Séquence 7 Travail, emploi, chômage
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Séquence 7 Travail, emploi, chômage Sommaire Introduction 1. Comment s’articulent marché du travail et organisation dans la ges- tion de la main-d’œuvre. 2. Quelles politiques pour l’emploi ? Auto-évaluation Corrigé des activités Séquence 7 – SE01 1 © Cned - Académie en ligne
Introduction En ce début d’année, 55 % des personnes interrogées se déclarent pessimistes pour 2012, et surtout, 9 sur 10 placent le chômage en tête de leurs préoccupations. Il faut dire que le chômage est à nouveau en hausse. Fin 2011, on comptabilisait 2 844 800 demandeurs d’emploi (catégorie A), et 4,2 millions si l’on prend en compte l’ensemble des per- sonnes recherchant activement un emploi : un tel niveau n’avait plus été atteint depuis 1999. Cette dégradation du marché de l’emploi, tendance lourde de la fin 2011, devrait s’accentuer au cours de l’année qui vient. Favorisée en cela, au moins à court terme, par la politique d’austérité mise en place pour contrecarrer la dégradation des comptes publics. Alors que faire face à ce qui semble inéluctable ? Les théories économiques (présentées dans le premier chapitre) sont riches mais contradictoires. Pour les économistes néoclassiques, il faut supprimer les rigidités du marché du travail, alors que les keynésiens préconisent une relance de la demande. Ces grilles de lecture vont définir les politiques mises en place dans le domaine de l’emploi (chapitre 2). le chômage est un phénomène économique mais aussi social. Régler le problème du chômage et de la précarité s’avère primordial dans une société où l’emploi et le travail occupent une place centrale dans l’inté- gration des individus. C’est pourquoi ce thème s’inscrit dans la partie sur les « regards croisés », intéressant tout autant les économistes que les sociologues. Séquence 7 – SE01 3 © Cned - Académie en ligne
Comment s’articulent marché 1 du travail et organisation dans la gestion de la main-d’œuvre. Introduction Comme toute analyse économique de marché (étudiée en classe de pre- mière SE11, séquence 3), celle du marché du travail présente conjointe- ment deux aspects : le prix et la quantité. « Le prix » concerne la déter- mination du salaire (ou relation salariale) et « la quantité » se rapporte au volume de l’emploi et du chômage. L’organisation de la gestion de la main-d’œuvre concerne également l’aspect qualitatif : quels types d’em- ploi occupent les travailleurs ? Si les questions du salaire et de l’emploi sont au cœur de l’actualité éco- nomique et sociale, elles ont toujours été au cœur des problématiques de la pensée économique. Le modèle théorique néoclassique de base (A) incontournable a été récem- ment amendé par les nouvelles théories du marché du travail (D). Cepen- dant dès la première moitié du XXe siècle, l’économiste britannique, J.M. Keynes avait remis en cause l’analyse néoclassique (B). Une dernière par- tie (D) sera consacrée à la présentation d’analyses « croisées » prenant en compte différents aspects, notamment institutionnels et organisationnels. Pré-requis Salaire, marché, productivité, Notions à acquérir offre et demande, prix et quan- tité d’équilibre, preneur de prix, rationnement, asymétrie d’infor- Taux de salaire réel, coût salarial unitaire, salaire d’ef- mation, hiérarchie, coopération, ficience, salaire minimum, contrat de travail, segmen- conflit, institutionnalisations tation du marché du travail, normes d’emploi, conven- marchandes. tions collectives, partenaires sociaux. Activité 1 Sensibilisation : Existe-il un marché du travail ? Document 1 : Voici quelques annonces fictives de demande et de recherche d’emploi : 1. Je suis à la recherche d’un emploi de cuisinier, chef de partie ou second, j’ai dix ans d’expérience dans ce domaine, je suis titulaire 4 Séquence 7 – SE01 © Cned - Académie en ligne
d’un BEP restauration et d’un bac professionnel restauration cuisine. Je recherche un CDI de 35h minimum et suis libre dès le 1er janvier. » 2. Nous recherchons pour des missions intérim pour l’un de nos clients à Marseille, (secteur d’activité : industrie agroalimentaire) des CARISTES. Missions : Chargement et déchargement de camion Alimentation de chaîne de production Rangement de palette, divers travaux de manutention Salaire mensuel : 1393 € brut + majoration des heures supplémentaires + 10% indem- nité de fin de mission + 10% indemnité de congés payés. 3. Professionnel confirmé et expérimenté comme magasinier-cariste, manutentionnaire, agent de quai, préparateur de commandes, chauf- feur-livreur recherche un emploi similaire sur LYON. Je recherche un CDI de préférence, mais étudierais toute proposition de CDD. Salaire souhaité 1350€. 4. Recherche cuisinier H/F, Préparation des entrées, plats et desserts au sein de restaurants collectifs (restaurants d’entreprises, écoles, mai- sons de retraites…). Expérience exigée. Contrat de travail temporaire. Questions Pourquoi peut-on dire qu’il existe un marché du travail ? Ce marché est-il à l’équilibre en France aujourd’hui ? Qui sont les offreurs de travail ? les demandeurs de travail (de main- d’œuvre) ? Quels sont les différents types de contrat de travail que vous pouvez recenser (document et connaissances), précisez en les caractéris- tiques ? Quels sont les déterminants du salaire ? Si le marché du travail fonctionnait comme les autres marchés, com- ment serait déterminé le niveau des salaires ? Problématique Le marché du travail est-il un marché comme les autres ? De quoi dépend la relation salariale ? Comment expliquer la persistance du chômage de masse ? Existe t-il un ou plusieurs marchés du travail ? Autant de ques- tions auxquelles ce chapitre s’intéresse. Nous allons nous appuyer sur les analyses théoriques qui apportent différentes clés de lecture permettant de comprendre les problèmes de l’emploi et des salaires. Séquence 7 – SE01 5 © Cned - Académie en ligne
