Méthodologie et Pratique de l'Exploration Fonctionnelle à l'eXercice (EFX)

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Recommandations

Méthodologie et Pratique de l’Exploration
Fonctionnelle à l’eXercice (EFX)

B. Aguilaniu1, R. Richard2, F. Costes3, F. Bart4, Y. Martinat5, B. Stach6, A. Denjean7

                                                                      Préambule
                                                                            Le Conseil Scientifique de la SPLF nous a demandé de
                                                                      réunir un groupe de travail pour élaborer un texte de réfé-
                                                                      rence en langue française sur les aspects théoriques et prati-
                                                                      ques de la méthodologie des Explorations Fonctionnelles à
                                                                      l’eXercice (EFX). La pneumologie est une spécialité médicale
                                                                      qui appuie largement ses pratiques sur la physiopathologie et
                                                                      les explorations fonctionnelles. Depuis une vingtaine d’année,
                                                                      l’exploration du sommeil puis celle des réponses fonctionnel-
                                                                      les au cours de l’exercice ont contribué au développement de
                                                                      la spécialité. Il était donc légitime de fournir aux pneumolo-
                                                                      gues un texte de recommandation pour encourager et guider
                                                                      leur enthousiasme grandissant pour une approche physiologi-
                                                                      que intégrée des symptômes et des maladies pour les quelles
                                                                      ils sont consultés.
                                                                            Le groupe a été constitué de pneumologues et de physio-
                                                                      logistes d’origine universitaire, hospitalière, ou libérale ayant
                                                                      une expérience établie dans le domaine de l’exercice, chez
                                                                      l’adulte ou chez l’enfant. Le groupe a travaillé de façon conti-
                                                                      nue tout au long de l’année 2005 - 2006 avec plusieurs réu-
Remerciements aux Pr. François Péronnet                               nions et de très nombreux échanges électroniques,
(Université de Montréal, Canada) et au Pr. Jacques Mercier                  Après avoir défini un plan très détaillé, le travail de
(CHU Montpellier, France) pour leur relecture critique.
                                                                      bibliographie et d’écriture a été réparti en fonction de l’expé-
Mots-clés : Exercice • Évaluation • Pneumologie •                     rience de chacun. Chaque chapitre a fait l’objet d’une lecture
Test exercice • Méthodologie.                                         critique en groupe, permettant de mieux préciser certains
1 HYLAB,
                                                                      points et de proposer un texte qui ne soit pas l’avis d’un seul
          Physiologie Clinique et Exercice, Grenoble, France.
2
  Service de Physiologie et d’Explorations Fonctionnelles,            expert, mais qui reflète l’accord de tous en prenant en compte
  Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, Hôpital Civil, Strasbourg,   les données de la littérature scientifique. Plusieurs réunions de
  France.
3
  Service de Physiologie Clinique et de L’Exercice, Hôpital Nord,     mise au point ont été nécessaires. La mise en forme finale et
  CHU de Saint Etienne, France.
4 Centre Hospitalier de Béthune, Béthune, France.
                                                                      l’homogénéité du texte complet ont ensuite été soigneusement
5
  Centre P.A.R.O.T, Lyon, France.                                     revues par deux membres du groupe. Une lecture critique col-
6
  Pneumologue, Valenciennes, France.
7 Service de Physiologie, Explorations Fonctionnelles,
                                                                      lective de ce texte a finalement permis d’obtenir un consensus
  Hôpital Robert Debré, Paris, France.
                                                                      sur le contenu et de s’accorder sur les contrastes qu’il fallait
                                                                      donner à ce texte. Chaque membre a eu par la suite, le temps
Correspondance : B. Aguilaniu                                         de revoir l’intégralité du texte pour une ultime vérification.
HYLAB, Physiologie Clinique et Exercice
45 avenue Marie Reynoard, F-38100 Grenoble.                                 Une fois finalisé ce texte a été confié à deux physiologistes
bernard.aguilaniu@hylab.fr                                            internationalement reconnus pour leur compétence scientifi-

Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 2S111-2S160                                             © 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés   2S111
Doi : 10.1019/200720008
B. Aguilaniu et coll.

        que dans le domaine de l’exercice. C’est cette version finale qui              ment les développements physiologiques qui servent de ration-
        a été soumise au conseil scientifique de la SPLF.                              nel à la pratique résultent d’une synthèse, admise par tous les
              Les auteurs ont opté pour un texte long correspondant à                  auteurs, et de plusieurs points de vue. Autant dire que les dis-
        une monographie complète afin d’atteindre l’objectif d’être                    cussions ont mis en évidence des divergences de formation ou
        facilement consulté par les utilisateurs (techniciens, stagiaires,             d’école mais la bonne volonté et la raison de chacun a permis
        médecins…). Une version courte pourrait faire croire que l’on                  de retenir ce qui a paru robuste et utile. Nous pensons avoir
        peut aborder l’EFX à moindre coût. Les auteurs ont ainsi sou-                  respecté la demande de la SPLF de fournir un guide de réfé-
        haité affirmer que l’on ne peut pas transiger avec la méthodo-                 rence pour soutenir la pratique de ceux qui font ou veulent
        logie rigoureuse de l’EFX au risque d’interprétations cliniques                faire des EFX. Nous espérons que ce texte facilitera l’appétit
        erronées.                                                                      des jeunes en formation (et celle des seniors) pour la physiopa-
              Ce texte est unique car il pioche dans des domaines de                   thologie intégrée et qu’il sera consulté par ceux qui défendent
        connaissance très divers et parfois difficile à atteindre. Notam-              la pratique de la pneumologie auprès des autorités.

