La période Camman Une histoire de l'assèchement de l'étang de Marseillette 1900-1942 - Mairie d'Aigues-Vives (Aude)
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Christophe Monié Une histoire de l’assèchement de l’étang de Marseillette La période Camman 1900-1942
Du même auteur : Une histoire de l’assèchement de l’étang de Marseillette : la période Lawless – 1789 - 1844, édité en 2014. Photo de couverture : carte postale de l’usine de Naudy, Narbo Editions, vers 1940
3 Préface Dans les familles de Puichéric ou d’Aigues-Vives on se raconte encore les évènements qui ont émaillé la vie des « anciens ». Ceux-ci ont participé à l’histoire de l’étang de Marseillette. Mais les derniers témoins atteignent le grand âge et il était temps de recueillir leurs souvenirs. Monsieur Monié fait partie de cette génération qui a envie de faire revivre ce passé, persuadé que nous sommes tous ses héritiers. Ce passé doit résister à l’usure du temps, car il met en lumière l’effort que des générations ont fourni avec courage, ingéniosité, persévérance pour faire vivre contre vents et marées un territoire tout d’abord hostile. Cette histoire remonte à la nuit des temps lorsque le Languedoc n’était qu’une vaste étendue lacustre, domaine du sel, des moustiques, des roseaux et de la malaria. Patiemment les hommes l’ont asséchée, irriguée, cultivée et nous ont laissé un territoire dont vous allez suivre l’épopée. Marguerite Camman Puichéric, le 25 novembre 2012
5 Sommaire Préface ........................................................................................................................................ 3 Sommaire .................................................................................................................................... 5 Introduction ................................................................................................................................ 7 Résumé de l’histoire de l’étang de Marseillette......................................................................... 9 1 – L’arrivée des Camman à Puichéric ...................................................................................... 13 2 – L’usine hydroélectrique ...................................................................................................... 17 3 – L’électricité pour les travaux agricoles ............................................................................... 22 4 – Les travaux dans l’étang...................................................................................................... 36 5 – La mise en culture ............................................................................................................... 41 6 – La vie dans l’étang ............................................................................................................... 43 7 – Le départ des Camman ....................................................................................................... 48 Remerciements à : .................................................................................................................... 49 Bibliographie non exhaustive ................................................................................................... 49 Annexe 1 : le labourage électrique ........................................................................................... 51 Annexe 2 : les recensements de 1926 ...................................................................................... 57
7 Introduction Ce livre est le fruit de mes recherches personnelles sur l’histoire de l’étang de Marseillette et de plusieurs heures d’entretiens avec M. Robert Camman et son épouse Marguerite. Robert est le fils de feu Joseph Camman, qui fut propriétaire du domaine de l’étang dans la première moitié du XXe siècle. Quand cela n’est pas précisé, les textes sont issus des notes que j’ai prises lors de nos discussions. J’ai aussi eu la grande chance de me voir confier de nombreuses photos de cette époque : elles sont tellement belles que je les ai toutes intégrées dans ce livre, en respectant leur format d’origine. C’est la première fois que le public peut admirer cette magnifique collection de clichés. J’espère que je saurai vous communiquer toute l’admiration que j’ai ressentie en apprenant tout ce qu’a accompli Joseph Camman pour l’étang de Marseillette. Peut-être que comme moi, vous ne pourrez plus vous promener dans l’étang asséché sans arrêter votre regard sur une rigole, un canal, un pont, une margelle en fer, une vanne d’irrigation, une rangée de cyprès, un champ immergé… toutes ces choses d’apparence ordinaire que je ne remarquais pas auparavant et qui m’évoquent désormais le travail et l’ingéniosité d’un homme soucieux du moindre détail. Car TOUT fut conçu, réfléchi, amélioré, perfectionné, construit pour faire de ce domaine une des exploitations les plus modernes de son temps. Et si seulement vous pouviez vous aussi rêver d’une usine hydroélectrique de Naudy qui retrouverait sa splendeur d’antan ! Christophe Monié Aigues-Vives, le 26 novembre 2012
9 Résumé de l’histoire de l’étang de Marseillette Formation géologique Dès le début de l’Ère Secondaire (il y a 220 millions d’années), le territoire français est sous les eaux, seul le Massif Central est émergé. À la fin de l’Ère Secondaire (il y a 100 millions d’années), les continents commencent à se détacher, la mer effectue de nombreux va-et-vient dans notre région et dépose quantité de sédiments et de sel. Tout au long du Tertiaire (de – 65 à – 2,6 MA) la mer se retire peu à peu, en creusant les vallées et laissant de nombreux bassins inondés. Au Quaternaire (il y a 2,6 MA), pendant les dernières phases glaciaires, les terres sont asséchées (– 100 000 à – 10 000 ans) et le Languedoc-Roussillon est balayé d’Ouest en Est par des vents beaucoup plus violents qu’aujourd’hui et qui modèlent son paysage. Cette érosion éolienne va creuser dans les terrains les plus tendres de nombreuses cuvettes de forme ovale ou arrondie qui deviendront des étangs, dont la superficie totale dépasse les 20 000 ha. Citons Jouarres, Azille, La Redorte, Montady, Mas, Capestang, Vendres, Bages, Sigean… Tous ces étangs sont donc des dépressions éoliennes. Description physique Ainsi s’est formé le futur étang de Marseillette : une cuvette de 2 000 hectares, dont on a calculé que le vent avait déplacé 800 millions de m3 de matériaux ! De nos jours, le sol est encore sablonneux à l’extrémité Est de l’étang : le sable y a été accumulé par le vent contre les coteaux qui délimitent l’étang à Puichéric. Cette dépression éolienne reçoit les eaux d’un bassin versant naturel de près de 10 000 hectares : l’eau arrivée là ne peut plus s’en écouler et forme le plus grand étang de l’Aude. Avant son assèchement, sa profondeur peut atteindre 2 m. L’étang mesure environ 6 km de long sur 4,5 km de large, avec un périmètre de 16 km. Il est partagé entre six communes : Marseillette, Blomac, Puichéric, Rieux-Minervois, Saint- Frichoux et Aigues-Vives. Le Moyen-âge Au Moyen-âge, l’étang est partagé entre les seigneurs locaux et le clergé. C’est une réserve de pêche, il fournit quelques plantes aquatiques et sert de prairie pour les vaches et les moutons en période d’eaux basses. Mais les populations sont décimées par les fièvres paludéennes et le choléra, véhiculés par les eaux saumâtres de l’étang et les moustiques qui pullulent : plusieurs tentatives d’assèchement échouent de 1302 à 1615. Les propriétaires décident finalement de signer deux contrats en 1622 avec la famille Ranchin pour qu’elle assèche l’étang et le rende cultivable. L’assèchement est effectué en 3 ans : on creuse une grande tranchée de 2,5 km environ qui part de l’étang et va jusqu’à l’Aude. Cette rigole de fuite draine les eaux saumâtres de l’étang vers l’Aude en passant par Puichéric : c’est la grande rigole de l’étang. Celui-ci est vidé en 1626.
