LES DÉFIS ÉNERGÉTIQUES - JEAN-LOUIS BORLOO L' Afrique : une triple révolution - Lianes coopération
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DOSSIER LES DÉFIS ÉNERGÉTIQUES JEAN-LOUIS BORLOO L’ Afrique : une triple révolution INFOGRAPHIE L’ énergie : tout un système ! TÉMOIGNAGES L’ accès à l’énergie pour tous 1 décembre 2019
DIMENSION ENVIRONNEMENTALE DIMENSION ÉCONOMIQUE PHASE PRÉPARATOIRE PHASE PRÉPARATOIRE PENDANTLE PROJET Quelles sont les sources d’énergie disponibles et les Quelles sont les ressources financières locales ? contraintes environnementales localement ? Les bénéficiaires sont-ils solvables ? Solaire, hydraulique, biomasse, éolienne. Quels sont aujourd’hui les usages énergétiques locaux et Quels impacts le projet aura-il sur l’environnement local ? quel est leur coût ? Réduction du recours à la biomasse, réduction des émissions de CO2, Domestiques (éclairage, recharge de téléphones, cuissons des ali- réduction du recours aux énergies fossiles. ments …), productifs (artisanat, conservation de denrées alimentaire, ...), publics (Ecole, hôpitaux, éclairage public, …) PENDANTLE PROJET En quoi l’accès à l’énergie va participer au développement Quelle est la part de l’utilisation des énergies renouvelables local ? dans le mix énergétique ? Développement des AGR, amélioration des conditions de vie, diminu- Combinaison solaire/carburant fossile/recours à la biomasse/Energie tion du recours à la biomasse, … mécanique. Quel modèle économique mettre en place pour que l’action L’impact du projet sur l’environnement est-il mesurable ? soit pérenne ? Compensation carbone, prélèvement sur la biomasse. Calcul des coûts d’investissement et de fonctionnement, mise en place d’une tarification, … A LA FIN DU PROJET Quelles sont les possibilités de recyclage du matériel ? A LA FIN DU PROJET DIMENSIONTECHNIQU Gestion de l’électronique, durée de vie du matériel, filière de recy- Le modèle économique choisi permet-il de financer clage. Une compensation carbone du projet est-elle prévue ? le fonctionnement et l’autonomie du système mis PHASE PRÉPARATOIRE en place ? SOMMAIRE Compensation financière, plantation, dans le projet, … Quelles sont les solutions tech Système d’épargne, de prépaiement, de combinaison avec expériences ont les partenaire des AGR. Mini-réseau autonome, raccordeme Comment sont réparties les dépenses d’investisse- solutions de stockage. ment et de fonctionnement après le projet ? Quel rapport qualité/prix des é Budget d’investissement, salaires, formation, entretien, Rédaction du cahier des charges, p nouveaux raccordements, … marking2. PENDANTLE PROJET Quels outils de suivi de la mai DIMENSION SOCIALE Rédaction de consignes de sécurité DIMENSION PARTENARIALE tion des techniciens locaux, outils i Quelle filière d’approvisionne PHASE PRÉPARATOIRE PHASE PRÉPARATOIRE ou équipement ? Filière locale, i Quel est le rôle de chaque partenaire du projet ? stockage. Quels sont les besoins exprimés, par qui et pour qui ? Collectivité territoriale locale, opérateur national d’électricité, agence Une collectivité, une organisation locale, une communauté, des de développement, organisation communautaire, entreprises, bénéfi- entrepreneurs locaux. A LA FIN DU PROJET ciaires. A quels besoins correspond la demande ? pour quelle Quelle stratégie de dépannage Quelles sont les règlementations nationales concernant la finalité sociale ? Répertoire de prestataires, protoco production et la distribution d’électricité ? Développement des AGR, service public, besoins d’une communauté. Qui gère l’entretien et la main Taxation, cadre réglementaire, accréditation de l’opérateur. aussi le recouvrement des frai PENDANTLE PROJET tion implique un paiement par PENDANTLE PROJET Qui sont les acteurs exclus du projet ? Solution de pay as you go3, installa Qui sera l’opérateur local de gestion du réseau ? Exclusion économique, sociale, culturelle, géographique. de facturation, service proposé aux Entreprise de service public, PME locale, affiliation à une entité Comment cela est-il pris en compte ? nationale. Mesure de compensations, actions de sensibilisation, évolution du projet. Comment assurer la concertation avec les autorités locales, 1 Réseau intellige les associations, les usagers ? A LA FIN DU PROJET rapport entre con ONG porteur du projet, collectivités, bénéficiaires … Quelle est la stratégie de sortie de projet ? d’énergie en temp Transfert de compétences, autonomisation d’une structure locale, 2 Comparatif d’éq Quel renforcement des capacités de tous les acteurs ? désengagement progressif. laires développés Compétences techniques, monitoring et suivi des installations, gestion un contexte comp Une nouvelle action sur la même thématique et la même de la consommation et facturations, … 3 Solution de prép zone géographique doit-elle être envisagée ? Renforcement des capacités de production, l’extension du réseau à de A LA FIN DU PROJET nouveaux acteurs. Qui gère la partie financière et économique ? Municipalité, opérateur, coopérative d’habitants. FICHE MÉTHODOLOGIQUE La question de l’accès à l’énergie est sou Comment valoriser le projet ? les projets de développement, sans être Stratégie de communication, capitalisation, changement d’échelle, réplicabilité du projet. L’ Afrique : une triple LES DIFFÉRENTES en soit. Mais installer un mini réseau ne Outres les contraintes techniques et lég révolution DIMENSIONS flexions méritent d’être menées avant d action liée à l’énergie. Comment aborde D’UN PROJET l’accès à l’énergie lorsque nous ne somm Jean-Louis Borloo D’ÉLECTRIFICATION Nous vous proposons ici un outil perme RURALE flexion sur différents dimensions de l’ac mique, environnementale, partenariale P.16 Les différentes dimensions d’un ÉNERGIE : projet d’électrification Quels enjeux pour le rurale développement ? Fiche Marie-Noëlle ENTREPRISES ET ONG : méthodologique Reboulet Comment les faire travailler ensemble ? P.4 Hélène Demaegdt P.20 La Région Hauts-de- France s’engage pour l’accès à l’énergie