THESE - VETAGRO SUP CAMPUS VETERINAIRE DE LYON
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VETAGRO SUP CAMPUS VETERINAIRE DE LYON Année 2018 - Thèse n° 048 MALADIES RÉNALES CHRONIQUES ET HYPERTHYROÏDIE CHEZ LE CHAT : ÉTUDE RÉTROSPECTIVE CHEZ 70 CHATS (2012-2017) THESE Présentée à l’UNIVERSITE CLAUDE-BERNARD - LYON I (Médecine - Pharmacie) et soutenue publiquement le 12 octobre 2018 pour obtenir le grade de Docteur Vétérinaire par GHISLAIN Paul Né le 4 janvier 1994 à Nice (06)
VETAGRO SUP CAMPUS VETERINAIRE DE LYON Année 2018 - Thèse n° 048 MALADIES RÉNALES CHRONIQUES ET HYPERTHYROÏDIE CHEZ LE CHAT : ÉTUDE RÉTROSPECTIVE CHEZ 70 CHATS (2012-2017) THESE Présentée à l’UNIVERSITE CLAUDE-BERNARD - LYON I (Médecine - Pharmacie) et soutenue publiquement le 12 octobre 2018 pour obtenir le grade de Docteur Vétérinaire par GHISLAIN Paul Né le 4 janvier 1994 à Nice (06)
Remerciements au jury À Madame le Professeur Françoise Borson-Chazot, de la Faculté de médecine Lyon-Est, Université Claude-Bernard Lyon 1, Pour nous avoir fait l’honneur d’accepter la présidence de notre jury de thèse, Respectueux hommages. Au Docteur Marine Hugonnard, du Campus Vétérinaire de Lyon, VetAgro Sup, Pour nous avoir fait l’honneur d’encadrer cette thèse, Pour l’intérêt porté à notre travail, votre gentillesse et vos encouragements, Nos sincères remerciements. À Monsieur le Professeur Jean-Luc Cadoré, du Campus Vétérinaire de Lyon, VetAgro Sup, Pour nous avoir fait l’honneur d’examiner notre travail, Et pour nous transmettre votre intérêt pour la médecine, Nos sincères remerciements. 5
Remerciements aux proches À mes parents, pour tout ce que vous m’avez donné et qui m’a construit, pour votre amour et votre soutien pendant ces années. À ma grand-mère, qui n’aura pas eu assez de temps pour me voir devenir il suo dottore. À mes sœurs, Sarah et Léa, pas toujours à côté, mais toujours dans le cœur. À ma famille. À mes amis, où que vous soyez maintenant en France ou à travers le monde. À toute l’équipe de la Clinique Vétérinaire Lingostière, pour ce que vous m’avez apporté et avoir participé à faire de moi le vétérinaire que je suis aujourd’hui. Je vous embrasse tous chaleureusement. 7
Table des matières Table des figures 11 Table des tableaux 13 Liste des abréviations 15 Introduction générale 17 I Synthèse bibliographique 19 1 L’hyperthyroïdie et la fonction rénale : interactions entre les hormones thyroïdiennes et le rein 21 1.1 Effets hémodynamiques systémiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 1.1.1 Résistance vasculaire systémique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 1.1.2 Volume d’éjection systolique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 1.1.3 Pression artérielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 1.2 Effets directs sur le rein . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 1.3 Urée et créatinine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 1.4 Analyse d’urine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 1.4.1 Densité urinaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 1.4.2 Protéinurie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 2 Diagnostic de l’hyperthyroïdie et maladies rénales chroniques 27 2.1 Dosages en hormones thyroïdiennes et en TSH et maladies non thyroïdiennes 27 2.1.1 Utilisation de la T4 totale comme test de dépistage . . . . . . . . . 27 2.1.2 T4 libre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 2.1.3 TSH sérique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 8
2.2 Test de freinage par la T3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 2.3 Test de stimulation à la TRH . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 2.4 Scintigraphie thyroïdienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 2.5 Approche diagnostique de l’hyperthyroïdie chez les chats atteints de MRC 31 3 Traitement de l’hyperthyroïdie et azotémie rénale 33 3.1 Traitement des chats hyperthyroïdiens et initialement non azotémiques . . 33 3.2 Prédire l’insuffisance rénale après traitement . . . . . . . . . . . . . . . . . 34 3.3 Traitement des chats hyperthyroïdiens et azotémiques . . . . . . . . . . . . 35 4 Signification pronostique de l’azotémie chez les chats hyperthyroïdiens 37 Résumé 39 II Étude expérimentale 41 Introduction 43 1 Matériel et méthodes 45 1.1 Recrutement des chats et définition des populations . . . . . . . . . . . . . 45 1.1.1 Population A . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45 1.1.2 Population B . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46 1.2 Paramètres étudiés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 1.2.1 Données cliniques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 1.2.2 Données paracliniques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 1.2.3 Mesures de pression artérielle systolique . . . . . . . . . . . . . . . 49 1.3 Données et analyses statistiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 2 Résultats 51 2.1 Description des populations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51 2.1.1 Population A . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51 2.1.2 Population B . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52 2.2 Évolution de la fonction rénale chez les chats hyperthyroïdiens . . . . . . . 54 2.2.1 Présentation clinique au diagnostic d’hyperthyroïdie . . . . . . . . . 54 9