10 Mais entre les années de procès, les guerres de religion en Languedoc sous Louis XIII, l’épidémie de peste de 1626 à 1632 et les inondations, la rigole n’est pas assez entretenue et l’étang s’inonde de nouveau. La famille Ranchin vient s’installer à Puichéric et fait construire le château de Fonfile (actuel domaine de Ranchin) vers 1645. Le domaine change plusieurs fois de propriétaires, de 1650 jusqu’en 1789. Les plus célèbres sont Roudil de Berriac, maire de Carcassonne et l’ingénieur-astronome toulousain François de Garipuy. Quand le Canal du Midi sera construit à partir de 1665, Pierre-Paul Riquet construira un pont-aqueduc afin d’acheminer les eaux du canal au-dessus de celle de la rigole de l’étang. La Révolution La situation est la même qu’au Moyen-âge : l’étang est complètement inondé et ses eaux stagnantes gangrènent la santé des villageois des alentours. En 1801, l’Irlandaise Marie Anne Lawless rachète l’étang aux précédents propriétaires Howard et Wilkins et s'engage à l'assécher en 4 ans. À 40 ans, elle est la veuve de John Lawless et vient vivre en France avec ses trois enfants. Son mari (décédé en 1795) était un riche marchand en gros de produits lainiers à Dublin. Des rumeurs courent sur des liens entre la famille Lawless et Napoléon. Trois nouvelles rigoles sont creusées et rejoignent la rigole de vidange des Ranchin, l’aqueduc de l’Aiguille est reconstruit, plus large et plus profond. Grâce à tous ces travaux, l’étang est de nouveau asséché en 1808. On découpe l’étang en 20 métairies et on y construit des 18 bâtisses : le Magasin, Boriette, le Jardin, Plagette, la Jonction, Roquetrincade, la Gravière, Naudy, l’Isthme, Ferrand, le Loup, les Saliès, la Thibaude, Fonfile, la Vigne, Touzèle, la Resclause et la Rouquette. Malheureusement, le sel remonte à la surface de nombreuses parcelles et ces efflorescences salines tuent la végétation. Mme Lawless subit et intente de nombreux procès avec les riverains de l’étang, contracte de nombreux prêts pour faire face à un coût des travaux plus importants que prévus et au coûteux mariage de sa fille avec le préfet de palais de Napoléon. En 1824, elle hypothèque lourdement l’étang mais cela ne fait que retarder l’échéance. Comme elle ne peut plus rembourser ses dettes, la Caisse Hypothécaire entame une procédure d’expropriation des 1833. Marie Anne quitte l’étang et décède à Pau en 1838 (à 77 ans). La Caisse Hypothécaire À partir de 1844, la Caisse Hypothécaire est propriétaire de l’étang de Marseillette et décide de mener un ancien projet à bien, que Mme Lawless n’avait pu entamer faute de moyens. Pour laver les terres de son sel, il faut amener de l’eau de l’Aude dans l’étang par un tunnel creusé dans les coteaux qui les séparent. Les travaux débutent en 1849 et l’inauguration du tunnel a lieu en 1851. Il mesure plus de 2135 m de long et a une pente totale de 4,27 m. Grâce aux eaux de l’Aude apportées par le tunnel, l’étang de Marseillette ne manque plus d’eau pour irriguer ses champs et en drainer le sel.