A Le modèle économique de base : l’analyse néoclassique du fonc- tionnement du marché du travail 1. Le marché du travail selon les néoclassiques Pour les économistes néoclassiques (A C Pigou 1877-1959), le travail est une marchandise comme une autre qui s’échange sur un marché de concurrence pure et parfaite et dont le prix (le taux de salaire réel) fluctue en fonction de l’offre et de la demande. L’analyse est microéconomique, le raisonnement marginaliste et les agents économiques rationnels. Activité 2 Questions Rappelez les caractéristiques du marché concurrentiel (cours de pre- mière). Comment fonctionne le marché du travail selon les néoclassiques ? Qu’y échange t-on ? À quel prix ? A retenir Selon, les néoclassiques, le marché du travail Taux de salaire réel : salaire nomi- est un marché ou se rencontrent l’offre globale nal déflaté de l’inflation, il corres- de travail (somme des offres individuelles) qui pond au pouvoir d’achat du salaire émanent des actifs et la demande globale de travail (somme des demandes individuelles) et calcule en divisant le salaire qui émanent des employeurs (entreprises ou nominal par l’indice des prix. administrations). 2. Les déterminants de l’offre et de la demande de travail a) L’offre de travail Document 2 L’offre de travail émanent des actifs qui avant de se présenter sur le marché du travail, comparent l’utilité apportée par le loisir (c’est-à-dire le non travail » et l’utilité apportée par le salaire réel, rémunération du travail. 6 Séquence 7 – SE01 © Cned - Académie en ligne
En effet, le fait de travailler diminue d’autant le temps de loisir des indi- vidus : c’est donc un « effort » qui doit être récompensé. Acteur écono- mique rationnel, les individus vont chercher à maximiser leur satisfaction en faisant un arbitrage entre le coût de l’effort (résultat de la diminution du temps de loisirs) et le revenu que leur procure le fait de travailler. Selon l’analyse néoclassique, le coût de l’effort est appelé « désutilité du travail » et la rémunération du travail correspond au taux de salaire réel c’est-à-dire le pouvoir d’achat du salaire (les salariés n’étant pas victime de l’illusion monétaire selon les néoclassiques). Plus le salaire réel sera élevé, plus les travailleurs accepteront de subs- tituer du temps de travail au temps de loisirs. L’offre de travail est donc une fonction croissante du salaire réel. Activité 3 Questions Pourquoi l’offre de travail est-elle une fonction crois- sante du salaire ? Recopiez le graphique ci- dessous en complétant : salaire réel (w/p) ; quan- tité de travail (T), offre de travail Représentation graphique de l’offre de travail b) La demande de travail Document 4 La demande de travail émane des employeurs qui cherchent à maximiser leur profit en comparant le coût du travail à la productivité des salariés. Les néoclassiques raisonnant à la marge, considèrent qu’un employeur embau- chera un travailleur supplémentaire tant qu’il lui rapporte plus qu’il ne coûte. Cette recette supplémentaire correspond à la productivité marginale. Dans le cadre de l’hypothèse des rendements décroissants (programme de première), toutes choses égales par ailleurs, la productivité marginale diminue au fur et à mesure sur la production augmente. Par conséquent, les effectifs des entreprises s’établissent au niveau où ce que rapporte le dernier travailleur embauché est égal à son coût (salaire réel). La demande de travail est une fonction décroissante du salaire réel. Séquence 7 – SE01 7 © Cned - Académie en ligne
Productivité marginale : production supplémentaire d’une entreprise liée à l’utilisation d’une unité supplémentaire d’un facteur de produc- tion (une machine, un salarié). Activité 4 Questions Rappeler « la loi des rende- ments décroissants » Pourquoi la demande de travail est-elle une fonction décroissante du salaire réel ? Recopiez le graphique ci- dessous en complétant : salaire réel (w/p) ; quantité de travail (T), demande de travail Représentation graphique de la demande de travail 3. L’ajustement sur la marché du travail a) les mécanismes d’ajustement Salaire réel w p w chômage offre Comme sur les autres marchés, la confron- p 1 tation entre l’offre et la demande déter- mine le prix et la quantité d’équilibre, w* p Le marché du travail selon les néoclas- siques demande DT T* OT Quantité 1 1 de travail 8 Séquence 7 – SE01 © Cned - Académie en ligne
