La fontaine de Charlemagne dans la forêt de Saint-Hubert (Moselle). Mythes, rites, légendes.

 
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La fontaine de Charlemagne
dans la forêt de Saint-Hubert (Moselle).
         Mythes, rites, légendes.
par Philippe W A L T E R , membre correspondant

            Dans la forêt de Saint-Hubert, à une vingtaine de kilo-
  mètres au nord-est de Metz, en bordure de l'ancienne fron-
  t i è r e l i n g u i s t i q u e r o m a n e , (1) se t r o u v e la c h a p e l l e de
  Notre-Dame de Rabas. Elle se niche au cœur d ' u n e vallée
  sauvage où serpente un ruisseau. Celui-ci reçoit en contre-
  bas de la chapelle les eaux d'une source jaillissant à proxi-
  mité du chemin conduisant du village de Saint-Hubert au
  hameau de Béfey (2). La source porte le nom de Fontaine
  de Charlemagne. Mais d'où vient cette tradition locale? Et
  puis que vient faire Charlemagne dans cette forêt perdue de
  L o r r a i n e ? (3) Comment comprendre ce site sur le plan du
  folklore mais aussi de l'ethnologie religieuse?

Avec l'aimable autorisation "des Amis de Rabas" de Vigy
La source païenne et la chapelle romano-gothique

      C'est avec Raphaël de Westphalen (1873-1949), le plus illustre folklo-
riste du pays messin, qu'il faut commencer l'enquête. Ce médecin de cam-
pagne consignait au retour de ses visites quantité de légendes, traditions et
coutumes que lui livraient ses patients. Sa collecte constitue un véritable
trésor du folklore lorrain. S'agissant de la fontaine de Rabas, il indique :

         A côté de cette fontaine, on apercevait jusqu'en 1919 et 1920, une grosse pierre
         émergeant d'une quinzaine de centimètres du sol. Sur la surface de cette pierre
         on remarquait une figure ressemblant vaguement à l'empreinte d'un énorme fer
         à cheval, à un rudimentaire croissant. La pierre était appelée : la Pierre de
         Charlemagne; les habitants de l'ancien bailliage de Lorraine allemande lui don-
         naient le nom de Karlsprung, c'est-à-dire Saut de Charlemagne. (4)

      Une fontaine et une pierre à l é g e n d e : même minimal, ce décor n'est
pas innocent. Il rappelle bien d'autres lieux semblables que le folkloriste
français Pierre Saintyves faisait remonter à la préhistoire. (5) La descrip-
tion donnée est celle d'une pierre à cupules de l'ère néolithique. (6) Elle
relève d ' u n e culture mégalithique qui a laissé d'innombrables traces dans
pratiquement toute l'Europe. (7)

      A défaut de témoignages historiques sur cette pierre, on en est réduit,
dans le cas de Rabas, à scruter les bribes éparses de la tradition orale. Car
la fontaine a sa légende depuis longtemps. C'est l'abbé Cazin, archiprêtre
de Vigy et premier historien de Rabas, qui la résume :

         C'était, paraît-il en été. L'empereur s'adonnait au plaisir de la chasse, ou, selon
         d'autres, était en guerre. La chaleur était accablante. Chasseurs ou guerriers,
         valets, destriers, lévriers, tout le monde languissait, périssait. Le prince touché
         de compassion pour les siens et souffrant lui-même de la soif, fit alors vœu à la
         Sainte Vierge de lui bâtir, à l'endroit même, une chapelle si elle venait à son
         secours. Soudain, sous les pieds frémissants du coursier royal, une source jaillit,
         fraîche ; limpide, et abondante. L'empereur tint parole : la chapelle fut bâtie. (8)

         Raphaël de Westphalen indique une variante de la légende :

         Le coursier de l'empereur, arrivé au bord du talus, sauta dans le vide et imprima
         dans la pierre dite de Charlemagne la marque de sabot ferré. (9)

      La légende comprend ainsi trois motifs principaux. Deux sont nette-
ment païens : la pierre à empreinte et le cheval sourcier, le troisième est
chrétien p u i s q u ' i l s ' a g i t de la fondation d ' u n e chapelle. (10) A quand
remonte la légende ? Il est difficile de le dire. Un chroniqueur messin du
     e
X V I siècle nommé Jean Châtelain rapporte :
En celui temps, le grand Charlemaigne,
        Roi et empereur d'Allemaigne,
        En chassant au bois a l'esbat
        Fonda la chapelle de Rabas. (11)

                                                    e
       Dans cette chronique du X V I siècle, il est bien question d ' u n e cha-
pelle mais pas d ' u n e fontaine. Pas d'intervention d ' u n cheval non plus,
pour la faire jaillir. Les éléments mythiques sont absents. Le chroniqueur se
limite à des faits supposés historiques: l'empereur Charlemagne décide de
fonder, dans un élan de piété, une chapelle perdue au fond des bois. Un tel
sanctuaire, dans un site enclavé, ne pouvait trouver sa fonction religieuse
que dans un pèlerinage. Or, il semble bien que la chapelle de Rabas ait
                                                                       e
entretenu un pèlerinage depuis au moins le X V siècle. Dans leur histoire
de Metz, les Bénédictins indiquent que cette chapelle « était destinée à
recevoir les religieux de Saint-Arnould dans les temps de peste et de mala-
dies épidémiques ». (12) On pourrait alors peut-être expliquer la légende
de f o n d a t i o n c a r o l i n g i e n n e p a r l ' i n t e r v e n t i o n du m o n a s t è r e de Saint-
Arnould, propriétaire de la chapelle. Saint A r n o u l d était un ancêtre de
Charlemagne et le monastère messin qui porte son nom a été, tout au long
du Moyen Age, un puissant relais de la propagande carolingienne, comme
                                                                                      e
en témoigne encore la légende d'Hervís de Metz au XIII siècle. (13) Au
mois d'octobre 1049, le pape Léon IX (pape français né en Alsace) aurait
consacré l'église de Rabas sous l'invocation de la Vierge. (14) Une partie
de l'édifice primitif existe toujours: c'est la première enceinte de la cha-
                                e
pelle actuelle. Au X V siècle, la chapelle fut en grande partie reconstruite
et consacrée de nouveau. La deuxième enceinte actuelle, en style gothique,
et le retable de l'autel sont de cette époque.

