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as de pole position pour les médecins P et les hôpitaux Page 4 La loi sur la qualité du Conseil fédéral – exigences et effets Page 8 dialogue place au Nous sommes bons. Non? En ligne de mire: la qualité du système de santé Numéro 1 / 2014
Echo Vladimir Ilitch Lénine La classe Académie Suisse des Sciences Médicales plutôt que Des études? la masse Où? «Je demande sans relâche: non «De nombreux procédés médicaux multa, sed multum. Mieux vaut moins en vigueur depuis longtemps n’ont mais mieux.» toujours pas fait l’objet d’études politicien et révolutionnaire russe démontrant leur bénéfice.» (1870-1924) Feuille de route «Médecine durable», décembre 2012 Felix Schneuwly, Head of Public Affairs Comparis Prestation (ne) compte (pas) «Aucun hôpital ni aucun cabinet médical n’est fermé parce que ses prestations sont insuffisantes.» Handelszeitung, 7 mai 2013 Heinz Locher, économiste de la santé Chambre noire Conseil fédéral «Jusqu’ici, les hôpitaux et les médecins ont empêché avec Concurrence? succès la publication de don- nées sur la qualité. Le système Que nenni! de santé est la chambre noire de la nation.» Neue Luzerner Zeitung, 18 août 2014 «Il n’existe pas de réelle concurrence en termes de qualité, laquelle pourrait avoir un impact positif sur la qualité des traitements et les coûts.» Rapport «Santé 2020» du Conseil fédéral
Editorial/Sommaire Suivez-nous aussi sur Twitter: twitter.com/CSSPolitik Sommes-nous Riccarda Schaller est cheffe les meilleurs? Politique de la santé de la CSS riccarda.schaller@css.ch Table des matières «Encore un nouveau magazine!», êtes-vous peut-être en train de vous dire. «Mais quel magazine!», aurais-je envie 4 La qualité du système de santé de rétorquer. Car avec sa nouvelle publication «place au Pas de pole position pour les médecins dialogue», la CSS ne voudrait pas se limiter à ajouter un titre et les hôpitaux à la longue liste des publications dans le domaine de la 7 Point de vue santé. Elle entend plutôt examiner sous différents éclairages «Qualité: la CSS y a tout intérêt» des thèmes essentiels du système de santé suisse, et sur- tout en discuter. Aller au fond des choses au lieu de rester 8 Contexte à la surface, telle est notre ambition. Nous consacrons La loi sur la qualité du Conseil fédéral– le premier numéro au thème de la qualité, qui est pour ainsi exigences et effets dire la pièce maîtresse de tout système de santé. La Suisse 10 Pratique a le meilleur système de santé du monde, aime-t-on à Qu’apporte vraiment la publication rappeler souvent. Mais qu’en est-il vraiment de la qualité? d’indicateurs de qualité? Est-elle mesurable et comparable? Et qu’en est-il de la transparence? Ce sont autant de questions, parmi d’autres, Un autre regard 11 sur lesquelles nous nous pencherons aux pages suivantes. Tu es ce que tu manges En Suisse, le débat sur la politique de la santé se limite trop 12 n en parle O souvent à la question des coûts. Et dans l’assurance de «L’idéal selon moi, ce serait une sorte base, les assurances-maladie sont tenues de prendre en de TripAdvisor pour les hôpitaux» charge les prestations, même si la qualité nécessaire n’est Personnel 16 pas attestée de manière transparente dans tous les cas. De l’importance des patients satisfaits Pourtant, dans un système où de (très) nombreux presta- taires font la même chose précisément, la qualité devrait 18 Santé! devenir un facteur concurrentiel déterminant. Et la concur- «Un acte de solidarité» rence pourrait contribuer à ralentir un peu la spirale des 19 Science dépenses que connaît le système de santé. La gestion du risque clinique dans les hôpitaux suisses J’espère que vous apprécierez notre nouvelle publication. Mentions légales Paraît trois fois l’an en allemand et en français. Editeur: CSS Assurance, Tribschenstrasse 21, CH-6002 Lucerne, e-mail: dialog@css.ch, internet: www.css.ch, rédacteurs en chef: Riccarda Schaller et Roland Hügi; collaboration rédactionnelle, production et graphisme: Infel Corporate Media, Claudia Sebald (texte) et Franziska Neugebauer (art direction) | Crédit photos: màd, Keystone/Gaëtan Bally, Zeljko Gataric, Grafilu, iStock/ inakiantonama, getty/Simon Greenwood | Retouche photos: n c ag, 8902 Urdorf | Impression: Kromer Print AG, 5600 Lenzburg. Cette publication est entièrement financée avec des fonds provenant des affaires d’assurance complémentaire (LCA). place au dialogue 1/2014 3
La qualité du système de santé Pour ce qui est de la qualité des soins médicaux en Suisse, cela ne marche pas très fort. Il est question de milliers de décès et de dizaines de milliers de complications, tous évitables. La réaction des hôpitaux, des médecins et des autorités est tiède. Par Urs P. Gasche Hôpitaux et médecins: pas de pole position L es crashes d’avion ou les accidents de reux de produits thérapeutiques selon les estimations train font la une des journaux. Leurs de Gerd Kullak, professeur en pharmacologie clinique causes sont analysées et les mesures de à l’Hôpital universitaire de Zurich. Ce n’est pas toujours sécurité renforcées. Dans notre percep- la douleur effective qui détermine les examens, diag- tion, de tels événements représentent nostics et traitements à suivre, mais le choix aléatoire un plus grand danger que les risques du médecin. La revue des consommateurs «Scelgo Io» qui font «uniquement» des victimes au fil du temps, rapporte que pour le même problème de peau, une comme dans les hôpitaux et les cabinets médicaux. patiente tessinoise a consulté dix dermatologues. Trois Environ 