Présentation du peintre Arcabas et de son oeuvre
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Présentation du peintre Arcabas et de son œuvre Jean Marie Pirot, dit Arcabas est né en 1926. Il est actuellement considéré comme l'un des maîtres de l'art sacré contemporain. Il est à la fois peintre, sculpteur et verrier. À partir de 1953, Arcabas s’est fait connaître à travers une œuvre monumentale réalisée en plusieurs étapes pendant plus de 30 ans : l'ensemble d'art sacré de l'église Saint-Hughes-de- Chartreuse à Saint Pierre de Chartreuse, dans le massif du même nom. L’œuvre qui nous intéresse se trouve à la Chapelle de la Résurrection, dans l’église Torre de Roveri à Bergame en Italie. L’ensemble des pèlerins d’Emmaüs est un polyptique composé de plusieurs toiles avec aplats d’or fin. Les scènes représentées illustrent successivement les différents épisodes écrits par Saint Luc dans son Evangile (chapitre 24). Chez Arcabas, la peinture est indissociable de son chemin de foi : "Dans toutes mes tentatives, de peindre, dit Arcabas, j'essaie de faire ressortir la beauté. J'espère qu'il y aura des regards pour la capter, et peut-être pour être transformés. La beauté peut conduire à la foi et la beauté est un élément de la foi en Dieu." Son travail, qui s'inspire des paraboles et récits de la Bible, se présente souvent de manière linéaire et narrative : généralement sous forme de fresques, de cycles de tableaux et de polyptyques. Arcabas réintroduit une part de profane dans le traitement de sujets sacrés : éléments et figures de la vie quotidienne actuelle, allusions à des thèmes d'actualité ou à une universalité qui dépasse largement le cadre biblique. Les symboles sont omniprésents dans le travail du peintre, jusqu'à composer exclusivement certains petits tableaux, ce qui leur confère une dimension abstraite. Parmi les symboles utilisés, nous pouvons évoquer une petite croix trapue comme le signe +, généralement réalisée à l'aide de la feuille d'or. Ainsi, la croix devient un signe de vie, d'une grande richesse.
Le temps de la lecture d’image Pour une pédagogie de lecture d’images avec un groupe d’adultes ou des enfants, voir les fiches correspondantes. Commentaire des disciples d’Emmaüs par Catherine de Salaberry à partir de l’interview de l’auteur Arcabas (Jean-Marie Pirot) -1- Les disciples en chemin : des têtes, des jambes, des mains, des visages, mais on voit surtout ce qu'ils ont en tête. Ils sont anxieux. Pas de détails anecdotiques sur Jérusalem ou Emmaüs, pas de paysage. Espèce de serpentin pour suggérer le chemin. Le soleil, encore haut sur l'horizon, est derrière eux. Il est toujours difficile de représenter des gens qui marchent de face. Le Christ incognito marche de concert avec eux, hanche contre hanche, appuyé sur un bâton de pèlerin. Il se tait, il est très énigmatique. Chacun des disciples est dans ses pensées, parle dans le désordre. Leurs regards ne se croisent pas. En fait chacun parle pour soi. O ma tête, ô mon cœur ! Ils racontent Jésus à Jésus ! Ils lui expliquent ce qui lui est arrivé. La réponse de Jésus va venir. Il leur ouvre les Ecritures Idées d’approfondissement Luc 24, 13-24 Jésus fait parler les disciples, il leur fait raconter ce qui est arrivé. Importance de la relecture de l’événement. Prendre le temps de parler, d’écouter, de relire sa vie. Mais en même temps, chacun est enfermé dans ses pensées, chacun parle pour soi. Ils parlent de l’échec. Peut-on reconnaître le Messie dans cet homme crucifié ? Saint Augustin : « Ils avaient perdu la foi, ils avaient perdu l'espérance, et c'étaient des morts qui marchaient avec un vivant, des morts qui marchaient avec la Vie même. La Vie marchait bien avec eux, mais elle n'était pas rentrée encore dans leurs cœurs .» Sermon 235 http://www.clerus.org/bibliaclerusonline/es/dqb.htm C’est de leur côté à eux qu’est l’obstacle. Et effectivement, il nous est très difficile de reconnaître dans la croix l’acte qui sauve. Il est très difficile de reconnaître, dans l’humanité telle qu’elle est, avec ses souffrances et ses œuvres de mort, le chemin du salut. Jésus lui même est passé par là. Est-ce que je sais reconnaître ce qui m’empêche de reconnaître le Christ ? Est-ce que je sais nommer mes manques ? Liens possibles : Les femmes au tombeau Matthieu 28,1-8 / Marc 16,1-8 / Luc 24,1-10 / Jean 20, 1-2 : au début surprise, incompréhension et incapacité des femmes à reconnaître le Ressuscité devant le tombeau vide, puis proclamation de l’incroyable évènement mais totale incrédulité des disciples. Difficulté de l’annonce de la bonne nouvelle.