     Toutefois, les mentions historiques du pèlerinage et de la fontaine
sont rares m ê m e si la tradition orale l'établit avec netteté. Jean-Emmanuel
Drochon ne mentionne pas le pèlerinage de Rabas dans sa volumineuse
                                                                                          e
histoire des pèlerinages français à la Vierge (15). Au X V siècle, Jean
Aubrion mentionne la chapelle mais sans donner d'autres précisions :

       [1488] Le temps estoit fort dangereux d'oraiges, car, tantost qu'il faisoit ung
       peu de challour, le temps se chaingeoit; et fit le dairien jour d'apvril ung ter-
       rible temps de grelle, et fit grant dommaige depuis St Germain jusque bien près
       de Nostre Dame de Rabay. (16)

         Jehan Aubrion pouvait connaître Rabas à cause du pèlerinage à la
Vierge dont on peut supposer qu'il était bien vivant à cette époque puis-
                                                                                                   e          e
q u ' o n a conservé deux statues de la Vierge qui remontent aux X I V et X V
siècles. Une statue en pierre date du réaménagement de la chapelle vers
                                                                                              e
1496. Une autre statue en chêne est un peu plus ancienne (XIV siècle) : la
Vierge y présente le sein à l'enfant Jésus qui tend la main vers lui. (17)
Cette statue est fixée sur un brancard car elle était portée en procession.
e
      L ' a b b é Cazin p r o u v e l ' e x i s t e n c e du p è l e r i n a g e de R a b a s au X V I
siècle. En 1515, précise-t-il, il était déjà de coutume d'aller boire et se
laver à cette fontaine. Car « dans les baux passés, en 1515 et 1564, entre
les r e l i g i e u x de S a i n t - A r n o u l d et les fermiers a u x q u e l s ils louaient la
métairie de Rabas, il est expressément stipulé que le preneur devra prendre
soin de la fontaine et en entretenir le cours ». L'abbé imagine alors le pèle-
rinage au fil du temps :

       Arrivé à la chapelle, on chantait, on priait, on déposait aux pieds de l'image
       vénérée sa petite offrande ou quelque naïf ex-voto ; puis on se remettait en
       route, emportant, celui-ci une branche de lierre, celle-là un petit vêtement tou-
       chés de Notre-Dame, tous un peu d'eau de la fontaine de Charlemagne. (18)

      Le pèlerinage de Rabas pourrait provenir de la dévotion des moines
de Saint-Arnould envers Notre Dame. C'est en 1410 que Jean de Roillenat,
abbé de Saint-Arnould, n o m m e un aumônier à Rabas. Cela prouve q u ' à
cette époque la grande abbaye messine tenait bien la chapelle sous son
autorité. Il n'est pas interdit de penser que le pèlerinage aurait été institué
pour concurrencer quelques rites païens entourant la fontaine. Le docteur
de W e s t p h a l e n fait m ê m e état de c o u t u m e s au p a g a n i s m e m a r q u é qui
                                         e
auraient survécu j u s q u ' a u X I X siècle :

                                                                                         e
       D'après nos renseignements, on avait coutume, vers la fin du 18 siècle et
       après, d'aller à Rabas pour se prémunir contre les fièvres, contre les maladies
       des yeux, pour guérir les nourrissons malingres, en châte. Certains pèlerins y
       apportaient une chemise ou un autre vêtement du malade et jetaient l'objet sur
       l'eau du bassin creusé devant la fontaine. Si cet objet flottait sur l'eau, la guéri-
       son était considérée comme certaine. On trempait aussi la chemise du malade
       dans l'eau salutaire et on la laissait ensuite sécher sur un buisson d'aubépine
       du voisinage. D'autres venaient à la fontaine pour s'y laver les yeux et suspen-
       daient le linge qui leur avait servi, à un arbrisseau où il était abandonné empor-
       tant avec lui le mal. Le pèlerin allait ensuite toucher la statue miraculeuse de
       Notre Dame. (19)

         Il s'agit de pratiques traditionnelles bien connues des folkloristes :
é p r e u v e p a r le flottement du l i n g e , (20) a b l u t i o n s , l a v a g e s de parties
malades, (21) transfert des maladies aux arbres et buissons. (22) Elles sont
très répandues non seulement en France mais dans toute l'Europe et témoi-
gnent souvent de pratiques rituelles archaïques. Au fil des siècles, ces rites
païens ont évidemment eu le temps de se christianiser. La croix dressée
devant la fontaine cherche à attirer l'intérêt :

      Autrefois, les jeunes filles de la contrée de Vigy désireuses de se marier allaient
      à la croix de Charlemagne, près de la fontaine. Elles coupaient des brindilles de
      rameaux verts et en formaient de petites croix. Après avoir prié devant cette
      grande croix, dite de Charlemagne, chacune y déposait sa petite croix soigneu-
      sement confectionnée. (23)
Ainsi la chapelle et la fontaine semblent être deux versants d ' u n e
seule et m ê m e dévotion. A Rabas, la superstition païenne rejoint la ferveur
chrétienne. Lors de la Terreur, un document témoigne de la permanence
des dévotions à R a b a s : il s'agit cette fois d'une dénonciation adressée aux
autorités révolutionnaires. Le pèlerinage et les statues survécurent néan-
moins à la tornade révolutionnaire.

      C'est toutefois vers la mémoire légendaire qu'il faut se tourner à pré-
sent pour faire parler ce site. On se trouve bel et bien devant un de ces
sites relevant de la « mythologie chrétienne » du Moyen Age (24), c'est-à-
dire une mythologie païenne christianisée, ou tout au moins une mytholo-
gie païenne qui trouve dans le christianisme un moyen à la fois de mainte-
nir ses croyances et un moyen de les relier à une doctrine religieuse parée
de tous les prestiges de l'autorité spirituelle.

Charlemagne sourcier

         L'association de Charlemagne à des lieux légendaires n'est pas propre
à Rabas. (25) Le souvenir de l'empereur est resté attaché dans la mémoire
populaire à plusieurs autres sites lorrains. Dans les Vosges, la marque du
fer de son cheval se trouve sur la Pierre Charlemagne près de Gérardmer.
Deux autres légendes mettent en scène l ' e m p e r e u r : la corne de Cornimont
et le brochet du lac de Longemer. Pour récompenser un garde-chasse qui
l'avait secondé lors de la chasse d'un aurochs furieux, Charlemagne lui fit
don d'une corne de la bête qu'il avait fait orner de bagues d'argent. Cette
corne fut conservée à Cornimont qui tira, dit-on, son nom de l'objet. Une
a u t r e l é g e n d e r a c o n t e q u e C h a r l e m a g n e a v a i t p é c h é d a n s le l a c d e
Longemer un brochet d ' u n e taille exceptionnelle. Il lui fit ajuster un collier
muni d'une clochette d'argent et le remit à l'eau. Depuis lors, ce brochet
n ' a jamais pu être péché et il nage toujours dans l'eau du lac tandis que
l'on entend tinter sa cloche d'argent.

