Rapport de stage : Novo Ideo

La page est créée Jocelyne Ferreira
 
CONTINUER À LIRE
Rapport de stage : Novo Ideo
UPEC AEI – Master 1 politiques publiques, parcours Action publique

                            Rapport de stage :
                               Novo Ideo

   L’action publique écologique dans la campagne pour les élections
                  présidentielles et législatives 2017

                                             Auriane Biron
                                              18/05/2017

Action publique, écologie, élection présidentielle, think tank
Remerciements

Je tiens à remercier toutes les personnes qui ont contribué au succès de mon stage et qui m'ont aidé
lors de la rédaction de ce rapport.

Tout d'abord, j'adresse mes remerciements à mon professeur, Mr Fabrice Hamelin, qui m'a permis
de trouver ce stage.

Je tiens à remercier vivement mon tuteur de stage, Mr Jean-Marc Pasquet, pour sa confiance, grâce à
laquelle j’ai pu m’accomplir dans mes missions. L’indépendance qu’il m’a accordée m’a aussi aidée à
progresser.

Je remercie également La Fabrique Documentaire pour son accueil, et en particulier Mr Benjamin
Bibas, pour ses précieux conseils et quelques suggestions musicales.

                                                                                                  2
Table des sigles

Andra : Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs

AP : action publique

APE : action publique écologique

DD : développement durable

EELV : Europe-Ecologie-Les-Verts

FN : Front National

GIEC : Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat

LTE : Loi de transition énergétique

NDDL : Notre-Dame-Des-Landes

ONG : Organisation Non-Gouvernementale

PP : politiques publiques

PS : Parti socialiste

UE : Union Européenne

                                                                        3
Sommaire

Remerciements                                                                                      2
Table des sigles                                                                                   3
Sommaire                                                                                           4
Introduction                                                                                       5
Première partie : L’EcoloBaromètre2017 de Novo Ideo                                                6
        I. Novo Ideo, un think tank                                                                6
                  A. Novo Ideo                                                                     6
                  B. Les think tanks en France                                                     8
        II. Mes missions                                                                           9
                  A. Collecte d’informations                                                       9
                  B. Production d’analyse                                                          11
Deuxième partie : Etat, candidats et acteurs non-étatiques face à l’écologie                       14
        I. L’écologie dans les campagnes : des visions multiples                                   14
                  A. L’écologie comme enjeu de politiques publiques                                14
                  B. Pour l’élection présidentielle, des candidats à l’ambition écologie variée    16
        II. La place des acteurs publics non-étatiques dans le débat sur l’action publique         18
                  A. Le think tank, un acteur ambivalent entre expertise, recherche et plaidoyer   18
                  B) Gouvernance et action publique écologique                                     20
Conclusion                                                                                         22
Bibliographie                                                                                      23
Annexes                                                                                            26
        Annexe 1 : Le tableau Excel du premier tour                                                26
        Annexe 2 : Le questionnaire envoyé à Marine Le Pen                                         50
        Annexe 3 : Méthodologie de l’EcoloBaromètre                                                53
        Annexe 3 : Brouillons d’articles de l’entre-deux tours                                     56

                                                                                                        4
Introduction

        Avec le recul que j’ai, je dirais que le moment le plus intense de mon stage fut quand, lassés
par des discussions sans fin sur des graphiques impossibles à représenter, nous avons collectivement
décidé, pour produire une analyse claire des programmes écologiques des candidats à l’élection
présidentielle, de noter ceux-ci sur un axe de « gentil » à « méchant ».
        Evidemment, ce n’était pas une décision sérieuse. Mais la problématique de la neutralité en
politique a malgré tout été un questionnement constant au cours de mon stage jusqu’à aujourd’hui.

         En cherchant un stage, je voulais sortir de tâches opérationnelles ou logistiques que j’avais
effectuées lors de mon stage de licence. J’avais en effet à cette occasion beaucoup appris sur le
fonctionnement concret d’une ONG, mais je n’avais pas l’impression d’avoir progressé
intellectuellement. Cette fois, je voulais réfléchir.
         J’avais déjà une idée en tête : le monde des think tanks. Pour moi, ça semblait un juste
équilibre entre l’entreprise et la recherche. En effet, cette dernière m’attire, mais je ne suis pas
certaine d’avoir les compétences pour être chercheuse. Je visualisais cependant en tant que think
tanks des grandes structures américaines recherchant uniquement des post-doctorants spécialistes
de la politique fiscale des Etats-Unis ou des relations irako-syriennes depuis la chute de l’empire
ottoman. Soit des domaines d’expertise très précis que je ne maîtrise pas.
         C’est là que M. Hamelin a transmis l’offre de Novo Ideo. Le think tank « écologiste et
progressiste indépendant » cherchait un stagiaire de master qui serait « chargé de décrire,
d'analyser, de comparer et d'évaluer les programmes des candidat/es sur la question de la transition
écologique des territoires ». En plus d’un intérêt pour les politiques publiques territoriales, le stage
demandait entre autres des capacités d’analyse et méthodologiques, de l’autonomie et des qualités
de rédaction. Des compétences que je devrais avoir si je me décidais en effet à faire de la recherche.

         Novo Ideo est donc un think tank orienté vers les politiques publiques et l’écologie, fondé et
présidé par Jean-Marc Pasquet, mon tuteur. C’est une structure relativement petite, dans un monde
des instituts de recherche encore jeune en France.
         C’est pour cela que j’ai travaillé quelques jours par semaine à La Fabrique Documentaire et le
reste du temps chez moi. Là, j’ai analysé les programmes écologiques notamment des cinq
« principaux » candidats à l’élection présidentielle et j’ai participé à l’élaboration de
l’« EcoloBaromètre2017 » de ces programmes. C’est une mission que je continue en vue des
élections législatives.

