Rapport 2012 sur le développement en Afrique - Vers une croissance verte en Afrique - African ...

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Rapport 2012 sur le développement en Afrique - Vers une croissance verte en Afrique - African ...
Rapport 2012 sur le développement en Afrique
        Vers une croissance verte en Afrique

                                      Vue d’ensemble
Rapport 2012 sur le développement en Afrique - Vers une croissance verte en Afrique - African ...
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Rapport sur le développement en Afrique 2012

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lations employées dans la présente publication n’impliquent aucune prise de position de la part de la Banque quant
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ISBN 978- 9938-882-00-1
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Rapport 2012 sur le développement en Afrique
                                  Vue d’ensemble

        Vers une croissance verte en Afrique
Rapport 2012 sur le développement en Afrique - Vers une croissance verte en Afrique - African ...
Avant-propos
     La croissance économique robuste de l’Afrique, avoisinant 5 % par an au cours des dix dernières années, a placé le
     continent parmi les régions ayant la croissance la plus rapide au monde. Au cours de la dernière décennie, les taux
     de pauvreté sur le continent n’ont cessé de décroître et la réalisation des autres cibles des OMD est désormais en vue.

     Malgré la baisse des taux de pauvreté par habitant, l’Afrique est toujours un continent pauvre et la croissance écono-
     mique rapide n’as pas réduit les inégalités. La famine reste largement étendue sur le continent, notamment en Afrique
     subsaharienne, tandis que l’accès à l’énergie est inadéquat. Les changements environnementaux et socio-économiques
     confrontent l’Afrique à d’autres défis. Le changement climatique, la croissance de la population mondiale et l’évolution
     des modes de consommation exercent notamment une pression supplémentaire sur les ressources naturelles de l’Afrique.

     Des solutions viables à ces défis actuels et futurs sont ancrées dans les voies de croissance qui encouragent la gestion
     efficiente et soutenable du patrimoine naturel, émettent moins de carbone que les voies conventionnelles, et assurent
     le partage équitable des bénéfices tirés de la croissance afin de réduire la pauvreté et les inégalités de revenu et d’amé-
     liorer les conditions de vie.

     La Banque africaine de développement a placé la croissance inclusive et la transition vers la croissance verte au centre
     de sa nouvelle stratégie décennale (2013-2022). La transition vers la croissance verte fait partie d’une action plus
     large visant à améliorer la qualité de la croissance et qui met l’accent sur le fait d’aider les pays africains à atteindre
     leurs objectifs de développement d’une manière plus soutenable et plus résiliente tout en assurant une utilisation plus
     ­efficiente des ressources. Le rapport soutient la priorité que la Banque accorde au renforcement du caractère robuste,
      soutenable et inclusif de la croissance sur le continent dans une ère de changement rapide. Il apporte des perspectives
      analytiques innovantes ainsi que des contributions cruciales à la discussion sur ce que représente la croissance verte
      pour le développement de l’Afrique.

     Donald Kaberuka
     Président,
     Groupe de la Banque africaine de développement

ii     Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique
Rapport 2012 sur le développement en Afrique - Vers une croissance verte en Afrique - African ...
Remerciements
Le Rapport sur le développement en Afrique 2012 a été préparé sous la direction générale du Professeur Mthuli Ncube
(Économiste en chef et Vice-président, ECON), de Gilbert Mbesherubusa (Vice-président, Infrastructure, secteur
privé et intégration régionale), d’Aly Abou-Sabaa (Vice-président, Opérations Secteurs II), de Steve Kayizzi-Mugerwa
(Directeur, Département Recherche et développement), d’Hela Cheikhrouhou (Directrice, Département Énergie,
environnement et changement climatique), d’Abebe Shimeles (Chef de division, Département de Recherche et déve-
loppement) et de Kurt Lonsway (Chef de division, Département Énergie, environnement et changement climatique).

Le rapport a été préparé conjointement par le Département de la recherche sur le développement et le Département
de l’énergie, l’environnement, et le changement climatique. L’équipe principale était comprise d’Adeleke Salami
(Gestionnaire des tâches), de Frank Sperling (Co-gestionnaire des tâches), d’Anthony Simpasa, de Jacob Oduor, de
Robert Kirchner, de Vinaye Ancharaz et de Ghecham Mohieddine. Wisdom Akpalu (State University of NewYork
Farmingale,New York) a coordonné le rapport.

Le contenu de ce rapport s’appuie sur des documents de référence produits par Wisdom Akpalu, Channing Arndt,
Kristi Mahrt, Gunnar Köhlin, Precious Zikhali, Afaf Rahim, Elizabeth Robinson, Yonas Weldegebriel Alem, Salvatore
Di Falco, Nadege Yameogo, David Ockwell, Robert Byrne, Katharine Vincent, Timothy Koomson, Frank Sperling et
Kevin Urama.

L’équipe voudrait remercier Gabriel Umoh, Claudia Ringler, Edward Barbier, Kwadwo Asenso-Okyere, James K. Ben-
hin et Witness Simbanegavi qui ont revus les premières versions du rapport. Les commentaires et suggestions reçus
de la part des experts sectoriels des différents départements de la Banque africaine de développement sont hautement
appréciés. Nous remercions particulièrement l’équipe de la croissance verte de la Banque et les participants aux sé-
minaires de la Banque. Nous exprimons une gratitude particulière à l’égard de Yogesh Vyas, Daniel Gurara, Gilbert
Galibaka, Florence Richard, Elodie Dessors, Monojeet Pal, Mafalda Duarte, Sebastian Delahaye, Olufunso Somorin,
Osman-Elasha Balgis, Ignacio Tourinosoto, Awa Bamba et Anthony Nyong pour leurs commentaires constructifs et
leurs suggestions perspicaces.

Des services éditoriaux ont été fournis par Cyndi Berck et John Ward, tandis qu’Anna von Wachenfelt, Urbain Thierry
Yogo, Ishmael Abeyie, Lauréline Pla, Abdelaziz Elmarzougui et Imen Rabai ont fourni un appui précieux à la recherche.
Ahmed Jeridi a fourni une assistance statistique. L’équipe administrative comprise de Rhoda Bangurah, Josiane Kone,
et Abiana Nelson a fournit une assistance logistique au rapport.