Abraham et les 3 visiteurs Genèse 18,1-5 : mystérieuse visite de 3 visiteurs parmi lesquels Abraham finit par reconnaître le Seigneur. La promesse d’une descendance va s’accomplir. Parties de la messe évoquées : l’accueil, le temps de la Parole, mais aussi l’envoi avec une certaine espérance dans cette rencontre… -2- L’étranger leur explique les Ecritures Tableau d'apparence abstraite mais qui ne l'est pas du tout. Sont livrées en vrac des lettres, les Ecritures qui depuis Moïse concernaient Jésus, annonçaient Jésus. Toile qui suggère plastiquement les rapports Premier et Nouveau Testament. 1er Testament : masse, minerai, gangue aux reflets de mâchefer qui laisse apparaître la croix dans un estuaire lumineux. Le mystère de la croix est comme une pépite qui se dégage d'un magma primordial, dont elle est solidaire. Où le mystère de la croix est le noyau de sens de la première Alliance ! Croix de la même couleur que ce dont elle se dégage : Jésus est Juif. Il est de la même matière que le peuple dont il naît, dont il s'extrait. "Bon tableau" dit Arcabas. Idées d’approfondissement Luc 24, 25-27 Jésus se désigne lui-même comme la clé des Ecritures. Il parle de lui à la 3ème personne. Il ne dit pas «il fallait que je souffre » mais « ne fallait-il pas que le Christ endurât ses souffrances ? ». Celui qu’ils écoutent n’est pas celui dont ils parlaient tout à l’heure. Quelle est cette Parole qu’il leur dit ? La Parole qui le dit n’est pas séparable de lui. Liens possibles -Les tables de la loi ou les 10 Paroles ou Décalogue : Exode 20,1-17 / Deutéronome 5, 1-22 : fondements de la LOI. -Le Saint des Saints Epître aux Hébreux 9,1-10 : La Parole sort du sanctuaire pour devenir universelle. -L’image du temple de Jérusalem Exode 26, 33 / Luc 23, 45 / Marc15, 38 : Le rideau du temple se déchire. -La descente aux enfers 1Pierre 3, 18-20 / le Credo : La miséricorde du Christ est de tous les temps : passé, présent et à venir -Le tombeau vide Matthieu 28,1-8 / Marc 16,1-8 / Luc 24,1-8 / Jean 20,1-10 Parties de la messe évoquées : le temps de la Parole, le Credo
-3- La nuit tombe. Un soleil bas rougit le ciel. On est arrivé. Regards de désir et d'espoir : "Reste avec nous." Regards insistants qui invitent chez eux, chez nous : table de chez nous, coupe de fruits de chez nous, carrelage. La maison, le seuil sont vides. Tout est dégagé. Il va entrer dans notre vide, notre creux, notre capacité à l'accueillir. Irruption de la table dans le vide illuminé par le soleil. Absence d'expression de l'étranger qui garde son secret. Mais dans la fente sous son bras, irruption des derniers rayons du soleil comme une forme de plaie au côté, plaie bordée d'écarlate. Le ressuscité d'aujourd'hui est le supplicié d'hier. Idées d’approfondissement Luc 24,28-29 Le faire semblant de Jésus nous surprend. Il conduit au «reste avec nous », attitude spirituelle, appel à la présence de Dieu dans nos vies. Jésus semble amener la lumière avec lui, il entre dans notre nuit. Le bâton à sa main : c’est celui qui mène son troupeau. Les deux autres personnages ont l’air plus heureux et plus unis dans leur action. A l’inverse de l’image 1, les mains sont tendues vers l’autre et non pas repliées. Geste d’accueil, mais aussi geste pour recevoir (cf. l’Eucharistie). Les gestes convergent vers le centre du tableau, vers le lieu de la rencontre et de la « reconnaissance ». Liberté de chacun de se tourner, d’inviter le Christ, il est là présent au seuil de notre porte, de notre intérieur, mais il ne s’impose pas. Liens possibles : Les préparatifs du repas Pascal Marc 14,12-16 / Matthieu 26,17-19 / Luc 22, 7-13 : des préparatifs qui annoncent la Cène Jésus invité aux noces de Cana Jean 2,1-12 : un repas qui annonce l’heure de la glorification de Jésus et la célébration des noces entre le Seigneur et son peuple L’invitation