5000 personnes décèdent ainsi chaque année d’entre eux ont examiné les pellicules, deux ont effec- des suites d’une erreur commise dans un hôpital pour tué des tests de sang et d’allergie, l’un d’eux a diagnos- soins aigus. A celles-ci viennent s’ajouter les 120 000 tiqué une mycose et prescrit une pommade antifon- patients qui subissent une atteinte à leur santé à cause gique, un autre a prescrit une pommade cicatrisante et de leur hospitalisation, doivent être réopérés ou suivre quatre autres une crème hydratante. L’un d’eux a par un traitement complémentaire. ailleurs prescrit en plus une préparation à base de fer. Quand de nombreux cabinets médicaux avec «La moitié des nuisances pourrait être évitée» chirurgiens sont implantés dans une région, les pa- Ce nombre important de victimes est dû aux infec- tients atterrissent plus souvent en salle d’opération. tions contractées à l’hôpital, aux erreurs de traite- Ainsi, les Tessinois étaient comparativement opérés ment, à une médication incorrecte, à des diagnostics plus rarement du cœur. Toutefois, depuis que des car- erronés ou tardifs, de même qu’à des erreurs de soins. diologues et des chirurgiens cardiaques ont ouvert L'OFSP résume le sérieux de la situation en ces termes: un centre de cardiologie en 1999, les interventions au «Un patient hospitalisé sur dix subit une atteinte à sa niveau du cœur – avec tous les risques qu’elles com- santé et la moitié de ces événements indésirables se- portent – sont beaucoup plus fréquentes au Tessin rait évitable.» Ce sont 2000 à 3000 décès et près de que dans la plupart des autres cantons – sans utilité 60 000 cas de nuisance qui pourraient être évités avérée. Dans le canton de Fribourg, les femmes de chaque année. Ces nombreuses 60 ans sans utérus sont presque victimes ne font pas la une des deux fois aussi nombreuses journaux. Pour elles, il n’y a pas de que dans le canton des Grisons. pression publique. D’où l’idée que En bref les politiques, les autorités et les «Difficile de trouver responsables des hôpitaux n’en font • Un patient hospitalisé sur un système de santé pas assez pour améliorer la sécurité. dix subit une atteinte à sa équivalent» santé, et la moitié de ces Notre pays s’offre les soins de Les risques existent aussi en événements domma- santé les plus chers d’Europe, dehors des hôpitaux geables serait évitable. mais pas les meilleurs. Ceux qui Les cabinets médicaux et les en vivent s’empressent de cla- EMS ont leur part de responsabi- • Alors qu’il le pourrait, le mer que la Suisse se classe en lité. Cinq admissions hospitalières tête. La Société zurichoise des Conseil fédéral n’exige sur cent sont dues à des erreurs médecins-chefs a justifié les aucun contrôle scienti- de prescriptions de médicaments. coûts élevés en expliquant que Les décomptes de caisses-mala- fique systématique pour notre système de santé était l’un die montrent que 150 000 patients garantir la qualité. des meilleurs au monde, sinon suivent plus de vingt traitements le meilleur. Elle faisait bien ré- médicamenteux à la fois. Plus de • Pendant que plusieurs férence à l’offre: selon l’OCDE, 5000 d’entre eux meurent chaque pays européens cherchent nous avons chez nous un année à cause d’un mélange dange- à parfaire la qualité de quart de médecins en activité leurs soins, nous en sommes encore à ergoter 4 place au dialogue 1/2014 sur les coûts de la santé.
La qualité du système de santé Des hôpitaux trop nombreux avec une pratique insuffisante Cliniques spécialisées, Hôpital général, prise en charge centralisée Hôpital général, prise en charge centralisée 1 universitaire), nb. 5 (niveau 1, hôpital (niveau 4), nb. 32 (niveau 5), nb. 33 (niveau 3), nb. 21 (niveau 2), nb. 25 Hôpital général, Hôpital général, Hôpital général, 2 Nombre de cas soins de base soins de base soins de base nb. 35 3 4 3 7 7 Attaque cérébrale, toutes les 5 13 15 18 3 093 formes, âge 45-64 9 14 21 32 1 1 3 2 4 12 Ablation de la vésicule biliaire (sans tumeur) 5 18 13 12 11 20 11 531 24 18 7 1 1 1 3 5 6 4 22 8 Ablation de la glande thyroïde 5 15 9 7 3 400 22 26 13 21 1 2 2 3 4 OP laparoscopique/vaginale 2 3 12 en cas d’ablation de l’utérus 5 10 16 9 22 7 511 (sans chirurgie plastique) 21 17 18 4 1 2 2 2 22 3 7 Résection mammaire en cas 11 de cancer du sein 5 10 11 15 11 20 7 469 20 18 9 1 11 4 2 3 3 4 3 10 6 Résection prostatique transurétrale (TURP) 5 18 4 25 9 993 17 6 22 16 11 1 22 Première implantation d’EPT de 11 12 hanche (pas en cas de fracture) 4 23 21 21 7 3 14 14 17 452 7 2 5 11 1 3 2 11 16 902 Première implantation 13 15 14 21 6 d’EPT de genou 21 4 23 7 2 4 2 4 4 5 2 9 18 240 2 13 12 2 16 OP de la colonne vertébrale 5 10 17 2 5 25 8 5 2 2 1 1 3 1 1 2 4 7 6 Fracture du col du fémur, 2 13 11 9 1 144 âge 85-89 19 2 17 25 28 Nombre d’hôpitaux avec au moins un cas par semaine (≥52 cas) Nombre d’hôpitaux avec moins d’un cas par semaine (12-51 cas) Nombre d’hôpitaux avec moins d’un cas par mois (
