Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d'action actualisées - INSPQ
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AUTEURS Chantal Blouin Andréanne Charbonneau Direction du développement des individus et des communautés Mélanie Beaudoin Onil Samuel Direction de la santé environnementale et de la toxicologie SOUS LA COORDINATION DE Geneviève Lapointe Vice-présidence à la valorisation scientifique et aux communications AVEC LA COLLABORATION DE Marie-Claude Paquette Direction du développement des individus et des communautés Vicky Bertrand Vice-présidence à la valorisation scientifique et aux communications MISE EN PAGE Hélène Fillion Vice-présidence à la valorisation scientifique et aux communications Ce document est disponible intégralement en format électronique (PDF) sur le site Web de l’Institut national de santé publique du Québec au : http://www.inspq.qc.ca. Les reproductions à des fins d’étude privée ou de recherche sont autorisées en vertu de l’article 29 de la Loi sur le droit d’auteur. Toute autre utilisation doit faire l’objet d’une autorisation du gouvernement du Québec qui détient les droits exclusifs de propriété intellectuelle sur ce document. Cette autorisation peut être obtenue en formulant une demande au guichet central du Service de la gestion des droits d’auteur des Publications du Québec à l’aide d’un formulaire en ligne accessible à l’adresse suivante : http://www.droitauteur.gouv.qc.ca/autorisation.php, ou en écrivant un courriel à : droit.auteur@cspq.gouv.qc.ca. Les données contenues dans le document peuvent être citées, à condition d’en mentionner la source. Dépôt légal – 4e trimestre 2017 Bibliothèque et Archives nationales du Québec ISBN : 978-2-550-79977-1 (PDF) Gouvernement du Québec (2017)
Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d’action actualisées Avant-propos En 2016, le MAPAQ a lancé un nouveau processus de consultation en vue du dépôt d’une politique bioalimentaire au printemps 2018. L’INSPQ a L’Institut national de santé publique du Québec participé à la première rencontre préparatoire axée (INSPQ) est un centre d’expertise et de référence en sur les préoccupations des consommateurs. Il s’est matière de santé publique au Québec. Sa mission repenché, par ailleurs, sur les connaissances est de soutenir le ministre de la Santé et des scientifiques qui ont soutenu la production de son Services sociaux du Québec (MSSS), les autorités mémoire de 2011. Afin d’éclairer la prise de régionales de santé publique ainsi que les décision, l’INSPQ souhaite par le présent document établissements dans l’exercice de leurs partager la mise à jour de son analyse de certaines responsabilités, en rendant disponibles son thématiques traitées en 2011 ainsi que de nouveaux expertise et ses services spécialisés de laboratoire constats et travaux touchant le secteur et de dépistage. L’une des missions de l’Institut est bioalimentaire. d’informer le ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec de l’impact de politiques publiques sur l’état de santé de la population québécoise en s’appuyant sur les meilleures données disponibles. En 2011, l’INSPQ a participé à la consultation menée par le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) visant l’élaboration d’une politique bioalimentaire québécoise. Il a produit un mémoire 1 dans lequel il attirait l’attention des décideurs sur certains enjeux de santé que soulevait le Livre vert, soit la saine alimentation et les problèmes reliés au poids, l’innocuité des aliments, l’occupation du territoire et la qualité de vie et finalement la sécurité à la ferme. L’INSPQ avait proposé des pistes d’action autour de la qualité nutritionnelle et la sécurité des aliments, des milieux de vie et de travail sains et sécuritaires, ainsi que de la bonne gouvernance du secteur bioalimentaire. 1 Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : mémoire déposé dans le cadre de la consultation générale sur le Livre vert pour une politique bioalimentaire (Beckal et collab., 2011). Institut national de santé publique du Québec I
Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d’action actualisées Table des matières Faits saillants ..................................................................................................................................................................... 1 1 Introduction ................................................................................................................................................................ 2 2 Les politiques du secteur bioalimentaire et la saine alimentation ....................................................................... 2 2.1 Renforcer la diversification des productions agricoles ..................................................................................... 3 2.2 Développer et atteindre des cibles de reformulation des aliments transformés .............................................. 4 2.3 Promouvoir les marchés publics et autres circuits courts................................................................................ 5 3 L’innocuité alimentaire et les pesticides ................................................................................................................ 6 3.1 Risques associés à la présence de pesticides dans les aliments .................................................................... 6 3.2 Renforcer le programme québécois de surveillance des résidus de pesticides dans les aliments ................. 7 3.3 Améliorer la diffusion de l’information sur les résidus de pesticides dans les aliments .................................. 7 3.3 Promouvoir les outils d’aide à la décision auprès des producteurs agricoles ................................................. 8 3.4 Promouvoir la gestion intégrée des ennemis des cultures (GIEC) et la production biologique ....................... 8 4 L’alimentation et les changements climatiques .................................................................................................... 9 4.1 Promouvoir l’achat local et les circuits courts de mise en marché .................................................................. 9 4.2 Favoriser l’agriculture urbaine ........................................................................................................................... 9 4.3 Réduire la consommation de protéines animales........................................................................................... 10 5 Conclusion ............................................................................................................................................................... 11 6 Références ............................................................................................................................................................... 12 Annexe 1 : Pistes d’action proposées par l’INSPQ dans son mémoire de 2011 ...................................................... 15 II Institut national de santé publique du Québec
Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d’action actualisées Faits saillants Renforcer le Programme national québécois de surveillance des résidus de pesticides dans les La future politique bioalimentaire aura plusieurs aliments en augmentant et en diversifiant implications pour la santé de la population. Les l’échantillonnage, mais aussi en obtenant de consommateurs et les différents acteurs du secteur l’Agence canadienne d’inspection des aliments bioalimentaire ont d’ailleurs identifié la santé comme (ACIA) les données spécifiques au Québec afin de l’une de leurs principales préoccupations. Dans le bonifier le portrait québécois en matière de résidus présent document, l’INSPQ attire l’attention des de pesticides dans les aliments. décideurs sur certains enjeux de santé à considérer Améliorer la diffusion de l’information sur les résidus dans l’élaboration de la politique, soit la saine de pesticides dans les aliments. alimentation, l’innocuité alimentaire et les pesticides ainsi que l’influence des activités agricoles et de Déployer des efforts supplémentaires pour l’alimentation sur les changements climatiques. Les promouvoir, auprès des producteurs agricoles, les deux premières thématiques ont été abordées dans un outils d’aide à la décision développés pour faciliter précédent mémoire produit en 2011. Plusieurs des la substitution des pesticides les plus toxiques par constats ou recommandations demeurent pertinents, des produits à moindre risque. mais ont été actualisés et précisés à la lumière des Déployer des efforts supplémentaires pour faciliter nouvelles connaissances scientifiques et des l’imprégnation de la gestion intégrée des ennemis développements dans le domaine. des cultures comme approche de gestion agricole au Québec, notamment en facilitant et en soutenant Soutenir une politique facilitant des choix sains la recherche et le développement dans le domaine, Les politiques publiques touchant la production de même qu’en accentuant les efforts de formation agricole, la transformation et la distribution peuvent pour les producteurs. contribuer à créer des environnements favorables à une saine alimentation. À cet effet, les pistes suivantes sont Réduire l’impact sur les changements climatiques à considérer : Les politiques publiques adoptées par le secteur Mener une réflexion afin d’identifier quelles bioalimentaire de même que les choix faits par les politiques contribueraient à renforcer la consommateurs eux-mêmes ont des impacts sur les diversification de la production et les marchés changements climatiques. Certaines mesures et actions locaux d’aliments nutritifs. peuvent contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre, lesquelles sont responsables de la Développer et mettre en œuvre des cibles de transformation du climat : reformulation des aliments transformés, c’est-à-dire des objectifs chiffrés d’amélioration de la Promouvoir l’achat local et les circuits courts de composition nutritionnelle des aliments (sodium, mise en marché, soit les marchés publics, gras trans, gras saturés, sucres). l’agriculture soutenue par la communauté et l’agriculture urbaine, afin de réduire le transport des Promouvoir les marchés publics et autres circuits produits alimentaires. courts pour favoriser une meilleure alimentation, notamment une plus grande consommation de fruits Favoriser l’agriculture urbaine qui, en plus et légumes. d’accroître l’offre alimentaire de proximité, représente souvent un mode de culture sans Limiter les risques associés à la présence de pesticides et comporte d’autres impacts favorables résidus de pesticides dans les aliments à la santé. Afin de limiter la présence de pesticides dans les Viser la réduction de la consommation de protéines aliments, de favoriser une offre d’aliments sécuritaires animales par le développement de et d’obtenir les données pertinentes, il est recommandé recommandations nutritionnelles en ce sens. de : Institut national de santé publique du Québec 1
Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d’action actualisées 1 Introduction 2 Les politiques du secteur Une démarche de réflexion est actuellement menée par bioalimentaire et la saine le MAPAQ visant l’élaboration d’une politique alimentation bioalimentaire. Depuis le début de cette démarche, plusieurs défis et préoccupations ont été identifiés par Dans son mémoire de 2011, l’INSPQ arrivait au constat les consommateurs ainsi que par les différents acteurs que les politiques agroalimentaires n’étaient pas du secteur bioalimentaire. Or, la santé a émergé de exploitées à leur plein potentiel pour maximiser les façon claire comme l’un des principaux enjeux d’intérêt. effets positifs et minimiser les effets négatifs sur Lors des consultations, il a été notamment question de l’alimentation des Québécois (Beckal et coll., 2011). À la présence de résidus de pesticides dans les aliments, la lumière des travaux scientifiques publiés depuis, ce de l’accessibilité physique et économique à une saine constat demeure d’actualité. Or, de nouveaux travaux alimentation ainsi que de l’amélioration de la qualité sur les différentes composantes du système alimentaire nutritive des produits