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Rapport 2012 sur le développement en Afrique - Vers une croissance verte en Afrique - African ...
Table des matières
     Avant-propos                                                                                                    ii
     Remerciements                                                                                                  iii
     Abréviations et acronymes                                                                                       v

     1. Introduction                                                                                                 1

     2. De la nécessité de promouvoir une croissance verte                                                           3
           2.1 Redressement économique de l’Afrique                                                                  4
           2.2 L’Afrique au 21e siècle                                                                               5

     3. Rôle de la croissance verte dans la promotion d’une croissance et de modes de développement plus durables    7
           3.1 Tirer le meilleur parti des dotations en ressources naturelles renouvelables                          8
           3.2 Sécurité énergétique, combustibles fossiles et opportunités de
                développement à faible émission de CO2                                                              11

     4. Transfert de technologies en vue d’une croissance verte en Afrique                                          14

     5. Financement de la croissance verte en Afrique                                                               17

     6. Création d’un environnement favorable à la croissance verte                                                 20

     Références		                                                                                                   24

     Figures
     Figure 1 : PIB par habitant par région (dollars EU constants de 2000)                                           4
     Figure 2 : Prévisions démographiques moyennes                                                                   6
     Figure 3 : Différentes qualités de matériel et de connaissances dans le processus de
                 transfert de technologie et leur contribution aux différents types de nouvelles capacités          16

     Tableaux
     Tableau 1 : Potentiel des énergies renouvelables dans les différentes régions d’Afrique                        12

iv     Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique
Rapport 2012 sur le développement en Afrique - Vers une croissance verte en Afrique - African ...
Abréviations et acronymes
ADBI	Institut de la Banque asiatique de                 ITIE 	Initiative pour la transparence dans les
         développement                                              industries extractives
AIE      Agence internationale de l’énergie              MDP        Mécanisme de développement propre
APD      Aide publique au développement                  OCDE 	Organisation de coopération et de
ASS      Afrique subsaharienne                                      développement économiques
BAD      Banque africaine de développement               OMS        Organisation mondiale de la santé
CCNUCC 	Convention-cadre des Nations Unies sur les      PDDAA 	Programme détaillé pour le développement de
         changements climatiques                                    l’agriculture africaine
CFU      Climate Fund Update                             PFNL       Produits forestiers non ligneux
CIC      Centre d’innovation climatique                  PIB        Produit intérieur brut
CNUCED 	Conférence des Nations Unies sur le             PME        Petites et moyennes entreprises
         commerce et le développement                    PNUD 	Programme des Nations Unies pour le
CO2      Dioxyde de carbone                                         développement
CSLP     Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté   PNUE 	Programme des Nations Unies pour
                                                                    l’environnement
DPI      Droits de propriété intellectuelle
                                                         PNUEH 	Programme des Nations Unies pour les
ECOSOC 	Conseil économique et social des Nations
                                                                    établissements humains
         Unies
                                                         R&D        Recherche et développement
EES      Évaluation environnementale stratégique
                                                         RE4 	Quatrième rapport d’évaluation du Groupe
EMBO 	Organisation européenne de biologie
                                                                    d’experts intergouvernemental sur l’évolution
         moléculaire
                                                                    du climat
ÉQ-CO2   Équivalent CO2
                                                         REDD 	Réduction des émissions liées à la
FAO 	Organisation des Nations Unies pour                           déforestation et à la dégradation des forêts
         l’alimentation et l’agriculture
                                                         REV        Rapport sur l’économie verte
FEDA     Fonds des energies durables en Afrique
                                                         TER        Technologie des énergies renouvelables
FIDA 	Fonds international de développement
                                                         TT         Transfert de technologie
         agricole
                                                         S21        Seuil 21
GCRAI 	Groupe consultatif pour la recherche agricole
         internationale                                  UA/NEPAD 	Nouveau partenariat pour le développement
                                                                    de l’Afrique (NEPAD) de l’Union Africaine
GES       Gaz à effet de serre
                                                                    (UA)
GHI      Indice de la faim dans le monde
                                                         WWAP 	Programme mondial pour l’évaluation des
GIEC 	Groupe d’experts intergouvernemental sur                     ressources en eau
         l’évolution du climat
                                                         ZEE        Zone économique exclusive
IDE      Investissement direct étranger
IFPRI 	Institut international de recherche sur les
         politiques alimentaires
IRENA 	Agence internationale de l’énergie
         renouvelable

                                                           Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique   v
Introduction

      Réduire la pauvreté et améliorer les conditions de vie demeure une priorité
absolue en Afrique. Néanmoins, nous devrions nous fixer comme but d’identifier
                                                                                            1
                                                                                     Chapitre

 des choix de développement qui permettent d’atteindre les objectifs fixés sur le
  plan économique tout en s’assurant que le patrimoine social et environnemental
                           d’un pays est géré d’une manière efficace et durable.
                                 Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique   1
1             Introduction

