Saint-Gall (principauté abbatiale)

 
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           Saint-Gall (principauté abbatiale)
           Territoire soumis à l'autorité temporelle du prince-abbé de S.; le centre en était l'abbaye bénédictine,
           supprimée en 1805, située dans la ville du même nom. Le monastère, fondé en 719 sur le tombeau de saint
           Gall, près d'une cascade de la Steinach, à mi-chemin entre l'Alpstein et le lac de Constance, relevait du
           diocèse de Constance; mais l'officialité instituée en 1613 dispensa les paroisses de la principauté de la
           juridiction épiscopale. Vers 720 monasterium sancti Gallonis, 745 monasterium sancti Galli, 1290 gozhus zu
           sante Gallen, 1702 monasterium Principale S. Galli. Saints patrons: Gall (fête le 16 octobre) ainsi que, dès
           883, Otmar (fête le 16 novembre).

           Dans la première moitié du IXe s., S. devint une abbaye d'Empire. Le titre de prince-abbé est attesté pour la
           première fois en 1207. Jusqu'à sa chute, la principauté abbatiale appartint formellement au Saint-Empire,

           mais elle ne figura plus aux matricules à partir du XVIIe s. Dès 1451, elle fut en même temps pays allié de la
           Confédération. Au Moyen Age, l'abbaye de S. était un puissant seigneur foncier, exerçant des droits sur un
           territoire fort étendu (jusqu'en Allemagne du Sud), quoique morcelé. A l'époque moderne, la principauté
           comprenait le Fürstenland ou Alte Landschaft et le comté de Toggenbourg, acheté en 1468 (Neue
           Landschaft), les seigneuries d'Ebringen et de Norsingen dans le Brisgau, celle de Neuravensburg dans le
           Wurtemberg, ainsi que de nombreuses basses juridictions dans le Rheintal saint-gallois et dans le bailliage
           commun de Thurgovie. L'abbaye survécut à la Réforme et resta jusqu'en 1798 à la tête d'un Etat territorial.

           Le quartier conventuel était enclavé dans la ville de S. (indépendante de l'abbaye dès le XVe s. et protestante
           dès 1528), elle-même enclavée dans l'Alte Landschaft. La principauté comptait environ 95 000 âmes à la fin

           du XVIIIe s. En 1803, son territoire fut attribué au nouveau canton de S. La juridiction spirituelle passa en 1815
           à l'administrateur Franz Bernhard Göldlin von Tiefenau, en 1819 au diocèse de Coire, en 1823 au double
           diocèse de Coire-S. et en 1847 au diocèse de S.

                 1 - L'abbaye au Moyen Age
                    1.1 - Origines

           Vers 612, le moine irlandais ou franco-irlandais Gall, compagnon de l'abbé itinérant Colomban le Jeune, établit
           son ermitage près d'une cascade de la Steinach, avec l'appui du clergé d'Arbon et du duc Gunzo. Il adopta
           une règle mêlant des éléments colombaniens et bénédictins, et la transmit aux disciples qui le rejoignirent. Il
           mourut très âgé un 16 octobre, vers 640/650, à Arbon, et fut inhumé dans son oratoire sur la Steinach. Ses
           compagnons et bientôt d'autres prêtres se firent les gardiens de son tombeau, où la population, qui le
           vénérait comme un saint, venait chercher protection en cas de danger. L'ermitage subsista durant des
           décennies.

           Dès 719, Otmar, qui avait été ordonné prêtre au siège épiscopal de Coire, transforma la communauté en un
           monastère dont il fut le premier abbé. Il agit à l'instigation du seigneur foncier et tribun d'Arbon Waltram,
           avec le soutien du maire du palais Charles Martel. A côté de l'abbaye, Otmar fit bâtir un hospice pour les
           pauvres et une léproserie. Aux premiers moines venus de Rhétie avec Otmar s'ajoutèrent des Alamans issus
           de la noblesse locale. Le registre des profès indique les noms de cinquante-trois personnes ayant prononcé
           leurs vœux sous l'abbatiat d'Otmar. Saint Magne de Füssen et Theodor, apôtres de l'Allgäu et fondateurs des
           abbayes de Kempten et de Füssen, furent d'abord moines à S. La richesse foncière de l'abbaye (en Thurgovie,
           dans le Zürichgau et dans le reste du duché d'Alémanie jusqu'au Neckar) augmentait en même temps que
           ses effectifs, grâce à des donateurs parmi lesquels se distingue le clan de Beata (lac supérieur de Zurich).

           Par l'entremise de Carloman, frère de Pépin le Bref et maire du palais, qui visita le tombeau de saint Gall en

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           se rendant à Rome en 747, l'abbaye adopta la règle de saint Benoît de Nursie. Depuis la bataille de Cannstatt
           (746), l'Alémanie était intégrée au royaume franc. Otmar entra en conflit avec le nouveau pouvoir, représenté
           par les comtes Ruthard et Warin, à cause des riches donations faites à son abbaye alémanique au détriment
           des Carolingiens. En 759, comme il s'était plaint des confiscations prononcées par les comtes francs, il fut
           arrêté et exilé à Werd, île du Rhin près d'Eschenz, où il mourut le 16 novembre 759 (sa dépouille sera
           transférée à S. dix ans plus tard). L'abbaye tomba alors sous la coupe de l'évêque de Constance; un accord

           précisa les modalités de cette dépendance, dont elle put néanmoins s'affranchir peu à peu au IXe s.
           L'empereur Louis le Pieux lui conféra l'immunité en 818; Louis le Germanique lui accorda le droit d'élire
           librement son abbé en 833 et l'affranchit en 854 des derniers cens dus à l'évêque de Constance. Elle devint
           ainsi une abbaye d'Empire. Malgré son statut dépendant, elle avait réussi à accroître dans la seconde moitié

           du VIIIe s. sa fortune et ses effectifs. Le scriptorium, dont Winitharius est le premier responsable connu, et la
           bibliothèque furent soutenus notamment par Waldo, abbé de S. en 782-784, puis de Reichenau et de Saint-
           Denis près de Paris.

