LE VOYAGE ET L'AVENTURE : POURQUOI ALLER VERS L'INCONNU ? - Jardin ...

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THÈME 1

LE VOYAGE ET L’AVENTURE : POURQUOI ALLER VERS L’INCONNU ?

Le cycle 3 a développé le thème de l’aventure au pluriel : les héros vivent « des aventures », c'est-à-dire qu’ils font rêver les
jeunes lecteurs en leur faisant partager des dangers, traverser des péripéties avec la certitude qu’une fin heureuse accompagne
ces récits. Ce à quoi invite le thème 1 du programme de 5e, et qui ouvre donc le cycle 4, est d’une autre nature : il s’agit de vrai
voyage, d’aventures le plus souvent vécues et dont les motivations et l’issue sont parfois bien plus rudes qu’un roman de litté-
rature de jeunesse.

Trois niveaux de réflexion sont proposés ici, que l’on peut décliner à partir de l’atelier d’ouverture, des deux parcours et de
l’atelier.

▶ Le premier est celui de la découverte de ses propres motivations : Pourquoi, dès l’enfance, en imaginant depuis sa chambre,
le vaste monde, peut-on avoir envie de partir ? Pourquoi ce besoin de s’arracher à ce que l’on aime, en quête d’inconnu ? C’est là
une première occasion de permettre aux élèves de se familiariser avec l’expression de sentiments parfois confus, de revenir sur
la contradiction intérieure qui peut exister entre la peur et l’envie, et qui est propre à chacun.

▶ Le deuxième s’inscrit davantage dans une perspective historique, géographique et anthropologique, même si ce dernier
terme n’est pas à donner en tant que tel aux élèves. Au-delà des images convenues de Christophe Colomb découvrant l’Amé-
rique, nous avons souhaité faire comprendre deux idées-clés : que la représentation du monde est avant tout une construction
mentale, avant d’être une reproduction fidèle de la réalité, et que l’exploration des terres inconnues était aussi une remise
en question de certaines idées reçues, créées par les croyances religieuses. L’aventure devient alors la tentative de mettre ses
propres connaissances en adéquation avec la réalité que l’on découvre. Mais toute terra incognita n’est pas pour autant terre
inhabitée. La découverte de l’autre et la manière dont on le considère, au fil des siècles, est déjà, pour des élèves de 5e, une
ébauche de réflexion critique que poursuivra le cycle 4, sur la notion de respect des peuples, d’estime de l’autre, même si, préci-
sément, les grands explorateurs ont souvent été des contre-exemples en matière d’humanisme et d’amour du prochain.

▶ Le troisième est davantage une approche littéraire et sociologique pour faire entrer de jeunes esprits dans la mentalité
d’un écrivain qui a fait de sa vie une aventure et de son écriture le témoignage de son insatiable quête des autres et du monde.
Avec la figure de Jack London, et le parcours qui est proposé, c’est la volonté de faire comprendre à tous qu’un jeune garçon
qui aurait pu « mal tourner », grâce aux livres, au travail acharné, à l’intérêt pour les autres, à la conscience aussi des souffrances
vécues par autrui, a réussi à faire de sa vie une œuvre et de son œuvre le reportage romanesque de sa vie. Indirectement,
cette approche que nous avons souhaitée la plus vivante possible, est aussi une manière de montrer aux élèves qu’un écrivain
n’est pas forcément une personne retirée du monde, bien au contraire.

▶ Dans une période où le repli sur soi est une menace intellectuelle et culturelle qui guette même les adultes, il nous a semblé
important de faire comprendre que l’esprit de conquête ne recouvrait pas toujours de nobles causes mais qu’en revanche, l’envie
de découvrir d’autres terres, d’autres façons de penser, de vivre, faisait partie de nos aspirations légitimes et que, depuis Ulysse,
tous les hommes ne peuvent qu’aspirer à la découverte, que l’aventure soit sur terre, dans l’espace ou dans la pensée. Nous avons
voulu aussi faire comprendre qu’au cours de l’histoire, des aventuriers n’ont pas craint de prendre des risques immenses pour
aller vers des horizons nouveaux et donner à leur vie un sens que la banalité du quotidien n’aurait pu leur offrir.

                                        © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 5e – Livre Ressources                                  9
THÈME 1 LE VOYAGE ET L’AVENTURE :
                   POURQUOI ALLER VERS L’INCONNU ?

 PARCOURS UN THÈME                      Les grands explorateurs p. 26 à 37
                        OBJECTIFS               ET DÉMARCHES DU PARCOURS
Présentation
▶ Les programmes invitent les élèves à questionner l’élan vers l’inconnu dont témoignent les récits de voyage et les romans
d’aventure. Il s’agit à la fois de les amener à comprendre les motifs de cet élan et à s’interroger sur les valeurs mises en jeu, tant
par le voyage lui-même que par les représentations qui en sont données. En lien avec la programmation annuelle en histoire
(thème 3 : « Transformations de l’Europe et ouverture sur le monde aux XVIe et XVIIe siècles »), ce parcours propose l’étude de récits
évoquant les voyages des grands explorateurs pendant la période des Grandes Découvertes. L’étude de ces textes vise à mettre
en avant le rôle culturel qu’ils ont joué : ils ont agrandi le regard de leurs contemporains sur le monde.

Problématique générale
▶ Le voyage ouvre en effet le voyageur et ceux auxquels il le raconte à une vérité plus large : il permet la confrontation des
préjugés et des opinions. Le questionnement au cœur de ce parcours peut donc se formuler ainsi : pourquoi le voyage
implique-t-il un changement de regard sur soi et l'Autre ? L’élan vers l’inconnu suppose et entraine un changement de regard
qui est à la fois la cause et la conséquence du voyage. De ce dernier résulte en effet nécessairement un mouvement en sens
inverse : le retour sur soi.

Présentation de la progression et du choix des œuvres/extraits
▶ Ce parcours est un voyage en soi, menant des Grandes Découvertes à la découverte de soi. Il est conçu comme un échange
de regards. Les grands explorateurs ont d’abord ouvert les yeux sur le monde et découvert qu’il n’était pas tel qu’ils le pensaient
et le représentaient. Leur regard, faussé par les préjugés et guidé par l’intérêt, n’a, dans un premier temps, fait que croiser celui
des habitants du Nouveau Monde. Ce n’est qu’en regardant l’Autre dans les yeux, que la véritable rencontre a pu avoir lieu. Plus
on avance dans le parcours, plus le regard s’ouvre à l’altérité. En filigrane, même si nous n’avons pas proposé ces textes aux élèves
en raison de leur difficulté, ce sont Montaigne et Claude Lévi-Strauss que l’on rencontre au terme de ce voyage.

Définition des objectifs pédagogiques
▶ Ce parcours vise à amener les élèves à :
– comprendre les valeurs qui sont en jeu dans l’élan vers l’inconnu et ses représentations littéraires ;
– acquérir des repères culturels liés à l’histoire et à la géographie des civilisations ;
– développer l’ouverture aux autres et comprendre en quoi elle est fondamentale dans la construction de soi.

