Les Lepidochelys (Chelonii, Cheloniidae), Tortue de Kemp L. kempii (Garman, 1880), et Tortue Olivâtre L. olivacea (Eschscholtz, 1829) ...
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Les Lepidochelys (Chelonii, Cheloniidae), Tortue de Kemp L. kempii (Garman, 1880), et Tortue Olivâtre L. olivacea (Eschscholtz, 1829) naturellement dans les eaux martiniquaises de la Caraïbe orientale, et des côtes atlantique d’Amérique Centrale et du Sud proches du Golfe du Mexique. par Marcel BOURGADE Parc Naturel Régional de la Martinique Morne Tartenson, F de F, 97200 Martinique Caraïbe orientale mbourgade@hotmail.com Résumé – Jusqu’à la fin des années 1970 les tortues marines de toutes les diverses espèces disponibles dans les eaux martiniquaises furent intensément pêchées et très consommées par les martiniquais. Ces tortues capturées et ramenées du large par les pêcheurs donnaient lieu à des débats populaires sur les plages et marchés quant aux identifications et dénominations vernaculaires de ces tortues à écailles (Chelonii, Cheloniidae) manifestement de diverses espèces, et surtout débats relatifs aux espèces, autres que les trois connues et reconnues comme fréquentant les plages de la Martinique pour y pondre ; tortues « hors débat » qui sont : - les Tortues Luth, Dermochelys coriacea ( Vandelli, 1761), dénommée en martiniquais Tòti a Klen (ou Tòti Chaloup par les pêcheurs des Anses d’Arlet) ; - les Tortues imbriquée, Eretmochelys imbricata (Linnaeus, 1766) , Tòti Karèt en martiniquais ; - les Tortues Vertes, Chelonia mydas (Linnaeus, 1758), Tòti Blan en martiniquais. Sans aucun doute à cette époque, parmi ces nombreuses tortues péchées il y avait des Caretta caretta (Linnaeus, 1758), tortue Caouanne, Tòti Jòn, Tòti Gwo Tèt ou Tòti Kwan en martiniquais (nom d’origine amérindienne), mais aussi des Lepidochelys, d’abord la Tortue Olivâtre L. olivacea ; et bien entendu plus rarement la Tortue de Kemp L. kempii. A Sainte- Anne, les pécheurs attribuaient un autre nom à des tortues visiblement différentes et rarement péchées, et ce nom de Tòti Kawonn (prononcé Carongne, vraisemblablement nom d’origine amérindienne) correspondrait à celui utilisé pour désigner, en les confondant, les deux espèces de Lepidochelys présentent dans les eaux martiniquaises. M o t s - c l é s : Martinique, Caraïbe orientale, Lepidochelys kempii, Tortue de Kemp, Tortue de Ridley, Lepidochelys olivacea, Tortue olivâtre. 1
Lepidochelys (Chelonii, Cheloniidae), Tortoise de Kemp L. kempii (Garman, 1880), and Tortoise Olivâtre L. olivacea (Eschscholtz, 1829) naturally in the Martinican waters of the eastern Caribbean, and the Atlantic coasts of Central America and from the south near the Gulf of Mexico. S u m m a ry - Until the end of the 1970s, sea turtles of all the various species available in Martinican waters were intensely fished and widely consumed by the people of Martinique. These turtles captured and brought back from the sea by fishermen gave rise to popular debates on beaches and markets as to the identifications and vernacular names of these tortoises with scales (Chelonii, Cheloniidae) obviously of various species, and especially debates relating to the species, other that the three known and recognized as frequenting the beaches of Martinique to lay eggs; turtles "out of debate" which are: - Leatherback turtles, Dermochelys coriacea (Vandelli, 1761), called Tòti a Klen in Martinique (or Tòti Chaloup by fishermen from Anses d´Arlet); - Hawksbill Turtles, Eretmochelys imbricata (Linnaeus, 1766), Tòti Karèt in Martinique; - Green Turtles, Chelonia mydas (Linnaeus, 1758), Tòti Blan in Martinique. Without a doubt at that time, among these many turtles caught there were Caretta caretta (Linnaeus, 1758), Loggerhead turtle, Tòti Jòn, Tòti Gwo Tèt or Tòti Kwan in Martinique (name of Native American origin), but also Lepidochelys , first of all the Olive Turtle L. olivacea; and of course more rarely the Kemp Tortoise L. kempii. At Sainte- Anne, sinners gave another name to visibly different and rarely caught turtles, and this name of Tòti Kawonn (pronounced Carongne, probably name of Native American origin) would correspond to that used to designate, by confusing them, the two Lepidochelys species present in Martinique waters. Key-words: Martinique, Eastern Caribbean, Lepidochelys kempii, Kemp's tortoise, Ridley's tortoise, Lepidochelys olivacea, Olive Ridley tortoise. I. INTRODUCTION Robert PINCHON, Docteur en sciences, chercheur arrivé en Martinique en 1945, étudiant la nature martiniquaise, observant les us