           Auteur(e): Ernst Tremp / PM

                     1.2 - Du IXe au XIe siècle: "âge d'or", malheurs et "âge d'argent"

           La première grande époque de S. commença sous l'abbatiat de Gozbert (816-837), qui étendit les possessions
           foncières, unifia l'administration des biens dispersés et introduisit un classement des chartes selon trente-six
           chapitres territoriaux. Dès 830, il fit élever une basilique à trois nefs dédiée à saint Gall et vraisemblablement
           de nouveaux bâtiments conventuels qui, réalisés notamment par les moines Winihart, Isenrich et Ratger,
           devaient répondre aux exigences de la réforme monastique de Louis le Pieux et aux multiples fonctions d'une
           grande abbaye carolingienne. Gozbert pourrait s'être inspiré du plan dont il est sans doute le dédicataire,
           dessiné en 819 (ou entre 826 env. et 830 env.) par des moines de Reichenau sous la direction du
           bibliothécaire Reginbert, à la demande de leur abbé Haito. Ce document, le plus ancien plan d'architecture du
           Moyen Age européen, présente l'image idéale d'une abbaye carolingienne. Gozbert agrandit le scriptorium, où

           travaillait le calligraphe Wolfcoz Ier.

           Grimald, ancien archichancelier de Louis le Germanique et à ce titre l'un des hommes les plus influents de
           Francie orientale, fut abbé de S. de 841 à 872. Parmi ses successeurs, il faut citer Hartmut (872-883) et
           Salomon (890-920), qui fut en même temps évêque de Constance. L'abbaye tira profit du fait que ses chefs
           cumulaient de hautes fonctions dans l'Empire. Des empereurs et des rois séjournèrent dans ses murs.

           L'école abbatiale était fréquentée non seulement par des moines, mais aussi par des membres de la classe
           dirigeante laïque et du haut clergé séculier. Son rayon de recrutement était vaste. Elle constituait un point de

           rencontre entre le monastère et le monde. C'est sans doute pour cette raison que le plan du IXe s. la place à
           l'extérieur de la clôture (alors que la maison des novices est à l'intérieur), entre l'auberge et le palais de
           l'abbé, parmi les bâtiments publics. L'Alaman Iso ( 871) y enseigna, comme l'Irlandais Moengal, dit aussi
           Marcellus. Le poète et musicien Notker le Bègue ( 912), maître de la séquence, et le maître d'école Ratpert (
              vers 911) enrichirent la liturgie, de même que Tuotilo ( apr. 912), qui sculpta en outre les planches
           d'ivoire ornant la reliure de l'Evangelium longum de Charlemagne, manuscrit réalisé (texte et initiales) par le
           copiste et enlumineur Sintram. La visite de l'empereur Charles le Gros en 883 fut particulièrement stimulante
           pour la vie artistique et littéraire de S. (historiographie, poésie). Le scriptorium produisit sous le calligraphe
           Folchard et ses successeurs des manuscrits aux initiales enluminées. La bibliothèque comptait alors plus de

           400 volumes réunissant environ 600 ouvrages. L'abbaye connut à la fin du IXe s. et au début du Xe son "âge
           d'or".

           Même si l'on parvint à mettre à l'abri la bibliothèque et le trésor, l'invasion hongroise de 926, qui coûta la vie
           à la recluse Wiborada, fut un désastre (Invasions hongroises), tout comme l'incendie de 937. Les beaux jours

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           revinrent vers le milieu du Xe s.; cet "âge d'argent", dont la visite de l'empereur Otton Ier le Grand et de sa

           cour (972) marqua le point culminant, porte l'empreinte de Notker le Physicien, d'Ekkehard Ier le Doyen,
           d'Ekkehard II, du reclus Hartker, de Notker l'Allemand, directeur de l'école abbatiale, qui fut par ses
           traductions l'un des principaux artisans langagiers du Moyen Age, et d'Ekkehard IV, qui a relaté dans sa

           continuation des Casus sancti Galli l'histoire de l'abbaye entre 870 et 972. A l'instigation d'Otton Ier et après
           avoir subi vers 966 la visite d'inspection d'un groupe d'évêques et d'abbés, S. s'ouvrit à la réforme de Gorze
           (dite aussi réforme lorraine) et adopta les statuts de Kerbodo de Lorsch, mais refusa la réforme plus radicale
           de Sandrat de Trèves en 972-973.

           La renaissance intellectuelle du Xe s. se traduisit par de nouvelles constructions. Sous les abbés Purchart
           (958-971), Notker (971-975) et Ymmo (976-984), on édifia les chapelles Saint-Gall, Saint-Jean et du Saint-
           Sépulcre, ainsi que l'église Saint-Laurent; on décora l'église abbatiale et acheva le mur d'enceinte de l'abbaye
           et du bourg. L'école, la liturgie et l'art de S. exerçaient une forte influence à Einsiedeln, à Mayence, à
           Augsbourg (par l'entremise de l'évêque Ulrich, formé à S. et protégé de Wiborada) et jusqu'en Hongrie, grâce
           à l'activité missionnaire du moine Prunward, qui baptisa vers 974 le grand-prince Géza. Le grand abbé du

           XIe s., Norbert de Stavelot (1034-1072), introduisit la réforme clunisienne, malgré l'opposition des moines, et
           rénova la liturgie (Réforme de l'Eglise). Son mandat fut aussi marqué par les progrès de la colonisation des
           vallées appenzelloises; la paroisse d'Appenzell (église Saint-Maurice) fut fondée en 1071.

           Auteur(e): Ernst Tremp / PM

                     1.3 - De la fin du XIe au XVe s.: déclin et renaissance

           A la fin du XIe s., lors de la querelle des Investitures entre l'empereur Henri IV et le pape Grégoire VII, l'abbaye
           de S. devint l'un des principaux appuis du premier en Alémanie. Ulrich von Eppenstein, abbé de 1077 à 1121
           et patriarche d'Aquilée dès 1086, resta fidèle à l'empereur. A lui remonte la fondation de l'abbaye de San
           Gallo à Moggio (Frioul) et probablement celle de l'église de Sankt Fiden en 1085, avec des reliques ramenées
           d'un pèlerinage à Agen (Aquitaine).

           Ulrich von Eppenstein inaugura la série des abbés nobles qui s'occupèrent surtout d'affaires politiques et
           militaires, tout en dirigeant un couvent dont les moines, peu nombreux, étaient aussi d'origine noble. Dans les
           conflits entre les Hohenstaufen et la papauté, S. soutint les empereurs. Ulrich von Sax, abbé de 1204 à 1220,
           en lutte avec l'évêque de Constance pour la possession de Rheineck, eut le dessous à la bataille du Breitfeld
           (août 1208). Konrad von Bussnang, abbé de 1226 à 1239, fut l'un des principaux conseillers du roi de
           Germanie Henri VII et un soutien de l'empereur Frédéric II qui l'appuya dans l'acquisition de la ville de Wil en
           1236, après un conflit interne à la famille des comtes de Toggenbourg (fratricide de 1226). Un autre conflit

           opposa en 1287-1288 l'abbé Wilhelm von Montfort à Rodolphe Ier de Habsbourg, lequel fonda la bourgade de
           Schwarzenbach pour faire pièce à Wil et nomma l'anti-abbé Konrad von Gundelfingen (1288-1291).

