L. 74-77 : les femmes sont déçues, la rempailleuse ne cor- Mémoires d’outre-tombe p. 120-121 respond pas à l’héroïne romantique à laquelle elles s’atten- daient. L’interjection « Pouah ! » (l. 75) traduit leur mépris. La vie des marins 3. Il s’agit d’un commentaire ironique puisque la petite rem- 1. Au xixe siècle, la vie des marins est dure : d’après le texte 1, pailleuse est en proie à la colère d’un père qui l’appelle « cra- les pêcheurs pêchent la nuit et risquent leur vie (l. 19-22) ; pule » (l. 101-102). dans le texte écho, les autres métiers rattachés à la navigation Bilan 4. La rempailleuse est rudoyée par son propre père, sont évoqués à travers une fervente activité (énumérations qui aurait dû la protéger, et méprisée par les aristocrates qui, donnant un effet de profusion, l. 5-10). amatrices d’histoire d’amour sincère, auraient dû l’admirer. 2. Le père de Jeanne est baron, il appartient à la petite noblesse de province. Sa remarque empreinte de romantisme ▶▶À l’oral : Exprimer un avis correspond dans le texte écho à la phrase lyrique : « il n’y avait Les élèves peuvent être invités à relire le passage de leur plus rien qu’un océan sans bornes et des mondes inconnus » rencontre. La rempailleuse est tombée amoureuse du petit (l. 2-3). Le baron semble se rendre compte du danger (« sur qui Chouquet pour deux raisons : elle a pour idée reçue que tant d’existences sont en péril », l. 25) mais c’est pour l’exalter les enfants bourgeois sont toujours heureux (l. 115-117) et 74 © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 4e – Livre Ressources
l’enfant se laisse embrasser, ce qui est, pour elle qui n’en a 5. L’objet révélateur pas l’habitude, une véritable marque d’affection (l. 122-123). Mais, en réalité, si l’enfant se laisse faire, c’est qu’il regarde Gustave Flaubert, Madame Bovary p. 127 l’argent... Comprendre la valeur symbolique d’un objet L’amour miné par l’argent 1. C’est le bouquet d’Emma (texte 4) qui est principalement 1. Les élèves peuvent noter dans deux colonnes différentes évoqué à travers les matériaux qui le composent. On voit bien les traits physiques et moraux : maigreur, pauvreté, saleté le souci d’effet de réel. Pour le premier, seuls les rubans de pour la rempailleuse, propreté, beauté, prestance pour le satin blanc sont mentionnés (l. 8). petit Chouquet ; générosité pour la première, cupidité pour 2. Remontant au Moyen Âge, composé jusqu’au xixe siècle de le second. Les deux personnages s’opposent. fleurs d’oranger, il symbolise la pureté de la jeune mariée. 2. C’est l’argent qui est à l’origine de leur rencontre et qui sera 3. C’est dans le texte 3 qu’on apprend ce qu’Emma ressent : le fil de leur histoire. On peut parler de « monde à l’envers » : tout d’abord, de l’étonnement à travers l’exclamative au style c’est la rempailleuse qui constitue, en se sacrifiant toute sa indirect libre (l. 8-9), puis, une certaine mélancolie (« son- vie, un héritage qu’elle lègue au bourgeois. geait », l. 12, « se demandait », l. 14) puisqu’avant même d’avoir commencé sa vie conjugale, elle pense à sa mort. 3. Les Chouquet ont la même réaction de mépris et de 4. Le bouquet réapparait au moment du départ de Tostes où dégout que les femmes aristocrates au début de la nou- elle s’ennuie à mourir (texte 4). Les mots liés au passage du velle. Par trois fois, la rempailleuse est traitée de « gueuse » temps sont dépréciatifs : « jaunes de poussière » (l. 5), « s’effi- (l. 230). loquaient » (l. 6). 