 ORGANISATION                      DU PARCOURS ET CHOIX DES AXES DE LECTURE

1. Pourquoi partir ?                                  p. 26-27         différents motifs. La courte activité d’oral invite quant à elle
                                                                       les élèves au décentrement (activité à l’oral, « Se mettre dans
●  Pistes didactiques                                                  la peau d’un explorateur », p. 27) pour faciliter leur entrée
                                                                       dans le parcours et permet d’évaluer leur capacité à reformu-
Cette première double page vise à donner des repères histo-
                                                                       ler ce qu’ils ont lu.
riques aux élèves sur les Grandes Découvertes. Cette période
constitue le thème 3 de la programmation d’histoire ; il est
donc fort probable qu’elle n’ait pas encore été étudiée au             2. Les conditions du voyage                          p. 28-29
moment où l’enseignant de français met en œuvre ce par-
cours. La découverte du contexte scientifique, technique,               ●  Pistes didactiques
politique et intellectuel est l’occasion de rappeler aux élèves        Cette double page, en présentant les conditions matérielles
qu’un voyage est d’abord une projection imaginaire, faite              et intellectuelles dans lesquelles s’effectuaient les périples des
d’attente et de rêve.                                                  grands navigateurs, invite les élèves à découvrir leur héroïsme.
Après avoir fait connaissance avec les principaux explora-             L’enseignant peut donc saisir l’occasion de faire le lien avec le
teurs, les élèves sont invités à se demander quels mobiles les         thème 4 du programme en proposant par exemple la lecture
ont poussés à découvrir et conquérir de nouveaux territoires.          du prologue de l’Odyssée, modèle inconscient ou revendiqué
On veillera à ce qu’ils puissent exprimer leur jugement sur ces        de tout récit de voyage, qui fait du voyage un mythe originel.

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Le courage des « conquérants de la mer » et de leur équipage           dace et le génie avec lesquels ces hommes ont maitrisé les
est loué par Zweig (texte 1). Colomb, animé par sa foi chré-           mers et l’étonnement de les voir si inhabiles en tout ce qui
tienne et la conviction que la Terre est ronde, ne doute pas           touche l’homme. L’explorateur se présente, dans cette double
de la réussite de son entreprise (son destin). Néanmoins, les          page, comme une figure négative : il se mue en conquérant et
conditions de vie à bord et les croyances des marins sur le            devient celui qui asservit l’Autre, voire l’anéantit. Cette double
monde sont des obstacles à la compréhension de l’équipage              page donne à voir des regards qui se croisent mais ne se ren-
(texte 2 et texte écho). Leur déracinement et leur désarroi face       contrent pas. L’admiration est un regard qui vient d’en bas, le
à un monde inconnu va de pair avec un complet boulever-                mépris, un regard écrasant venu d’en haut. Quand on ne se
sement de soi qui les conduit déjà à perdre une part de leur           regarde pas dans les yeux, on ne se rencontre pas ; on finit par
humanité. Si le courage de ces navigateurs est évident, la suite       se tourner le dos.
du parcours invite néanmoins à questionner leur héroïsme.              Colomb (texte 6) pose un regard intéressé sur les habitants
S’ils ont agrandi le regard européen sur le monde et accepté           du Nouveau Monde : il doit prouver que les découvertes sont
de changer de regard face à l’inconnu géographique, ils n’ont,         rentables. La recherche de l’or et le mythe du « bon sauvage »
dans un premier temps, pas fait preuve de la même ouverture            s’entrecroisent pour déclencher la machine infernale de la
d’esprit face à l’Autre.                                               colonisation. Cortés (textes 7 et 8) ne voit que ce qu’il veut
                                                                       voir : son admiration est bien vite oubliée pour légitimer les
●  Proposition d’hypothèse de lecture
                                                                       massacres des populations indigènes. Qu’ils soient jugés bons
Dans quelles conditions les grands explorateurs se sont-ils            ou mauvais, le résultat est le même. Les images servent de
élancés vers l’inconnu ? À quoi ont-ils été confrontés ?               supports à l’analyse de cet échange de regards et permettent
                                                                       d’insister auprès des élèves sur le fait que cette période de
3. Les attentes des voyageurs                         p. 30-31         l’histoire est encore très douloureuse dans la mémoire des
                                                                       peuples d’Amérique latine, qui ne portent d’ailleurs pas du
●  Pistes didactiques                                                  tout le même regard que nous, Européens, sur le personnage
Colomb est la figure centrale de la première partie de ce par-          de Colomb. Diego Rivera dénonce la désintégration culturelle
cours parce qu’il est l’inventeur de la plus grande découverte         et spirituelle de la civilisation amérindienne.
de l’Histoire. On lui doit aussi le récit du premier contact entre     ● Proposition d’hypothèse de lecture
l’Ancien et le Nouveau Monde. Colomb nous offre donc à la
                                                                       Quel regard les explorateurs ont-ils d’abord porté sur le Nou-
fois une œuvre et un regard fondateurs. Néanmoins, c’est un
                                                                       veau Monde ?
personnage paradoxal : c’est encore un homme du Moyen
Âge qui croit aux sirènes et aux cyclopes. Ses attentes sont
trompeuses et révèlent la force des préjugés (Graine de savoir         5. La vraie rencontre                                   p. 34-37
p. 30) : il porte sur le Nouveau Monde un regard faussé par ses
lectures (Marco Polo) et ses a priori culturels (une vision chré-      ●  Pistes didactiques
tienne du monde fondée sur la Bible). La comparaison texte             La fin du parcours est consacrée au véritable échange de
et image vise à faire prendre conscience aux élèves de l’écart         regards fondé sur la reconnaissance d’une commune huma-
entre ce qu’il croit voir et ce qu’il a réellement sous les yeux.      nité et le respect de l’Autre, même différent, idéologie véhi-
Son principal préjugé est qu’il pense être en Orient, préjugé          culée par l’humanisme de la Renaissance. Ce sont les valeurs
dont la trace perdure dans la langue : nous appelons les des-          mises en jeu dans l’élan vers l’Autre et le sens de ses représen-
cendants des habitants du Nouveau Monde les « Indiens ».               tations qui doivent être l’enjeu de la réflexion menée par les
Ce qu’il cherche l’empêche de voir ce qu’il a sous les yeux            élèves.
(texte 3). Ce qu’il voit le confirme par ailleurs dans son erreur       Le texte de Jean de Léry (texte 9) est original en ce qu’il donne
(texte 5 et texte écho) : il pense découvrir le paradis terrestre.     la parole à l’Autre. La confrontation avec l’altérité modifie le
De plus, il est entouré d’interprètes asiatiques et ne peut donc       regard du monde européen sur lui-même, ce que souligne
communiquer avec les autochtones. Balard, dans sa préface              Jean-Christophe Ruffin dans son interview. Regarder l’Autre
au Journal de bord de Colomb, écrit : « Colomb a cherché ce            dans les yeux, c’est aussi pouvoir échanger un regard amou-
qu’il n’a pas trouvé et a trouvé ce qu’il ne cherchait pas ».          reux, entrer dans un rapport de séduction (page cinéma et
                                                                       texte 10). En effet, l’élan vers l’Autre est aussi synonyme de la
● Proposition d’hypothèse de lecture
                                                                       sortie de l’enfance, une invitation à laisser éclore l’Autre en soi.
Quelles étaient les attentes des grands explorateurs ?                 La fin de ce parcours permet ainsi, pour les enseignants qui le
                                                                       souhaitent, de faire le lien avec le thème 2.
4. Regards sur l’Autre                                p. 32-33
                                                                       ● Proposition d’hypothèse de lecture
● Pistes didactiques                                                   Quelles sont les conditions à la véritable rencontre de l’Autre ?
Michelet disait éprouver deux sentiments contraires à l’égard
des conquérants du Nouveau Monde : l’admiration pour l’au-