2.2.2 Fonction rénale au moment du diagnostic d’hyperthyroïdie . . . . . 55 2.2.3 Choix du traitement de l’hyperthyroïdie . . . . . . . . . . . . . . . 56 2.2.4 Fonction rénale au cours du traitement de l’hyperthyroïdie . . . . . 57 2.3 Diagnostic d’hyperthyroïdie chez les chats atteints d’une MRC . . . . . . . 66 2.3.1 Présentation clinique et stade IRIS au moment du diagnostic de MRC 66 2.3.2 Thyroxinémie au moment du diagnostic de MRC . . . . . . . . . . 67 3 Discussion 71 Conclusion 75 Bibliographie 77 A Données paracliniques des chats de la sous-population As 81 B Données cliniques et paracliniques des chats de la population B 85 C Recommandations pour la classification IRIS des maladies rénales chroniques 87 10
Table des figures Figure 1 Mécanismes d’augmentation du DFG dans la thyrotoxicose, adap- tée d’après Chalhoub et al. [7]. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Figure 2 Répartition probable des concentrations sériques de tT4, de fT4 et de TSH chez les chats normaux et les chats atteints d’hyper- thyroïdie manifeste, d’hyperthyroïdie occulte et de maladie non thyroïdienne modifiée d’après Graves et al. [11]. . . . . . . . . . . 29 Figure 3 Stades IRIS au moment du diagnostic d’hyperthyroïdie dans la sous-population As . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55 Figure 4 Traitement initial (à gauche) et à long terme (à droite) de l’hy- perthyroïdie dans la sous-population As . . . . . . . . . . . . . . . 56 Figure 5 Stades IRIS au moment du diagnostic d’hyperthyroïdie, au mo- ment du premier dosage de la créatininémie au moins quatre se- maines après la mise en place de traitement de l’hyperthyroïdie et à la fin de la période de suivi dans la sous-population As . . . . . 58 Figure 6 Créatininémie en fonction de la thyroxinémie au cours de la pé- riode de suivi dans la sous-population As . . . . . . . . . . . . . . 62 Figure 7 Densité urinaire en fonction de l’absence ou de la présence d’une azotémie à la fin de la période de suivi dans la sous-population As 63 Figure 8 Pression artérielle systolique en fonction de l’absence ou de la pré- sence d’une azotémie à la fin de la période de suivi dans la sous- population As . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65 Figure 9 Thyroxinémie au moment du diagnostic de MRC dans la popula- tion B . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68 11
Figure 10 Thyroxinémie en fonction de l’absence ou de la présence d’un no- dule thyroïdien palpé dans la population B . . . . . . . . . . . . . 68 Figure 11 Thyroxinémie en fonction de la créatininémie au moment du diag- nostic de MRC dans la population B . . . . . . . . . . . . . . . . 69 12
Table des tableaux Tableau I Données cliniques au moment du diagnostic d’hyperthyroïdie dans la sous-population As (n = 14) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54 Tableau II Données cliniques au moment du diagnostic de MRC dans la po- pulation B (n = 24) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67 13
14
Liste des abréviations DFG débit de filtration glomérulaire DPR débit plasmatique rénal fT4 thyroxine libre HTA hypertension artérielle IECA inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine IRIS International Renal Interest Society MRC maladie rénale chronique PAS pression artérielle systolique RPCU rapport protéines sur créatinine urinaires RVS résistance vasculaire systémique SDMA diméthylarginine symétrique SRAA système rénine-angiotensine-aldostérone T3 triiodothyronine T4 thyroxine TRH hormone de libération de la thyréostimuline, thyrotropin-releasing hormone TSH thyréostimuline, thyroid-stimulating hormone tT3 triiodothyronine totale tT4 thyroxine totale VES volume d’éjection systolique 15
16
Introduction [11, 27] Depuis sa première description dans la littérature vétérinaire en 1979, l’hyperthyroïdie est devenue la maladie endocrinienne la plus fréquente chez les chats domestiques et une des maladies les plus importantes dans la pratique féline. Il existe diverses estimations de la prévalence de la maladie en Amérique du Nord et en Europe qui indiquent que l’incidence de la maladie semble augmenter. L’hyperthyroïdie atteint des chats d’âge moyen à âgés, avec un âge moyen d’apparition de 12 à 13 ans selon les études. La prévalence globale de l’hyperthyroïdie est de 2 à 4 %, et d’au moins 6 % chez les chats âgés de plus de neuf ans. D’après certaines estimations, près de 10 % des chats gériatriques développeront une hyperthyroïdie [14, 20, 33, 39]. Les maladies rénales chroniques (MRC), bien que souvent considérées comme des af- fections du chat âgé, se produisent à tout âge. Dans une étude rétrospective de chats atteints de MRC, 53 % étaient âgés de plus de sept ans, avec un intervalle de 9 mois à 22 ans [9]. Dans une autre étude, l’âge moyen était de 12,6 ans avec un intervalle de 1 à 26 ans [10]. La prévalence des néphropathies est estimée, d’après une étude réalisée auprès de praticiens privés aux États-Unis, entre 1,6 et 20 % des chats [17]. Cependant, une estimation raisonnable de la prévalence globale des MRC serait de 1 à 3 % [5]. L’hyperthyroïdie et les MRC étant des maladies courantes chez les chats âgés, l’ap- parition de ces deux affections simultanément chez le même animal est possible. Dans la première partie, nous réalisons une synthèse bibliographique sur l’hyperthyroïdie et ses répercussions sur la fonction rénale, et les implications cliniques de la présence d’une 17
hyperthyroïdie et d’une MRC chez le même chat. Puis, dans la seconde partie, nous pré- sentons une étude rétrospective réalisée chez 70 chats atteints d’hyperthyroïdie ou de MRC présentés au Centre Hospitalier Universitaire Vétérinaire (CHUV) de VetAgro Sup entre 2012 et 2017. L’objectif de cette étude est, d’une part, de suivre l’évolution de la fonction rénale chez les chats hyperthyroïdiens et, d’autre part, d’évaluer les difficultés diagnostiques de l’hyperthyroïdie chez les chats atteints de MRC. 18
