Le Programme d'Imagerie Motrice : Élaboration d'un protocole d'autorééducation - Kinedoc
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Institut de Formation aux Métiers de la Rééducation et Réadaptation Pays de la Loire 54, rue de la Baugerie – 44230 SAINT SÉBASTIEN-SUR-LOIRE Le Programme d’Imagerie Motrice : Élaboration d’un protocole d'autorééducation pour les patients du Centre de la Main d’Angers atteints du SDRC-1 Mélanie DUCORNETZ Travail Écrit de Fin d’Études En vue d’obtention du Diplôme d’État de Masseur-Kinésithérapeute Année scolaire : 2012-2013 RÉGION DES PAYS DE LA LOIRE
Résumé La douleur et les troubles trophiques observés chez les patients atteints du SDRC-1 (Syndrome Douloureux Régional Complexe de type 1) seraient la conséquence d’une réorganisation corticale. L’autorééducation par le Programme d’Imagerie Motrice (PIM) a été développée en réponse à la mise en échec de la thérapie miroir lorsque le SDRC-1 est installé depuis longtemps. Dans le cadre de sa mise en place au Centre de la Main d’Angers, un protocole a été élaboré en tenant compte des ressources du cabinet de kinésithérapie. Il définit les paramètres du PIM (population, matériel, modalités des trois phases, fréquence de travail) ainsi qu’une démarche pédagogique favorisant compétence et observance du patient. Si ces paramètres sont communs à l’ensemble des praticiens, la stratégie pédagogique utilisée est propre à chacun et s’adapte aux besoins et aux demandes du patient. Mots-clés Autorééducation Pédagogie Programme d’Imagerie Motrice Syndrome Douloureux Régional Complexe de Type 1 Thérapie miroir Keywords Self-rehabilitation Pedagogy Motor Imagery Program Complex Regional Pain Syndrome Type 1 Miror therapy
Sommaire Introduction ....................................................................................................................... 1 1 Mode d’action du PIM sur les troubles du SDRC-1 ................................................. 3 1.1 Présentation du SDRC-1 ......................................................................................... 3 1.2 Modèle cortical de la douleur .................................................................................. 6 1.2.1 Données de neuro-anatomie ........................................................................ 6 1.2.2 Réorganisation corticale et troubles moteurs et sensitifs............................. 7 1.2.3 Système de contrôle moteur, incongruence sensorimotrice et douleur ....... 9 1.2.4 Système nerveux sympathique et entretien de la douleur............................ 9 1.3 Stratégies de prise en charge ................................................................................. 11 1.3.1 La thérapie miroir pour le SDRC-1 aigu ................................................... 11 1.3.2 Le PIM pour le SDRC-1 chronique ........................................................... 12 2 Choix des paramètres du PIM................................................................................... 14 2.1 Population .............................................................................................................. 14 2.2 Matériel ................................................................................................................. 15 2.3 Modalités de réalisation ......................................................................................... 17 2.3.1 Reconnaissance de la latéralité .................................................................. 17 2.3.2 Mouvements imaginés ............................................................................... 17 2.3.3 Thérapie miroir .......................................................................................... 18 2.4 Fréquence de travail .............................................................................................. 18 3 Compétence et observance du patient ...................................................................... 20 3.1 Facteurs spécifiques à prendre en compte ............................................................. 20 3.2 Moyens pédagogiques retenus............................................................................... 21 3.2.1 Cours .......................................................................................................... 21 3.2.2 Apprentissage ............................................................................................ 21 3.2.3 Documents écrits ....................................................................................... 22 3.3 Utilisation de ces moyens pédagogiques lors de différentes étapes clés ............... 24 Discussion ......................................................................................................................... 28 Conclusion........................................................................................................................ 30 Bibliographie Annexes
Introduction Sachant que les kinésithérapeutes du Centre de la Main d’Angers prenaient régulièrement en charge des patients atteints du Syndrome Douloureux Régional Complexe de type 1 (SDRC-1), j’ai débuté mon stage mémoire avec la volonté de travailler sur un thème en lien avec cette affection qui m’intriguait. En effet, au cours d’un de mes stages précédents, une même kinésithérapeute prenait en charge tous les patients du centre où il avait été diagnostiqué le SDRC-1. Les autres kinésithérapeutes de l’équipe laissaient volontairement la prise en charge de ces sujets à leur collègue, eux-mêmes dépourvus sur le plan kinésithérapique devant les signes et symptômes propres à la pathologie, sans étiologie lésionnelle retrouvée. Je n’ai pas eu l’occasion de travailler avec cette kinésithérapeute et donc de découvrir le SDRC-1. Les kinésithérapeutes du Centre de la Main m’ont par