11 Revente de l’étang À partir de 1852, l’étang va connaître un nouveau morcellement : la Caisse Hypothécaire revend le domaine de l’étang, qui va encore changer souvent de propriétaires. Pendant des décennies, l’entretien des canaux est négligé et ils se bouchent, envahis par les limons et les plantes aquatiques. À partir de 1875, de nouveaux associés emploient une très importante main d’œuvre pour nettoyer et assécher de nouveau les parcelles de l’étang. Pour amortir ce coup, ils revendent les terres au fur et à mesure des assèchements. 1000 hectares sont ainsi revendus de 1875 à 1900. De nouvelles métairies sont construites ou des anciennes renommées, elles portent le nom de leurs propriétaires, précédés du mot « Saint » : Saint Marc, Saint-Firmin, Saint-Joseph, Saint-Jean, Saint-André… C’est à cette époque que l’on organise la distribution de l’eau dans toutes les parcelles par un réseau gravitaire : chaque terrain peut être irrigué, voire inondé, par un jeu de vannes qui permet de faire entrer l’eau ou de l’évacuer. La cohabitation de ces multiples propriétaires ne se fait pas toujours sans mal. Vue aérienne de l’étang, mai 2008 (collection personnelle)
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13 1 – L’arrivée L’arrivée des Camman Camma à Puichéric Puiichéric Wielfried Pierre Léon Camman Wielfr Camm (Léon est son prénom pré usuel, uel, com commee souvent souve l’est le troisième isième prénomnom au XIXe siècle), ècle), né en n 1842 à Ginestas (Aude), ude), devient de ent notaire nota à Tarascon rascon ((Bouches uches-du-Rhône). hône). SSes parents Joseph Camman Cam et Marianne Marian Bérar sont nt boul boulangers gers et propriétair opriétaires à Ginestas. inestas. 1 Léon épouse é use en 187474 Marie Seguin eguin, fille de François Fran , célèbre lèbre libraire lib ire imprim imprimeur ur d'Avignon. d'Avig La signature ignature de Léon Camman Cam Léon Camman man et Marie Seguin Seg habite au n°1 de la grand habitent grand’ruee de Ta Tarascon scon (la rue a depuis puis changé cha é de nom nom, peut-êtr être « Cours National N » dans d les ann annéess 1900). Cart postale Carte stale du Courss National, Nation vers ers 1900 Ils ont un premie premier fils ils en 1875, 18 , qui déc décédera era à douze do e ans. Le Leur deuxièm deuxième fils, Pierre, Pier né en 1877, sera s a un brillant bri t profes professeur ur de mathématiqu m ématiques,, avec de nombreu ombreux manuels anuels à son actif. tif. En 187979 nait Marthe, rthe, mmais elle décède dé de en 1881. 1 1. Leur quatrième atrième enfant, nfant, Joseph Jo 1 François ançois SSEGUINN a nota notamment nt édité les œuvres uvres d de Frédéric déric Mistral Mi et d’Alph d’Alphonse Daudet et son on arrière arrièr petit- fils, Pierre BBoulle,, est l’auteur l’a r des célèbres cél s romans roman La planète des d singes (1963) et Le popont de la rivière rivièr Kwaï (1952) 52) adaptés adap tous ous les d deux au ciném éma.
14 (prénommé en fait Jacques Michel Marie Joseph), nait en 1882 à Tarascon. Léon et Marie auront ensuite Paul en 1888, décédé deux jours plus tard, puis Sophie, née en 1890. Joseph devient ingénieur des arts et métiers à l’école de Reims, où il reçoit une formation de modeleur : il fabrique des pièces à partir de plans. Ascendance de Joseph Camman sur 4 générations Vers 1905, Léon envoie son fils Joseph au domaine de l’étang de Marseillette. Joseph a fini ses études d’ingénieur et doit se montrer trop « désœuvré » pour son père : les courses de moto du jeune homme ne doivent pas non plus le rassurer ! Peut-être que Léon Camman pense qu’il est grand temps de trouver un métier à son fils. Joseph va donc résider au château du Magasin, chez un ancien notaire, Me Eugène Félix Sourdon. Vraisemblablement, Léon Camman a des intérêts dans ce domaine : il détient peut- être des parts dans la société de gestion du domaine, ou Félix Sourdon lui doit peut-être de l’argent.
15 Félix Sourdon est le dernier associé vivant de la société Sourdon, Digoin et Brunet qui a racheté l’étang dans sa totalité en 1875 et 1880. Il a revendu d’année en année plus de la moitié des terres de l’étang et il est désormais administrateur de la Société de l’étang de Marseillette (ainsi désigné dans le journal l’Express du Midi du 18 novembre 1911). Il est né dans l’Eure (Haute-Normandie) en 1823, le troisième fils d’une famille de cultivateurs. Célibataire, il va passer ses dernières années au Magasin, au sein de la famille Camman. Il décède en 1912, âgé de 89 ans et il est inhumé dans le caveau familial des Camman à Puichéric. Eugène Félix Sourdon (1823-1912) (collection Camman)2 Au recensement de 1906 à Puichéric, Félix Sourdon et Léon Camman se qualifient de « rentiers » et vivent dans la métairie du Magasin. Extrait du recensement de Puichéric, 1906 (Archives Départementales de Carcassonne, cote 6MD344) Joseph Camman rencontre Henriette Sibade, dont la famille est propriétaire du domaine de Pelletier à Puichéric. Ils se marient en 1908 à Narbonne et après la mort d’Eugène Sourdon en 1912, ils deviennent propriétaires (d’abord en indivision avec Sophie Camman, sœur cadette de Joseph) de 820 hectares sur l’étang de Marseillette. 2 Les photos de la « collection Camman » ont pour la plupart été prises et développées par Mme Henriette Camman.