et coutumes et s’informant auprès des pêcheurs, a attesté de la présence dans les eaux au large de la Martinique de l’espèce Lepidochelys olivacea, Tortue olivâtre ; espèce dont il a conservé la carapace d’un spécimen dans sa collection. La tortue de Kemp Lepidochelys kempii, elle aussi est mentionnée comme avoir été observée présente dans les eaux martiniquaises par Pinchon en 1967 ; certains auteurs ont mis manifestement à tort, en doute cette observation, et il s’avère bien que ces considérations contestant l’observation de Pinchon sont infondées, d’autant plus suite aux données de répartition de l’espèce relevées cette dernière décennie menant à la certitude scientifique que cette tortue de Kemp est bien présente en dessous de la latitude de 16°, et qu’elle circule donc bien dans la mer Caraïbe et dans l’Atlantique, et par conséquent peut tout naturellement se retrouver de passage dans les eaux des îles de la Caraïbe orientale. Ces données se sont vues confirmer par la mise en évidence de la présence de la tortue de 2
Kemp, Lepidochelys kempii, dans les eaux martiniquaises, et précisément au cap Chevalier à Sainte-Anne, signalée et rapportée le 13 septembre 2013, par un agent du Parc Naturel Régional de la Martinique. A noter que durant cette dernière décennie, en Martinique des constats d’échouages de tortues de l’espèce Lepidochelys olivacea, Tortue olivâtre, à deux reprises ont été établis sur les rivages de la péninsule de la Caravelle, dans la réserve naturelle à Trinité par des agents du Parc Naturel Régional de la Martinique (Thomas ALEXANDRINE, Christophe AUGUSTE, Pascal VATBLE). La tortue de Kemp ou tortue de Ridley, Lepidochelys kempii (Garman 1880), est une espèce classée en danger critique par l'IUCN, très rarement observée dans les eaux martiniquaises et en général en dessous de la latitude de 16°, bien que l’espèce a déjà été attestée bien présente sur les côtes du Venezuela, de Colombie et du Costa Rica. 3
II. RÉSULTATS 13 septembre 2013 : spécimen observé par un agent du PNRM (Parc Naturel Régional de la Martinique) d’une tortue de l'espèce Lepidochelys kempii décapitée et échouée sur une plage de l’îlet Chevalier à Sainte-Anne Martinique Caraïbe orientale. (Photo : Marcel BOURGADE) Longueur maximum de carapace estimée : ≤ 65 cm Poids maximum estimé : ≤ 50 kg Clé de détermination : En absence de la tête et donc selon les données observables vu état de décomposition du cadavre nous avons procédé par déduction logique en fonction de critères fondés sur : - l’analyse du nombre de paire(s) de griffes sur membres supérieurs. (1) - l’analyse du nombre de paires d’écailles costales sur dossière de la carapace. (2) - l’analyse de la forme générale du plastron et de ses caractéristiques en nombre, formes et tailles d’écailles inframarginales. (3) (1) Le critère du nombre de paire(s) de griffes observé sur membres supérieurs de la tortue marine en objet de notre rapport d’identification de l’espèce nous conduit à exclure l’hypothèse qu’il puisse s’agir de la tortue Imbriquée Eretmochelys imbricata dite Karèt en martiniquais, ni de la tortue Caouanne Caretta caretta dite Toti Jòn en Martinique. En effet la tortue découverte décapitée le vendredi 13 septembre 2013 échouée sur plage de l’îlet Chevalier sur le territoire de Sainte-Anne Martinique, comportait une (1) seule paire de griffes sur ses membres supérieurs et inférieurs. 5
(2) Le critère du nombre de paires d’écailles ou plaques costales sur dossière de la carapace qui est de cinq (5) pour la tortue découverte décapitée le vendredi 13 septembre 2013, nous indique qu’il ne peut s’agir de l’espèce de tortue Verte Chelonia mydas (pour laquelle on dénombre 4 paires d’écailles costales sur dossière), ni de l’espèce de tortue Olivâtre Lepidochelys olivacea (pour laquelle on dénombre 6 ou plus paires d’écailles costales sur dossière). 1 2 3 4 5 (3) Le critère de la forme générale du plastron ainsi que ses caractéristiques en nombre, formes et tailles d’écailles inframarginales viennent confirmer qu’il s’agit d’une tortue de Kemp ; taxon : Lepidochelys kempii. IDENTIFICATION DE L’ESPECE DE TORTUE MARINE DECOUVERTE ECHOUEE DECAPITEE SUR ILET AUX LEZARDS (ou ILET CHEVALIER) SAINTE-ANNE LE 13 SEPTEMBRE 2013 6
PLASTRON et CARAPACE TORTUE DECAPITEE ECHOUEE SUR ILET AUX LEZARD –STE-ANNE MARTINIQUE Photos : Marcel BOURGADE (PNRM) Plastron ci-dessus type L. kempii (D’après : TORTUGA LORA, Secretaría Pro Tempore de la Convención Interamericana para la Protección y Conservación de las Tortugas Marinas (CIT), San José, Costa Rica, Abril, 2005) 8