           Les mesures politiques et administratives prises par plusieurs abbés aux XIe et XIIe s. ne purent empêcher le
           déclin économique de l'abbaye, conséquence de la cession de terres à des nobles laïques, de l'inféodation de
           droits aux ministériaux et des frais liés à l'entretien de la cour abbatiale et au service impérial. Dans ces

           conditions, l'élan spirituel s'essouffla et S. connut son "âge de fer" (jusqu'au milieu du XVe s.). Le scriptorium,

           encore actif au XIIe s., cessa de produire vers 1200. La chronique de Ratpert et Ekkehard IV fut continuée
           jusqu'en 1234 par trois moines anonymes et par Konrad von Fabaria. Un bourgeois de S., Christian
           Kuchimeister, poursuivra leur récit, mais en allemand (Nüwe Casus Monasterii, 1335).

           Le chapitre de Petershausen (1417), qui se tint en marge du concile de Constance, donna le signal d'une
           réforme interne. Le pape Martin V ordonna des visites qui aboutirent à la déposition de l'abbé Heinrich von

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           Gundelfingen, auquel succédèrent des réformateurs étrangers comme le Saxon Konrad de Pegau et Heinrich
           von Mansdorf. L'abbé Eglolf Blarer von Girsberg tenta de rétablir la vie commune, avec l'aide de moines
           venus de Hersfeld en Hesse en 1429/1430 et de Kastl en Bavière à la fin des années 1430. Kaspar von
           Landenberg, abbé de 1442 à 1463, fit appel peu après 1442 et en 1454 à des moines de l'abbaye de
           Wiblingen (près d'Ulm), qui avait accueilli les réformes lancées par les bénédictins de Subiaco (Latium) et
           Melk (Basse-Autriche). Ses efforts se heurtèrent d'abord à la résistance des conventuels, attachés à leurs
           libertés personnelles, mais ils entraînèrent ensuite une hausse des effectifs. Confronté à une situation
           financière précaire, obstacle sur la voie du renouveau, il suggéra de transformer l'abbaye en un chapitre de
           chanoines placé sous le protectorat de la ville de S.; mais le couvent, qui y aurait perdu une large part de son
           autonomie, et les cantons protecteurs s'opposèrent à ce dessein.

           Le tournant fut l'œuvre de l'énergique Ulrich Rösch, abbé de 1463 à 1491. Sans adhérer à une congrégation
           réformée, Rösch rétablit la discipline monastique grâce à une clôture stricte, à un règlement pour les frères
           lais de l'hôpital Saint-Otmar (institution fondée sans doute par Otmar, à l'extérieur de l'abbaye) et aux visites
           de 1469 et 1485. L'école abbatiale reçut des bases matérielles solides; de jeunes moines furent envoyés dans
           des universités; la bibliothèque fut réorganisée et enrichie. Le renouveau se traduisit aussi par l'édification de
           bâtiments conventuels au Mariaberg au-dessus de Rorschach et par la reconstruction du chœur de l'abbatiale
           (achevé en 1483). Rösch encouragea le pèlerinage auprès de Notre-Dame-de-la-barrière (im Gatter), à
           l'abbatiale qui eut jusqu'à la Réforme un rayonnement suprarégional.

           Les abbés de Saint-Gall
            Abbatiat            Abbé                                            Abbatiat            Abbé
            719-759             Otmar                                           1220-1226           Rudolf von Güttingen
            759/760-782         Jean                                            1226-1239           Konrad von Bussnang
            782                 Ratpert                                         1239-1244           Walter von Trauchburg
            782-784             Waldo                                           1244-1272           Berchtold von Falkenstein
            784-812             Werdo                                           1272-1277           Ulrich von Güttingen
            812-816             Wolfleoz                                         1272-1274           Heinrich von Wartenberga
            816-837             Gozbert                                         1277-1281           Rumo von Ramsteinb
            837-840/841         Bernwig                                         1281-1301           Wilhelm von Montfort
            840/841             Engilbert                                       1288-1291           Konrad von Gundelfingena
            841-872             Grimald                                         1301-1318           Heinrich von Ramstein
            872-883             Hartmut                                         1318-1329           Hiltbold von Werstein
                                                                                                                              c
            883-890             Bernhard                                        1330-1333           Rudolf von Montfort
            890-920             Salomon                                         1333-1360           Hermann von Bonstetten
            922-925             Hartmann                                        1360-1379           Georg von Wildenstein
            925-933             Engilbert                                       1379-1411           Kuno von Stoffeln
            933-942             Thieto                                          1411-1418           Heinrich von Gundelfingen
            942-958             Craloh                                          1418-1419           Konrad de Pegau
                                       a
            953-954             Anno                                            1419-1426           Heinrich von Mansdorf
            958-971             Purchart                                        1426-1442           Eglolf Blarer von Girsberg
            971-975             Notker                                          1442-1463           Kaspar von Landenberg
            976-984             Ymmo                                            1463-1491           Ulrich Röschd
            984-990             Ulrich                                          1491-1504           Gotthard Giel von Glattburg
            990-1001            Kerhart                                         1504-1529           Franz Gaisberg
            1001-1022           Purchart                                        1529-1530           Kilian Germann
            1022-1034           Thietpald                                       1530-1564           Diethelm Blarer von Wartensee
            1034-1072           Norbert                                         1564-1577           Otmar Kunz
            1072-1076           Ulrich                                          1577-1594           Joachim Opser

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            Abbatiat            Abbé                                            Abbatiat            Abbé
            1077-1121           Ulrich von Eppenstein                           1594-1630           Bernhard Müller
                                          a
            1077-ca. 1083 Lutpold                                               1630-1654           Pius Reher
            1083-1086           Werinhara                                       1654-1687           Gallus Alt
            1121-1133           Manegold von Mammern                            1687-1696           Cölestin Sfondrati
                                                        a
            1121-1122           Heinrich von Twiel                              1696-1717           Leodegar Bürgisser
            1133-1167           Werinher                                        1717-1740           Joseph von Rudolphi
            1167-1199           Ulrich von Tegerfelden                          1740-1767           Cölestin Gugger von Staudach
            1199-1200           Ulrich von Veringen                             1767-1796           Beda Angehrn
            1200-1204           Heinrich von Klingen                            1796-1805           Pankraz Vorster
            1204-1220           Ulrich von Sax

           a
               Anti-abbé
           b
               Anti-abbé 1274-1277
           c
               Administrateur
           d
               Administrateur 1457-1463
           Sources:HS, III/2