transformés (MAPAPQ, 2017). Les invitent l’INSPQ à préciser et renforcer certains deux derniers points représentent d’ailleurs des éléments, de même qu’à ajouter de nouvelles problématiques pour lesquelles des objectifs sont fixés dimensions à son analyse. À cet effet, l’Organisation dans la Politique gouvernementale de prévention en des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture santé (PGPS) rendue publique en octobre 2016. Cette (FAO) a publié à la fin de l’année 2016 le rapport « Agir politique cible également les répercussions des sur l’environnement alimentaire pour une alimentation changements climatiques et le respect de saine » qui formule des recommandations quant aux l’environnement, ce dernier point ayant été également changements à apporter aux différentes composantes soulevé lors des consultations. du système alimentaire afin de favoriser la saine alimentation (FAO, 2016). L’INSPQ, à titre de centre d’expertise en matière de santé publique au Québec, souhaite alimenter les En s’appuyant sur le cadre conceptuel présenté dans le discussions et la réflexion en apportant un éclairage rapport de la FAO (figure 1), ce chapitre s’intéresse à scientifique sur certains enjeux de santé à considérer trois des sous-systèmes du système alimentaire. La dans l’élaboration de la future politique. Il s’appuie, première section présente les travaux récents qui se pour ce faire, sur différents rapports qu’il a produits, penchent sur le sous-système de la production agricole dont un mémoire publié en 2011 traitant et ses liens avec la saine alimentation. Il y est discuté spécifiquement d’une politique pour ce secteur. de la recommandation de la diversification de la production mise de l’avant par la FAO. La seconde Ce document s’intéresse à trois grandes thématiques, section examine le sous-système de la transformation soit la saine alimentation, les résidus de pesticides des produits alimentaires et traite principalement des dans les aliments ainsi que l’influence des activités cibles nutritionnelles à établir afin d’améliorer la qualité agricoles et de l’alimentation sur les changements de l’offre des aliments transformés et des politiques à climatiques. L’INSPQ avait abordé les deux premiers mettre en place pour atteindre ces cibles. La troisième thèmes dans son mémoire de 2011 et identifié des section touche surtout au sous-système de la vente au pistes d’action prometteuses pour éclairer les détail et de l’approvisionnement. Elle revisite la décideurs dans le choix des mesures à mettre en contribution des circuits courts à la création œuvre. Plusieurs constats et recommandations de d’environnements plus favorables à la saine l’INSPQ ont été ici actualisés et précisés à la lumière alimentation. des nouvelles connaissances scientifiques et des développements dans ces domaines. L’enjeu entourant les changements climatiques n’avait pas été traité et fait l’objet du dernier chapitre de ce document. 2 Institut national de santé publique du Québec
Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d’action actualisées Figure 1 Cadre conceptuel décrivant les liens entre systèmes alimentaires, environnements alimentaires et qualité du régime alimentaire Source : FAO, 2016 Résumé en français. 2.1 Renforcer la diversification des de manière plus équilibrée les besoins en aliments productions agricoles nutritifs au niveau local et mondial. Conséquemment, la FAO recommande aux Dans son récent rapport sur les liens entre les systèmes gouvernements, entre autres choses, de « surveiller alimentaires et la saine alimentation, la FAO soulève l’évolution des tendances en matière de diversité des des enjeux liés à la diversification des productions aliments nutritifs dans l’environnement alimentaire, agricoles au niveau mondial (FAO, 2016). Ce rapport dans la production agricole et sur les circuits souligne que le système alimentaire mondial ne produit commerciaux afin de déterminer à quelles jonctions pas suffisamment certains groupes d’aliments tels que faire porter les efforts » (FAO, 2016, résumé en français, les fruits, les légumes, les légumineuses et les noix, de page 12). Elle recommande aussi de « promulguer des manière à pouvoir offrir une alimentation qui répond aux politiques qui facilitent la gestion de l’équilibre entre la besoins nutritionnels des populations. Ainsi, si les spécialisation et la diversification agricoles, notamment populations adoptaient une alimentation qui réduit au des politiques qui renforcent les marchés locaux minimum les risques à la santé, la production mondiale d’aliments nutritifs » (FAO, 2016, résumé en français, de fruits devrait passer de 423 à 746 millions de tonnes page 12). par année. Inversement, la production mondiale de viande rouge passerait de 202 à 36 millions de tonnes Au Québec, une réflexion en ce sens est nécessaire afin par année. Ces constats indiquent que les d’identifier les politiques contribuant à renforcer la changements dans le sous-système de la production diversification de la production et les marchés locaux agricole ne devraient pas nécessairement viser à d’aliments nutritifs. Néanmoins, la réflexion amorcée produire plus de denrées, mais à produire en vue par la FAO semble une approche innovante pour d’assurer une disponibilité des aliments qui comblent évaluer non seulement les conséquences économiques Institut national de santé publique du Québec 3
Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d’action actualisées et environnementales de la production agricole, mais initiatives varient grandement. En effet, les approches aussi les conséquences nutritionnelles et sur la santé. peuvent être volontaires ou réglementaires, toucher un aliment (ex. : sodium dans le pain) ou un ensemble de Mener une réflexion afin d’identifier quelles politiques catégories de produits et cibler un nutriment ou contribueraient à renforcer la diversification de la plusieurs à la fois. Les stratégies et cibles de réduction production et les marchés locaux d’aliments nutritifs. du sodium dans les aliments transformés sont les plus répandues. Une revue de littérature dénombrait 75 pays 2.2 Développer et atteindre des cibles dotés d’une stratégie de réduction du sodium (Trieu et de reformulation des aliments coll., 2015). À titre d’exemple, le Royaume-Uni, le Canada et les États-Unis ont adopté des cibles transformés volontaires visant les teneurs en sodium dans plusieurs catégories d’aliments, tandis que l’Afrique du Sud et Sachant que plusieurs facteurs de risque des maladies l’Argentine ont adopté des cibles réglementaires. Les chroniques sont modifiables, les organismes de santé cibles de réduction ou d’interdiction des gras trans sont publique reconnus incitent les pays à passer à l’action aussi fréquentes et l’approche réglementaire a été et ont identifié l’amélioration de la composition privilégiée. Les cibles visant les teneurs en gras saturés nutritionnelle des aliments ou la reformulation des ou en sucre sont moins fréquentes, mais les approches aliments transformés comme stratégie porteuse plus globales de la reformulation, qui tiennent compte (Institute of Medicine (U.S.) et coll., 2010; NICE, 2010; de plusieurs nutriments dans un même temps, gagnent WHO, 2014a, 2014b). Les cibles de reformulation des en popularité. aliments transformés correspondent à des objectifs chiffrés d’amélioration de la composition nutritionnelle Le Québec pourrait lui aussi développer des cibles de (sodium, gras trans, gras saturés, sucres) des aliments. reformulation des aliments transformés afin d’inciter Il s’agit donc d’un levier d’amélioration de la qualité ses entreprises alimentaires à minimiser, dans la nutritive des aliments. Ultimement, l’objectif est de fabrication de leurs produits, l’utilisation d’intrants réduire les apports alimentaires en nutriments ou comme le sucre, le sel ou les gras trans. Dans le composantes dont les effets néfastes sur la santé ont processus de développement et de mise en œuvre de été démontrés et à l’inverse, maintenir ou préserver ces cibles, différents facteurs pouvant faciliter le succès certains éléments « positifs » qui sont retirés ou détruits de cette initiative ont été identifiés (Webster, 2009; par le processus de transformation (van Raaij, Magnusson et Reeve, 2015; National Heart Foundation Hendriksen et Verhagen, 2008). La composition of Australia, 2012) et pourraient ainsi guider le Québec : nutritionnelle n’étant pas le seul déterminant de la qualité nutritionnelle d’un aliment ou d’une boisson, les Rattacher les cibles de reformulation des aliments stratégies de reformulation doivent tenir compte de transformés à une stratégie globale, intégrée et l’ensemble des nutriments et composantes dans le multicomposante qui tiennent compte de la produit de même que de certains facteurs de nature complexité inhérente aux systèmes alimentaires. qualitative, notamment la qualité des ingrédients. Par Assurer un leadership et un engagement soutenu du exemple, il ne serait pas souhaitable que des produits gouvernement et allouer des ressources dédiées. reformulés pour réduire la teneur en sucres soient davantage salés pour maintenir un goût acceptable Dresser un portrait de situation à partir des données comme c’est le cas pour certaines céréales à déjeuner de surveillance (apports alimentaires en nutriments, (Institute of Medicine (U.S.) et coll., 2010). Aussi, composition nutritionnelle des aliments transformés) lorsque des produits sont reformulés pour éliminer les pour informer l’action et soutenir un dialogue factuel gras trans, l’huile de palme peut être utilisée comme avec l’industrie alimentaire. ingrédient de substitution ce qui n’améliore pas la Développer des cibles de reformulation SMART, qualité nutritive globale du produit (Downs, Thow et c’est-à-dire spécifiques pour chaque catégorie Leeder, 2013). d’aliments, mesurables avec une valeur au temps 0, acceptables, réalistes et temporellement définies. Un nombre important de pays à travers le monde, dont le Canada, ont adopté des cibles de reformulation des aliments transformés. La nature et la portée de ces 4 Institut national de santé publique du Québec
Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d’action actualisées Fournir des incitatifs pour encourager l’adhésion de D’autres études se sont intéressées à la présence de l’industrie alimentaire et établir des sanctions en cas marchés publics dans un quartier sur l’alimentation ou de non-conformité. la santé de la population desservie (Salois, 2007, Jilcot, 2011, Gustafson, 2013, Bimbo, 2015). Leurs résultats Établir des mécanismes robustes de monitorage et indiquent une meilleure alimentation ou de meilleurs d’évaluation, en préservant la transparence et indicateurs de santé, notamment une prévalence l’indépendance dans le processus. moindre d’obésité ou de diabète. Des études constatent aussi que l’établissement de marchés Au Québec, les travaux de la Politique gouvernementale publics peut pallier aux déserts alimentaires, mais pour de prévention en santé (PGPS), inclut une mesure ayant une minorité des cas étudiés, car ces marchés sont pour objectif d’améliorer la qualité nutritive des aliments souvent établis dans des zones déjà bien desservies et la mise sur pied d’un chantier visant à explorer la par les commerces d’alimentation (Larsen, 2009, Sage, pertinence et la faisabilité de mettre en place, de 2013, Wang, 2014). À noter ici que la contribution manière progressive, des mesures plus persuasives positive des marchés publics à la saine alimentation est concernant la composition nutritive de certaines tributaire de la qualité nutritionnelle de l’offre catégories d’aliments. alimentaire que l’on y retrouve. De nouvelles tendances de commercialisation d’aliments moins favorables à la Développer et mettre en œuvre des cibles de santé dans les marchés publics pourraient venir reformulation des aliments transformés, c’est-à-dire contrecarrer cet effet positif. Une étude américaine des objectifs chiffrés d’amélioration de la composition indique que de telles tendances semblent à l’œuvre nutritionnelle des aliments (sodium, gras trans, gras dans les marchés publics d’un quartier de New York saturés, sucres). (Lucan et coll., 2015). 