LE DÉFI D'ÉTUDE DE CAS SCOTIABANK VANIER COLLEGE 2019

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LE DÉFI D’ÉTUDE DE CAS
                          SCOTIABANK VANIER COLLEGE 2019

                                  Samedi le 9 février 2019
Receiver Coffee: petites fèves, grandes ambitions

                              LA VERSION FRANÇAISE

                                               Préparé par :
                                              Eric Dolansky
                              Brock University, Goodman School of Business

© 2019. Ce dossier a été préparé par Eric Dolansky et ne vise pas à démontrer l’efficacité ni l’inefficacité d’une situation de
gestion. Certains renseignements peuvent avoir été modifiés dans un souci de confidentialité. Cette étude de cas a été rédigée à
des fins d’apprentissage et ne peut être reproduite à des fins autres que ceux du concours d’étude de cas sans l’autorisation de
l’auteur et du Défi d’étude de cas Scotiabank Vanier College.
RECEIVER COFFEE1

Septembre 2018. La saison touristique d’été tirait à sa fin pour Receiver Coffee, une entreprise
de torréfaction de café établie à Charlottetown, à l’Île du Prince-Édouard. Colleen MacKay, une
des copropriétaires de l’entreprise, avait hâte de commencer à réfléchir aux meilleures stratégies
pour la faire grandir. L’entreprise n’était pas en mauvaise posture, loin de là, avec ses deux cafés
à Charlottetown et une croissance supérieure à 100 % d’une année à l’autre, mais Colleen MacKay
et ses associés avaient le sentiment d’avoir exploité leur marché au maximum et cherchaient à
accroître les revenus tirés de la vente en gros.

L’entreprise avait été lancée six ans plus tôt. Depuis l’arrivée de Colleen MacKay trois ans et demi
auparavant, la demande avait augmenté et Receiver Coffee avait accru sa capacité, ouvert un
nouvel emplacement et élargi son offre de produits. L’entreprise avait bien établi ce qui la
différenciait : un accent mis résolument sur le café, son origine, sa torréfaction et sa vente. « Nous
cherchons constamment la façon la plus éthique qui soit de nous procurer nos intrants, a affirmé
Colleen MacKay, et ce que nous faisons est assez unique à l’Île du Prince-Édouard. » Les trois
principaux objectifs de l’entreprise étaient énoncés ainsi sur son site Web : offrir du café au goût
remarquable et de provenance éthique; offrir de délicieux produits alimentaires et produits de
boulangerie; et créer une communauté.

Dans le cadre de sa croissance, Receiver Coffee avait ouvert son deuxième établissement en juin
2017. Cependant, au dire de Colleen MacKay, la demande avait dépassé la capacité après
seulement huit mois. L’entreprise prévoyait donc une troisième phase de croissance pour l’été
2019, sous forme d’un espace de production pour installer la machine à torréfier et une
boulangerie ainsi qu’un petit café avec pignon sur rue. En parallèle, Colleen MacKay avait comme
objectif d’accroître la vente en gros aux cafés dans les Maritimes2, en Ontario et au Québec. La
fin de la haute saison et le ralentissement qui l’accompagnerait seraient propices à la planification
et à l’acquisition de clients à l’extérieur de l’île. Il fallait utiliser cette période à bon escient. Colleen
MacKay a résumé son problème ainsi : « Je ne sais pas par où commencer! »

Receiver Coffee

Receiver Coffee (Receiver) est né à Charlottetown, à l’Île du Prince-Édouard, en juin 2012, sous le
nom « Row 142 ». À l’origine, c’était un petit torréfacteur et un café offrant aussi des produits de
boulangerie. Le local était tout petit et il n’y avait qu’un seul banc pour s’asseoir. Or, comme
l’explique Colleen MacKay, « Row 142 était le point de rencontre des mordus de café, parce qu’il
offrait du café de spécialité qu’on n’avait jamais encore trouvé sur l’île ». En 2014, les
propriétaires ont sauté sur une occasion de déménager l’entreprise quatre portes plus loin sur
Victoria Row. Cette rue piétonnière, pavée de pierres rondes, est bordée de cafés, de bars et de
boutiques et est considérée comme étant l’une des principales attractions touristiques de
Charlottetown. Le nouvel emplacement était plus grand et mieux situé. C’est à ce moment que
1
 Copyright © 4 décembre 2018, Eric Dolansky. Reproduction ou distribution interdites sans autorisation.
2
 Maritimes : quatre provinces sur la côte est du Canada : l’Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick, la
Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador.