4. Le pharmacien donne l’image d’une bourgeoisie de pro- Bilan 5. Emma s’y pique le doigt et le jette au feu. Il devient vince mesquine et cupide – il revient pour prendre la voiture le symbole d’un mariage malheureux, d’une réalité qui a rat- mais laisse les animaux (l. 266-281). Le médecin, beaucoup trapé les rêves de bonheur de la jeune femme. plus humain et sensible durant toute la nouvelle, lui serre tout de même la main car ils ont une clientèle, des intérêts communs (l. 281-283). ▶▶À l’oral : Lire une nouvelle intégrale Bilan 5. Loin du « Pouah ! » initial, la marquise est émue ; Guy de Maupassant, pour autant, en généralisant le cas – sublime – de la rem- « Première neige » p. 127 pailleuse, elle semble ne pas avoir compris l’injustice sociale violente dont celle-ci a toujours été victime. À travers la voix du médecin humaniste et l’évocation d’une bourgeoisie et Ressources numériques ACTIVITÉ d’une aristocratie insensibles, le narrateur prend parti pour Texte intégral de « Première neige » AUDIO cette pauvre rempailleuse dont on ne connait même pas le nom. lu et à télécharger « Première neige » est une nouvelle réaliste de G. de Maupassant facile d’accès dont le sujet, le mariage 4. Le mariage dans le viseur des réalistes malheureux d’une jeune fille normande, correspond au thème de la double page. Le calorifère tant souhaité P. A. J. Dagnan-Bouveret, par l’héroïne représente le besoin de chaleur humaine Une noce chez le photographe p. 126 de la jeune femme qui s’ennuie, se refroidit auprès de son mari. Montrer l’envers du décor d’une photographie Les élèves peuvent lire ou écouter cette nouvelle à officielle la maison et répondre à la question en relevant les 1. Cette toile propose deux plans distincts, celui des mariés passages où il est question du calorifère. La mise posant pour la photo, celui du photographe derrière l’objectif. en commun des réponses permettra d’évaluer la Le complément circonstanciel du titre suggère que le lieu est compréhension du texte et pourra être l’objet d’une le vecteur de dévoilement de la réalité. discussion à partir des propositions des élèves. 2. Les mariés, de par leurs vêtements et ceux de leurs invités, semblent appartenir à une petite bourgeoisie cherchant à se mettre en valeur le jour du mariage. 6. Le réalisme, témoin de la réalité de la guerre 3. D’un côté, le rideau et le tapis ou encore, sur la photogra- phie, les bouquets de fleurs ; de l’autre, le parquet élimé et la Guy de Maupassant, vitre cassée. En laissant voir au spectateur l’envers du décor, le « Deux amis » p. 128-131 peintre réaliste démythifie la photographie officielle et l’ap- parat qu’elle cherche à dégager. ▶▶À l’oral : Repérer la structure d’une nouvelle On veillera à sensibiliser les élèves au traitement du temps (analepse, l. 12 à 48), à l’alternance de moments calmes et de ▶▶À l’oral : Comprendre une mise en scène moments plus inquiétants. de la réalité Avant de faire élaborer un titre aux élèves, il est souhaitable Une guerre que l’on refuse de voir de leur demander de formuler à l’écrit les intentions réalistes 1. Informations données au lecteur : une capitale en souf- du peintre. france pour cadre de l’intrigue, l’amitié de Morissot et Sau- © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 4e – Livre Ressources 75
vage, des souvenirs heureux du passé « avant la guerre ». Le 7. Dire la réalité des humbles retour en arrière que permet le point de vue omniscient crée Guy de Maupassant, un contraste avec le présent malheureux. 2. L. 116 à 122, le point de vue interne donne un aperçu de « Le donneur d’eau bénite » p. 132-135 la réalité vue par les deux personnages : « Il n’entendit rien. Ils étaient bien seuls, tous seuls. […] La petite maison du restau- Ressource numérique AUDIO rant […] semblait délaissée depuis des années ». Or, la suite de la narration va les détromper : derrière cette maison se Lecture de la nouvelle « Le donneur d’eau cachent leurs futurs bourreaux. bénite » (texte intégral) 3. Dès les premières lignes est mentionné un Paris envahi et La lecture audio de l’intégralité de cette nouvelle de en souffrance. Une première mention de la guerre se trouve G. de Maupassant est disponible à l’écoute en saisissant ligne 12, mais Sauvage ne fait état que d’« événements » (l. 53). le lienmini proposé. La demande du laisser-passer (l. 86-88), l’évocation fugace des Prussiens tournée en boutade (l. 96-106) renvoient à une Résumer une vie humble réalité que les deux amis refusent de voir. Or, pour le