           Auteur(e): Ernst Tremp / PM

                  2 - La principauté abbatiale au Moyen Age
                     2.1 - De la seigneurie foncière à la souveraineté territoriale

           De nombreuses donations permirent à l'abbaye de bâtir dès le VIIIe s. une seigneurie foncière qui comptait
           vers 900 environ 4000 manses sur les deux rives du Rhin et 1897 paysans censitaires et corvéables, alors que
           170 personnes environ vivaient dans le quartier conventuel, dont une centaine de moines. Les quelque 800
           chartes de la période 750-920 qui nous sont parvenues (auj. conservées aux archives du couvent de S.)
           forment l'un des ensembles d'actes les plus importants du haut Moyen Age et témoignent de la prospérité de
           l'abbaye. Au Moyen Age classique, le régime domanial fut peu à peu remplacé par le système basé sur la
           rente foncière. Dans la plupart de ses domaines, l'abbaye renonça à l'exploitation directe de la réserve
           seigneuriale, préférant la diviser en parcelles confiées à des paysans contre un cens fixe. Cette évolution se
           reflète dans la raréfaction des prieurs forains, intermédiaires entre l'abbé et les mayors (responsables locaux

           de l'économie domaniale), qui ne subsistent au XIIIe s. que dans le Brisgau et en Argovie.

           Un rentier du XIIIe s. énumère trente-six domaines, situés entre Rorschach et Wil, dans le Bas-Rheintal, le Bas-
           Toggenbourg, le pays d'Appenzell et la Thurgovie orientale, qui constituaient le cœur de la seigneurie
           abbatiale vers 1300. L'abbaye détenait en outre un réseau serré de droits seigneuriaux aux environs de S. et
           en Appenzell. Elle possédait de nombreux biens en Haute-Argovie, dans le Zürichgau, le sud de l'Allemagne et
           le Vorarlberg, mais il lui était souvent difficile de faire valoir ses droits en des lieux éloignés, si bien qu'elle
           risquait de les perdre. L'administration des domaines se partageait entre l'abbé, le doyen, le camérier, le
           prieur, le grand cellérier, le portier, le custode et l'hospitalier.

           L'abbaye possédait, comme seigneur foncier, des églises à titre privé, ce qui l'amena à se préoccuper de la
           prédication et de l'assistance spirituelle à la population, qui pourtant ne faisaient pas partie des buts originels
           du monachisme bénédictin. On recensait quarante-quatre de ces églises vers 926 (souvent proches de la
           ferme qui servait de centre administratif à un domaine seigneurial) et, à la suite de fondation ou d'acquisition,
           soixante-trois vers 1266 (selon une liste établie par Berchtold von Falkenstein), dans les diocèses de
           Constance et de Coire.

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           L'abbaye exerça aussi des droits souverains dès le IXe s. Quand l'abbé Ulrich von Sax reçut de l'empereur
           Philippe de Souabe le rang de prince d'Empire et les droits régaliens en 1207, puis du pape Honorius III les
           insignes pontificaux en 1217, elle était devenue une puissance régionale, capable de fonder ou d'agrandir des
           villes (par exemple Wil, Altstätten ou Wangen dans l'Allgäu) et gérant une seigneurie territoriale avec l'aide
           de nombreux ministériaux et vassaux nobles qui tenaient en fief des charges administratives et
           accompagnaient les abbés dans leurs campagnes militaires ou dans le service d'Empire. Le rang de prince-
           abbé impliquait la tenue d'une cour avec ses quatre offices héréditaires: sénéchal (les chevaliers de

           Singenberg au XIIIe s., puis les Bichelsee), maréchal (les Falkenstein), échanson (les Landegg) et chambrier
           (les Giel von Glattburg). Dans les grandes occasions, le duc de Souabe officiait comme sénéchal, le comte de
           Hohenzollern comme maréchal, le duc de Teck (plus tard le comte de Hohenberg) comme échanson et le
           baron de Regensberg comme chambrier. A la Pentecôte 1270 eut lieu sous l'abbé Berchtold von Falkenstein
           une grande fête qui rassembla quelque 900 nobles et au cours de laquelle on adouba 99 chevaliers.

           L'évolution générale de l'économie médiévale, le passage du régime domanial à la rente foncière et surtout la
           crise agraire du bas Moyen Age, les difficultés internes de l'abbaye, son implication dans la politique, dans le
           service de l'empereur, dans des guerres publiques et privées, enfin l'ascension et l'indépendance progressive
           de la ville de S. furent les causes d'une crise grave et durable. Ce fut Ulrich Rösch, le premier abbé d'origine
           roturière, qui parvint à sauver la situation. Considéré comme le second fondateur de l'abbaye, il transforma la
           seigneurie abbatiale en un Etat territorial moderne. Dans l'Alte Landschaft, qui s'étendait de Wil à Rorschach,
           Rösch récupéra les divers morceaux du bailliage impérial et commença à unifier les droits seigneuriaux des
           princes-abbés. A partir de 1463, il fit établir des coutumiers similaires dans vingt-trois basses juridictions. Il
           étendit à l'ensemble des sujets de la principauté le statut de serfs de la Maison-Dieu. En outre, il utilisa les
           statuts du pays, dont une première version fut présentée en 1468, pour imposer une unification du droit, des
           rapports avec le prince et de l'administration. Le pays fut divisé, sous Rösch ou ses successeurs immédiats,
           en bailliages du gouverneur (Landshofmeisteramt), de Rorschach, d'Oberberg, de Wil et de Romanshorn; il y
           avait des cours de haute justice à Sankt Fiden, Rorschach, Gossau et Wil. Rösch créa de nouvelles institutions:
           le chancelier, le gouverneur (Hofmeister) et le Conseil du palais (Pfalzrat, dit aussi Pfalzgericht ), qui
           fonctionnait sans doute déjà comme cour d'appel.