16 Le domaine est composé de dix métairies : le Magasin, Jonction, le Jardin, Plagette, Boriette (sur la commune de Puichéric), la Resclause (à Saint-Frichoux), l’Isthme, Naudy (à Marseillette), la Vigne (à Rieux-Minervois) et le Loup (sur Aigues-Vives). Les voici mises en évidence sur cette carte d’état-major (avec en vert le domaine de Pelletier) : la Vigne la Resclause Boriette Pelletier le Loup Plagette le Magasin la Jonction l’Isthme le Jardin Naudy Carte d’état-major, 1851 (source : geoportail.fr)
17 2 – L’usine L’usin hydroélectri hydro oélectrique En 1912, 19 Joseph Camman man a l’idée d’util utiliser les eaux eau dee l’Aude quii arriven arrivent du u tunnel tunne avec un débit d de 2 m3 par seconde pour produire de e l’électricité. l’électr Il y construit ruit l'usi l'usine hydro-électrique hydro trique après a s avoir ajouté a uté une retenue d'eau dans les le 300 derniers rniers mètres m res du tunnel el pour éélever ver le niv niveau de 1 mètre m re et donner don er ainsi p plus de débit. débi Il fait notammen tamment venir des de ingénieur ngénieurs allemands, allemand qui lui conseillent nseillent de produire produi de l’électricit lectricité à haute tension t sion (500 (5000 V) afin d de faciliter aciliter son s « transport transp ». D De l'usine ine partira part un réseau de lignes à haute hau tension quii vont al alimenter enter toutes tou s les métairies mé ries en éélectricité. tricité. Joseph Camman près du panneau anneau de contrôle ntrôle de d l’usine sine (collec (collection n Camm Camman)
18 Comme l’atteste l’extrait Comm xtrait de la matrice cadastrale adastrale dee Puiché Puichéric, l'usine ine estt terminée termin et opérationn érationnelle le en 191 1914. On peut liree sur la photo ci--dessous, us, ligne 5,, 1914 / C CN (Construction (Constru Nouvelle) ouvelle) / Naudy audy / u usinee électri électrique. Extrait du cadastre cada de Puichéric Puichér (Archives Archives Départemen artementales de Carcassonne, Carc nne, cote PW 5823) es deux Ces de cartes postales p mo rent que le bâtiment montrent bâtimen est st de tou toute beauté et représente représen un fleuron uron du patrimoin atrimoine industriel ndustriel de l’Aude, même ême si – hélas – il n’est plu lus entretenu retenu de nos jours comme comm il le mériterait… mér Carte rte Postale Post dee l’usine, l’usine éditions ions Bibet Bib Henry,, vers 1925
19 Autre carte Postale de l’usine, Narbo éditions, vers 1940 Quand Joseph est mobilisé en juillet, il laisse à son épouse des instructions écrites pour faire fonctionner l’usine. L’eau de l’Aude prélevée à Marseillette est acheminée sur 2 160 m dans le tunnel. L’eau captée pour produire l’électricité est ensuite évacuée dans le bassin devant l’usine, par une conduite qui sort sous le niveau de l’eau, entre les deux arches que l’on voit sur la façade. Ces deux ouvertures laissent passer le surplus d’eau non utilisé par la turbine. Par la petite fenêtre du bas, les ouvriers suspendent parfois un grand panier en fil de fer au dessus du bassin. Surement à cause des remous provoqués par les différentes sorties d’eau, les poissons sautent hors de l’eau et retombent dans le panier, une pêche facile !
20 Arrivée à l’usine hydroélectr Arrivé h roélectrique, e, l’eau de l’Aude entraine e raine un une turbine urbine de 100 00 CV (située au niveau le plus bas de l’usine). La turbine fait it tourner tourne lee rotor d de l’alternat ’alternateurr du 1er 1 étage parr l’inter l’intermédiaire diaire d’une d e énorm énorme courroie (voir voir photo pho ci-desso dessous,, à droit droite).. Ce rotor roto est constitué nstitué de bobines de cuivre quii doivent être tre traversées trave es par un u faible co courant ant électrique élect continu ntinu p pourr produi produire à l’intér l’intérieur ur de l’a l’alternateur rnateur un champ magnétiq nétique (comme une dynamo namo d de vélo, élo, mai mais les es bobin bobines remplac remplacentt les aimants). aim ts). L’ex L’excitatrice trice mo montée ée sur l’arbre l’ de son rotor ro fournit ce courant continu. ntinu. LLes variations variatio du cham champ magnéti magnétique e provoquées provoq parr la rota rotation n du rot rotor produise produisent le coura courant électrique. électriqu Vue de d l’extérieur térieur en entree le tunnel et l’usine ’usine L’excitatrice L’excita e à gauche gauch et l’alterna l’alternateur à droite, droite avec (collectio Camman) (collection amman) l’énorme l’éno courroie qui descend escend jjusqu’à ’à la turbine tur (collec n Camm (collection Camman)
21 Suivant laa quanti Suivan quantité de coura courant désirée, on utilise le régulateur régulateu (voir pho photos ci-dess dessous) : en tournant tourna un volanvolant, on agit ssur l’orienta l’orientation n des pales p s de la tturbine, ine, lui donnant nnant plus pl ou moins oins de prise se à l’ea l’eau du tunnel. tunne Ainsi, on accélère ccélère ou o ralentit la l turbine, ce qui régule régu du coup up la qu quantité tité d’én d’énergie ie électrique éle e produ produite par l’alternateur. l’alt ateur. L’intéri L’intérieur dee l’usine, l’usine avec ec le régu régulateur eur au premier premier plan, l’alternateur l’ nateur au a fond d (collec (collection Camman) Camman Ainsi, les métairi métairies sont toutess équipé équipées d’un poste po e transf transformateur ateur eet alimenté limentées en électricité ectricité. Elles les sont en outre toutes to es reliée reliées par ar un circuit cir it interne dee téléph téléphoneses permettant perme de joindre less autres métairies étairies et l’usine hydroélectr h roélectrique. e. Les vvillages ges alen alentours urs s’éclairent s’écla encore core au gazz à cette époque ! Il existe exis toutefo toutefois une sorsorte de « couvre-feu feu » : les enfants enfa des mmétairies airies doivent do terminer rminer leurs l rs devoir devoirs avant vant 22h 22h000 (appro (approximativeme ativement)) car l’électricité l’él ricité esest coupée oupée pour p la nuit.