lec- teur, c’est avant tout l’aspect désertique du paysage qui est 1. Jean a environ vingt-cinq ans, trente ans tout au plus. inquiétant. Le front n’est véritablement évoqué qu’à partir de 2. Plusieurs années sont évoquées en huit lignes. On appelle la ligne 133 ; la violence de la guerre est aussi retranscrite plus cela un sommaire. Pour la scène de reconnaissance qui dure loin (l. 173-180) mais les personnages, d’après leur conver- tout au plus quelques minutes, trente lignes. La scène capitale sation au style direct, ne s’en inquiètent pas (« haussa les est donc évoquée plus longuement. Le sommaire permet, au épaules », l. 153, « tranquillement », l. 169, « en riant », l. 183), contraire, d’évoquer le temps figé du manque. semblent aveugles tant qu’ils ne sont pas véritablement 3. Ils vivent d’abord de l’argent de la vente de leur maison, de confrontés aux Prussiens (l. 197). Ce contraste est saisissant. menus travaux à leur passage dans les villes (d’où l’expression « se louer »), puis de l’aumône (l. 62). Le charron finit donneur Bilan 4. La syllabe [so] qui fait penser à « sot ». Le narrateur d’eau bénite. Il s’agit du résumé d’une vie très pauvre. accentue ainsi leur naïveté, leur bêtise. Un conte de fée réaliste Les pouvoirs de dévoilement du réalisme 1. C’est à travers les propos de la mère que le lecteur com- 1. La bataille est évoquée à travers des personnifications prend que le jeune homme est leur fils. C’est émouvant d’au- inquiétantes : « grande silhouette du Mont Valérien, qui por- tant qu’elle le reconnait grâce à sa ressemblance avec le père. tait au front une aigrette blanche [...] » (avec ambiguïté du 2. La taille, la prestance et surtout le style de vêtement ont mot « front »), l. 142-144 ; « la montagne jetait son haleine de été un frein : ils recherchaient un saltimbanque. L’habit est un mort », l. 149. grand marqueur social à l’époque, d’où l’attention très grande 2. « Mais ils tressaillirent effarés, sentant bien qu’on venait de des réalistes à son endroit. marcher derrière eux », l. 184-185. Conscients, cette fois, de la 3. Le fait que le jeune homme se rappelle ses parents à travers mort qui les attend, ils ne livrent pas pour autant le colonel l’expression de son enfance « Papa Pierre, maman Jeanne ! » qui leur a délivré le laisser-passer. Ils deviennent des héros. est émouvant. Le registre pathétique est aussi souligné par 3. L’officier allemand donne l’image d’un homme fourbe (il les larmes du personnage et des deux dames qui l’accom- les incite à trahir, « Donnez-moi ce mot d’ordre et je vous fais pagnent (l. 130 et 132) accompagnées d’une effusion de sen- grâce », l. 215-216), cruel (il leur rappelle leur famille, l. 229), d’un timents (« suffoquaient d’une joie démesurée », l. 131). calme monstrueux (« toujours calme », l. 226, « toujours serein », 4. Jean, après trois ans passés avec les saltimbanques, a été l. 279, « Puis il se remit à fumer », derniers mots du récit). vendu à une vieille dame aristocrate qui s’est prise de pitié 4. Par le registre épique, le narrateur donne, au contraire, pour lui. Il a reçu une bonne instruction et un héritage, ce qui une vision monstrueuse de la guerre (personnifications déjà l’a sauvé. citées, énumération de verbes d’action l. 169-180, allitérations Bilan 5. Ce récit réaliste raconte une vie de malheur et de en [r]). misère qui finit étonnamment bien. La vieille dame aristo- crate peut être considérée comme une fée-marraine. Bilan 5. Sauvage et Morissot sont finalement des « héros » car ils ne trahissent pas leur pays, même au prix de leur vie, « ordi- ▶▶À l’écrit : Expliquer un caractère et un naires » car, tout au long de la nouvelle, on les voit débon- comportement naires, refusant de voir la réalité en face. « Ténacité » : persistance de ce dont on ne peut se défaire mais aussi ce qui persiste dans le temps. Les parents, en ne renon- Ressource numérique AUDIO çant pas à la recherche de leur fils, ont été plus tenaces que le malheur. Lecture de la nouvelle « Deux amis » Dans un souci de pédagogie différenciée, l’explication pour- (texte intégral) rait d’abord se faire à l’oral. Par la suite, les élèves pourraient La comédienne fait une lecture sans accent prussien être invités à reformuler à l’écrit la réponse élaborée collecti- des paroles au style direct de l’officier ; pourtant, bien vement. Une structure de réponse pourrait leur être propo- que le narrateur mentionne son « excellent français » sée : quelques phrases pour les sens du mot trouvés dans le (l. 201), on pourrait, dans la perspective d’un récit dictionnaire, puis, quelques phrases qui expliqueraient le sens réaliste soucieux de l’effet de réel, lire ces passages du mot dans le contexte et enfin, une conclusion qui pourrait avec un léger accent. contenir une opinion personnelle sur la ténacité de ces parents et proposer une autre morale pour ce « conte de fée réaliste ». 76 © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 4e – Livre Ressources
▶▶Graine de savoir 8. Le réalisme poétique d’« Un cœur simple » Entre autres, notons : Morissot, Sauvage avec jeu sur le mot « sot », Bovary avec jeu sur « bovin », Félicité, prénom qui signi- Gustave Flaubert, fie « la joie », alors que cette servante sacrifie sa vie au travail, « Un cœur simple » (texte 7 et texte écho) p. 136 mais aussi la rempailleuse qui n’en a pas car elle n’est pas considérée par la société. Un portrait révélateur de la simplicité de la servante 1. Le portrait commence par : Guy de Maupassant, – l’évocation du programme de la journée de travail de Féli- « Aux champs » p. 135 cité ; – la description de ses vêtements ; Ressource numérique ACTIVITÉ – l’évocation d’un visage qui semble gommer son âge. Elle est Guy de Maupassant, « Aux champs » servante avant d’être Félicité. 2. Félicité est présentée comme pieuse, travailleuse, sou- I. Une nouvelle opposant deux mondes cieuse de la propreté et économe, les qualités de la servante 1. La fermière s’exprime en avalant des syllabes, des idéale. articles, et en faisant des erreurs de conjugaison. 3. Félicité a connu une vie difficile faite de sacrifices : « misère Le narrateur, de manière très réaliste, rend compte de son enfance » (l. 4-5), « déception du premier amour » (l. 5), du parler paysan. M. d’Hubières emploie, lui, un perte des êtres chers. vocabulaire juridique (« héritier », « rente ») et développe Bilan 4. Félicité a un comportement d’automate faisant les une argumentation. La différence entre les classes mêmes gestes, à la même heure, toute l’année (imparfait sociales s’entend. d’habitude, indications temporelles : « dès l’aube […] jusqu’au 2. L’argument est celui de l’argent d’où la réaction soir, sans interruption », l. 1-2, « en toute saison », l. 12). La scandalisée de la mère : « Vous voulez que j’vous phrase composée d’un groupement ternaire au participe vendions Charlot ? » passé avec auxiliaire exprimé une fois en dénominateur com- II. Un tableau du monde paysan mun, « puis le dîner étant fini, la vaisselle en ordre, et la porte 1. Le narrateur focalise l’attention du lecteur sur bien close, […] elle enfouissait la bûche sous les cendres et s’endormait devant l’âtre » (l. 3-4), fait d’elle une véritable Cen- l’alimentation très simple de cette famille pauvre. drillon qu’aucune fée n’est jamais venue visiter. 2. « Tout cela » pour parler d’individus, « moutard », « mioches » relèvent du registre familier qui laisse Gustave Flaubert, entendre le milieu défavorisé de cette famille. « Un cœur simple », texte 8 (extrait lu) III. Des inégalités sociales cruelles Émile Adan, 1. Charlot est jaloux de l’aisance sociale de son illustration pour « Un cœur simple » p. 137 camarade d’enfance car il aurait pu être à sa place. Sa misère est si grande qu’il reproche à ses parents de ne pas l’avoir vendu et s’en va en les insultant. Ressources numériques AUDIO 2. Les morales que proposeront les élèves pourront être variées, tout dépend de leur sensibilité à tel ou Lecture d’un extrait d’« Un cœur simple » tel aspect du texte : « La misère emporte tout, même + texte de l’extrait à télécharger l’amour », « Aimer son enfant, c’est savoir s’en détacher Cet extrait, disponible à l’écoute en saisissant le lienmini pour son bien », « La société française du xixe siècle était proposé, est lu par la comédienne Marie-Christine trop injuste »... Barrault. Il s’agit de la scène d’« Un cœur simple » au cours de laquelle Félicité fait courageusement face au IV. Vidéo d’Olivier Schatzky taureau. 