           Auteur(e): Ernst Tremp / PM

                     2.2 - Relations avec la ville de Saint-Gall et avec Appenzell

           Pour l'abbaye de S., la ville apparue à ses portes au Xe s. était un élément à la fois complémentaire et opposé.
           Dès les origines, sous l'abbé Otmar, des personnes affectées au service du monastère, des artisans et des
           commerçants s'étaient établis à proximité. Pour parer aux attaques, telles celles des Hongrois, les abbés
           Anno (953/954) et Notker (971-975) firent construire une muraille qui englobait le quartier adjacent. Il fallut
           environ cinq siècles pour que la ville, de plus en plus puissante économiquement, s'affranchisse de l'abbaye.

           L'émancipation n'alla pas sans tensions et conflits, parfois sévères. Au cours du XIIIe s., la ville acquit
           progressivement l'immédiateté impériale. Mais elle resta étroitement liée à l'abbaye, malgré ses privilèges

           impériaux et son élévation au rang de ville d'Empire au début du XVe s. Jusqu'au XIVe s., la ville fut dirigée par
           un amman qui, comme les douze membres du Conseil qui l'assistaient, était nommé par l'abbé. Les franchises
           octroyées en 1291 par l'abbé Wilhelm von Montfort (reprenant celles de l'abbé Ulrich von Güttingen datant de
           1272/1273), délimitent pour la première fois le ressort judiciaire de la ville, en précisant qu'"entre les quatre
           croix", la basse justice relève de l'abbé, tandis que le bailli impérial choisi parmi les bourgeois exerce la haute

           justice. Le régime corporatif introduit au milieu du XIVe s. réduisit le rôle des conseils nommés par l'abbé.

           En Appenzell, le processus d'émancipation était déjà bien avancé quand l'abbé Kuno von Stoffeln (1379-1411)
           tenta en vain de rétablir une autorité à laquelle mirent fin, de fait, les guerres d' Appenzell (1401-1429). Des
           arbitrages confédéraux confirmèrent l'indépendance des Appenzellois tout en les obligeant, ce qu'ils admirent

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           en 1429, à continuer de payer certaines redevances à l'abbaye.

           Auteur(e): Ernst Tremp / PM

                     2.3 - Evolution politique de la principauté au XVe siècle

           Après les guerres d'Appenzell, l'abbé Eglolf Blarer von Girsberg conclut en 1437 une combourgeoisie de vingt
           ans avec Schwytz, première manifestation d'un rapprochement avec les Confédérés. En 1451, l'abbé Kaspar
           von Landenberg signa une alliance perpétuelle avec les cantons protecteurs de Zurich, Lucerne, Schwytz et
           Glaris; la principauté devint ainsi un pays allié de la Confédération. La ville de S. s'allia aussi aux Confédérés
           en 1454; en 1457, grâce à la médiation de Berne, elle put racheter à l'abbaye d'importants droits
           seigneuriaux (poids et mesures, nomination de l'amman et du monnayeur) et s'affranchir de la prestation
           d'hommage.

           La principauté s'agrandit en 1468, sous Ulrich Rösch, par l'acquisition du comté de Toggenbourg, prospère
           région préalpine qui, contrairement à l'Alte Landschaft, put garder une relative autonomie, des liens de
           combourgeoisie avec Schwytz et Glaris, ainsi qu'un Conseil dont les droits limitaient ceux du prince-abbé. En
           1479, l'abbé Rösch renforça les liens avec les Confédérés par un traité qui donnait aux quatre cantons
           protecteurs le droit de fournir le capitaine (Landeshauptmann) de Wil, une sorte de bailli. Parallèlement,
           Rösch chercha à faire légitimer sa politique par le Saint-Empire dont il restait membre et s'efforça de marquer
           concrètement son rang de prince.

           Pour désenclaver l'abbaye, Rösch imagina, avec l'accord de l'empereur et du pape, de la transférer à
           Rorschach. Les bourgeois de S. et les Appenzellois s'opposèrent à ce projet en détruisant les bâtiments
           presque achevés lors du sac du couvent de Rorschach (28 juillet 1489). Le conflit se poursuivit dans la guerre
           de S.: en février 1490, les Confédérés mirent à genoux les adversaires de l'abbaye et dictèrent le 7 mars le
           traité d'Einsiedeln, qui leur permit de prendre pied définitivement comme puissance dirigeante dans le nord-
           est de la Suisse. Les frontières de la principauté furent fixées pendant la guerre de Souabe, sous l'abbé
           Gotthard Giel von Glattburg, et en 1501 (accord avec les cantons sur la limite avec le bailliage commun de
           Thurgovie).

           Auteur(e): Ernst Tremp / PM

                 3 - L'époque moderne (1504-1805)

           Entre 1504 et 1805, quatorze princes-abbés se succédèrent. La durée de leur règne varia entre deux et
           trente-six ans (en moyenne vingt et un an et demi). Les plus marquants furent Diethelm Blarer von
           Wartensee (1530-1564), Bernhard Müller (1594-1630), Cölestin Gugger von Staudach (1740-1767), tandis que
           Cölestin Sfondrati (1687-1696) se distingua comme théologien.

                     3.1 - Principales institutions de la principauté

           A l'époque moderne, la principauté abbatiale était un Etat important par son étendue et sa population. L'Alte
           Landschaft en constituait le noyau; les princes-abbés y avaient leur seconde résidence (à Wil) et y régnaient
           en maîtres absolus, le peuple n'ayant rien à dire. En revanche, leurs pouvoirs étaient plus limités dans le
           comté de Toggenbourg (acquis en 1468 et divisé en deux bailliages, l'Oberamt et l'Unteramt), car les sujets
           pouvaient s'exprimer dans le cadre d'un Conseil où siégeaient des représentants des communes et même
           examiner la conformité des mandats de ce Conseil avec les privilèges de la vallée. Dans le Rheintal saint-
           gallois, bailliage commun de plusieurs cantons dès 1490, l'abbaye de S. détenait des seigneuries foncières et
           de nombreuses basses justices, mais ses prétentions à la souveraineté se heurtaient aux compétences du
           bailli des Confédérés, qui exerçait notamment la haute justice. L'abbaye possédait en outre des biens et
           droits en Thurgovie (comme le Berggericht, relevant du bailliage de Wil), dans la campagne zurichoise et en
           Allemagne (les seigneuries d'Ebringen et de Norsingen dans le Brisgau, celle de Neuravensburg au nord de

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           Lindau et la paroisse de Wasserburg sur le lac de Constance).