2.3 Promouvoir les marchés publics et Par ailleurs, l’implantation de marchés mobiles serait autres circuits courts une initiative de circuit court prometteuse afin d’améliorer l’accessibilité à des aliments nutritifs. En 2011, le mémoire de l’INSPQ identifiait Quelques études ont montré qu’elle peut avoir des l’accroissement de la présence des marchés publics impacts significatifs sur la consommation de fruits et de offrant principalement des fruits et légumes et des légumes dans les milieux défavorisés (Abusabha, 2011, circuits courts de mise en marché comme étant des Jennings, 2012). pistes d’actions pour promouvoir un environnement agroalimentaire favorable aux saines habitudes de vie Promouvoir les marchés publics et autres circuits (Bekal et coll., 2011). Depuis, les travaux de recherche courts pour favoriser une meilleure alimentation, sur les liens entre la saine alimentation et la notamment une plus grande consommation de fruits et fréquentation des marchés publics ou la participation à légumes. des circuits courts se sont poursuivis et viennent étayer cette recommandation. Les travaux réalisés observent généralement que la fréquentation des marchés publics (Herman, 2008, Evans, 2012, Cromp, 2012, Pitts, 2013, Freedman, 2013, Pitts, 2014, Pitts, 2015) ou d’un autre type de circuits courts tels que l’agriculture soutenue par la communauté (Landis, 2010, Minaker, 2014, Wharton, 2015, Wilkin, 2015) est associée à une plus grande consommation de fruits et légumes. Institut national de santé publique du Québec 5
Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d’action actualisées 3 L’innocuité alimentaire et 3.1 Risques associés à la présence de pesticides dans les aliments les pesticides Une nouvelle étude publiée en 2017 par l’INSPQ vise à Dans son précédent mémoire, l’INSPQ rappelait qu’en estimer les doses d’exposition chroniques et aiguës dépit du message rassurant des organisations théoriques aux résidus de pesticides auxquels les provinciales et fédérales responsables de la Québécois pourraient être exposés en consommant surveillance des résidus de pesticides dans les des fruits et des légumes, à en identifier les principaux aliments, plusieurs interrogations et inquiétudes déterminants et à évaluer les risques toxicologiques y demeuraient quant à la présence de ces résidus, et ce, étant associés (Valcke et coll., 2017). tant pour la population que pour les professionnels de la santé. Plus précisément, il rappelait l’impossibilité de Cette étude a été réalisée à l’aide des données de conclure sur le niveau de risques sanitaires attribuables résidus de pesticides publiées par l’Agence canadienne à la présence de pesticides dans les aliments d’inspection des aliments (ACIA) au cours de la période consommés au Québec en raison de la faible 2005-2008, et ce, pour des aliments échantillonnés disponibilité des données pour la province (Beckal et partout au pays et non spécifiques au Québec. Ces coll., 2011). Des pistes d’actions ont été proposées afin données ont été couplées aux quantités individuelles d’améliorer les bilans de contamination des aliments de fruits et de légumes consommées en 2004 par un aux pesticides. échantillon représentatif de 4780 Québécois âgés de plus d’un an. Cette étude confirme la faible probabilité Plusieurs des inquiétudes soulevées en 2011 sont d’un risque aigu notamment pour les jeunes enfants. De toujours d’actualité. Elles ont d’ailleurs été reprises par manière générale, les risques chroniques pour les effets le vérificateur général du Québec (VGQ) dans son non cancérigènes, comme les effets sur la reproduction rapport couvrant la période 2016-2017. C’est dans le et le développement, apparaissent aussi faibles. En cadre de ces travaux que le commissaire au contrepartie, le risque cancérigène global estimé de développement durable a inclus le thème des manière très prudente pour l’ensemble des pesticides pesticides en milieu agricole dans son enquête (VGO, considérés est d’environ 3 cas de cancer en excès sur 2017). Le rapport du commissaire au développement 10 000 personnes exposées durant toute leur vie. À durable vise notamment à s’assurer que le MAPAQ l’échelle de la population québécoise, ces chiffres évalue les effets des moyens de lutte antiparasitaire suggèrent que les résidus de pesticides présents dans utilisés sur la qualité des aliments ainsi que sur le les fruits et les légumes consommés pourraient causer développement d’une agriculture durable et en publie jusqu’à 39 cas de cancer annuellement dans la les résultats. province. Les auteurs notent cependant que les cas de cancer qui seraient prévenus par l’effet protecteur Dans ce chapitre, l’INSPQ reprend plusieurs de ses associé à la consommation de fruits et de légumes recommandations de 2011, mais les précise en fonction seraient beaucoup plus importants que les cas de nouveaux développements dans ce secteur. La attribuables aux pesticides. Cependant, le nombre de première section de ce chapitre discute des risques cas estimé n’est pas négligeable et pourrait être plus associés à la présence de pesticides dans les aliments. important si on considère que plusieurs incertitudes ont Les points qui suivent font état des avancées du été associées à l’étude. Par exemple, l’additivité des MAPAQ, mais aussi du travail qui reste à faire au niveau risques associés à l'exposition simultanée à plusieurs de la surveillance et la diffusion de l’information quant pesticides partageant ou non le même mécanisme aux résidus de pesticides dans les aliments, de la d’action n’a pas été évaluée. Les auteurs concluent promotion des outils d’aide à la décision et enfin de la d’ailleurs que ces incertitudes en lien avec certains gestion intégrée des ennemis des cultures (GIEC) et la risques justifient que les instances gouvernementales et production biologique. les intervenants agricoles poursuivent leurs efforts pour réduire le plus possible les concentrations résiduelles de pesticides détectés dans les aliments. 6 Institut national de santé publique du Québec
Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d’action actualisées 3.2 Renforcer le programme québécois Par ailleurs, au cours des dernières années, l’ACIA a de surveillance des résidus de démontré une plus grande volonté à partager ses pesticides dans les aliments données, notamment en collaborant à l’étude de l’INSPQ (Valcke et coll., 2017). Les données fédérales ne permettent cependant toujours pas d’isoler les En 2011, l’INSPQ rapportait dans son mémoire que les informations propres au Québec. Afin de bonifier le données recueillies au Québec comme au Canada ne portrait québécois en matière de résidus de pesticides permettaient pas de faire un portrait global de dans les aliments, le MAPAQ aurait avantage à créer l’exposition alimentaire aux pesticides de la population des ententes avec l’ACIA pour obtenir ces données. québécoise en raison du faible échantillonnage du programme québécois, de l’impossibilité d’y Renforcer le programme québécois de surveillance des amalgamer les données fédérales propres au Québec résidus de pesticides dans les aliments en augmentant et du peu de transparence dans la divulgation des et en diversifiant l’échantillonnage, mais aussi en données (Beckal et coll., 2011). Le renforcement des obtenant de l’ACIA les données spécifiques au Québec. programmes de surveillance des résidus de pesticides dans les produits destinés à l’alimentation humaine a, par ailleurs, été identifié comme l’un des objectifs de la 3.3 Améliorer la diffusion de Stratégie phytosanitaire québécoise en agriculture l’information sur les résidus de 2011-2021 (SPQA) par plusieurs partenaires pesticides dans les aliments gouvernementaux et agricoles (MAPAQ, MDDEP, MSSS, UPA, 2011). Le récent rapport du commissaire Conformément aux actions identifiées dans la SPQA, au développement durable recommandait quant à lui des efforts sont aussi consentis par le MAPAQ pour de diversifier les tests sur les aliments pour mesurer les améliorer la diffusion de l’information sur les résidus de résidus de pesticides afin de tenir compte des pesticides dans les aliments pour qu’elle soit différentes provenances et des variétés d’aliments accessible à la population et aux organismes de santé consommés (VGQ, 2017). publique. Par ailleurs, afin de répondre à l’exigence du VGQ (2017) de présenter aux citoyens une information Afin d’atteindre ces objectifs, le MAPAQ a mis en place annuelle complète des pesticides présents dans les certaines actions ciblées dans la SPQA dont la relance aliments, laquelle comprend les dépassements des du Comité ad hoc sur les résidus de pesticides. Ce normes pour les différents aliments testés ainsi que les Comité consultatif composé de plusieurs intervenants risques d’ingestion de résidus de pesticides à long du milieu agricole et de la santé discute sur une base terme, le MAPAQ s’est engagé à : scientifique des façons de bonifier le programme de Faciliter l’accès à l’information complète des surveillance. Le comité de travail pourra certainement pesticides présents dans les aliments par la aider à identifier des actions et situations prioritaires en publication annuelle des résultats d’analyse dans un matière de surveillance et ainsi favoriser la souci de transparence; diversification des tests. Or, en plus de diversifier l’échantillonnage, l’INSPQ recommande également une Rédiger un rapport sur le plan quinquennal en augmentation du nombre d’analyses ce qui favoriserait surveillance des résidus dans les fruits et légumes une meilleure appréciation des risques pour la 2011-2016. population québécoise. Dans son rapport, le commissaire au développement durable rappelait Habituellement, les rapports du MAPAQ sont présentés d’ailleurs que le programme de surveillance du MAPAQ, sous une forme très synthétique, ce qui est qui consiste à mener des activités d’inspection pour compréhensible lorsque les informations visent la des aliments ciblés sans établir un portrait statistique population. Cependant, la divulgation des données de la contamination de l’ensemble des fruits et des brutes des études du plan quinquennal aux instances légumes consommés au Québec, permet de faire le de santé publique, notamment l’INSPQ, serait un atout suivi de la présence de résidus de pesticides dans les considérable pour mieux comprendre les risques pour aliments, mais pas de tirer une conclusion sur le niveau la population québécoise. L’INSPQ a développé des de risques pour la santé (VGQ, 2017). outils spécifiques afin d’évaluer les risques liés à la présence de résidus de pesticides dans les aliments Institut national de santé publique du Québec 7
Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d’action actualisées (Valcke et coll., 2017) et la disponibilité de données 3.4 Promouvoir la gestion intégrée des propres au Québec permettrait de mieux documenter la ennemis des cultures (GIEC) et la situation québécoise. production biologique Améliorer la diffusion de l’information sur les résidus de L’INSPQ indiquait en 2011 que la future politique pesticides dans les aliments par la divulgation des bioalimentaire devrait mettre en place des mécanismes données brutes des études du plan quinquennal par le qui facilitent la GIEC (Bekal et coll., 2011). Cependant, MAPAQ aux instances de santé publique. Cela le VGQ rapporte que seulement 27 % des producteurs permettrait une évaluation plus précise des risques utilisent la plupart du temps ou toujours les pratiques encourus par la population québécoise. de la gestion intégrée des ennemis des cultures (VGO, 2017). Les grandes cultures et les cultures maraîchères 3.3 Promouvoir les outils d’aide à la sont les secteurs pour lesquels la gestion intégrée décision auprès des producteurs serait la moins imprégnée favorisant ainsi l’utilisation agricoles des pesticides comme principale méthode de lutte contre les ennemis des cultures. Sans complètement Dans son mémoire de 2011, l’INSPQ recommandait de mettre de côté l’utilisation des pesticides, il a été mettre en place des moyens pour mieux faire connaître démontré que la GIEC pouvait significativement l’IRPeQ, l’indicateur des risques des pesticides