Première partie Synthèse bibliographique 19
Chapitre 1 L’hyperthyroïdie et la fonction rénale : interactions entre les hormones thyroïdiennes et le rein [2, 15, 29, 34, 36] L’hyperthyroïdie a de nombreux effets sur les fonctions glomérulaire et tubulaire ré- nales. Les hormones thyroïdiennes augmentent le débit de filtration glomérulaire (DFG) par leurs effets sur le système hémodynamique, qui ont pour conséquences d’augmenter le débit plasmatique rénal (DPR), et par une action directe sur le rein. Les altérations de la fonction rénale induites par l’hyperthyroïdie chez le chat sont une source de préoccupation en médecine vétérinaire. En revanche, elles sont rarement prises en compte en médecine humaine, bien que des changements similaires se produisent [12]. Ce manque d’intérêt est probablement dû au fait que les populations de patients qui présentent une MRC ou une hyperthyroïdie sont épidémiologiquement relativement éloignées : l’insuffisance rénale chronique affecte des personnes âgées (médiane : 72 ans ; interquartile : 62 à 80 ans) dont 60 % sont de sexe masculin alors que les patients qui développent une thyrotoxicose, soit un excès d’hormones thyroïdiennes dans le sang, sont d’âge moyen (46,7 ans ± 15,5 ans) et en majorité de sexe féminin (82,2 %) [16, 32]. En 21
raison de ce manque d’intérêt clinique, il existe relativement peu de recherche fondamen- tale sur l’effet des hormones thyroïdiennes sur la fonction rénale dans l’hyperthyroïdie en médecine humaine. 1.1 Effets hémodynamiques systémiques 1.1.1 Résistance vasculaire systémique La thyrotoxicose entraîne une dilatation des artérioles de la circulation périphérique par l’augmentation du métabolisme tissulaire, libérant des vasodilatateurs à action locale, et par les effets directs de la triiodothyronine (T3) sur le muscle lisse vasculaire. La dilatation des artérioles conduit à une diminution importante de la résistance vas- culaire systémique (RVS). Chez l’Homme, on constate que l’hyperthyroïdie est associée à une diminution supérieure à 50 % de la RVS [13]. Cette diminution de la RVS entraîne une diminution du volume circulant efficace, donc une baisse de la pression dans l’artère rénale qui stimule la sécrétion de rénine par le rein activant le système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA). 1.1.2 Volume d’éjection systolique L’angiotensine II, via le récepteur AT1, stimule la réabsorption tubulaire de sodium par le canal épithélial à sodium (ENaC) et la sécrétion d’aldostérone par la glande surrénale qui agit sur la pompe sodium-potassium (Na+ -K+ ATPase), entraînant une réabsorption de sodium et d’eau contre des ions potassium. Ces deux mécanismes d’action entraînent une rétention de sodium et d’eau, conduisant à une augmentation du volume d’éjection systolique (VES). 22
1.1.3 Pression artérielle Dans le contexte clinique de l’hyperthyroïdie, en plus de l’augmentation du VES, une augmentation de la fréquence cardiaque et du volume sanguin contribuent à l’augmen- tation du débit cardiaque. Chez l’Homme, une augmentation de 40 % de la fréquence cardiaque et de 100 % du débit cardiaque a été observée [13]. La pression artérielle augmente parce que la fréquence cardiaque augmente et que la diminution de la pression diastolique engendrée par la diminution de la RVS est compen- sée par l’augmentation de la pression systolique causée par l’augmentation du VES par activation du SRAA. 1.2 Effets directs sur le rein La thyrotoxicose entraîne une hypertrophie rénale, dont le mécanisme n’est pas bien compris et dont les conséquences sur le DFG sont compliquées à évaluer. D’autre part, le mécanisme de « diurèse-natriurèse de pression » est altéré par une diminution de la réponse des tubules rénaux aux facteurs natriurétiques, entraînant une augmentation du volume plasmatique et une diminution de l’excrétion de sodium en dépit de l’augmentation du flux sanguin rénal et du DFG. En résumé, les facteurs hémodynamiques et les modifications directes sur le rein sont associés à une augmentation du DPR et du DFG mises en évidence dans l’hyperthyroïdie chez les hommes et les chats (Figure 1). 23
Figure 1 – Mécanismes d’augmentation du DFG dans la thyrotoxicose, adaptée d’après Chalhoub et al. [7]. 24
1.3 Urée et créatinine L’augmentation du DFG, associée à l’hyperthyroïdie, entraîne généralement une dimi- nution des concentrations sanguines en urée et créatinine, bien que ces deux paramètres biochimiques restent habituellement dans l’intervalle de référence. Cependant, les variations de l’urée et de la créatinine ne sont pas proportionnelles l’une à l’autre ; le rapport urée sur créatinine augmente chez le chat hyperthyroïdien. Les raisons de la modification de ce rapport sont multifactorielles. Les patients hu- mains hyperthyroïdiens présentent une augmentation du taux de renouvellement des pro- téines corporelles qui entraîne une augmentation de la production d’urée et conduit à une augmentation de l’urée sérique. La créatinine sérique diminue par augmentation de l’ex- crétion tubulaire et diminution de la production secondaire à la diminution de la masse musculaire. Les mêmes phénomènes peuvent se produire chez le chat. 1.4 Analyse d’urine 1.4.1 Densité urinaire Initialement, la polyurie et la polydipsie étaient observées chez 74 % des chats atteints d’hyperthyroïdie. Avec le temps, la prévalence de ces signes cliniques a diminué grâce au diagnostic plus précoce. Ainsi, les chats hyperthyroïdiens, et plus fréquemment ceux atteints d’une thyrotoxi- cose sévère, peuvent présenter une diminution de la densité urinaire sans que celle-ci soit corrélée à l’évolution du DFG. Les causes de la polyurie et de la polydipsie restent incomprises, deux hypothèses sont avancées indépendantes de tout dysfonctionnement rénal sous-jacent. 25