           L'administration de la principauté incombait aux moines, assistés par des fonctionnaires laïques, les premiers
           ayant toujours la préséance. Elle se divisait en deux volets (affaires temporelles et spirituelles). Parmi les
           fonctionnaires ecclésiastiques, il faut citer les lieutenants ou économes (Statthalter): placés à la tête d'une
           circonscription (notamment à S. même, Wil, Rorschach, Sankt Johann sur la Thur et Ebringen), ils y
           représentaient le prince-abbé, avaient autorité sur les autres moines qui s'y trouvaient et géraient les affaires
           économiques. Quoique très occupés par leurs tâches administratives, ils ne devaient pas négliger leurs
           obligations religieuses (les abbés y veillaient). Les premiers fonctionnaires laïques étaient au siège de
           l'abbaye le gouverneur (Hofmeister puis Landshofmeister), le chancelier et le commissaire des fiefs
           (Lehenvogt), dans les campagnes les baillis de Rorschach et Gossau (dans l'Alte Landschaft), Lichtensteig,
           Iberg et Schwarzenbach (dans le Toggenbourg) et de Romanshorn (en Thurgovie). Dans le Rheintal, l'abbaye
           avait pour principaux représentants le bailli de Blatten, qui contrôlait le trafic des bacs sur le Rhin, le
           président du tribunal d'Altstätten et le bailli de Berneck, qui de sa résidence de Rosenberg s'occupait
           notamment des vins perçus à titre de cens et de leur transport vers Rorschach. On appelait conseils palatins
           les tribunaux suprêmes de la principauté (à S. et Wil); composés de moines et de laïcs, ils étaient présidés par
           le père doyen à S. et par le père économe à Wil. Les criminels passibles de la peine capitale était remis au
           bras séculier (le gouverneur à S., le bailli impérial à Wil). Le prince-abbé gouvernait avec l'assistance du
           Conseil secret qui lui aussi réunissait des ecclésiastiques et des laïcs.

           Auteur(e): Lorenz Hollenstein / PM

                     3.2 - Réforme et Contre-Réforme

           Les successeurs d'Ulrich Rösch s'attachèrent à poursuivre son œuvre. Franz Gaisberg fut confronté à
           l'introduction de la Réforme en ville de S. par Vadian (1528-1529). A la fin de février 1529, des iconoclastes
           sévirent dans l'abbatiale. La Réforme gagna le pays d'Appenzell, le Rheintal, l'Alte Landschaft et le
           Toggenbourg. Gaisberg se retira au château de Sainte-Anne à Rorschach, où il mourut en mars 1529. Kilian
           Germann lui succéda, puis Diethelm Blarer von Wartensee en 1530. Deux des quatre cantons protecteurs,
           Zurich et Glaris, vendirent les bâtiments abbatiaux à la ville de S. en 1530. Dans le Toggenbourg, où les
           ecclésiastiques réunis en synode avaient pris position en 1528 en faveur de la Réforme, donc contre l'abbaye,
           les idées nouvelles progressaient sous l'influence d'Ulrich Zwingli. Zurich utilisa le conflit confessionnel pour
           s'emparer de la souveraineté dans le territoire de la principauté, et l'abbaye fut provisoirement privée de son
           autorité temporelle. Mais la victoire de la Suisse centrale catholique dans la seconde guerre de Kappel (1531),
           au cours de laquelle Zwingli lui-même fut tué, s'avéra désastreuse pour la ville de S. qui, abandonnée à son
           sort par les cantons protestants lors des tractations qui suivirent la défaite, dut restituer les bâtiments
           conventuels et verser un dédommagement à l'abbaye, en vertu d'un accord conclu en 1532. La ville enclavée
           n'eut plus jamais la possibilité d'agrandir son territoire.

           Le 1er mars 1532, Blarer revint à S. Il rétablit très rapidement son autorité. Il imposa la Contre-Réforme et
           encouragea la Réforme catholique, afin de renforcer l'ancienne foi dans l'Alte Landschaft. Sur le plan
           temporel, il poursuivit la politique d'Ulrich Rösch. En 1546, il reprit l'administration de l'abbaye de Sankt
           Johann sur la Thur; il l'incorpora en 1555, tout en la transformant en un prieuré, géré par un prieur et un
           économe avec l'aide d'un laïc (Hofammann). Une douzaine de moines y vivaient; ils tenaient une école dont
           les élèves venaient de toute la Confédération et ils marquèrent la vie spirituelle du Haut-Toggenbourg. Sankt
           Johann abrita les débuts de l'imprimerie dans la principauté.

           Les successeurs de Blarer continuèrent sa politique. Sur le plan religieux, ils combattirent la Réforme. Dans
           les parties protestantes de la principauté, ils encouragèrent les conversions, surveillèrent les prédicants et
           favorisèrent l'installation de catholiques. Ils renforcèrent l'assistance spirituelle dans tout le territoire.
           Cependant, ils ne parvinrent à éliminer complètement la foi nouvelle que dans l'Alte Landschaft. Le
           protestantisme resta majoritaire dans le Haut-Toggenbourg; il se maintint dans le Rheintal et partiellement

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           dans le Bas-Toggenbourg. Des églises servant aux deux cultes apparurent dans le Rheintal dès 1531 et dans
           le Toggenbourg au cours des cent années suivantes. La "sentence de Rapperswil" (1559) régla les droits de
           l'abbaye envers ses sujets.

           Auteur(e): Lorenz Hollenstein / PM

                     3.3 - Activités de l'administration spirituelle et temporelle

           Dans les affaires ecclésiastiques, la principauté abbatiale eut sans cesse à s'affirmer face aux évêques de
           Constance. Les princes-abbés firent de grands efforts pour échapper à la juridiction épiscopale. Ils obtinrent
           un premier succès en 1613: un concordat avec l'évêque de Constance permit l'établissement à S. d'une
           officialité et d'un vicariat général. Les paroisses de la principauté furent ainsi libérées de la juridiction et des
           visites épiscopales. Grâce à la "concorde" signée avec Constance en 1748, l'abbaye acquit des droits et
           compétences supplémentaires en matière d'administration spirituelle. Dès lors, l'officialité saint-galloise jouit
           d'une large autonomie. Chef de cette institution et président de son tribunal, le père official résidait à
           l'abbaye; il exerçait la haute surveillance sur les prêtres, les paroisses, la vie et les mœurs des sujets.

           L'administration spirituelle passait notamment par les visites, régulièrement organisées dès 1603, au cours
           desquelles l'abbé en personne ou des dignitaires se rendaient dans les paroisses et chapellenies; ils
           inspectaient les églises, les chapelles, les cimetières, interrogeaient les curés, sacristains, administrateurs et
           responsables des communes, et exigeaient dans leurs rapports des améliorations, dans le sens de la réforme
           tridentine. Des moines remplissaient les fonctions de curé dans maintes paroisses, notamment dans le Haut-
           Toggenbourg, et celles de confesseur dans les couvents féminins de la principauté.