La qualité du système de santé n’a pas été mandatée par le législateur. Les différents effets incitatifs expliquent entre autres pourquoi les Pays-Bas, en proportion de la population, n’ont besoin En Suisse, que d’un quart des hôpitaux de la Suisse. Les Néer- 5000 personnes landaises et Néerlandais doivent aller moins souvent à décèdent chaque année des suites l’hôpital, se font opérer plus rarement et s’exposent de d’une erreur dans un ce fait à moins de risques. L’espérance de vie et l’état hôpital pour soins aigus. de santé de couches sociales comparables sont iden- tiques dans les deux pays. La Suisse fait moins bien que ses pays voisins En Suisse, les surenchères des traitements sans utilité réelle sont trop nombreuses. De plus, pendant leur hospitalisation, les patients sont exposés à des risques 15 000 plus importants. Chez nous, les infections sont plus fré- maladies infectieuses quentes qu’aux Pays-Bas, en Allemagne ou en France. pourraient être évitées grâce Chaque année, près de 600 décès et 15 000 mala- à des meilleurs standards d’hygiène. dies infectieuses pourraient être évités si les normes d’hygiène minimales étaient respectées dans les salles d’opération. Ce constat ressort d’une enquête réalisée par Swissnoso, un groupe de spécialistes de l’hygiène et des infections hospitalières. Sur un total d’environ de plus par habitant que dans les autres pays indus- 9700 opérations de l’intestin réalisées chaque année, trialisés, et nous battons des records en termes d’équi- près de 400 infections en moins pourraient se pro- pement technique spécialisé tel qu’IRM, scanner, etc. duire si la qualité des traitements dispensés en Suisse était au moins aussi bonne qu’en Allemagne, et si elle Les traitements inutiles sont lucratifs pour atteignait le niveau des hôpitaux français, il y en aurait les médecins même 500 de moins. Swissnoso a expliqué que ces Ce qui intéresse les patients: la rapidité et la durabilité valeurs étaient une vérité statistique inébranlable. de leur guérison, ou la manière de maîtriser au mieux leurs maladies chroniques. La plupart des médecins L’échec des autorités fédérales font de leur mieux, mais il n’en demeure pas moins que Le risque d’infections, de traitements post-stationnaires leurs revenus dépendent de la fréquence à laquelle ils non planifiés ou d’erreurs de médication peut être cinq examinent, traitent et opèrent. Les tests diagnostiques, fois plus élevé dans un hôpital que dans un autre. Le traitements, voire même complications inutiles, font problème, c’est que nous ne savons pas dans lequel. gonfler leurs comptes bancaires. A l’inverse, les bons Les résultats des traitements ne sont toujours pas col- médecins qui ne font que ce qui est utile et assure lectés à des fins de comparaison, et quand ils l’ont été, donc la guérison sont moins bien lotis financièrement. comme pour les infections, les chiffres des différents Dans la plupart des autres pays, les médecins spécia- hôpitaux n’ont pas été communiqués publiquement. Il listes sont rémunérés selon leur temps de présence. y a très longtemps que les données complètes sur les Quand ils expliquent à une patiente les avantages et les résultats thérapeutiques devraient être accessibles sur risques d’une intervention, ils gagnent autant que s’ils internet. En 1996, la loi sur l’assurance-maladie (LAMal) opéraient. Chez nous, les mauvaises incitations sont a octroyé au Conseil fédéral la compétence de «prévoir un sujet tabou, même pour les hôpitaux. Leurs pro- des contrôles scientifiques et systématiques pour ga- fits se portent mieux s’ils dressent des diagnostics plus rantir la qualité». Pour ces contrôles, il aurait pu exiger compliqués qu’il ne le faut, qu’ils dispensent des traite- la saisie homogène de données sur les résultats théra- ments plus coûteux et qu’ils se précipitent pour opé- peutiques. Depuis 2009, les hôpitaux sont même tenus rer au lieu d’attendre. De plus, comme les forfaits par de fournir des statistiques sur la surveillance de la qua- cas ne couvrent que les frais hospitaliers, les hôpitaux lité. Pourtant, malgré les 5000 personnes qui décèdent n’ont aucun intérêt à suivre le rétablissement des pa- chaque année des suites d’une erreur commise lors de tients après leur sortie. D’où l’absence de transparence leur hospitalisation, et malgré les 120 000 personnes sur les hôpitaux qui soignent le mieux leurs patients. qui subissent une atteinte à la santé, le Conseil fédé- Aux Pays-Bas, en revanche, les forfaits par cas ral n’a pas eu le courage de s’imposer contre les lobbys englobent tous les coûts, même après la sortie de des hôpitaux et des médecins et d’exiger des données l’hôpital, jusqu’au rétablissement définitif. Les hôpitaux comparables. Ce n’est pas un bon présage pour ceux ont tout intérêt à ce que leurs patients retrouvent vite qui, avec une caisse unique, misent sur une médecine la forme, c’est pourquoi ils cherchent les meilleures plus étatique. Une concurrence réglementée telle que solutions pour les soins consécutifs et la rééducation. celle des Pays-Bas améliorerait rapidement la qualité. Il Les résultats définitifs du traitement sont évalués et faudrait pour cela que les caisses disposent de la liberté comparés. En Suisse, la Suva est la seule à posséder de contracter. ces données sur les patients. Elle pourrait commu- niquer sans autre quelles équipes thérapeutiques de Des chiffres même pas comparables quels hôpitaux sont les plus efficaces pour soigner les Si les chirurgiens et les équipes hospitalières ne réa- victimes d’accidents. Pourtant, la Suva n’exploite pas lisent que rarement une opération donnée, et qu’ils ses données, sans doute pour des considérations poli- pratiquent trop peu, il peut en résulter des réopéra- tiques. Elle cherche des excuses en affirmant qu’elle tions, des hémorragies, des infections de plaies, ou au 6 place au dialogue 1/2014