Configuration type de positionnement des écailles du plastron de Lepidochelys kempii Configuration comparée au plastron de Lepidochelys olivacea ; pour la tortue de Kemp les lignes dans le sens de la largeur du plastron, séparant d’une part les écailles abdominales et les écailles pectorales, et d’autre part ces lignes séparant les écailles abdominales et les écailles fémorales, ne viennent point en quasi prolongement des lignes séparant respectivement les écailles infra-marginales 1 et 2, et celles 3 et 4 . Pectorale Abdominale Fémorale 1 2 3 4 A noter que la bordure de carapace est lisse. 9
Photo : Police de l’Ecologie de Sainte-Anne Dossière de la carapace typique de la tortue de Kemp (aussi large que longue, plutôt aplatie) ayant toutes ses écailles sans leur couche ou pellicule protectrice de bêta-kératine suite exposition prolongée au soleil après décès. III. DISCUSSION L'espèce de tortue de Kemp Lepidochelys kempii est une espèce ayant comme berceau (lieux de pontes) une part des côtes mexicaines et étasuniennes, versant Golfe du Mexique, se trouve donc une espèce inféodée à l'océan Atlantique. Océan récent comparé à celui du Pacifique, séparé de ce dernier par l'isthme centre américain, depuis environ 10 millions d'années. Comme les deux espèces d’algues flottantes du genre des Sargasses, végétaux marins ayant même berceau que la tortue de Kemp, le Golfe du Mexique ; cette espèce du groupe des Testudines ( ou Chelonii, Chéloniens), de tortues marines évoluant uniquement dans l’Atlantique au gré de courants marins du Gulf Stream depuis des millions d’années, il est alors présomptueux et non scientifiquement fondé d'affirmer que ce serait de "première fois" que cette espèce fréquenterait la latitude de la Martinique et ailleurs dans la Caraïbe orientale. Cette certitude, disons-le, déjà établie, se voit alors confirmée par l’observation récente ce 8 avril 2021 d’une autre (après celle de 2013) tortue de Kemp, toujours au Cap Chevalier à Sainte-Anne Martinique cette fois par une équipe du CNRS. 10
L. kempii L. olivacea Le Dr Robert PINCHON, professeur de sciences naturelles, en 1967 n’a certainement pas fait la confusion entre les deux espèces de tortues Lepidochelys, qu’il a pu observer en Martinique au contact des pécheurs et d’une population à l’époque très consommatrice de produits de la mer en général et en particulier des tortues marines. A Sainte-Anne, les pécheurs attribuaient un autre nom à des tortues visiblement différentes et rarement péchées, et ce nom de Tòti Kawonn correspondrait à celui utilisé pour désigner à la fois les deux espèces de Lepidochelys présentent dans les eaux martiniquaises. R e m e r c i e m e n t s. Je remercie mon grand oncle Feu Georges BORDES, pharmacien de profession, et mon grand-père Feu Roland BOURGADE, professeur et chercheur en mathématique, tous deux pratiquants et amateurs de pêche en mer, qui durant mon enfance à la grande anse du Cap Férré (Tèt Kap) à Sainte-Anne, m’ont initié à la reconnaissance des trois espèces de tortues marines qui venaient y pondre, et à ma prise de conscience de l’existence d’autres espèces de tortues marines présentes au large, dont les femelles ne viennent pas pondre leurs œufs sur les plages de Martinique. 11
IV - RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES - Directives visant à réduire la mortalité des tortues de mer liée aux opérations de pêche, Rome, 2013 Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, FAO, ISBN 978-92-5-206226-4 (version imprimée) E-ISBN 978-92-5-207705-3 (PDF). - Tortuga Lora (Lepidochelys kempii), Secretaría Pro Tempore de la Convención Interamericana para la Protección y Conservación de las Tortugas Marinas (CIT), San José, Costa Rica, Abril, 2005 ; - Rediscovering Kemp’s Ridley Sea Turtle (Lepidochelys kempii): Molecular Analysis and Threats, by Miguel Angel Reyes-López, Fátima Yedith Camacho-Sánchez, Catherine E. Hart, Valeria Leal-Sepúlveda, Kevin Alan Zavala-Félix, César Paúl Ley-Quiñónez, A. Alonso Aguirre and Alan Alfredo Zavala-Norzagaray ; Submitted: September 17th 2020Reviewed: February 16th 2021Published: March 9th 2021. - Dictionnaire encyclopédique des technologies créoles (créole- français), La pêche en Martinique, par Serge Harpin, éditions AMEP. 1995. - Marcel Bourgade. Demonstration of the presence of the Kemp's turtle, or Ridley's turtle Lepidochelys kempii in the Caribbean waters of Martinique. [Research Report] PARC NATUREL RÉGIONAL DE MARTINIQUE. 2013. ⟨hal-03207172⟩ 12
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