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Receiver est né, explique Colleen MacKay. Les fondateurs, Chris Francis et Sean Bruinooge,
voyaient le restaurant comme « le Cheers 3 de Charlottetown ». Au dire de Colleen MacKay,
quiconque entrait dans l’établissement était salué par au moins une personne qui le connaissait.
« Cela n’était pas fréquent sur l’île avant l’ouverture de Receiver. »

Peu de temps après, soit au début de 2015, Colleen MacKay s’est jointe aux fondateurs de
Receiver. Titulaire d’un certificat en comptabilité et d’un diplôme en administration des affaires,
elle travaillait dans le secteur des services depuis l’âge de 18 ans. Elle avait occupé le poste
d’agente à l’administration et aux finances pour le Port de Charlottetown, ce qui lui avait permis
d’acquérir une expérience variée en matière d’information financière. Chez Receiver, elle
s’occupait de la comptabilité, des ressources humaines et de l’administration générale.

L’entreprise a continué à grandir et sa capacité a commencé à être insuffisante. La petite machine
à torréfier que Receiver utilisait, d’une capacité de six livres, ne suffisait pas pour répondre à la
demande engendrée par le café, et encore moins pour la vente en gros. Les entrepreneurs ont
donc sorti la machine de l’emplacement de Victoria Row afin de libérer de l’espace pour des
places assises et entrepris une analyse visant à trouver un emplacement qui serait consacré à la
torréfaction. En mars 2017, les plans se sont concentrés sur The Brass Shop, un nouvel
emplacement à Charlottetown, où Receiver pourrait à la fois ouvrir un café et torréfier les fèves.
À la fin d’avril 2017, Receiver devenait propriétaire de The Brass Shop et entamait les rénovations.
Colleen MacKay explique : « Nous n’avons conservé que les murs extérieurs. » L’objectif était
d’ouvrir avant le 1er juillet et les premiers clients ont pu être accueillis le 29 juin. Environ au même
moment, Receiver a fait une demande de financement pour l’achat d’une machine à torréfier
d’une capacité cinq fois supérieure à la machine précédente. Le nouvel appareil, livré en
septembre 2017 et opérationnel dès le mois suivant, pourrait répondre aux besoins des deux
établissements actuels et à la demande de café en gros. « Et voilà, nous étions partis! », déclare
Colleen MacKay.

L’entreprise a connu une nouvelle phase de croissance quand son fournisseur de produits de
boulangerie, Breadworks, a approché les associés. Les achats de Receiver comptaient pour 55 %
des recettes de Breadworks et le propriétaire approchait de la retraite. Il a vendu sa boulangerie
bio à Receiver à peu près au moment où l’entreprise emménageait dans The Brass Shop. « La
boulangerie représentait une composante beaucoup plus importante que nous l’aurions
imaginé », explique Colleen MacKay. Breadworks était l’une des seules boulangeries bio de l’Île
du Prince-Édouard à avoir des clients de gros, elle était un fournisseur clé de Receiver et avait
aussi d’autres clients.

En raison de la croissance rapide générée par l’expansion et les acquisitions, le chiffre d’affaires
de 2017 et de 2018 a connu une hausse de 100 % et de 150 %. Par conséquent, Receiver
envisageait une troisième phase de croissance, prévue pour mai ou juin 2019, possiblement par
l’ajout d’un nouvel établissement, d’une boulangerie ayant pignon sur rue et, le plus important,
d’une capacité accrue afin d’accroître les revenus tirés de la vente en gros.
3
 Cheers est une émission télévisée qui a été diffusée sur le réseau NBC de 1982 à 1993. Elle mettait en présence un
groupe d’habitués de Cheers, un bar de Boston. Le titre de la chanson thème de l’émission était Where Everybody
Knows Your Name [où tout le monde te connaît par ton prénom].