d’Abraham au chêne de Mambré Genèse 18,1-5 : c’est Abraham qui est finalement invité à croire en la promesse de Dieu Le repas chez Marthe et Marie Luc 10,38-42 : Marthe et Marie accueillent Jésus mais comment réagissent-elles, séparément, à sa Parole ? Parties de la messe évoquée : Profession de Foi, début de la prière eucharistique, l’invitation au Christ… -4-Succession d'instants, interlude, intermède… (Cette toile ne fait pas l’objet d’un travail de groupe) Entre l'entrée dans la maison et la mise à table. Préparatifs et graines d'espoir : Aurore boréale, colorée, ascendante. Palette référentielle avec toutes les couleurs des 7 toiles. Introduction à la table servie, à la table d'Emmaüs. Idées d’approfondissement : Intermède. Ils entrent. Comment entrer dans la maison de la foi ? Quel est le moment de ma vie où « j’entre » ? Moment mystérieux ! Pourquoi moi ? Partie de la messe évoquée : les offrandes
-5- Les voici assis à table : Ils sont assis autour d'une table qui n'a pas de pieds. Il n'y a pas de chaises non plus ou presque. L'accent est mis sur la réunion, la communion des 3 autour d'une même table, le bonheur d'être ensemble. Les problèmes de physique et de gravitation ne comptent plus. Et cependant la cohérence est autre que matérielle. Le pèlerin de droite empoigne à pleine main une bouteille. Mélange de quotidien et de sacré. Dans la banalité de gestes ordinaires (empoigner une bouteille, tenir son menton dans la paume) transparaît une liturgie. Comment repère-t-on Jésus au premier regard ? Notre œil est immédiatement attiré par la sorte d’auréole (ou de mandorle) qui entoure sa silhouette. La qualité de la matière et la lumière qui en jaillit ne peuvent nous tromper. Son visage est aussi particulièrement soigné. Dans le choix des couleurs, nous trouvons les nuances du noir et des couleurs primaires : bleu, jaune, rouge. Il est possible de distinguer deux sources de lumière dans cette toile. La première lumière est naturelle, c’est le chandelier central qui éclaire la table et le plafond ; la seconde, la plus lumineuse jaillit des mains du Christ et irradie ce qui l’entoure, le côté gauche restant plus dans l’ombre. Ce procédé de source « cachée » rappelle les peintres du début du 17° siècle comme Caravage, de la Tour… Idées d’approfondissement : Le texte de l'Evangile semble si actuel au peintre qu'il le traduit par cette vision d'aujourd'hui. Le Christ, les yeux fermés, très recueilli. Grande intériorité. Ce n'est pas le moment de la fraction du Pain. C'est celui de la Bénédiction. Il va disparaître à leurs yeux, lui qui est le Pain béni, rompu, partagé. Tout va aller très vite maintenant dans le temps et dans l'espace. Tout se passe comme si deux histoires se superposent, il y a « diffraction ». Dans le même instant, Jésus bénit le pain et le rompt, tandis que les disciples méditent encore les paroles de cet homme rencontré. Cette toile nous fait réfléchir sur l’instant de la « reconnaissance », de la révélation. Chacun dans leur histoire personnelle, les voilà maintenant unis dans une même mémoire, une même foi. On trouve une croix sur la nappe, elle rappelle le passage par la mort. La dimension du sacrifice sur la Croix est une des composantes de la compréhension de l’Eucharistie. Images 5 et 6 - Luc 24,30-32 Comment reconnaître le Christ aujourd’hui à la fraction du pain ? Liens possibles: -Le dernier repas Luc 22,15-20 / Matthieu 26,26-29 / Marc 14,22-25) : institution de l’Eucharistie -La reconnaissance de Joseph par ses frères Genèse 45,3-7 : le salut passe-t-il par la « re »connaissance ? -Pilate demande à Jésus : « Qui es-tu ? » / Luc 23,3 / Jean 18,33-37 et 19,9 / Marc 15,2 / Matthieu 27,11 Jésus devant Pilate : sommes-nous des « Pilate » aujourd’hui ? Parties de la messe évoquées : Les rites de Communion, la fraction du pain et la bénédiction.