en Afrique P.12 P.24 REVUE DU RÉSEAU N°44 - LES DÉFIS ÉNERGÉTIQUES Comité de rédaction Centraider, Lianes Coopération, Horizons Solidaires, So Coopération • Contributeurs Jean-Louis Borloo, Hélène Demaegdt, Électriciens Sans Frontières, François Moisan, Marie-Noëlle Reboulet, et les Equipes de Centraider, Lianes Coopération, Horizons Solidaires, So Coopération, Christine Pavot, Philippe Josephe, Mathias Povse, Sophie Cauwet, Jacques de Bucy • Crédits photographiques Merci aux contributeurs de cette revue pour leurs photographies, Licence Creative Commons Flick’r, Freepik.com, Pixabay.com, Unsplash.com, Shutterstock.com • Remerciements Vincent Jacques le Seigneur, Synergie Solaire, ADEME, Marie Desjardins, Anaïs Asselin • Elaboration de la revue Equipes de Centraider, Lianes Coopération, Horizons Solidaires, So Coopération • Coordination et création graphique Guillaume Guetreau • Visuel de couverture Unsplash.com • Directeur de publication Pascale Pavy • Impression pour diffusion lors du Forum des Acteurs de l’Energie : Région Hauts-de-France • ISSN 2270-8377 • Contact contact@lianescooperation.org • Lianes Coopération est une association loi 1901 soutenue par le Ministère de l’Europe et des Affaires Etrangères et le Conseil Régional Hauts-de-France • www.lianescooperation.org 2 revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019
L a Région Hauts-de-France ne manque pas d’énergie ! L’accès à l’énergie est un facteur déterminant dans tout dé- veloppement humain. Qu’il s’agisse de santé, d’alimentation, d’éducation ou encore de développement économique, toute ÉDITO activité humaine nécessite le recours à différentes sources d’énergie, aussi ce sujet est considéré comme une des clés du développement de ” nombreux pays. En 2017, la Région Hauts-de-France s’engageait pour l’accès à une énergie durable et accessible pour tous les Africains. Deux ans plus tard, c’est une véritable dynamique régionale basée sur une coopération multi-acteurs et sur une volonté commune d’in- novation et d’entrepreunariat qui se met en place en étroite Cette revue collaboration avec les partenaires d’Afrique. Elle permet de témoigne des développer une réelle expertise et capacité d’action régionale, expériences et notamment en matière de formation, de recherche-déve- loppement et d’expérimentation de solutions adaptées aux réflexions qui ont usages, sur le terrain africain. pu être portées pendant ces deux Lianes coopération et la Région Hauts-de-France, avec le pôle MEDEE et la Fondation Energies pour le Monde, partagent la dernières années, même volonté de faire travailler ensemble associations, entre- tant en région qu’à prises, collectivités, laboratoires de recherche, acteurs locaux d’autres endroits, et et nationaux. En alliant les compétences de ces différents ac- qui font avancer la teurs et de nos partenaires africains, nous sommes persuadés de pouvoir inventer le modèle énergétique de demain pour dynamique. l’Afrique. Cette revue témoigne des expériences et réflexions qui ont pu être portées pendant ces deux dernières années, tant en région qu’à d’autres endroits, et qui font avancer la dynamique. Nous vous en souhaitons bonne lecture. Salvatore Castiglione > Pascale Pavy > Vice-président de la Région Présidente du réseau Hauts-de-France en charge des Lianes coopération solidarités avec les territoires et des relations internationales revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019 3
photo ; Antoni Garcia - Unsplash.com DOSSIER ÉNERGIE : QUELS ENJEUX POUR LE DÉVELOPPEMENT? Marie-Noëlle Reboulet > GERES Transition énergétique, précarité énergétique, chèque-éner- gie, énergie durable pour tous, … l’énergie est au cœur de l’actualité, en France et dans la plupart des pays, riches ou pauvres. Le mot « énergie » est devenu, depuis le 19ème siècle, d’un usage très commun. Mais de quoi parle-t-on et Agronome et titulaire d’un Master en sciences sociales à l'EHESS, active depuis les années 80 dans des pourquoi est-ce si important pour l’activité humaine ? Quels ONG de solidarité internationale et dans les énergies sont les enjeux autour de cet « objet », en particulier pour les renouvelables, ancienne déléguée générale de la plus démunis ? Comment agir dans le cadre de la solidarité Fondation Poweo, présidente du GERES depuis 2017. internationale ? 4 revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019
L’énergie est une notion physique, elle mesure la capacité d’un système De l’énergie aux services Les enjeux de l’ODD1 7 à modifier l’état d’autres systèmes et énergétiques s’exprime en Watt-heure (ou kWh, L’énergie était absente des OMD2 ou MWh …). Elle est fournie sous Cet qui est indispensable à la vie adoptés en 2000. Mais le sujet est forme chimique, thermique, méca- et à nos sociétés, ce sont les services revenu sur le devant de la scène et, nique ou électrique d’une part par fournis par l’énergie pour satisfaire en 2012, les Nations-Unies ont lan- le stock non renouvelable de com- les besoins domestiques, collectifs ou cé l’Initiative « accès à l’énergie du- bustibles fossiles (pétrole, gaz « na- productifs : cuire, chauffer, refroidir, rable pour tous (SE4all) » avec trois turel », charbon) et nucléaire pui- transporter, éclairer, ventiler, trans- objectifs : donner un accès universel sés dans le sous-sol. Et d’autre part former, cultiver, récolter, tisser, soi- à l’énergie (notamment l’électricité) ; par les ressources renouvelables : gner, fabriquer, construire, etc. doubler l’efficacité énergétique ; dou- soleil, humains et animaux, bio- Le passage de la ressource à ces bler la part des renouvelables dans le masse (bois, végétaux, déchets or- services n’est ni facile ni gratuit. Des mix énergétique mondial. En 2015, ganiques sous forme de combustible objets convertissent, stockent, trans- cette ambition s’est traduite par l’ODD solide, biogaz ou biocarburant), flux portent et utilisent l’énergie : feu, 7 : « garantir l’accès de tous à des ser- d’eau et d’air ou encore eau chaude « foyer 