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Le secteur du café en 2018

Le café est un secteur majeur au Canada. Le chiffre d’affaires global du secteur se chiffrait à
6,2 milliards de dollars en 2017, répartis entre la vente de café dans les restaurants, les cafés et
les bars et les autres entreprises du secteur alimentaire (4,8 milliards de dollars) et la vente de
café dans les épiceries et les autres magasins de détail (1,4 milliard de dollars)4. Selon l’Association
canadienne du café (Coffee Association of Canada), 71 % des Canadiens âgés de 18 à 79 ans
consommaient du café chaque jour, 81 % en consommaient au moins une fois par semaine, et
85 % en consommaient au moins une fois par année5. Le café était en fait la boisson au taux de
pénétration le plus élevé au Canada, devant l’eau du robinet (67 %), l’eau embouteillée (44 %), le
thé (48 %), les boissons alcoolisées (43 %), et les boissons gazeuses (29 %).

La croissance au sein du marché du café était largement influencée par les catégories de produits.
En 2013, 13 % des Canadiens consommaient des boissons à base d’espresso (c.-à-d. cappuccino,
latte); en 2017, ce pourcentage avait grimpé à 23 %. Parmi les Canadiens âgés de 18 à 79 ans, 8 %
consommaient de nouvelles variantes telles que le café glacé ou le café nitro6. La consommation
de café à la maison diminuait (76 % des gens préparaient et buvaient leur café à la maison en
2017, contre 79 % en 2015), tandis que la consommation hors du domicile augmentait (38 % en
2015, 44 % en 2017). L’utilisation des systèmes à dosette (par ex., Tassimo, Keurig), après une
forte croissance les années précédentes (taux de pénétration de 38 % en 2015 contre 15 % en
2012), s’était stabilisée et était nulle depuis 2015.

Les marges et les coûts de production variaient beaucoup en fonction de la qualité du café. En
moyenne, selon l’Association canadienne du café de spécialité (Specialty Coffee Association), les
fèves de café non torréfiées de qualité marchand7 se négocient généralement à un prix allant de
1,75 $ à 2,25 $ la livre, et les fèves de café de spécialité se négociaient à un prix se situant dans la
partie supérieure de cette fourchette et même à un prix plus élevé. Ce prix englobait les coûts liés
à la production comme la main-d’œuvre, les certifications, le transport et les fournitures (par ex.,
les fertilisants), et un petit bénéfice pour le caféiculteur. Les torréfacteurs (comme Receiver)
achetaient les fèves à un prix négocié. Ils assumaient les coûts de production, de main-d’œuvre,
d’emballage et de marketing, ainsi que les frais d’importation. La freinte (diminution de volume)
était également un enjeu. Environ 18 % du poids du café était perdu lors de la torréfaction, de
sorte qu’une livre achetée donnait 0,82 livre de café torréfié. Un torréfacteur vendait
généralement le café torréfié à un prix deux à quatre fois plus élevé que le prix des fèves non
torréfiées. 8

4
  Site Web de la Coffee Association of Canada, http://www.coffeeassoc.com/coffee-facts/, consulté le 2 octobre
2018.
5
  Site Web de la Coffee Association of Canada, https://www.coffeeassoc.com/wp-
content/uploads/2018/02/CanadianCoffee2017infographic_whitebkd-2.pdf, consulté le 2 octobre 2018.
6
  Ibid; Le café nitro est un café infusé à froid chargé d’azote, ce qui lui donne une texture crémeuse.
7
  Pour faire la distinction avec le café de spécialité.
8
  Site Web de la Specialty Coffee Association, http://www.scanews.coffee/2014/09/15/the-cost-of-a-cup-of-coffee-
where-does-the-money-go-2/, consulté le 2 octobre 2018.

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Les torréfacteurs vendaient le produit aux restaurants et aux cafés ainsi qu’aux particuliers qui le
consommaient à domicile. Les établissements tiraient environ 16 tasses de café par livre, vendues
généralement environ 2,00 $ la tasse. Ces revenus couvraient les frais d’exploitation et le prix du
café, et procuraient un bénéfice à l’établissement.