                                                                 Liste des Abréviations

        AIE                                              Asthme Induit par l’Exercice
        ATP                                              Assistant Technicien en Pneumologie
        BAV                                              Bloc Auriculo-Ventriculaire
        BIE                                              Bronchospasme Induit par l’Exercice
        BPCO                                             Broncho Pneumopathie Chronique Obstructive
        BTPS                                             “Body Temperature Pressure Saturated”
        CI                      L.                       Capacité Inspiratoire
        CO2                                              Dioxyde de carbone
        CV                      L                        Capacité Vitale
        D(a-v)O2                mlO2   .ml-1.ml   sang   Différence artério-veineuse en oxygène
        ECG                                              Electrocardiogramme
        EE                                               Electrocardiogramme d’Effort
        EELV                    L                        “End Expiratory Lung Volume”, volume pulmonaire de fin d’expiration
        EFX                                              Exploration Fonctionnelle à l’eXercice
        EILV                    L.                       “End Inspiratory Lung Volume”, volume pulmonaire de fin d’inspiration
        EVA                                              Echelle Visuelle Analogique
        FACO2                   %                        Fraction de CO2 dans l’air alvéolaire
        FC                      Batt.min-1               Fréquence Cardiaque
        FCmax                   Batt.min-1               Fréquence Cardiaque Maximale
        FECO2                   %                        Fraction expiratoire en CO2
        FEN2                    %                        Fraction expiratoire en N2
        FEO2                    %                        Fraction expiratoire en O2
        FICO2                   %                        Fraction inspiratoire en CO2
        FIN2                    %                        Fraction inspiratoire en N2
        FIO2                    %                        Fraction inspiratoire en O2
        FMT                     Batt.min-1               Fréquence cardiaque Maximale Théorique
        FR                      Cycle.min-1              Fréquence Respiratoire
        GDS                                              Gaz Du Sang
        HRB                                              Hyper Réactivité Bronchique
        HTAP                                             Hyper Tension Artérielle Pulmonaire
        METs                                             “Metabolic equivalent of the task” 1 MET représente la valeur du métabolisme basal
        N2                                               Azote
        O2                                               Oxygène
        P(A-a)O2                mmHg                     Gradient de Pression Alvéolo-artérielle en Oxygène
        PA                      mmHg                     Pression Artérielle

2S112   Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 2S111-2S160
Méthodologie et Pratique de l’Exploration Fonctionnelle à l’eXercice (EFX)

PaCO2     mmHg          Pression du sang artériel en CO2
PAD       mmHg          Pression Artérielle Diastolique
PaO2      mmHg          Pression du sang artériel en O2
PAO2      mmHg          Pression Alvéolaire en O2
PAiO2     mmHg          Pression Alvéolaire idéale en O2
PAS       mmHg          Pression Artérielle Systolique
PB        mmHg          Pression Barométrique
PETCO2    mmHg          “End tidal CO2 pressure”, Pression partielle de fin d’expiration en CO2
PETO2     mmHg          “End tidal O2 pressure”, Pression partielle de fin d’expiration en O2
PMA       Watt          Puissance Maximale Aérobie
Pmax      Watt          Puissance maximale développée
Qc        L.min-1       Débit cardiaque
QR                      Quotient Respiratoire, rapport VCO2/VO2 dans les tissus
RER                     “Respiratory exchange ratio”, quotient d’échanges gazeux respiratoires
RV        %             Réserve Ventilatoire
SaO2      %             Saturation du sang artériel en O2
SpO2      %             Saturation percutanée en O2
STPD                    “Standard, Temperature, Pressure, Dry”
SV                      Seuil Ventilatoire
TM6                     Test de Marche de 6 minutes
TPSV                    Troubles Paroxystiques Supra Ventriculaires
TV                      Tachycardie Ventriculaire
VA        L.            Volume Alvéolaire
VCO2      L.CO2.min-1   Débit de CO2 produit
Vd        L             Volume de l’espace mort
VE        L.min-1       Ventilation Externe : employé pour Débit ventilatoire expiré
VE/VCO2                 Équivalent respiratoire pour le CO2
VE/VO2                  Équivalent respiratoire pour l’O2
VEmax     L.min-1       Débit ventilatoire Externe maximal
VEMS      L             Volume Expiratoire Maximal Seconde
VES       Ml            Volume d’Ejection Systolique
VI        L.min-1       Débit Ventilatoire Inspiré
VMV       L.min-1       Ventilation Maximale Volontaire
VN2 in    L.min-1       Débit d’azote entrant dans le poumon
VN2 out   L.min-1       Débit d’azote sortant du poumon
VO2       LO2.min-1     Débit d’oxygène consommé appelé communément Consommation d’O2
VO2MAX    LO2.min-1     Débit maximal d’oxygène consommé ou Consommation maximale d’O2
VO2 pic   L.            Valeur de VO2 mesurée à l’exercice maximal
VRI       L.            Volume de Réserve Inspiratoire
VT        L.            Volume courant : «Tidal Volume »

                                                                   © 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés      2S113
Méthodologie et Pratique de l’Exploration
        Fonctionnelle à l’eXercice (EFX)

                                                 Introduction
                                                        L’Exploration Fonctionnelle à l’eXercice (EFX) est un
                                                 test diagnostique global qui intègre des grandeurs cardio-res-
                                                 piratoires et métaboliques et permet de mieux évaluer les
                                                 pathologies chroniques, les thérapeutiques, et d’observer les
                                                 modifications fonctionnelles associées aux symptômes persis-
                                                 tants [1-4]. L’exercice est une situation de contrainte com-
                                                 plexe qui met en jeu simultanément des adaptations
                                                 musculaires, hémodynamiques, respiratoires et métaboliques
                                                 [5]. Dans cette condition, l’analyse des réponses fonctionnel-
                                                 les est nécessairement intégrée, amenant le spécialiste à abor-
                                                 der la physiopathologie dans son ensemble, et non pas
                                                 uniquement dans le domaine de sa propre spécialité. De plus,
                                                 l’EFX est la seule exploration fonctionnelle intégrée qui per-
                                                 met de juger des relations entre les symptômes et les réponses
                                                 fonctionnelles.
                                                        Ainsi l’EFX réalisée par le pneumologue, est une investi-
                                                 gation fondamentalement différente de l’épreuve d’effort car-
                                                 diologique (EE) dont le but essentiel est la détection de
                                                 l’ischémie coronarienne ou de troubles rythmiques. Dans un
                                                 cas, il s’agit de réaliser un effort suffisamment violent (généra-
                                                 lement un incrément de 30-50 watts toutes les trois minutes)
                                                 pour démasquer une ischémie latente, dans l’autre, il s’agit
                                                 d’un exercice dynamique progressif ou en état stable prolongé
                                                 pour observer des adaptations fonctionnelles et les rapporter
                                                 aux symptômes ressentis par le patient. La méthodologie de
                                                 l’EFX ne doit donc pas être univoque face à des questions cli-
                                                 niques variées. La sophistication actuelle des appareils de
                                                 mesure (ergo spiromètres), qui permet de mesurer dans le
                                                 même temps les échanges gazeux pulmonaires, différents
                                                 aspects de la réponse ventilatoire et l’électrocardiogramme
                                                 12 dérivations, ne doit pas occulter la nécessité d’une métho-
                                                 dologie adaptée à la question clinique et à la stratégie diagnos-
                                                 tique. Pour N.L. Jones [2], l’exercice incrémental maximal
                                                 sans détermination des gaz du sang correspond au premier
                                                 stade de complexité de l’EFX, les deux suivants incluant en
                                                 plus l’étude de l’hématose et enfin la mesure du débit cardia-