1. Points communs : le ton de Charlot (« rudement », l. 1), un bon nombre de ses paroles, son départ et la rumeur de la fête donnée en l’honneur de Vallin. Illustrer un épisode narratif Différences : dans l’adaptation, la mère cherche à se 1. Au centre, au second plan derrière Madame Aubain et ses justifier au près de son fils puis accable le père au cours enfants apeurés, Félicité est seule face au taureau, ce qui ne d’une dispute violente, elle se suicide ensuite. l’empêche pas d’agir. 2. La violence de Charlot envers ses parents (insulte) 2. On trouve les deux figures féminines adultes aux robes si mais aussi le verbe « disparaître » dont le sujet est différentes puisqu’elles appartiennent à deux milieux sociaux Charlot mais que le réalisateur a déplacé sur la mère opposés : la paysannerie et la bourgeoisie aisée de province. ont pu suggérer ce suicide. L’une agit au péril de sa vie, l’autre fuit. 3. Cela provoque un choc. Fidèle à l’intention Bilan 3. Avant de lancer les élèves dans cette activité, il serait dénonciatrice de G. de Maupassant, O. Schatzky montre bon de leur demander comment une illustration peut mettre la violence des conséquences de l’injustice sociale sur en avant la bravoure d’un personnage (au centre, au premier une vie de famille. plan, jeu de couleurs... ?). © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 4e – Livre Ressources 77
Gustave Flaubert, Félicité, humble, sacrifiée, représentative des paysannes nor- « Un cœur simple », texte 9 p. 137 mandes, mais aussi Félicité généreuse, transfigurée, capable de voir la poésie des choses simples. Un cœur pur face à la cupidité des bourgeois 1. Le mot « héritiers » (l. 1) appartient au champ lexical juri- Activités d’expression p. 138-139 dique. ▶▶Sujet 1 : Écrire la suite d’un dialogue réaliste 2. Les verbes « accourir » (l. 1), « survinrent » (l. 2), le groupe- ment ternaire sans conjonction de coordination « fouilla [...], L’enseignant peut faire chercher quels pourront être les argu- choisit [...], regagnèrent » (l. 1-3), l’énumération des objets ments de Lheureux : qualité et finesse des matières, élégance emportés (l. 4-8) montrent bien l’empressement cupide de de la jeune femme, vente à crédit, prix dérisoire. On peut Paul et sa femme d’autant qu’ils n’ont pas oublié de mettre également faire imaginer quelles pourront être les questions en vente la maison sans prévenir Félicité qui y habite depuis d’Emma, ses marques d’hésitation, l’expression de son envie. tant d’années. ▶▶Sujet 2 : Décrire un objet à travers le regard d’un 3. « Ivre de tristesse » est une métaphore montrant l’immense personnage chagrin que Félicité connait. Elle est si triste qu’elle semble ne Le professeur peut faire repérer le passage où il est question plus savoir que faire, ni où aller, comme le ferait une personne des écharpes et faire relever les éléments de description à ivre. développer. À travers quels verbes de perception le point de 4. Elle trouve du réconfort dans la prière, devant son perro- vue d’Emma sera-t-il évoqué ? Quelles émotions ressentira-t- quet empaillé (l. 14-15). elle ? 