La troisième vague du café

Le café, savouré et apprécié partout au monde, est un produit simple et complexe à la fois. On
peut le voir soit comme une façon banale de commencer la journée, un produit bas de gamme et
pratique de restauration rapide, soit comme une boisson raffinée et spéciale aux saveurs
complexes. Chez Receiver, on était de la deuxième école de pensée et on traitait le produit avec
soin. « Nous n’achetons que les fèves notées 85 ou plus [sur 100] », a déclaré Colleen MacKay. À
court terme, l’entreprise voulait se procurer des fèves ayant une note encore plus élevée, a ajouté
Chris Francis, afin d’obtenir un produit de qualité supérieure, mais le prix rendait cet objectif
difficile à atteindre.

L’approche de Receiver quant au café s’inscrivait dans ce qu’on appelle « la troisième vague du
café ». Cette approche consiste à traiter le café comme un produit unique, artisanal et de haute
qualité, un peu comme le vin ou le caviar. Elle contraste avec l’idée plus conventionnelle que le
café est un produit de base. Elle met l’accent sur des fèves uniques, toutes les subtilités des
saveurs et la qualité générale. Le café d’origine unique9 est une composante importante de cette
philosophie, et Receiver l’avait faite sienne. Sur le plan pratique, cela signifiait qu’une attention
particulière était portée à toutes les étapes de l’achat, du traitement et de la vente du café.

Receiver n’utilisait que des fèves d’origine unique et n’achetait pas de fèves qui avaient dépassé
leur date « meilleur avant ». « Nous savons qui a produit nos fèves et quand elles ont été
récoltées, » a indiqué Colleen MacKay. En comparaison, des détaillants comme Tim Hortons et
Starbucks utilisaient des fèves bas de gamme, les mélangeaient et les torréfiaient plus longtemps.
MacKay a expliqué qu’« ils doivent torréfier les fèves jusqu’à ce que la torréfaction l’emporte sur
les caractéristiques naturelles du café, parce que la seule façon d’obtenir un goût uniforme est
de surtorréfier. » Elle a ajouté : « Les grandes chaînes ne sont pas locales et elles ne vendent pas
un produit haut de gamme. On y appuie sur un bouton pour créer un espresso. La marque prime
sur le café. » L’utilisation de fèves uniques et plus fraîches fait ressortir les différentes
caractéristiques et saveurs, a expliqué Chris Francis, en ajoutant « qu’acheter des microlots de
café permet de trouver des cafés plus distinctifs présentant des caractéristiques spéciales. Les
grandes récoltes ne donnent tout simplement pas la même qualité qu’une petite récolte. »

Le produit

Receiver choisissait et évaluait des fèves vertes par l’entremise de nombreux courtiers. Les
propriétaires choisissaient à la main leurs cafés, ne sélectionnant que les fèves faisant partie des
15 % meilleures fèves au monde, même si cela signifiait en acheter une très petite quantité à la
9
 L’expression signifie qu’un lot de café torréfié provient entièrement de la même source, plutôt que les mélanges
qui combinent des grains de plusieurs sources, récoltes et caféiculteurs.

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fois. « Nous pourrions par exemple acheter des fèves pour lesquelles il n’y a que huit sacs
disponibles, a expliqué Colleen MacKay, acheter une récolte entière au Honduras et être les seuls
à offrir cette variété ».

En 2018, Receiver en était arrivé à torréfier environ 1 000 livres de café par semaine seulement
pour suffire à la demande. La moitié de ce café était vendue aux clients des deux établissements,
tandis que l’autre moitié était vendue en gros. L’objectif était de torréfier de 500 à 700 livres par
semaine pendant la basse saison (octobre à mai), mais sans constituer de stocks, étant donné que
la fraîcheur était primordiale. Idéalement, le café doit être consommé dans les trois semaines
suivant la torréfaction.

Le produit signature de Receiver était son mélange « Operator Blend ». Même s’il changeait selon
la saison, il conservait toujours le même profil aromatique afin d’être accessible et abordable. En
plus de ce produit, Receiver offrait de trois à cinq fèves d’origine unique, qui changeaient toutes
les trois semaines environ avec l’arrivée d’un nouveau produit. Ces fèves provenaient d’Amérique
centrale et d’Amérique du Sud, de même que d’Afrique orientale. Receiver torréfiait le café cinq
jours par semaine pour répondre à la demande. Si un client souhaitait un profil aromatique
particulier, Receiver pouvait se procurer les fèves correspondant à ce profil et les torréfier de
manière à le faire ressortir, puis mettait le café en vente. Le café torréfié était vendu en gros en
sacs de cinq livres pour les magasins (à des prix variant de 55 $ à 95 $ selon la fève) ou au détail
en sacs de 340 grammes (12 onces), au prix de 15,50 $ à 20 $.