1. Dans les études expérimentales chez les rongeurs, on a montré une inhibition de l’insertion des aquaporines dans les tubules distaux et les canaux collecteurs, qui entraîne une forme de diabète insipide néphrogénique. 2. Le développement d’une polydipsie psychogène, probablement causée par une in- tolérance à la chaleur. Le traitement de l’hyperthyroïdie, malgré la baisse résultant du DFG qui devrait provoquer une résolution de la polyurie et de la polydipsie, a des effets très imprévisibles sur la densité urinaire, hormis chez les chats qui deviennent azotémiques. 1.4.2 Protéinurie Les chats hyperthyroïdiens présentent fréquemment une protéinurie en raison de l’aug- mentation du DFG, et en particulier de l’hypertension et l’hyperfiltration glomérulaires. La protéinurie tend à disparaître avec le traitement de l’hyperthyroïdie, même chez les chats qui développent une azotémie. 26
Chapitre 2 Diagnostic de l’hyperthyroïdie et maladies rénales chroniques [11] Le diagnostic de l’hyperthyroïdie, bien que relativement aisé en général, peut consti- tuer un défi lors de la présence d’une maladie non thyroïdienne, comme une MRC, autre- ment appelé « syndrome euthyroïdien malade » ou « syndrome de T3 basse et T4 basse » (euthyroid sick syndrome) (Figure 2). 2.1 Dosages en hormones thyroïdiennes et en TSH et maladies non thyroïdiennes 2.1.1 Utilisation de la T4 totale comme test de dépistage Les dosages d’hormones thyroïdiennes, incluant la thyroxine totale (tT4), la triio- dothyronine totale (tT3) et, dans une moindre mesure, la T4 libre (fT4), sont largement disponibles. Le dosage de thyréostimuline (TSH) est peu utilisé chez le chat, mais pourrait néanmoins être pertinent. 27
Le dosage des concentrations sériques basales en tT3 n’a pas de valeur diagnostique en raison du chevauchement important des valeurs entre les chats sains, les chats hyper- thyroïdiens et les chats atteints d’une maladie non thyroïdienne. Le test de dépistage le plus couramment utilisé est le dosage de la concentration sérique en tT4. Un résultat au-dessus de l’intervalle de référence confirme le diagnostic chez plus de 91 % des chats hyperthyroïdiens [19, 25]. Le fait de trouver une concentration sérique en tT4 normale n’exclut pas le diagnostic d’hyperthyroïdie féline. Un nombre relativement élevé de chats hyperthyroïdiens ont une tT4 normale, en particulier en présence d’une maladie non thyroïdienne. Les maladies non thyroïdiennes peuvent diminuer les concentrations sériques en tT4. Le Laboratoire de Biologie Médicale de VetAgro Sup fournit un intervalle de référence de la tT4 chez les chats sains de 15 nmol/L à 65 nmol/L. Une étude montre que les chats sains ont une tT4 moyenne de 24 nmol/L, alors qu’elle est d’en moyenne 10 nmol/L chez les chats atteints de MRC [22]. 2.1.2 T4 libre La fT4 représente la petite fraction de tT4 non liée aux protéines sériques. Le dosage de fT4 a une sensibilité élevée pour l’hyperthyroïdie féline, mais une faible spécificité et une mauvaise valeur prédictive positive [25]. Jusqu’à 12 % des chats souffrant d’une maladie non thyroïdienne ont des valeurs de fT4 augmentées, indiquant que le dosage de fT4 ne doit être interprété qu’en présence de signes cliniques et en regard des résultats des analyses d’urine, de l’hémogramme, du profil biochimique sérique et de la tT4 [19]. Les chats avec une hyperthyroïdie occulte, c’est-à-dire une hyperthyroïdie occultée par une maladie non thyroïdienne, devraient avoir une fT4 augmentée et une tT4 dans les valeurs hautes de l’intervalle de référence. Cependant, des concentrations en tT4 in- férieures au milieu de l’intervalle de référence ont été rapportées chez des chats atteints d’hyperthyroïdie occulte [23]. 28
Figure 2 – Répartition probable des concentrations sériques de tT4, de fT4 et de TSH chez les chats normaux et les chats atteints d’hyperthyroïdie manifeste, d’hyperthyroïdie occulte et de maladie non thyroïdienne modifiée d’après Graves et al. [11]. 29
2.1.3 TSH sérique Les chats à la fois atteints d’hyperthyroïdie et de MRC ont des concentrations sériques de TSH faibles [38]. Cependant, des dosages fiables pour la mesure de la TSH ne sont pas largement disponibles chez le chat. 2.2 Test de freinage par la T3 Le test de freinage par la T3 peut être utilisé chez les chats présentant des signes cli- niques d’hyperthyroïdie, mais avec des concentrations basales en hormones thyroïdiennes normales [24]. Chez les chats sains, l’administration de T3 exogène (liothyronine sodique, Cynomel, Sanofi) supprime la sécrétion de TSH hypophysaire et provoque ensuite une baisse de la concentration sérique en tT4. Chez les chats atteints d’hyperthyroïdie, cependant, l’ad- ministration de T3 exogène a peu ou pas d’effet sur la concentration en tT4 [24]. 2.3 Test de stimulation à la TRH Le test de stimulation à l’hormone de libération de la thyréostimuline (TRH) n’est pas réalisable en pratique courante, la TRH commerciale n’étant pas disponible pour les vétérinaires en France. 2.4 Scintigraphie thyroïdienne L’absorption par la thyroïde d’iode radioactif est extrêmement sensible pour diagnos- tiquer l’hyperthyroïdie féline [4]. L’utilisation de cette technique est limitée par sa dispo- 30