        Durant ce stage, une question récurrente s’est posée : comment l’action publique écologique
(APE) se construit-elle ?
        Premièrement, on peut argumenter que Novo Ideo et moi-même avons contribué à
construire l’action publique (AP) liée à l’écologie par l’EcoloBaromètre2017, même à une échelle
relativement petite. Ensuite, il convient d’analyser les différents acteurs qui participent à cette APE,
qui semble particulièrement encline à la participation de différents niveaux de gouvernement et
différentes formes de gouvernance.

                                                                                                      5
Première partie : L’Ecolobaromètre 2017 de Novo Ideo

         Novo Ideo, en tant que think tank d’orientation écologiste, se devait se regarder sous cet
angle l’élection présidentielle. C’est donc ce que je l’ai aidé à faire.

I. Novo Ideo, un think tank

         Un think tank est un organisme privé qui mène des recherches et des analyses techniques ou
scientifiques liées aux politiques publiques.1 L’expression anglaise « think tank » peut se traduire par
« laboratoire d’idées » ou « groupe de réflexion ». Créé en 2009, Novo Ideo est un acteur
relativement jeune dans ce monde lui aussi récent en France.

A) Novo Ideo

        Novo Ideo se décrit comme « un think tank d’inspiration progressiste, sociale, humaniste,
laïque et écologiste au service des politiques publiques territoriales »2.
        A sa fondation en 2009, il est décrit comme une nouvelle plate-forme de réflexion en ligne,
lancée sous l’impulsion d'un groupe de Verts. Il se veut « le premier think tank grand public de
l'écologie politique ».3 Depuis, il n’est plus lié ni aux Verts ni à EELV.
        D’après ses statuts, il a pour but de diffuser les pratiques et idées écologistes au moyen de
publications, prioritairement par le biais d’un site Internet et de newsletter. Il s’adresse notamment
aux élus et associatifs écologistes.
        Novo Ideo a été labellisé en 2016 « think tank et transparent » par l’Observatoire européen
des think tanks.

         Novo Ideo aborde des thèmes aussi variés que la culture, les médias, l’écologie, l’économie,
le social, l’international ou l’Europe, par une approche concrète des projets, le plus souvent à travers
le prisme du local. Sa spécificité est donc de s’encrer sur le territoire, contrairement à la plupart des
structures similaires, qui ont une approche nationale ou internationale. Ce changement d’échelle
permet de dégager de nouvelles problématiques. C’est aussi une focale qui convient
particulièrement aux thématiques environnementales et écologiques.
         Le think tank veut aussi être une force de proposition plutôt qu’une simple plate-forme de
discussion.

         Créée par Jean-Marc Pasquet, Novo Ideo est une association « Loi 1901 », toujours présidée
par son fondateur. Elle est animée par des membres bénévoles et son réseau de contributeurs. Ceux-
ci étaient 243 en janvier 2017.

1
  NAY Olivier (2014), Lexique de science politique, Dalloz, France, ISBN 978-2-247-13711-4, 628 pages
2
  Novo Ideo, « Qui sommes-nous ? », http://www.novo-ideo.fr/qui-sommes-nous/, consulté le 15 avril 2017
3
  SOLETTY Marion, « Novo Ideo, un think tank pour l'écologie politique », L’Express.fr, 18 septembre 2009,
http://www.lexpress.fr/actualite/politique/novo-ideo-un-think-tank-pour-l-ecologie-politique_788696.html,
consulté le 14 avril 2017

                                                                                                             6
Sa gouvernance est composée d’un Bureau, d’un Conseil d’Administration et d’un Conseil
d’Orientation créés en 2016.

        D’après les statuts, le conseil d'administration de 9 membres maximum est désigné par
l’Assemblée générale pour diriger l'association. Cette assemblée élit directement un président, un
trésorier et un secrétaire qui sont membres du conseil. Les membres du conseil d'administration sont
élus pour une durée de deux ans. Ils sont rééligibles. Le président représente l'association dans tous
les actes de la vie civile. Le secrétaire est chargé de tout ce qui concerne la correspondance et les
archives. Il rédige les procès verbaux des réunions et assemblées et, en général, toutes les écritures
concernant le fonctionnement de l’association, à l’exception de celles qui concernent la comptabilité.
Le trésorier est chargé de tenir ou faire tenir sous son contrôle la comptabilité de l’association. Il
effectue tous paiements et reçoit toutes sommes dues à l’association. Il ne peut aliéner les valeurs
constituant le fonds de réserve qu’avec l’autorisation du conseil d’administration. Il tient une
comptabilité régulière de toutes les opérations qu'il effectue et rend compte à l’assemblée générale
annuelle qui approuve sa gestion. Le conseil d'administration se réunit au moins une fois par an.4
        Jean-Claude Lescure est le Président du Conseil d’orientation.

          Novo Ideo a de nombreux partenariats ou amis :
         La Fabrique Documentaire, qui a pu m’accueillir dans ses locaux ;
         FabR, design web ;
         Observatoire des Politiques Publiques de l'Université Paris-Est Créteil, donc un lien avec le
          monde de l’université ;
         Fondation de l'Ecologie Politique ;
         Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri) ;

4
    Novo Ideo, « Statuts », http://www.novo-ideo.fr/wp-content/uploads/2016/11/statuts_Novo_Ideo_2016.pdf

                                                                                                        7
   Etopia, centre d'animation et de recherche en écologie politique ;
       Reporterre, média engagé pour l’écologie ;
       Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme, un autre think tank.

        Novo Ideo est financé par les cotisations de ses membres et des subventions publiques (à
plus de 95%), à l’exclusion de toute personne morale privée. L’association a 7 000€ de budget pour
l’année 2017, soit une augmentation par rapport à 2016.
        D’après ses statuts, ses ressources comprennent :
        • Le montant des cotisations Statuts de Novo Ideo ;
        • Les subventions de l'Union européenne, de l'État, des collectivités locales, des
établissements publics ;
        • Les recettes des manifestations organisées par l'association ;
        • Les ventes faites aux membres ;
        • Toutes ressources autorisées par la loi.