          A 3 kilomètres de Gérardmer, sur le chemin du Holweck on trouve un
Pont des fées et une pierre où le cheval de Charlemagne a laissé la trace de
son sabot. Près de Chavigny, à quelques kilomètres de Nancy, se trouve
une source C h a r l e m a g n e . La légende r e s s e m b l e é t r a n g e m e n t à celle de
Saint-Hubert. A la poursuite d'un cerf, Charlemagne assoiffé s'arrête pour
chercher un peu d'eau. Ne trouvant aucune source, il ordonne à son cheval
de frapper trois fois le sol de son sabot. La terre s'entrouvre et il en jaillit
une source dont l'eau passait pour miraculeuse. Mais le site n ' a pas été
c h r i s t i a n i s é , bien q u ' i l se t r o u v e à p r o x i m i t é d ' u n e r o u t e de p è l e r i n s
menant à Saint-Nicolas-de-Port. (26)

     Autre e x e m p l e : la source Sainte M e n n e . Entre Vannes-le-Châtel et
Blénod-lès-Toul, se trouvait autrefois une chapelle dédiée à sainte Menne,
sœur de sainte Libaire et de saint Elophe. La légende fut rapportée par
l'instituteur de Blénod-lès-Toul en 1889. Charlemagne passe par là lors
d'une partie de chasse. C o m m e il a soif, il frappe la terre de la pointe de
son épée et profère un mauvais jeu de mots : « Menne, menne, amène-nous
de l'eau ». Aussitôt, une source abondante jaillit. Plus de cheval, mais le
sourcier Charlemagne a fait merveille, une fois de plus.

       La légende existe également en Allemagne. L'église de Gudensberg
(en Hesse) possède une pierre à empreinte où le cheval de Charlemagne
aurait laissé jadis la marque de son sabot. Il en aurait fait jaillir une source.
Autre présence carolingienne dans le folklore allemand : au confluent de la
D i e m e l et de la Weser, sur une colline, se trouve une roche présentant
l'empreinte du bras de l'empereur. (27)

      Une telle récurrence de légendes topographiques conduit à une obser-
vation : les motifs relevés laissent apparaître une stéréotypie légendaire qui
pourrait bien être la trace d ' a n c i e n s mythes préchrétiens. Tout se passe
comme si, en des endroits très différents, la configuration particulière d'un
site (avec pierre, fontaine et arbres) avait suscité une explication légen-
daire de son origine. Toutefois, ce n'est pas le site qui a créé la légende,
c'est plutôt la légende qui a créé le site. Le mythe possède évidemment sa
part de responsabilité dans cette création. On en conclut alors que la visite
supposée de Charlemagne à Rabas ne doit plus se poser en termes de vrai-
semblance historique mais bien en termes de symptôme légendaire. Cette
présence d ' u n e légende fait signe et fait sens dans un scénario mythique
aux significations ethnologiques.

         Les origines mythiques du cheval sourcier ne sont plus à démontrer.
Dans ses Métamorphoses            (V, 262), Ovide mentionne la source Hippocrène
que le cheval Pégase né du sang de sa mère fait jaillir sous son sabot.
Cicéron évoque l'empreinte géante du cheval de Castor (frère de Pollux)
lors de son apparition pendant la bataille du lac Régille r e m p o r t é e par
Postumius. (28) La mythologie védique raconte comment Mithra fait jaillir
une source d'un rocher. (29) La mythologie celtique n'ignore pas non plus
le cheval sourcier. Celui-ci appartient à un dieu ou un personnage de l'autre
monde. Un texte irlandais intitulé L'Inondation           du Lough Neagh raconte
q u ' O e n g u s , fils du Dagda (le dieu bon), remet un cheval fée à des visiteurs.
Il leur prescrit de toujours faire marcher ce cheval au pas. Mais les posses-
seurs du cheval négligent ce conseil et une fontaine magique surgit sous les
pas de l'animal. On peut aussi songer à la légende du cheval Bayard auquel
la tradition médiévale puis populaire attribue des faits semblables. (30)

      D a n s le cas de R a b a s , on se trouve, à l ' é v i d e n c e , devant un récit
mythique de fondation. L'invention de la source par le cheval se redouble
de l'édification d'une chapelle par son impérial cavalier. La source païenne
a certainement précédé la chapelle chrétienne, cette dernière ayant proba-
blement eu pour fonction de christianiser un site cultuel païen. Il n ' y avait
aucune raison d'édifier une chapelle dans un lieu si écarté sinon pour
recouvrir de piété chrétienne de vieilles pratiques superstitieuses qui se
perpétuaient à cet endroit.

Mythe, site et rite

      En fait, prise isolément, la tradition carolingienne de Rabas ne peut
relever que d ' u n e tradition historique invérifiable ou de la belle légende
invraisemblable. C ' e s t l'attitude qui a prévalu j u s q u ' a u j o u r d ' h u i . Il y a
toutefois une autre voie à explorer: celle du folklore comparé. Les sites
légendaires constituent de véritables complexes mythiques qu'il convient
d'analyser comme tels. Ils peuvent révéler des sites plus anciens (préhisto-
riques) qui ont pu entretenir un lien avec la religion m é g a l i t h i q u e . Un
mythe s'inscrit toujours dans un site auquel sont associés des rites (chré-
tiens ou profanes, voire les deux à la fois).

       La rencontre de la source et de la pierre à légende est en soi significa-
 tive. En rajoutant l'arbre (Béfey, nom du village voisin nous renvoie au
fagus « hêtre », (31) on obtient la triade pierre, source et arbre qui est
 caractéristique d'un site druidique. Un bon exemple se trouve dans la forêt
 de Brocéliande où une fontaine (celle de Barenton) est associée à un per-
 ron mégalithique et à des pins. Pour le celtisant C. Guyonvarc'h, « toute
 forêt celtique, quelle qu'elle soit et où qu'elle soit, est en principe un sanc-
 tuaire. C'est le nemeton, d'un mot qui, dans la Gaule méridionale, ne ser-
 vait plus q u ' à traduire le latin templum » (32). A Rabas, la présence d'un
 toponyme en fagus (Fey) à côté d'un site cultuel (sans doute antérieur au
 christianisme) n'est pas étonnante. On sait que le hêtre était un arbre sacré
 chez les Celtes puisque l'on possède une inscription à un Deo Fago avec
 des motifs végétaux dans le Comminges. A R o m e se trouvait le Fagutal,
 sanctuaire dédié à Jupiter, et en Thessalie était adoré un Zeus Phégos (33).
 Dans les cultes antiques, p r i n c i p a l e m e n t d ' o r i g i n e i n d o - e u r o p é e n n e , le
 hêtre se présente bien comme un arbre sacré, au même titre que le chêne.
 Béfey fait donc bel et bien partie du décor mythique de Rabas.