nibilité, seules deux structures étant équipées en France (Micen Vet, Créteil et Oncovet, Villeneuve-d’Ascq). 2.5 Approche diagnostique de l’hyperthyroïdie chez les chats atteints de MRC [2, 34] Le diagnostic de l’hyperthyroïdie est généralement simple chez un chat qui en présente les signes cliniques et une tT4 élevée. Cependant, chez un petit nombre de chats atteints de MRC, il peut représenter un défi lorsque la tT4 est dans l’intervalle de référence du laboratoire. Ils doivent être suspectés d’hyperthyroïdie lorsque l’on note une perte de poids alors que la concentration sérique en créatinine diminue, une augmentation des vomissements, une augmentation inexpliquée de l’activité des enzymes hépatiques ou lors de la palpation d’un goitre. Une étude compare trois populations : une première de 16 chats présentant une MRC et des signes cliniques compatibles avec une hyperthyroïdie, mais avec une concentration plasmatique de tT4 dans la plage de référence et dont l’hyperthyroïdie est confirmée par la suite, une deuxième de 20 chats présentant une MRC seule et une troisième de 20 chats sains. La plupart des chats hyperthyroïdiens ont une tT4 supérieure à 30 nmol/L (14/16), une fT4 élevée (> 40 pmol/L ; 15/16) et une TSH faible (16/16). Tous les chats atteints d’une MRC seule ont une tT4 inférieure à 30 nmol/L et seulement 4 chats sur 20 ont une fT4 limite ou élevée [38]. Plusieurs stratégies sont donc possibles afin de confirmer l’hyperthyroïdie féline. La première option est de doser la tT4. L’hyperthyroïdie est confirmée si elle est au-delà des valeurs usuelles, sinon, et lors de suspicion clinique forte, il est conseillé de répéter toutes les deux à quatre semaines le dosage, dans l’espoir que les valeurs seront en dehors de l’intervalle de référence. La seconde option consiste à utiliser une combinaison des tests diagnostiques : une mesure de la tT4 dans la moitié supérieure de l’intervalle de référence 31
avec une concentration en fT4 augmentée appuie le diagnostic. Lorsque ces concentrations sont dans l’intervalle de référence et chez un chat présentant certains signes classiques d’hyperthyroïdie (polydipsie, polyurie, perte de poids malgré un appétit conservé), il faut inclure dans le diagnostic différentiel un diabète sucré, une malabsorption/maldigestion gastro-intestinale ou une tumeur gastro-intestinale, en particulier un lymphome. Si ces hypothèses sont écartées, d’autres options diagnostiques incluent l’utilisation du test de freinage par la T3, la concentration en TSH ou la scintigraphie thyroïdienne [6, 25]. 32
Chapitre 3 Traitement de l’hyperthyroïdie et azotémie rénale [2, 34] La prise en charge thérapeutique de l’hyperthyroïdie doit prendre en considération la présence d’une azotémie au moment du diagnostic ou en prévoir le développement après la mise en place du traitement. 3.1 Traitement des chats hyperthyroïdiens et initialement non azotémiques Chez un chat hyperthyroïdien sans signe d’insuffisance rénale avant la mise en place du traitement, l’objectif est de diminuer la concentration en tT4 dans l’intervalle supérieur de référence afin de résoudre les signes de thyrotoxicose [15]. Pour rappel, les options de traitement classique de l’hyperthyroïdie comprennent : — la thérapie antithyroïdienne par voie orale (méthimazole ou carbimazole) ; — la thyroïdectomie chirurgicale ; 33
— la radiothérapie à l’iode (131 I) ; — la gestion nutritionnelle avec un régime pauvre en iode (Hill’s y/d) [29]. Initialement, l’approche thérapeutique doit se faire avec prudence. Il est toujours re- commandé de choisir un traitement réversible avant de mettre en place un traitement définitif (radiothérapie ou thyroïdectomie). Une étude réalisée sur 12 chats traités avec du méthimazole, dont deux qui développent une azotémie après traitement, montre que, chez ces deux chats, l’arrêt du méthimazole entraîne une augmentation du DFG (sans toutefois revenir aux valeurs préthérapeutiques) et une diminution de la créatininémie [1]. La plupart des études portent sur les traitements antithyroïdiens par voie orale (méthi- mazole ou carbimazole). Cependant, la gestion nutritionnelle avec un régime pauvre en iode (Hill’s y/d) semble être une option envisageable. La fonction rénale doit être évaluée à chaque visite de suivi. Si le chat devient azoté- mique, cela doit être considéré comme le résultat de la résolution de la thyrotoxicose qui s’accompagne d’une diminution du DFG qui « démasque » une MRC sous-jacente pré- existante et non comme un effet secondaire du traitement. Une étude réalisée sur 13 chats traités par radiothérapie à l’iode montre une diminution significative du DFG après un mois, mais aucune baisse supplémentaire après six mois. Toutefois, la créatininémie est plus longue à se stabiliser après le traitement, typiquement après environ trois mois [30]. 3.2 Prédire l’insuffisance rénale après traitement Les estimations de la prévalence du développement d’une insuffisance rénale après le traitement de l’hyperthyroïdie varient, 15 % sur une période de huit mois dans une étude et 60 % sur une période de six mois dans une autre [40, 41]. L’estimation du DFG par la mesure de la clairance plasmatique d’une substance ou par des techniques d’imagerie en médecine nucléaire se révèle être un facteur prédictif du développement d’une azotémie après le traitement. Cependant, ces méthodes ne peuvent pas être mises en œuvre en routine en clinique et, à ce jour, aucune étude ne permet de prédire le développement d’une insuffisance rénale post-traitement à partir de paramètres 34