A retenir Au salaire d’équilibre (w/p)*, toute personne offreuse de travail à ce prix est assurée de trouver un emploi et toutes les offres d’em- bauche sont satisfaites. Si les conditions de concurrence pure et parfaite sont satisfaites, ce modèle interdit tout chômage involontaire. En effet, imaginons que des contraintes institutionnelles (par exemple la fixation d’un salaire minimum) amène le salaire en vigueur au dessus du salaire d’équi- libre, au niveau de (w/p) 1, l’offre de travail se situe au niveau (OT1) alors que a demande se situe au niveau de (DT1). On se trouve alors dans une situation de où l’offre de travail (OT1) est supérieure à la demande de travail (DT1) : c’est-à-dire une situation de chômage. Conformément à la loi de l’offre et de la demande, la flexibilité des prix devrait permettre le retour à l’équilibre. Dans ce cas, la levée de la contrainte institutionnelle devrait permettre au salaire en vigueur de s’établir au niveau de (w/p)* et résorber ainsi le chômage. En effet si le salaire réel baisse : l’embauche augmente alors que l’offre de travail diminue (certains travailleurs considérant la rémunération du travail trop faible). Salaire minimum : montant de rémunération minimale qu’un salarié doit percevoir en échange de son travail. En France le salaire minimum légal est le SMIC (salaire minimum interprofessionnel de croissance). Activité 5 Question Que se passe t-il dans une situation de pénurie de main-d’œuvre ? b) Origines du chômage et solutions libérales Dans les conditions de concurrence parfaite, le chômage ne peut donc qu’être volontaire ; les travailleurs jugeant le niveau de salaire trop faible préféreront ne pas travailler. L’existence du chômage (autre que volontaire ou frictionnel) peut prove- nir du non-respect des règles de concurrence qui nuiraient au bon fonc- tionnement du marché. (existence d’un salaire minimum supérieur au salaire d’équilibre, les syndicats et les négociations salariales qui empê- cheraient le retour à l’équilibre par la flexibilité des salaires). Séquence 7 – SE01 9 © Cned - Académie en ligne
En cas de chômage, les néoclassiques préconisent donc de sup- primer toutes les entraves au bon fonctionnement du marché du travail : En rendant plus flexibles les conditions d’embauche, de licenciement et de rémunération ; En déréglementant le marché du travail (diminution du poids des syn- dicats) ; En diminuant le coût du travail des salariés les moins qualifiés. Ainsi si les économistes néoclassiques assimilent ce coût au salaire réel, les économistes retiennent aujourd’hui les notions suivantes : coût sala- rial et coût salarial unitaire qui prend en compte la productivité Le coût du travail (ou coût salarial) est constitué de toutes les dépenses induites par l’utilisation du facteur travail dans l’entreprise. Il comprend le salaire brut (avec les primes, les congés payés et les cotisations so- ciales à la charge des salariés) et les cotisations sociales patronales. le coût du travail qui est la dépense totale supportée par l’employeur le salaire brut qui est le montant du salaire net augmenté des cotisa- tions sociales supportées par le salarié le salaire net qui est le salaire perçu par le salarié. Les comparaisons internationales de coût du travail n’ont aucun sens si le salaire n’est pas corrigé par la productivité. Un salarié du pays A dont le salaire est Le coût salarial unitaire = coût de 1000 euros par mois et qui produit 200 unités par salarial par unité de valeur ajou- mois du produit considéré coûte moins cher qu’un tée produite. salarié d’un pays B dont le salaire est de 500 euros pour une production de 50 unités. On définit ainsi le coût salarial unitaire (coût salarial par unité produite) qui se calcule de la manière suivante : Coût salarial/quantité produite Le chapitre 2 qui traite des politiques de l’emploi reprendra de manière plus détaillée ces éléments. Activité 6 Complétez le schéma ci-après en intégrant dans les étiquettes : chô- mage, baisse des salaires, Embauche, plein emploi, salaire réel, produc- tivité marginale, 10 Séquence 7 – SE01 © Cned - Académie en ligne
Suppression des rigidités Suppression du salaire minimum... La théorie néoclassique va dominer la pensée économique jusqu’au moment où la grande dépression des années trente va remettre en cause le retour automatique à l’équilibre sur les marchés : le chômage atteint des sommets alors même que les salaires baissent. J M Keynes (1883- 1946), économiste britannique, élabore alors une théorie économique alternative qui constitue une véritable « révolution keynésienne ». B La révolution keynésienne 1. Présentation de l’analyse keynésienne Document 5 Pour les néoclassiques, la persistance sous emploi révèle une défaillance de flexibilité salariale localisée dans le périmètre du marché du travail. Pour Keynes, la rigidité des salaires n’est pas excessive, elle est au contraire souhaitable parce qu’elle est économiquement vertueuse. Il considère qu’au niveau macroéconomique, le niveau de l’emploi est déterminé non pas par le niveau de salaire mais par le niveau de la demande effective, c’est-à-dire la demande globale anticipée par les entrepreneurs : les employeurs embauchent en fonction des débouchés qu’ils prévoient pour leurs produits. La baisse des salaires ayant un effet Séquence 7 – SE01 11 © Cned - Académie en ligne
dépressif sur la demande, elle ne fait qu’aggraver le problème en temps de crise. Soutenir les salaires est donc un moyen de soutenir la demande agrégée. Plus généralement, l’activisme des politiques économiques, qu’elles soient monétaires ou budgétaires, doit être préféré au laissez- faire des marchés. Cahiers français, n° 345. Activité 7 Questions (document 5) Quelles sont les conséquences d’une baisse des salaires, en période de chômage pour les néoclassiques ? pour Keynes ? Qu’est-ce qui détermine le niveau de l’emploi pour les néoclassiques ? pour Keynes ? Donnez des exemples de mesures de politiques économiques de relance de la demande monétaire et budgétaire ; A retenir Constatant les ravages de la crise des années trente en termes de chômage durable, le célèbre économiste J M Keynes se lance dans une critique de l’analyse néoclassique et présente ses thèses dans son œuvre majeure « Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie ». Contrairement à la thèse