          Par ailleurs, c'est probablement une erreur d'isoler le site de Rabas et
de le considérer dans sa singularité purement locale. Il existe d'autres sites
comparables dans d'autres régions françaises, souvent avec des rites sem-
b l a b l e s , des l é g e n d e s i d e n t i q u e s , voire des n o m s a n a l o g u e s . U n e telle
redondance n'est pas une simple coïncidence. L'explication paraît être la
suivante: on se trouve devant des sites cultuels dont l'importance aurait
été marquée d'une légende significative car récurrente. C'est précisément
cette récurrence qui en modèle le caractère mythique.
En Saintonge par exemple, Robert Colle a rapporté l'histoire d ' u n e
autre fontaine de Charlemagne qui ressemble étrangement à celle de Rabas :

      Il s'agit bien sûr d'une légende, Charlemagne n'ayant peut-être jamais mis les
      pieds dans notre région. Sur la route de Marennes, entre Saint-Sornin et Saint-
      Just, on montrait encore il y a quelques années les « traces des pas du cheval de
      Charlemagne ». Je les ai vues avant qu'elles ne disparaissent sous le goudron de
      la route : ce sont les fossiles de coquillages, les hippurites, qui ressemblent à des
      sabots de cheval.

     Au village de Villeneuve, non loin de Montierneuf, rapporte Garnier, existait
     une « fontaine de Charlemagne ». On raconte que le monarque, parti à la pour-
     suite des Sarrasins, campait là avec toute son armée et que ses soldats man-
     quaient d'eau. Comme il priait le Seigneur, son cheval frappa du pied et fit
     jaillir du sol une source dont l'eau merveilleuse faisait guérir rapidement les
     blessures.

      Par la suite, on oublia la source et ses vertus curatives. Or, un jour, un chasseur
      nommé Gauvin blessa une biche. Il partit à sa poursuite et la retrouva près d'une
      fontaine. La bête buvait de l'eau et fut aussitôt guérie. Le chasseur goûta à son
      tour l'onde rafraîchissante et sentit immédiatement toute sa fatigue s'envoler.

      [Le seigneur de Marennes gravement malade est guéri par Gauvin grâce à une
      fiole d'eau venant de la fontaine. Pour le récompenser, le seigneur lui accordera
      le droit de garder la source afin qu'il puisse guérir les malades et blessés qui
      viendraient y chercher remède.]

      On oublia de nouveau la fontaine miraculeuse: Gautier prétend qu'elle fut
      détruite par la construction d'un canal. En fait, elle existe toujours près de
      Saint-Agnant, je l'ai retrouvée : elle alimente en eau des jardins maraîchers dont
      les légumes doivent être particulièrement délicieux et bénéfiques. (34)

        Paul Sébillot (35) rapporte une autre série de légendes - généralement
caniculaires (36) - racontant des inventions de sources parfois par des
héros (comme Roland) mais le plus souvent par des saints. Lorsque l'ar-
mée de saint Martin traversait le territoire d'Ancerville (Meuse), ses sol-
dats souffraient de la soif. Le saint commanda à son cheval de frapper la
terre et sous son sabot se mit à sourdre la fontaine abondante qui coule
encore au Pré Saint-Martin (37). Ailleurs e n c o r e : tandis que saint Martin
prie le ciel pour obtenir de l'eau, son cheval frappe un rocher d'un violent
coup de pied qui y reste empreint et il en sort une fontaine qui existe près
de Druyes (Yonne). A Clion (Loire atlantique), même miracle pour le che-
val du m ê m e saint. (38) Pour la France, le témoignage écrit le plus ancien
d ' u n équidé laissant son e m p r e i n t e sur une pierre et faisant jaillir u n e
                                                        e
source se trouve chez Grégoire de Tours au VI siècle. De passage à Nieul-
lès-Saintes, l'âne de saint Martin imprime la marque de son sabot sur une
pierre, à côté d ' u n e source que l ' a n i m a l a fait surgir. (39) Il existe par
ailleurs des Pas saint Martin dans de très nombreuses régions françaises et
même en Belgique. Dans sa fonction de sourcier, saint Martin a ainsi des
émules : saint Julien, saint Jacques, saint Georges, saint Mathurin, etc. Le
saint change parfois de nom mais l'histoire reste toujours la même.

      Le positivisme moderne condamne le folklore où il ne voit que super-
stitions et fadaises galopantes. Il oublie qu'avant de relever d'un cadastre
foncier la terre relevait d'un plan d'occupation sacré des sols dont on entre-
voit aujourd'hui l'importance pour l'étude des cultures dites traditionnelles.

Le nom de Rabas

       Un mythe se conserve souvent dans des noms. L'onomastique et la
toponymie sont de véritables conservatoires des traditions mythiques. Le
nom de Lyon, capitale des Gaules, contient celui du dieu panceltique Lug
(Lug-dunum) dont la mythologie souligne la fonction souveraine. Le nom
de Rabas n ' a pas la même notoriété mais suscite quand m ê m e l'intérêt. Il
faut d'abord prêter attention aux différentes formes attestées du nom dans
                                                  e
les t e x t e s é c r i t s d e p u i s le X V s i è c l e (il n ' y a p a s d ' a t t e s t a t i o n p l u s
ancienne). (40) Ces formes transcrites sont le reflet d ' u n e prononciation
changeante, le copiste médiéval écrivant généralement ce qu'il entend :

       Ralbas (1405, dans un document relatif à l'abbaye de Villers, liasse
       Rabas)
       Capella beatae Mariae de Rabay (1410, abbaye de Saint-Arnould)
       Ravay (1437, chronique du doyen de Saint-Thiébault)
       Notre Dame de Rabay (1488, Journal de Jean Aubrion)
       Notre Dame de Raibay (1511)
       Notre Dame de Raba
       Ribba (1610)
       Roba (1756)
       Raibay (en patois)
       Rebach (en allemand)

      On écartera l'étymologie de Rabas proposée par l'abbé Cazin d'après
le seul nom germanisé Rehbach (« ruisseau des chevreuils »). Elle est pho-
nétiquement indéfendable et résulte de la germanisation artificielle des
noms de lieux français pendant l'occupation allemande. (41)

          Le français dialectal ouvre une première piste pour c o m p r e n d r e le
terme. En l'état actuel, l'explication reste toutefois hypothétique. En fran-
                   e
çais du X V I siècle, le mot rabat se trouve chez Rabelais. L'un des titres
f a c é t i e u x d ' o u v r a g e s a p p a r t e n a n t à l ' a b b a y e de S a i n t - V i c t o r e s t : La
Mommerie des Rebatz et Lutins. (42) C o m p r e n d r e : « la m a s c a r a d e des
esprits follets et des lutins ». Le dictionnaire de la langue française du sei-
zième siècle d'E. Huguet glose le mot rabast en esprit follet, lutin (43) avec
cet exemple daté de 1586, où Pierre Le Loyer, conseiller du roi au présidial
d'Angers, rapporte : « Quelquefois aussi ès maisons particulières on oit des
bruits et tintamarres q u ' y font les Rabbats, Lutins ou Esprits follets ».