Point de vue Le système de santé suisse a besoin d’un changement de paradigme: la qualité doit devenir un facteur central. «Qualité: la CSS y a tout intérêt» On dirait que de nombreux acteurs du responsable. Malgré tout, l’intérêt de système de santé ont peur du thème de la l’assurance-maladie pour les indicateurs qualité. Est-ce aussi le cas de la CSS? de qualité et leur mesure auprès du corps L’absence de transparence sur la qualité médical a pour effet qu’elle se préoccupe Dr Christian Affolter est reflète en priorité un problème culturel: la de plus en plus des questions de qualité. responsable Public Affairs Structures peur que la transparence soit faite sur sa tarifaires de la CSS propre activité ou que les critères de qualité On parle souvent de traitements inutiles, christian.affolter@css.ch ne soient utilisés abusivement pour imposer qui sont coûteux et au pire des cas, qui des mesures politiques, structurelles et portent atteinte au patient. Quelle est relatives aux prix. Un changement culturel l’attitude de la CSS sur cette question? rapide s’impose donc: la qualité doit devenir La surabondance de l’offre et les traite- un facteur prépondérant dans le système ments non indiqués posent problème de santé suisse. La CSS y a tout intérêt. Car sur le plan des risques et des coûts. Ils une bonne qualité de traitement se réper- résultent des mauvaises incitations. Ceux cute immédiatement sur les patients, et qui multiplient les actes gagnent plus. finit aussi par avoir un impact positif sur les Ceux qui effectuent des prestations de dépenses de santé et donc les primes. mauvaise qualité ne sont pas sanctionnés. Mais les patients ne sont pas non plus En quoi la CSS contribue-t-elle à amélio- tout à fait innocents, car souvent, ils récla- rer la qualité des traitements médicaux? ment un traitement en l’absence de Dans le système de santé suisse, c’est toute indication contraignante. La CSS se le libre choix qui prédomine, et en fin de mobilise pour les patients: les tarifs et compte, l’assurance de base doit sup- contrats négociés doivent récompenser la porter les coûts indépendamment de la qualité, et pas la quantité. Les presta- qualité. D’où toute la difficulté, pour tions doivent être examinées à grande une assurance-maladie, d’influer directe- échelle quant à leur bénéfice, et les ment sur la qualité du traitement, dont deuxièmes avis médicaux sur des inter- le fournisseur de prestations est le seul ventions sont encouragés. pire des cas de décès. Il y a plusieurs années déjà, le Au total, 3400 opérations ont été réparties entre 98 hô- «British Medical Journal» constatait que pour de nom- pitaux (se reporter au graphique de la page 5). breuses opérations, afin de réduire les risques, il ne faut pas seulement un chirurgien qui opère beaucoup, Tolérance zéro mais aussi un hôpital qui opère beaucoup. Aux Pays- Il y a sept ans, l’Ecosse a lancé un programme national Bas, les caisses-maladie ne sont pas dans l’obligation d’éradication de toutes les erreurs médicales et hospi- de prendre en charge des opérations d’un hôpital qui talières évitables. D’ici 2015, seulement cinq patients sur en pratique trop rarement. Il s’agit d’un moyen efficace cent doivent subir une atteinte à leur santé durant leur pour inciter les hôpitaux à se spécialiser. hospitalisation, soit une proportion inférieure de moi- En Suisse, le Conseil fédéral n’a pas encore demandé tié à celle enregistrée en Suisse. Pendant que l’Ecosse une seule fois à ce jour un dénombrement des opéra- et d’autres pays travaillent à l’amélioration de la qualité tions par établissement hospitalier. L’OFSP compare de leurs soins, nous en sommes encore à ergoter sur les chiffres de certains hôpitaux avec ceux de groupes les coûts. Pourtant, les hôpitaux, les médecins et les hospitaliers entiers. Néanmoins, ils sont déjà assez alar- autorités ne devraient plus tolérer que les traitements mants. Deux exemples: ablation du pancréas: en Suisse entraînent autant de blessés et de morts évitables. alémanique, 19 hôpitaux ou groupes hospitaliers ont Comme pour les crashes d’avion, il faut apprendre de réalisé moins de dix fois cette intervention délicate en ses erreurs. Les collectes de données facultatives, la 2012. Au total, 700 opérations ont été réparties entre volonté d’égard et de ménagement, ainsi que l’absence 50 hôpitaux. Ablation totale ou partielle de la glande de communication sous le couvert de la protection des thyroïde: cette opération comporte le risque de blessure données, traduisent une irresponsabilité totale. d’un ou des deux nerfs de la corde vocale. Selon l’hôpi- tal, le risque peut varier entre 1:50 ou 1:200, comme le montrent les chiffres de l’étranger. En 2012, 38 hôpitaux — Urs P. Gasche est publiciste et rédacteur spécialisé dans ont effectué cette opération moins de dix fois par année. les questions de santé sur la plateforme Infosperber.ch. place au dialogue 1/2014 7
Contexte Avec la nouvelle loi, le Conseil fédéral veut optimiser la qualité du système de santé. Une proposition qui a un grand potentiel ou plutôt une chimère? Analyse succincte. Par Matthias Schenker Loi sur la qualité du Conseil fédéral: les exigences et les effets de données. Les données sur la qualité sont plutôt rares. Quand elles existent, elles manquent souvent de transparence, soit parce qu’elles ne peuvent pas être comparées, soit parce qu’il n’y a pas de volonté de les publier. Or, dans le système de santé préci- Matthias Schenker est sément, des données sur la qualité transparentes directeur adjoint Politique de devraient jouer un rôle prépondérant. la santé de la CSS matthias.schenker@css.ch Les bases d’une concurrence efficace Cela est donc clair: il est nécessaire de disposer de P données transparentes, pertinentes et compara- tives sur la qualité des prestations. Les patientes et our ce qui est de l’espérance de