           Pour améliorer la desserte religieuse de la population, l'abbaye fonda de nouvelles paroisses et fit construire
           de nouveaux sanctuaires. Cette politique atteignit son apogée sous Iso Walser, official de 1759 à 1785, à qui

           l'on doit neuf paroisses, six chapellenies et dix-neuf églises et chapelles. Les princes-abbés des XVIIe et

           XVIIIe s. encouragèrent la construction d'écoles, si possible dans chaque commune; ils s'efforcèrent d'élever le
           niveau de l'enseignement et veillèrent à une fréquentation régulière des leçons. D'abord, le programme ne
           comprenait que la lecture et le catéchisme. Sous l'abbé Beda Angehrn (1767-1796), on introduisit l'école dite
           normale (Normalschule), sorte d'école réale qui se heurta à de vives oppositions. Dans le domaine de la santé
           publique, les princes-abbés, soucieux de répondre aux besoins fondamentaux de la population, instituèrent
           des examens pour les barbiers-chirurgiens, afin d'assurer la qualité minimale des soins. Ils encouragèrent
           systématiquement les sages-femmes; chaque commune devait en engager au moins une, certifiée et
           assermentée. Cette mesure entraîna un réel progrès sanitaire dans les campagnes, même si la première
           raison d'être de ces accoucheuses, aux yeux du souverain ecclésiastique, était d'assurer en cas de besoin le
           baptême d'urgence.

           L'abbaye de S. joua un rôle moteur dans la Congrégation suisse des bénédictins, fondée en 1602. A plusieurs
           reprises, elle envoya des forces vives dans des maisons affaiblies (surtout Disentis et Pfäfers). Plusieurs
           princes-abbés furent des bâtisseurs. Diethelm Blarer von Wartensee fit construire une nouvelle bibliothèque.
           Le prieuré de Sankt Johann sur la Thur ayant brûlé en 1626, Bernhard Müller fit ériger un nouveau couvent à
           Sidwald (Krummenau), à une dizaine de kilomètres en aval, qui prit le nom de Neu Sankt Johann (son église,
           commencée en 1641, fut consacrée en 1680). Toujours sous Müller, on reconstruisit l'église Saint-Otmar à S.
           (1623-1628), rénova les châteaux baillivaux d'Iberg, de Schwarzenbach et Romanshorn et remplaça le
           château de Neuravensburg, après un incendie, par un édifice plus vaste. Gallus Alt (1654-1687) fit bâtir l'aile
           de la cour (Hofflügel) dans le quartier conventuel de S. Cölestin Gugger (1740-1767) remodela profondément
           ce quartier; il fit reconstruire l'abbatiale Saints-Gall-et-Otmar en style baroque tardif (1756-1766), puis la
           bibliothèque (1758-1767), qu'il flanqua d'un nouvel hôpital. La grenette de Rorschach date de 1746-1749. On
           doit à Beda Angehrn, outre le nouveau palais (1767-1769) avec sa salle du trône, l'aménagement de tronçons
           routiers (Rorschach-Wil en 1773-1778, Wil-Ricken en 1786-1790, S.-Speicher, S.-Hérisau, Gossau-Hérisau);
           grâce à ces travaux, les voies de communication de la principauté figuraient parmi les meilleures de Suisse

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           au XVIIIe s.

           Les princes-abbés menaient une politique économique active qui, tout en accroissant l'indépendance de leurs
           sujets envers les marchands entrepreneurs de la ville de S. (leurs adversaires politiques et confessionnels),
           visait à augmenter le bien-être général et les revenus de l'Etat. Le tissage de la toile fut introduit en 1610 à
           Rorschach à l'initiative de Bernhard Müller.

           Auteur(e): Lorenz Hollenstein / PM

                     3.4 - Relations avec la Confédération, le Saint-Empire et les régions voisines

           La principauté abbatiale de S. devint en 1451 le premier, en étendue et en importance, des pays alliés de la
           Confédération. Elle était plus proche de la Suisse centrale catholique que des cantons protestants, d'autant
           plus qu'elle eut souvent des difficultés avec Zurich. Les princes-abbés recrutaient en Suisse centrale des
           fonctionnaires laïques de haut rang. Princes d'Empire, ils se firent confirmer par l'empereur, lors de leur

           entrée en fonction, leurs privilèges, leurs droits régaliens et leur haute juridiction jusqu'à la fin du XVIIIe s.
           Cependant, ils entretenaient des relations bien plus étroites avec la Confédération qu'avec l'Empire. Certes,
           ils reçurent jusqu'en 1663 des invitations à participer à la Diète impériale, mais ils n'y donnèrent pas suite. Ils
           ne rappelaient opportunément leur appartenance à l'Empire que dans certaines circonstances, par exemple

           pendant la seconde guerre de Villmergen ou lors des guerres de Coalition de la fin du XVIIIe s. Pays allié de la
           Confédération, la principauté fut partie prenante avec les autres cantons d'accords avec les puissances
           européennes et englobée comme eux, à divers titres, dans des traités de paix internationaux. Dans les
           années 1670, sous la conduite du gouverneur Fidel von Thurn, responsable des Affaires étrangères, elle se
           détourna de la France pour se rapprocher de l'Autriche. En 1686, elle conclut une alliance défensive avec la
           Savoie, qui conféra dès lors aux princes-abbés l'ordre de l'Annonciade. Des hommes de la principauté prirent
           part aux côtés d'autres Confédérés au service d'Espagne, de France, d'Autriche, de Savoie, de Venise, de
           Naples-Sicile, de Hollande et de Prusse.

           Il existait un rapport particulier entre la principauté et la ville de S., laquelle avait aussi le statut de pays allié

           de la Confédération tout en restant liée à l'Empire (jusqu'au XVIIe s.). Leurs relations furent gravement
           affectées par la Réforme. Mais comme l'abbaye était enclavée dans le territoire de l'Etat-cité, lui-même
           enclavé dans la principauté, tous deux étaient condamnés à trouver un modus vivendi, qui ne fonctionna pas
           trop mal durant l'époque moderne, en dépit de la guerre des Croix (1697), qui éclata parce que les
           catholiques avaient traversé la ville, lors de processions, en brandissant leurs crucifix (au lieu de les porter
           horizontalement, comme convenu). On parvint à résoudre le conflit sans effusion de sang.