    La croissance enregistrée récemment en Afrique est le résul-                            systèmes écologiques de façon efficace et durable avec de
    tat de plusieurs années de réformes entreprises par différents                          faibles émissions de carbone, et qui garantiraient le partage
    pouvoirs publics, ainsi que d’une forte hausse de l’extraction                          des bénéfices de la croissance afin de réduire la pauvreté ainsi
    et de l’exportation des ressources naturelles. Afin de soute-                           que les inégalités de revenus. Il aborde aussi les questions des
    nir cette croissance et de la rendre plus inclusive, des axes                           besoins de financement de la croissance verte en Afrique, la
    de politiques devront être retenus sur le long terme. Les                               création d’un environnement favorable et les moyens d’action
    répercussions des pratiques actuelles sur la durabilité des                             de la BAD en ce qui concerne l’intégration de la croissance
    actifs naturels, qui représentent une source de revenu pour                             verte en Afrique.
    la grande majorité de la population en Afrique, sont impor-
    tantes. Le secteur agricole, par exemple, emploie environ                               L’objectif de ce rapport est de susciter le débat sur le rôle de
    60 % de la population globale en Afrique et contribue pour                              la croissance verte dans le processus de développement en
    un tiers du PIB. Au regard des enjeux du 21e siècle, tels que                           Afrique. Ainsi, le rapport s’intéresse aux aspects de la crois-
    le changement climatique et la croissance démographique,                                sance économique actuelle sur le continent et aux contraintes
    l’Afrique est contrainte d’adopter un nouveau modèle de                                 environnementales et socioéconomiques auxquelles sont
    croissance, notamment la croissance verte.                                              confrontées les entreprises et les économies africaines. Le
                                                                                            rapport analyse le rôle des secteurs et technologies clés
    La croissance verte, qui se focalise sur la durabilité sur le                           dans la promotion d’une croissance plus durable et de nou-
    plan environnemental et sur l’inclusion, représente une                                 velles options de développement. Ces problématiques sont
    opportunité unique pour les perspectives économiques et                                 abordées dans les chapitres 1 et 2 du rapport. Les chapitres
    sociales sur le continent. Dans ce contexte, le thème prin-                             3 et 4 traiteront de la gestion des ressources naturelles re-
    cipal du Rapport 2012 sur le développement en Afrique a                                 nouvelables en Afrique, telles que les terres agricoles, les
    été retenu. En effet, ce rapport évoque l’importance de la                              ressources forestières et en eau, les ressources halieutiques
    croissance verte pour le développement de l’Afrique tout                                ou encore la biodiversité. Le chapitre 5 analysera les réper-
    en prenant la mesure des défis de croissance du 21e siècle.                             cussions de l’amélioration de la sécurité énergétique sur le
                                                                                            continent, en prenant en compte le rôle des combustibles
    La croissance verte se conçoit de façon différente selon les                            fossiles et les options de développement à faible émission
    régions et les contextes. Cependant, le rapport adopte la                               de carbone. Les chapitres 6 à 9 souligneront les stratégies
    définition retenue au sein de la Banque africaine de dé-                                nécessaires pour induire une croissance verte. Le chapitre 6
    veloppement (BAD). Selon la Banque, la croissance verte                                 évoquera le rôle du transfert de technologie dans la promo-
    provient de « la promotion et l’optimisation des opportunités                           tion des choix de développement qui permettent d’adopter
    découlant de la croissance économique à travers la création                             une croissance verte, tandis que le chapitre 7 se concentrera
    des conditions favorables à la résilience et la gestion efficace                        sur les opportunités et les difficultés de financement de la
    et durable des ressources naturelles, y compris l’amélioration                          croissance verte en Afrique. Enfin, le rapport évoquera les
    de la productivité agricole et l’incitation au développement                            conditions d’amélioration d’un environnement favorable à
    d’infrastructures durables ».                                                           la croissance verte (chapitre 8), tout en tenant compte du
                                                                                            rôle de facilitation que la BAD pourra jouer (chapitre 9). La
    Le présent rapport démontre la nécessité d’adopter des mo-                              teneur des neufs chapitres du rapport principal est résumée
    dèles de croissance qui utiliseraient le capital naturel et les                         au travers de six chapitres dans cette vue d’ensemble.

2     Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique
De la nécessité de
     promouvoir une
     croissance verte                                                           2
S’ils veulent remédier aux problèmes liés à la dégradation environnementale et aux
    inégalités tout en maintenant la croissance, les pays africains devront suivre des
                                                                                         Chapitre

    chemins de croissance verte. La croissance verte devrait être perçue comme un
 modèle tourné vers l’avenir et fondamental pour répondre aux besoins en matière
                                                  de développement du 21ème siècle.
                                  Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique   3
2
    	De la nécessité de promouvoir une
      croissance verte

    2.1	Redressement économique de                                                               sécheresse en Afrique de l’Est et de l’Ouest et suite à une
         l’Afrique                                                                                série de chocs importants dans certains pays, y compris
                                                                                                  les conséquences des conflits civils dans des pays afri-
    Après plusieurs décennies de morosité économique, la                                          cains tels que la Côte d’Ivoire ou le Mali. Ainsi, même en
    plupart des pays africains ont connu, au cours des 15                                         prenant en compte les effets de ces crises et les effets du
    dernières années une croissance économique soutenue.                                          printemps arabe en Afrique du Nord, qui ont ralenti la
    Certains pays africains se classent désormais parmi les                                       croissance pourtant soutenue, la croissance du continent
    pays ayant connu une croissance rapide dans le monde.                                         africain a fait preuve de résilience, rebondissant fortement
    Entre 2001 et 2012, le taux moyen de croissance du PIB                                        à près de 7 % en 2012. Les perspectives à moyen terme
    en Afrique était de 5,2 %. Même si la crise mondiale de                                       sont également solides avec une croissance attendue de
    2009 a frappé de plein fouet l’Afrique, les effets y ont été                                  près de 5 % en moyenne entre 2013 et 2014.
    moins sévères que dans la plupart des autres régions (BAD
    et al., 2011).                                                                                En dépit de ces avancées, de nombreux défis subsistent.
                                                                                                  Comme l’indique la figure 1, l’Afrique est toujours à la
    Le continent a enregistré des progrès remarquables dans                                       traîne, en termes de PIB par habitant, derrière d’autres
    un contexte de crise mondiale (notamment la crise de la                                       régions en voie de développement, telles que l’Asie de
    dette en Europe), de chocs sur les marchés causés par la                                      l’Est, le Pacifique et l’Amérique latine. Les fondements de

                  Figure 1 : PIB par habitant par région (dollars EU constants de 2000)
                     6 000
                                       Asie de l’Est & Pacifique        Amérique latine & Caraïbes
                                       Asie du Sud           Afrique subsaharienne       Afrique       Afrique du Nord
                      5 000

                      4 000

                      3 000

                      2 000

                      1 000

                          0
                               1960         1965       1970        1975        1980        1985       1990     1995      2000   2005      2012

                  Source : Équipe du Rapport 2012 sur le développement de l’Afrique, selon les données extraites des bases de données de la BAD et de la
                            Banque mondiale (BM).