néoclassique, qui s’appuyant sur la rationalité des acteurs se situe au niveau microconique, Keynes opte pour une ana- lyse macroéconomique, s’intéressant ainsi aux indicateurs globaux de l’économie et à leurs interdépendances. Ainsi, selon lui, le salaire n’est pas uniquement un coût pour l’entreprise, mais un revenu dont la diminution entraîne des conséquences macroéconomiques négatives sur la demande globale, la production et in fine l’emploi. Pour Keynes, c’est la demande effective (ou anticipée) qui détermine le niveau de la production et donc les besoins en main-d’œuvre. Les ressources en main-d’œuvre dépendent elles de facteurs démographiques, politiques et sociaux qui ne correspondront pas forcément aux besoins des entre- prises. Selon lui, il peut exister un équilibre de sous-emploi, c’est-à-dire une situation où l’offre globale de biens et services est égale à la demande globale de biens et de services mais où les besoins en main-d’œuvre soient insuffisants par rapport aux ressources. En cas de sous-emploi, l’État doit intervenir pour relancer la demande effective et permettre le retour au plein- emploi. 12 Séquence 7 – SE01 © Cned - Académie en ligne
Consommation Investissement Demande effective (anticipée) Niveau de la production Niveau de l’emploi L’État dispose de différents instruments de politique économique pour agir sur la demande effective La politique monétaire avec l’action sur les taux d’intérêt (aujourd’hui, cette prérogative n’appartient plus aux Etats dans la zone Euro mais à la BCE (banque centrale européenne) indépendante. La politique budgétaire : augmentation des investissements publics, augmentation des prestations sociales ….. 2. Dans les faits Document 6 Taux de chômage depuis 1975 en France en % Taux de chômage 1975 3,5 1980 5,4 1985 9,0 1990 7,9 1995 10,1 2000 8,6 2005 8,9 2010 9,2 2011 9,7 Séquence 7 – SE01 13 © Cned - Académie en ligne
Lecture : en moyenne en 2009, 9,1 % de la population active est au chômage au sens du BIT. Champ : France métropolitaine, population des ménages, personnes de 15 ans ou plus (âge au 31 décembre). Insee, enquêtes Emploi, données corrigées de la rupture de série en 2002. Activité 8 Questions Intégrez les données de 1975 et 2011 dans une phrase. Comment a évolué le chômage de France sur la période ? A retenir Dans les faits le chômage de type « keynésien » lié à l’insuffisance de la demande, aurait dominé en France dans les années 60, où les politiques de relance de types keynésiennes mises en place en cas de dégradation ponctuelle du marché du travail se sont révélées efficaces. Le chômage est alors frictionnel et /ou conjoncturel. Dans les années 1970, la situation macroéconomique change pour laisser place à un chômage structurel. Dans le même temps, l’inflation s’installe partout. Dans ce contexte, la politique de relance mise en place en France en 1981 s’est traduite par une dégradation des comptes publics, du commerce extérieur et une hausse des prix. Les thérapies keynésiennes ne semblent plus adaptées et sont remises en cause. C’est le retour des politiques libérales qui tentent de maîtriser l’inflation pas des politiques de rigueur. Si l’inflation arrive à être maîtrisée, le chômage s’installe et malgré quelques améliorations ponctuelles, il persiste à des niveaux très élevés notamment en Europe. On distingue différents types de chômage Chômage conjoncturel : chômage dû aux fluctuations macro-économiques à court terme (insuffisance de la croissance, économique notamment). Chômage frictionnel : lié aux délais d’ajustement de la main-d’œuvre, d’un emploi à l’autre. Chômage structurel : lié aux changements de longue période intervenus dans les structures technologiques, démographiques, économiques, sociales et institutionnelles. Chômage de conversion : chômage des personnes qui étaient aupara- vant intégrées dans le monde du travail et que le déclin de certaines industries a mises au chômage (mines, sidérurgie, chantiers navals…. ) Chômage de longue durée : chômage d’une durée de plus d’un an au cours des dix-huit derniers mois. Le chômage de très longue durée ex- cède trois années. 14 Séquence 7 – SE01 © Cned - Académie en ligne
Partant de ces constats, la situation de chômage en Europe devient un sujet préoccupant. Les nouvelles théories du marché du travail vont alors tenter d’expliquer cette persistance du chômage par la présence de nou- velles sources de rigidités des salaires. Certaines hypothèses de base du modèle de base ont ainsi été assouplies. C Les nouvelles théories du marché du travail Ces nouvelles théories sans remettre en cause les fondements microéco- nomiques de l’analyse néoclassique (efficience des marchés, rationalité des agents économiques, démarche individualiste) insistent sur l’imper- fection des marchés. Ils rendent compte de la rigidité des prix et des salaires qui empêchent le retour au plein-emploi. 1. La théorie de capital humain (remise en cause de l’homogénéité du facteur travail) Document 8 Pour Gary Becker, la formation accroît la productivité de la personne : par conséquent, plus on se forme, plus le revenu que l’on en tirera ultérieure- ment sera élevé. Mais les élèves sont inégalement doués. Pour certains, la formation nécessitera beaucoup de temps, ce qui en limite l’intérêt : les gains ultérieurs cumulés ne compensent pas la dépense de formation (en incluant dans cette dernière la renonciation à un revenu d’activité durant la période de formation). Ceux-ci ne poursuivront donc pas leurs études. Au contraire, les plus doués apprennent vite, ils n’échouent pas et pour- suivent donc plus loin leurs études. Les premiers investissent peu en édu- cation, puisque la rentabilité qu’ils peuvent en tirer est insuffisante. Les seconds investissent beaucoup, puisque c’est rentable. Poursuivre ou non ses études est donc strictement une question de rationalité individuelle : chacun investit jusqu’au point où l’investissement cesse d’être rentable. Denis Clerc, mars 1993, la théorie du capital humain. Alternatives Economiques n° 105, www.alternatives-economiques.fr Activité 9 Questions Qu’est-ce que le capital humain ? Pourquoi certains individus ont intérêt à poursuivre leurs études et d’autres pas ? Séquence 7 – SE01 15 © Cned - Académie en ligne