2S114   Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 2S111-2S160
Méthodologie et Pratique de l’Exploration Fonctionnelle à l’eXercice (EFX)

que par « rebreathing » de CO2. Dans ce document, il nous a         Tableau I.
paru nécessaire de discuter les indications et la méthode de        Indications de l’EFX. Commentaires dans le texte.
l’EFX à puissance progressivement croissante, de l’EFX à
                                                                                   Symptôme                        Évaluation Fonctionnelle
puissance constante, moins utilisée mais plus adaptée à
                                                                                                                        Pathologie prédominante
l’exploration de certaines questions cliniques, des spécificités
                                                                                                                        Pathologie Intriquée
de l’EFX de l’enfant, et du cas particulier de la recherche de      Pathologie                    Pathologies
                                                                                                                        Suivi Évolutif
l’asthme induit par l’exercice.                                     prédominante                  Intriquées
                                                                                                                        Facteur de Risque
      Quelles que soient les modalités de l’EFX, une attention          • Cardiologie • Pneumologie • Rénale
                                                                                                                        Pré-opératoire
                                                                          • Métabolique • Neuro-musculaire
particulière doit être portée à l’évaluation des symptômes                  • Hémato-cancérologique • …                 Aptitude
dans ces conditions standardisées afin de compléter le juge-                                                            Évaluation Thérapeutique
ment clinique lorsqu’il s’agit de conclure au bénéfice ou à                           Isolé
l’inefficacité d’une intervention thérapeutique. L’interpréta-                        • Dyspnée
tion correcte des résultats est donc conditionnée par le respect                      • Fatigue
                                                                                      • Fatigabilité
rigoureux d’une méthodologie technique et clinique qui                                • Myalgies
dépend de la question médicale et donc de l’indication.                               • Douleurs Thoraciques
                                                                                      • Autres…
      Le plan de ce texte suivra chronologiquement les étapes
de la réalisation de l’EFX. Les auteurs ont souhaité développer
le rationnel théorique de chaque aspect pratique dans le texte            Lorsqu’une pathologie (ou plusieurs) est connue, la
ou dans les annexes. Ce texte est donc une présentation prag-       question est de savoir si le symptôme (dyspnée par exemple)
matique des questions quotidiennes liée à la pratique de            est compatible avec la (ou les) pathologie (s) identifiée (s) ;
l’EFX et ne constitue en aucune façon une description               par exemple, évaluer le retentissement fonctionnel et le pro-
exhaustive de la méthodologie de l’exploration fonctionnelle.       nostic de l’insuffisance cardiaque, apprécier la gravité ou
Le lecteur doit considérer cette argumentation comme la par-        l’évolutivité d’une BPCO ou d’une fibrose interstitielle, d’une
tie émergente de la connaissance théorique et de l’expérience       valvulopathie, ou d’une myopathie, etc. L’EFX est aussi indi-
clinique nécessaire pour la réalisation satisfaisante d’une EFX.    quée pour juger d’une inaptitude, ou de la prédiction du ris-
Ce texte a aussi pour but de signifier aux cliniciens qui sou-      que opératoire d’une chirurgie de résection pulmonaire. Enfin
haitent évaluer rationnellement les symptômes et la physiopa-       elle est utile pour évaluer objectivement une thérapeutique
thologie de prendre la mesure des exigences scientifiques et        médicamenteuse ou un programme de réadaptation. À titre
cliniques liées à cette légitime ambition. Les auteurs espèrent     indicatif, les pathologies explorées par un laboratoire de phy-
que ce texte répondra aux questions des techniciens d’explora-      siopathologie (ville de 500 000 habitants, 800 à 1 000 EFX
tion fonctionnelle et aux cliniciens intéressés par la physiopa-    par an) sont cardiologiques (30 %), broncho-pulmonaires
thologie de l’exercice.                                             (40 %), cancéro-hématologiques (15 %), musculaires (7 %),
                                                                    endocriniennes ou rénales (4 %), vasculaires (2 %) et autres
Les indications [2, 6]                                              (2 %).

       L’EFX doit être précédée par une exploration fonction-
nelle minimale de repos adaptée à la situation clinique             Contre-indications absolues
comme l’ECG (ou échographie cardiaque), la spirométrie              et indications à risques (tableau II)
(éventuellement pléthysmographie, diffusion pulmonaire), et
le dosage de l’hémoglobine. L’EFX a de nombreuses indica-                 Les contre-indications représentent des situations clini-
tions qui peuvent, d’un point de vue clinique, être classées en     ques où le risque n’est pas maîtrisable et/ou l’EFX n’a pas
deux catégories : soit l’exploration diagnostique d’un symp-        d’intérêt. Les indications à risque regroupent des situations
tôme, soit l’évaluation fonctionnelle d’une pathologie connue       cliniques où l’EFX a un apport diagnostique validé mais où le
ou d’une situation clinique (tableau I). Les symptômes sont         risque de survenue d’événements indésirables graves existe.
parfois isolés, mais ils peuvent aussi être associés à une patho-   Dans ce cas, le rapport-bénéfice risque doit être soigneuse-
logie prédominante ou à des pathologies intriquées. Lorsque         ment évalué.
le symptôme est isolé, il s’agit de déceler une pathologie non            Les risques de l’EFX n’ont jamais été spécifiquement
reconnue par les explorations de repos, ou de rapporter le          évalués contrairement aux risques liés à l’épreuve d’effort
symptôme à un comportement fonctionnel inadapté (Ex :               d’une population cardiologique. Dans l’étude récente du
Hyperventilation ou réponse cardio-vasculaire inappropriées).       Veterans Affairs Health System l’analyse de 75 828 tests
Parmi les symptômes explorés, la dyspnée représente dans            d’effort d’une population cardiologique retrouve 1,2 évène-
notre expérience, environ 60 % des indications. L’intolérance       ment pour 10 000 tests (infarctus du myocarde, tachycardie
à l’effort (myalgies, fatigue) représente environ 20 % des indi-    ventriculaire) sans aucun décès [7]. Une incidence de 2 décès
cations, les autres symptômes étant les oppressions thoraci-        pour 100 000 tests a été rapportée dans une population d’un
ques, l’inaptitude, ou des malaises divers.                         million de sujets regroupant des sportifs et des patients pré-