la suite fait part de leur projet de mettre en place le Programme d’Imagerie Motrice (PIM) pour leurs futurs patients SDRC-1, ce qui m’a amenée au choix de travailler sur ce thème. En effet, le kinésithérapeute est un des professionnels de santé le mieux placé pour proposer ce programme au patient SDRC-1, puisqu’il le voit déjà régulièrement pour une prise en charge physiothérapique complémentaire à l’autorééducation par le PIM. De surcroît, il sera en mesure d’apprécier l’efficacité du PIM sur les troubles du SDRC-1 pour chaque patient en s’appuyant sur ses compétences d’évaluation des déficiences du corps humain. Le PIM est un programme d’autorééducation se basant sur l’imagerie mentale. L’image mentale est « une représentation figurative d’une chose, d’un acte ou d’une abstraction, dans l’esprit d’un individu. Cette organisation spatiale des connaissances dans la mémoire permet de projeter mentalement un référentiel, exact ou non, qui structure et guide les processus cognitifs et les adaptations psychomotrices. » (1). L’imagerie motrice est un versant de l’imagerie mentale, elle consiste à « imaginer une action sans l’exécuter physiquement ». Quant à la pratique en imagerie motrice, il s’agit de « la répétition ou révision d’actes moteurs imaginés avec l’intention d’améliorer leurs exécutions physiques » (Malouin, 2010). Ce programme a été développé pour traiter les troubles du SDRC-1, il diminue notamment la douleur en corrigeant certaines anomalies cérébrales mises en évidence dans cette pathologie. Il dure 6 semaines et est composé de trois phases distinctes, dont la dernière est la thérapie miroir, célèbre pour son efficacité sur la douleur du membre fantôme chez les amputés (2). Les exercices demandés sont différents pour chaque phase et leurs consignes et conseils de réalisation sont multiples et précis. De plus, ils sont à réaliser plusieurs fois par jour (3). Puisque le PIM est un programme d’autorééducation, le kinésithérapeute ne sera pas présent auprès du patient pour vérifier qu’il suit bien le programme d’une part et qu’il réalise correctement les exercices d’autre part. Par ailleurs, les exercices demandés peuvent interroger le patient qui s’étonnera de l’utilité de ceux-ci pour traiter les troubles au niveau de son membre atteint. Un transfert de connaissances et de compétences du kinésithérapeute à son patient semble ainsi nécessaire, afin que celui-ci s’investisse dans son autorééducation et maitrise les exercices pour garantir des effets sur les troubles du SDRC-1. En effet, le degré d’investissement du patient peut jouer sur l’efficacité de la technique. 1
Ainsi, au vu de la nature du PIM, et dans le cas spécifique de sa mise en place au Centre de la Main d’Angers, différents facteurs sont à considérer pour en assurer l’efficacité lors de sa réalisation future. Il s’agit de : facteurs contextuels, liés au cadre, soit au Centre de la Main facteurs humains, liés aux acteurs de la communication, c’est-à-dire au kinésithérapeute et à son patient candidat au PIM facteurs techniques, liés d’une part au choix des paramètres de réalisation du PIM, et d’autre part aux critères du message de communication entre les acteurs. Ma problématique est la suivante : Quel protocole élaborer pour mettre en place le Programme d’Imagerie Motrice au Centre de la Main d’Angers auprès de patients atteints du SDRC-1 ? La démarche d’élaboration du protocole s’effectuera en deux étapes. En effet, dans un premier temps, les paramètres de réalisation du PIM lui-même sont à définir en s’appuyant à la fois sur les données de la littérature et sur les ressources humaines et matérielles disponibles au Centre de la Main d’Angers. Dans un second temps, puisque le PIM se base sur de l’autorééducation, sa mise en place auprès du patient candidat du cabinet sera spécifique et devra favoriser compétence et observance de celui-ci au programme. Cependant, la compréhension du mode d’action du PIM sur le SDRC-1 apparaît comme un pré-requis à la mise en place de ce programme, justifiant son emploi pour la prise en charge de cette pathologie et l’intérêt des trois phases. En outre, la connaissance de ces informations sera nécessaire lors des deux étapes de la démarche citées précédemment. En effet, elle permettra d’orienter le choix entre les différents paramètres possibles du PIM et pour le kinésithérapeute, elle permettra d’assurer l’adhérence du patient au programme en lui transmettant certaines de ces informations dans un second temps. Ainsi, le mode d’action du PIM, qui s’appuie sur l’hypothèse physiopathologique du modèle cortical de la douleur, sera développé en première partie de ce travail. Ensuite, les paramètres du PIM choisis pour le Centre de la Main seront présentés dans une deuxième partie. Enfin, après avoir défini les différents facteurs à prendre en compte pour favoriser la compliance et l’observance du patient au PIM, l’exploitation de différentes méthodes et outils pédagogiques sera exposée dans la troisième partie de ce travail. 2