        L’orientation politique de Novo Ideo est résumée par son inspiration « progressiste, sociale,
humaniste, laïque et écologiste ». C’est une inspiration dont le think tank se revendique, car elle fait
son identité, son socle de valeurs. En politique, il semble impossible d’être neutre et objectif. A
défaut, il est possible d’expliquer et de clarifier les valeurs et les aprioris sur lesquels se basent une
analyse ou un jugement.

B) Les think tank en France

         L’expression « think tank » a été forgée au cours de la Seconde Guerre mondiale pour décrire
les penseurs et stratèges embarqués dans les chars de combat pour conseiller le commandement
militaire des Etats-Unis. Il existe des centaines de think tanks américains et plusieurs milliers dans le
monde.5
         Pour l’Observatoire Européen des Think Tanks (OETT), l’appellation « think tank » regroupe
les associations, fondations ou autres entités privées ayant une activité non principalement
marchande et travaillant à étudier et produire des contenus innovants de politique publique.6
         L’objectif d’un think tank est d’informer et d’influencer le personnel politique, les médias, les
milieux d’affaires et l’opinion publique par la production d’études et d’analyses sur des enjeux de la
vie politique. Pour ce faire, ils collectent, synthétisent et analysent tout un ensemble de données
théoriques et empiriques à partir desquelles ils élaborent ensuite une expertise fiable.
         Les think tanks effectuent un travail de réflexion, d’information et de conseil car ils
entendent participer aux nouvelles logiques de pouvoir en étant présents dans la mise en œuvre des
politiques publiques, des processus de normalisation et des programmes de sensibilisation et de
formation de l’opinion. C’est au travers de leurs activités de recherches et de publication, se
développant notamment par le biais de sites internet et de revues, que les think tanks proposent
leurs analyses et solutions et diffusent leurs opinions.
         Pour l’OETT, les caractéristiques et missions des think tanks sont les suivantes :

5
 NAY Olivier (2014), Lexique de science politique, Dalloz, France, ISBN 978-2-247-13711-4, 628 pages
6
 URRUTIA, O., MERED, M., DENOUAL, R., et al. (2016). La France des Think Tanks 2016. Paris : Observatoire
Européen des Think Tanks, 308 p

                                                                                                            8
• Organismes permanents se spécialisant dans la production de solutions de politique
publique, grâce à des experts dédiés à la recherche et fournissant une production originale de
réflexion, d'analyse et de conseil, qui a vocation à être communiquée aux gouvernants et à l'opinion
publique.
        • Ne sont pas chargés d'accomplir des missions gouvernementales et s'efforcent de
maintenir leur liberté de recherche et de ne pas être liés à des intérêts spécifiques ; pas pour tâche
principale de former ni d'accorder des diplômes.
        • Ambition, explicite ou implicite, d'œuvrer au bien public, par opposition aux organes à but
uniquement commercial et lucratif.

        Les principaux facteurs qui concourent au développement des think tanks dans le monde
depuis le début du 21ème siècle sont les suivants :
        • Révolution des technologies de l’information et de la communication ;
        • Fin du monopole étatique de l’information ;
        • La multiplication et la complexité technique croissante des problématiques politiques
        • La méfiance croissante envers l’Etat et ses institutions ;
        • Le phénomène de globalisation et l’essor exponentiel des acteurs non étatiques
        • Les crises économiques, politiques et militaires ;
        • La crise de la représentation politique ;
        • Le transfert de souveraineté des Etats dans le cadre des institutions supranationales.

         Certains courants politiques en France ont leur think tank depuis relativement longtemps.
C’est le cas de la droite libérale avec l’Institut Montaigne (fondé en 2000) et des socialistes avec Terra
Nova. Il existe aussi (entre autres, évidemment) la Fondation pour l’écologie politique, mais celle-ci
n’est pas dans le classement de l’OETT.

II. Mes missions

         Lors de mon premier entretien téléphonique avec Jean-Marc Pasquet, mes tâches avaient
été définies ainsi : veille d’observation des programmes des candidats aux élections présidentielles et
législatives. L’objectif était de construire un baromètre sur une approche territoriale de la transition
écologique via un travail documentaire et, dans un deuxième temps, des rencontres. Un élément-clef
du cahier des charges était déjà de produire un travail lisible pour les médias.
         Ce travail supposait deux types de tâches, chacune nécessitant des compétences différentes.
D’une part, la collecte d’informations m’oblige à avoir une certaine culture politique et médiatique
ainsi qu’une capacité à m’organiser. D’autre part, la production d’analyses va avec un esprit
synthétique et certaines qualités littéraires.

A) Collecte d’information

         Mon stage a commencé le 15 février, relativement tard par rapport à la quantité
d’informations que je devais digérer.
         La question s’est tout-de-suite posée du ciblage des candidats à étudier. En effet, à cette
date, la liste des candidats retenus n’était pas définitive, la date limite pour le dépôt des signatures,