La concurrence

« Nous sommes petits, mais plus gros que la plupart des autres joueurs dans notre marché. La
majorité des entreprises sont soit un café, soit une brûlerie, mais pas les deux », a expliqué
Colleen MacKay en 2018. Même si Receiver ne considérait pas les géants tels Tim Hortons et
Starbucks comme des concurrents, la direction reconnaissait que les clients pourraient voir les
choses autrement, surtout s’ils ne cherchaient qu’un simple café plutôt qu’une boisson de qualité,
haut de gamme.

Dans les Maritimes, il n’y avait qu’un seul autre grand torréfacteur ayant la même philosophie
que Receiver quant aux fèves de café : Anchored Coffee, situé à Dartmouth, en Nouvelle-Écosse.
Anchored présentait son produit comme étant « de provenance transparente, soigneusement
préparé, toujours délicieux [traduction] ». Tout comme Receiver, Anchored privilégiait la
transparence dans les activités d’achat et de vente et une attitude respectueuse envers le café et
les caféiculteurs. Sur le site Web d’Anchored, on pouvait voir des prix de 18 $ à 26 $ pour les sacs
de 340 grammes. La vente en gros était aussi une source de revenus importante pour Anchored.
Colleen MacKay a déclaré : « Il n’y a que quelques torréfacteurs spécialisés dans la région.
Receiver en est un, Anchored en est un autre. »

Java Blend, un autre torréfacteur de Halifax, en Nouvelle-Écosse, était semblable à Receiver. En
2018, il avait fêté le 80e anniversaire de sa fondation. Sur son site Web, Java Blend prétendait se
procurer ses fèves de café partout au monde et indiquait que son équipe passait énormément de
temps à essayer de trouver comment faire ressortir le mieux la saveur extraordinaire des fèves
de café que l’entreprise a la chance de pouvoir torréfier. Java Blend comptait aussi un volet de
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vente en gros, offrant aux clients des torréfactions sur demande, une livraison le lendemain et
une livraison gratuite pour les commandes de 30 livres et plus. Sur son site Web, Java Blend
écrivait que ses prix de gros étaient très concurrentiels. L’entreprise vendait également du café
pour consommation personnelle qui pouvait être commandé en ligne au prix de 12,40 $ à 16,95 $
la livre10.

À l’Île du Prince-Édouard, des cafés comme Kettle Black (« le café et la brûlerie de Charlottetown »
[traduction]), et Samuel’s Coffeehouse (« le riche patrimoine de l’Île avec une touche
moderne [traduction] »), faisaient concurrence à Receiver. Certains cafés de ce type faisaient leur
propre torréfaction et pouvaient avoir des clients de gros, tandis que d’autres ne le faisaient pas.
Samuel’s Coffeehouse, par exemple, ne faisait pas de torréfaction (et servait du café Java Blend),
mais l’envisageait pour l’avenir.

Les clients

Les ventes de Receiver étaient largement saisonnières (la haute saison se déroule de juin à
octobre de chaque année). L’attrait touristique de l’Île du Prince-Édouard contribuait non
seulement au chiffre d’affaires de ses propres cafés, mais aussi à celui des clients de gros locaux
(principalement les cafés et les marchés). En 2018, une diversification de la clientèle de gros aurait
aplani certaines variations dans la demande, mais Receiver n’avait pas encore accédé à un grand
nombre de nouveaux marchés ou types de clients, à l’exception de l’Université de l’Île du Prince-
Edouard, qui avait choisi les produits de Receiver en 2017 pour remplacer ceux de Starbucks. Les
ventes à l’Université avaient aidé à compenser la chute des ventes lorsque la saison touristique a
pris fin.

La plupart des clients de gros étaient établis sur l’île; la demande à l’intérieur de l’île représentait
75 % des revenus de la vente en gros. Receiver fournissait également ses produits à deux cafés
de la Nouvelle-Écosse, et faisait de la vente au moyen de son site Web et de services
d’abonnement (par ex., Secret Sip, une entreprise canadienne qui envoie chaque mois à ses
abonnés une sélection de cafés provenant de différentes brûleries de partout au pays).