1 Mode d’action du PIM sur les troubles du SDRC-1 1.1 Présentation du SDRC-1 Définition Le terme clinique de syndrome douloureux régional complexe de type I (SDRC-1) a été retenu par le groupe de travail International Association for the Study of Pain (IASP) et introduit lors d’une conférence de consensus ayant eu lieu à Orlando en Floride en 1993. Ce terme exclut toute référence à une physiopathologie incertaine impliquant le système nerveux sympathique et remplace les nombreuses appellations antérieures du syndrome, telles que « ostéoporose douloureuse post-traumatique » (Leriche, 1930), « dystrophie réflexe des extrémités » (de Takats, 1937, Mandl, 1944), « rhumatisme neurotrophique » (Ravault, 1946) et le plus souvent « reflex sympathetic dystrophy » (Evans, 1946) dans la littérature anglo- saxonne ou « dystrophie sympathique réflexe » en français, qui comprend plusieurs formes cliniques dont l’algo(neuro)dystrophie (et la causalgie). Dans la dénomination « syndrome douloureux régional complexe », le terme « syndrome » désigne l’ensemble des signes cliniques et symptômes retrouvés dont la douleur est le symptôme principal retenu, leur distribution est régionale, elle s’étend au-delà de la zone initiale traumatique et le mot « complexe » fait référence à la grande variabilité clinique retrouvée, en lien avec l’implication de nombreux mécanismes physiopathologiques. Epidémiologie A ce jour, aucune étude épidémiologique à grande échelle n’a été menée sur le SDRC-1. Une incidence de 5,46 nouveaux cas par 100 000 habitants par an a été retrouvée en 2003 par Sandroni et al. dans le comté d’Olmstead au Etats-Unis (4), alors que De Mos et al. indiquent en 2007 une incidence de 26,2 nouveaux cas par 100 000 habitants par an dans leur étude menée aux Pays-Bas (5). Selon ces deux études, les femmes seraient affectées au moins trois fois plus que les hommes, au membre supérieur plus qu’au membre inférieur, et le principal événement précipitant serait une fracture. Il apparaît de manière consensuelle que le SDRC-1 survient en tant que complication dans la grande majorité des cas : après un traumatisme (fracture, immobilisation, geste chirurgical), une affection neurologique (hémiplégie, maladie de Parkinson, neuropathie), viscérale (coronaropathie) ou métabolique (diabète), un traitement médicamenteux prolongé ou encore une grossesse. L’apparition essentielle d’un SDRC-1 est souvent surestimée. Le rôle de facteurs psychologiques dans cette apparition est inconnu, mais il semble que des troubles psychologiques seraient davantage la conséquence du syndrome à cause de l’inactivité et contribueraient au maintien d’une douleur chronique. 3
Diagnostic clinique Lors de cette même conférence de consensus de 1993 à Orlando, l’IASP propose une classification qui distingue le SDRC de type 1 (SDRC-1) du SDRC de type 2 (SDRC-2), dont les dénominations antérieures étaient respectivement algodystrophie et causalgie. Cette classification se base sur la description de la douleur (la distinction est faite entre l’allodynie qui est une douleur résultant d’un contact non nociceptif et l’hyperalgie qui comprend l’allodynie et qui est une douleur disproportionnée par rapport au stimulus) et inclut les troubles vasomoteurs, sudomoteurs et œdémateux, mais ne tient pas compte de la dysfonction motrice et de l’enraidissement articulaire secondaire. (6) Devant le manque de spécificité de ces critères (36%-41%), malgré leur grande sensibilité (98%-100%), conduisant à des erreurs de diagnostic par excès (7), une nouvelle méthode diagnostique est définie en 1999 et adoptée par l’IASP lors du congrès de Budapest en 2003 (Tableau 1) (8). En 2010, Harden et Bruelh évaluent la sensibilité de cette méthode à 99% et sa spécificité à 68% pour l’utilisation clinique (sensible à 78% et spécifique à 79% pour la recherche) (9). 4
Bien que ces critères diagnostiques aient été clairement définis et révisés par l’IASP, les différentes études traitant du SDRC-1 ne les utilisent pas systématiquement, ce qui rend leurs résultats difficilement comparables. Evolution L’évolution du syndrome est classiquement décrite comme une succession de trois phases (Tableau 2) (10) : La durée d’évolution totale du SDRC-1 est de quelques mois à 1 an, voire 2 ans pour une localisation à la main. Dans moins de 10 à 15% des cas, les patients peuvent garder des séquelles dans la zone atteinte : raideur douloureuse, atrophie, ostéoporose, hyperpathie, allodynie. Un patient algodystrophique encore douloureux au stade III atrophique a une probabilité faible de guérir spontanément. Cette évolution en trois phases est aujourd’hui remise en cause par la mise en évidence de sous-types du SDRC-1. En effet, selon Bruelh et Harden (11), les mécanismes physiopathologiques se retrouvent en différentes proportions d’un patient à l’autre, et chez un même patient au fur et à mesure de l’évolution du SDRC-1, formant ainsi trois sous-types distincts. Le premier correspond à la prédominance des signes vasomoteurs et des troubles trophiques, le second associe la douleur et les anomalies sensorielles, alors que le troisième est composé de la douleur intense et d’une coloration anormale du membre atteint. Ces trois sous-groupes ont une durée d’évolution identique. 5
Physiopathologie La physiopathologie du SDRC-1 reste controversée et a fait l’objet de multiples investigations ces dernières années. Différents mécanismes sous-jacents à la pathologie ont été retrouvés pour expliquer la présence d’anomalies centrales et périphériques. Il s’agit de mécanismes inflammatoires, vasculaires, sympathiques et nerveux périphériques et centraux, dont les modalités d’apparition et d’action ne sont pas encore clairement identifiées. La coexistence d’anomalies à la fois périphériques et centrales chez les patients atteints du SDRC-1 sont à l’origine de deux théories physiopathologiques pour identifier le point de départ de la pathologie : une théorie centrale (modèle cortical de la douleur) et une théorie périphérique. Les anomalies périphériques regroupent une perturbation de l’activité des neurones sympathiques en relation avec une douleur spontanée qui augmente lorsque cette activité sympathique augmente, une augmentation de la réponse inflammatoire, une hypoxie de la peau, une diminution de la vasoconstriction périphérique et une diminution des réflexes proprioceptifs. Les anomalies centrales rassemblent une perturbation de l’activité sensorielle, une inhibition du cortex moteur et une perturbation du schéma corporel (3). Le modèle cortical de la douleur (cortical model of pain (12)) est la théorie prédominante pour expliquer l’apparition des troubles du SDRC-1, sur laquelle se basent les techniques de réentrainement sensorimoteur, telles que la thérapie miroir et le PIM (3). 