Quelle hypothèse de concurrence pure et parfaite du marché du travail cette théorie remet-elle en cause ? A retenir La théorie du capital humain de G. Becker prend en compte la dimension qualitative de l’offre de travail et remet en cause l’hypothèse d’homogénéité du facteur travail de la théorie néoclassique de base. Elle permet de comprendre comment les individus arbitrent entre le prolongement des études et l’entrée sur le marché du travail, en fonction des gains salariaux anticipés. Elle apporte également une explication des différences de salaires liées aux qualifications. Employeurs et salariés peuvent avoir intérêt à établir des relations de longue durée qui s’écartent de l’hypothèse néoclassique de rémunération à la productivité marginale. En effet, les salariés récemment embauchés et n’ayant pas encore acquis les qualifications spécifiques ont un taux de salaire supérieur à leur productivité marginale car l’entreprise est obligée pour les attirer, de les payer aux taux du marché avant même qu’ils ne soient opérationnels. Elles investissent dans leur formation. Par contre, plus les salariés acquièrent de l’expérience dans l’entreprise, plus leur productivité marginale augmente. Cependant l’entreprise peut continuer à leur verser le taux de salaire du marché, ce qui leur permet de récupérer le rendement de son investissement. Dans ce contexte, un ralentissement de l’activité n’incite pas les entreprises à réduire le salaire des plus expérimentés, et ce tant que leur productivité marginale reste supérieure au salaire. Si la récession s’aggrave, l’entreprise peut décider de ne pas baisser le salaire et ce tant que le coût subi reste inférieur au rendement anticipé de son investissement en capital humain. Dans ce cadre théorique, on considère que l’individu investit en capital humain afin d’accroître sa productivité et son salaire. Le salaire est toujours déterminé par la productivité marginale mais il est aussi fonction du capital humain accumulé par l’individu. Cette théorie permet d’expliquer des comportements de formation qui auraient pu paraître irrationnels dans le cadre néoclassique d’homogénéité des facteurs. Le capital humain désigne le stock de connaissances et de compétences économiques valorisables : c’est l’ensemble des capacités productives des individus… Le capital humain renvoie à l’éducation, la formation continue, la mobilité professionnelle, et l’investissement des individus dans leur santé. Quand un individu prolonge sa formation, il augmente son stock de capital humain, et peut de cette manière augmenter les salaires reçus à la suite de son existence. 16 Séquence 7 – SE01 © Cned - Académie en ligne
2. La théorie du job search (prise en compte de l’imperfection de l’information) Document 8 Les analyses de « job search » ont cherché à modéliser le comportement de chômeurs dans un environnement où l’information sur les emplois disponibles et les salaires correspondants est imparfaite. Le but était de déterminer la durée du chômage, et par conséquent, le niveau de chômage de prospection. La durée du chômage est notamment selon cette approche d’autant plus longue que l’indemnisation du chômage est généreuse, cette dernière rendant les chômeurs plus « exigeants » en termes de salaire. Au-delà du chômage frictionnel de prospection, il peut être considéré comme volontaire, car résultant du choix des chômeurs. Jerôme Gautié, causes du chômage et politiques de l’emploi, Cahier français n° 353. Activité 10 Questions Quelle hypothèse du modèle néoclassique de base est-elle remise en cause ici ? Comment cette analyse explique t-elle la dimension frictionnelle du chômage ? Pourquoi peut-elle être considérée comme volontaire ? La théorie du « job search » ou « recherche d’emplois » remet en cause l’hypothèse de la transparence de l’information sur le marché et permet d’expliquer l’importance du chômage frictionnel. Selon cette approche, il faut du temps pour trouver un nouvel emploi. L’individu à la recherche d’un emploi ne connaît ni la totalité des emplois, ni leurs caractéristiques en termes de salaires, de pénibilité… Il doit donc développer une activité de recherche d’informations sur ces postes : c’est « l’activité de prospection ». Dans cette perspective micro- économique, l’individu reste au chômage tant que le coût marginal d’une journée de recherche supplémentaire ( assimilé à une perte de salaire journalier) est inférieur au bénéfice marginal d’une journée de recherche supplémentaire (chance de retrouver un emploi mieux rémunéré). L’imperfection du marché donne une explication au chômage frictionnel constitué des personnes qui changent de travail et prennent le temps d’en trouver un autre. Dans ce cadre, toute amélioration de la situation d’un chômeur a pour effet d’accroître la part volontaire du chômage frictionnel (puisque l’indi- vidu perdra moins d’argent à chercher plus longtemps). Séquence 7 – SE01 17 © Cned - Académie en ligne