3 pierres », moulin, harnais, vices énergétiques fiables, durables souterraine. Toutefois l’énergie de la moteur, pipeline, pale d’éolienne ... et modernes, à un coût abordable ». biomasse n’est renouvelable que si la La combinaison « ressources et Quelles sont les cibles de cet ODD ? ressource est renouvelée. Tandis que techniques » a permis la croissance l’énergie hydraulique est en concur- des activités humaines au cours de rence avec d’autres usages de l’eau et l’histoire. Car tout est dans la phy- dans le cas des grands barrages, peut sique : un humain adulte en bonne La maitrise de la demande fortement impacter le milieu humain santé a une puissance d’environ 40 W, en énergie : consommer et naturel. « Energie » n’est pas synonyme d’ s’il travaille 2500 heures/an, il four- nit une énergie annuelle de 100 kWh, mieux « électricité », l’électricité « trans- c’est l’énergie de moins de 2 heures de porte » l’énergie issue du rayonne- voiture ou de tracteur ! Notre capacité « L’énergie est notre avenir, économi- ment solaire (photovoltaïque) ou de d’action a été ainsi bouleversée grâce sons-la ! ». Ce slogan est valable par- la transformation d’une énergie mé- à une consommation toujours accrue tout et pour tous, ménages et profes- canique (éolienne) ou thermique (cen- d’énergie. Aujourd’hui l’électricité est sionnels. La maitrise de la demande trale thermique ou nucléaire), avec considérée comme une « énergie mo- en énergie par les industries est un des pertes de rendement à chaque derne » en raison de ses qualités et de enjeu économique et environnemen- étape. ses usages spécifiques (froid, petits tal, sans oublier que ces consomma- moteurs, numérique …). tions correspondent souvent à une 1 ODD : Objectif de développement durable 2 OMD : Objectif du Millénaire pour le développement photo : GERES ” Pour près d’un milliard de personnes [...] le problème crucial est l’accès à l’électricité. revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019 5
importation d’émissions de CO2 par tures d’énergie représentent 14 à 25% des ruraux. Et ce service reste coû- les pays riches. Au Cambodge, où se du budget en hiver en raison de la teux (environ 0,30 €/kWh pour les fournissent les grandes marques de mauvaise performance énergétique ménages au Mali, contre 0,12 à 0,17 prêt-à-porter, l’amélioration de l’effi- des logements. €/kWh en France, hors abonnement). cacité des chaudières utilisées par les Maitriser la demande en énergie, La qualité du service est inégale : des 1138 usines textiles permettrait d’éco- c’est favoriser à la fois une consom- générateurs au gasoil suppléent les nomiser 190 000 m3 de bois par an mation sobre (pour un usage donné et défaillances des réseaux et les kits so- et d’éviter 140 000 TeqCO23, avec un une vie décente) et efficace (en rédui- laires individuels fournissent le plus investissement récupérable souvent sant au minimum les pertes). souvent, quelques centaines de watts, en moins de 2 ans. pour un coût du kWh supérieur à 1 €. Pour les ménages, mieux utili- Cette situation impacte fortement les ser l’énergie est aussi un enjeu social L’accès à l’énergie : activités économiques des ménages et et sanitaire. Plus de 2.7 milliards de le cas de l’électricité des entreprises. personnes, dont 81% des sub-saha- riens et 63% des indiens, cuisinent L’accès à l’énergie concerne l’accès et se chauffent en brûlant de la bio- à l’électricité et à des carburants ou L’utilisation de sources masse dans des équipements ineffi- combustibles non polluants, en quan- d’énergie renouvelables caces et insalubres . Conséquences : tités suffisantes, à des prix stables et gaspillage d’énergie, dégradation de abordables, pour les besoins domes- Depuis la fin du 18ème siècle, la la ressource forestière, mais aussi tiques mais aussi pour la mobilité et combustion croissante de ressources travail pénible de collecte du combus- les usages productifs. carbonées émet des quantités expo- tible ou dépenses excessives quand le Pour près d’un milliard de personnes nentielles de gaz à effet de serre dans combustible est acheté, et maladies et nombre d’entreprises et de services l’atmosphère. Cet « effet de serre », provoquées par les fumées. Pourtant des pays les plus pauvres, le problème nécessaire à la vie sur terre, devient ces biocombustibles sont souvent les crucial est l’accès à l’électricité. Sans trop important, entrainant une aug- moins onéreux et les plus facilement électricité ou avec un réseau défaillant, mentation excessive de la tempéra- disponibles. difficile d’avoir un éclairage correct ture mondiale moyenne. Et chaque Et, quand l’énergie est disponible, ou du froid pour conserver vaccins ou 0.1° supplémentaire accroit le danger. la précarité énergétique touche les aliments, pas d’équipements efficaces Il est donc indispensable d’abandon- ménages modestes : par manque de ou d’ordinateurs pour les entreprises ner les énergies fossiles. ressources, « 26 millions d’européens ou les hôpitaux, pas de pompe suffi- Mais valoriser les ressources renou- sont dans l’incapacité de maintenir sante pour le réseau d’eau potable. velables exige des investissements une température assez chaude dans En Afrique sub-saharienne, deux- élevés. C’est une contrainte majeure leur logement en hiver» . Au Tadjikis- tiers des ménages urbains ont accès pour les grands réseaux électriques : tan, où intervient le GERES, les fac- à l’électricité, mais seulement 19 % une centrale thermique est moins 3 TeqCO2 : Tonne équivalent CO2 photo : Karsten Wurth - Unsplash.com 6 revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019