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CORRIGÉS                DES QUESTIONNAIRES ET DES EXERCICES

1. Pourquoi partir ?                                                   3.
                                                                               Les difficultés                        Les souffrances
Comprendre les enjeux des Grandes Découvertes                           • la perte des repères :         • physiques : « souffrances de la faim
Entrer dans la lecture. Le verbe « découvrir » s’emploie pour           « ignorants de la route à        et de la soif » (l. 6-7), « une chaleur
exprimer l’action de trouver quelque chose qui existait déjà            suivre, perdus dans l’infini »    infernale, un froid impitoyable » (l. 11),
mais était inconnu, tandis que le verbe « inventer » signifie            (l. 5).                          « comme boisson l’eau saumâtre des
imaginer une chose qui n’existait pas précédemment.                     « sans cesse exposés aux         tonneaux et l’eau de pluie » (l. 7-8),
1. Les Européens souhaitent se rendre aux Indes mais ils                dangers et aux intempéries »     « rien d’autre à manger que le biscuit
arrivent en Amérique.                                                   (l. 6)                           dur comme de la pierre […] souvent
                                                                        • les conditions matérielles :   même manquant de cette pauvre
2. Christophe Colomb : conquérir des terres, propager sa foi ;
                                                                        « Pas de lumière la nuit »       nourriture pendant de longs jours ! »
Amerigo Vespucci : faire progresser les connaissances ; Vasco           (l. 7), « Pas de lit ni de       (l. 8-10)
de Gama : s’enrichir, propager sa foi ; Fernand de Magellan :           couchette » (l. 11).             • morales : « la conscience qu’ils
faire progresser les connaissances ; Hernán Cortés : s’enrichir ;                                        étaient seuls, absolument seuls » (l. 12),
Jacques Cartier : conquérir des terres ; Jean de Léry : faire pro-                                       « personne ne pourrait les sauver de la
gresser les connaissances.                                                                               détresse et du malheur » (l. 15-16).
 Bilan 3. Lire de nos jours les récits des grands explorateurs
permet de comprendre les changements fondamentaux                       Bilan 4. L’auteur a honte car son impatience et son ennui
intervenus dans les représentations du monde à la Renais-              pendant sa traversée vers l’Amérique du Sud paraissent
sance et les motifs de cet élan vers l’autre et l’ailleurs (ambi-      déplacés en comparaison des conditions de voyage des
tions économiques, politiques et religieuses).                         grands navigateurs des siècles passés. Il voyage pour sa part
                                                                       de manière confortable et avec la certitude d’arriver.
▶ À l’oral : Se mettre dans la peau d’un explorateur
                                                                       ▶ P. Martyr d’Anghiera, Décades du Nouveau Monde,
Colomb : Je suis arrivé en Asie par l’ouest !
                                                                       texte 2, J.-C. Noguès, Le Voyage inspiré, texte écho p. 29
Vespucci : Me voici dans le Nouveau Monde !
Magellan : Je viens de prouver que la Terre est bien ronde.            Étudier les sentiments de l’équipage
Cartier : Tout ça pour ça !                                            1. Le champ lexical dominant est celui de la violence : « l’acca-
                                                                       blèrent bientôt d’invectives » (l. 2), « méditèrent de le tuer »
2. Les conditions du voyage                                            (l. 2), « le jeter à la mer » (l. 3), « enflammés de fureur » (l. 6),
                                                                       « grands cris » (l. 6), « harcelaient » (l. 7), « les excités » (l. 9),
S. Zweig,                                                              « des châtiments » (l. 10).
Magellan, texte 1                                           p. 28      2. Ces sentiments sont la méfiance, la colère et la peur.
                                                                       3. Pour calmer ses hommes, Colomb flatte son équipage et
Se mettre à la place des grands navigateurs                            alimente leurs « espérances » (l. 9). Simultanément, il emploie
Entrer dans la lecture. Le mot « impatience » vient du latin.          la menace et promet « des châtiments » (l. 10) à ceux qui refu-
Le préfixe in- indique le contraire, « l’incapacité à », et patien-     seraient de lui obéir.
tia « la capacité à supporter, à endurer ». Étymologiquement,          4. Cette manière de gouverner l’équipage s’explique par la
l’impatience est donc « l’inaptitude à supporter quelque               situation particulière du navigateur : isolé au milieu de l’océan,
chose », d’où l’ « incapacité à attendre avec calme ».                 charge lui incombe d’asseoir son autorité et de maintenir la
1. Les groupes nominaux « des audacieux navigateurs » (l. 2)           cohésion parmi les marins afin de mener à bien la mission qui
et « des conquérants de la mer » (l. 18) montrent l’admiration         lui a été confiée. Colomb apparait sûr de lui et fait montre des
de Stefan Zweig à l’égard des premiers explorateurs.                   qualités de meneur d’hommes.
2. L’adjectif « seul » et le pronom « personne », chacun répété        5. On retrouve la peur qui anime les marins.
deux fois, appartiennent au champ lexical de la solitude. L’au-        6. Ceux-ci voient dans le dérèglement de la boussole une
teur les emploie pour souligner le courage de ces navigateurs          vengeance divine. Christophe Colomb, qui est au service des
et la difficulté de leur entreprise.                                     rois catholiques d’Espagne et dont les voyages sont pour lui
                                                                       un moyen d’agrandir le royaume de Dieu, n’est évidemment
À l’oral : Exprimer ses sentiments                                     pas de cet avis.
Les élèves feront part de sentiments positifs, comme la curio-          Bilan 7. Voyager au XVe siècle, c’est se projeter vers l’inconnu
sité ou l’impatience, mais aussi négatifs, comme l’inquiétude,         sans être certain d’arriver quelque part, faute de connais-
la peur voire l’angoisse. L’enseignant les invitera à exposer          sances cartographiques suffisantes. La peur alimente les
les motifs de ces sentiments contradictoires et à rappeler les         superstitions et altère la santé mentale des marins qui sont
raisons pour lesquelles ils peuvent, à leur âge, être amenés à         « déboussolés », « perdent le nord », au propre comme au
faire un long voyage.                                                  figuré.