                                                                                 © 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés      2S115
B. Aguilaniu et coll.

        sentant une maladie chronique. Dans cette cohorte, aucun                       La répartition des tâches avec un assistant technicien en pneu-
        décès n’a été dénombré chez les sujets sains et les sportifs qui               mologie (ATP) permet d’optimiser la réalisation de l’examen
        développaient des puissances très élevées [8-10]. Comme                        et sa fiabilité.
        attendus, la plupart des incidents recensés survenaient chez les                      Le médecin doit avoir une connaissance particulière en
        patients cardiologiques. Au vue de la littérature (voir dans [6])              physiologie de l’exercice et être entraîné à l’interprétation des
        et de l’expérience des auteurs qui ont collectivement réalisé un               résultats de l’EFX en pathologie. Il doit aussi connaître les
        minimum de 100 000 EFX correspondant aux indications du                        procédures de calibration, et les critères de qualité de toutes
        tableau I, sans aucun évènement grave, on peut considérer                      les mesures réalisées. Le rôle du médecin est de vérifier avant
        que l’EFX est un test qui ne présente pas de risque significatif               le début de l’examen l’indication et la capacité du patient à
        lorsque la méthodologie et les contre indications énumérées ci                 réaliser l’examen qui a été programmé. Il décide du protocole
        dessous sont respectées (tableau II).                                          et assure les conditions de sécurité de l’épreuve. Si le médecin
                                                                                       est aidé par un ATP, il doit rester à proximité immédiate de la
        Tableau II.                                                                    salle d’examen pour intervenir rapidement et juger d’un évé-
        Contre-indications absolues et indications à risques de l’EFX incré-           nement clinique particulier. Sa présence à l’acmé de l’effort
        mentale.                                                                       est indispensable pour détecter des éléments cliniques perti-
                                                                                       nents éventuels. L’assistant technique ou à défaut le médecin
            Contre-Indications Absolues                    Indications à Risques       doit assurer les contrôles techniques indispensables avant cha-
                                                                                       que examen pour obtenir des mesures fiables. Il/Elle doit
        1. Angor instable                                1. Sténose connue du tronc
                                                         coronaire                     aussi conduire l’examen de façon très standardisée pour obte-
        2. Infarctus du myocarde récent                  2. Valvulopathie sténosante
                                                                                       nir du sujet un effort réellement maximal et assurer la fiabilité
        (< 5 jours)                                      modérée                       et la reproductibilité des réponses fonctionnelles et psychomé-
        3. Rétrécissement aortique serré                 3. Tachyarythmie ou           triques fortement influencées par l’environnement. La répar-
        symptomatique                                    brady -arythmie               tition des rôles entre médecin et ATP sera décidée en tenant
                                                         non contrôlée par
                                                         le traitement
                                                                                       compte du niveau d’habileté et de qualification pour les diffé-
                                                                                       rentes tâches techniques de l’examen et en fonction du
        4. Arythmies symptomatiques                      4. BAV de haut degré
        non contrôlées                                                                 patient et de la pathologie à explorer. En France, la plupart
        5. Endocardite, myocardite,                      5. HTAP modérée à sévère
                                                                                       des pneumologues libéraux ne font pas appel à une assistance
        péricardites aiguës                                                            technique pour réaliser les EFX ou les EFR. À l’inverse, les
        6. Embolie pulmonaire aigue                      6. Insuffisance rénale        médecins hospitaliers délèguent généralement cette tâche à
                                                         chronique avec désordres      des personnels ayant acquis une compétence réelle mais infor-
                                                         électrolytiques et anémie     melle. Rappelons cependant que les délégations de compéten-
                                                         Hb < 10 g.100 ml-1
                                                                                       ces pour les actes médicaux d’explorations fonctionnelles ne
        7. Insuffisance cardiaque instable
        non contrôlée                                                                  concernent pas encore l’EFR ou l’EFX. Il serait souhaitable,
        8. Thrombose veineuse aigue
                                                                                       compte tenu de l’évolution attendue de la démographie médi-
        des membres inférieurs                                                         cale et de la complexité croissante des aspects techniques des
        9. Suspicion de dissection aortique                                            actes diagnostiques que cette situation évolue d’autant que les
        10. Œdème pulmonaire
                                                                                       médecins eux-mêmes n’ont, le plus souvent, jamais reçu de
                                                                                       formation technique spécifique à l’EFR et particulièrement à
        11. Asthme instable
                                                                                       l’EFX. Pour pallier cette carence, les sociétés de Pneumologie
        12. Hypoxémie de repos avec
        SpO2< 85 % en air ambiant
                                                                                       et de Physiologie ont déposé en 2004 un projet de formation
                                                                                       d’un métier d’Assistant Technique en Pneumologie (ATP).
        13. Insuffisance respiratoire aigue
                                                                                       Malgré l’absence de réglementation, il existe néanmoins une
        14. Toute affection
        non-cardiovasculaire risquant                                                  formation pour la lecture de l’ECG d’effort réservée aux infir-
        de compromettre la performance                                                 mières détachées à la réalisation des épreuves d’effort stricte-
        ou aggravée par l’exercice                                                     ment cardiologiques (Université de Bordeaux et de Dijon), un
        (ex : thyréotoxicose, infection aigue)
                                                                                       cycle de formation sur la Physiologie de l’exercice & Interpré-
        15. Incapacité mentale ou physique
        à réaliser l’examen
                                                                                       tation Clinique (Hylab - Grenoble) et un Diplôme Inter Uni-
                                                                                       versitaire Exercice & Réhabilitation (Paris - Strasbourg -
        * le test peut être alors réalisé sous oxygène                                 Montpellier).
                                                                                              Par contre, les recommandations internationales sur les
        Qualification du personnel [6]                                                 compétences et les qualifications nécessaires pour réaliser et
                                                                                       interpréter des EFX concernent distinctement l’assistant tech-
              Une EFX doit toujours être réalisée sous la responsabilité               nique et le médecin responsable de l’examen. Ces recomman-
        et les directives d’un médecin, de préférence pneumologue ou                   dations sont régulièrement mises à jour et consultables sur le
        cardiologue, formé aux gestes d’urgence cardio-respiratoire.                   site de l’American College of Sport Medecine [8].