photo : GERES coûteuse en investissement, même si le prix A l’échelle macroéconomique, les questions et l’approvisionnement en combustible sont se posent en termes d’investissements et de incertains sur le long terme. financements (490 milliards seraient néces- Un des grands avantages des énergies renou- saires pour électrifier l’Afrique d’ici 2040), de velables est de pouvoir produire de l’électri- prix et de régulation, par filières ou secteurs cité de manière décentralisée. Toutefois, pour (fossiles, renouvelables, nucléaire, transports, les ménages souvent pauvres des zones hors électrification, …). La coopération entre états réseau électrique, il n’est pas facile d’arbitrer concerne en particulier l’extension des ré- entre acheter chaque jour un peu de pétrole seaux électriques et l’investissement dans des ou investir dans un kit solaire. Comment centrales solaires, éoliennes, hydrauliques ou rendre le coût du kWh supportable : modali- géothermiques d’une puissance de plusieurs tés de paiement (le système « pay as you go » dizaines de MW. est-il la solution ?), subvention à l’investisse- A l’échelle microéconomique, on s’intéresse ment, systèmes individuels ou mini-réseaux, plutôt aux liens entre énergie et vulnérabilité tarification et péréquation ? et aux pratiques « entre sources, techniques Nous voyons donc que, derrière l’ODD 7, se et services énergétiques » . En lien étroit avec posent de multiples questions économiques et les autorités et partenaires des pays concer- territoriales, environnementales et sanitaires nés, l’action dans le domaine de l’énergie à ou de réduction de la pauvreté et des inéga- l’échelle des collectivités et des associations lités. Les questions relatives à l’énergie ne de solidarité internationale peut ainsi se dé- peuvent être traitées isolément, l’ODD 7 n’est cliner selon deux grands axes : qu’un moyen pour atteindre les autres ODD. Prendre en compte l’énergie (efficacité, so- briété, accès) dans des projets centrés sur d’autres ODD : un investissement sani- taire, agricole, hydraulique ou scolaire, Répondre à l’ODD 7 au travers l’entrepreneuriat, la formation profession- de l’action internationale ? ” Les Nations-Unies, avec cet ODD, affirment la nécessité de « renforcer la coopération internationale en vue de faciliter l’accès aux sciences et technologies de l’énergie propre » et de « développer l’infrastructure et amélio- Aujourd’hui, en plus des sources d’énergie rer la technologie afin de fournir des services primaire, c’est l’accès aux terres rares et à énergétiques modernes et durables à tous les certains métaux permettant de produire, habitants des pays en développement, dans le respect des programmes d’aide qui les transporter et stocker l’électricité, qui concernent ». inquiète. revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019 7
” Plus de 700 millions de personnes, principalement en Afrique sub- La solidarité climatique : un impératif pour la paix. Les guerres des 20ème et 21ème siècles saharienne, vivront encore sans montrent que l’accès aux ressources énergé- tiques est éminemment stratégique et la dépen- électricité en 2040 dance aux importations se ressent au quotidien, en France comme dans les villages enclavés du Mali ou de Mongolie. Aujourd’hui, en plus des nelle, l’amélioration de la condition féminine. sources d’énergie primaire, c’est l’accès aux A titre d’exemple, pour la construction d’une terres rares et à certains métaux permettant école, d’un centre de santé, on favorisera les de produire, transporter et stocker l’électricité, techniques qui économisent chauffage ou cli- qui inquiète. matisation et améliorent le confort (orientation Et si le nombre de personnes sans électricité est par rapport au sud, disposition des ouvertures, passé en dessous du milliard au niveau mon- aérations, choix des matériaux, isolation), on dial, plus de 700 millions de personnes, prin- optimisera l’installation électrique (par rapport cipalement en Afrique sub-saharienne, vivront aux besoins, à l’existant et aux capacités d’en- encore sans électricité en 2040 . Les investisse- tretien), on contrôlera sa bonne réalisation, et ments à réaliser, et donc les besoins de finan- on prévoira des équipements économes adaptés cement, sont considérables. Ce marché attire à aux besoins de chauffage d’eau et/ou de cantine. la fois les grands groupes de l’énergie et de la finance et les PME et start-up du monde entier. Sans parler des marchés de la construction ou Investir dans la maitrise de la de l’automobile, et même des équipements de demande et l’accès à l’énergie cuisson propres et économes adaptés au « bas à l’échelle d’un territoire de de la pyramide ». coopération (ville, commune Face à ces situations, dans tous les pays, les rurale, département). dirigeants politiques sont interpellés par leurs électeurs pour accélérer les investissements, La première étape devrait être de faire un subventionner le prix des énergies ou des équi- diagnostic énergétique. L’analyse fine des pements valorisant les renouvelables. besoins actuels et futurs (chaleur, mobilité, électricité spécifique, domestiques et pro- Dans le même temps, le GIEC rappelle que le ductifs, …), ainsi que des sources d’appro- point de non-retour ne doit pas être dépassé, visionnement et de production potentielles, avec + 1,5°C les impacts du réchauffement cli- permet de proposer des solutions conciliant matique restent prévisibles, au-delà de + 2°C, au mieux point de vue des utilisateurs, dé- l’ampleur des conséquences et inconnue. Il pré- veloppement, environnement et adaptation conise de réduire les émissions de CO2 globale- aux changements climatiques. Les investis- ment de 45% d’ici 2030 par rapport à 2010 et de sements, mais aussi les actions relevant de la favoriser une nouvelle approche de l’usage des formation des professionnels, de la sensibilisa- sols. tion des habitants, ou du financement, doivent L’aspiration des pays les plus pauvres à une vie s’appuyer sur les compétences existantes : plus facile est pourtant légitime. Comment y agences techniques de l’état, entreprises (ar- parvenir sans émettre encore massivement des tisans, fournisseurs, start-up, consultants…), GES ? Dans les négociations internationales, ONG nationales ou internationales, services les dirigeants de ces pays tentent d’échanger techniques des collectivités. De nombreux leur accord aux mesures pour le