cliniques usuels avant traitement, en particulier la créatinine, l’urée, la densité urinaire et le rapport protéines sur créatinine urinaires (RPCU). La concentration de créatinine sérique utilisée comme marqueur du DFG à un instant donné est relativement peu sensible. Néanmoins, les différences de concentration de créatinine dans le temps chez un même chat reflètent des différences inversement proportionnelles du DFG. Une étude montre qu’une densité urinaire supérieure ou égale à 1,035 avant traitement n’est pas corrélée à une diminution du risque de développer une insuffisance rénale post-traitement [28, 40]. Une étude prospective récente réalisée sur 262 chats hyperthyroïdiens traités par ra- diothérapie à l’iode et non azotémiques avant le traitement montre que 42 (16 %) chats sont devenus azotémiques après le traitement et parmi ceux-ci, 14 avaient des concentra- tions en diméthylarginine symétrique (SDMA) élevées avant le traitement. En tant que test diagnostique d’une MRC préazotémique (masquée) chez des chats hyperthyroïdiens non traités, la SDMA dispose d’une sensibilité de 33,3 % et une spécificité de 97,7 %. En conclusion, une concentration sérique élevée de SDMA chez un chat hyperthyroïdien peut aider à prédire le développement d’une azotémie après traitement. Le test a une spécificité élevée (peu de résultats faussement positifs), mais une sensibilité relativement faible (ne permet pas de prédire l’azotémie chez deux tiers des chats hyperthyroïdiens) [26]. 3.3 Traitement des chats hyperthyroïdiens et azotémiques Dans la plupart des études publiées, environ 10 % des chats hyperthyroïdiens sont azotémiques au moment du diagnostic. La décision de traiter un chat souffrant d’hyper- thyroïdie et de MRC, qu’elle soit diagnostiquée avant ou démasquée par la mise en place du traitement de l’hyperthyroïdie, doit se faire sur des critères cliniques. La présence d’une thyrotoxicose (perte de poids, souffle cardiaque, protéinurie) doit inciter à traiter l’hyperthyroïdie, sans confondre ces signes avec ceux des MRC. Il est recommandé de mettre en place un traitement médical en commençant par une faible dose de méthimazole ou carbimazole, puis de l’augmenter graduellement et progressivement jusqu’à atteindre un état général optimal et une prise de poids. Dans la 35
plupart des cas, cela s’accompagne d’une aggravation de l’azotémie. Un compromis doit être fait entre le maintien de la fonction rénale et la contrôle de l’hyperthyroïdie afin d’optimiser la qualité de vie. L’interprétation isolée de la tT4 pour évaluer le niveau de contrôle de l’hyperthyroïdie doit se faire avec prudence, et ne présente que peu d’intérêt. En effet, pour rappel, les chats qui présentent une MRC ont une tT4 diminuée et l’objectif thérapeutique chiffré à atteindre n’est pas établi. Chez les chats qui présentent une insuffisance rénale après un traitement définitif de l’hyperthyroïdie, une supplémentation en hormones thyroïdiennes peut être envisagée afin de rétablir le flux sanguin rénal et d’augmenter le DFG. En effet, une étude montre que l’hypothyroïdie iatrogène après traitement de l’hyperthyroïdie est associée à l’aggravation de l’azotémie et à une diminution de la durée de survie [40]. Dans cette étude, la restau- ration de l’euthyroïdie s’est accompagnée d’une diminution de la concentration sérique en créatinine. Cependant, elle s’accompagne également d’une diminution du poids corporel et d’une augmentation de la fréquence cardiaque, de l’hématocrite et des activités sériques de la phosphatase alcaline. La diminution de la masse musculaire peut contribuer à la diminution de la créatininémie et les autres changements sont compatibles avec l’hyper- thyroïdie non contrôlée. Les bénéfices de la supplémentation n’ont pas encore été étudiés [40]. Parallèlement, une prise en charge des MRC doit être mise en place selon les recom- mandations de l’International Renal Interest Society (IRIS ; www.iris-kidney.com). Elle inclut une gestion nutritionnelle, et, si nécessaire, des inhibiteurs de l’enzyme de conver- sion de l’angiotensine (IECA), des antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II (ou sartans), des inhibiteurs calciques ou des chélateurs du phosphate [8]. 36
Chapitre 4 Signification pronostique de l’azotémie chez les chats hyperthyroïdiens [2] [34] Le pronostic chez les chats traités pour hyperthyroïdie et azotémiques est mal connu ; en effet, de nombreuses études publiées ont exclu les chats qui étaient azotémiques avant le traitement. Dans une étude réalisée sur 22 chats traités par radiothérapie à l’iode, dont neuf sont en insuffisance rénale avant le traitement et cinq développent une insuffisance rénale après le traitement, la médiane de survie des chats euthanasiés à la suite d’une insuffisance rénale est de 15,5 mois (5-36) après le traitement, et deux chats avec insuffisance rénale sont vivants 39 mois après le traitement [35]. Une étude réalisée sur 167 chats montre que les 27 chats avec une néphropathie avant le traitement de l’hyperthyroïdie ont une durée de survie plus courte que les chats sans signe de néphropathie avant le traitement [18]. Cependant, dans une étude réalisée sur 116 chats hyperthyroïdiens traités par thy- roïdectomie chirurgicale ou par thérapie antithyroïdienne par voie orale et non azoté- miques au moment du diagnostic d’hyperthyroïdie, la médiane de survie des chats qui développent une azotémie dans les six mois suivant la normalisation de la fonction thy- 37
roïdienne (595 jours [62-2016]) n’est pas significativement différente de celle des chats qui ne développent pas d’azotémie après traitement (584 jours [29-2044]) [37]. Les temps de survie médians rapportés dans cette étude sont semblables aux données précédemment publiées provenant d’animaux traités par radiothérapie à l’iode [21, 31]. 38