4    Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique
la croissance sur le plan environnemental et en termes de           gestion des risques liés au changement climatique est
lutte contre la pauvreté se sont progressivement érodés.            depuis longtemps un enjeu essentiel en matière de dé-
Dans certains pays du continent, la croissance a principa-          veloppement (p. ex., BAD et al. 2003). La croissance
lement été tirée par un taux élevé d’extraction ou d’épui-          démographique présente à la fois des opportunités et
sement des ressources naturelles telles que les produits            des défis. D’un côté, elle sous-entend une main d’œuvre
forestiers, les carburants fossiles, les terres agricoles, et les   productive potentiellement plus abondante, à condition
ressources halieutiques et minérales (BAD, 2012 ; Sperling          que les mesures adéquates en termes de formation soient
et al., 2012). Les données disponibles révèlent qu’entre            mises en œuvre et que des opportunités d’emplois soient
2000 et 2005, plus de 50 % de la destruction globale des            créés. De l’autre, la croissance démographique implique
forêts du monde est attribuable à l’Afrique. L’eau se fait          qu’un plus grand nombre de personnes devront utiliser les
de plus en plus rare étant donné que l’augmentation de              ressources naturelles alors que les biens et services issus
la population et le développement agricole et industriel            des écosystèmes se raréfient (MEA 2005). La croissance
contribuent à l’accroissement des besoins en eau. La plu-           verte met l’accent sur l’amélioration de l’usage efficace des
part des aquifères disparaissent progressivement (Oteino,           ressources naturelles, la réduction des déchets et de la
2013 ; Stock 2004).                                                 pollution et l’amélioration de la résilience afin de prépa-
                                                                    rer l’Afrique à répondre aux demandes d’une population
Il existe une très forte relation inverse entre la croissance       accrue et à s’adapter au changement climatique.
économique et les taux de pauvreté en Afrique. Toutefois
la croissance n’est pas inclusive. Les inégalités sociales sont     Impacts du changement climatique en Afrique
bien plus marquées en Afrique que dans les autres régions           En affectant les ressources naturelles du continent, le chan-
du monde, à l’exception de l’Amérique latine (Günther et            gement climatique représente une menace sérieuse pour
Grimm, 2007). En 2011, parmi les dix pays où les inégalités         la croissance économique et le bien-être de la population.
sont les plus accentuées dans le monde, six sont des pays           L’Afrique est particulièrement vulnérable au changement
d’Afrique : la Namibie, l’Afrique du Sud, le Lesotho, le            des conditions climatiques en raison de sa très grande
Botswana, la Sierra Leone et la République centrafricaine           sensibilité au climat et de ses faibles capacités d’adaptation
(les deux derniers étant des États fragiles). De plus, la           (GIEC, 2007a : Collins, 2011). Le second groupe de travail
création d’emplois est insuffisante et la population active         du RE4 soutient que la baisse de rendement des cultures
ne bénéficie pas de la protection sociale.                          projetée dans certains pays africains pourrait atteindre les
                                                                    50 % en 2020 et que les revenus nets des récoltes risquent
Pour résoudre ces problèmes de dégradation environne-               de diminuer de 90 % d’ici 2100, les petites exploitations
mentale et d’inégalité tout en maintenant les tendances             étant les plus affectées (GIEC, 2007a). D’autres études ont
de la croissance, les pays africains devraient opter pour           obtenu des résultats similaires. L’étude réalisée par Lobell
un processus de croissance verte.                                   et al.(2011) indique par exemple qu’environ 65 % des ré-
                                                                    gions productrices de maïs en Afrique subirait des pertes
                                                                    de rendement pour chaque degré Celsius supplémentaire
2.2 L’Afrique au 21e siècle                                         de réchauffement dans des conditions optimales de plu-
                                                                    viométrie. Les pertes de rendement les plus importantes
La croissance verte devient de plus en plus nécessaire              pourraient avoir des conséquences macro-économiques
au regard des tendances mondiales et régionales du 21e              significatives, en particulier en termes de réduction de
siècle, en particulier en ce qui concerne les changements           la pauvreté. L’Afrique doit donc se préparer à s’adaptater
climatiques et la croissance démographique. Les effets              en investissant dans la formation et en développant des
du changement climatique sont de plus en plus visibles              capacités institutionnelles flexibles et fonctionnelles pour
sur la planète, et il est désormais admis que les activités         mieux gérer les chocs.
humaines en sont la cause principale (GIEC, 2007a). La

                                                                      Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique   5
En outre, bien que l’Afrique émet moins de 4 % du CO2                                          peuplée que l’Inde. D’ici 2050, une personne sur quatre
    dans le monde, ses émissions de CO2 ont augmenté de                                            dans le monde sera africaine. De plus, 9 personnes sur 10
    35 % au cours des dix dernières années (AIE, 2012). Etant                                      en Afrique résideront en Afrique Subsaharienne.
    donné la vulnérabilité de l’Afrique au changement des
    conditions climatiques, les pays africains ont intérêt à                                       Cette croissance démographique présente de réelles oppor-
    faire partie de la solution pour remédier aux changements                                      tunités économiques, surtout en ce qui concerne la popu-
    climatiques, à la fois en mettant en œuvre des politiques                                      lation active mais aussi de nombreux défis. Si le continent
    d’atténuation efficaces et efficientes et en prenant part au                                   continue à évoluer de cette façon, la taille de l’économie
    plaidoyer en faveur de ces politiques auprès de la com-                                        africaine en 2050 sera plus grande que celle de la Chine
    munauté internationale.                                                                        en 2010 ce qui posera de vrais problèmes au regard des
                                                                                                   émissions de gaz à effet de serre. Mais bien avant cela, une
    Croissance démographique en Afrique                                                            trop forte croissance démographique pourrait engendrer
    La population en Afrique devrait doubler entre 2010 et                                         des contraintes notables en termes de disponibilité des
    2050, comptant ainsi pour presque la moitié de la crois-                                       ressources notamment la la lutte pour l’appropriation des
    sance démographique mondiale sur cette période (voir                                           terres et de l’eau par les municipalités et des industries
    la figure 2). D’ici 2025, la population africaine devrait                                      avec des effets négatifs potentiels sur les opportunités de
    dépasser celle de la Chine et, d’ici 2030, l’Afrique sera plus                                 croissance.