climat contre exemples de réalisations existent, il est indis- un soutien financier massif des pays riches pensable de s’inspirer de leurs résultats. Parmi pour leur développement bas-carbone et leur les ONG spécialisées, on peut citer en France, adaptation aux changements climatiques. les membres de la Commission Climat et Dé- veloppement de Coordination-SUD (GERES, Au-delà des financements, les enjeux pour les Electriciens sans Frontières, Fondation Ener- pays concernés, en particulier en Afrique, sont : gies pour le Monde, Bolivia-Inti, Gret, Initia- • technologiques : transferts technologiques, tive-Développement, La Voute Nubienne …). besoins en formation et R&D, adaptation aux ressources et aux besoins locaux. • économiques : place pour des entreprises locales et nationales dans ces marchés de l’énergie en pleine croissance, création 8 revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019
photo : Pexels.com d’emplois, fiscalité et budget des meilleur, le Geres défend la Solidari- états. té Climatique, c’est-à-dire la nécessi- • sociaux et territoriaux : réduc- té d’émettre moins de GES et de sou- tion des inégalités à l’intérieur tenir une vie décente pour tous. Pour des pays, entre des catégories cela, nous proposons une transition urbaines au mode de vie occi- vers une consommation énergétique dental énergivore (béton, clima- sobre et responsable et l’accès de tous tisation, automobiles, …) et des à des services énergétiques durables. populations péri-urbaines ou En Afrique, en Asie comme en ré- rurales qui consomment peu et gion Provence-Alpes-Côte d’Azur, la ” sont les plus impactées par les diffusion de solutions énergétiques changements climatiques ; dé- durables crée des emplois et de la placements de population. valeur ajoutée locale, améliore le • politiques : capacité des états à bien-être des personnes, renforce élaborer et à mettre en œuvre leur résilience et contribue à l’atté- en toute indépendance des po- nuation et à l’adaptation climatiques. Les questions litiques nationales qui prennent L’action de terrain est complétée par relatives à l’énergie en compte à la fois les enjeux de une action de mobilisation : les ci- développement et d’environne- toyens, consommateurs, profession- supposent des ment. nels, sont incités à agir concrètement choix techniques, pour réduire leurs émissions de GES. organisationnels, Les questions relatives à l’énergie supposent des choix techniques, or- Il est temps d’agir avant que chan- socio-économiques ganisationnels, socio-économiques gement climatique ne devienne sy- et donc politiques qui et donc politiques qui interrogent nonyme de chaos climatique. La So- interrogent toutes les toutes les sociétés. Elles mettent aussi en exergue l’interdépendance lidarité climatique est un impératif pour la paix ! sociétés. entre pays et régions, pour le meil- leur ou pour le pire. Pour éviter le pire et aller vers le revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019 9
Sur les sites venteux, l’éolienne peut- être utilisée seule ou en complément d’une autre source d’énergie. La production peut-être assurée par une ferme solaire qui a pour seule fonction la production d’électricité pour la communauté. INFOGRAPHIE L’ÉNERGIE : TOUTUN SYSTÈME ! DE SA PRODUCTION À SON UTILISATION Un projet de mini-réseau en milieu rural s’inscrit dans un écosystème social, économique, environnemental. création graphique : Guillaume Guetreau Le projet doit donc associer l’ensemble des acteurs - CENTRAIDER privés, institutionnels et de la société civile dans la construction d’un modèle systémique. 10 revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019
L’utilisation de sources d’énergie fonctionnant par intermittence (soleil ou vent) nécessite un stockage d‘énergie. Pour les besoins éloignés du réseau communautaire, un générateur solaire autonome peut produire de l’électricité directement sur le lieu de consommation. Il existe des compteurs fonctionnant sur un système prépayé. L’énergie est payée avant sa consommation, comme si on achetait du pétole ou des bougies. Il existe différents usages de consommation que ce soit pour la maison avec l’alimentation d’un frigo, d’un four ou d’une télévision. Il faut aussi de l’énergie pour les entreprises comme les boulangeries pour faire cuire le pain ou encore pour les batîments publics tels que les écoles. revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019 11
Photos : Synergie Solaire INTERVIEW ENTREPRISES ETONG : COMMENTLES FAIRETRAVAILLER ENSEMBLE ? Une énergie durable au service de l’Homme, qu’est-ce que cela veut dire pour vous ? Il s’agit de donner accès à une énergie stable, pérenne, non pol- Hélène Demaegdt > Synergie Solaire luante et accessible financièrement dans des endroits qui ne sont pas raccordés au réseau national, ou dont le réseau n’est pas fiable ou dont la source d’électricité est très polluante comme celle des Entrepreneur depuis 20 ans dans le secteur de la générateurs diesel. Cet accès à l’énergie va permettre d’améliorer grande distribution et actionnaire d’une PME productrice les conditions de vie des populations locales : santé, éducation, dé- d’énergies renouvelables, Hélène Demaegdt crée en veloppement économique, sécurité, communication, connexion au 2008 une première fondation dédiée à l’enfance. En 2010, devenue actionnaire d’une entreprise productrice monde et ainsi leur donner les moyens de se développer. Les im- d’énergies renouvelables, elle lance le fonds de dotation pacts sociaux et environnementaux sont intimement liés. Synergie Solaire qui lie la filière EnR française puis européenne à des ONG pour mener à bien des projets Quelle est votre vision d’un modèle énergétique durable ? d’accès à l’énergie. Comment cette vision peut-elle se concrétiser ? Afin que les projets soient pérennes, nous nous attachons à ce que Synergie Solaire notre soutien réponde à un besoin identifié sur le terrain par les porteurs de projets afin d’être certains de l’utilité du projet, de son