12                                      © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 5e – Livre Ressources
3. Les attentes des voyageurs                                                    4. Regards sur l’Autre

M. Polo,                                                                         Ch. Colomb,
Le Livre des Merveilles, texte 3                                        p. 30    Les Îles récemment découvertes, texte 6                      p. 32

Comparer texte et image                                                          Identifier le regard posé sur l’Autre
1. Marco Polo décrit un palais extraordinaire qui semble tout                    Entrer dans la lecture. Christophe Colomb est intéressé dans
droit sorti des contes de fées, tant par sa taille « grandissime »               le sens « chercher à en tirer un avantage personnel ou maté-
(l. 9 et 18) que par sa « richesse […] démesurée » (l. 18). Le                   riel » (réponse b).
nom « merveille », répété deux fois (l. 6 et 18), renforce cette                 1. Les Indiens sont « francs, de bonne foi et […] généreux »
impression.                                                                      (l. 2). Ils sont accueillants et tournés vers l’Autre (l. 4) et ont
2. L’aspect sauvage des lieux et la vie rudimentaire des                         une conception de la valeur des choses qui diffère de celle des
hommes qui y vivent contraste fortement avec le raffinement                        Européens. Ainsi, ils n’hésitent pas à « échange[r] des choses
et la richesse du palais évoqué par Marco Polo. Par ailleurs,                    de valeur contre de menus objets » (l. 5).
la topographie est sensiblement différente et ne renvoie pas                      2. Christophe Colomb interdit à ses marins de tirer profit de
à « une île […] en haute mer, à mille cinq cents milles des                      la naïveté ou de la différence de regards des Indiens sur les
terres » (l. 2)                                                                  richesses.
▶ Graine de savoir                                                               3. « de façon à me les concilier plus facilement, afin qu’ils se
                                                                                 fassent chrétiens et soient portés à aimer le Roi, la Reine, nos
Le nom « préjugé ».
                                                                                 princes, et tous les peuples d’Espagne, et s’activent à recher-
Ch. Colomb,                                                                      cher et à rassembler, pour nous les céder, tous les biens qu’ils
Journal de bord 1492-1493, textes 4 et 5                           p. 30-31      ont à profusions » (l. 8-11).
                                                                                   Bilan 4. Les Indiens font preuve d’ouverture à l’altérité,
Comprendre que les explorateurs sont influencés par                               de sincérité et se montrent désintéressés. Les marins, au
leur propre culture                                                              contraire, se montrent cupides et tirent profit des différences
                                                                                 culturelles pour s’enrichir. Quant à Christophe Colomb, s’il
1. L’expression « Il crut comprendre […] » (l. 5) suggère que                    attache, en chrétien fervent, de l’importance à la morale, il fait
C. Colomb se trompe.                                                             néanmoins preuve d’hypocrisie et porte lui aussi un regard
2. Christophe Colomb n’a pu comprendre les Indiens du fait                       intéressé sur les Indiens.
de l’absence de langue commune pour communiquer.
3. La découverte de l’Hispaniola suscite l’émerveillement                        Hernán Cortés,
du navigateur, ce dont témoignent les adjectifs mélioratifs :                    textes 7 et 8                                            p. 32-33
« immenses » (l. 2), « magnifiques » (l. 4), « belles » (l. 10),
« bonnes » (l. 10 et 15). La description méliorative des lieux                   Étudier l’évolution du regard
découverts est en outre soutenue par des adverbes d’inten-                       Entrer dans la lecture. Les Aztèques sont un peuple amérin-
sité (« incomparablement », l. 3, « si », l. 10).                                dien vivant dans la vallée de Mexico vers le début du XIVe siècle
4.                                                                               et dont le niveau de civilisation est parmi les plus avancés
                           Hispaniola                  Le jardin d’Éden          d’Amérique à cette époque. L’arrivée du conquistador Hernán
                                                                                 Cortés marque la fin de l’Empire aztèque.
 • une nature      « les terres si belles et        « Dieu fit pousser            1. Cortés éprouve de l’admiration pour les constructions
 luxuriante… :     grasses, bonnes pour planter     du sol toute espèce          aztèques. Il juge « qu’on ne saurait faire mieux nulle part »
                   et semer » (l. 9-11), « pleine   d’arbres séduisants
                                                                                 (l. 6-7).
                   d’arbres de mille essences,      à voir et bons à
                   si hauts qu’ils semblent         manger » (l. 2-4).           2. Cortés permet à son lecteur le roi Charles Quint de mieux se
                   atteindre au ciel » (l. 5-7).                                 représenter les constructions aztèques : il compare l’inconnu
 • …irriguée par   « Ses fleuves nombreux,           « Un fleuve sortait           à une réalité connue.
 des fleuves :      grands, aux bonnes eaux          d’Éden pour arroser          3. Cortés présente les Aztèques comme un peuple cruel/
                   […] » (l. 14-15)                 le jardin et de là il se     barbare/sauvage/inhumain parce qu’ils font des sacrifices
                                                    divisait pour former         humains.
                                                    quatre bras. » (l. 6-7).      Bilan 4. Cortés justifie ainsi la conquête du Mexique : la cou-
 • la présence     « dont la plupart charrient      « le pays de Havila, où      tume cruelle des Aztèques autoriserait à faire preuve de la
 d’or :            de l’or » (l. 15-16).            il y a de l’or » (l. 8-9).   plus grande cruauté à leur égard.
5. L’erreur de Colomb s’explique par ses préjugés : il a été                     ▶ Lecture d’images
victime de ses a priori culturels. Grand lecteur du Livre des
                                                                                 1. Le signe le plus évident de l’avancée de la civilisation
Merveilles, il pense marcher dans les pas de Marco Polo et
                                                                                 aztèque est la splendeur de l’architecture – dont témoigne
s’efforce de (pour ne pas dire se force à) voir dans le Nouveau
                                                                                 au second plan la grande pyramide de Tajin – et plus géné-
Monde ce que ce dernier a trouvé en Asie. Son regard est aussi
                                                                                 ralement de l’urbanisme. Le terrain de jeu de balle, à gauche
influencé par la vision chrétienne du monde qui a cours à
                                                                                 de la fresque, et, au centre, les Voladores, danseurs dont les
cette époque : le paradis terrestre (le jardin d’Éden) est repré-
                                                                                 chevilles sont attachées par une corde à un grand mât autour
senté sur les cartes. De plus, sa soif d’or l’aveugle et la barrière
                                                                                 duquel ils tournent, rendent compte quant à eux de la variété
de la langue est source de malentendus.
                                                                                 des traditions sportives et culturelles. Au premier plan, la
                                                                                 somptueuse réception d’un dignitaire met en avant l’exis-
                                                                                 tence de relations diplomatiques et commerciales. On peut