vie et patients s’en serviront comme d’une base précieuse des autres indicateurs de santé, la Suisse pour prendre des décisions fondées lors du choix est dans le peloton de tête en comparai- d’un fournisseur de prestations, ainsi que lors de son mondiale, comme le montrent entre l’acceptation ou du refus d’un traitement. De leur autres les chiffres de l’OCDE. Le devons- côté aussi, les fournisseurs de prestations et les assu- nous à la qualité médicale et des soins du système reurs ne peuvent se passer de données de qualité. Ce de santé suisse? On peut le supposer, mais cela reste n’est que de cette manière qu’ils peuvent convenir difficile à prouver. ensemble d’une rémunération loyale et économique des prestations. Car dans un système concurrentiel Le manque de données et de transparence efficace, les prix remboursés devraient non seule- Pour étayer une telle affirmation, il faudrait dispo- ment être déterminés en fonction du benchmarking ser de données concrètes sur la qualité des résul- des coûts, mais aussi de celui de la qualité. tats (outcome) des prestations médicales fournies. Il existe certes (depuis peu) des données corres- Les objectifs incontestés du Conseil fédéral pondantes dans certains domaines de prestations – Compte tenu des déficits existants, le Conseil fédé- entre autres grâce à l’Association nationale pour ral a mis en consultation la loi fédérale sur le centre le développement de la qualité dans les hôpitaux pour la qualité dans l’assurance obligatoire des soins. et les cliniques (ANQ). Néanmoins, dans de vastes Le Parlement étudiera probablement le projet en pans du système de santé suisse, notamment dans 2015. Les objectifs formulés dans le projet consul- le domaine ambulatoire, la recherche de données tatif sont logiques et cohérents. Dans l’assurance sur la qualité s’apparente à la traversée d’un désert de base, le Conseil fédéral demande entre autres la 8 place au dialogue 1/2014
Contexte La loi sur la qualité à elle seule est loin de garantir que les grandes exigences en matière de qualité se refléteront dans la réalité. «promotion de la transparence concernant la qualité décisionnelle. Si les bases élaborées par le centre rela- et l’adéquation des prestations». La promotion de la tives à la qualité et à l’évaluation de technologies de la sécurité des patients et la mise à disposition de bases santé ne se reflètent pas dans la pratique des parte- scientifiques systématiques pour l’appréciation des naires contractuels et de l’OFSP, les objectifs de la loi technologies de la santé sont tout à fait judicieuses ne seront pas atteints. aussi. Car dans le domaine de l’évaluation résolue de l‘efficacité, de l’adéquation et de l’économicité des Ainsi, la responsabilité incombe aussi bien aux four- prestations médicales précisément, les politiques ont nisseurs de prestations qu’aux assureurs et à l’OFSP. également constaté des manques importants.* Ils doivent tous intégrer à titre obligatoire les bases élaborées dans leur activité opérationnelle. En consé- Il ne suffit pas de créer un centre quence, le centre peut et doit uniquement remplir une Les tâches et les objectifs du centre pour la qualité pré- fonction d’assistance. C’est pourquoi il est judicieux vu sont donc clairement définis dans la loi et traduisent d’impliquer à un stade précoce déjà les parties pre- un besoin important. Néanmoins, ces buts ne pourront nantes mentionnées dans les travaux du centre. Cela pas être atteints grâce aux seules activités du nouveau augmentera son ac- centre pour la santé. Cela ne tient pas au centre plani- ceptation et l’im- fié en tant que tel ou à ses responsabilités, mais plutôt pact de ses activi- Les parties prenantes au fait qu’avec la nouvelle loi, rien ne change par rap- tés. Un financement doivent pouvoir collabo- port à la répartition actuelle des compétences. Dans paritaire du centre le domaine de la qualité, il appartient toujours aux est par ailleurs obli- rer à un stade précoce. fournisseurs de presta- gatoire. Les coûts tions d’élaborer les indi- ne doivent pas seulement être supportés par les En bref cateurs correspondants payeurs de primes, mais aussi par les institutions res- et de convenir de leur ponsables, tout au moins en ce qui concerne les tra- • Les objectifs de la loi sont vérification avec les par- vaux élémentaires sur la qualité. L’évaluation des tech- logiques et cohérents. tenaires contractuels, à nologies de la santé doit rester une tâche financée par savoir les assureurs. En la Confédération, conformément à la proposition. • Le centre pour la qualité à ce qui concerne la ges- lui seul ne peut atteindre tion des prestations à la les objectifs. charge de l’assurance de base, l’Office fédé- * CdG-N, Inspection «Détermination et contrôle des ral de la santé publique prestations médicales dans l’assurance obligatoire des • C’est pourquoi les four- (OFSP) reste l’institution soins». Lettre au Conseil fédéral, 26.1.2009 nisseurs de prestations et les assureurs doivent mettre en œuvre les bases élaborées. place au dialogue 1/2014 9