                                                                                                        9
et donc des candidatures, étant fixée au 17 mars. Les cinq « principaux » (Emmanuel Macron, Marine
Le Pen, François Fillon, Jean-Luc Mélenchon et Benoit Hamon) étaient des évidences. Etaient ensuite
envisagés deux candidats considérés comme « moyens », Nicolas Dupont-Aignan et Yannick Jadot, et
peut-être une « petite », Charlotte Marchandise. J’ai finalement concentré la majorité de mes efforts
sur les cinq « grands ».
         Dans ma collecte d’éléments programmatiques, j’ai commencé par les sites officiels des
candidats. Ce fut facile pour Marine Le Pen, François Fillon et Benoit Hamon. Les premières difficultés
sont venues avec le programme de Jean-Luc Mélenchon et La France Insoumise, difficilement
trouvable sur internet. J’ai utilisé le livre L’Avenir en commun, qui m’avait été prêté pour l’occasion
(avant de trouver le programme complet en PDF sur internet).
         A ce point de mon travail (une semaine après le début de mon stage), j’avais toutefois un
problème : Emmanuel Macron n’avait toujours pas sorti de programme. Les informations à ce stade
suggéraient que la présentation aurait lieu début mars, avec un cadrage budgétaire fin février. Etant
donné le timing serré, j’ai donc dû recourir à d’autres moyens. Le premier que j’ai trouvé était une
vidéo d’un live de Mediapart datant de novembre dernier. J’ai ainsi pu avoir quelques orientations
écologiques générales, mais les informations étaient parfois floues et trop anciennes, et j’avais
l’impression qu’un certain nombre de points s’étaient précisés depuis cette interview.
         J’ai profité de cette incursion sur la chaine Youtube de Mediapart pour regarder une
interview de Benoit Hamon datant de janvier, au moment des primaires citoyennes de la Gauche.
Toutefois, la partie écologie (qui se limitait à l’énergie) était assez peu satisfaisante, notamment du
point-de-vue des instruments de politiques publiques.
         Des éléments programmatiques du coté d’Emmanuel Macron sont venus avec son interview
par le WWF, avec Libération. J’ai pris en notes tous les éléments plus ou moins concrets de politiques
publiques, puis je me suis aidée pour les remettre en contexte d’un article sorti le jour même sur le
site de Libération suite à la vidéo.

        A ce moment, je notais toutes les propositions que je trouvais ayant trait à l’écologie ou
l’environnement en vrac, sans trop avoir d’orientation méthodologique. Celle-ci est toutefois vite
venue, et j’ai commencé un tableur Excel. La première étape était de pouvoir lister les propositions
des candidats (un candidat par colonne) par grande thématique (santé, énergie, transports …).
Ensuite, je devais noter chaque proposition, ou item, de 1 à 3 (1 : orientation générale, 2 : affirmation
avec objectif précis/chiffrage, 3 : priorité). Le but était de produire un tri des informations lisible et
« pas trop littéraire », selon les notes que j’ai prises lors d’un appel avec M. Pasquet. En bref, le
baromètre forçait à simplifier certains éléments.

         Tandis que je regardais les programmes, je devais aussi élargir ma culture des
problématiques écologiques, pour mieux comprendre les problèmes que les propositions des
candidats voulaient résoudre. J’ai donc regardé des analyses d’autres think tanks (Terra Nova …), des
articles de médias divers (Les Echos, Reporterre …)

        Une fois les propositions rassemblées (même si elles étaient toujours sujettes à
actualisation), je les ai classées dans des sous-catégories, elles-mêmes classées dans des grandes
catégories : (en gras celles retenues pour l’analyse finale)
        - Energie : nucléaire ; renouvelables ; énergies fossiles ; habitat durable ; autres

                                                                                                       10
-     Agriculture : bio, agro-écologie, alimentation ; circuits courts ; modernisation et mode
             d’agriculture ; autres
        - Transports : mobilité individuelle, diesel ; transports collectifs ; autres
        - Environnement, biodiversité : déchets ; pollution air, eau et sols ; autres
        - Autres : maltraitance animale ; procédures ; principe de précaution ; Notre-Dame-des-
             Landes ; autres
        Certaines sous-catégories n’étaient abordées que par un candidat (ex : François Fillon et les
procédures), d’autres avaient une portée assez limitée (ex : Notre-Dame-des-Landes). J’ai tenté de
mettre la maltraitance animale dans l’agriculture, mais cela occultait par exemple la question des
tests sur les animaux.

       Puis, Yannick Jadot s’est retiré pour former une alliance avec Benoit Hamon, modifiant le
programme de celui-ci. J’ai fait des dernières recherches de mises à jour de propositions, et nous
avons pu finaliser l’EcoloBaromètre et construire un document présentant méthodologie (en Annexe
3).

        Finalement, j’ai aussi regardé les programmes écologiques des « petits » candidats, sans
classer et noter leurs propositions.

         Après le premier tour, il s’agissait de concentrer le tir sur Emmanuel Macron et Marine Le
Pen. Le but au départ était de produire un article de sur chacun des candidats. J’ai commencé par
vérifier et actualiser les propositions des candidats, en cherchant notamment à préciser les
propositions qui ne rentraient pas dans les catégories analysées au premier tour (la maltraitance
animale, NDDL …) Je me suis aussi intéressée à ce que pouvait signifier la disparition de certains
départements (pour Emmanuel Macron) ou des régions et des intercommunalités (pour Marine Le
Pen). Mais, pour le deuxième tour, la partie recherche était assez limitée

B) Production d’analyse

         De nombreuses questions se sont posées sur la méthodologie de l’EcoloBaromètre. Il a été
par exemple envisagé de faire des « araignées » avec les notes sur chaque sous-thématique et de les
colorier pour symboliser la centralisation ou décentralisation sous-jacente des mesures.
         J’avais aussi à faire un questionnaire qui serait envoyé à l’équipe des candidats. Au départ,
j’avais essayé de produire de véritables questions pour chaque candidat, mais je n’avançais pas
vraiment.
         Puis il a été décidé que le même questionnaire serait envoyé à toutes les équipes. Nous
envisagions alors de leur faire « valider les araignées » établies avec leurs priorités. Ainsi, nous
pourrions soit voir nos analyse et notation confirmées, soit faire des découvertes, soit conclure que
certaines équipes notaient de manière aléatoire (ou s’attribuaient des priorités maximales partout
pour nous faire plaisir). En plus, nous voulions leur proposer la possibilité de s’étendre de manière
littéraire sur une mesure par grande thématique, pour leur permettre soit d’insister sur leurs
priorités, soit de s’étendre sur des moyens.