2S116   Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 2S111-2S160
Méthodologie et Pratique de l’Exploration Fonctionnelle à l’eXercice (EFX)

Le local                                                            souvent une consultation avant l’EFX pour préciser le dérou-
                                                                    lement, les buts attendus de l’examen et les conclusions éven-
     Il doit être spacieux, correctement ventilé afin d’assurer     tuelles. La pratique confirme en effet qu’il s’agit bien d’un
un confort optimal au patient et une circulation correcte du        « petit drame » particulier et inhabituel car la consultation qui
personnel, et idéalement équipé d’une climatisation. Une toise      suit l’examen révèle parfois au médecin (et au patient) l’aspect
et une balance pour le recueil des données anthropométriques        névrotique de certains symptômes.
sont indispensables. La température de la pièce doit se situer
entre 18 et 22 °C tout au long de l’année. Un baromètre per-        Préparation du patient
mettant la mesure de la pression atmosphérique est nécessaire.
                                                                         Le patient doit avoir une tenue adéquate à la réalisation
Un téléphone doit être disponible dans la salle pour alerter une
                                                                    de l’épreuve (chaussures, short ou pantalon), respecter un
équipe d’urgence en cas de problème. Un matériel de soins
                                                                    intervalle de 2 heures après le repas et ne pas avoir fumé avant
d’urgence doit être facilement accessible pour assurer les pre-
                                                                    l’examen.
miers gestes de réanimation. Ce chariot de premier secours,
régulièrement contrôlé, doit comprendre : un système pour           Anthropométrie
administrer une oxygénothérapie éventuellement avec un mas-               Le patient sera mesuré et pesé et la mesure de VO2 sera
que de ventilation, un matériel d’intubation adapté à l’âge de      exprimée en LO2.min-1 et en LO2.min-1.kg-1. Cette précau-
la population testée (cf. Chapitre enfant) avec une prise de vide   tion permettra de confronter les résultats aux normes disponi-
pour aspiration et un ballonnet pour assurer une ventilation        bles de la littérature et aussi d’interpréter dans le temps les
manuelle dans les meilleures conditions. Le défibrillateur car-     variations de VO2 d’un sujet dont la masse corporelle aurait
diaque régulièrement testé, doit être sur place et la procédure     changé significativement.
d’entretien du chariot d’urgence régulièrement validée. La pro-
cédure de transfert du patient vers un service de réanimation       Installation du patient sur l’ergocycle
du centre ou vers une structure mobile de réanimation en vue             Pour réaliser un exercice maximal, le patient doit être
de rejoindre un établissement proche doit être écrite et dispo-     confortablement assis avec une hauteur de selle suffisante
nible sur le lieu de la réalisation de l’EFX.                       pour que l’extension maximale du membre inférieur en bas de
                                                                    course corresponde à une flexion du genou d’environ 15°. Le
                                                                    guidon doit être aussi réglé à une distance confortable, les
L’EFX à puissance progressivement
                                                                    cale-pieds doivent tenir correctement l’avant-pied.
croissante
                                                                    Installation du patient sur le tapis roulant
     La réalisation d’une EFX incrémentale comprend                       On s’assurera que le patient est capable de réaliser une
5 phases : L’information et la participation du patient, la pré-    marche coordonnée sans soutien. La procédure d’arrêt rapide
paration du patient, l’étalonnage, l’exercice incrémental et la     du déroulement du tapis doit être démontrée et assimilée.
préparation des résultats.                                          L’environnement doit être sécurisé notamment à l’arrière du
                                                                    tapis.
Information et participation du patient
                                                                    Explication des échelles de symptômes
Consentement informé
                                                                           Lors de l’épreuve, on demandera au patient de rensei-
      Le consentement signé certifie que le patient a été           gner l’opérateur sur l’évolution de sa dyspnée et de la fatigue
informé des objectifs de l’EFX, de son déroulement, des buts
                                                                    musculaire (Échelle de Borg ou Échelle visuelle analogique).
attendus et des risques potentiels de l’examen. Ce consente-
                                                                    La méthode choisie sera expliquée au patient, avant le début
ment est un préalable indispensable à la réalisation de
                                                                    de l’exercice, en prenant le soin de réaliser un « étalonnage
l’épreuve (annexe 1).
                                                                    interne » de la perception du patient qui doit connaître la
Participation du patient                                            signification des bornes minimale et maximale de l’échelle.
      La mise en condition du patient doit être codifiée. Elle      Pour l’échelle de Borg, le niveau 0 correspond à « aucun
relève d’une méthodologie précise adaptée à chaque labora-          essoufflement », le niveau 10 à « l’essoufflement maximal
toire. Fréquemment le clinicien est confronté à des réactions       jamais ressenti ». Il n’y a pas lieu de commenter un niveau
déclenchées par l’examen dont le patient est l’acteur principal.    intermédiaire, mais il faut montrer que certains chiffres ne
Si on considère ce test comme une mise en scène où s’exerce         sont pas accompagnés par des mots, et que le patient peut
une contrainte pour juger d’une aptitude, on comprend que           indiquer avec le doigt un niveau d’essoufflement entre deux
l’impact psychologique puisse être d’une autre nature que           chiffres ou entre deux mots. De nombreux travaux ont mon-
celui de l’électrocardiogramme d’effort où se juge un risque.       tré que la perception subjective de la dyspnée et de la fatigue
Dans une perspective plus clinique que fonctionnaliste, il est      musculaire ressenties au cours d’un test incrémental était
nécessaire de souligner l’importance de la présentation de          quantifiable, reproductible, et sensible au changement sous
l’EFX car elle conditionne en grande partie la façon dont les       l’effet d’une thérapeutique ou au contraire de l’aggravation de
résultats seront compris par le patient. Ceci justifie le plus      la maladie [11-14].

                                                                                 © 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés      2S117
B. Aguilaniu et coll.