Fonds de dotation de la filière européenne des appropriation par les populations locales ainsi que de l’attention énergies renouvelables, Synergie Solaire cen- portée à sa maintenance. Il s’agit donc d’un modèle énergétique tralise les fonds mais aussi les compétences durable dans le sens où nous utilisons les énergies renouvelables des entreprises du secteur, pour accompagner mais aussi parce que les projets sont viables dans le temps. Il est financièrement et techniquement des ONG sé- également important pour nous d’inclure une dimension écono- lectionnées, porteuses de projets humanitaires mique. Nous faisons des dons mais nous trouvons important de d’accès à l’énergie partout dans le monde, ne pas maintenir les bénéficiaires dans l’assistanat, par exemple, préalable à tout développement. faire payer les bénéficiaires pour un kit solaire permet de lui don- 12 revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019
ner plus de valeur et d’attention quant à son en- d’ailleurs développé un réseau d’experts tech- tretien. Concrètement, nous privilégions des niques en appui des programmes d’électrifica- ONG ayant cette vision. tion. Inversement, les entreprises qui souhaitent soutenir des projets d’accès à l’énergie n’ont pas Différents acteurs travaillent sur des pro- forcément conscience des besoins sur le terrain ni de la façon de le mettre en œuvre (connais- jets énergétiques : ONG, Entreprises, sance des acteurs locaux, des bénéficiaires, des Collectivités… quelles sont les limites des institutions, des réglementations, de la culture, projets que l’on observe aujourd’hui ? connexions avec les instances locales…). Aujourd’hui on parle beaucoup d’impact, tous les Dans ce rapprochement entre différents financeurs ont besoin de savoir en quoi les projets mondes (ONG, entreprises, …) qu’est ce qui est financés participent à l’amélioration des condi- le plus difficile ? Quels sont au contraire vos plus tions de vie des populations locales. Les limites peuvent être d’abord culturelles : que mesure- grandes réussites ? t-on sachant que nous n’accordons pas la même importance aux choses selon les endroits (par Le challenge est de mobiliser les entreprises pour exemple le gain en productivité est plus ou moins un impact éloigné de chez eux dont ils n’ont pas important selon les cultures) ? Mais aussi tempo- forcément conscience : l’accès à l’énergie, ce n’est relles : les effets se mesurent sur le long terme, pas simplement la lumière, c’est pouvoir travail- par exemple, l’impact de l’éducation sur le long ler après 18h, accéder à des soins de santé variés terme. Ainsi qu’économiques : mesurer l’impact près de chez soi, brancher un ventilateur pour est chronophage et représente un coût important dormir la nuit, conserver ses aliments au frais, notamment pour les petits projets qui ont peu de recharger un téléphone portable, marcher dans moyens humains et financiers. La question est des rues éclairées et donc plus sécurisées, de- comment on mesure cet impact : quels sont les venir plus compétitif dans une activité profes- indicateurs à mettre en place sur le court ou long sionnelle, se connecter au monde… Nous n’en terme et avec quels moyens ? Aujourd’hui, nous avons pas forcément conscience car nous ne nous utilisons un outil de mesure d’impact élaboré en posons plus la question de l’accès à l’énergie à fonction des objectifs de chaque projet mais nous moins d’en être privés pendant quelques heures. nous questionnons en permanence sur ce sujet Aujourd’hui nous sommes fiers d’avoir réussi à complexe afin de mesurer la performance sur le fédérer près de 200 entreprises de la filière des terrain de la manière la plus juste possible. Un énergies renouvelables. Fédérer les entreprises apport technique important dans notre domaine pour mutualiser capitaux et compétences, c’est est le monitoring des installations électriques. ainsi que nous pouvons démultiplier l’impact Comme évoqué plus haut, il est primordial de sur le terrain et que nous avons pu soutenir près consacrer un budget à l’entretien et à la mainte- de 700 000 personnes jusqu’à aujourd’hui. La nance des installations afin de s’assurer que les particularité de Synergie Solaire c’est d’être une équipements soient utilisés à 100% de leur ca- fondation dédiée à une filière et non à une seule pacité et que le projet vive sur le long terme. Il entreprise, cela demande parfois aux entreprises faut donc que le personnel soit formé ou qu’une de dépasser les logiques de concurrence pour entreprise puisse assurer ce service. Nous avons se tourner vers un enjeu global qui va au-de- mis en place un outil de monitoring que nous là de notre hexagone. Mises à part les relations sommes également en train d’améliorer en fonc- ONG/entreprises que nous avons tissées, nous tion de nos retours d’expérience sur le terrain. avons construit des relations avec des institu- tions ; nous sommes soutenus par le Ministère Vous rapprochez ONG et entreprises, quelle de la Transition écologique et solidaire ainsi que est la plus-value d’un projet multi-acteurs par les 3 syndicats de la filière. Nous sommes convaincus que la réponse à un monde meilleur dans le domaine de l’accès à l’énergie ? réside dans la collaboration entre tous : institu- Rapprocher entreprises et ONG permet de bé- tionnels, entreprises, ONG, société civile. ” néficier d’expertise propre à chacun des ac- teurs. L’entreprise va permettre non seulement d’apporter des fonds financiers mais aussi des compétences dont l’ONG ne bénéficie pas. Nous encourageons vivement nos entreprises parte- naires à faire du mécénat de compétences car les Afin que les projets soient pérennes, nous besoins ne sont pas uniquement financiers. Nous voulons promouvoir des liens humains, des rela- nous attachons à ce que notre soutien tions interculturelles indispensables à la bonne réponde à un besoin identifié sur le réalisation d’un projet quel qu’il soit. Nous avons terrain par les porteurs de projets [...] revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019 13