Pratique La collecte de données sur la qualité du système de santé suisse s’impose de toute urgence. Pourtant, sans les conditions cadres correspondantes, nous risquons de nous retrouver face à un cimetière de données non interprétables. Par Michael Schlander Qu’apporte vraiment la publication d’indicateurs de qualité? S elon la «NZZ» du 23 juillet 2009, une main ne sait pas ce que l’autre fait dans le sys- tème de santé suisse. La plus grande trans- parence possible est donc demandée. Elle doit être obtenue par la collecte et la publi- cation d’indicateurs de qualité adéquats. Dans le sys- tème de santé suisse, le thème de l’assurance-qualité expériences dans d’autres pays montrent toutefois que ceux-ci utilisent essentiellement des facteurs tels que la disponibilité et les prestations hôtelières comme base décisionnelle pour choisir un hôpital. Les autres bénéficiaires sont les médecins prescripteurs, les hôpi- taux, les organismes de paiement, ainsi que les pou- voirs législatif et exécutif. Pour leurs décisions, ils ne n’est pas nouveau, puisqu’il est ancré depuis 1996 déjà peuvent se passer de données fiables. Il se pose le dans la LAMal et l’OAMal. Depuis 2009, «les fournis- problème des mauvaises incitations et des possibilités seurs de prestations doivent communiquer aux auto- de manipulation; les mots-clés dans ce contexte sont: rités fédérales compétentes les données qui sont né- les sorties prématurées pour réduire les complications cessaires pour surveiller l’application des dispositions et la létalité devant faire l’objet d’un rapport, le trans- de la présente loi relatives au caractère économique fert des patients à haut risque, le non-engagement de et à la qualité des prestations». En 2009 aussi, l’ASSM procédures risquées, mais indiquées, la réduction du (Académie Suisse des Sciences Médicales) a publié une traitement et la manipulation des données. prise de position au sujet de la collecte, de l’analyse et de la publication de données sur la qualité des traite- Compétition pour la meilleure qualité possible ments médicaux. Une idée est centrale, celle que la concurrence permet d’atteindre la meilleure qualité possible, qui débouche Le risque d’un cimetière de données au final sur des modèles de rémunération axés sur les Pour l’essentiel, l’assurance-qualité consiste à compa- résultats. Les expériences pratiques en rapport avec les rer la situation prévisionnelle et celle réelle. Sans norme modèles correspondants nous viennent surtout des de référence, la collecte d’indicateurs de qualité dé- Etats-Unis et d’Angleterre. Les données sur les effets bouche sur un cimetière de données non interpré- manquent de clarté au niveau international et ont à tables. C’est pourquoi il est bon, sur le principe, que la plusieurs reprises abouti à la conclusion que la publica- Confédération prépare la création d’un «Centre pour tion de données sur la qualité n’a aucune conséquence la qualité dans l’AOS», qui doit aussi avoir la compé- positive pouvant être démontrée, et que par consé- tence de réaliser les Health Technology Assessments quent, la concurrence au niveau de la qualité n’est pas (HTA). Car seules des normes s’appuyant le mieux porteuse de manière générale. Le modèle «Pay for Per- possible sur des faits sont de nature à servir d’ossa- formance» va encore plus loin par rapport à la compé- ture pour une amélioration et une garantie durables tition qualitative, car au lieu des incitations purement de la qualité dans le système de santé. Pourtant, la immatérielles, il crée des incitations financières pour Confédération veut plus, elle demande précisément l’amélioration des indicateurs de qualité. Ici encore, la la «promotion de la transparence concernant la qua- situation en matière de données est hétérogène. For- lité et l’adéquation des prestations». Il se pose ainsi mulé autrement, l’état des connaissances scientifiques la question de savoir qui profite de la transparence. internationales en faveur de l’impact des indicateurs de D’emblée, nous penserions en effet aux patients. Les qualité publiés ne correspond pas (encore) aux normes reconnues de la médecine fondée sur les données probantes. Cela ne devrait pas empêcher d’exploiter les opportunités qui existent pour garantir la qualité du système de santé, mais contribuer à une évaluation réaliste du potentiel, de façon à prévenir les déceptions ultérieures liées à des attentes exagérées. La garantie de la qualité dans la — Médecin et économiste, le Professeur Michael Schlander, fourniture de prestations est MBA, est économiste de la santé à l’Université d’Heidel- berg et à la Hochschule für Wirtschaft, et président fonda- ancrée dans la loi teur de l’institut d’utilité publique, Institute for Innovation depuis 1996 déjà. & Valuation in Health Care (InnoValHC), à Wiesbaden. 10 place au dialogue 1/2014
Un autre regard Bien cuisiner, c’est une question d’aptitude. Un bon cuisinier doit sans aucun doute maîtriser toutes les règles de l’art culinaire. Pourtant, cela ne suffit pas. Quel est donc le secret de la haute cuisine? Et pourquoi la qualité paie-t-elle? Par Irma Dütsch Tu es ce que tu manges P our qu’un mets soit excellent, il faut plus le boucher, le fromager et le vigneron jouent un rôle qu’une bonne recette. La cuisine est une tout aussi important pour la qualité des mets. Ils ont passion. Elle nécessite de l’amour, du de larges connaissances dont nous bénéficions en tant temps et de la patience. C’est pareil pour que cuisiniers. Ces échanges de connaissances et cet manger. Quand on ne prend pas le temps examen des produits locaux prennent du temps, mais et que l’on ne consomme que des plats cuisinés, on la précipitation est incompatible avec la qualité. ne sait même plus reconnaître le goût d’un bon repas. Dans mon métier, le contrôle qualité est immédiat: Pourtant, rien n’importe plus qu’une alimentation de quand le client paie l’addition, on sait tout de suite qualité et ayant bon goût. Car les aliments vont dans s’il paie de bon cœur. Et il n’y a rien de plus beau que notre corps, ils