                                                                                                   11
Mon premier carnet de notes se finit sur une question qui nous donnera du fil à retordre :
« priorité, mais aussi ambition ? » En effet, la note de 1 à 3 permet de noter l’importance que la
mesure semble avoir pour le candidat et les efforts qu’il pourrait de ce fait y consacrer. Cette note
pouvait devenir négative (-1, -2, -3) si la mesure était contre-productive pour l’environnement (ex :
engager le Grand Carénage : -2).
         Mais certaines mesures sont plus facilement réalisables ou plus ambitieuse que d’autres.
Sortir du nucléaire, ce n’est pas comme sortir du charbon. Là se posait la double question de
l’ambition et de la faisabilité, très difficiles à juger. C’était la solidité des propositions qui était aussi
en jeu. Ces éléments devaient-ils mener à une pondération des notes dans les sous-catégories ? Un
candidat avec 10 mesures à 1 point difficilement réalisables devait-il être mieux noté qu’un avec une
mesure +3 facilement réalisable ? ou qu’un candidat à trois mesures +1 très ambitieuses ?
         Tous les éléments ne pouvaient pas être directement visibles dans la notation, qui pourrait
simplement être pondérée.
         Finalement, il a été décidé que la notation globale serait de -3 à +3 sur chaque grand thème
(énergie, agriculture, transports et environnement, biodiversité). Ce serait une moyenne des notes
données à chaque proposition pondérée par leur nombre, leur cohérence, leur ambition et leur
faisabilité.

        Début mars, nous avons arrêté une forme pour les questionnaires : chaque candidat se
verrait envoyer un tableau avec ses propres propositions, à classer par ordre de priorité de 1 à 3
(sans les + et -). (En Annexe 2, l’exemple du questionnaire envoyé à Marine Le Pen, le plus court.) A
l’époque, la question se posait du retrait de François Fillon, mais nous lui avons malgré tout envoyé
un questionnaire.
        Nous avons reçu deux réponses sur cinq. D’abord celle de Martine Billard, responsable
écologie chez Jean-Luc Mélenchon. Elle n’a pas eu le temps de remplir le questionnaire avant que
nous fassions le Baromètre, mais elle a rapidement validé les items et les propositions. Elle avait
aussi proposé un rendez-vous, qui n’a pu avoir lieu faute de temps.
        Ensuite celle de l’équipe de Marine Le Pen, dont le questionnaire avait été envoyé à une
connaissance à moi ayant des liens avec le Front National, et c’est cette connaissance qui l’a transmis
à la personne compétente et l’a relancée. C’est le seul questionnaire rempli (bien qu’à minima) qui
nous ait été renvoyé. Je pense que c’est plus lié à mes rapports amicaux avec la personne que je
connais au FN, à qui j’avais dit que les réponses étaient importantes pour mon stage, qu’à autre
chose. Les notations étaient cohérentes avec les miennes, même si pas forcément identiques.

        Les notes ont été revues pour la publication sur le site, avec des pondérations et arbitrages
parfois complexes. En effet, il s’agissait de noter un programme, sans pour autant ignorer la
personnalité du candidat, son équipe, ses soutiens …
        Je pense que la méthodologie présente sur le site (et en Annexe 3) montre, à défaut d’une
neutralité impossible à atteindre, une certaine ambition de transparence et d’honnêteté
méthodologique.

       J’ai produit deux lignes sur le programme écologique de chaque « petit » candidat, qui sont
reproduites telles quelles sur le site de Novo Ideo.

                                                                                                           12
Pour le second tour, j’ai eu moins d’une semaine pour produire 4 000 signes, tout en restant
attentive à l’actualité. Finalement, la forme des articles sur le site a changé pour n’avoir plus qu’un
article traitant des deux candidats. Cet article est plus « politique » et contextualisé que les deux
miens, qui restent très axés politiques publiques. (En Annexe 4, mes deux brouillons d’articles.)

         Une fois l’élection présidentielle passée, je fournirai un travail similaire sur les élections
législatives, en regardant notamment les évolutions des programmes.

         Depuis le début de mon stage, j’ai eu beaucoup de liberté. Premièrement en ce qui concerne
l’organisation de mon travail. En effet, je ne suis à La Fabrique Documentaire que 2 jours par semaine
environ. Le reste du temps, je travaille de chez moi, ou à vrai dire d’où je veux. C’aurait d’ailleurs
probablement parfois été plus difficile si je n’avais pas eu de smartphone, car celui-ci m’a parfois été
bien utile, notamment en me permettant de relire un brouillon d’article en proposant mes
corrections alors que je n’étais pas chez moi.
         J’ai aussi une grande autonomie dans mon travail lui-même. J’ai la responsabilité des
informations que je collecte, et si je me trompais par exemple sur une proposition ou faisais quoi que
ce soit pour par exemple nuire à un candidat en lui attribuant des propositions qu’il n’a pas, c’est sur
Novo Ideo que cela retomberait, car Ms. Pasquet et Bibas n’ont pas refait le travail après moi pour
tout confirmer. C’est don une grande confiance qui m’a été accordée.

         J’ai pu progresser, pendant ces trois mois. J’ai acquis de nombreuses connaissances sur
l’écologie et ses enjeux, mais aussi sur les médias et sur la communication politique. J’ai pu explorer
la méthodologie d’un think tank sur un dossier particulier en tenant compte des différentes
contraintes pesant sur celui-ci (être lisible, être en accord avec ses valeurs sans être trop partial …).
         Je regrette de n’avoir pu réaliser d’entretien, mais j’ai bon espoir de pouvoir le faire lors de
mon travail à venir sur les élections législatives.
         J’ai aussi l’impression que certains enjeux sont encore un peu flous pour moi, notamment
lorsqu’ils touchent au technique et technologique. C’est notamment le cas dans le domaine de
l’énergie.
         J’ai conscience d’avoir parfois perdu du temps. D’une part parce que la « veille d’actualité »
sur Twitter s’est parfois transformée en visionnages répétés du « Bottle Flip Challenge » d’Emmanuel
Macron,7 d’autre part parce que j’ai tendance à perdre du temps à cause de mes connaissances
rudimentaires d’Excel.