1.2 Modèle cortical de la douleur 1.2.1 Données de neuro-anatomie Le cortex cérébral est la couche externe du cerveau, épaisse de quelques millimètres seulement. Il est composé neurones qui sont disposés en colonnes verticales distinctes et en couches horizontales. Ces colonnes de neurones corticaux créent des connexions avec les neurones du corps entier, formant des circuits neuronaux particuliers. Grâce aux techniques de Tomographie par Emission de Positons (TEP) et d’Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnelle (IRMf), chaque zone du cortex a pu être associée à une fonction appelée aire. En effet, des variations du débit sanguin dans une zone corticale précise sont visualisées lorsque le sujet effectue une tâche particulière, qu’elle soit motrice, sensitive ou cognitive. Par exemple, l’aire visuelle se situe dans la zone occipitale et l’aire auditive se situe dans la zone temporale. Afin de comprendre la physiopathologie du SDRC-1, il convient de s’intéresser à l’aire somatosensorielle primaire S1 liée à la zone pariétale, et aux aires motrices primaire M1 et secondaires M2 (composée elle-même des aires prémotrice et motrice supplémentaire) liées à la zone frontale. Le cerveau étant composé de deux hémisphères, ces aires sont doubles. En outre, puisque leurs voies neuronales spécifiques décussent au niveau du tronc cérébral, elles codent pour l’hémicorps controlatéral. L’aire S1 reçoit des influx sensitifs des récepteurs proprioceptifs profonds et extéroceptifs superficiels des différentes parties du corps, alors que 6
l’aire M1 intervient dans l’exécution du mouvement et l’aire M2 est responsable de la planification et de l’organisation du mouvement (13). Au niveau des aires corticales primaires, il existe une représentation du corps humain. Cette représentation ne se base pas sur la taille réelle des parties du corps, mais est définie selon des critères de finesse et de richesse des récepteurs sensitifs pour le cortex sensitif, et des mouvements pour le cortex moteur. Cette correspondance entre le corps et les aires sensitives et motrices du système nerveux central est appelée somatotopie sensitive et somatotopie fonctionnelle, et est à l’origine de l’homunculus, du neurologue américain Wilder Penfield en 1950 (Figure 1). Chez l’homme, la main et la face sont surdimensionnées, alors que le tronc et les segments proximaux des membres ont une petite surface de projection. Les circuits neuronaux sont mis en place lors du développement embryonnaire mais peuvent se modifier tout au long de la vie, suivant les expériences vécues, c’est-à-dire en fonction des influx sensitifs qui les stimulent et des influx moteurs générés. Le cerveau est capable de se remodeler afin d’être le plus efficace possible : c’est la plasticité cérébrale. Ce remodelage se traduit lors d’un apprentissage par la création de neurones et de nouvelles connexions neuronales dans la zone cérébrale stimulée ou l’activation de connexions préexistantes. A l’inverse, ce processus permet également d’effacer des acquisitions antérieures : il s’agit de désapprentissages, qui se traduiront par une disparition de cellules neuronales dans la zone corticale spécifique par non sollicitation. 1.2.2 Réorganisation corticale et troubles moteurs et sensitifs Chez des patients SDRC-1, une réorganisation de l’aire S1 a été constatée grâce à l’IRMf. La représentation de la partie atteinte est plus petite par rapport au côté sain. En effet, la représentation des territoires adjacents s’étend sur la zone normalement dédiée au membre atteint. Par exemple, lors d’une algodystrophie de la main, il y a une diminution de l’aire corticale fonctionnelle de la main qui est envahie par la zone voisine (celle de la lèvre inférieure) (14). 7
De même, une réorganisation du cortex moteur primaire (M1) a été mise en évidence du côté controlatéral au membre atteint, c’est-à-dire au niveau de l’aire corticale représentant le membre non atteint (15). Contrairement à S1, la surface de M1 est considérablement augmentée. Cela serait du à une augmentation de l’aire homologue controlatérale via des fibres entre les deux hémisphères, probablement pour suppléer une demande attentionnelle trop importante pour réaliser des mouvements avec le membre atteint (16). En effet, des troubles moteurs sont retrouvés chez les patients algodystrophiques : ils présentent une difficulté à effectuer des mouvements complexes, un retard à l’initiation du mouvement, une faiblesse musculaire, ainsi que des tremblements et dystonies. Il existe plusieurs hypothèses concernant l’origine de la réorganisation cérébrale. D’après Maihöfner, cette réorganisation serait la conséquence de la répétition d’influx nociceptifs, alors que pour l’IASP, cela serait du à une sous-utilisation du segment de membre à cause de l’immobilisation et de la douleur post-traumatiques. La zone du segment de membre de l’aire somatosensorielle S1 serait insuffisamment stimulée, les réseaux neuronaux auparavant dédiés au segment de membre feraient de nouvelles connexions avec les zones corticales voisines dédiées à d’autres parties du corps. Des recherches menées par Toussaint et Meugnot en 2012 (17) confirment que la réorganisation corticale du segment de membre atteint débute précocement : dès 24h après l’immobilisation d’un poignet par une attelle chez des sujets sains. L’origine de la réorganisation corticale serait donc la sous-utilisation et non la douleur, qui elle serait la conséquence de la perturbation de la représentation du corps. Différents troubles sensitifs sont constatés chez les patients SDRC-1, en conséquence à la