du contribuer à la diminution des risques liés à l’utilisation Québec et l’outil d’aide à la décision SAgE pesticides des pesticides ainsi qu’à la réduction des résidus de (Bekal et coll., 2011). Ces outils ont entre autres été ces produits dans les aliments. Or, la mise en place de développés pour faciliter la substitution des pesticides cette approche culturale semble stagner au Québec. Le les plus toxiques par des produits à moindre risque. MAPAQ devrait accentuer ses efforts pour faciliter Cependant, selon le VGQ, seulement 36 % des l’imprégnation de la GIEC comme approche de gestion agriculteurs sondés utilisent SAgE pesticides. Des agricole au Québec notamment en facilitant et en efforts importants ont été consacrés à la formation des soutenant la recherche et le développement dans le conseillers agricoles non liés pour l’utilisation de ces domaine. Il pourrait également accentuer les efforts de outils, mais peu d’efforts ont visé à rejoindre les formation pour les producteurs. producteurs agricoles directement. Comme le rapporte le VGQ, l’augmentation des ventes de pesticides se La production biologique peut aussi contribuer de poursuit et les indicateurs de risque qui y sont associés façon importante à la réduction des résidus de étaient à la hausse en 2014, malgré l’adoption de la pesticides dans les aliments. Alors que ce mode de première stratégie phytosanitaire il y a près de 25 ans. Il production augmente de façon considérable aux États- note aussi que les mesures mises en place par le Unis, il croît plus lentement au Québec. La valeur des MAPAQ sont insuffisantes pour amener les agriculteurs produits biologiques a bondi de 23 % aux États-Unis à adopter des pratiques agricoles favorables au en 2016 selon le département américain d’Agriculture ; développement durable et pour faire contrepoids à 56 % des 7,6 G $ US générés par la vente de produits l’industrie agrochimique qui influence fortement le biologiques étaient pour des fruits et légumes. Le marché (VGO, 2017). Même si elle est souvent freinée nombre de fermes certifiées biologiques y a crû de par ces derniers et par des considérations 11 % alors que les superficies ont augmenté de 15% économiques, la substitution de produits en 2015 (Normandin, 2017). Le MAPAQ a prolongé antiparasitaires par des pesticides moins toxiques peut jusqu'en 2022 le programme de transition en agriculture certainement contribuer à la réduction des risques. biologique qui donne soutient les producteurs qui passent de l'agriculture conventionnelle au bio, une Déployer des efforts supplémentaires pour promouvoir, période de transition de trois ans. Ce type d’initiative auprès des producteurs agricoles, les outils d’aide à la aura certainement une influence sur l’accroissement du décision développés pour faciliter la substitution des bio au Québec, mais d’autres initiatives, notamment en pesticides les plus toxiques par des produits à moindre recherche et développement, devront être mises en risque. place afin d’aider les producteurs de ce milieu. Il apparaît par ailleurs surprenant que la SPQA, qui vise à réduire les risques reliés aux pesticides, n’aborde 8 Institut national de santé publique du Québec
Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d’action actualisées d’aucune façon la production biologique. L’agriculture 4.1 Promouvoir l’achat local et les biologique devrait être considérée dans la nouvelle circuits courts de mise en marché Stratégie phytosanitaire de façon à favoriser la croissance de ce mode de production au Québec. Selon le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte aux changements Déployer des efforts supplémentaires pour faciliter climatiques (MDDELCC), le secteur qui produisait le l’imprégnation de la gestion intégrée des ennemis des plus d’émissions de GES au Québec, en 2014, était cultures comme approche de gestion agricole au celui des transports (routier, aérien, maritime, ferroviaire Québec, notamment en facilitant et en soutenant la et hors route) générant 33,7 mégatonnes en équivalent recherche et le développement dans le domaine, de de CO2 soit 41,0 % des émissions (MDDELCC, 2016). À même qu’en accentuant les efforts de formation pour lui seul, le transport routier représentait 82 % des les producteurs. émissions du secteur des transports, soit 33,6 % des émissions totales de GES. Une partie de ces émissions 4 L’alimentation et les est causée par le transport de produits alimentaires. Ainsi, la présence de marchés publics, les initiatives changements climatiques d’agriculture soutenue par la communauté et l’agriculture urbaine, discutée au point suivant, sont des L’INSPQ juge pertinent d’aborder dans ce document alternatives intéressantes en ce qui concerne les l’impact des activités agricoles et de l’alimentation sur émissions de GES et leur impact sur les changements les changements climatiques. Un récent rapport du climatiques. Lancet Countdown, regroupant une vingtaine d’institutions académiques et d’organisations Ainsi, une politique qui met en valeur l’achat local et les intergouvernementales, mentionne que les produits de saison contribuera à la santé de la changements climatiques ont déjà un impact important population et à la lutte contre le changement sur la santé de la population mondiale et que l’action climatique. très limitée menée globalement jusqu’à maintenant pour contrer le phénomène a mis la santé de la Promouvoir l’achat local et les circuits courts de mise population en danger (Watts et coll., 2017). Une action en marché, soit les marchés publics, l’agriculture concertée et efficace pourrait représenter, selon ces soutenue par la communauté et l’agriculture urbaine, experts, la plus grande opportunité de santé publique afin de réduire le transport des produits alimentaires. du 21e siècle. Dans cette perspective, les décisions et orientations prises par le secteur bioalimentaire 4.2 Favoriser l’agriculture urbaine devraient viser la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), lesquels sont responsables de la Au cours des dernières années, l’intérêt marqué des transformation du