22 3 – L’électricité L’électricité pour p les travaux travaux agrico agricoles Joseph Camman amman conçoit aussi aus sur sa tatable e à dessins dess d’énorm d’énormes treuils électriques ctriques. Il en fait it fabriq fabriquerr deux deux, danss l’usine Carrière arrière-Guyot à Carcassonne, Car ssonne, ruer Antoine Marty, arty, près de l’ancien ncien cinéma ma l'Od l'Odéum. M. Guyot, G ot, ancie ancien forgeron dee La RedRedorte, s’éta ’était lancé dans la fabrication brication dee charru charrues défonceuses défonce es en 19 1902.. Sa fille ayant ant épou épousé un ingé ingénieurur des Arts A et Métiers étiers ddénommé ommé Joseph Jo ph Carrière Carri (1881 (1881-1952), , l'entreprise l'ent est passé peu après près au stade industriel dustriel sous us l'appe l'appellation tion Carr Carrière-Guyot Guyot. Dans un article a icle de La Dépêche du Midi en mars 2010, 10, on cite c le témoignage témo age d’u d’un ancien ncien ou ouvrier er de l’usine l’us : « A ce moment ent (a (au début but de 1914), ), on construisait c ruisait un treuil reuil p pour les cha charruess à défoncer, dé actionné tionné par un gro gros moteur teur éélectrique ique dde 100 chevaux chev environ nviron pourr M. C Camman n à l'étang de Marseillette, Mars te, un une grandende propriété p iété ooù toutt était étai électrique ctrique… Cee mot moteur actionn tionnait un grand and ta tambour ur de ffonte sur le lequel s'enro s'enroulait et se déroulait d lait un gross câbl câble d'acier cier qui qu tirait unee char charrue à défoncer. défo . On ne n putt term terminer ce joli jo travail vail ccar c'était 'était een juillet illet 1914. 19 Le samedi medi soir, s à tour de rôle, ôle, on nouss paya la semain emaine en louis uis d'or d dee 20 ffrancs, s, et ce fut les derniers rniers que je vis : c'était it le 31 juillet let 1914 ». L’usine est st très connue nnue dans da son qu quartier, tier, car son on marteau-pilon mart pilon éémet et des bruits assourdiss sourdissants ts du ma matin au soir, rendant ndant toute to grasse matinée m tinée impossible im ssible au aux alentours lentours ! Deux eux photo photos prises ises dans les usines sines Ca Carrière-Guyot Guyot, vers 1900, par p la Société d’Études des Scien Scientifiques ues de l’Aude l’ Les treuils tre ls ainsi p produits duits pè pèsentt une vvingtaine taine de tonnes nnes et ontt une pu puissance sance de 60 à 1000 chevaux. chev . Leur mise ise au p point nt pren prend plusieurs années nnées : améliorati élioration du système sys d’enroulem enroulement nt du câble, câ e, ajout d’unun mote moteur thermique thermiq pour u un déplacem déplacement nt autonome, auton d’un un toit (pour (p ur protég protéger les ouvriers ouvr s du sole soleil ?)… Comm pour l’usine Comme l’u e électr électrique, ue, Joseph Jose Camman Camma se met en relatio relation avec d’autres ingénieur génieurs de différents différen pays (Allemagne, agne, TTunisie, isie, Pays-Bas…) Pay qui ont de l’ex l’expérience rience dans d le domaine maine d des treuils treuil électriques, ctriques, utilisés ilisés ess essentielleme tiellement dans les très ès grand grandes exploitations. exploita Dès 1879, la société allemande llemande Siemens iemens-Halskelske avait ava fait ait la dé démonstratio onstration de labo abourage électrique ectrique avec ec des machines m hines Gramme (inventeur (inv teur belge belg de la dynamo) dyn :àp plusieurs ieurs reprises, rep
23 Joseph Camman aura recours à l’expérience d’ingénieurs allemands pour l’aider à concevoir son réseau électrique et ses multiples utilisations. Ci-dessous, une carte postale envoyée de Tunisie à M. Camman, le 20 novembre 1912. Il est écrit au dos : « Tunis le 20/11/12. Je viens de voir propriété possédant labourage électrique. Il me dit que vous feriez bien de venir le voir pour éviter mauvaise combinaison électrique. Pas de ligne basse tension. Transformateurs sur treuils pour éviter poids cuivre. Je ne perds pas mon temps ici. Je me documente. Pars demain pour Alger. Amitiés. Signé Harmin3 ». Carte Postale d’un treuil en Tunisie, avec transformateur intégré (collection Camman) Le labourage électrique existe donc un peu partout dans le monde, comme le montrent plusieurs documents (publicités, cartes postales, objets de collection…) rassemblés dans l’annexe 1. Les moteurs électriques des treuils ont une telle puissance que la difficulté est leur démarrage. Joseph Camman utilise de puissants rhéostats4 venus d'Allemagne. 3 La signature est peu lisible 4 Un rhéostat est un appareil permettant de régler l'intensité du courant électrique passant dans un circuit, il est utilisé dans des appareils nécessitant de hauts voltages.