              L’échelle de BORG (fig. 1) comporte 10 niveaux de per-           Préparation pour la mesure répétée des gaz du sang
        ception subjective de l’intensité du symptôme (dyspnée ou              (GDS)
        fatigue) cotés de 0 à 10 (voir l’échelle). Le technicien deman-              La méthode de prélèvement sanguin pour mesurer de
        dera au patient, à intervalles réguliers tout au long de               façon répétée les GDS au cours de l’exercice doit être choisie
        l’épreuve d’effort, d’indiquer avec le doigt « quelle est l’impor-     par le médecin en fonction du patient exploré et des techni-
        tance de votre essoufflement (de votre fatigue musculaire) ? »         ques disponibles. Un prélèvement sera réalisé systématique-
              L’ÉCHELLE VISUELLE ANALOGIQUE (EVA) se présente                  ment lors de l’exercice à la fin du palier d’échauffement, puis
        sous la forme d’une réglette à deux faces orientées de gauche à        un second à l’exercice maximal.
        droite sur laquelle se déplace un curseur. Une face recto est                D’autres prélèvements intermédiaires sont souvent sou-
        destinée au patient : À l’extrémité gauche est noté « pas de           haitables en fonction de la situation clinique. Le prélèvement
        dyspnée ». À l’extrémité droite est noté « dyspnée maximale ».         sera réalisé soit par des ponctions itératives de l’artère radiale,
        Une face verso est destinée au technicien pour mesurer                 soit par prélèvements de sang capillaire au lobe de l’oreille,
        l’intensité de la dyspnée graduée de 0 à 10. Le score d’EVA est        soit enfin après la mise en place d’ un cathéter artériel radial.
        visualisé par le trait du curseur que le patient a positionné.               La ponction artérielle est la technique de référence pour
                                                                               la gazométrie de repos. C’est la seule technique autorisée par la
          0               Nulle                                                nomenclature récente (CCAM version 2). Cependant elle est
          0,5             Très, très léger à peine perceptible                 difficile à répéter au cours de l’exercice avec un taux d’échec de
          1               Très léger                                           la deuxième ponction de 17 % dans notre expérience [15].
          2               léger                                                Elle est irréalisable chez certains patients au capital artériel fra-
          3               Modéré                                               gile ou inaccessible et quasiment impossible sur tapis roulant
          4               Peu sévère                                           ou chez l’enfant. Enfin elle est parfois responsable de malaise
          5               Sévère                                               vagal voire de perte de connaissance chez les sujets jeunes ou
          6                                                                    sensibles.
          7               Très sévère                                                Les prélèvements capillaires sont largement utilisés au
          8                                                                    cours de l’exercice malgré une sous -estimation quasi systéma-
          9               Très très sévère (presque maximale)
                                                                               tique de la valeur de PaO2 d’environ 4 mmHg. Cette
          10              Maximale
                                                                               sous-estimation est systématiquement inférieure à 5 mmHg
                                                                               pour des valeurs de PaO2 artérielles < 80-85 mmHg. Pour des
        Fig. 1.                                                                valeurs de PaO2 élevées, l’erreur est variable, non prévisible et
        Échelle de Borg applicable pour la dyspnée ou la fatigue musculaire.   peut être supérieure à 10 mmHg. Néanmoins la répercussion
        Remarquez que la valeur 0 correspondant à l’absence de symptôme        de cette erreur sur le calcul du gradient alvéolo-artériel en
        est située en haut de l’échelle.
                                                                               oxygène et sur le calcul de VD/VT n’affecte pas significative-
                                                                               ment l’interprétation de la (a)normalité de l’espace mort ou
        Spirométrie                                                            de la diffusion pulmonaire de l’oxygène au cours de l’exercice
              Une spirométrie complète avec mesure de la capacité              [15, 16] Les valeurs capillaires de PaCO2 et de pH sont par
        vitale maximale (en général la CV lente) et des débits maxi-           contre strictement superposables aux valeurs obtenues par
        maux inspiratoires et expiratoires (courbe débit volume)               prélèvements artériels quelle que soit la valeur absolue des
        seront réalisés avant le démarrage de l’épreuve.                       deux variables [15, 17].
        ECG et pression artérielle de repos                                    Étude de l’hématose au cours de l’exercice
              Un ECG est enregistré au repos, avant le démarrage de                  La dégradation de l’hématose au cours de l’exercice n’est
        l’épreuve. La qualité de l’ECG en cours d’exercice doit être suf-      pas systématiquement détectée par la simple mesure des gaz du
        fisante pour permettre de rejeter les artefacts liés aux mouve-        sang artériel. En effet, l’hyperventilation et l’augmentation de
        ments et repérer les modifications de l’ECG rapportées dans le         PAO2 peuvent conduire à une sous estimation d’un trouble
        tableau VII. Un enregistrement continu multipistes (12 dériva-         diffusionnel et à ignorer ainsi une pathologie sur le versant ven-
        tions) est optimal pour le diagnostic d’une ischémie myocardi-         tilatoire, circulatoire ou interstitiel. Il faut donc nécessairement
        que au cours de l’exercice car il permet un moyennage des              mesurer le gradient alvéolo-artériel en oxygène et son évolution
        complexes QRS avec une analyse automatique et un lissage du            jusqu’à l’exercice maximal. De même, la mesure répétée de
        segment ST. Toutefois pour certaines épreuves d’exercice,              l’espace mort peut permettre de détecter une atteinte vasculaire
        notamment l’évaluation initiale d’une réhabilitation respira-          pulmonaire. Le calcul de P(Ai - a)O2 et de VD/VT implique
        toire chez un sujet porteur de BPCO sans point d’appel car-            de faire coïncider les valeurs de PaO2 et de PaCO2 avec les
        diologique, un enregistrement trois pistes est suffisant pour          valeurs moyennées pendant le temps du prélèvement des gran-
        surveiller le rythme cardiaque et dépister une ischémie.               deurs obtenues par l’ergospiromètrie (RER, PEmixCO2, VT)
              La mesure répétée de la pression artérielle par méthode          (cf. V. Détermination des grandeurs). Pour obtenir des valeurs
        manuelle est habituellement plus fiable que la mesure automati-        fiables et reproductibles, il faut prélever le sang rapidement sans
        que.                                                                   déclencher d’hyperventilation ou de modification du mode

2S118   Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 2S111-2S160
Méthodologie et Pratique de l’Exploration Fonctionnelle à l’eXercice (EFX)