sont notre corps. Ainsi, nous sommes des clients satisfaits. Pour cela, le prix doit concorder effectivement ce que nous mangeons. avec la qualité. Je demande souvent à mes cuisiniers: Pour qu’une cuisine soit excellente, différents fac- «Serais-tu prêt à payer ce prix pour le plat que tu es en teurs sont déterminants: le produit, la manière de le train de faire servir?» Un bon cuisinier doit avoir des cuisiner et de le mettre en valeur par l’assaisonne- contacts avec ses clients. ment, les arômes. Sans oublier le cuisinier, qui doit Ces derniers doivent sentir être capable de transformer ses composantes en une qu’ils sont importants pour La cuisine, c’est création harmonieuse. Pour la haute cuisine, d’autres lui. Cela aussi, c’est un cri- le savoir, l’habileté, éléments sont également importants, qui n’ont soi- tère de qualité. Nous devons disant rien à voir avec la cuisine: la manière dont le être contents d’accueillir la vision et la per- client est accueilli, dont la table est décorée et dont nos clients, et tout doit être sonnalité. les verres sont placés a une influence sur la qualité. La transparent. Pas seulement manière dont les mets sont présentés dans l’assiette sur la provenance des produits, mais aussi sur notre en fait aussi partie, car le regard participe également personnalité. Cela crée la confiance. Car comme je l’ai au repas. En bref, les détails sont l’une des clés d’une dit, il n’y a rien de plus intime que la nourriture. Tu es cuisine excellente. ce que tu manges. Les ingrédients ont eux aussi une importance fon- damentale. Un mets n’aura que la qualité des ingré- dients qui le composent. Il est donc préférable de choisir des produits — Irma Dütsch fait indiscutable partie saisonniers, qui sont frais et du En bref des meilleures toques de Suisse. Elle pays. Par chance, la Suisse a quatre a grandi à Gruyères dans une famille • Ne jamais perdre de de paysans. Petite déjà, elle voulait saisons. Quand le printemps arrive, vue les détails. Un devenir cuisinière et a été la première nous nous réjouissons de retrou- tout est toujours fille de Suisse à apprendre ce métier. ver les asperges, l’ail des ours et les Pour son art culinaire, Irma Dütsch composé d’un en- fraises. Qui aurait donc envie de a entre autres été récompensée par choucroute au safran avec scampi semble d’éléments une étoile au guide Michelin et a reçu en été? En hiver toutefois, c’est un isolés. 18 points au Gault & Millau. Pendant plat excellent. Un bon cuisinier se 30 ans, elle a dirigé avec son mari le • La qualité nécessite restaurant Fletschhorn à Saas-Fee. laisse inspirer par l’offre et les mar- Aujourd’hui, elle travaille en tant chés locaux. Ainsi, il connaît encore du savoir, beaucoup que consultante, écrit des livres et ses fournisseurs et producteurs. Ce de savoir, et du temps. intervient en tant qu’invitée dans des contact personnel est essentiel, car émissions de cuisine. • La qualité n’est pas un luxe superflu. Elle est payante. place au dialogue 1/2014 11
On en parle Une plus grande transparence est-elle nécessaire sur les questions de qualité? Guido Graf, directeur de la santé dans le canton de Lucerne, et Nello Castelli, secrétaire général du Genolier Swiss Medical Network, en débattent. Interview réalisée par Patrick Rohr «L’idéal selon moi, ce se- rait une sorte de TripAdvisor pour les hôpitaux» Avant de commencer et pour que nous lité doit pouvoir être déterminée selon des parlions bien de la même chose: normes claires.» comment définiriez-vous la notion de «qualité», vous Monsieur Castelli en Vous êtes convaincants! Le problème, tant que fournisseur de prestations, et c’est qu’aujourd’hui, le patient ne sait pas vous Monsieur Graf, en tant qu’ache- ce qui est mesuré et comparé. Il n’y a pas teur de prestations? de transparence à ce sujet! Guido Graf (GG): «Pour moi, la qualité de NC: «Il y a de la transparence, mais il est la médecine n’est rien d’autre que ce que vrai que les résultats sont difficiles à évaluer j’entends par qualité quand j’achète une pour les patients. On parle par exemple voiture, par exemple: la prestation sou- de certifications selon ISO, mais pour la plu- haitée doit être bien fournie, et le résultat part des patients, cela ne veut pas dire doit être mesurable. Comme dans le sport, grand-chose. Nous sommes d’avis qu’un — Guido Graf, conseiller d’Etat (PDC) où l’on peut clairement mesurer qui est le meilleur. Et alors, on peut comparer.» label tel que ‹Swiss Leading Hospitals› ou peut-être une certification indépen- du canton de Lucerne, chef du Dé- Nello Castelli (NC): «J’entrevois aussi les dante interne de Genolier, de même partement de la santé et des affaires choses de cette manière. La qualité qu’externe, pourraient être plus efficaces.» sociales depuis 2010. Technicien du doit également être mesurable en méde- génie civil de métier et titulaire d’un diplôme en management de NPO et cine, car la santé est ce qu’il y a de plus Mais cela n’apporterait pas plus de possi- d’associations, il dirigeait auparavant important pour les gens, et donc, la qua- bilités de comparaison. sa propre entreprise. NC: «Probablement pas, vous avez raison. C’est pourquoi il ne faut pas uniquement évaluer les processus et structures. Nous devons également tenir compte des ré- sultats. Précisément, c’est là la difficulté.» Pourquoi? NC: «Les médecins s’y opposent farou- chement. En tant que membre de la direction du groupe Genolier, j’estime néanmoins que de telles mesures et com- paraisons devraient être rendues possibles et accessibles au public. L’idéal selon moi, ce serait une sorte de TripAdvisor pour les hôpitaux. D’ici quelques années, chaque patient devrait pouvoir s’informer de manière très simple du niveau de garantie de la qualité dans tel ou tel hôpital.» Cela me surprend! Vous formulez cette exigence à l’égard des médecins? NC: «Oui. Et je le dis de manière générale 12 place au dialogue 1/2014