5. Le reflet de la lumière dans l’œil de verre de son perroquet l’exalte (l. 16-17). ▶▶Dégager les caractéristiques réalistes d’un tableau Bilan 6. La poésie de ce passage tient dans son lyrisme : Les élèves, en s’aidant des consignes de travail proposées, registre soutenu (« vapeur d’azur », l. 19, « humant », l. 20, peuvent être laissés en autonomie pour ce travail final. « sensualité mystique », l. 20, « exhala », l. 23, « cieux », l. 24), ▶▶Exprimer son avis personnel sur un genre groupements binaires avec rimes internes (« plus [...], plus », « comme […] comme », l. 22-23), personnification (« Ses lèvres Cette activité consiste en l’expression d’un avis personnel et souriaient », l. 21). On est loin d’une vision objective de la argumenté qui nécessite une relecture permettant de faire un réalité, Félicité est transfigurée pour rendre compte, de la bilan sur le mouvement réaliste. manière la plus fidèle possible, du moment de grâce qu’elle Afin d’aider les élèves à apprendre à justifier une préférence, connait au moment de mourir. l’enseignant pourra revoir le vocabulaire de la prise de posi- tion, de la modalisation : « à mon sens », « selon moi », « en ce ▶▶À l’oral : Justifier un choix qui me concerne », « il me semble que ». Les raisons du choix Ce débat va permettre aux élèves de faire le point sur ce qui a peuvent être balisées : sensibilité à la beauté du texte, à une fait la souffrance de la vie de Félicité mais aussi son bonheur : injustice sociale, lecture qui provoque de l’émotion... Les métiers vus par les peintres DOSSIER du xixe siècle p. 140 à 143 Objectifs et démarches du dossier ▶▶ Nous avons voulu dans ce dossier, qui s’inscrit dans le thème 3 « La fiction pour interroger le réel », proposer des œuvres picturales donnant à voir des hommes et des femmes au travail. Les élèves découvriront sans doute des métiers disparus dont ils ignoraient l’existence et des œuvres d’artistes parmi les plus célèbres de la seconde moitié du xixe siècle. Intégré entre le parcours « Le récit réaliste, miroir de la réalité » et le parcours « Une vie, une œuvre » consacré à Émile Zola, ce dossier permet aux élèves de réinvestir ou de découvrir par une autre approche des réalités étudiées dans ce thème, en établissant des liens étroits entre la littérature et la peinture. ▶▶ Nous n’avons volontairement pas présenté les œuvres dans un ordre chronologique (Gustave Courbet, considéré comme le chef de file du mouvement réaliste, serait alors apparu en premier, et Claude Monet, maitre incontesté de l’impressionnisme, en dernier) mais dans un ordre thématique : la première double page montre ainsi des travailleurs du monde industriel, la seconde des ouvriers des villes et des campagnes. ▶▶ Ce dossier peut être exploité dans le cadre du Parcours d’Éducation Artistique et Culturelle puisqu’il contribue à s’approprier des repères, à porter un jugement construit et étayé en matière d’art, en décrivant, contextualisant et analysant une œuvre. Pour cela, des questionnaires guideront les élèves et l’activité interactive numérique leur permettra d’aller plus loin dans l’analyse du tableau de Gustave Caillebotte. ▶▶ Suggestion de problématique : quelle réalité du monde du travail les peintres de la seconde moitié du xixe siècle donnent-ils à voir ? 78 © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 4e – Livre Ressources
Corrigé des questionnaires James Nasmyth, du pont, des mâts des péniches, des cheminées des usines au Le Marteau-pilon p. 140 fond mais aussi des coltineurs du premier plan. • Les personnages qui rejoignent la péniche se tiennent droit Prendre la mesure de l’homme face à la machine et ont retourné la corbeille vide de charbon sur leur tête ; ceux • Le marteau-pilon occupe le centre de la toile, la moitié de qui la quittent marchent courbés sur les planches étroites et sa largeur et presque toute sa hauteur. Les hommes qui l’en- tiennent d’un bras leur lourd chargement sur l’épaule. tourent apparaissent bien petits face à elle (on peut deman- • On comprend donc que les personnages placés au premier der aux élèves d’estimer sa hauteur à partir de celle des sil- plan retournent à la péniche pour un nouveau chargement. houettes des ouvriers). • L’ensemble des lignes donne l’impression que les charbon- • Les couleurs dominantes sont le rouge, pour la chaleur niers sont prisonniers de leur tâche. Il peut faire penser à un