3. L’introduction des apports de la théorie de l’incitation Document 9 Les modèles de salaire d’efficience ont introduit l’hypothèse d’une informa- tion asymétrique et débouché sur la conclusion suivante : le comportement rationnel des agents peut, dans cet univers, provoquer des situations non concurrentielles, source de rigidités réelles influençant le niveau de chômage. Dans le cas de la sélection adverse, l’employeur ne connaît pas la pro- ductivité des travailleurs qu’il veut recruter. il propose alors un salaire supérieur au salaire concurrentiel, le salaire d’efficience, dans le but de provoquer une auto-sélection des travailleurs : seuls les travailleurs les plus productifs sont supposés présenter leur candidature. Dans le modèle du tire-au-flanc, traitant de l’aléa moral, le salaire d’effi- cience est un mécanisme d’incitation à l’effort des travailleurs à double titre. D’une part, les travailleurs qui ne maximisaient pas leur effort ris- quent de perdre l’avantage de ce salaire supérieur au salaire concurren- tiel. D’autre part, le salaire d’efficience est source de chômage, puisqu’il est supérieur au salaire assurant le plein-emploi ; le chômage agit alors comme une menace de perdre sa rente, pour tout travailleur ne maxi- misant pas son effort. Ce modèle repose sur l’existence d’une fonction d’effort, reliant l’effort fourni par les travailleurs au salaire perçu. Les modèles de salaire d’efficience veulent expliquer pourquoi les employeurs rationnels n’ont eux-mêmes pas intérêt à la flexibilité des salaires : si les salaires baissent, rien ne garantit que le niveau d’effort des travailleurs permettent aux entreprises de maximiser leur profit. Lien Hoang-Ngoc, le fabuleux destin de la courbe de Phillips, édition septentrion, 2007. http://www.septentrion.com/fr/livre/?GCOI=27574100273170 Activité 11 Questions Qu’est-ce que le salaire d’efficience ? Pourquoi les employeurs peuvent avoir intérêt à payer leurs salariés à un niveau supérieur au salaire du marché ? La théorie du salaire d’efficience remet en cause quelle hypothèse du modèle néoclassique de base ? Salaire d’efficience : salaire supérieur au salaire concurrentiel. Niveau de salaire nécessaire pour motiver un travailleur à fournir sa productivité du travail maximale. Salaires d’efficience (théorie des) : théorie d’inspiration libérale qui inverse le sens de la relation néo-classique entre productivité et salaire, Le salaire détermine ainsi la productivité. 18 Séquence 7 – SE01 © Cned - Académie en ligne
A retenir Les théories du salaire d’efficience permettent d’expliquer pourquoi les entreprises peuvent avoir intérêt à verser des salaires supérieurs au salaire d’équilibre. Ces théories proposent une justification de la rigidité des salaires du fait d’une asymétrie de l’information. Selon ces analyses, ce n’est pas la productivité qui détermine les salaires mais l’inverse. L’employeur subit un risque ou « aléa moral » car le salarié embauché peut de pas fournir l’effort maximum et adopter une attitude de « tire-au-flanc ». En augmentant les salaires, les employeurs poussent les employés à augmenter leurs productivité. Le modèle de sélection adverse montre que les entreprises ne connaissant pas parfaitement les compétences des candidats à l’embauche sélectionnent les meilleurs en proposant un salaire supérieur au salaire d’équilibre. Dans cette logique, en cas de baisse de l’activité, l’entreprise n’a pas intérêt à baisser les salaires car ce sont les salariés les plus efficaces qui quitteront les premiers l’entreprise, et ne resteront alors que les moins performants. 4. Les théories de la segmentation Au début des années 70, s’est développé un ensemble de travaux à l’ini- tiative d’un groupe d’économistes de tradition « néo- institutionnaliste » PIORE et DOERINGER, Normes d’emploi : caracté- regroupé sous l’étiquette « théories de la segmenta- ristiques communes à la plu- tion du marché du travail ». part des emplois (durée du contrat, protection sociale Même si la norme d’emploi reste le CDI (contrat associée, avancement…). C’est à durée déterminée, d’autres situations d’emploi se le type d’emploi qui domine multiplient (CDD, intérim, contrats aidés…) (cf cha- dans une société durant une pitre 2) période. Ex : CDI pendant les Ces théories de la segmentation proposent ainsi de trente glorieuses. distinguer 2 types de marché. Un marché primaire (à l’alimentation et aux fonctions spécifiques, domi- nés par des firmes qui entretiennent des pratiques d’attachement durable à leurs salariés) et un marché secondaire aux caractéristiques opposées résumées dans le tableau ci-dessous : Marché primaire Marché secondaire Caractéristiques Niveau du salaire élevé Faible des emplois Garanties de carrière et perspectives de promotion Absence Niveau élevé des qualifications Faible Bonnes conditions de travail Mauvaises Main-d’œuvre Ancienneté de leur présence sur le marché du travail Faible (jeunes) Taux de syndicalisation élevé Faible Stabilité des comportements et des aspirations Immigrés, jeunes, peu qualifiés Séquence 7 – SE01 19 © Cned - Académie en ligne