réorganisation de l’aire de S1 dédiée au segment de membre atteint. Plus de 80% des sujets atteints du SDRC-1 présentent un syndrome d’exclusion acquis. L’exclusion fonctionnelle ou syndrome d’exclusion segmentaire est l’inutilisation ou la sous- utilisation d’un membre ou d’un segment de membre lors des activités quotidiennes, possiblement réversible à la demande d’un tiers, sans qu’aucune lésion du système nerveux central ne soit constatée. Elle peut se produire à la suite d’un traumatisme ou d’une immobilisation ; le sujet omet de se servir d’une partie de son corps qui est effacé de son schéma moteur. (1) Le niveau d’attention portée au membre est perturbé, les patients négligent leur membre et le mettent souvent hors de leur champ de vision (18). Les patients ont une sensation de membre étranger. Le membre atteint est décrit comme hostile, il est découplé du corps et considéré comme une entité séparée avec son propre système de commande. Les patients SDRC-1 ont une image de leur membre atteint altérée. Par ailleurs, une image déformée du membre est donnée et se traduit par une surestimation de sa taille, une différence de température perçue par rapport à celle réelle est constatée, et certains patients ont des difficultés à se représenter mentalement les parties atteintes (14). De plus, en 2005, Pleger a montré une corrélation entre l’intensité de la douleur et le degré de réduction corticale de la zone atteinte : plus la réduction est importante, plus la douleur est intense. Inversement, les techniques d’imagerie montrent que la baisse de la douleur dans le SDRC-1 s’accompagne d’une réorganisation corticale correcte. (14) 8
Là encore, différentes hypothèses tentent d’expliquer le lien entre réorganisation corticale et douleur. L’hypothèse la plus souvent retenue est la discordance entre planification (feedforward) et retour sensitif (feedback) lors d’un mouvement volontaire, sur laquelle sont fondés la thérapie miroir et le PIM. 1.2.3 Système de contrôle moteur, incongruence sensorimotrice et douleur Le Système de Contrôle Moteur (SCM), grâce à la relation privilégiée entre systèmes sensoriel et moteur, permet à un individu d’effectuer des mouvements fluides et coordonnés et de le préparer aux conséquences d’un tel mouvement, en anticipant une menace éventuelle par la rencontre avec un obstacle. Afin de définir un ordre moteur à l’origine d’un mouvement, le SCM recueille des informations issues du système sensoriel sur l’état actuel de l’individu et de l’environnement (visuelles, proprioceptives, extéroceptives) et prédit l’état futur du système sensoriel après le mouvement (feedforward). La comparaison des informations sensorielles entre ces deux états permet d’élaborer la commande motrice. Tout au long du mouvement volontaire, il y a un retour continu d’informations au SCM qui rendent compte de l’état véritable du système sensoriel (feedback). Le SCM compare ainsi cet état au modèle prédit (feedforward) et corrige les éventuelles déviations en réajustant la commande motrice afin que le mouvement soit précis et efficace. Le feedforward est bien souvent une approximation grossière des véritables conséquences de la commande motrice, mais est nécessaire notamment pour préparer l’individu aux conséquences de son mouvement. Ce système est parfois mis en évidence dans la vie de tous les jours : le mauvais jugement de la hauteur d’un trottoir peut entrainer un trébuchement lorsque la personne le franchit, ce qui la surprend car elle s’attendait à monter sur le trottoir sans encombre (15) (19). D’après McCabe (15) (19), dans le cas du SDRC-I, des perturbations continues dues à la réorganisation corticale ou à des influx sensitifs altérés à cause de l’immobilisation post- traumatique seraient à l’origine d’erreurs récurrentes entre les systèmes sensitif et moteur. Il y aurait donc une discordance entre le feedforward et le feedback erroné, à l’origine d’une altération du SCM. Ce conflit sensorimoteur prolongé induirait douleurs et autres symptômes, de la même manière que le mal de mer apparaît lorsqu’il y a un conflit sensoriel entre les messages provenant du vestibule indiquant un mouvement alors que la vision est à l’origine d’un message indiquant l’absence de mouvement (20). Puisque la douleur est un mécanisme protecteur, elle serait produite par le cerveau dans le but d’avertir d’un danger lié au dysfonctionnement du SCM (15) (19). 1.2.4 Système nerveux sympathique et entretien de la douleur Le rôle du système nerveux sympathique est de permettre au corps de réagir face à un danger. Il est activé dans les situations de stress, par un message d’alerte du système nerveux central (13). Un fonctionnement fluide du SCM est nécessaire à la sécurité de l’individu, c’est pourquoi, en cas d’altération de celui-ci, le système nerveux autonome est alerté et le système nerveux sympathique stimulé pour se préparer à la défense, à l’origine des troubles 9
périphériques constatés dans le cas du SDRC-1 (changement de la couleur et de la température de la peau, œdème, sueur) (19) (15). Ces troubles périphériques, ainsi que la douleur produite en réponse au dysfonctionnement du SCM, sont à l’origine d’un déficit de mobilité du segment atteint et d’une impotence fonctionnelle, ce qui conduit à une sous-utilisation du membre. Or, la douleur est la conséquence d’une immobilisation, donc le système sympathique participe au maintien du cercle vicieux. Ainsi, une réorganisation cérébrale se traduisant par un rétrécissement de la représentation du membre atteint dans le cortex primaire somatosensoriel a été constatée chez les patients atteints du SDRC-1, en lien avec la manifestation de douleurs au niveau du membre, associée à d’autres troubles périphériques (Figure 2). Il apparaît alors intéressant d’introduire des techniques qui stimuleront ces zones corticales pour permettre progressivement une nouvelle réorganisation cérébrale, donc une amélioration symptomatique et fonctionnelle. 10