dégagée par la machine, et le noir et les nuances de gris de la réseau de fils enfermant les personnages, à une fourmilière. vapeur qui s’échappe du marteau-pilon et des usines que l’on ▶▶À vous d’interpréter distingue au fond. • Ces différents éléments laissent deviner un travail pénible, Il n’y a pas de réponse type. Le visage n’est pas le propos du éreintant, harassant, qui exige force, précision et attention. tableau et les personnages sont réduits à des silhouettes ; c’est la représentation de l’activité qui intéresse le peintre. Suggestion d’activité complémentaire Edgar Degas, Proposer aux élèves : Les Repasseuses p. 142 – d’observer la fiche détaillée du marteau-pilon à vapeur de James Nasmyth conservé au musée des Arts ▶▶À vous d’écrire et Métiers de Paris : Cet exercice peut être préparé par l’analyse des groupes http://www.arts-et-metiers.net/musee/marteau-pilon- nominaux ou le repérage des adjectifs qualificatifs selon le vapeur-par-nasmyth niveau des élèves. À l’issue de l’activité, les élèves liront leur phrase à leurs camarades et demanderont « Qui suis-je ? », afin – de faire ensuite une recherche plus approfondie sur de vérifier quel personnage ils ont choisi. son fonctionnement. Recréez l’atmosphère de l’atelier de repassage Cette activité d’oral permettra de valider la capacité de l’élève Écho littéraire à « adapter sa lecture et la moduler en fonction de la nature • Émile Zola compare la machine à un monstre vivant. On fera et de la difficulté du texte » (Socle commun de connaissances, relever les mots « respiration », « sueur », « organes », « effort » de compétences et de culture). Le professeur pourra séparer pour justifier la réponse. la classe en deux groupes et demander aux élèves n’ayant pas L’ouïe est particulièrement mise en valeur, comme le montrent lu de déterminer si la compétence est acquise par ceux qui les noms « battements », « chocs », « trépidation », « coups » et ont effectué la lecture. la comparaison « résonnant comme des cloches ». • À l’oral. On attend un groupe nominal enrichi par au moins Gustave Caillebotte, une expansion. Les Raboteurs de parquet p. 143 • L’appartement se situe en hauteur : la fenêtre au fond, d’où Suggestion d’activité complémentaire provient la lumière, laisse apparaitre des toits parisiens au- Écho sonore delà du balcon en fer forgé. Écoutez sur le site de l’Ircam un extrait des Fonderies • Les outils sont dispersés dans la pièce. Au tout premier plan, d’acier, du compositeur russe Mossolov, interprété par une lime est dirigée vers le personnage central et semble guider le regard du spectateur. Une seconde est saisie par l’Orchestre Philarmonique de Radio France sous la l’ouvrier de gauche qui tient un racloir dans sa main droite. direction de Sylvain Cambreling : À droite, un marteau sépare les deux raboteurs qui utilisent http://medias.ircam.fr/x3a9975_zavod-les-fonderies- chacun un rabot et un racloir. dacier-op-19-alexandre • La lumière se reflète sur les corps des raboteurs qui tournent • Quels mots de l’extrait d’Émile Zola pouvez-vous le dos à la fenêtre, sur les outils et sur les parties encore mouil- associer à cette œuvre ? lées du parquet. • Qu’ajoute pour vous le son à vos impressions visuelles ? • Le personnage du centre se dirige vers le fond de la pièce tan- dis que celui de droite avance vers le spectateur. La position Claude Monet, de leurs mains et la couleur du parquet travaillé le prouvent. Les Déchargeurs de charbon p. 141 • Gustave Caillebotte parvient en une image à recréer l’atmos- phère du chantier et donne au spectateur l’impression d’assis- Entrez dans la composition du tableau ter à une scène en mouvement. • Cette première question oblige à observer précisément le Tous ces éléments pourront être précisés grâce à la ressource tableau pour en saisir le cadre : les lignes verticales sont celles numérique. © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 4e – Livre Ressources 79
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