-6- Alors même qu'ils le reconnaissent, il a disparu de devant leurs yeux. Le disciple de droite se lève en renversant sa chaise. Il prend appui sur la table qui les a réunis. L'autre contemple : il a deviné, compris un peu avant. "Nous l'avons reconnu à la Fraction du Pain", diront-ils. La table, les chaises, la nappe, les serviettes font l'unité plastique, mais le centre est ailleurs. Les deux disciples dirigent notre regard vers un centre de gravité qui n'est pas dans la toile. Instantané de surprise. Illumination de l'Esprit. Si l’on observe bien cette toile, on a une impression d’un déplacement. Le Christ parti, la lumière a quitté ce monde, vidant la scène vers la droite. Tout un mouvement s’inscrit dans cette direction : la chaise, les corps, les regards… Idées d’approfondissement : Si le Christ est parti, l’espoir demeure, comme en témoigne le regard du personnage assis, la lumière brille dans ses yeux. Il y a également la présence de la croix. Les gestes des deux hommes renforcent l’idée de présent et d’avenir. Le personnage debout est ancré dans le présent les mains sur la table, il évoque la surprise et l’instantané. Tandis que le personnage assis tient une serviette et exprime une pensée profonde. Sans doute ces deux personnages, n’en font-ils qu’un et reflètent-ils notre réalité d’homme, dans le « vivre et le croire ». Ils évoquent également à eux deux l’espoir de l’après. Après avoir quitté Jérusalem les voilà « retournés » dans leur foi. En quittant la ville, ils se sont rapprochés du Christ. Aujourd’hui, comment vivre l’absence du Christ ? Moment de la foi. Je passe du voir au croire. Liens possibles :, -L’Ascension : Luc 24,50-53 / Marc 16,19-20 / Actes des Apôtres 1,9-11 -Elie emporté aux cieux : 2ème livre des Rois 2,1-13 -Le buisson ardent (la reconnaissance de Dieu) : Exode 3,2-8 Partie de la messe évoquée : l’action de grâce « avec joie, vous rendez grâce à Dieu le Père qui vous a donné son fils »
-7- Aussitôt ils courent à Jérusalem Ce tableau conclut une série de 7 toiles représentant les pèlerins. Après avoir reconnu le Christ, les disciples sont repartis annoncer la bonne nouvelle à Jérusalem. C’est une scène que l'on ne voit pas, pas plus que nous ne les voyons. Ce que nous constatons c’est : un repas abandonné, une porte ouverte, un ciel étoilé… une table où se répètent nos repas quotidiens. A droite, sous la nappe, une table sans pied, comme un plongeoir vers l’extérieur. Tout est mouvement : chaise renversée, serviette délaissée, nappe froissée. La couleur de la nappe porte la dynamique du passage : le jaune de la fête et un gris de linceul. Le chandelier est éteint mais la clarté demeure. L’espoir est né et les disciples sont partis transformés. La croix a disparu avec les hommes, seuls deux couverts sur la table nous la rappellent… Idées d’approfondissement : En peignant ce lieu de rencontre, vide à présent de toute présence humaine, Arcabas nous montre dedans et dehors ; la réconciliation heureuse d'un dedans et d'un dehors. "Je suis la porte". Les disciples sont sortis par la porte, par lui. Dehors c'est le ciel. L'extérieur du premier tableau est retrouvé, mais transformé, agrandi. Sans les montrer, la toile suggère des hommes dynamisés, chargés de mission. "Allez, sortez…" la Pentecôte se dessine déjà. Arcabas n'a voulu signer aucune de ces toiles. Il rejoint la grande tradition de l'iconographie, consciente de recevoir plus. Image 7 - Luc 24, 33-35 L’expérience de la résurrection est faite. Ils sont repartis. Quelle expérience de résurrection dans ma vie ? Liens possibles : -la Pentecôte : Actes des Apôtres 2,1-4 -la promesse faite à Abraham (les étoiles) : Genèse 15,1-6 -les mages qui suivent l’étoile : Matthieu 2,1-11 -les disciples qui laissent tout derrière eux et suivent le Christ…. Matthieu 28,18-20 / Marc 16,15-18
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