1.3 Stratégies de prise en charge 1.3.1 La thérapie miroir pour le SDRC-1 aigu La première stratégie est la thérapie miroir, qui a été inventée par Vilayanur Ramachandran en 1996 pour lutter contre des douleurs ressenties chez des amputés dans leur membre fantôme. La thérapie miroir a ensuite été utilisée pour la première fois en 2003 par McCabe et al auprès de patients atteints du SDRC-1 (2). La réalisation de la thérapie miroir nécessite tout d’abord une bonne installation du sujet (Figure 3). Un miroir est placé dans le plan sagittal du sujet, entre ses membres, et il doit se pencher de manière à voir le reflet de son membre sain dans le miroir. Son membre atteint n’est alors plus visible. Il doit se concentrer sur ce qu’il voit dans le miroir. Ainsi, en bougeant son membre sain, le patient a l’illusion que le membre atteint bouge correctement en réponse aux commandes motrices. Différentes théories tentent d’expliquer le mode d’action de la thérapie miroir. Actuellement, l’hypothèse la plus reconnue est la restitution d’une congruence sensorimotrice entre les influx sensitifs (extéroceptifs, proprioceptifs, douloureux) et sensoriels (visuels), et la commande motrice. McCabe définit la thérapie miroir comme une technique de leurre sensoriel, où les informations visuelles priment sur les informations sensitives en provenance du membre atteint. Elle ferait appel à l’utilisation des neurones miroirs, c’est-à-dire qu’il y aurait une activation des mêmes zones cérébrales chez l’individu lorsqu’il regarde l’exécution d’une action que chez l’exécuteur. Dans l’étude de 2003 de McCabe et al. (2), 8 patients présentant un SDRC-1 à la cheville évoluant de 3 semaines à 3 ans ont suivi un programme de 6 semaines comprenant deux phases contrôle et une dernière phase de thérapie miroir (plusieurs séances par jour de flexion-extension de la cheville pendant 10 minutes à chaque fois). Seuls les résultats à l’issue de la phase de thérapie miroir ont été significatifs. Pour les 3 patients dont l’évolution du SDRC-1était inférieure ou égale à 8 semaines (phase aiguë), il a été constaté une régression des troubles trophiques, une diminution saisissante de leur douleur et un retour à la normale de la fonction. La douleur diminuait pendant la pratique des exercices avec le miroir, puis 11
augmentait brutalement au retrait de celui-ci. Au fil des jours, les périodes sans réapparition de la douleur à l’arrêt des exercices ont duré de plus en plus longtemps, jusqu’à ce qu’elle ne réapparaisse plus, au bout de 6 semaines. Les patients en phase subaiguë (5 mois et 1 an) ont rapporté une diminution de la sensation de rigidité lors du mouvement de leur cheville et une amélioration de la fonction. Pour le patient dont le SDRC-1 est apparu il y a 1 an, la diminution de la douleur a seulement été constatée 6 semaines après la fin de la thérapie miroir, contrairement au patient de 5 mois d’évolution du SDRC-1, pour qui elle avait diminué au fil des séances. Une régression des troubles vasomoteurs a été objectivée seulement chez ce dernier sujet. Enfin, aucune amélioration n’a été mise en évidence chez les 3 sujets en phase chronique du SDRC-1 (2 ans ou plus).Il a même été rapporté que la thérapie miroir pouvait entrainer une exacerbation des douleurs pour ces patients (3). La thérapie miroir a ainsi montré des résultats satisfaisants pour les patients SDRC-1 aigus. Cependant, elle n’a pas eu d’effet positif sur les troubles du SDRC-1en phase chronique. Afin de palier à ce manque de résultat, l’australien G. Lorimer Moseley, physiothérapeute spécialisé dans le traitement de la douleur chronique, a développé un programme d’autorééducation standard basé sur l’imagerie motrice graduelle (graded motor imagery) : le Motor Imagery Program (MIP) ou Programme d’Imagerie Motrice (PIM) en français. 1.3.2 Le PIM pour le SDRC-1 chronique Afin d’expliquer l’échec de la thérapie miroir dans le traitement de la douleur et des troubles trophiques pour le SDRC-1 chronique, McCabe et son équipe ont émis plusieurs hypothèses (2) : la réponse analgésique est empêchée soit par les limitations de mouvement du membre atteint à cause des troubles trophiques, soit par des mécanismes nociceptifs trop développés ou des modifications corticales trop importantes. De plus, cet auteur reporte une exacerbation de la douleur chez les patients SDRC-1 chronique lors de la pratique de la thérapie miroir. Par ailleurs, il a été constaté que les sujets atteints du SDRC-1 mettaient plus de temps à reconnaître la latéralité d’une main représentée sur une photo si cette latéralité coïncidait avec celle de leur main atteinte. Moseley a par la suite démontré que cette augmentation du temps de réponse était directement en lien avec l’importance de la durée d’évolution du SDRC-1 et l’importance de la douleur que provoquerait l’exécution du mouvement par le patient (21). Il postule donc que pour éviter l’apparition de douleurs lors de la thérapie miroir et diminuer la douleur originelle chez les patients SDRC-1 chronique, il est nécessaire, dans un premier temps, de ne pas impliquer de mouvement du membre atteint. Il introduit ainsi deux phases d’imagerie motrice avant la thérapie miroir : la reconnaissance de la latéralité et la phase des mouvements imaginés. Moseley s’appuie ainsi sur la thèse que les trois phases du PIM activent séquentiellement les mécanismes corticaux responsables du mouvement du membre atteint (3). Ce serait l’activation du cortex prémoteur (M2) lors de la phase 1, sans l’activation du cortex moteur primaire (M1) (stimulé lors des phases 2 et 3) qui serait à l’origine de l’efficacité du PIM. L’activation des réseaux neuronaux responsables de la préparation des mouvements (phase 1) 12