           Dans le Rheintal, bailliage commun des Confédérés, la principauté était le plus gros seigneur foncier, ce qui
           créait une situation conflictuelle. Il fallut chercher des arrangements avec le bailli fédéral et avec la
           population, et accepter la mixité confessionnelle. La principauté put conforter sa position par un traité appelé
           Kommunell, conclu avec les cantons en 1676, sous l'égide de l'abbé Gallus Alt, lui-même originaire de la
           région, et du gouverneur Fidel von Thurn.

           L'abbaye possédait aussi des basses justices dans le bailliage commun de Thurgovie; elle les faisait gérer par
           son économe de Wil et par son bailli de Romanshorn, ce qui ne donna pas lieu à de trop graves disputes avec
           les Confédérés. La frontière entre la principauté de S. et le bailliage de Thurgovie fut fixée en 1501 et vers
           1730; elle correspond largement aux limites cantonales actuelles.

           Dans le Toggenbourg, des conflits éclatèrent tout au long du XVIIe s. entre le pouvoir abbatial et les sujets. La
           situation devint dangereuse quand l'abbé Leodegar Bürgisser commença, peu après 1700, à construire une
           route de Wattwil à Uznach par Ricken (route de Hummelwald), afin d'améliorer les communications avec la
           Suisse centrale catholique. Les gens de Wattwil se rebellèrent, le conflit entre la principauté et les sujets du

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           Toggenbourg, qui avaient plusieurs motifs de mécontentement, s'étendit et aboutit finalement en 1712 à la
           seconde guerre de Villmergen (dite aussi guerre du Toggenbourg et en all. Zwölferkrieg), qui impliqua une
           bonne partie de la Confédération. Dès 1710, les gens du Toggenbourg occupèrent trois châteaux abbatiaux,
           le prieuré de Neu Sankt Johann et Magdenau. En 1712, Zurich et Berne intervinrent et s'emparèrent de l'Alte
           Landschaft, des possessions saint-galloises en Thurgovie et de l'abbaye même, qu'ils pillèrent. Ils
           emportèrent notamment une partie des archives et de la bibliothèque. Berne restitua ce butin après la paix
           de Baden (1718), mais non Zurich; le contentieux ne fut réglé par un compromis avec le canton de S. qu'en
           2007. Le prince-abbé Leodegar Bürgisser et le doyen s'enfuirent à Neuravensburg, où Bürgisser mourra en
           1717. Quelques moines les y accompagnèrent (ils y restèrent six ans), d'autres se réfugièrent dans d'autres
           abbayes. Bürgisser refusa le traité de paix avec Zurich et Berne, élaboré à Rorschach en 1714. Son
           successeur Joseph von Rudolphi finit par signer avec les deux cantons la paix de Baden en juin 1718. Il put
           revenir à S. en octobre 1718. Le traité rétablit l'abbaye et sa principauté, mais en restreignant ses droits dans

           le Toggenbourg, où des troubles continuèrent de se produire au XVIIIe s. Les gens du comté contestaient en
           particulier au prince-abbé le droit de lever des troupes.

           Auteur(e): Lorenz Hollenstein / PM

                     3.5 - La renaissance du XVIIIe siècle et la fin

           Joseph von Rudolphi réussit à réorganiser l'Etat abbatial profondément ébranlé par la seconde guerre de
           Villmergen. Il rétablit l'administration, ce qui lui donna l'occasion de reclasser les archives; il se distingua
           autant par sa conduite habile et prudente des affaires matérielles de l'abbaye que par les améliorations qu'il
           introduisit dans l'encadrement spirituel du pays. Le nombre des moines recommença à croître fortement. Son
           successeur Cölestin Gugger (1740-1767), l'un des abbés de S. les plus éminents, remboursa les dettes de la
           principauté, malgré les coûteux chantiers qu'il entreprit, et laissa des finances saines.

           Beda Angehrn (1767-1796) déploya lui aussi de multiples activités et se soucia du bien-être du peuple,
           surtout par des achats de grains en Lombardie pendant la famine de 1770-1771. Mais à la différence de ses
           prédécesseurs, il n'était pas un bon gestionnaire. Sous son règne, la principauté s'endetta de plus en plus
           lourdement; ce fut l'une des raisons expliquant la formation parmi les moines d'un groupe d'opposants qui
           demandaient de manière générale davantage de participation au gouvernement abbatial et qui ne se
           laissèrent pas démonter par l'éloignement de leurs meneurs, envoyés à Ebringen, une dépendance de
           l'abbaye dans le Brisgau. Dans les années 1790, Angehrn fut confronté aux effets de la Révolution française.
           Un mouvement révolutionnaire apparut dans l'Alte Landschaft, conduit par Johannes Künzle, ancien buraliste
           de la poste abbatiale à Gossau. En novembre 1795, six mois avant sa mort, Angehrn dut accorder à ses sujets
           le Gütlicher Vertrag, qui abolit le servage et certaines redevances féodales. Cette concession ne suffit pas à
           arrêter le mouvement révolutionnaire. Le successeur d'Angehrn, Pankraz Vorster (1796-1805) ne put
           empêcher la chute de la principauté. Avant même l'arrivée des troupes françaises en Suisse orientale,
           l'autorité des princes-abbés s'effondra dans le Toggenbourg, l'Alte Landschaft et le Rheintal (février et mars
           1798). Au début d'avril, la majeure partie de la principauté fut incorporée au nouveau canton du Säntis de la
           République helvétique. Le 10 mai, les Français entrèrent à S. et établirent leur quartier général dans les
           bâtiments de l'abbaye. Vorster s'enfuit à Vienne, seuls quelques moines restèrent sur place pour assurer le
           service divin.

           Au début de la deuxième guerre de Coalition, l'armée autrichienne occupa la Suisse orientale (mai 1799).
           Vorster regagna S. et s'efforça de restaurer l'ancienne principauté. Cet épisode s'acheva à la fin de
           septembre 1799 déjà. L'abbé dut reprendre le chemin de l'exil; il n'en revint jamais.

           L'acte de Médiation de 1803, par lequel Bonaparte réorganisa la Suisse dans un esprit fédéraliste, créa le
           canton de S.; il garantissait le maintien des couvents, mais empêchait le rétablissement des anciens rapports
           de sujétion. Cependant, Pankraz Vorster, qui ne reconnut jamais la suppression de l'abbaye et qui, exilé,
           poursuivait infatigablement la lutte pour la restauration de sa principauté, refusa de renoncer à ses droits de

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