                                               © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 5e – Livre Ressources                                       13
aussi noter la richesse des parures. C’est principalement des          l’explorateur mais aussi par le jugement critique qu’il formule
couleurs que se dégage une impression de joie de vivre.                sur les sociétés européennes. L’ Autre apparait ici comme un
2. Cette fresque témoigne de la violence exercée par les               miroir dans lequel l’Europe est invitée à changer de regard sur
conquistadors espagnols à l’encontre des Aztèques : la tor-            elle-même.
ture (au premier plan), la conversion obligatoire (la croix à          ▶ Graine de savoir
gauche), l’esclavage et le travail forcé (au second plan), les
exactions (à l’arrière-plan).                                          a. indigène ; b. autochtone ; c. sauvage
3. Avant la période coloniale, les Aztèques sont une civilisa-         T. Malick,
tion avancée, tant du point de vue culturel qu’économique              Le Nouveau Monde                                          p. 35
et politique. Ils se montrent par ailleurs pacifiques et accueil-
lants. En important le christianisme de manière brutale et             ▶ À l’oral : Commenter à l’oral en groupe
en réduisant les populations autochtones à l’esclavage, les
                                                                       • Photogrammes 1 et 2 : Pocahontas et sa tribu vivent au cœur
colons anéantissent l’Empire aztèque et plus généralement la
                                                                       d’une nature verdoyante. La jeune fille bénéficie d’une grande
culture amérindienne, ce dont témoigne le changement de
                                                                       liberté, ce dont témoignent sa course et ses cheveux lâchés,
paysage à l’arrière-plan du tableau p. 33 : la culture aztèque a
                                                                       flottants au vent. Son sourire rayonnant répond à la lumière
littéralement disparu.
                                                                       qui baigne l’image et souligne l’harmonie avec la nature.
▶ À l’oral : Observer une couverture                                   • Photogrammes 3 et 4 : L’arrivée de John Smith signe l’irrup-
• Cette couverture montre le conquistador Hernán Cortés et             tion de la « civilisation » (le bateau) perçue comme menaçante
l’empereur aztèque Moctezuma.                                          (l’homme armé au premier plan) et la naissance de l’amour
• La position des deux personnages, dos à dos, souligne leur           pour l’héroïne. L’attirance que Pocahontas éprouve pour John
antagonisme. Ces deux peuples ne se sont jamais regardés               Smith se lit clairement dans son regard. De plus, l’emploi du
dans les yeux : à l’admiration a succédé le mépris. La véritable       langage des signes pour communiquer souligne l’importance
rencontre n’a donc pu avoir lieu.                                      du corps dans leur relation.
                                                                       • Photogramme 5 et 6 : Pocahontas vit désormais dans une
                                                                       maison en pierre et non dans une hutte. Elle apprend à lire,
5. La vraie rencontre                                                  sous la surveillance de son futur mari. Son intégration et sa
                                                                       transformation sont soulignées par ses nouveaux vêtements
J. de Léry,                                                            et sa coiffure. Elle est désormais habillée comme il sied à une
Voyage en terre de Brésil, texte 9                          p. 34      dame anglaise : on ne voit plus sa peau et ses cheveux sont
                                                                       tressés. Elle ne semble plus aussi libre qu’auparavant (scènes
Comprendre la nécessité du dialogue pour rencontrer                    d’intérieur contrairement aux images précédentes) et offre un
l’Autre                                                                visage plus sérieux.
Entrer dans la lecture. Le mot « barbare » vient du grec bar-          J.-C. Rufin,
baros (βάρϐαρος) qui désigne « celui qui ne parle pas grec ».
Ce terme désignait chez les Grecs, puis par la suite chez les
                                                                       Rouge Brésil, texte 10 et texte écho                  p. 36-37
Romains, les peuples n’appartenant pas à leur civilisation. De
                                                                       Comprendre les choix d’un écrivain
nos jours, le terme « barbare » a une connotation péjorative
et désigne une personne qui agit avec cruauté et sauvagerie.           1. « irrésistiblement » (l. 1), « m’obsède » (l. 2) montrent que
1. « Voilà en résumé le véritable discours que j’ai entendu de         l’auteur s’est senti forcé d’écrire ce livre.
la propre bouche d’un pauvre Sauvage américain. » (l. 19-20)           2. Jean-Christophe Rufin compare la rencontre entre deux
2. Les nombreuses questions posées par le vieil Indien                 civilisations à la rencontre amoureuse : « elle s’apparente à
témoignent de son incompréhension des pratiques cultu-                 l’élan amoureux qui peut saisir deux êtres lorsqu’ils sont mis
relles et économiques françaises mais soulignent aussi sa              en présence pour la première fois » (l. 7-8).
curiosité.                                                             3. Le romancier compare le voyage au passage à l’âge adulte :
3. « je comprends à présent que vous autres Mairs, c’est-à-            « être arraché au monde de l’enfance et embarquer pour l’in-
dire Français, êtes de grands fous » (l. 9-10). L’Indien reproche      connu de l’âge adulte » (l. 14-15).
aux Français leur avidité, leur inconséquence et le peu de             4. Jean-Christophe Rufin a, comme certains voyageurs,
confiance qu’ils accordent à la nature.                                 répondu à une nécessité, un élan vers l’autre et l’ailleurs.
4. Jean de Léry ne partage pas l’opinion de ses contempo-              De plus, le thème de la rencontre entre deux civilisations
rains selon laquelle les Indiens sont des barbares. Il loue leur       est, comme celui de la rencontre amoureuse, particulière-
conversation (« ce sont de grands discoureurs », l. 3) et la           ment romanesque (propre à susciter des émotions). Enfin, le
subtilité de son interlocuteur (« mon vieillard, nullement lour-       romancier a choisi un sujet susceptible d’intéresser tous les
daud », l. 8), qu’il juge à sa mesure.                                 lecteurs : le voyage est l’ « aventure de chaque être humain »
                                                                       (texte écho, l. 13).
 Bilan 5. Le dialogue entre Jean de Léry et le vieil Indien est un
                                                                                                                                VIDÉO
véritable échange qui se révèle constructif : chacun s’efforce          Comprendre une interview
de comprendre l’autre et fait preuve d’ouverture d’esprit. Le
                                                                       1. L’aventure des Français au Brésil a entrainé un changement
regard porté par Jean de Léry sur les Indiens, fondé non pas
                                                                       complet du regard sur l’Autre. Ils pensaient apporter la civili-
sur des préjugés mais sur l’observation et l’objectivité, est
                                                                       sation à des Indiens cannibales mais ce sont eux qui se sont
caractéristique de l’humanisme de la Renaissance. En outre,
                                                                       conduits comme des sauvages : ils se sont entretués entre
l’étonnement dont fait preuve l’Indien à l’égard des mœurs
                                                                       catholiques et protestants. Ils ont aussi appris à connaitre ces
européennes renverse la perspective habituellement adop-
                                                                       Indiens qu’ils croyaient primitifs. Ils ont rapporté en France
tée par les explorateurs européens : c’est lui qui dirige le dia-
                                                                       l’idée du « bon sauvage », selon laquelle les Indiens étaient
logue, à la fois par les nombreuses interrogations adressées à
                                                                       peut-être plus civilisés que les Européens. Le regard des