climat. consommateurs pour une offre de produits sains et sans pesticides, dont les produits biologiques, a permis Ce nouveau chapitre identifie quelques pistes pouvant d’observer une augmentation du nombre de jardins contribuer à diminuer les émissions de GES, soit la communautaires et collectifs dans plusieurs promotion de l’achat local et des circuits courts de municipalités de la province et un intérêt croissant pour mise en marché, la mise en valeur de l’agriculture l’agriculture urbaine (Beaudoin, M. et Levasseur, ME, urbaine ainsi que la réduction de la consommation de 2017). À ce titre, l’agriculture urbaine contribue à l’offre protéines animales. Ces pistes se recoupent parfois ou alimentaire de proximité, réduisant les distances entre sont complémentaires aux constats et la production et la consommation alimentaire et, ce recommandations identifiés dans les deux sections faisant, les émissions de GES. précédentes. L’agriculture urbaine a, en outre, d’autres impacts favorables à la santé. La démonstration du rôle positif que peut jouer ce type d’agriculture dans une communauté a en effet été l’objet de plusieurs recherches et publications. Les jardins communautaires Institut national de santé publique du Québec 9
Une politique bioalimentaire pour un Québec en santé : des pistes d’action actualisées apportent un impact positif sur la santé mentale, autant les autres produits animaux). Les diètes « sans viande d’un point de vue préventif que thérapeutique, en rouge » et « sans bœuf » produisaient 60 % moins réduisant notamment le stress et l’anxiété. Cette d’équivalents de CO2 que le régime « sans porc ». Les activité permet en plus d’accroître le sentiment de diètes « végétarienne » et « végétalienne » avaient développement personnel et la confiance en soi des l’impact le moins important. Toutefois, lorsqu’ajusté en jardiniers. Elle offre la possibilité d’adopter un mode de fonction de l’apport en protéines, le régime végétalien vie plus sain en permettant d’abord un accès accru à venait en troisième position des diètes les plus des fruits et légumes frais, ce qui d’ailleurs permet de susceptibles de contribuer au réchauffement global, en contrer les effets néfastes des déserts alimentaires, raison de la quantité plus importante d’aliments ainsi qu’en procurant une opportunité d’atteindre les nécessaires pour atteindre la recommandation recommandations liées à l’activité physique (Beaudoin, quotidienne en protéines. M. et Levasseur, ME, 2017). Selon une étude de 2014, qui a quantifié les effets sur Favoriser l’agriculture urbaine qui, en plus d’accroître la santé associés à l’adoption d’une diète à faible l’offre alimentaire de proximité, représente souvent un émission de GES, si la diète moyenne au Royaume-Uni mode de culture sans pesticides et comporte d’autres était optimisée afin de répondre aux recommandations impacts favorables à la santé. nutritionnelles de l’OMS, une réduction estimée de 17 % des émissions de GES en résulterait (Milner et 4.3 Réduire la consommation de coll., 2015). Pour ce faire, la diète devrait contenir protéines animales moins de viande rouge, de produits laitiers, d’œufs et de produits transformés, mais plus de céréales, de Le Lancet Countdown a élaboré une liste d’indicateurs fruits et de légumes. Ce faisant, près de 7 millions pertinents en regard de cobénéfices à la santé liés avec d’années de vie perdues prématurément au Royaume- des politiques de réduction de GES, parmi lesquels Uni seraient sauvées au cours des 30 prochaines figure la production de viande de ruminants pour la années, et l’espérance de vie moyenne serait consommation humaine (Watts et coll., 2017). En effet, augmentée de 8 mois, d’après le modèle utilisé dans selon un rapport de la FAO publié en 2014, l’étude. Par contre, une diète qui réduirait de 40 % les « l’ensemble des émissions de [GES] des filières de émissions de GES verrait les effets bénéfiques sur la l’élevage est estimé à 7,1 gigatonnes d’équivalent CO2 santé diminuer. Les auteurs expliquent en effet qu’en par an pour 2005, année de référence. Ces émissions dépassant une réduction de 40 % des émissions de représentent 14,5 % des émissions de GES d’origine GES, la diète rencontrerait de justesse les humaine » (Gerber et coll., 2014). Les bovins à eux recommandations de l’OMS et la composition de la seuls représentent 65 % des émissions du secteur de diète se limiterait à quelques groupes alimentaires, l’élevage. L’impact de l’élevage en matière de causant des carences en calcium et vitamines. changements climatiques est donc important. Au L’acceptabilité sociale d’un tel type de diète serait Canada, les activités agricoles représentent 8 % des également réduite. émissions de GES (Canada, 2016), tandis qu’au Québec 9,4 % des GES proviennent de la production Il appert de ces études, comme d’autres études alimentaire (MDDELCC, 2016). publiées avant elles en Europe, notamment, qu’une modification légère de la diète la plus répandue Une étude ontarienne, publiée en 2017, a revu (« omnivore » et « sans porc » représentant différentes diètes alimentaires pour déterminer leur respectivement 30 % et 27 % de l’échantillon de la impact sur les émissions de GES en fonction population en Ontario utilisé pour l’étude de Veeramani, notamment de la production, du transport et de Dias et Kirkpatrick, 2017) pourrait avoir un impact l’emballage des aliments (Veeramani, Dias et important. En effet, il est plus facile d’inciter les gens à Kirkpatrick, 2017). Ajustées en fonction des calories, les diminuer leur consommation de viande rouge que de diètes les plus susceptibles de contribuer au leur demander de changer complètement leur diète. réchauffement global étaient les diètes « omnivore » Selon différents scénarios, une réduction de la (aucune exclusion ou restriction alimentaire) et « sans consommation de viande et de produits laitiers, au porc » (excluant les produits du porc, mais incluant tous Canada, conduirait à une diminution de 10 à 40 % des 10 Institut national de santé publique du Québec
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