24 Les treuils tre ls sont ti tirés par des bœufs ufs et aamenés enés jusqu’aux jus ’aux cham champss que l’o l’on veut labourer. labo Plus us tard, ils seront équipés uipés de moteurs eurs thermiques t rmiques leur ur perm permettantant de sse déplacer sans bœufs : Joseph Jo Camm n’aime pas Camman as utilise utiliser des animaux, anim x, ce n’n’estt vraisem vraisemblablemen ablement pas assez sez mod moderne ne pour lui l ! Les treuils treu tirés rés par les bœufs ufs (collection (coll n Camman) Camm
25 On n installe ins un transformate tra formateur et deux treuils, uils, un de chaque côté té du ch champ. On avertit a less ouvrier ouvriers dee l’usine électrique lectrique pour ur qu’ils arrêtent rrêtent l’électricité. l’ ctricité. Le transfor transformateur teur est alors branché anché à unee ligne à haute tension tens n (enviro (environ 5 000 V) et produit dud courant en basse se tension (autour utour de 400 0 V) pou pour alimente limenter less treuils treuils. Transform urs sur le terrain Transformateurs rain (collection (colle n Camman) Camm Cette gravure vure de 1879, 79, tirée d’un un long article a icle de la revue vue scie scientifique Na Nature,, illustre illustr très bien en la mé méthode ode avec sess treuils de chaque côté té du champ. cha Gravure ure dans la revue evue scien scientifique Nature, Natu n°140, °140, an année 1879 Sur le premier emier d des treuils, un u long câb câble métallique métalliq d’envir d’environ 500 mèmètress de long lon est déroulé roulé à travers vers le cchamp. mp. Sur le l deuxième euxième treuil, euil, un autre tre câble estt enroul enroulé sur une e grande bobine bine en fonte.. Ces câbles bles son sont alors lors atta attachés és à chaque chaq extrém extrémité de la ch charrue rue à bascule. ba
26 Le moteur du u premie premier treuil enroule en ule son ccâble le sur la l bobine obine et tracte acte ain ainsi la charrue charru sur toute ute la la largeur eur du cchamp. mp. En mêmeême tem temps,s, l’autre câble âble de déroule.e. QQuandnd la charrue ch arrive rive au premier p mier treuil, treu on inverse inver la manœ manœuvre re pour creuser user un nouveau uveau sisillon. Sur cette ce photo, le l treuil reuil n’a pass encore dee moteur moteu pour our s’auto-tracter, s’aut tracter, n ni de e toit. Sous S le treuil, euil, on peut p t voir la poulie ulie hor horizontale ntale et le câble tendu ten vers ers la charrue. arrue. En arrière--plan, on aperçoit erçoit u un poteau oteau él électrique trique des de lignes ignes à h hautete tension tensio qui sillon sillonnent nt le dom domaine. Unee des prem premières es versio versions du u treuil (collection (c ection Camman) Ca Unee amélio amélioration n de confort con : le toit (collection (c lection Camman) Cam
27 Les photos ph suivan s montre suivantes montrent d’autres améliorat méliorationss apport apportéess aux tre treuils, s, notamment notam le moteu moteur thermique thermiqu dont o on voit le ventilateur ntilateur sur ur le ppremier mier cli cliché.. Les treuils t s’affranch affranchissent nt ainsi du tractage par ar les bœufs, bœ s, sans pour p r autant aller er plus vvite ! Les treuils reuils améliorés am és avec moteur m eur et toit toi (collection llection Camman) C Sur les le deux vu vues suivante suivantes, on dist distingue ue très bienen les ccâbles les élect électriques ues portés por à l’arrière rrière d des treuils et e qui ui rejoign rejoignentt un tra transformateu formateur relié elié aux lignes à haute tension. tension Est- ce Henriette Henriet Sibade (épouse ouse de JJoseph Camman) Cam ) sur ces c deux pho photos ? Un n treuil avec toit, mais ma pass encore de moteur oteur thermique th ique (co (collection ion Camm Camman)
28 Entre les deux roues arrière, la grosse bobine de câble mue par deux énormes roues dentées (collection Camman) Le principal souci technique de ces treuils est l’enroulement du câble de traction : soumis à une pression de plusieurs tonnes lorsqu’il tire une charrue, il s’enroule mal autour de sa bobine. Un premier système est constitué d’un bras métallique qui par va-et-vient répartit l’enroulement du câble, mais soumis à cinq tonnes de pression, il y a beaucoup de casse. Après plusieurs essais, Joseph Camman conçoit un système efficace : le puissant moteur électrique fait tourner une grosse bobine horizontale placée le long de l’essieu des grandes roues arrière (par l’intermédiaire d’engrenages qui démultiplient sa force). En tournant, cette bobine entraîne le câble de halage qui va d’abord passer par une poulie verticale située à l’avant. Le câble passe ensuite par la gorge d’une grande poulie horizontale placée sous le ventre du treuil et de là il est arrimé à la charrue à bascule. Les treuils « dernière génération » avec toit et moteur (collection Camman)
29 Quand la charrue arrive rive au bout b t du cha champ,, un signal sign (appelé mire) re) est h hissé sur le toit t du premier emier treuilil pour signaler s naler au second qu’il peut commencer co encer à tracter racter la charrue arrue de son côté. Un treuil treu avec ec la mire mir levée ée (collection (collec Camman) Camma La charrue cha e est à b bascule : elle ell possède ossède d deuxx socs, un u de chaqu chaque côté de sson essieu, et n’a donc nc pas b besoin oin de fa faire demi demi-tour.. Le cond conducteur teur de la charrue change nge seu seulement ent de siège, la charrue bascule scule et repart art dans l’autre autre sen sens ! Un volant vola permet au conduct conducteurr de la diriger. di Les charrues cha à bascu bascule trisoc isoc (collection (collec n Camman) Camm Alors que q e dans to toutee la Fran France,, on labo laboure e par la force rce des b bœufs ufs ou ddes locomobiles locomob à vapeur, peur, le domaine maine dde Marseille arseillette défonce défonc ses es champs cham à l’énerg l’énergie électriq électrique ! D’ailleurs, D’ailleu le domaine maine reçoitoit de fréquentes f uentes visitesites du préfet éfet et de personnalités personn ités imp importantes antes venues ve découvrir couvrir le « far-wes west » audois. Bien entendu, e endu, le les ouvriers dee l’étan l’étang ont des consignes nsignes strictes rictes afafin d’éviter tout accident cident en e manipula anipulant le résea réseau électrique lectrique. Ill est toutefois tout ois impo impossible ble de gagarantir ntir à 100 10 % la sécurité curité quand qu d les ou ouvriers passent passe autant d d’heures eures en contact ntact avec av de la ha haute tension. tension Le 13 juillet illet 1937 1937, Jacques Maugard, augard, contremaît tremaître des lignes ligne électriqu électriques du domaine, dom finit it avec sson équipe habituelle bituelle (dont Eloi Escande E ande et Vincent V cent Ma Manuel) el) le lab labourr d’un champ. ch Il faut don donc que Jacques Jacq s déconn déconnectete un tre treuill électrique électriq du tran transformateur rmateur. Ill monte à une