est nécessaire avant l’activation de ceux de l’exécution des mouvements imaginés (phase 2) et réels (phase 3). Moseley a montré que le respect de l’ordre de ces phases est important pour garantir les effets du PIM, confirmant ainsi la thèse de l’activation neuronale séquentielle (18). Différentes composantes de l’Imagerie Motrice (IM) sont à prendre en compte. La perspective peut être interne (imagination de son propre membre) ce qui active les aires motrices, ou bien externe (imagination du mouvement comme s’il était vu par quelqu’un d’autre) ce qui active les aires visuelles (Kosslyn, 1999). L’IM peut être explicite, c’est-à-dire verbalisable, consciente (stimulation mentale du mouvement volontaire) et dépendante du contexte, ou bien implicite soit non verbalisable, indépendante du contexte et inconsciente. Enfin, la modalité de l’IM peut être soit visuelle (s’imaginer voir l’action), soit kinesthésique (s’imaginer ressentir les sensations accompagnant l’action). L’IM serait plus efficace en perspective interne, avec sollicitation de la modalité kinesthésique (22). La phase de reconnaissance de la latéralité implique une imagerie motrice implicite, en perspective externe et de modalité visuelle, alors que la phase des mouvements imaginés se caractérise par une imagerie motrice explicite, en perspective interne et de modalité kinesthésique. Deux études de niveau de preuve II ont été réalisées par Moseley et son équipe pour prouver l’efficacité du PIM dans la prise en charge des SDRC-1 en phase chronique (3) (23). Les patients sont partagés en un groupe expérimental qui suivra le PIM et un groupe contrôle qui bénéficiera d’une prise en charge conventionnelle. Les paramètres étudiés pour évaluer l’efficacité du PIM sont la douleur, l’œdème et la fonction du membre atteint. La première étude est un essai clinique randomisé à simple aveugle avec un devis croisé (3). Des améliorations importantes de la douleur et de l’œdème ont été mesurées chez le groupe expérimental après 6 semaines de traitement ; elles ont ensuite été retrouvées dans le groupe contrôle à partir du commencement de la pratique du PIM. 6 semaines après la fin du PIM, environ 50% des patients ne remplissaient plus les critères diagnostiques de Bruelh et al. de 1999. La seconde étude, qui est un essai clinique randomisé à simple aveugle sans devis croisé (23), met en évidence une forte diminution de la douleur avec une importante amélioration de la fonction, maintenues 6 mois après le début du programme. L’activation séquentielle des mécanismes neuronaux responsables du mouvement par le PIM permet donc une amélioration des signes cliniques et symptômes retrouvés dans le SDRC-1, ce qui justifie l’intérêt de mettre en place de ce programme d’imagerie motrice graduelle pour les patients du Centre de la Main d’Angers. Dans ce but, les différents paramètres du PIM restent à définir. 13
2 Choix des paramètres du PIM 2.1 Population Le SDRC-1 est une pathologie régulièrement prise en charge au Centre de la Main, que ce soit en phase aigue ou chronique. En effet, il peut s’agir : de patients dont le diagnostic du SDRC-1 est établi par les chirurgiens de la main (déjà suivis ou non au centre pour une autre pathologie) (SDRC-1 aigu) de patients déjà diagnostiqués comme algodystrophiques, s’adressant directement aux kinésithérapeutes pour une prise en charge spécifique (SDRC-1 aigu ou chronique) de patients déjà diagnostiqués comme algodystrophiques, venant consulter un chirurgien de la main pour trouver une solution thérapeutique à leur SDRC-1 qui dure (SDRC-1 chronique). Il semble qu’il existe à ce jour trois moyens de définir, pour un patient donné, quelle technique, entre la thérapie miroir et le PIM, est la plus adaptée pour diminuer sa douleur et ses troubles trophiques, et permettant un retour à la normale de la fonction du membre atteint. Il n’existe aucun consensus dans la littérature pour définir clairement les indications (et contre-indications) de l’utilisation du PIM chez des patients atteints de SDRC-1. Tout d’abord, puisque les résultats de la thérapie miroir seule sont influencés par la durée d’évolution du SDRC-1 (2), il semble que ce paramètre permette de déterminer si un patient peut participer au PIM. En effet, lorsque les résultats obtenus suite à la thérapie miroir sont concluants sur la douleur et les troubles trophiques, il ne semble pas nécessaire d’ajouter les deux premières phases du PIM. Ainsi, le PIM n’est pas indiqué pour un SDRC-1 de 8 semaines ou moins, alors que c’est le cas pour un SDRC-1 d’une durée supérieure à 2 ans. Les résultats de la thérapie miroir sont plus mitigés pour des SDRC-1 dont les durées d’évolution sont respectivement 5 mois et 1 an. Que ce soit sur le site internet ou dans la seconde étude de Moseley (23), aucune notion de durée d’évolution n’est mentionnée vis-à-vis des patients qui suivent le PIM. Dans la première étude (3), les patients présentent un SDRC-1 depuis au moins 6 mois. Les résultats indiquent une baisse de la douleur et de l’œdème dès la première phase. Cependant, les résultats obtenus en fonction de la chronicité du SDRC-1 pour chaque patient ne sont pas précisés. Ensuite, une équipe de chercheurs (24) a mis en évidence une corrélation entre l’exclusion du membre et l’efficacité de la thérapie miroir : plus le patient perçoit son membre de manière déformée, moins la thérapie miroir entraine de diminution des troubles du SDRC- 1. Ainsi, plus le degré d’étrangeté du membre est important, plus le PIM est indiqué. Cependant, aucune technique pour mesurer objectivement le degré d’étrangeté du membre n’a été à ce jour été développée. Enfin, sur le site internet de référence, pour la phase de reconnaissance de la latéralité d’une main, les valeurs normales de la rapidité et de la justesse des réponses pour un sujet 14