On en parle — Nello Castelli, secrétaire général du Genolier Swiss Medical Network. Jusqu’en 2013, le juriste était secrétaire général adjoint de l’Association des Banquiers Privés Suisses et membre de la direction de santésuisse. pour tous les médecins, pas que pour les sances, nous devons l’éviter. Sur ce point, il au niveau national que le thème serait le nôtres. Bien sûr, l’évaluation des presta- faut encore faire évoluer les choses.» mieux traité. » tions médicales n’est pas facile, mais elle est possible. Par exemple, la Fondation Tout de même! L’OFSP parle concrè- Précisément: depuis 2012, nous pouvons Equam à Bâle l’a déjà mise en place.» tement de 5000 décès et de 120 000 choisir librement l’hôpital. Cela est peu nuisances à la santé par année dans les utile quand on sait que dans le canton de Monsieur Graf, nous entendons ici une hôpitaux suisses. Et il précise qu’une Lucerne, le conseiller d’Etat Graf vérifie déclaration claire d’un fournisseur de transparence accrue permettrait de avec une grande précision, mais qu’il se prestations. Voyez-vous les choses ainsi réduire le nombre de cas de la moitié peut que les choses se passent très diffé- en tant qu’acheteur de prestations? environ. remment dans le canton voisin. GG: «Dans ce domaine, je joue un autre GG: «Dans notre canton, tous les hôpitaux GG: «Tout à fait, certains critères de rôle: j’assume la surveillance des hôpitaux répertoriés doivent être affiliés à l’ANQ, qualité devraient être les mêmes pour qui figurent sur la liste hospitalière.» l’Association nationale pour le dévelop- tous, et cette question devrait être évo- pement de la qualité dans les hôpitaux et quée ouvertement.» Dans ce cas, vous devriez donc être les cliniques. Les relevés de l‘ANQ peuvent d’autant plus intéressé par la plus grande être comparés entre eux. De plus, j’exige Par exemple? transparence possible. de nos hôpitaux qu’ils fournissent chaque GG: «Les sorties ‹sanglantes›, autrement GG: «Oui, je partage cet intérêt. Mais je année les réclamations des patients. dit lorsqu’un patient est renvoyé chez lui dois vous dire que je pense que la qualité Quand elles concernent la qualité, je prématurément. L’hôpital ne le veut pas non dans nos hôpitaux n’est pas plus mauvaise peux réagir. Je constate à cet égard une plus, car il y a ce que l’on pourrait appeler en comparaison de nos pays voisins. Natu- grande ouverture de la part de nos hôpi- un ‹travail sous garantie›. Autrement dit, le rellement toutefois, ce que nous pouvons taux. Néanmoins, la qualité peut toujours patient retourne à l’hôpital qui ne touche éviter, je veux parler des décès et nui- être améliorée, et peut-être que c’est aucun nouveau forfait en contrepartie.» place au dialogue 1/2014 13
On en parle Mais n’est-ce pas précisément le cœur pour la prochaine fois. La concurrence domaine précis. Vu sous cet angle, la liste du problème? Avec le forfait par cas, constitue donc déjà une incitation suffi- en dit peu sur la qualité. Ne faudrait-il chaque cas comparable est rémunéré de sante en faveur de la qualité.» pas beaucoup plus de centres spécialisés, la même manière, indépendamment pour que les patients puissent vraiment du niveau de qualité. Le prix ne devrait-il Un instant. Cela me paraît un peu simple: se fier à la qualité? pas plutôt refléter la qualité, pour que quand quelque chose se passe mal, le GG: «La médecine est hautement spécia- les hôpitaux soient réellement incités à patient peut opter pour un autre hôpital. lisée, et beaucoup de regroupements ont fournir une bonne qualité? A-t-il en effet le choix? De cette manière, déjà été opérés. Mais je suis d’accord avec NC: «Cette incitation existe déjà au- vous vous opposez précisément à une vous que nous devons nous améliorer à ce jourd’hui. Le patient peut décider libre- plus grande transparence! niveau. Il est clair que quelqu’un qui traite ment de l’hôpital où il souhaite aller. GG: «Monsieur Rohr, écoutez-moi je vous un ou deux cas par année ne peut offrir la Et il choisit l’hôpital qui offre la meilleure prie: pensez-vous qu’un hôpital puisse même qualité que celui qui en prend en qualité. Mais il est tout à fait clair que figurer sur la liste hospitalière s’il n’est pas charge une cinquantaine. Néanmoins, la pour pouvoir décider réellement, il fau- en mesure de garantir la qualité? S’il y a collaboration entre hôpitaux fonctionne drait plus de transparence.» un risque pour les patients, je sors cet hôpi- GG: «Prenons un exemple concret: tal de la liste hospitalière ou je l’exclus. admettons qu’une personne vienne chez C’est la responsabilité de la surveillance et «La concurrence consti- nous à l’Hôpital cantonal de Lucerne le patient doit pouvoir se fier au fait que et qu’elle soit renvoyée chez elle préma- nous l’assumons.» tue déjà une incitation turément. A coup sûr, ce patient n’aura suffisante en faveur de la aucune envie de retourner dans cet Sur la liste sont toutefois aussi mention- hôpital. Quand on n’est pas satisfait d’une nés des hôpitaux qui n’effectuent qu’une qualité.» prestation, on cherche un autre hôpital à deux opérations par année dans un Guido Graf 14 place au dialogue 1/2014
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