                  Figure 2 : Prévisions démographiques moyennes
                              Millions
                        2,5
                                         Chine          Inde     Afrique
                       2,0

                        1,5

                        1,0

                       0,5

                         0
                               2010              2015          2020        2025             2030        2035       2040          2045          2050

                  Source : Équipe du Rapport 2012 sur le développement en Afrique, selon les données fournies par la Division de la population des Nations Unies.

6     Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique
3
  Rôle de la croissance verte
    dans la promotion d’une
  croissance et de modes de
développement plus durables
                                                                                                               Chapitre
    Suivre des chemins de croissance verte conduira les pays africains à réaliser dès à présent des inves-
       tissements « intelligents » qui se concentrent sur les activités nécessaires pour soutenir les progrès
     en Afrique. Il s’agit notamment de l’investissement dans l’infrastructure, l’énergie et les habitations
     en milieu urbain durables ; d’une meilleure gestion des ressources naturelles, y compris la terre, les
   stocks de poisson, l’eau et les forêts ; du renforcement de la résilience aux catastrophes naturelles et
                                 au changement climatique ; et de l’amélioration de la sécurité alimentaire.
                                                        Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique   7
3                 R ôle de la croissance verte dans la
                       promotion d’une croissance et de
                       modes de développement plus durables
    L’Afrique reste le continent le plus pauvre du monde. Les                               mentionné ci-dessus, le secteur agricole emploie environ
    taux de famines chroniques sont les plus élevés au monde                                60 % de la population totale africaine et compte pour un tiers
    et le pourcentage de population ayant accès à l’électricité est                         du PIB du continent. Le nombre total de foyers dépendants
    le plus bas. La réduction de la pauvreté et l’amélioration des                          de la biomasse traditionnelle, qui leur sert de combustible,
    perspectives de subsistance de la population demeurent des                              devrait augmenter de manière drastique et passer de 657
    priorités absolues. Fort heureusement, certaines pratiques                              millions en 2009 à 922 millions en 2030 (OCDE et AIE,
    et technologies dans le domaine de la croissance verte ne                               2010). La productivité agricole et la disponibilité des sources
    se contentent pas uniquement d’encourager une croissance                                d’énergie traditionnelles dépendent de l’état des ressources
    durable mais elles répondent également à des besoins de                                 naturelles (terres, eau, forêts). En conséquence, l’utilisation
    développement à court terme. Il pourrait néanmoins exis-                                continue des ressources naturelles afin de répondre à ces
    ter en pratique un compromis entre les solutions liées à                                besoins exige impérativement une gestion durable de ces
    la croissance verte et la satisfaction des besoins socioé-                              ressources. Ci-après, nous présenterons de manière succincte
    conomiques immédiats. Par exemple, la déforestation est                                 des données qui montrent le rôle des solutions vertes dans
    souvent la conséquence de l’augmentation des exportations                               la gestion durable des ressources.
    de produits forestiers, d’une expansion de l’agriculture et de
    l’usage domestique d’un combustible abordable tel que le                                Agriculture, forêts et gestion durable du territoire
    bois. De même, les pays dotés de combustibles fossiles peu                              Le secteur agricole en Afrique a connu une stagnation au
    chers risquent d’avoir du mal à intégrer un processus de                                cours du dernier demi-siècle. Dans les régions où l’on ob-
    croissance verte dépendant de technologies plus coûteuses.                              serve une augmentation de la production, celle-ci provient
    A cet égard, l’enjeux principal pour le continent consiste à                            généralement d’un agrandissement de la zone de culture et
    s’assurer de la satisfaction des besoins de développement                               non d’une productivité plus élevée (Bluffstone et Köhlin,
    à moyen-terme, tout en atteignant des une trajectoire de                                2011). De plus, il est à craindre que l’intensification de
    développement qui ne remette pas en cause les perspectives                              l’agriculture et la diversité génétique réduite contribuent à
    de croissance économique et la soutenabilité du mode de                                 des rendements faibles et en déclin (Rosegrant et Livernash,
    développement sur le long terme. La sous-section suivante                               1996).
    traite du rôle et des avantages des pratiques et technologies
    vertes en ce qui concerne les secteurs des ressources natu-                             Nous disposons de données factuelles qui montrent que les
    relles et de l’énergie.                                                                 pratiques agricoles écologiques peuvent inverser la tendance
                                                                                            au déclin de la productivité agricole sur le continent. Une
                                                                                            étude récente (PNUE 2010) a révélé que des pratiques telles
    3.1	Tirer le meilleur parti des dotations en                                           que la lutte antiparasitaire, la gestion intégrée des éléments
         ressources naturelles renouvelables                                                nutritifs, l’agriculture avec labour de conservation, l’agrofo-
                                                                                            resterie, l’aquaculture, la récupération d’eau et l’intégration
    La majorité de la population pauvre en Afrique dépend avant                             de l’élevage pourraient permettre d’augmenter le rende-
    tout des ressources naturelles pour leur subsistance. Tel que                           ment moyen de 79 %. De même, une analyse des pratiques