sain sont données : la justesse des réponses doit atteindre 80% et le temps de réponse doit être de 2 secondes ± 0,5. Par ailleurs, les valeurs de ces paramètres doivent être à peu près égales pour la droite et pour la gauche, et les résultats doivent être stables et constants pendant au moins une semaine. Il est précisé que ces normales sont basées sur les résultats de centaines d’individus et qu’il se peut que même après des mois de pratique le patient n’atteigne pas ces valeurs. Ainsi, il est possible d’imaginer un test où le patient candidat au PIM reproduirait le travail demandé à la première phase, et où les deux paramètres précédents témoignant de sa performance seraient enregistrés, puis comparés aux valeurs normales. Si ces résultats se rapprochent de la normale ou la surpassent, le patient commencerait directement par la thérapie miroir. Au Centre de la Main, les critères d’inclusion retenus pour la pratique du PIM sont la survenue d’un SDRC-1 depuis plus de 8 semaines et une localisation du SDRC-1 à la main et/ou au poignet. Les critères d’exclusion retenus sont une extinction motrice, une exacerbation de la douleur et/ou des troubles du mouvement, une incapacité à croire en l’illusion, un refus de participation du patient au PIM après l’annonce de son existence par son kinésithérapeute, des troubles psychologiques importants ou des troubles de la concentration et de la compréhension qui seraient responsables d’une impossibilité à réaliser le PIM, et enfin, une localisation bilatérale du SDRC-1. Deux patientes prises en charge au centre respectent les critères d’inclusion et d’exclusion. Elles suivent le PIM au fur et à mesure de la mise en place du protocole et participeront ainsi à l’élaboration de celui-ci. 2.2 Matériel Dans les deux essais randomisés à simple aveugle menés par Moseley (3) (23), deux banques de x photos de mains droites sont créées selon le genre et dans différentes positions et orientations. Ces photos sont ensuite renversées digitalement afin d’obtenir les photos de mains gauches correspondantes. Il y a ainsi deux banques de 2x images : mains masculines droites et gauches, mains féminines droites et gauches. De plus, une boîte miroir de dimensions 300mmx300mm est fournie aux sujets lors de la troisième phase, afin de dissimuler leur main atteinte. Sur le site internet (25) dédié à la description du PIM et à sa réalisation, il est possible de se procurer le matériel nécessaire à la réalisation du programme. Plusieurs solutions sont possible : lot de 48 photos de mains droites et gauches sous forme de cartes, accès de deux mois en ligne au logiciel Recognise [TM] ou application mobile pour la réalisation de la phase 1. De plus, pour la dernière phase du programme, le site propose un miroir de dimensions 300mm x 295mm. Tous ces produits sont disponibles à la vente sur le site internet (25). Afin de mettre à bien la réalisation du PIM, le cabinet de kinésithérapeutes du Centre de la Main s’est procuré différents outils. 15
Tout d’abord, 1520 photos de mains droite et gauche ont été fournies (au format classique jpeg, sur ordinateur) par le département de la rééducation de la main des Hôpitaux Universitaires de Grenoble. Ces photos représentent des mains masculines et féminines dans différentes positions et situations (tenue ou utilisation d’objets simples comme un balle, une bouteille, un clavier d’ordinateur…) déjà rencontrées et utilisées par le patient (Annexe 1). Chaque photo illustrant une position ou situation a été renversée digitalement à l’aide d’un logiciel de photographie pour obtenir deux photos de mains droite et gauche similaires. Ces photos ont différents points communs : les mains ont été prises d’une vue supérieure, ce qui correspond à l’angle de vue du sujet qui regarde sa main, le fond des photos est uniforme et de couleur foncée pour mettre en évidence la couleur du membre, la dimension de la main est identique sur chaque photo et le cadrage coupe toujours l’avant-bras de manière à ne voir que sa moitié distale. De plus, les mains représentées sont dépourvues de tatouages, de vernis coloré sur les ongles et de bijoux. Pour la 1ère phase, la totalité des photos est utilisée et elles sont placées dans différentes orientations (une photo représentant une position sert à en créer 8, droites et gauches mélangées). Elles ont été classées de manière aléatoire de façon à ce que les orientations, la latéralité de la main et les positions et situations diffèrent régulièrement. Pour les 2e et 3e phases, les photos contenant un objet ont été exclues et le restant a été trié selon la latéralité de la main représentée, mais pas selon le genre, les différences entre les mains masculines et féminines étant jugées peu importantes. Elles ont ensuite été partagées en deux niveaux (niveaux 1 et 2) selon la difficulté du mouvement à réaliser, le niveau 1 étant le plus facile. Le choix d’un support informatique implique la nécessité pour le patient de disposer d’un ordinateur. Les photos ont été classées en dossiers sur Cd-rom. Ainsi, un patient présentant un SDRC-1 au niveau de la main droite sélectionnera le dossier « mon côté atteint est le droit », puis il sélectionnera la phase du programme à laquelle il est rendu. De cette manière, la latéralité des photos pour les phases 2 et 3 seront adaptées : mains représentant le côté atteint pour la phase 2 et mains représentant le côté sain pour la phase 3. Pour la 3e phase du PIM, le cabinet s’est équipé en boîtes miroir (Figure 4). Ce modèle a été retenu pour sa capacité à dissimuler facilement le membre atteint de la vue du patient et à se plier pour pouvoir se transporter facilement. 16
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