14                                      © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 5e – Livre Ressources
Indiens a lui aussi changé : il y a eu un véritable échange, un        Activité d’expression
« cannibalisme » culturel, comme le dit Jean-Christophe Rufin,
qui présente le Brésil comme un pays « anthropophage » qui a           ▶ Écrire un dialogue pour confronter des idées
toujours absorbé les peuples, les cultures et les langues.
                                                                       Toutes les suggestions des élèves quant au système de com-
2. J.-C. Rufin insiste sur la nécessité de ne pas grandir replié        munication seront acceptées à condition qu’elles soient
sur soi. Il estime que ce n’est d’ailleurs pas dans la nature          logiques. L’enjeu de cet exercice est que l’élève écrive un
humaine : « je crois que de toute façon on le cherche cet              véritable dialogue, c’est-à-dire confronte des pensées, des
Autre. Parfois il vous est donné, parfois on le trouve plus tard.      cultures et des systèmes de valeurs. On n’attendra cependant
Mais de toute façon on le cherche, et quand on le trouve on            pas, de la part d’élèves de 5e, une réflexion philosophique ou
le reconnait. » La rencontre de l’Autre est source d’émotions et       anthropologique : ils doivent montrer leur compréhension
de réflexions. Elle nourrit l’imaginaire et enrichit la construc-       des enjeux du parcours. Ce travail est aussi l’occasion de revoir
tion de son identité. Cette rencontre de l’Autre a guidé la vie        la présentation du dialogue (leçon 34, p. 340-341) en souli-
et nourri l’œuvre de cet écrivain. Il souligne par ailleurs que        gnant l’importance des verbes de parole et de favoriser (ou
cette rencontre de l’Autre peut être celle de deux groupes ou          d’évaluer) l’acquisition du lexique de la leçon 6 « L’inconnu,
de deux personnes mais peut aussi se produire à l’intérieur            l’autre » (p. 264-265).
d’une même personne.

     Les cartes et les mots
 DOSSIER

pour dire le monde                                                                                                       p. 38 à 45

                          OBJECTIFS               ET DÉMARCHES DU DOSSIER
▶ Le thème 1 invite les élèves à partir à la découverte de l’inconnu. Quels meilleurs outils pour favoriser cet élan vers l’ailleurs
que les cartes et les mots, à la fois vecteurs de la représentation de soi dans le monde et moyens d’expression où se disent les
rapports à l’Autre ?
▶ Ce dossier est une invitation au voyage, à marcher dans les traces des voyageurs du passé. Il amène les élèves à s’interroger
sur « les représentations du monde » (thème 5 du socle) pour élargir et enrichir leur expérience du temps et de l’espace. Il fait le
lien avec le thème 1 de la programmation annuelle en histoire : « Chrétientés et islam (VIe-XIIIe siècles), des mondes en contact : la
Méditerranée comme lieu d’échanges scientifiques, culturels et artistiques », Méditerranée qui apparait à la fois comme la mer/
mère de nos langues et le témoin privilégié des échanges entre les peuples sur lesquels notre culture s’est construite. L’histoire
des arts est aussi un enjeu majeur de ce dossier qui vise à l’acquisition de repères culturels liés à l’histoire et à la géographie
des civilisations, envisage la circulation des formes artistiques autour de la Méditerranée médiévale et constitue une approche
originale du manuscrit médiéval.
▶ Ce dossier témoigne d’une ouverture et d’un dialogue avec l’Autre qu’il nous parait essentiel d’encourager nos élèves à
poursuivre. Il se veut donc aussi un outil permettant la mise en œuvre de plusieurs EPI :
– Langue et cultures de l’Antiquité : évolutions de la langue française en ne se limitant pas aux apports du latin et du grec.
On peut envisager un voyage dans le bassin méditerranéen de l’Antiquité au Moyen Âge comme voyage à la découverte des
langues qui ont modelé le français.
– Culture et création artistiques : travail autour des Grandes Découvertes. Descriptions de nouvelles contrées entre réalisme et
fantaisie. Écriture de carnets de bord ou de voyage, réels ou fictifs.
▶ La lecture des cartes anciennes permet aux élèves de se confronter de manière ludique à des visions du monde et de mesurer
les avancées scientifiques d’une époque. Les cartes témoignent de la façon dont le regard sur l’autre et l’inconnu est influencé
par sa propre culture et amènent les élèves à s’interroger sur la notion d’a priori culturels.
La présence des mots arabes dans notre langue atteste quant à elle du voyage réel des hommes. Les élèves sont invités à suivre
le voyage de certains mots pour mieux mesurer en quoi le français est une langue vivante. Un mot ne sert pas seulement à
désigner une réalité : il nous raconte une histoire. Dans la langue, l’Autre parle en nous.

Objectifs pédagogiques
▶ Ce dossier invite les élèves à :
• découvrir une forme originale d’une représentation de l’ail-
leurs ;
• enrichir leur expérience du temps et de l’espace ;
• comprendre que le français est une langue vivante qui porte
la trace des rencontres avec l’Autre.

                                        © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 5e – Livre Ressources                                   15
CORRIGÉS                DES QUESTIONNAIRES ET DES EXERCICES

1. Les cartes pour imaginer le monde                                       Ressource numérique
                                                                                                                                      ACTIVITÉ