      En dialecte solognot, les rabâteux sont « des gens peu scrupuleux qui
faisaient peur aux gens, disent maintenant les esprits forts. Ils montaient
dans les greniers la nuit, faisaient les revenants et en profitaient pour voler
le blé. Les gens le savaient mais ils avaient peur quand m ê m e et n'osaient
pas aller les surprendre ». (44) Le rabast, rabat est donc un lutin, un esprit
follet. Il est, comme les korrigans bretons, un être de l'autre monde. Il était
réputé faire du tapage, autrement dit rabater. Selon O. Bloch et W. von
Wartburg, le verbe rabâcher serait un s y n o n y m e de l ' a n c i e n rabaster
(attesté vers 1175) puis rabater « faire du tapage ». L'étymon serait d'ori-
gine pré-romane ou germanique. (45) On se demande si cet esprit plus ou
moins souterrain q u ' e s t le rabat ne conduirait pas alors vers le raboliot
solognot, le lapin de garenne qui creuse des terriers et qui vit donc, lui
aussi, dans le monde souterrain. La rabouillère est le lieu où le lapin de
garenne creuse son terrier (lequel lapin se dit en anglais rabbit). Ce lien
avec le monde souterrain est peut-être suggestif car il conduira à envisager
plus loin l'aspect archéologique du site de Rabas. On comprendrait assez
mal cependant que le nom d'un lutin ou d'un feu follet ait pu être associé à
celui de la Vierge. Il faut donc envisager une autre explication.

     Le nom de Rabas pourrait, par l'intermédiaire du rabat, évoquer la
rage (*rabia, en latin vulgaire). (46) Au Moyen Age, on attribue l'origine
de certaines maladies à des êtres malfaisants, généralement des revenants
ou des êtres de l'autre monde (esprits incubes ou succubes). C'est le cas
pour un certain Roba mentionné dans la Légende dorée et qui est possédé
par des démons au point de devenir enragé. (47) La rage est transmise par
des animaux infestés qui possèdent de ce fait un statut diabolique: l'assi-
milation de la rage et du rabat aurait pu être facilitée par une ancienne
homonymie remontant au latin vulgaire (où Rabas et *rabia devaient être
proches).

           La toponymie locale appuierait peut-être cette explication. Pour arri-
ver à Notre-Dame de Rabas, on passe par le village de Saint-Hubert. Or
saint Hubert est un éminent guérisseur de la rage. (48) Lors du pèlerinage
(au lundi de Pentecôte) avait lieu (encore dans les années 1960) la bénédic-
tion des enfants. Ceux-ci passaient devant le prêtre qui posait l'extrémité
de son étole sur leur tête. On sait l'importance de l'étole de saint Hubert
dans les rites de protection contre la rage. C'est vraisemblablement pour
protéger les enfants de la rage ou de toute autre influence maligne comme
la folie par exemple que le prêtre procédait à cette bénédiction (à cet effet,
l ' é t o l e de s a i n t H u b e r t est b i e n p o s é e sur la t ê t e ) . L a p é r i o d e de la
Pentecôte est d ' a i l l e u r s m a r q u é e , un peu partout, par des rites apotro-
païques contre la rage et la folie. Le pèlerinage de Rabas a lieu le lundi de
Pentecôte. Or, le lendemain, à Echternach au Luxembourg, la procession
dansante en l'honneur de saint Willibrord mime des phénomènes de pos-
session ou une danse de Saint-Guy qui s'apparente à une folie. Les deux
pèlerinages auraient ainsi une fonction apotropaïque : il s'agissait par l'in-
termédiaire de rites christianisés de se protéger de maladies graves que
l'on attribuait toujours à des influences malignes de créatures ou d'esprits
malfaisants. (49) L'autre moment important du pèlerinage de Rabas était la
procession circulaire de la chapelle j u s q u ' à la fontaine. U n e fois arrivé
devant la fontaine, le célébrant procédait à une aspersion d ' e a u bénite,
c o m m e p o u r un rite d ' e x o r c i s m e . (50) Est-il invraisemblable de penser
alors que le rabat était un esprit qui hantait les fontaines et que le christia-
nisme s'efforçait d ' e x o r c i s e r ? (51) Ensuite la procession se reformait et
revenait vers la chapelle. Le rite ambulatoire visait ainsi à neutraliser les
effets supposés maléfiques de la fontaine et à mettre celle-ci sous la pro-
tection de la Vierge. L'espace païen est c o m m e annihilé par le rite chrétien.
Il est mis sous tutelle, puisque la procession place symboliquement par le
mouvement de la marche le lieu païen sous l'autorité de la Vierge. On ima-
gine alors q u ' à l'instar de la « colline inspirée » de Sion-Vaudémont (52),
cette forêt inspirée qu'est Rabas a probablement vu se succéder des cultes
animistes (néolithiques) puis druidiques (celtiques) avant de devenir un
lieu de p è l e r i n a g e chrétien dédié au culte de la Vierge, héritière de la
déesse-mère des cultes préchrétiens.

          C'est toutefois une enquête comparée de tous les noms de lieux pho-
nétiquement apparentés à Rabas qui est susceptible de donner les meilleurs
r é s u l t a t s . L e n o m de R a b a s e x i s t e en F r a n c e c o m m e t o p o n y m e a v e c
diverses variantes mais avec un environnement légendaire, géographique
ou rituel qui rappelle souvent celui de Rabas. Les exemples qui suivent ne
sont pas exhaustifs.