8     Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique
biologiques ou quasi-biologiques de 144 projets dans 24          En plus de ces bénéfices directs, les forêts d’Afrique offrent
pays d’Afrique a démontré que les rendements avaient au          des services au-delà des frontières du continent. Elles ab-
minimum doublés dès lors que ces pratiques étaient mises         sorbent du CO2, à la fois grâce à la biomasse (racines, tiges,
en place (CNUCED et PNUE, 2008). En outre, puisque les           branches et feuilles) et au sol (Beedlow et al., 2004). Une
populations pauvres sont les premières concernées par la         forêt d’un hectare retient environ 2,2 à 9,5 tonnes de CO2
croissance agricole, bien plus que par les autres secteurs       (Birdsey, 1996). Il semble donc légitime de compenser les
(Banque mondiale, 2007), l’augmentation du rendement             agriculteurs ou les propriétaires fonciers en échange de la
devrait être un allié particulièrement précieux dans la lutte    mise en œuvre de pratiques « vertes » telles que l’amélio-
contre la pauvreté et dans l’atténuation des disparités de       ration des stocks forestiers et la limitation de la perte de la
revenus. Par exemple, une étude d’évaluation d’impact            biomasse forestière. Des initiatives internationales, telles que
menée au Burkina Faso a prouvé que le passage à des pra-         le REDD ou le MDP ont proposé des financements aux pays
tiques biologiques améliorait les revenus des agriculteurs,      africains afin d’offrir aux agriculteurs et aux propriétaires
la sécurité alimentaire et la qualité de vie générale (Pineau,   fonciers des alternatives économiques pour qu’ils mettent
2009), tandis qu’une étude menée en Ethiopie a mis en            en place des solutions vertes.
exergue l’augmentation des revenus des ménages ainsi que
l’amélioration de l’environnement grâce à des pratique agri-     Dans ce domaine, peut-être plus que dans les autres, de
coles « vertes » (Kassie et al., 2009).                          telles solutions vertes s’opposent aux besoins économiques
                                                                 et sociaux immédiats. Le fait de mettre fin à la déforestation
Certains pays ont cependant amélioré la sécurité alimentaire     risque d’être dommageable pour les exportations, la crois-
par le biais de stratégies incluant des produits chimiques.      sance de l’agriculture ou l’accès à un combustible peu cher.
Le Ghana a réduit son GHI de 59 % entre 1990 et 2011 en          Les forêts sèches du Miombo, située en Afrique centrale et
investissant dans l’agriculture (fourniture d’informations       en Afrique du sud, fournissent du charbon à environ 25
et d’intrants tels que les pesticides et les engrais) tout en    millions d’habitants des zones urbaines (Campbell et al.,
améliorant les infrastructures, le développement rural, la       2007). Il est clair que les décideurs politiques doivent évaluer
qualité de l’éducation fournie et à la santé (Kufuor, 2011).     les bénéfices associés au développement durable des forêts
Il convient aussi de noter qu’une étude récente portant sur      et les comparer aux coûts liés aux pertes économiques et
le rendement relatif des systèmes de culture « verts » et        aux opportunités sociales liées à la dégradation de la forêt.
conventionnels a permis d’observer le fait que les différences
de rendement dépendent largement du système utilisé et des       Gestion intégrée des ressources en eau
spécificités du site (Seufert et al., 2012). L’augmentation de   L’eau est une ressource essentielle au développement en
la production agricole en Afrique d’une manière durable          Afrique. Les ressources hydriques sont indispensables à
nécessite divers instruments, incluant à la fois des pratiques   l’agriculture, secteur le plus gourmand en eau. Dès lors
écologiques et des pratiques conventionnelles, avec pour         que la majeure partie de la population africaine dépend de
objectif de préserver l’environnement sur lequel repose la       l’agriculture, le fait d’augmenter les ressources en eau peut
sécurité alimentaire.                                            améliorer la sécurité alimentaire, faire reculer la pauvreté
                                                                 et encourager la croissance économique. D’après les don-
Les forêts jouent un rôle important dans la sécurité alimen-     nées fournies par les indicateurs du développement dans le
taire, le chauffage et les revenus des populations des régions   monde de la Banque mondiale, le secteur agricole compte
avoisinantes. On estime que 70 % des foyers africains se         pour 85 % des utilisations d’eau chaque année, en Afrique, le
chauffe et cuisine avec des combustibles comme le bois ou        reste étant réservé à l’usage domestique (10 %) et industriel
le charbon et que la forêt représente un filet de protection     (5 %). Les utilisations domestiques, municipales et indus-
social pour de nombreux foyers dans les zones rurales, en        trielles s’intensifient néanmoins suite au développement
leur fournissant de la nourriture et des opportunités de         de l’urbanisation et du fait de l’augmentation des revenus.
revenu (Somorin, 2010).                                          D’après le PNUEH, la population urbaine en Afrique devrait