Photo : ESF DOSSIER L’électricité, E.S.F : AU SERVICE une nécessité au quotidien DE LA SOLIDARITÉ L’accès à l’énergie est indispensable aujourd’hui pour la vie courante ; pour l’alimentation comme ÉNERGÉTIQUE l’accès à l’eau, pour la santé comme l’éducation, un certain nombre de personnes se retrouvent contraintes par le faible développement du ré- INTERNATIONALE seau ou l’absence d’infrastructures électriques. C’est pour répondre à ces différents besoins que l’ONG de solidarité internationale Electriciens Sans Frontières déploie son réseau de 1300 béné- voles, avec à ce jour environ 124 projets réalisés > Électriciens Sans Frontières dans 35 pays différents (chiffres au 31 décembre 2017). Depuis 1986, les bénévoles d’Electriciens Sans Frontières agissent dans La plus grande partie des actions de la structure le monde aux côtés d’acteurs associatifs, institutionnels et économiques. sont des projets d’accès à l’électricité et à l’eau Ensemble, ils contribuent à répondre aux besoins essentiels de populations afin de contribuer à l’amélioration des conditions majoritairement situées en zones rurales isolées et menacées par un niveau de d’éducation, de soins et au développement écono- pauvreté extrême, les effets du réchauffement climatique ou une catastrophe mique des populations qui les sollicitent. humanitaire. 14 revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019
rales isolées et favoriser l’appro- sources naturelles renouvelables, Intervention en cas priation des projets mis en place, disponibles localement. d’urgences humanitaires l’approche d’ESF se fonde sur un important travail de concertation • Former pour inscrire les projets Au même titre que l’eau et la nour- avec les populations locales avant, dans la durée - La pérennité est riture, l’électricité est vitale dans les pendant et après la réalisation ef- un élément central des actions. situations d’urgence humanitaire. fective des installations. Elle s’appuie sur différents élé- ESF intervient auprès des autres ONG ments : la formation, la présence pour qu’elles puissent agir dans les • Impliquer les populations locales d’un comité de gestion, l’émer- meilleures conditions possibles (élec- - Afin d’apporter des solutions ef- gence d’un opérateur local. La trification d’hôpitaux, éclairage des ficientes et adaptées au territoire création d’activités économiques zones de recherche de survivants la concerné, les travaux sont le plus participe aussi à la durabilité des nuit). L’action est également orientée souvent réalisés avec une entre- projets. La réunion de l’ensemble directement auprès des populations prise locale ou la communauté de ces conditions permet ensuite sinistrées pour assurer le maintien villageoise. Leur implication est la duplication des installations d’un lien social à la nuit tombée et indispensable à l’appropriation par les populations elles-mêmes participer à la sécurité des personnes des installations, elle-même gage et participe à leur autonomie. grâce, notamment, à de l’éclairage pu- de pérennité. blic. Au travers de ses actions, ESF s’en- • Conjuguer efficacité énergétique gage pour un développement durable et énergies renouvelables - Un de l’accès à l’énergie propre dans le nombre plus important de per- monde. Partir des individus, de leur Actions coopératives avec sonnes bénéficiera d’une installa- environnement et de leurs usages collectivités locales et ONG tion électrique si celle-ci répond pour construire ensemble et leur à des critères d’efficacité énergé- donner les clefs d’un développement ESF répond ponctuellement aux be- tique. De même, les coûts engen- durable local, c’est aussi ça la solida- soins d’autres acteurs de la solidarité drés et l’impact environnemental rité internationale des énergies, élec- internationale comme les collectivi- seront moindres. En outre, les triques ou humaines. tés territoriales (Ville de Montreuil, projets s’appuient sur les res- Saint-Brieuc…) et les autres ONG (Médecins Sans Frontières, Croix- Rouge française, Médecins du Monde, Oxfam...). En sécurisant et fiabilisant Photo : ESF leurs installations électriques notam- ment, mais également en apportant une expertise dans la mise en œuvre de leurs projets dans les pays en dé- veloppement. Ces actions se déploient avec une vo- lonté réelle de durabilité, pour cela l'association a pris différents engage- ments ; • Allier services collectifs et éco- nomie - Privilégier les services collectifs garantit que l’électricité bénéficie au plus grand nombre et sert de levier de développement humain et économique. La créa- tion d’une source de revenus dé- diée au bon fonctionnement des installations électriques permet ” de développer l’économie locale et générer des fonds pour l’entretien des installations. • Répondre à un besoin exprimé localement - Pour répondre aux 75 % des projets d’ESF touchent besoins spécifiques des zones ru- au développement revue du réseau Lianes Coopération n°1 - décembre 2019 15
Photo : Fondation Énergies pour le monde TÉMOIGNAGE JEAN-LOUIS BORLOO Vouloir faciliter l’accès à l’énergie dans les pays du Sud, et en premier lieu en Afrique, c’est non seulement garantir la réussite de nos politiques L’AFRIQUE : climatiques mais c’est aussi prévenir un enjeu crucial pour la paix et la stabilité du monde. UNE TRIPLE Pourquoi ? Parce qu’en Afrique, nous sommes face à une triple révolution et chacune d’elle, par sa vitesse et par ses impacts, est inédite RÉVOLUTION dans l’histoire de l’Humanité. Première révolution, le choc démographique. > Fondation Énergies pour le Monde La population africaine devrait doubler dans les trente ans qui viennent. Le continent, qui a Fondation spécialisée depuis trente ans dans l’accès à l’électricité à partir déjà vu sa population multipliée par 10 depuis de sources renouvelables, Energies pour le Monde intervient aujourd’hui l’accès à l’indépendance et/ou la création de exclusivement en Afrique au côté des acteurs locaux. Fondée par Alain nouveaux Etats, devra nourrir, loger, soigner, Liébard, elle a été présidée par Vincent Jacques le Seigneur avant que Jean- former, employer plus d’un milliard de per- Louis Borloo, ancien ministre d’Etat et initiateur d’Energie pour l’Afrique lors sonnes supplémentaires d’ici 2050. Un milliard de la COP 21, n’en reprenne les rênes. de jeunes de moins de trente ans – ils ne sont 16 revue du réseau [...] n°1 --décembre n°... Lianes Coopération mai 2019 2019