      R E B A I S : « La paroisse de Verdelot, au canton de Rebais, possède
aussi sous le titre de la Bonne Dame de Pitié, une Vierge renommée, haute
d'un mètre douze centimètres, sculptée dans un seul bloc de noyer, avec le
Christ sur ses genoux. Sauf le dos du fauteuil où elle est assise et qui a été
brisé, la Révolution l'a respectée. Elle est encore en grand honneur. [...]
Les pèlerins y accourent avec confiance, pendant le carême et au mois de
septembre ». (53) N o t r e - D a m e - d e - R a b a s possède é g a l e m e n t une vierge
sculptée en b o i s . On notera la p r o x i m i t é des n o m s ( R e b a i s , R a b a s ) et
l'identité des rites autour de la Vierge, en dépit de l'éloignement géogra-
phique des deux sites. L'un n ' a pas pu être influencé par l'autre.

     RABUT. A Donlieux, en Haute-Loire, existe un lieu-dit Rabut mar-
qué par une croix dont la base est un menhir avec l'empreinte d'un Pied du
diable.
R A B A N E L . P r è s de S a i n t - G u i l h e m - l e - d é s e r t ( H é r a u l t ) se t r o u v e
l ' a b î m e de Rabanel, près de Notre-Dame-du-Suc où l'on rencontre cinq
dolmens (dont une Peyre Martine) avec une croix de carrefour plantée sur
un ancien menhir.

          RABIER. A Magné dans la Vienne existe une Fontaine de Puyrabier
qui est la source d ' u n e rivière appelée Belle. Un village de la Charente se
nomme Theil-Rabier (où Theil semble en rapport avec le nom du tilleul).
En Seine-et-Marne, à Saint-Just, au lieu-dit Plessis-Hénaut dont le patron
est saint Hubert, il y avait jadis une chapelle (aujourd'hui disparue) consa-
crée à Notre-Dame-de-chêne-Rabier. (54) On se demande si cette dénomi-
n a t i o n n ' a u t o r i s e p a s à r e c o n n a î t r e en rabier un a n c i e n n o m d ' a r b r e .
N'honore-t-on pas sur certains de ces sites une Vierge en bois sculpté ?

      On pourrait relever encore bien d'autres exemples. Visiblement, le
cas de Rabas n'est pas isolé. Il témoigne d ' u n contexte et d'un site que
l'on pourra qualifier de mythiques dans la mesure où convergent sur un
lieu prédestiné des éléments rituels (pèlerinages), légendaires et probable-
ment calendaires (liés à des moments particuliers de l'année) témoignant
d'anciennes liturgies païennes plus ou moins christianisées.

      La conclusion de cette brève excursion en pays messin pourrait être
archéologique. Il semble en effet que le site de Rabas soit ancien, bien plus
ancien que le Moyen Age qui le pare d'une chapelle et d'une légende caro-
lingienne. On ne soulignera jamais assez l'importance de la continuité des
mythes et des rites sacrés sur des sites prédestinés qui ont généralement
représenté à des époques antiques soit des ressources naturelles particuliè-
rement précieuses à la vie collective soit des sites sacrés qui, à l'instar de
la colline inspirée de Sion, sont porteurs d ' u n e spiritualité antérieure au
christianisme. Autrement dit, la stratigraphie peut s'appliquer autant à la
géologie q u ' à l'ethnologie ou à l'histoire.

      Le sous-sol de Rabas n ' a pas encore livré tous ses mystères. La pré-
sente étude s'arrêtera sur l'hypothèse d'une stratigraphie du site. Les élé-
ments rituels et légendaires autour de Rabas et leur c o m p a r a i s o n avec
d'autres éléments semblables associés à d'autres sites possédant un nom
comparable conduisent à soupçonner plusieurs strates dans l'histoire de
Rabas depuis une occupation au moins celtique et peut-être néolithique des
lieux. L'ethnologue laisse alors l'enquête à l'archéologue.

     Un autre site avec un nom proche de Rabas incite à penser que cette
enquête pourrait être fructueuse. Bretteville-le-Rabet se trouve dans le
Calvados, dans la plaine de Caen, au cœur de sites néolithiques d'exploita-
tion du silex d'environ 60 hectares. On y a trouvé des pics et des haches
ainsi que des résidus de pierre de taille. La fouille du site en 1955 permit
aussi de découvrir un puits car les h o m m e s du néolithique exploitaient des
mines de silex à environ deux mètres de profondeur. Les puits s'ouvraient
à la surface de la terre par une cheminée cylindrique d ' u n mètre de large.
Des pioches en bois de cerf servaient à creuser la terre. Leur datation au
radiocarbone renvoie entre 4 9 0 0 et 3900 avant Jésus-Christ. (55) Par ses
éléments traditionnels, le site de Rabas ne serait-il pas, c o m m e Bretteville-
l e - R a b e t , un a n c i e n site n é o l i t h i q u e ? S e u l e , u n e fouille a r c h é o l o g i q u e
m é t h o d i q u e p e r m e t t r a de le d i r e . C a r en ces q u e s t i o n s c o m m e en b i e n
d'autres, seule la terre se souvient.