        Je ne suis pas certaine de l’impact de ce stage sur mon projet professionnel – plus de recul
serait nécessaire – mas je sais que j’éprouve rarement autant de satisfaction que lorsque j’ai
l’impression de comprendre quelque chose, surtout si cela me semble être quelque chose de
nouveau ou d’inédit.
        Je pourrais probablement être épanouie professionnellement dans ce genre de domaine.

7
 « Emmanuel Macron bottle flip challenge », https://www.youtube.com/watch?v=qpnxFtXSE4Y, Chaine
Youtube Snapchat Pro Red, 20 avril 2017, consulté le 20 avril 2017

                                                                                                      13
Deuxième partie : Etat, candidats et acteurs non-étatiques face à l’écologie

        L’action publique peut être opposée aux politiques publiques en ce qu’elle concerne des
acteurs plus nombreux que les simples structures gouvernementales classiques.8
        Dans l’action publique écologique (APE), l’Etat a un rôle central (démontré par exemple par
l’importance du ministère de l’écologie, etc.). Les candidats à la l’élection présidentielle, qui
cherchent à devenir le premier personnage de l’Etat, s’y intéressent naturellement, de manières
multiples. Toutefois, la place réservée dans l’APE aux acteurs non-étatiques de plusieurs ordres est
aussi importante.

I. L’écologie dans les campagnes : des visions multiples

         L’écologie, parfois appelée environnement, s’est au cours de l’histoire récente développée
comme un domaine de politiques publiques. Dans cette campagne, on remarque toutefois que les
différents enjeux qui la composent sont traités de manières très différentes par différents candidats
à l’élection présidentielle.

A) L’écologie comme enjeu de politiques publiques

         Un domaine d’intervention de l’Etat, et donc de PP, se développe lorsque l’Etat juge qu’on
est face à un problème public.
         Les problématiques écologiques ont commencé à se diffuser dans les années 1970. C’est sur
cette décennie que la première candidature écologiste à la présidentielle a eu lieu, avec René
Dumont. Le résultat du scrutin sur la France est faible (1,32% des votes), mais il s'agit surtout
d'utiliser les médias pour faire connaître la pensée écologiste en politique. La politique écologique
française fondée par Dumont est pacifiste, contre le capitalisme agressif, pour la solidarité entre les
peuples et elle prend en compte le monde en voie de développement. En avance sur son temps,
Dumont prédit l'inévitable hausse du prix des carburants.9
         Pour prendre un exemple peut-être moins politique signifiant la progression de ces thèmes
dans la société, on peut citer le film L’Aile ou la cuisse, de Claude Zidi. Cette comédie de 1976 traite
en effet de la « malbouffe » due à la nourriture industrielle, thématique importante dans les milieux
écologistes. Aujourd’hui encore, ils fustigent l’agriculture industrielle et la pollution qu’elle génère et
prônent l’agriculture bio, sans OGM, en circuits courts.

        L’enjeu environnemental a été pensé comme un enjeu transversal, mais cela n’a pas
forcément été le cas au début. C’est aujourd’hui qu’on assiste par exemple à un rapprochement
croissant entre les enjeux sanitaires et ceux de l’environnement. Le domaine qui a le plus évolué est
sans doute celui de l’énergie. L’élargissement du champ de l’environnement s’est accompagné par un

8
  « Action publique » : NAY Olivier (2014), Lexique de science politique, Dalloz, France, ISBN 978-2-247-13711-
4, 628 pages
9
  INA, « RENE DUMONT Campagne électorale officielle : élection présidentielle 1er tour », Video INA,
https://www.ina.fr/video/CAF92033886, consulté le 21 avril 2017

                                                                                                              14
effort d’intégration de l’environnement dans les politiques sectorielles. C’est une double logique
d’innovation et de routinisation.10
         Les PP environnementales relèvent d’une série de programmes transversaux à beaucoup de
secteurs classiques (agriculture, transports, énergie …). Le ministère de l’Environnement ne gouverne
qu’une faible part du domaine qui semble lui être attribué par son intitulé.11
         Pour Joseph SZARKA, cité par LASCOUMES (2008), le modèle qui décrit le mieux l’APE est le
modèle néo-institutionnel, car le « style français » est déterminé par le rôle prégnant de
l’administration et de ses découpages, tensions internes et grands corps. Ce poids institutionnel filtre
et reformate les impulsions extérieures.12 Ce sentier de dépendance a intégré depuis environ trente
ans de nombreux changements qui trouvent leurs sources à l’extérieur ou à l’intérieur des
institutions.
         Le modèle de « sédimentation institutionnelle » de STREECK et THELEN (cité par
LASCOUMES, 2008) met l’accent sur la nécessité pour les décideurs de prendre en compte de
nouveaux objectifs et instruments tout en les insérant dans des structures préexistantes. Si les
programmes environnementaux gardent toujours un aspect expérimental, ils comportent aussi une
part de stabilisation et de généralisation de certaines pratiques. On retrouve l’innovation et la
routinisation. Le but de l’innovation peut alors se perdre, donnant lieu à une ritualisation.

         Il y a eu une internationalisation des PP environnementales, due aussi bien à des
changements cognitifs qu’à des stratégies d’acteurs ou à l’usage d’instruments d’AP originaux. De
nombreuses idées et normes se sont diffusées, orientant les choix des décideurs, parfois dans des
logiques de benchmarking. Ces logiques sont toujours à l’œuvre aujourd’hui, comme le montrent les
COP, et notamment la COP 21 en 2015.
         C’est ainsi qu’a émergé la notion de développent durable (DD), qui peut être appelé
« développement soutenable », ce qui le rapproche plus du « sustainable development » anglais. Ce
DD consiste à modifier son modèle de développement pour assurer la poursuite de dynamiques
économiques et sociales viables sur le long terme et défendable au nom d’une équité qui compense
les inégalités actuelles et en prévient de futures. C’est toutefois une notion assez floue, qui ne forme
pas par exemple à elle seule une PP. L’institutionnalisation des PP environnementales par l’insertion
dans la Constitution d’une Charte de l’environnement qui donne une force majeure à une série de
principes favorables au DD signifie une évolution des mentalités et un volontarisme politique. L’un
peut d’ailleurs renforcer l’autre.
         L’internationalisation des PP de DD a aussi mené à la création de notions telles que les biens
publics mondiaux, qui sont des ressources ou services qui sont indispensables au bien-être des
individus et ne sont susceptibles d’aucune appropriation privée. Ceux-ci, dans une logique de
routinisation, ont accumulé tellement d’éléments disparates (l’air, la santé publique, la paix, mais
aussi la régulation financière internationale) qu’ils ne sont plus vraiment des concepts opérants.