pas encore nés – vont représenter lustre ce monde du nomadisme et sements éoliens et partout pour son à l’échelle de la planète un actif sur de la communication permanente gigantesque potentiel de biomasse. quatre. Leurs modes de vie – pro- dans lequel nous sommes entrés duits de consommation courante, avec tout le village planétaire. transport, habitat…- et leur façon de travailler et de produire seront L’urgence d’agir évidemment déterminants pour le succès ou l’échec des politiques cli- Troisième révolution, Cette triple révolution - démo- matiques engagées ailleurs sur la planète. l’accès à l’énergie. graphie, communication et accès à l’énergie - est fascinante et doit L’accès à l’énergie est un enjeu uni- nous interpeller. C’est évidemment versel. C’est ce qui permet d’ac- un devoir d’humanité car on ne sau- céder aux droits fondamentaux : rait laisser dans le noir un terrien Seconde révolution, les l’eau potable mais aussi l’assainis- sur quatre, mais c’est aussi un de- communications. sement des eaux usées, l’éducation voir pour l’humanité qui joue là sa et la santé, l’emploi et la sécurité, survie. La rapidité de diffusion de la télé- la stabilité, en un mot le droit de phonie mobile et des smartphones vivre dignement dans son bourg ou Nous n’avons pas le choix et il est est tout simplement hallucinante dans son quartier. Et c’est un des urgent d’agir. : on compte aujourd’hui 995 mil- objectifs de développement durable lions d’abonnés au téléphone et 362 adoptés par l’Assemblée générale En premier lieu, les émissions de millions d’internautes. Il n’y a que des Nations Unies en 2015, qui en- gaz à effet de serre dont l’Afrique peu de foyers qui soient dépourvus tend « assurer à tous un accès à une est responsable sont aujourd’hui de téléphone portable même lors- énergie abordable, fiable, durable et quantité négligeable mais elle paie qu’il faut marcher des kilomètres moderne d’ici 2030 ». déjà le prix fort en termes d’impacts pour aller le recharger parce qu’il du changement climatique : pénu- n’y a pas encore l’électricité… Toute Or l’Afrique est plongée dans le ries en eau ou épisodes cycloniques l’Afrique a fait en moins d’une dé- noir alors qu’il serait possible de dévastateurs, recrudescence des cennie un saut technologique et ce permettre l’accès à l’électricité à maladies, malnutrition et famines faisant a vu ses perceptions et ses quelque 620 millions d’Africains à répétition, événements météoro- représentations, ses modes de vie qui en sont dépourvus, dont près logiques extrêmes… et de production bouleversés, en de 80 % vivent en milieu rural. moins d’une génération. Une opération à double dividende Second constat, si l’Afrique n’est puisque les Africains auraient alors que peu responsable de ces émis- C’est à la fois une menace et une accès au développement et, simul- sions, ce n’est évidemment pas une opportunité. Désormais, il est vain tanément, l’Afrique deviendrait le situation figée : ces cinq dernières d’imaginer sédentariser des po- premier continent faisant massi- années, 30 % des découvertes de pulations qui n’ont pas accès aux vement appel aux énergies renou- ressources fossiles dans le monde services essentiels indispensables velables ouvrant ainsi la voie à un l’ont été en Afrique subsaharienne. au développement alors qu’elles monde décarboné, condition de sur- Pas plus que les pays du Nord, pen- sont connectées avec le reste du vie de l’humanité. Ce n’est pas une dant le siècle passé, les pays du Sud monde et voient Paris, Addis-Abe- gageure, c’est un pari fou peut-être, concernés ne pourront résister à ba, Londres ou Lagos briller de un défi certainement mais qui reste cette manne qui git dans leur sous- mille feux. Et demain, plus encore à notre portée. Pourquoi ? Comme sol si rien n’est fait aujourd’hui pour qu’aujourd’hui, la jeunesse n’aura pour la téléphonie, l’absence de ré- les en dissuader. de cesse de prendre la route, attirée seau est une opportunité à saisir par les lumières et la musique de pour développer un peu partout Accompagner, donner un coup la ville. C’est une chance aussi car des mini-grids à l’échelle de la com- de main modeste pour permettre avec la communication, on accède à mune ou du canton alimentés par l’émergence du premier continent la modernité en tous points du ter- de petites centrales photovoltaïques décarboné de l’humanité qui fera ritoire : il est possible d’anticiper les ou hydrauliques. Les progrès tech- appel à 100 % d’énergie renouve- récoltes, de connaître les prévisions nologiques et les effets d’échelle font lable, c’est jouer un coup d’avance. météo, d’alerter ou de prévenir des aujourd’hui des énergies renouve- Il s’agit d’une course contre la risques, de payer ou d’être payé. Et il lables des sources compétitives qui, montre qu’il nous faut pourtant im- est désormais possible d’acheter de dans la majorité des cas, sont moins pérativement gagner car l’Afrique l’électricité à la demande, en fonc- onéreuses que celles produites par n’attendra plus. tion de ses besoins mais surtout de de petits groupes diésel. Les tech- ses ressources, comme on acquiert nologies sont robustes et adaptées à déjà des unités de communication. ce continent qui est béni des dieux, On appelle cela le « pay as you go », une expression qui, à elle seule, il- ici pour son irradiation solaire, là pour son régime de pluie ou ses gi- Jean-Louis BORLOO revue du réseau Lianes revueCoopération du réseau [...] n°1 - décembre n°... - mai 2019 17
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