Théorie du marché interne Certaines entreprises constituent des marchés internes du travail (pro- motions, gestion de carrières, pourvoir d’emplois vacants à partir de leurs propres employés), sans passer par le recrutement direct sur le marché du travail. Le marché interne : réunit les postes de travail dont l’accès n’est possible dans une entreprise qu’aux travailleurs qui occupaient auparavant cer- tains postes de travail déterminés dans la même entreprise. (Définition de FREYSSINET en 1979). Segmentation du marché du travail : le marché du travail est segmenté lorsqu il existe plusieurs compartiments nettement séparés. Il y a sou- vent un marché du travail stable et un marché du travail précaire par exemple. Le second concerne principalement les jeunes et les travail- leurs peu qualifiés. Conclusion au cours des 30 dernières années, la théorie a fortement progressé : le mouvement visant à donner « des fondements microéconomiques à la macroéconomie ». Ces nouvelles théories du marché du travail ont permis de donner des bases plus rigoureuses aux concepts de chômage conjoncturel, frictionnel et structurel. D La complexité de la relation salariale Document 10 Lorsqu’un joueur de football explique qu’il aimerait bien jouer dans tel ou tel club, mais qu’il ne le fera pas, car ce dernier ne pourrait lui donner que 3 ou 5 millions d’euros par an, on voit bien à quel point la puissance de la logique marchande s’impose. Le salaire est le prix d’une marchan- dise, mais il n’est pas évidemment que cela. Il est le principal moyen de vivre pour la plupart des gens, et aussi la traduction du statut ou de la reconnaissance sociale associés à une profession ou à un individu. En ce sens, la norme sociale. Celle-ci peur être institutionnalisé, comme c’est le cas du SMIC. […] Comme le remarquait Keynes, les individus sont très sensibles à leur salaire relatif, c’est-à-dire à la différence entre ce qu’ils gagnent et ce que gagnent les autres. […] Mais quelle répartition peut être jugée accep- 20 Séquence 7 – SE01 © Cned - Académie en ligne
table ? Comme l’écrivait John Hicks, il est bien difficile de s’entendre sur une répartition juste des revenus, mais une fois établie, elle est acceptée parce qu’elle correspond à ce que chacun s’attend. Elle devient normale. Pour lui, la distribution des salaires est le produit de la coutume, qu’on peut aussi appeler convention ou norme. […] Cette force de la coutume est certainement variable d’un pays à l’autre, suivant que la logique du marché influence plus ou moins fortement les comportements. Arnaud Parienty, comment se forment les salaires, Alternatives Economiques, hors série pratique n° 46, l’économie en questions. www.alternatives-economiques.fr Activité 12 Questions Qu’est-ce qu’une norme sociale ? En quoi le salaire est-il une norme sociale ? Qu’est-ce que le SMIC ? Comment évolue t-il ? Au-delà de l’aspect purement économique, le salaire est une construc- tion sociale et représente une dimension importante du statut social. Il doit être socialement accepté. Cette dernière partie montrera que le taux de salaire dépend également des résultats des négociations sala- riales, de l’intervention de l’État (avec notamment la fixation d’un salaire minium). Résultant à la fois du conflit et de la coopération, la relation salariale est aussi le fruit des rapports de force. 1. Le résultat des négociations collectives Document 11 Au niveau des branches professionnelles, est fixée une obligation annuelle de négocier (article L.132-12 du code du travail) : « Les organi- sations qui sont liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels, se réunissent, au moins une fois par an, pour négocier sur les salaires… » Cette obligation annuelle laisse aux partenaires de la branche la liberté de fixer le calendrier de cette négociation. En France, Il existe environ 700 branches professionnelles On reconnaît traditionnellement à la négociation salariale de branche 3 fonctions : ellle fixe l’ordre hiérarchique global (écart entre le salaire minimum du plus haut coefficient d’une catégorie et le salaire minimum du coefficient le plus bas); elle établit une structure hiérarchique interne (écart de salaires entre les coefficients successifs); elle donne enfin la valeur du salaire minimum affecté à chaque coefficient. L’employeur verse un salaire contractuel encore appelé « salaire réel » : il s’agit du salaire négocié de gré à gré entre l’employeur et le salarié par le contrat de travail. Il doit au minimum être équivalent Séquence 7 – SE01 21 © Cned - Académie en ligne
au SMIou au minima conventionnel, supérieur au SMIC. L’accord de branche est opposable aux seules entreprises adhérentes à un syndicat professionnel signataire, avant extension. L’accord devient applicable à toutes les entreprises relevant de la branche après extension par arrêté du Ministre en charge du travail Durée de validité : jusqu’à nouvelle négociation ou dénonciation de l’accord (ou annulation de l’arrêté d’extension) Au niveau des entreprises, une obligation est fixée par l’article L 132-27 du code du travail : « Dans les entreprises où sont constituées une ou plusieurs sections syndicales d’organisations représentatives au sens de l’article L. 132-2 du code du travail, l’employeur est tenu d’engager chaque année une négociation sur les salaires effectifs… » D’après la direction générale du travail www.coe.gouv.fr D’après l’INSEE, en France, les accords de salaire ont couvert en moyenne près de 75 % des salariés chaque année au cours de la période allant de 1994 à 2005. Les accords de branche concernent environ les deux tiers des salariés alors que les accords d’entreprise n’en couvrent que moins du quart. Contrat de travail : convention fondée sur un lien de subordination de l’em- ployé vis à vis de l’employeur, dans laquelle sont précisées les tâches de l’employé, sa rémunération et la durée de sa mission. Acivité 