ventilatoire. Dans ces conditions, la reproductibilité de P(Ai -       saire pour effectuer le travail mécanique et de l’énergie néces-
 a)O2 et de VD/VT est respectivement inférieure à 3-4 mmHg             saire pour le déplacement à plat. Le coût énergétique du
et à 5 % [18]. La répétition des mesures permet aussi de               déplacement à plat (appelé « économie ») dépend du rende-
s’affranchir d’une erreur de mesure ponctuelle et ainsi d’éviter       ment mécanique de l’exercice qui ne peut pas être mesuré. La
une interprétation erronée. En pratique, il faut considérer que        valeur d’une économie de déplacement n’a de signification que
l’étude de l’hématose au cours de l’exercice est une procédure         pour la vitesse à laquelle elle a été déterminée. Le coût métabo-
rigoureuse qui ne se résume pas à la simple mesure des gaz du          lique à plat est variable selon l’aptitude motrice du sujet, de l’âge
sang. Cet aspect de l’EFX nécessite un entraînement spécifique         (supérieur de 20 à 30 % chez l’enfant), et de la longueur de la
pour obtenir des résultats interprétables. L’étude de l’hématose       foulée. Ce coût métabolique est approximativement de
au cours de l’exercice doit donc être réservé à des questions dia-     1 METS par km.h-1 soit 3,5 ml d’O2.kg-1 et par kilomètre-
gnostiques qui justifient d’explorer au mieux la diffusion de          heure. Plusieurs protocoles sur tapis sont utilisés en clinique car-
l’oxygène au cours de l’exercice.                                      diologique et proposent une estimation de VO2 à partir de
Embout buccal ou masque facial                                         l’estimation du travail mécanique réalisé [27]. En pratique,
                                                                       l’étalonnage d’un tapis roulant se résume à contrôler différentes
      Le recueil des gaz inspirés et expirés sera effectué au
                                                                       vitesses de déroulement ainsi que la pente. Chaque vitesse est
moyen d’un embout buccal ou d’un masque facial. L’embout
                                                                       mesurée (de préférence avec un sujet en mouvement sur le tapis)
buccal est parfois inconfortable, responsable de nausée et
                                                                       à l’aide d’un tachymètre (compteur de vitesse) posé sur la bande
d’assèchement de la bouche. L’espace mort est de 50 à 100 ml
                                                                       de roulement. Ces mesures sont comparées aux vitesses souhai-
selon les dispositifs. Le masque facial expose au risque d’une
                                                                       tées, affichées sur le tableau de commande du tapis.
étanchéité imparfaite à l’origine de fuites, mais il doit être pré-
férentiellement utilisé lorsque le réflexe nauséeux lié à                 Bicyclette ergométrique
l’embout buccal est incontrôlable. Par ailleurs il expose à un               La puissance mécanique sur cyclo-ergomètre dépend de la
risque de ré-inspiration susceptible de modifier les fractions         résistance appliquée sur la roue (ou volant d’inertie), de son
de gaz inspirées et particulièrement la FICO2. La bonne étan-          diamètre et de la fréquence de pédalage. Le travail réalisé sur un
chéité doit être contrôlée avant le début de l’épreuve et tout         cyclo-ergomètre mécanique est égal au produit du développe-
au long de l’exercice.                                                 ment du pédalier par la fréquence de pédalage et par la
                                                                       résistance appliquée. Le cyclo-ergomètre électromagnétique
Les étalonnages                                                        maintient la puissance souhaitée en modulant la résistance élec-
      La fiabilité des grandeurs mesurées au cours de l’exercice       tromagnétique en fonction de la fréquence de pédalage. Quel
dépend des qualités (précision, reproductibilité) de l’ergomètre       que soit le type de cyclo-ergomètre, le travail mécanique est
(ergocycle, tapis roulant) et de l’ergospiromètre (analyseur des       quantifiable (en Joules) et peut être directement comparé à la
gaz expirés, pneumotachographe). Les caractéristiques techni-          dépense énergétique. Le travail mécanique fourni par le cyclo-
ques des différents matériels ne seront pas développées dans           ergomètre doit être contrôlé régulièrement en condition stati-
cette section. Le lecteur pourra se référer aux différents cons-       que et si possible dynamique. Le principe du contrôle statique
tructeurs et aux revues récentes sur ce sujet [6, 19]. L’objectif      est de vérifier le capteur de force du frein à l’aide de masses con-
de ce paragraphe est de décrire les phases d’étalonnage et les         nues. Les constructeurs ont généralement une fiche technique
aspects techniques de la mesure des échanges gazeux, préalable         associée au cyclo-ergomètre permettant facilement d’accéder à
incontournable à une analyse critique des grandeurs obtenues.          cet étalonnage. Le contrôle dynamique mesure précisément les
                                                                       puissances développées (et donc le travail fourni). Réalisé sur
Ergomètres                                                             un banc d’étalonnage (annexe 3), il permet de relever les carac-
      Le cyclo-ergomètre est plus utilisé que le tapis roulant         téristiques complètes de la bicyclette ergométrique pour des
car il est adapté à un plus grand nombre de situations clini-          puissances allant de 0 à 1 000 watts et des vitesses de pédalage
ques et permet d’obtenir des mesures fiables (annexe 2). Les           de 10 à 130 t.min-1. Ce type d’étalonnage n’est pas réalisable
mesures de VO2MAX réalisées sur tapis roulant sont générale-           en routine et doit être confié au constructeur ou à un service
ment supérieures de 7 à 12 % à celles qui sont obtenues sur            technique. Quel que soit le type de cyclo-ergomètre, les consi-
cyclo-ergomètre chez le sujet sain [20-22] et les patients car-        gnes de fréquence de pédalage proposées au sujet sont primor-
diaques [23, 24] mais, cette différence est moins évidente chez        diales. Une fréquence de 60 ou 80 t.min-1 est imposée pour
les patients BPCO [25].                                                les cyclo-ergomètres mécaniques avec résistance de freinage
   Tapis roulant                                                       sur le volant d’inertie (cyclo-ergomètre type Monark®). Pour
      La marche à plat ne fournit aucun travail mécanique car          les cyclo-ergomètres électromagnétiques, il est recommandé
celui-ci dépend du déplacement de la masse contre la gravité           de rester entre 60 et 90 t.min-1. Deux spécificités concernent
(pente). Pour calculer un travail mécanique et une puissance de        les populations extrêmes que nous sommes amenés à évaluer :
travail sur tapis, il faut donc effectuer un exercice avec une pente         1) Même lors du pédalage « à vide » (0 watt affiché), la
(marche ou course) [26]. La dépense énergétique d’un exercice          résistance du cyclo-ergomètre génère un travail mécanique
sur tapis roulant, qui combine en général un déplacement à plat        qui peut représenter une proportion significative de la puis-
puis en pente, correspond alors à la somme de l’énergie néces-         sance maximale des sujets les plus gravement atteints [28, 29]

                                                                                     © 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés      2S119
B. Aguilaniu et coll.