                                                                   Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique   9
croître de 45 % entre 2010 et 2030 (ONU-Habitat, 2010). En                              et afin d’entretenir les systèmes d’eau souterrains sont im-
     raison de la concurrence accrue entre les usages agricoles                              portants. A contrario, les régions qui reçoivent plus de pluies
     et non-agricoles (municipaux et industriels), la question de                            et qui dépendent des cultures pluviales doivent, quant à
     l’eau doit être considérée comme une problématique éco-                                 elles, mettre en place des infrastructures de récupération
     nomique, sociale et politique qui englobe tous les secteurs                             et d’alimentation des eaux, d’hydroélectricité et de contrôle
     de l’économie.                                                                          des crues. Actuellement, les pays d’Afrique subsaharienne ne
                                                                                             stockent que 4 % de leurs réserves en eau annuelles, comparé
     Les stratégies de croissance verte liées à la gestion intégrée                          à 70 ou 90 % dans les pays industrialisés (WWAP, 2009).
     des ressources en eau comprennent la récupération des eaux
     (infrastructures de stockage et de distribution) ainsi que la                           Outre la nécessité de mettre en place des infrastructures
     mise en place d’une gouvernance et d’un renforcement de                                 adaptées, il convient d’adopter un modèle de gouvernance
     institutions liées à la de gestion des eaux. Ces stratégies su-                         approprié pour une gestion durable, équitable et efficace des
     pervisent la disponibilité de l’eau et protègent la production                          ressources en eau. D’après le PNUD (2007), la gouvernance
     agricole contre les chocs climatiques. Il est donc important                            liée aux ressources en eau englobe « les systèmes politiques,
     que la gestion de l’eau en Afrique cible une utilisation efficace                       sociaux, économiques et administratifs mis en place pour
     des ressources hydriques, en particulier dans le domaine                                développer et gérer les ressources en eau à différents niveaux
     de l’agriculture. Il est indispensable de fournir et d’ache-                            de la société ». Parmi les options de gouvernance se trouvent
     miner plus efficacement l’eau aux cultures et d’augmenter                               de nouvelles formes de décentralisations des institutions
     le rendement par litre d’eau. Ceci s’avère particulièrement                             telles que les comités de bassin, les agences de gestion des
     important pour la majorité des pays africains, qui font face                            bassins versants et, au niveau local, les associations d’uti-
     à un manque d’eau cruel.                                                                lisateurs des ressources en eau, ainsi que les partenariats
                                                                                             public-privé. Elles signifient aussi une diminution du rôle
     En augmentant la disponibilité en eau à travers des in-                                 financier et technique du secteur public et de l’État (Niggi,
     frastructures de distribution, telles que l’irrigation, il devient                      2009 ; Salami et al., 2011).
     possible d’augmenter le rendement agricole. L’irrigation reste
     assez peu développée en Afrique, mis à part en Afrique du                               Gestion de la pêche
     nord et du sud (Kamara et al., 2009 ; You et al. 2011). Seuls                           La production totale de poisson en Afrique est estimée à
     6 % des terres cultivables collectives sont irriguées, ce qui re-                       7,6 milliards de tonnes par an, ce qui représente 8 % de la
     présente moins d’un tiers de la moyenne mondiale (Svendsen                              pêche mondiale. En plus de fournir des emplois à environ 10
     et al. 2009 ; Salami et al., 2010). Et pourtant, l’irrigation                           millions de personnes en ASS (Markwei et al., 2008), la pêche
     pourrait permettre d’augmenter la productivité de 50 %.                                 fournit environ 17 % des protéines animales consommées en
     Cependant, le cas de l’Afrique du nord montre bien que des                              Afrique et est particulièrement importante dans les régions
     pratiques d’irrigation extensive peuvent aussi mener à un                               où l’élevage est peu présent (Tidwell et Allan, 2001). Les
     usage peu durable des ressources en eau. L’irrigation doit                              petites entreprises de pêche traditionnelles1 emploient des
     servir à améliorer la disponibilité de l’eau et non à épuiser                           méthodes qui engendrent une empreinte carbone peu élevée.
     des ressources déjà limitées.                                                           La gestion de la pêche peut avoir des répercussions directes
                                                                                             sur d’autres ressources naturelles. Par exemple, les espèces
     Dans les régions particulièrement exposées à la sécheresse                              sauvages risquent d’être surexploitées pour servir comme
     d’Afrique du sud-est, l’est et du nord, où la hauteur des pré-                          source alternative de protéines dans le cas où il n’y aurait
     cipitations est inférieure à 1000 mm par an, les eaux souter-                           plus assez de poisson disponible (Bradshares et al., 2004).
     raines sont indispensables à la survie des cultures villageoises                        En outre, en servant d’alternative aux sources de protéines
     et à l’approvisionnement en eau des industries locales. Les
     investissements publics et l’aide au développement requis                               1	Dans un processus de pêche traditionnelle, les poissons sont capturés en milieu
     pour la mise en place de compétences et d’infrastructures                                  naturel au lieu d’être élevés.

10     Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique
et d’option de subsistance aux populations les plus pauvres,      convient de trouver un équilibre fragile entre les mesures
la pêche peut limiter la pression mise sur l’agriculture.         de croissance verte dans le secteur énergétique, en tenant
                                                                  compte du rôle que les énergies peu coûteuses peuvent jouer
Cependant, la pêche en Afrique a toujours été ouverte de          dans le développement tout en s’assurant que les économies
facto. Elle n’est donc régulée par aucune règlementation et       africaines suivent des modèles de développement durables,
est très peu supervisée. Alors que les efforts de pêche s’in-     efficaces et compétitifs dans un contexte de restriction des
tensifient, et les technologies se développent, les niveaux       émissions de CO2 et de mondialisation. Trouver cet équilibre
de production excédent la capacité de renouvellement des          nécessite une analyse précise de la manière dont les pays
espèces, comme l’illustre la baisse du nombre de prises           africains utilisent leurs ressources énergétiques renouvelables
par unités d’effort dans de nombreuses zones de pêche du          et non-renouvelables.
continent. De plus, les flottes étrangères ne respectent pas
toujours les quotas (quand ils existent) et ont grandement        Combustibles fossiles et substituts
contribuées à la situation actuelle, en particulier au regard     L’Afrique possède d’importantes ressources en combustibles
des réserves de poissons en haute mer dans les zones éco-         fossiles (pétrole, gaz, charbon). D’après des estimations
nomiques exclusives d’Afrique.                                    récentes, seuls neufs pays d’Afrique ne possèdent pas de
                                                                  réserves attestées ou potentielles en pétrole ou en gaz naturel.
Les stratégies de croissance verte destinées à résoudre ces       En 2011, le continent fournissait respectivement 9,5 % des
problèmes passent par la règlementation, l’investissement         réserves en pétrole, tandis que la part du gaz naturel s’élevait
dans le développement de la pêche et la promotion de l’aqua-      à 8 %. Les gisements africains de charbon représentent 4 %
culture. Les pays côtiers, en particulier ceux de l’ouest et du   de réserves mondiales (BP, 2012). Un montant significatif
sud-ouest africain, doivent améliorer leurs politiques dans       de ressources en combustibles fossiles en Afrique est ex-
le domaine de la pêche. Pour ce faire, ils doivent participer     porté hors du continent, soit environ 70 % du pétrole brut,
à l’effort international notamment en ce qui concerne la          55 % du gaz naturel sec et 23 % du charbon (AIE, 2011).
régulation qui encadre l’activité des pays qui pêchent dans       Ces ressources génèrent des revenus assez considérables et
leurs eaux. Il convient d’investir comme il se doit dans le       attirent les IDE. Entre 2000 et 2009, environ 75 % des IDE en
développement de la pêche, y compris dans l’évaluation            Afrique se sont tournés vers les pays producteurs de pétrole.
des stocks et des réserves marines. L’aquaculture (élevage        Mais, malgré les réserves abondantes dans de nombreux
de poissons) ne représente pour le moment qu’un tiers de la       pays d’Afrique, la sécurité énergétique reste extrêmement
production totale de poissons dans le monde, et uniquement        problématique sur le continent. Alors qu’en 2008 seuls 42 %
3 % en ASS. Le développement de l’aquaculture dans les eaux       de la population africaine avait accès à l’électricité, il est
douces intérieures et dans les eaux côtières est essentiel afin   estimé qu’en 2040 cette proportion atteindra les deux tiers
de réduire la pression sur la pêche traditionnelle.               de la population africaine (PIDA, 2011).