Résumé Dans l’état hyperthyroïdien, le débit cardiaque augmente en raison des effets combinés de l’augmentation du VES et de l’augmentation de la fréquence cardiaque. Cependant, bien que le débit cardiaque augmente, la diminution concomitante des RVS entraîne peu de changements dans la pression artérielle systémique. Ces altérations hémodynamiques, ainsi que l’activation du SRAA et les effets tubulaires directs, sont responsables d’une augmentation marquée du DFG. Beaucoup de chats deviennent azotémiques après le traitement de l’hyperthyroïdie comme conséquence du « démasquage » d’une MRC pré- existante. Cependant, il semble que les chats qui développent une azotémie après traitement n’ont pas un pronostic plus sombre que les chats qui restent non azotémiques. Ces résultats mé- ritent d’être confirmés par d’autres études qui, au-delà de la durée de survie, s’intéressent à la qualité de vie. Par conséquent, d’après les connaissances actuelles, l’apparition d’une azotémie modérée et stable ne devrait pas affecter le traitement de l’hyperthyroïdie et il n’est pas recommandé d’interrompre le traitement chez les chats azotémiques en bon état général dans le seul but de faire diminuer la concentration en créatinine. 39
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Deuxième partie Étude expérimentale 41
Introduction Nous présentons dans cette partie une étude rétrospective réalisée chez 70 chats at- teints d’hyperthyroïdie ou de MRC présentés au Centre Hospitalier Universitaire Vétéri- naire (CHUV) de VetAgro Sup entre 2012 et 2017. L’objectif de notre étude est de présenter dans une première partie, à partir d’une population de 46 chats hyperthyroïdiens suivis par le service de médecine interne du CHUV de VetAgro Sup, l’évolution de la fonction rénale de ces chats. Après avoir établi les signes cliniques et évalué la fonction rénale au moment du diagnostic puis défini les modalités de traitement de l’hyperthyroïdie, nous observons la fonction rénale après la mise en place du traitement à travers la créatininémie, la densité urinaire, la protéinurie d’origine rénale et la pression artérielle systolique. Dans une seconde partie, à partir d’une population de 24 chats atteints de MRC pré- sentés au CHUV dont le dosage de la T4 est réalisé et qui ne sont pas déjà diagnostiqués hyperthyroïdiens au moment du diagnostic de MRC, l’objectif est d’évaluer les difficul- tés diagnostiques d’une hyperthyroïdie occulte chez ces chats. Après avoir présenté leurs signes cliniques et leur stade IRIS, nous analysons la thyroxinémie en regard du fonction- nement rénal. 43
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Chapitre 1 Matériel et méthodes 1.1 Recrutement des chats et définition des populations Les dossiers médicaux des chats présentant un diagnostic d’hyperthyroïdie ou de MRC vus en consultation de médecine interne des animaux de compagnie au CHUV de VetA- gro Sup entre le 1er septembre 2012 et le 31 mars 2017 ont été examinés. 1.1.1 Population A La population A regroupe les chats hyperthyroïdiens. Ils sont inclus dans cette population si l’on dispose d’une anamnèse et de données cliniques appropriées, d’un profil biochimique et d’une concentration en tT4 supérieure à 65 nmol/L. Sous-population As La sous-population As regroupe les chats de la population A suivis par le service de médecine interne. 45
Ils sont inclus dans cette sous-population si l’on dispose d’au moins un profil biochi- mique et une concentration en tT4 au moins quatre semaines après la mise en place du traitement d’hyperthyroïdie. La « période de suivi » est définie pour chaque chat comme l’espace de temps entre la mise en place du traitement de l’hyperthyroïdie et le dernier suivi effectué au CHUV de VetAgro Sup. Sous-population Ans La sous-population Ans regroupe les chats de la population A non suivis. Ils sont inclus dans cette sous-population s’ils n’ont pas été inclus dans la sous- population As . 1.1.2 Population B La population B regroupe les chats atteints d’une MRC dont le dosage de la tT4 est réalisé et qui n’ont pas déjà été diagnostiqués hyperthyroïdiens au moment du diagnostic de MRC. Ils sont inclus dans cette population si l’on dispose d’une anamnèse et de données cli- niques appropriées, d’un profil biochimique avec une créatininémie supérieure à 140 nmol/L, d’une analyse d’urine avec une densité urinaire inférieure à 1,035 et d’une concentration en tT4 toujours inférieure à 65 nmol/L avant le diagnostic de MRC. Sous-population Bs La sous-population Bs regroupe les chats de la population B suivis pour la fonction thyroïdienne par le service de médecine interne. 46
Ils sont inclus dans cette sous-population si l’on dispose d’au moins un profil biochi- mique et une concentration en tT4 au moins 4 semaines après le diagnostic de MRC. Sous-population Bns La sous-population Bns regroupe les chats de la population B non suivis pour la fonction thyroïdienne. Ils sont inclus dans cette sous-population s’ils n’ont pas été inclus dans la sous- population Bs . 1.2 Paramètres étudiés 1.2.1 Données cliniques Les anamnèses sont recueillies et les chats sont examinés en présence de docteurs vétérinaires spécialistes ou en cours de spécialisation en médecine interne des animaux de compagnie au CHUV de VetAgro Sup. Un compte-rendu médical est rédigé puis validé par un docteur vétérinaire sur le programme Clovis. Les données de l’anamnèse retenues pour notre étude, car utiles au suivi de l’hyper- thyroïdie ou des MRC, sont la perte de poids, l’abattement, la dysorexie ou l’anorexie, la polyphagie, les vomissements, la diarrhée, la constipation, la polyurie et la polydipsie, la malpropreté urinaire, la dyspnée et les modifications de comportement. Les données de l’examen clinique retenues sont la présence d’un pelage altéré, d’une halitose ou d’une stomatite, d’un souffle cardiaque, d’une palpation rénale anormale et d’un nodule thyroï- dien. 47