10
   LASCOUMES Pierre, « Chapitre 1 : les politiques environnementales », in BORRAZ Olivier et al., Politiques
publiques 1, Presses de Science Po (P.F.N.S.P.) « Académique », 2008, p27-69
11
   Voir : Ministère de l’environnement, de l’énergie et de la mer, « Politiques publiques »,
http://www.developpement-durable.gouv.fr/politiques-publiques, consulté le 11 avril
12
   LASCOUMES Pierre, « Chapitre 1 : les politiques environnementales », in BORRAZ Olivier et al., Politiques
publiques 1, Presses de Science Po (P.F.N.S.P.) « Académique », 2008, p27-69

                                                                                                               15
L’européanisation signifie à la fois un style d’action spécifique à l’UE et l’influence de l’Union
par la diffusion de paradigmes et de normes. L’UE est depuis plus de 35 ans la principale source
d’orientation des PP environnementales et de DD.

         Une constatation importante quant à l’élection présidentielle de cette année est que tous les
candidats sont conscients que l’enjeu est important et le mentionnent. C’est devenu un enjeu de PP
« normal », au même titre que l’économie ou l’éducation. Pour certains, c’est peut-être aussi un
moyen de suivre certaines modes. Ainsi Jean-Luc Mélenchon a avoué à Gala une passion pour la
salade de quinoa. Il aurait fait un régime végétarien, pour mincir et pour consommer moins de
protéines carnées. « Le quinoa, c’est la plante de l’avenir » a-t-il déclaré.13
         Non seulement le sujet est abordé dans tous les programmes, mais jamais pour dire que le
candidat est « contre l’écologie » (le cas de Jacques Cheminade étant un peu ambigu). Il est
considéré comme normal d’être pour, même si certains trouvent qu’il ne faut pas aller trop loin dans
les logiques écologiques. En revanche, pour la première fois depuis 1974, aucun candidat estampillé
« écologiste » n’a été officiellement candidat jusqu’au bout.

B) Pour l’élection présidentielle, des candidats à l’ambition écologique variée

        Pendant les mois précédant l’élection présidentielle, on aurait pu croire à un foisonnement
de candidats écologistes. La candidature de Nicolas Hulot et de Noël Mamère était envisagée. 1415
Antoine Waechter, qui avait concouru en 1988, s’était déclaré candidat.16 Une primaire française de
l’écologie aurait lieu. François de Rugy était candidat à la primaire citoyenne de la Gauche …
        Puis tous ont abandonné ou échoué, en culminant avec Yannick Jadot, vainqueur de la
primaire écologiste, se retirant pour Benoit Hamon. En revanche, tous les écologistes n’ont pas
soutenu le candidat du PS. Daniel Cohn-Bendit, par exemple, a choisit Emmanuel Macron.

        La suite de cette partie concerne, sauf indication contraire, les cinq « grands » candidats :
François Fillon, Benoit Hamon, Marine Le Pen, Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon.

        Le développement des énergies renouvelables est un incontournable de l’élection. Il
rassemble un certain consensus entre les candidats. Le respect de la LTE est un marqueur du clivage
écologique, et il recoupe également la séparation entre la droite, plutôt hostile à une telle
programmation, et les autres. L’engagement du Grand Carénage suppose sans doute une forme de
dépendance au sentier. Fillon propose par exemple dans un tract d’aller « vers une économie

13
   « Jean-Luc Mélenchon: les secrets de son régime », Gala, 2 septembre 2016,
http://www.gala.fr/l_actu/news_de_stars/video_jean-luc_melenchon_les_secrets_de_son_regime_372576,
consulté le 12 avril 2017
14
   LAMBRECQ Maxence, « EELV : "Je souhaite que Nicolas Hulot soit candidat en 2017", lance le secrétaire
national », RTL.fr, 12 juin 2016, http://www.rtl.fr/actu/politique/eelv-je-souhaite-que-nicolas-hulot-soit-
candidat-en-2017-lance-le-secretaire-national-david-cormand-7783628640, consulté le 16 avril 2017
15
   BESSE DESMOULIERES Raphaëlle « Noël Mamère tenté par 2017 », LeMonde.fr, 29 mars 2016,
http://www.lemonde.fr/politique/article/2016/03/29/noel-mamere-tente-par-2017_4891877_823448.html,
consulté le 16 avril 2017
16
   SAINT SAUVEUR Charles (de), « Présidentielle 2017 : Waechter, le revenant », LeParisien.fr, 20 juin 2016,
http://www.leparisien.fr/espace-premium/fait-du-jour/si-hulot-y-va-je-me-retire-20-06-2016-5898501.php,
consulté le 16 avril 2017