Les détaillants tels les épiceries ne revêtaient pas un grand intérêt pour Receiver parce qu’ils ne
concordaient pas bien avec son produit et sa marque. Le café de spécialité ne se vendait pas
assez rapidement dans les épiceries, compte tenu de sa courte durée de conservation. Comme l’a
expliqué Colleen MacKay, « ce n’est pas en épicerie qu’on trouve le haut de gamme ». De plus,
les pratiques habituelles en épicerie ne correspondaient pas à celles de Receiver. Selon Colleen
MacKay, Receiver n’envisageait pas pour le moment de faire ce que font habituellement les
fournisseurs des épiceries, soit s’occuper de leur propre produit en le mettant sur les tablettes et
tenir des stocks.

L’objectif pour 2018 et les années subséquentes était de faire entrer les produits de Receiver dans
un plus grand nombre de cafés des Maritimes, ainsi que de les offrir en Ontario et au Québec.
Colleen MacKay mettait l’accent sur le Canada parce que c’était l’espace de moindre résistance,
et était en discussion avec des cafés à Toronto et à Vancouver. Un groupe d’entrepreneurs de
10
     Une livre = 454 grammes

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Moncton, au Nouveau-Brunswick, cherchait à ouvrir un café et avait approché Receiver afin d’en
faire son fournisseur de gros. « Nous voulons cibler les entrepreneurs qui ouvrent de nouveaux
cafés avant qu’ils choisissent leurs fèves », a expliqué Colleen MacKay, du fait que l’entreprise a
connu le succès auprès de cette clientèle par le passé. Il est plus difficile de vendre à des cafés
déjà établis parce que, selon Colleen, les gens sont fidèles à une marque et peu disposés à
changer.

Avec cet objectif à l’esprit, les dirigeants de Receiver ont commencé à faire de la sollicitation à
froid auprès de clients potentiels dans le but d’établir une relation avec eux. Cela s’est avéré
difficile. Receiver jouissait d’une excellente réputation à l’échelle du pays; un grand nombre de
Canadiens avaient visité la province, de nombreux touristes étaient entrés chez Receiver, et
partout au Canada on connaissait et on aimait la marque. Cependant, cela ne suffisait pas à
générer des ventes. Au dire de Colleen, « nous ne savons pas toujours par quel moyen attirer les
clients de gros ».

Un établissement vendant des produits provenant de nombreux torréfacteurs en gros tels que
Receiver constituait une piste d’affaires prometteuse. Si ses cafés se vendaient bien dans de tels
établissements, Receiver pourrait devenir un fournisseur régulier, mais cela ne s’était pas encore
concrétisé. Le problème comportait deux dimensions, a expliqué Colleen MacKay. « Nous devons
vendre notre café aux établissements pour que les clients le connaissent. Ceux qui aiment le café
adorent Receiver, et il leur devient alors accessible. »

Une autre possibilité aurait été d’embaucher une ressource de l’externe pour la vente, mais sans
certitude de rendement il aurait été difficile de justifier l’investissement sur plusieurs années
pendant la phase de croissance, surtout compte tenu du budget restreint de marketing. Le budget
annuel prévu par Receiver pour le marketing au cours des années précédentes n’avait été que de
l’ordre de 10 000 $ à 15 000 $, et ce montant était peu susceptible de changer pour les années
subséquentes. Les trois associés savaient exactement comment réaliser la croissance qu’ils
recherchaient, et étaient convaincus qu’une telle croissance serait engendrée par la vente en
gros. L’entreprise ne souhaitait pas ouvrir d’autres cafés à l’extérieur de l’Île du Prince-Édouard,
n’envisageait pas le franchisage et souhaitait à tout prix protéger sa marque de qualité.