        De même, le travail mécanique interne lié à la mobilisation           pour les anémomètres) et une linéarisation des débits. À l’aide
        des membres inférieurs peut correspondre à un coût métabo-            d’une seringue étalon de 2 ou 3 litres, le technicien ajuste la
        lique d’environ deux fois le métabolisme de repos. Ces coûts          réponse du pneumotachographe au débit généré par la serin-
        métaboliques (Inertie et travail interne) ne sont, par défini-        gue. Il faut suivre la procédure préconisée par le constructeur,
        tion pas comptabilisés en termes de watts-sur l’affichage du          en générant une gamme de débits lents (0,15 à 0,3 L.s-1) et
        cyclo-ergomètre [30].                                                 rapides (10 à 15 L.s-1).
             2) pour des raisons mécaniques, un cycliste de haut                 Étalonnage des analyseurs
        niveau avec une masse corporelle légère (60-65 kg) ne pourra                 Pour étalonner un analyseur de gaz à réponse linéaire,
        développer une puissance élevée (supérieure à 400 watts)              deux mélanges gazeux étalons sont nécessaires. Ils permettent
        qu’au prix d’une fréquence de pédalage supérieure à                   la construction d’une droite de référence à laquelle est
        90-110 t.min-1. Dans ce cas, il ne faut pas imposer la fré-           confronté l’échantillon de gaz afin de déterminer précisé-
        quence de pédalage.                                                   ment les concentrations en O2 et en CO2 du prélèvement
        L’ergospirométrie                                                     analysé (annexe 7). Les concentrations de ces deux mélanges
               L’ergospirometrie permet de mesurer simultanément des          sont choisies judicieusement : elles se situent au niveau des
        débits de gaz et des fractions partielles en O2 et CO2. En pra-       concentrations maximale et minimum que l’on souhaite
        tique clinique, les ergospirométres mesurent ces signaux à            mesurer. Pour des examens réalisés en normoxie, l’air ambiant
        chaque cycle respiratoire pour les moyenner ensuite sur une           pur et sec est un gaz étalon de choix (20,93 % d’O2 et 0,03 %
        période déterminée (15 à 60 secondes). L’utilisation d’une            de CO2). Puisque l’air ambiant est pris comme gaz étalon, on
        chambre de mélange fournit des mesures plus proches de la             comprend qu’il faut maintenir la pièce aérée afin de ne pas
        méthode manuelle de référence utilisant les sacs de recueil des       abaisser la FIO2 surtout lorsque plusieurs tests sont réalisés
        gaz expirés (Sac de Douglas) (Annexe 4). La difficulté techni-        successivement. Le second mélange étalon est un gaz indus-
        que de la mesure « cycle à cycle » est liée à la synchronisation      triel composé de 16 % d’O2 et de 5 % de CO2 ce qui corres-
        des valeurs de débit et des valeurs de fractions partielles du gaz    pond aux concentrations expiratoires, une précision de 2 %
        expiré (cf. infra Les ergospiromètres mesurent des volumes            est alors suffisante. Pour des examens réalisés en hyperoxie, le
        gazeux lors des phases expiratoires, et parfois également lors        gaz étalon sera ajusté aux niveaux de FIO2 administrés.
        des phases inspiratoires). Les grandeurs physiques qui influen-          Permapur®
        cent les volumes des gaz doivent être mesurées tous les jours et            Le gaz respiratoire contient de la vapeur d’eau dont la
        dans la mesure du possible maintenues constantes, au moins            concentration varie en fonction de la phase du cycle respira-
        pendant la durée du test. Ce sont la température ambiante, la         toire. Il est nécessaire de prendre en compte les effets de cette
        pression barométrique et la saturation de l’air ambiant en            fluctuation lors de la mesure des concentrations de CO2 et
        vapeur d’eau (annexe 5 a, b, c, d). Il faut donc une pièce aérée      d’O2. Pour cela, on utilise un tube Permapur® pour transpor-
        avec une température stable au cours de l’année pour minimi-          ter les gaz expirés jusqu’aux analyseurs. Constitué de nafion,
        ser les variations des caractéristiques physiques de l’air de la      ce tube laisse diffuser la vapeur d’eau à travers sa paroi. L’équi-
        salle. Pour respecter la mesure des gaz en condition STPD, il         libration des taux d’humidité des gaz qui l’entourent est ins-
        est impératif de présenter à l’analyseur un gaz déshydraté et         tantanée et les gaz à la sortie du tube Permapur® ont le taux
        donc de changer avant chaque test le tube « permapur® » qui           d’humidité de l’air ambiant. Ce tube très fragile doit être
        assure le transport du gaz en absorbant la vapeur d’eau               manipulé avec précaution. Il ne doit pas être pli é ni coudé, et
        (cf. paragraphe Mesures et Calculs).                                  doit être changé après chaque épreuve. Toute altération de ce
            Pneumotachographe                                                 tube (obstruction partielle) fausse la mesure des gaz par allon-
               Le pneumotachographe est un débitmètre qui mesure la           gement du temps de transit du gaz et par une variation de la
        vitesse instantanée des gaz respirés par le sujet à travers un con-   pression dans le circuit de l’analyseur. Dans ce cas, les mesures
        duit calibré. Il est important d’observer scrupuleusement le          sont le plus souvent sous-estimées, l’erreur portant à la fois sur
        montage mécanique et la procédure d’étalonnage préconisée             l’analyse de l’O2 et du CO2. Les erreurs de mesure de VO2 et
        par le constructeur. Les capteurs usuels déterminent le débit         VCO2 sont le plus souvent dues à des erreurs portant sur les
        du gaz en fonction d’une mesure de pression différentielle            fractions expirées des gaz. Le tableau III illustre l’ampleur de
        (Fleisch, Lilly, diaphragme, lamelle, Pitot, Venturi), du refroi-     ces imprécisions sur le résultat final.
        dissement d’un fil chaud (débitmètre de masse), d’une diffé-                Pour réaliser un étalonnage correct, les opérations sui-
        rence de temps de parcours des ultrasons ou d’une vitesse de          vantes seront scrupuleusement respectées.
        rotation d’un anémomètre (annexe 6) [31-34]. Chez l’homme,                  1) Introduire tous les jours, dans l’ergospiromètre les
        la gamme de débit au cours de l’exercice se situe entre 0 et          données de pression barométrique, température ambiante et
        15 L.s-1. L’utilisation d’un capteur unique nécessite une cor-        saturation en vapeur d’eau. Les modifier dans la journée en
        rection informatique de sa réponse. Cette procédure comporte          cas de forte variation climatique.
        deux phases : une correction du bruit de fond du capteur                    2) Avant chaque épreuve, changer le pneumotachogra-
        (offset), le plus souvent automatique (elle n’est pas nécessaire      phe et le tuyau Permapur®.

2S120   Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 2S111-2S160
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