                                                                                                               16
décarbonée. Je refonderai une ambitieuse politique de l’énergie. Je créerai les conditions favorables
au développement de véritables filières industrielles françaises des énergies renouvelables. La
politique d’économie d’énergie sera amplifiée et rendra ainsi du pouvoir d’achat aux Français. Le
charbon sera supprimé dans la production d’électricité. » « Parce qu’elle émet très peu de gaz à effet
de serre, la filière nucléaire sera modernisée en veillant à une sécurité et une sureté maximales. »
Marine Le Pen, elle, s’inscrit tout à la fois du côté des pro-nucléaires, du développement des
renouvelables et, soucieuse de présenter le visage de la défense des paysages (traversés par des
lignes à Haute Tension), elle plaide contre l’éolien. Au contraire, Mélenchon est le candidat le plus
anti-nucléaire.
         Sur le champ des questions agricoles, la plupart des candidats se prononcent contre les OGM,
tous se disent en faveur des circuits courts. Dans un tract d’En Marche ! distribué entre les deux
tours, il est mentionné la proposition d’Emmanuel Macron d’« obligation d’avoir au moins 50%
d’aliments bio, écologiques ou locaux dans toutes les cantines de France. » Si Mélenchon développe
cinq propositions sur le sujet, le projet de Fillon trahit davantage un projet économique de la filière
agricole dans lequel les objectifs écologiques ne sont pas explicites. Dans un tract de huit pages de
format A3 distribué dans des boites aux lettres parisiennes, François Fillon promet pour les
agriculteurs d’abroger « par ordonnance toutes les normes ajoutées aux textes européens », de faire
« de la déduction pour aléas un « compte épargne aléas climatiques et économiques » alimenté
librement pendant les années de bonnes récolte, utilisable en cas de pertes d’exploitation, et très
simple d’emploi », de défendre « une PAC 2020 basée sur la gestion des risques et sur le soutien à
l’investissement en maintenant à l’euro près le budget actuel ». Le candidat dit vouloir défendre
« l’agriculture et la ruralité bec et ongles. » Sur le sujet, Marine Le Pen s’inscrit à nouveau dans une
articulation des contraires. Si elle souhaite « réorganiser les filières », c’est certes pour favoriser le
rapprochement entre producteurs et consommateurs, mais aussi pour favoriser les exportations. Son
tract d’entre deux tours propose de « soutenir nos entreprises, valoriser le travail, préserver les
emplois en France » entres autres « en défendant nos agriculteurs avec la politique agricole
française. »
         La problématique des transports distingue les partisans d’investissements lourds dans les
infrastructures, chiffrés (Mélenchon) ou intentionnels (Hamon), de ceux qui misent sur un
changement des usages de la voiture. Soit, en développant l’électrique, soit en encourageant la
sortie du diesel. Ce qui par ailleurs est un lien commun entre Mélenchon, Hamon et Macron.
         Il y a quelques mentions de la biodiversité, mais elles sont assez limitées. Fillon entend
« construire une politique marine pour (…) sauvegarder » les espèces et « protéger nos espaces
naturels, nos forêts, nos paysages que l’on a trop dégradés. » Jean-Luc Mélenchon veut « protéger le
bien commun » notamment l’air et l’eau. Macron a dit entre les deux tours dans un tract vouloir
l’« interdiction des perturbateurs endocriniens dès lors qu’il existe des solutions reconnues comme
moins toxiques ».

        L’écologie est souvent un prétexte pour des mesures qui sont plus économiques qu’autre
chose, et ce à gauche comme à droite. C’est là le risque de la transversalité.
        Par exemple, dans le tract envoyé avant le second tour, Emmanuel Macron dit vouloir
« accélérer l’émergence d’un nouveau modèle de croissance réconciliant transition écologique,
industrie du futur et agriculture de demain. » Il prévoit de créer un plan d’investissement
quinquennal de 50 milliards d’euros, avec des objectifs aussi nombreux qu’ambitieux, parmi lesquels

                                                                                                       17
la transition écologique et énergétique, mais aussi des objectifs économiques. La question est de
savoir lesquels de ces objectifs vont primer.

         En ce qui concerne les « petits candidats, ils sont souvent moins intéressés par l’écologie ou
le sont selon des prismes autres. Nathalie Arthaud, par exemple, ne voit l’environnement s’améliorer
qu’avec la reprise des moyens de production. François Asselineau considère le « Frexit » comme
préalable à toute PP écologique. Jacques Cheminade se dit « gaulliste de gauche et jauressien » mais
prend pour modèle de milliardaire polémiste américain Lyndon LaRouche, complotiste et
climatosceptique.17

        En conclusion, on peut dire que, si un certain nombre d’enjeux écologiques sont de plus en
plus reconnus, les instruments de PP à mettre en place ne font pas l’unanimité. Et pour ceux qui
parlent d’« urgence écologique », c’est assez inquiétant.

II. La place des acteurs publics non-étatiques dans le débat sur l’action publique

         Novo Ideo se donne comme mission d’analyser les politiques publiques et l’écologie. Or il
serait intéressant de renverser le processus pour étudier le think tank par le prisme des politiques
publiques et de l’écologie et de le replacer ensuite dans le contexte de l’APE, fait de multiples acteurs
non-étatiques.

A) Le think tank, un acteur ambivalent entre expertise, recherche et plaidoyer

         Pour Diane Stone, cinq caractéristiques permettraient d’identifier un think tank : une
indépendance organisationnelle ; une autodétermination de l’agenda de recherche ; la volonté
d’influencer l’élaboration des politiques publiques ; la revendication d’expertise et de
professionnalisme ; la détention d’un important appareil de communication et de publication.
         A partir de ces caractéristiques, on peut déceler dans la structure relativement récente qu’est
le think tank un positionnement à la croisée d’autres types d’acteurs.

         Le think tank revendique une indépendance organisationnelle. C’est particulièrement vrai
pour Novo-Ideo qui se veut « indépendant » et qui n’a pas de lien officiel avec un parti politique. Ses
statuts le confirment. Ceci le place relativement proche de la recherche universitaire, mais aussi de
certaines ONG. Il est en revanche en opposition avec des experts mandatés par un ou des
gouvernements.

         L’autodétermination de l’agenda de recherche le place aussi du côté de la recherche ou des
ONG, à l’inverse de certains groupes d’experts qui sont chargés, par le gouvernement, de travailler
sur tel ou tel domaine.

17
     ROUDAUT Christian, « Eux, présidents ? », M Le magazine du Monde, 11 février 2017, p37-39

                                                                                                      18
Vous pouvez aussi lire