13 Question Comment sont négociés les salaires dans les entreprises françaises ? A retenir En France La négociation salariale se déroule au niveau de la branche et au niveau de l’entreprise, conformément au droit du travail. La négociation de branche qui est la plus large a été encouragée par les lois Auroux, qui favorisent l’extension de la couverture conventionnelle. ces lois instaurent une obligation annuelle de négocier sur les salaires et une obligation quinquennale de négocier sur les classifications. La négociation d’entreprise a été également été stimulée par les lois Auroux de 1982, qui ont institué l’obligation annuelle de négocier sur les salaires dans les plus grandes entreprises. Même si les lois Auroux ont impulsé un mouvement de décentralisation, le système français de relations professionnelles ne peut se résumer à la seule négociation de l’entreprise. En France, les pouvoirs publics interviennent de façon significative dans le processus de négociation collective. Au-delà de leur rôle dans les procédures d’extension, les pouvoirs publics fixent le salaire minimum national et encouragent la négociation des branches. 22 Séquence 7 – SE01 © Cned - Académie en ligne
Partenaires sociaux x : ensemble des syndicats, employeurs et salariés Conventions collectives : accords signés entre les partenaires sociaux d’une branche d’activités concernant essentiellement l’évolution des salaires et des conditions de travail. 2. Le rôle de l’État dans la fixation du salaire Document 12 L’intervention de l’État peut prendre trois voies. En premier lieu, l’action de l’État consiste à borner la négociation en fixant un salaire minimum. Si la formation des bas salaires n’est pas lais- sée au face à face entre l’employeur et le salarié et au seul jeu du marché, la détermination des rémunérations minimales peut incomber, soit aux partenaires sociaux (au niveau interprofessionnel ou de la branche) soit aux pouvoirs publics. L’intervention publique est ainsi une alternative à la négociation. Les pouvoirs publics peuvent intervenir, en deuxième lieu, en tentant d’influencer la négociation collective, soit pour faciliter un accord — les pouvoirs publics jouent un rôle d’arbitre entre deux par- ties aux contradictoires soit en tant que troisième joueur poursuivant des objectifs, macro-économiques, non pris en compte par les deux autres joueurs. En troisième lieu, l’État peut influencer plus directement le contenu de la négociation en définissant des règles, en particulier en matière d’indexation ou de désindexation. Activité 14 Question Comment l’État peut-il intervient-il dans la fixation des salaires ? En juillet de chaque année le gouvernement décide de l’augmentation du salaire minimum national, le Smic. De fait, celui-ci est exclu de la négociation avec les partenaires sociaux… Le Smic s’impose à tous et aucun salarié ne peut être payé en dessous de ce seuil. Le salaire minimum augmente suivant la règle légale suivante : la pro- gression annuelle du pouvoir d’achat du Smic ne peut pas être inférieure à la moitié de l’augmentation du pouvoir d’achat des salaires horaires des ouvriers (articles L3231-8 et L3231-4 du Code du Travail). En plus de Séquence 7 – SE01 23 © Cned - Académie en ligne
cette indexation, le gouvernement peut décider un « coup de pouce », c’est-à-dire une hausse supplémentaire, soit en cours d’année (article L3231-10 du Code du Travail), soit à l’occasion de la revalorisation du Smic au 1er juillet (article L3231-6 du Code du Travail). Par ailleurs, lorsque l’indice national des prix à la consommation (hors tabac) des ménages urbains dont le chef est ouvrier ou employé, croît à un rythme supérieur à 2 %, le Smic est revalorisé dans la même propor- tion le 1er jour du mois suivant (article L3231-5 du Code du Travail). Les pouvoirs publics favorisent aussi la négociation au niveau des branches en participant à des Commissions Mixtes Paritaires qui ras- semblent les salariés et les employeurs. Ces commissions sont desti- nées à faciliter la négociation de branche. Leur mise en place se fait soit à la demande des syndicats, soit à l’initiative du gouvernement en cas de difficultés dans la conduite des négociations. Salaire minimum : salaire minimum à verser à tout salarié (âgé de plus de 18 ans) fixé par l’État. en France, En 1969 le SMIC (salaire minimum interprofessionnel de croissance) a remplacé le SMIG (salaire minimum garanti) créé en 1950. 3. Entre conflit et coopération Document 13 La « grève du Nutella », symbole de négociations salariales qui achop- pent en France ÉCONOMIE - Plusieurs mouvements de grève sont lancés en France où les entreprises rechignent à augmenter les salaires, malgré l’inflation et les résultats en hausse… Depuis mardi, l’usine française de Ferrero à Villers-Ecalle (Seine-Mari- time) est à l’arrêt. Plus aucun produit chocolaté ne sort de l’établisse- ment, qui produit normalement 800.000 pots de Nutella et 1,2 million de barres Kinder Bueno. Pour l’instant, « il n’y a pas de risque de rupture de stocks », assure Chris- tophe Bordin, responsable des relations extérieures de Ferrero France. La Fédération des entreprises du commerce et de la distribution souligne qu’aucune crainte de pénurie n’émerge dans les centrales d’achat de la grande distribution. Ce sont des produits faciles à stocker, contrairement aux produits frais, et les distributeurs ne fonctionnent pas en flux tendus. Première grève depuis trente-sept ans 24 Séquence 7 – SE01 © Cned - Académie en ligne
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