Les communications

Le bouche-à-oreille constituait le principal mode de promotion de la marque Receiver et, au dire
de Colleen, cela répondait très bien aux besoins de l’entreprise. Receiver faisait un peu de
publicité, surtout à l’échelle locale (dans The Buzz, un journal local axé sur les arts et la culture,
dans le magazine de l’Île du Prince-Édouard consacré à l’art de vivre, ainsi que dans les magazines
distribués aux touristes dans les hôtels locaux), mais celle-ci était axée sur les cafés plutôt que sur
la vente en gros. L’entreprise avait aussi été mentionnée dans des publications renommées telles
que le magazine « Bon Appétit ». Les autres activités de communication étaient plutôt restreintes,
et Receiver avait peu recours à Internet aux fins de marketing. Receiver avait un site Web
fournissant de l’information sur l’entreprise et ses deux établissements et son offre en gros (y
compris des renseignements pour les clients de gros éventuels), ainsi qu’une boutique en ligne
pour vendre ses sacs de café destinés à la consommation à domicile.

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Aperçu de la présence de Receiver dans les médias sociaux :
• Facebook : 3 800 « J’aime », 3 850 abonnés, cote de 4,9 sur 5; entre 1 et 5 publications par
semaine par l’entreprise, sous forme d’annonces, de photos et de renseignements sur les
événements et les produits, qui généraient entre 10 et 50 « J’aime » et entre 2 et 10
commentaires par publication.
• Twitter : 1 185 abonnés, 520 « J’aime »; environ un gazouillis par semaine jusqu’en mai 2018,
puis fort ralentissement (un seul au cours des quatre mois qui ont suivi); contenu portant sur des
raisons génériques d’acheter des produits alimentaires et des boissons chez Receiver, chaque
gazouillis générant environ trois « J’aime » et parfois un commentaire.
• Instagram : 8 200 abonnés dans deux comptes (un pour Receiver Coffee et un pour The Brass
Shop); 1 ou 2 publications chaque jour, sous forme de photos de produits et du personnel,
générant chacune entre 60 et 250 « J’aime » et un commentaire à l’occasion.

Chaque page du site Web contenait des liens vers chaque compte de médias sociaux. Receiver
avait également fait l’objet de commentaires en ligne positifs : 4,5 étoiles (sur 5) sur TripAdvisor
et Yelp.

Selon Colleen MacKay, la marque Receiver Coffee était synonyme de « qualité et communauté »,
et les associés avaient développé l’entreprise autour de ces deux aspects. L’entreprise accordait
une importance considérable à des facteurs tels la provenance des fèves de café, le traitement
des partenaires des canaux de distribution, et l’éthique et la durabilité dans la façon de mener les
affaires parce que, comme l’expliquait Colleen MacKay, c’est grâce à ses partenaires que Receiver
peut réussir en affaires. Pour ce qui est de l’image de la marque aux yeux des clients, elle a indiqué
que l’entreprise était jugée hipster, mais que ce n’était pas péjoratif. « Nous ne sommes pas
extravagants, a-t-elle dit. Nous sommes plutôt une entreprise à la mentalité familiale. » Ce
message de la marque ne semblait pas avoir la même résonance chez les clients de gros
potentiels, étant donné que la plupart des clients qui achetaient du café en gros le faisaient pour
soutenir leur propre marque et accroître leurs propres revenus et bénéfices. Pour mousser la
vente en gros chez Receiver, il apparaissait nécessaire d’explorer les moyens d’intégrer l’identité
de sa marque au positionnement d’un autre café.

Le défi de la vente en gros

Colleen MacKay a déclaré : « Je n’étais pas une grande consommatrice de café, j’étais plutôt une
cliente ordinaire, mais j’ai adopté le café de spécialité à cause de la qualité de Receiver et j’y suis
maintenant accro ». Receiver progressait bien, chaque année apportant de nouveaux défis et de
nouvelles possibilités de croissance. Colleen MacKay, Chris Francis et Sean Bruinooge étaient
certains qu’un marché plus grand à l’extérieur de l’Île du Prince-Édouard était accessible, mais
compte tenu de la concurrence importante, tant dans les Maritimes qu’à l’extérieur, et d’un
budget limité à 15 000 $, le défi était de taille. « Comment pouvons-nous continuer d’étendre
notre marché de gros? » se demandait Colleen. Ses associés et elle savaient parfaitement où ils
voulaient amener Receiver Coffee, mais ils ne savaient pas comment s’y prendre pour atteindre
leurs buts. Comment pourraient-ils concrétiser leurs projets afin de continuer de savourer le bon
goût du succès?

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