1.2.2 Données paracliniques Données biologiques Les échantillons sanguins sont prélevés par ponction veineuse jugulaire, ou à défaut céphalique, sur tube sec ou sur tube hépariné puis acheminés au Laboratoire de Biologie Médicale de VetAgro Sup. Le sérum ou le plasma hépariné est séparé des cellules sanguines et analysé immédiatement. Les échantillons d’urine sont collectés par cystocentèse ou par miction naturelle sur tube sec puis acheminés au Laboratoire de Biologie Médicale de VetAgro Sup. La concentration sérique, plasmatique ou urinaire en créatinine sont mesurées par mé- thode enzymatique colorimétrique (Konelab, Thermo Fisher Scientific, Waltham). Confor- mément à la classification IRIS pour les MRC, l’azotémie rénale est définie comme dis- crète quand la créatininémie est comprise entre 140 µmol/L et 250 µmol/L (stade IRIS 2) et modérée quand elle est supérieure à 250 µmol/L (stade IRIS 3 et 4) (Annexe C). La concentration urinaire en protéines est mesurée par méthode au rouge de pyrogallol (Konelab, Thermo Fisher Scientific, Waltham). Le RPCU est calculé par division de la concentration urinaire en protéines par la concentration urinaire en créatinine traduites dans les mêmes unités. La concentration sérique ou plasmatique en tT4 est mesurée par méthode immunoenzymatique chimiluminescente (Immulite 2000 Canine Total T4, Sie- mens Healthineers, Erlangen). L’intervalle de référence de la thyroxinémie fourni par le Laboratoire de Biologie Médicale de VetAgro Sup est de 15 nmol/L à 65 nmol/L et la moi- tié de cet intervalle est 40 nmol/L. La densité urinaire est lue à l’aide d’un réfractomètre. Un rapport d’analyse est rédigé sur le programme Clovis. Données échographiques Les examens échographiques sont réalisés par des docteurs vétérinaires spécialistes, en cours de spécialisation ou reconnus en imagerie médicale sur un appareil Aplio 500 (Toshiba, Tokyo). Un compte-rendu d’imagerie médicale est rédigé puis validé par un docteur vétérinaire sur le programme Clovis. Les critères échographiques analysés car re- 48
tenus comme utiles dans la caractérisation des MRC sont une hyperéchogénicité corticale, une perte de la différenciation corticomédullaire, une réduction de la taille et une anomalie de contour des reins [3]. 1.2.3 Mesures de pression artérielle systolique Les mesures de pression artérielle systolique (PAS) par méthode Doppler sont super- visées par des docteurs vétérinaires ou des techniciens en santé animale et reportées dans le compte-rendu médical. 1.3 Données et analyses statistiques Les dossiers médicaux sont consultés sur le programme Clovis dans la base de données du CHUV de VetAgro Sup. La base de données des chats des populations décrites précédemment est créée en utili- sant les logiciels Calc et Base de la suite Apache OpenOffice (Apache Software Foundation, Forest Hill). Les analyses statistiques et les graphiques sont effectués en utilisant l’environnement RStudio (RStudio, inc., Boston) pour R (R Core Team). Les graphiques sont éventuelle- ment modifiés en utilisant le logiciel Inkscape (Inkscape.org). Les intervalles de confiance sont donnés à 95 % (IC95 % ). Un diagramme en boîte et un test de Shapiro-Wilk sont réalisés pour chaque série. Si la distribution est proche des lois normales ou les effectifs des deux séries supérieurs à 30, un test t de Welch est réalisé pour comparer les moyennes de deux séries. Dans le cas contraire, un test de Wilcoxon-Mann-Whitney est réalisé. 49
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Chapitre 2 Résultats 2.1 Description des populations 2.1.1 Population A Quarante-six chats répondent aux critères d’inclusion de la population A. Quatre des 46 chats sont de race pure, dont un Chartreux, un Persan, un Ragdoll et un Siamois. Dix-neuf chats sont des mâles (15 castrés) et 27 chats sont des femelles (24 stérilisées). L’âge moyen au moment du diagnostic est de 13 ans et 3 mois (intervalle : 4 ans et 8 mois à 20 ans et 4 mois). Sous-population As Quatorze chats sont inclus dans la sous-population As et sont numérotés de As 1 à As 14. Quatre des 14 chats sont de race pure, dont un Chartreux, un Persan, un Rag- doll et un Siamois. Huit chats sont des mâles (7 castrés) et 6 chats sont des femelles (5 stérilisées). Les données individuelles des chats de la sous-population sont fournies en Annexe A. 51
La durée moyenne de suivi par le service de médecine interne est de 1 an et 5 mois (518 jours ; intervalle : 55 jours à 4 ans et 9 mois) et 8 (57 %) chats sont suivis plus d’un an. Six (43 %) chats sont décédés. Parmi eux, un chat est euthanasié après 1 an et 4 mois (417 jours) de suivi en lien avec l’évolution d’une MRC. Pour les cinq autres chats, la date et la cause du décès ne sont pas précisées. Six (43 %) chats sont perdus de vue, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas été présentés au CHUV de VetAgro Sup depuis plus d’un an. Deux (14 %) chats sont toujours suivis régulièrement par le service de médecine interne. Le premier suivi (profil biochimique et concentration en tT4) au moins quatre semaines après la mise en place de traitement de l’hyperthyroïdie est réalisé en moyenne le 81e jour (valeurs extrêmes : 29 à 277 jours). Sous-population Ans La sous-population Ans comprend 32 chats. 2.1.2 Population B Vingt-quatre chats répondent aux critères d’inclusion dans la population B et sont numérotés de B 1 à B 24. Les données individuelles des chats de la population sont fournies en Annexe B. Un chat est un Siamois et 23 sont des chats européens. Quinze chats sont des mâles (14 castrés) et 9 chats sont des femelles (8 stérilisées). Sous-population Bs Deux chats européens stérilisés, un mâle et une femelle, sont inclus dans la sous- population Bs . 52
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