Les « cartes T en O » offrent une vision du monde sans rapport
                                                                           Le prince Abd al-Rahman et l’Andalousie
avec la réalité géographique : la carte 1 est une pure abstrac-
                                                                           1) Le monde musulman au VIIIe siècle
tion faite de formes géométriques. La carte 2 propose quant
à elle une vision du monde tirée de la Bible et tend à montrer             1. Abd al-Rahman régnait sur Damas (actuelle Syrie) et
ce dernier comme une création divine.                                      s’est installé à Cordoue en Espagne.
                                                                           2. De nos jours, Bagdad est la capitale de l’Irak.
Des cartes en T ?                                                p. 38     2) Abd al-Rahman et la poésie
                                                      e
Carte 1 : Les trois continents connus à l’époque (IX siècle) sont          De nos jours, c’est en direction de la Kaaba que les
l’Afrique (Africa), l’Europe (Europa) et l’Asie (Asia). Aujourd’hui,       Musulmans se tournent pour faire leurs cinq prières
c’est le nord qui est placé au sommet d’une carte.                         quotidiennes. C’est autour de ce cube que les pèlerins
Carte 2 : Le cercle sur la carte est entouré par trois rangs suc-          déambulent lorsqu’ils font le pèlerinage à la mecque.
cessifs : le premier fait de ciel et de nuages, le deuxième de             3) L’Andalousie au Moyen Âge
feu, comme l’astre solaire, et le troisième représente le firma-            1. L’Alcazar se trouve à Séville, l’Alhambra à Grenade et
ment avec les étoiles.                                                     l’intérieur est celui de la grande mosquée de Cordoue.
Une carte médiévale                                              p. 38
Il faut tourner la carte d’un demi-tour vers la gauche pour que
le nord (aquilon) se trouve au sommet. Les noms sont lisibles            L’arabe pour désigner des hommes
à l’exception de terra qui figure dans le cercle le plus foncé.           et des fonctions                                                p. 43
Attention : il s’agit d’une orthographe médiévale et non de              Dans l’ordre : sarrasin – bédouin – émir – calife – vizir.
latin pur.
                                                                         L’arabe dans les mots de la vie quotidienne                     p. 43
Géographie et Bible                                              p. 38
L’ Afrique est en bas à droite. L’ Asie se trouve au nord.               Épices & couleurs
                                                                         Le safran (obtenu à partir de la fleur de crocus) figure sur
Une carte inspirée des « portulans »                             p. 39   l’image du haut et le curcuma sur celle du bas.
Sur cette carte apparaissent des noms propres désignant des
pays ou des souverains réels. Par ailleurs, les différents traits
                                                                         Vêtements & étoffes
indiquent des itinéraires à destination des voyageurs. On                Dans l’ordre : makhazin – djubba – qutun – zaytou – Mawšil.
entre dans la carte pour se représenter le monde.
                                                                         Fruits &légumes
La « cosmographie »                                       p. 40-41       1d, 2c, 3b, 4a.
Sur la carte génoise, on distingue de vrais contours très                Qui suis-je ? (p. 44)
proches de la réalité géographique, comme la botte ita-
lienne. Tout ce qui relève de la géographie est bien réel mal-           1. Je suis le jeu d’échec.
gré quelques approximations. Les rois et les animaux le sont             2. Nous sommes la girafe et la gazelle.
aussi. En revanche, il subsiste une part de merveilleux, qui             3. Je suis le safari.
s’accentue au fur et à mesure que l’on s’éloigne de l’Europe.
On trouve des animaux ou des créatures légendaires comme                 L’arabe dans la culture et les arts                             p. 45
la sirène (en bas au centre) entourée de monstres marins, le
dragon volant en bas à droite et le griffon, tête en bas, en haut
                                                                         L’architecture
un peu à droite.                                                         • L’image de gauche présente une arabesque ; celle de droite
                                                                         une alcôve.
                                                             ACTIVITÉ
 Ressources numériques                                                   La poésie et la musique
                                                                         • L’objectif de cette activité est double : il s’agit d’une part
 Pour prolonger la découverte de ces cartes                              d’apprendre aux élèves à rechercher et à sélectionner des
                                                                         informations (éducation aux médias) et d’autre part à en
                                                                         rendre compte, c’est-à-dire à développer la maitrise de l’exposé
2. Les mots pour échanger : l’exemple de l’arabe                         à partir d’un support original, l’extrait musical. L’enseignant
                                                                         favorisera un travail en binôme et veillera particulièrement à
Un peu d’histoire…                                               p. 42   ce que les élèves emploient un vocabulaire précis (lexique de
                                                                         la musique).
Les voies de la guerre
Devinette : la bataille de Roncevaux s’est déroulée dans les
Pyrénées.
Les chemins de l’exil
Devinette : Abd al-Rahman régnait sur Damas.

16                                        © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 5e – Livre Ressources
ATELIER D’EXPRESSION                        Rédiger des descriptions
                                                                                                                                       p. 46 à 51

                          OBJECTIFS               ET DÉMARCHES DE L’ATELIER
▶ Dans cet atelier, les élèves seront amenés à travailler à la fois l’oral et l’écrit. À l’oral, il s’agira d’exprimer ses sentiments et ses
sensations. À l’écrit, on apprendra à mettre en œuvre un processus d’écriture, et à rédiger un texte en fonction d’une intention.
▶ En effet, on explorera ici différentes fonctions de la description. Des plus évidentes, « décrire pour montrer » et « décrire pour
expliquer », à la plus motivante pour l’apprenti-scripteur, « décrire pour émouvoir », qui implique de produire un effet sur son
public.
▶ À chaque étape de l’atelier, l’élève commencera par mettre en évidence un objectif possible de la description, en étudiant un
ou plusieurs extraits du Livre des Merveilles de Marco Polo. Après quoi, l’attention se portera sur des moyens précis d’atteindre cet
objectif : outils de langue ou procédés stylistiques.
▶ L’appropriation par l’élève de la palette ainsi constituée est favorisée de deux façons. D’une part, l’élève peut réutiliser dans
les activités d’expression ce qu’il vient d’apprendre, à chaque étape ou au fil de l’atelier. D’autre part, l’atelier prend en compte
la diversité des formes d’intelligence. Sont ainsi sollicités le regard de l’élève (schéma illustrant la méthode, images transportant
l’élève vers différents lieux, éléments surlignés dans les extraits...), mais aussi son oreille, en lui permettant d’écouter d’autres
descriptions extraites du Livre des Merveilles et en proposant une activité d’expression orale. Certaines activités peuvent même
donner lieu à une forme de mise en scène propre à faciliter l’expression.
▶ Compétences travaillées
– Exprimer ses sentiments et ses sensations ;
– Exploiter les ressources expressives et créatives ;
– Mettre en œuvre un processus d’écriture ;
– Rédiger un texte en fonction d’une intention.

               CORRIGÉS               DES QUESTIONNAIRES ET DES EXERCICES
Méthode                                                      p. 46      1. Décrire pour montrer

 Piste pédagogique                                                      Le palais d’été du Grand Khan à Ciandu                               p. 47
                                                                        L’intérêt de la description proposée tient à deux caractéris-
 Pour dynamiser l’entrée dans l’atelier, on peut proposer               tiques : sa précision et sa capacité à faire accéder le lecteur
 aux élèves de décrire l’image figurant sur cette page                   avec Marco Polo au cœur de l’univers de Kubilai Khan.
 (miniature du XVe siècle qui représente Marco Polo
 quittant Venise), pour les uns de manière à « montrer »,               Découvrir
 pour les autres de manière à « émouvoir ». Pour                        1. Cette activité peut être faite en deux temps. Répartis en
 souligner la valeur d’essai de cette activité liminaire,               petits groupes (2 ou 3), les élèves s’efforceront d’abord de
 et faire percevoir par les élèves l’intérêt pratique de                réaliser le plan schématique du palais d’été. Ensuite, chaque
 l’atelier, on leur demandera de noter les questions                    groupe ou les volontaires viendront présenter à la classe leur
                                                                        plan, en justifiant leurs choix par des citations.
 survenues ou les besoins constatés au cours de leur
 travail d’écriture. Au terme de l’atelier, un temps d’oral             Proposition de plan :
 pourra être consacré à faire collectivement le bilan :                                               muraille de Ciandu
 quelles questions ou quels besoins semblent à leur
 auteur ne pas avoir trouvé de réponse ? La classe est-
 elle en mesure d’y répondre ? Ce bilan pourrait par                                                            seconde muraille
 exemple trouver sa place juste avant l’activité finale,
                                                                                                                             plaine
 auquel il contribuerait à préparer les élèves.
                                                                                          palais de marbre                 palais de
                                                                                                                           bambou