30 échelle helle pour po couper l’électricitélectricité, maisais tombe tom sur les lignes nes élec électriques. iques. M Manuel, uel, occupé occ à combler mbler u un fossé ossé pou pour le franch franchir avecvec le trtreuil, il, entend enten la plainte dee son ch chef d’équipe et le voit it accro accroché aux fils fils. Ill agite alalorss son momouchoir hoir vers ver les es respo responsables ables du transforma ansformateur, quii coupe coupent le coura courant.. Mais il estt trop ta tard,, Eloi et Manuelnuel ten tententnt en vavain la respiration respir 5 artificielle tificielle surr leur co collègue ue élect électrocuté . Jacque Maugard Jacques Maugard, né en 1888 18 à Belcaire, Belc s'éttait marié arié en 1913 avec Rosalieosalie Bez. Be Le couple uple tro trouva d’abord d’abor du travailtrava à Salsign Salsigne. Pendant la guerre guerre, Jacques cques fut fait prisonnier, priso dans ns les eenvirons rons du lac de Cons Constance et son so épouse pouse revintint vivre à Belcaire elcaire, où elle accoucha acco de leurr fils fil en 1914 1914. En n juillet 1919, ils virent vivre ett travailler travaill à l'étan tang. Jacques y fut d’abord abord simple si le ouvri ouvrier agricole, puis devint devin chef hef du labourage la urage à l’électrici lectricité sur ur le domaine dom où il était tenu,, semble-t-il, sem il, en estime stime papar M. Camman Camm (la tradition tra tion famfamiliale le dit que q ce dernier rnier lui avait ait offer offert une ne mont montre !). Jacque avait le projet Jacques ojet d'ou d'ouvririr un pepetit magasin d'électric 'électricité à Carca Carcassonne. Son fils unique Louis est devedevenu instituteur. institute Acte de d décès écès de Jacques Ja es Maugard Maug (Archives Archives Communales munales de Puichéric Puichéric) 5 Le récit est es baséé sur le procès-verbal p verbal de gendarme ndarmerie quiui contient contie less témoig témoignagess d’Eloi EEscande de et Vincent Vin Manuel, nuel, qu que nouss a comm communiquéqué la pe petite-fille fille de Jacques J es Maugard. Maug
31 Voici une série de trois photos qui semblent avoir été prises le même jour et qui illustrent bien le va-et-vient des charrues à bascule. Les treuils semblent être de « 1ère génération », ils n’ont ni toit ni moteur thermique. La charrue en plein champ (collection Camman) Arrivée de la charrue vers le treuil qui la tracte (collection Camman)
32 « Demi-tour » et départ de la charrue vers l’autre treuil (collection Camman) Pour finir, ces cinq photos grand format de toute beauté étaient peut-être les mêmes qui furent un temps affichées dans l’usine. Sur le premier cliché, on remarque que le treuil n’a pas encore de moteur pour se déplacer, mais il est déjà doté d’un toit. Entre l’ouvrier et les grandes roues arrière, il y a le moteur électrique, alimenté en courant par le câble que l’on voit pendre à l’arrière. Entre les deux grandes roues, on distingue la bobine d’enroulement du câble de halage. Au fond à gauche, la charrue semble s’approcher du treuil. On peut voir aussi le massif de l’Alaric en arrière-plan, à droite. Sur la deuxième photo, la charrue prend la pose et nous permet d’observer les deux sièges et les volants correspondants. Un des deux messieurs coiffés d’un canotier est-il Joseph Camman ? On peut voir le profond sillon déjà creusé par la charrue et tous les roseaux en arrière plan qui attendent d’être arrachés. Les premières années, quand sont lancés les grands travaux de labour, les terres de l’étang sont envahies de roseaux. On voit bien sur la photo qu’ils ont poussé jusqu’à hauteur d’homme.
33 (collection Camman)
34 Encore un n bon ap aperçu çu du sil sillon profond ett large creusé cr sé par le socc de la ccharrue rrue Carrière- Car Guyot. uyot. On imagine agine sa sans mal le ccraquement quement impressio pressionnant ant des rroseaux eaux bri brisés.. L’ouvrier L’ouvri (ici distrait trait par pa le photog photographehe don dont on voit l’om l’ombre re en bas ba à gauche) contrôle ntrôle een permane ermanence la direction rection dde sa charr charrue grâce au volant. olant. Au fond, ond, à côté cô du treu treuil, une dam dame se protège protè du soleil leil avec unee ombre ombrelle,, peut-être peut encore l’épouse l ouse de Joseph Camman Cam ? (collec collection Camman) Camman
35 Sur cette dernière photo, on distingue très bien le câble tendu au premier plan qui hèle la charrue et le câble détendu au sol près du treuil qui suit la charrue. (collection Camman) on peut lire « Guyot S et C » sur la charrue (collection Camman)