                                                                  Les gouvernements africains sont souvent soumis à des
3.2	Sécurité énergétique, combustibles fos-                      pressions sociales et politiques importantes, afin d’éviter
     siles et opportunités de développement                       qu’ils ne répercutent les chocs liés aux fluctuations des prix
     à faible émission de CO2                                     des hydrocarbures sur les consommateurs. Par exemple, le
                                                                  Nigéria a récemment fait face à des révoltes contre le retrait
La sécurité énergétique représente un enjeu important en          des subventions pour le gaz puisque les groupes d’intérêt
Afrique. L’ASS a besoin « d’émissions de subsistance » afin de    concernés considéraient ces subventions comme des droits
répondre aux besoins humains de base (Agarwal et Narain,          acquis. Ainsi, afin d’améliorer l’accès à l’énergie par les
1991 ; Sachs et Someshwar, 2010), ce qui contraste fortement      populations les plus défavorisées, et d’encourager la crois-
avec les « émissions de luxe » des pays développés. Tandis        sance économique, certains pays d’Afrique subventionnent
que la taille de l’économie africaine continue de croître, il     les combustibles fossiles. Ces subventions permettent de

                                                                    Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique   11
stabiliser les prix et de les garder plus bas que le prix du mar-                       ces réformes sont nécessaires afin d’encourager la croissance
     ché ; ce qui pourrait améliorer le pouvoir d’achat des foyers.                          économique à long terme, les gouvernements doivent mettre
     Les subventions permettent aussi de limiter la déforestation                            en place des programmes de protection sociale adaptés afin
     en décourageant l’utilisation du bois et du charbon pour la                             de protéger les populations les plus vulnérables. En effet, les
     cuisine et le chauffage.                                                                enjeux environnementaux ne doivent pas prendre le pas sur
                                                                                             les considérations sociales et économiques. Le processus de
     Pourtant, de nombreux arguments s’opposent aux subven-                                  réforme des subventions doit commencer par une évaluation
     tions. Les opposants à ces subventions considèrent qu’il                                des répercussions engendrées. Il convient également de
     faudrait supprimer ou réformer le régime des subventions                                sensibiliser le public aux raisons sous-jacentes des réformes
     dans le but de les rendre plus efficaces. Ceci est justifié par                         et aux bénéfices attendus à long terme. La mise en œuvre de
     le fait que les subventions font augmenter la consomma-                                 ces réformes exige une parfaite transparence et une approche
     tion, ce qui augmente la production de CO2. En outre, elles                             séquentielle bien conçue.
     bénéficient plus aux riches qu’aux pauvres. De plus, les
     subventions ont tendance à décourager l’investissement                                  Options liées aux TER
     dans les technologies des énergies renouvelables (TER)                                  L’Afrique dispose d’abondantes ressources renouvelables.
     et elles détournent également les ressources publiques de                               On estime que le potentiel solaire à lui seul représente entre
     domaines prioritaires telles que l’éducation, la santé ou les                           155 000 et 177 000 térawatts/heure (TWh) par an, répartis
     infrastructures de base. Par exemple, en Afrique du sud,                                à travers tout le continent. Les régions nord et ouest de
     les subventions pour les combustibles fossiles représentent                             l’Afrique sont particulièrement bien dotées en ressources
     6,4 % du prix du marché. Par conséquent, le retrait de ces                              solaires. Le potentiel de l’énergie éolienne en Afrique est
     subventions résulterait en un gain d’efficacité économique                              également important, s’élevant à 5000 à 7000 TWh, large-
     de 0,1 % du PIB et limiterait la consommation d’énergie de                              ment concentré dans le nord et l’est du continent. Quant
     6,3 % et les émissions de CO2 de 8,1 % (CCNUCC, 2007).                                  au potentiel géothermique, il s’élève à 1 - 16 TWh exclu-
                                                                                             sivement dans l’est du continent. La dotation africaine en
     Bien que les considérations environnementales et d’efficience                           hydroélectricité, qui couvre principalement l’Afrique centrale
     économique en faveur de la limitation ou de la suppression de                           et australe, s’élève à 1844 TWh.
     ces subventions aient reçu un appui intellectuel, les réformes
     dans ce domaine demeurent un sujet controversé. Lorsque

 Tableau 1 : Potentiel des énergies renouvelables dans les différentes régions d’Afrique
      Région                        Vent                           Solaire                   Biomasse             Géothermique         Hydraulique
                                    (TWh/an)                       (TWh/an)                  (EJ/an)              (TWh/an)             (TWh/an)

      Est                           2 000-3 000                        30 000                20-74                1-16                 578

      Centre                        -                              -                         49-86                -                    1 057

      Nord                          3 000-4 000                    50 000-60 000             8-15                 -                    78

      Sud                           16                             25 000-30 000             3-101                -                    26

      Ouest                         0-7                            50 000                    2-96                 -                    105

      Total Afrique                 5 000-7 000                    155 000-170 000           82-372               1-16                 1 844

 Source : IRENA (2011), à partir d’un recueil de diverses sources.

12     Rapport 2012 sur le développement en Afrique : Vers une croissance verte en Afrique
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