                                                    NOTES

 1.    Cette frontière coupe en deux le département de la Moselle. Autour de Rabas se
       trouvent des toponymes d'origine romane (suffixe -acu: Vigy, Béfey) et des topo-
       nymes d'origine germanique (en -ach : Bettnach ou en -ing : Anzeling).
 2.    La chapelle est à mi-distance des deux villages et à 3 0 0 mètres environ (en direc-
       tion de Béfey) de la Fontaine de Charlemagne.
 3.    Charlemagne serait effectivement passé à Thionville en 7 7 2 , 7 8 2 , 7 8 3 et 8 0 6 mais
       on ne possède aucune preuve historique de sa venue à Rabas.
 4.    WESTPHALEN (R. de), Petit dictionnaire             des traditions populaires         messines, Metz,
       Le Lorrain, 1 9 3 4 , col. 6 2 5 - 6 3 2 .
 5.    SAINTYVES (P.), Corpus de folklore             préhistorique,      Paris, Nourry, 1 9 3 4 - 1 9 3 5 ( 2
       volumes).
 6.    Elles portent aussi le nom de pierres à écuelles, pierres à fossettes, à bassins ou a
       cupules. Voir REINACH (S.), Cultes, mythes et religions, Paris, Leroux, t. 3 , 1 9 1 3 :
       « Terminologie régionale et scientifique des monuments mégalithiques » (p. 4 3 4 -
       4 4 8 ) . Du même auteur dans le même volume voir aussi: « Les monuments de
       pierre brute dans le langage et les croyances populaires » (p. 3 6 4 - 4 3 3 ) .
 7.    Pour le domaine alpin: Rupestres. Roches en Savoie. Gravures. Peintures.                        Cupules
       (catalogue d'exposition), Chambéry, Musée savoisien, 1 9 9 0 .
 8.    CAZIN (Abbé), La chapelle et le pèlerinage de Notre-Dame de Rabas. Notice histo-
                                              re
       rique, Metz, Béha, 1 8 8 4 ( l édition), p. 1 2 . L'abbé Jean-Pierre-Désiré Cazin
       ( 1 8 4 0 - 1 9 2 6 ) fut archiprêtre de Vigy et, à ce titre, eut la charge d'organiser le pèle-
       rinage de Rabas.
 9.    WESTPHALEN (R. de), Petit dictionnaire              des traditions populaires        messines, Metz,
       1 9 3 4 , col. 6 2 6 .
10.    Sur la chapelle: P. Lesprand, La chapelle de Rabas, Etudes d'histoire    ecclésias-
       tique messine offertes à Monseigneur Willibrord Benzler, Guénange, 1 9 0 2 , p. 6 5 -
        119.
11.    CAZIN (Abbé), La chapelle et le pèlerinage de Notre-Dame de Rabas. Notice histo-
                                                                   E
       rique, Moulins-lès-Metz, chez l'auteur, 1 9 2 4 ( 2 édition), p. 1 2 .
12.   Histoire de Metz par les Bénédictins, t. 2 , p. 1 3 9 .
13.   WALTER (Ph.), Géographie et géopolitique dans la légende d'Hervis de Metz,
      Olifant, 1 3 , 1 9 8 8 , p. 1 4 1 - 1 6 3 .
14.   Il n'existe plus de document original sur cette fondation. Toutefois, une bulle
      papale qui existait encore en 1 4 0 5 attribuait bien la consécration de Rabas à Léon
      IX. Elle fut transcrite en 1 6 0 3 par un moine de Saint-Arnould. Voir Abbé Cazin,
      La chapelle et le pèlerinage de Notre-Dame de Rabas. Notice historique, Moulins-
                                 E
      lès-Metz, 1 9 2 4 ( 2 édition), p. 2 8 - 2 9 (avec la transcription du document).
15.   DROCHON (J. E.), Histoire illustrée des pèlerinages français de la Très Sainte
      Vierge, Paris, Pion, 1 8 9 0 . Pour le diocèse de Metz, p. 1 1 7 9 - 1 1 8 8 .
16.   Journal de Jehan Aubrion, éd. Loredan Larchey, Metz, Blanc, 1 8 5 7 , p. 1 9 8 - 1 9 9 .
17.   Reproduction de cette Madone de Rabas dans la revue Nos Traditions, t. 1, 1 9 3 8 ,
      p. 1 3 1 ainsi que dans: Le chemin des reliques (catalogue d'exposition), Metz,
      Musée municipal, 2 0 0 0 . Sur les statues médiévales de la Vierge en pays messin,
                                                                       ER
      voir aussi le catalogue de l'exposition du Musée de Metz (1 juillet - 1 8 septembre
      1 9 8 3 ) : Sculptures religieuses régionales du Moyen Age et de la Renaissance,
      Metz, Musée d'art et d'histoire, 1 9 8 3 ,
18.   CAZIN (Abbé), La chapelle et le pèlerinage de Notre-Dame de Rabas. Notice histo-
                                                           E
      rique, Moulins-lès-Metz, chez l'auteur, 1 9 2 4 ( 2 édition), p. 6 3 - 6 4 .
19.   WESTPHALEN (R. de), Petit dictionnaire        des traditions populaires    messines, Metz,
      1 9 3 4 , col. 6 2 9 - 6 3 0 .
20.   SÉBILLOT (P.), Le folklore de France. T. 4. Les eaux douces, Paris, Imago, 1 9 8 3 ,
      p. 7 6 - 8 2 .
21.   SÉBILLOT (P.), ibid.
22.   SAINTYVES (P.), « Le transfert des maladies aux arbres et aux buissons », Bulletin
      de la société préhistorique française, 1 5 , 1 9 1 8 , p. 2 9 6 - 3 0 0 .
23.   VEBER (E. L.), Villers-Bettnach, Metz, sans éditeur ni date, p. 3 7 . La tradition
      décrite ici est celle des croisettes qui ont lieu, autour de la fête de la croix ( 3 mai),
      du dimanche des Rameaux à la Pentecôte: VAN GENNEP (A.), Le folklore français.
      Cycles de mai, de la Saint-Jean, de Vété et de Vautomne, Paris, Laffont, 1 9 9 9 , t. 2 ,
      p. 1 3 4 6 - 1 3 6 9 . Pour des attestations médiévales: WALTER (Ph.), La mémoire du
      temps, Paris, Champion, 1 9 8 9 , p. 3 1 5 .
24.   WALTER (Ph.), Mythologie chrétienne. Fêtes, rites et mythes du Moyen Age, Paris,
      Imago, 2 0 0 3 . Traduction espagnole: Mitologia cristiana. Fiestas, ritos y mitos de
      la Edad Media, Buenos Aires, Paidos, 2 0 0 5 , 2 0 4 p.
25.   Sur Charlemagne mythique: DONTENVILLE (H.), Histoire et géographie                mythiques
      de la France, Paris, Maisonneuve et Larose, 1 9 7 3 , p. 1 5 8 - 1 6 4 .
26.   MAUD'HUY (R.), La Lorraine des légendes. Contes, croyances                et légendes de la
      Lorraine, Paris, France-Empire, 2 0 0 4 , p. 2 9 1 .
27.   MAUD'HUY (R.), La Lorraine des légendes. Contes, croyances                et légendes de la
      Lorraine, Paris, France-Empire, 2 0 0 4 , p. 2 9 5 .
28.   Cicéron, La nature des dieux, trad. de C. Auvray-Assayas, Paris, Les Belles
      Lettres, 2 0 0 2 , livre 2 , chapitre 2 et livre 3 , chapitre 5 .
29.   SAINTYVES (P.), « Le thème de l'eau jaillissant du rocher dans le culte de Mithra »,
      Revue des traditions populaires, 2 4 , 1 9 0 9 , p. 4 0 1 - 4 0 6 .