36 4 – Les travaux dans l’étang Il semble que le domaine de l’étang est en piteux état quand Joseph Camman le prend en mains : son entretien, confié petit à petit aux différents propriétaires de l’étang, a été négligé. L’histoire se répète : dès que l’étang est morcelé, il devient difficile de le rentabiliser. Grâce aux eaux de l’Aude apportées par le tunnel, l’étang de Marseillette ne manque pas d’eau pour irriguer ses champs et en drainer le sel. Mais par manque d’entretien, l’eau est mal utilisée par endroit et après de fortes pluies, elle s’accumule, stagne et rend les terres impropres à la culture. La végétation aquatique envahit les fonds des canaux et finit par les obstruer. Les limons s’accumulent et réduisent la profondeur des ruisseaux. Henriette Sibade racontait qu’enfant (entre 1890 et 1900), elle devait prendre de la quinine quand elle venait pour les vacances vivre au domaine de Pelletier à Puichéric : le risque de paludisme était encore grand et hantait les esprits. Joseph Camman s’ingénie à trouver une solution à tous ces problèmes. Il va employer en permanence une dizaine d’ouvriers pour entretenir et améliorer les canaux existants, mais aussi en creuser de nouveaux : il faut amener l’eau partout et aussi l’évacuer de façon plus efficace. Les rigoles qui amènent l’eau sont appelées des bésalières. Quand un canal n’est pas assez profond car il a atteint le rocher, on utilise la dynamite. Pour évacuer les limons et les plantes aquatiques, on a recours depuis quelques années à des barques en bois à fond plat. Ce serait Charles Digoin, associé d’Eugène Sourdon dans les années 1890, qui aurait adapté le système utilisé pour curer certaines galeries des égouts de Paris. Ces bateaux-vannes ont à leur proue une lame qui, au moyen d’un engrenage, peut être abaissée de manière à barrer presque entièrement la rigole à curer. L’eau s’élève alors en arrière, passe avec violence sous la vanne et, par deux ouvertures qui y sont ménagées, chasse les matières qu’elle rencontre et fait elle-même, par sa pression sur la face amont de la vanne, avancer le bateau. Plan longitudinal d’un bateau-vanne (source : http://ptolemaeus.canalblog.com)
37 Un n bateau-vanne bateau ne expos exposé au musée des d égouts de Paris Visite des égouts égo dee Paris, vers 1910 Joseph Camman amman perfectionn rfectionne encore lle système ystème en e remplaçant remplaç t les barbarqueses de bois bo par dess modèles modè en fer (peut-être être que ue les anciennes a iennes barquesques en boisois étai étaientt abimées abimée ou pourries) urries). Less canau canaux seront eront cucuréss régulièrement réguliè ment en utilisant tilisant ces « barqu barques ». Suivant Suiva la largeur du canal nal à ne nettoyer, yer, on ccouple ple jusqu’à jusqu trois barques ba es entre elles lles à l’ai l’aide d’un chevron. che Le devant dess barqu barques présent présente une grande gran lame de d fer. On d déploie loie de chaque aque côté cô de l’embarca mbarcation n deux aautres res lame lames (les ailes) ailes qui ui effleurent effleu nt les be berges.. Ces aailes n’exis existaient pass sur les bateaux teaux d des égouts d de Paris, aris, car leur ur lame de proue ép épousait usait les parois rois régulières régu dess canaux canau d’égout d’égout. Elles lles ont dû û être aajoutées utées pour p r s’adap s’adapter aux be berges es forcément forcé irrégulière régulières des es canaux canau de l’étan l’étang.
38 L’eau s’accumule ccumule contre ces c lames mes et lel bateau ateau avance av ce dans le sens du courant, urant, mû m par la pression dee l’eau dontt le nivea niveau s’est éle élevé d’une cinquantaine cin antaine de centimè centimètreses derrière derriè les lames.. Un volant lant act actionne ne une crémaillère émaillère afin fin de baisser b ser ou rrelever ver des sass sur les ailes latérales, térales, u un peu à la façon çon d’un d’une écluse. cluse. C Cela permet de réguler la pression de l’eau et ainsi la vitesse dess barques. barqu Si l’em l’embarcation cation sse bloque, on fait osc oscillerr le bat bateauu de droite dro à gauche uche en poussant oussant contre ntre les berges rges deux deu poteaux en bois pla placéss à l’arr l’arrière. e. La vase va est évacuée acuée vers v l’Aude, ainsi nsi que les anguille anguilles et les poissons, po ons, ce quii permet de e formidables formid pêches : les jours ours de ccurage, age, les habitants bitants de d l’étang ’étang reçoivent re ivent des poissons oissons p par sacs entiers ent ! Deux barques ues cou couplées,, avec les ailess latérales latéra déployé éployées devant ant et les potea en bois der poteaux derrièree (collection (collec Camman) Camman
39 Voici un u extrait d du livre ivre de Je Jean Girou, l’itinéraire néraire en e Terre d’Aude d’A (1936) (1936), qui ui raconte racon ces parties rties de pêche : « Une autre a distra distraction n spor sportive, sur l’é l’étang,, c’est la pêche che miraculeuse, mi leuse, au bateau ateau-vanne. Chaque aque trois t mois, environ, on, on cure les canaux ca x d’irrigation, d’irri n, un bateau au en ffer à fond plat p fait vanne nne et arrête te les eaux ; il descend, de d, poussé pou par ar le courant, c nt, en raclant ant le fond vaseux vaseu de sa pelle lle d’acier. d’a Les eaeaux, au devant, dev s’écoulent s’écou vivement vivem ett emp emportentt terre terres et herbages. herba Le poisson, isson, troublé blé da dans sa tranquillité, tran té, cro croit qu’il ’il va être privé d’eau et re remonte ce torrent. t Alors, ors, de la berge, erge, aavec de grandes gra épuisettes, épuise on n’a qu’à pêchpêcher : chaque haque coup ramène ramè une belle lle friture frit de gou goujons,, de ba barbeaux, ux, d’anguilles d ; c’est par seaux s que lle poisson isson peut se prendre. endre. ». Deux barques ba es couplées couplées, avec vec leurs grandes des lam lames Sur cette cet photo, oto, on voit le chevro chevron au premier plan qui frontales ntales (co (collection tion Camman) Cam couple les barques arques et on distingu distingue le volant qui q régule la pression ession de d l’eau eau (collec (collection Camman) Camma Quand lee curage est st terminé, termi , les barques ba es sont remontée montées à contre contre-courant urant par p un cheval.l. Mené Me par un troisième isième o ouvrier, rier, l’an l’animal al est harnaché ha à des d chaines et marche sur la berge. Si la rigole r le n’a p pas été réc récuréee depuis depui longtemp ongtemps par les bbarques ques et qu’elle ’elle est trop encombré combrée dee végétation, végét on, deux hommes mmes pprocèdent cèdent au a faucarda faucardage.. Chacun surr une rive, ri ils avancent ent à contre ontre courant co nt en imimprimant imant u un mouveme ouvement de va et e vient ient à un une longue chaine c
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