                                         © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 5e – Livre Ressources                                            17
Comprendre                                                                     b. 1) Cet empereur est remarquable. 2) Cette idée mérite
2. Le palais de pierre est décrit dans le premier paragraphe                   d’être examinée. 3) Ce souvenir est inoubliable.
(« un vaste palais de marbre et d’autres nobles pierres », l. 1-2).            2. a. « celles » (l. 5) ; « elles » (l. 5, 5, 9) ; « les » (l. 6)
Le palais de bambou, quant à lui, est décrit dans le second                    b. Les routes sont nombreuses. Elles sillonnent tout le pays.
paragraphe (« un grand palais tout de bambou », l. 13).                        Les cavaliers les parcourent d’un relais à l’autre. Ils peuvent
Chaque palais se trouve dans une moitié différente de Ciandu.                   changer de chevaux, les relais peuvent leur en fournir facile-
Le palais de pierre traverse toute une moitié de cette cité                    ment.
(« un bout est au milieu de la cité, et l’autre sur sa muraille », l.          3. a. « qui est entre l’épaisse écorce extérieure et le bois » (l. 3) ;
2-3). Le palais de bambou se trouve au milieu du « parc » (ou                  « qui est blanche » (l. 4).
« plaine ») aménagé dans l’autre moitié de la cité, à l’intérieur              b. Propositions : 1) Ils se rendent dans une province lointaine
de la « seconde muraille » (l. 6-12).                                          où l’on a inventé le papier monnaie. 2) La porcelaine, qui
• Ces deux palais se distinguent par une décoration intérieure                 s’est beaucoup fabriquée en Europe à partir du dix-huitième
somptueuse, qui comporte notamment des représentations                         siècle, a aussi été inventée en Chine. 3) Marco Polo veut faire
d’animaux réels ou imaginaires : « Les salles, chambres et cor-                connaitre les régions qu’il a parcourues pendant son voyage.
ridors en sont tout dorés et bellement peints en dedans de
                                                                               ▶ Décrire un lieu et Décrire une technique
fresques et images de bêtes et d’oiseaux [...], si habilement
que c’en est délice et merveille à voir. » (l. 3-5) ; « un grand               Ces deux activités, situées à mi-parcours, offrent la possibilité
palais tout de bambou sur de beaux piliers dorés et vernis ;                   d’un bilan d’étape prenant en compte la diversité des élèves. En
et au sommet de chaque pilier est un grand dragon tout doré                    effet, elles présentent des degrés de complexité différents : l’ac-
qui enroule sa queue autour du pilier [...]. » (l. 13-15).                     tivité d’expression écrite fait appel à des outils de langue acquis
• Ce détail donne l’impression que le Grand Khan a véritable-                  à la fois dans la première et dans la deuxième partie de l’atelier,
ment créé un monde.                                                            tandis que l’activité d’expression orale invite à mobiliser des
                                                                               connaissances acquises seulement dans la deuxième partie.
▶ Grammaire pour dire et pour écrire                                           En outre, elles permettent de prendre en compte différentes
J’applique                                                                     formes d’intelligence : prédilection pour l’expression écrite ou
On pourra répartir entre les élèves différents principes de                     pour l’expression orale devant un public, mémorisation favori-
progression parmi ceux mentionnés précédemment. Par                            sée par le mouvement physique ou par l’observation.
exemple, « du plus loin au plus près » et « de gauche à droite ».
On veillera à ce que seul l’élève sache quelle consigne lui a été              3. Décrire pour émouvoir
donnée à cet égard. Une fois le travail d’écriture réalisé, cha-
cun lira sa description à la classe, à qui il reviendra d’identifier            Extraits du Livre des Merveilles                                p. 50
le principe de progression. Ainsi, on entrainera les élèves à se
placer à la fois du point de vue du scripteur et du point de vue               Découvrir
du lecteur, tout en dynamisant l’activité.                                     1. Réactions possibles : étonnement / surprise (texte 1) ;
                                                                               effroi / peur / horreur (texte 2) ; admiration (texte 3)
2. Décrire pour expliquer
                                                                               Comprendre
Extraits 1 et 2                                                     p. 48      2. Ces trois extraits visent à provoquer une réaction. En effet,
                                                                               on y utilise des procédés qui produisent un effet sur le lecteur.
Découvrir                                                                      • Dans le texte 1, la périphrase crée de la curiosité car on ne
1. Résumés possibles pour l’extrait 1 : des routes nombreuses ;                nomme pas précisément la substance dont il est question, si
des lieux de repos luxueux ; des chevaux en abondance.                         bien que le lecteur se demande de quoi il s’agit.
Résumés possibles pour l’extrait 2 : transformation de l’écorce                • Dans le texte 2, la description des serpents insiste sur leur
en papier ; fabrication des différentes coupures ; validation                   taille gigantesque (« tellement démesurés », « aussi gros qu’un
des billets par le Grand Khan.                                                 tonneau », « [gueule] si vaste qu’ils peuvent bien engloutir un
L’extrait 1 pourrait s’intituler : « Comment on voyage à travers               homme »), et sur leur laideur (« très hideuses ») ce qui rend la
l’empire du Grand Khan ».                                                      description péjorative.
L’extrait 2 pourrait quant à lui s’intituler : « Comment on                    • Dans le texte 3, les nombreux termes soulignant la beauté
fabrique le papier monnaie dans l’empire du Grand Khan ».                      de Kubilaï Khan (« belle taille », « aspect très plaisant », etc.)
                                                                               composent une description méliorative de celui-ci.
Comprendre                                                                     3. Le premier texte décrit en fait le pétrole.
2. Les deux extraits commencent par « sachez » (verbe savoir à                 ▶ Grammaire pour dire et pour écrire
l’impératif ). Le but des deux descriptions est donc d’instruire.
                                                                               J’applique
• Les précisions données visent à permettre au lecteur de se
représenter mentalement les réalités évoquées. Il s’agit de                    Adjectifs au superlatif : « très grosses », « très hideuses », « les
« faire voir » ces choses malgré la distance.                                  plus gros », (texte 2) ; « très bien constitué », « très plaisant »
                                                                               (texte 3).
• Ces exemples mettent en évidence le sens de l’organisation
qui caractérise Kubilaï Khan.                                                  Termes appartenant aux champs lexicaux de la peur et de
                                                                               l’admiration : « serpents », « hideuses », « engloutir [un homme
▶ Grammaire pour dire et pour écrire                                           d’un seul coup] » (texte 2) appartiennent au champ lexical
J’applique                                                                     de la peur. « belle », « bien », « [comme] rose », « plaisant »,
1. a. « maintes » (l. 1) ; « les » (l. 6) ; « ces » (l. 10).                   « beaux », « séant » (texte 3) appartiennent au champ lexical
                                                                               de l’admiration.

18                                              © Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 5e – Livre Ressources
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