30.   DONTENVILLE (H.), Les dits et récits de mythologie française,         Paris, Payot, 1 9 5 0 ,
      p. 2 0 3 .
31.   Béfey pourrait s'expliquer alors par *bel -fagu (le beau hêtre). C'est déjà l'étymo-
      logie proposée par H. Hiegel, Dictionnaire étymologique des noms de lieux du
      département de la Moselle (en collaboration avec Ch. Hiegel), Sarreguemines,
      1986, p. 53.
32.   GUYONVARC'H ( C ) , « Nemeton, la forêt sanctuaire », dans: Brocéliande      ou l'obs-
      cur des forêts, La Gacilly, Artus, 1990, p. 35.
33.   DELAMARRE (X.) {Le vocabulaire indo-européen, Paris, Maisonneuve, 1984, p. 168)
      note toutefois que le grec phegos est « une sorte de chêne » car le hêtre n'existe
      pas en Grèce, ce qui met le hêtre dans le voisinage mythique du chêne.
34.   COLLE (R.), Nouveaux contes d'Aunis et de Saintonge, La Rochelle, Rupella, 1992,
      p. 119-120.
35.   SÉBILLOT (P.), Le Folklore de France, Imago, 1983, p. 24 et suiv.
36.   Sur la mythologie de la canicule : WALTER (Ph.), Canicule. Essai de mythologie sur
      Yvain de Chrétien de Troyes, Paris, SEDES, 1988.
37.   Monographie d'Ancerville par l'instituteur, 1889. Cité par Maudhuy, p. 204.
38.   SÉBILLOT (P.), Le Folklore de France. T 7: Les monuments, Paris, Imago, 1983,
      p. 25. Du même auteur: Le Folklore de France. T2: La terre et le monde souter-
      rain, Paris, Imago, 1983, p. 195-246 (Les empreintes merveilleuses).
39.   « In illius enim fontis ore est lapis in testimonium, qui vestigium retinet aselli
      huius super quem sanctus sedit antistes » Grégoire de Tours, De miraculis sancti
      Martini, livre 4, ch. 31 dans Migne, Patrologie latine, t. 71, p. 1003.
40.   BOUTEILLER (Ch. J. E. de), Dictionnaire topographique de l'ancien département      de
      la Moselle, Paris, Imprimerie nationale, 1874, notice Rabas.
41.   L'abbé Cazin {La chapelle et le pèlerinage de Notre-Dame de Rabas, Metz, 1884,
      p. 3 et 4) cite des étymologies encore plus incroyables proposées avant lui.
      L'étymologie en Rehbach est reprise par H. Hiegel, Dictionnaire étymologique des
      noms de lieux du département de la Moselle (en collaboration avec Ch. Hiegel),
      Sarreguemines, 1986, p. 276 et l'article du même auteur: Les lieux-dits sur les
      mammifères sauvages dans le bailliage d'Allemagne, Annuaire de la société d'his-
      toire et d'archéologie de la Lorraine, 1973, p. 22-23. On notera que la forme sup-
                   e
      posée du XII siècle (Rebach) qui sert de base à cette explication est d'authenticité
      douteuse (germanisation artificielle ?) et elle est totalement atypique par rapport à
      la série des formes romanes qui lui succèdent.
42.   Œuvres de François Rabelais, édition d'A. Lefranc, tome troisième, Pantagruel,
      Paris, Champion, 1922, ch. VII, p. 94. La note 194 cite un texte d'époque où il est
      question d'un « rabat que toutes les nuicts rodoit par les rues qu'ils appelloient le
      roy Hugon ». Le mot était encore usuel dans les patois d'Anjou et de Poitou au
                   e
      début du XX siècle. Il a parfaitement pu exister dans d'autres régions.
43.   HUGUET (E.), Dictionnaire de la langue française du seizième siècle, Paris, Didier,
      1965, p. 302. Voir aussi: F. Godefroy, Dictionnaire de l'ancienne langue fran-
                                         e      e
      çaise et de tous ses dialectes du IX au XV siècle, t. 6, p. 527-528.
44.   EDEINE (B.), La Sologne. Documents       de littérature   traditionnelle.   T3. Paris,
      La Haye, Mouton, 1975, p. 57.
45.   BIOCH (O.) et WARTBURG ( W . von), Dictionnaire étymologique       de la langue fran-
      çaise, Paris, PUF, 2002 (collection Quadrige), p. 528.
46.   BIOCH (O.) et WARTBURG ( W . von), Dictionnaire étymologique       de la langue fran-
      çaise, p. 530. Le latin classique donne la forme rabies.
47.   VORAGINE ( J . de), La Légende dorée, trad. de J. B. Roze, Paris, Garnier-
      Flammarion, 1967, t. 1, p. 328-329 (Vie de saint Pierre, martyr).
48.   GAIDOZ (H.), La rage et saint Hubert, Paris, Picard, 1887.
49.   On notera le parallélisme de dates entre les deux saints : Hubert est fêté le
      3 novembre et Willibrord le 9, six jours plus tard.
50.   Le pèlerinage est aujourd'hui appauvri dans ses rites essentiels mais l'auteur de
      ces lignes a encore pu assister aux derniers feux de cette tradition pluriséculaire.
51.   L'hypothèse serait d'autant plus séduisante que la rage suscite des réflexes d'hy-
      drophobie. Sur les êtres féeriques qui hantent les sites portant le nom de Rabas, on
      pourra par ailleurs mentionner cette tradition normande. Dans le bois de Rabey,
      près de Quettehou, il y avait un grand chêne surplombant le ruisseau de
      Morsalines. « Pendant la nuit de Noël, le tronc de l'arbre s'ouvre, une dryade
      apparaît et distribue des pièces d'or à pleines mains » (E. Colin, Légendes de
      Basse Normandie. Inventaire communal, Condé-sur-Noireau, Corlet, 1992, p. 141.
52.   BARRÉS (Maurice), La colline inspirée, édition critique de J. Barbier, Sarreguemines,
      Pierron, 1985.
53.   DROCHON (J. E.), Histoire illustrée des pèlerinages français de la Très Sainte
      Vierge, Paris, Pion, 1890, p. 1257. Voir aussi: LECOTTÉ (R.), Recherches sur les
      cultes populaires   dans Vactuel diocèse de Meaux (Seine-et-Marne),       Paris,
      Mémoires de la Fédération folklorique d'Ile-de-France, 1953, p. 82. Verdelot,
      archiprêtré de Coulommiers.
54.   LECOTTÉ (R.), Recherches sur les cultes populaires dans l'actuel diocèse de Meaux
      (Seine-et-Marne), Paris, Mémoires de la Fédération folklorique d'Ile-de-France,
      1953.
                                                                                e
55.   Etudiant le culte de saint Guinefort, guérisseur d'enfants depuis le XIII siècle, en
      région lyonnaise, J. C. Schmitt conclut son étude par une étude topographique où
      est émise l'hypothèse d'une présence humaine très ancienne sur le site du pèleri-
      nage médiéval: SCHMITT (J. C.), Le saint lévrier. Guinefort, guérisseur d'enfants
                   e
      depuis le XIII siècle, Paris, Flammarion, 1979.
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