Votez encore une fois non à l'épargne-logement - Asloca
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Droit au logement Le journal de l’ASLOCA No 205 / mai 2012 www.asloca.ch 1211 GENèVE 1 POSTCODE 1 JAB dossier Tiré à 94 000 exemplaires No 205/ mai 2012 JOURNAL DE L’ASLOCA DROIT AU LOGEMENT l’habitat des seniors Témoignages votations fédérales du 17 juin 2012 «Accéder à la propriété grâce à l’épargne-logement» 1211 genève 1 CASE POSTALE 2104 FéDéRATION ROMANDE ASLOCA Votez encore une fois non à l’épargne-logement Genève votations cantonales du 17 juin 2012 Non à la loi sur les institutions publiques
droit au logement Le journal de l’ASLOCA sommaire l’édito n 205 / mai 2012 o le message de l’asloca p.3 «Mourir, cela n’est rien/Mourir, la belle affaire!/Mais vieillir… Oh! vieillir.» Les suisse paroles de cette chanson de Jacques Brel Votations du 17 juin 2012: p.4-5 illustrent parfaitement les difficultés que NON à l’épargne-logement! l’on peut rencontrer en prenant de l’âge, notamment concernant notre lieu de vie, genève qui peut un jour ne plus être adapté à notre Votations du 17 juin 2012: p.6 état de santé. Les témoignages du dossier NON à la loi sur les institutions (pages 8-9) prouvent qu’il existe toutes sortes de possibilités et publiques qu’il est important de choisir celle qui nous convient le mieux. Le faire avant que d’autres doivent en prendre l’initiative à dossier notre place relève sans doute d’une certaine sagesse. Vieillir, c’est... aussi p.7-10 redéfinir son lieu de vie Dans ce journal, vous trouverez l’argumentaire qui vous prouvera une fois encore qu’il faut voter nOn à l’initiative fribourg sur l’épargne-logement le 17 juin 2012. Depuis 1999, soit en Changements au comité cantonal p.11 un peu plus de dix ans, ce sera la quatrième fois que le peuple suisse doit se prononcer sur ce sujet! genève Les coopératives d’habitation p.12-13 vous pourrez noter aussi les changements survenus ces dernières semaines au sein des ASLOCA de Fribourg et valais du valais et lire l’hommage rendu par l’ancien président de Hommage à Pascal Perraudin p.14 l’ASLOCA valais à Pascal Perraudin, que vous avez souvent lu dans ces colonnes et qui a disparu tragiquement au début permanences asloca p.15 du mois d’avril dans un accident de voiture. international Le comité de rédaction du journal fait part à sa compagne, à sa L’Europe veut accélérer p.16 mère et à ses enfants de toute sa sympathie. les économies d’énergie Claire-Lise Genoud Rédactrice en chef (en couverture) Nouvelle initiative sur l’épargne-logement vue par Pellet. DROIT ROIT AU LOGEMENT Journal de l’ASLOCA Rédactrice en chef: Diffusion: Comité de rédaction: Claire-Lise Genoud Membres des sections de Anne Baehler Bech, Christian Case postale 2104 l’ASLOCA Romande et abonnés Dandrès, Christelle Guélat Koller, 1211 Genève 1 xavier Guillaume, Marie-Claire Graphisme: Jeanprêtre-Pittet, Emilie Moeschler, claire-lise.genoud@asloca.ch Madame Paris/Alexandra Ruiz Marc Oran, Carlo Sommaruga, Correction: François Zutter Editeur: Elisabeth Gobalet Ont contribué à ce numéro: ASLOCA Romande Caro, Damien Chervaz, Gaston Paraît cinq fois par année Case postale 2104 Impression: Guex, xavier Guillaume, Pellet, Abonnement 13 francs/an 1211 Genève 1 Imprimerie Saint-Paul, Fribourg Pierre Reymond 2 — Droit au logement • Mai 2012 n° 205
le message de l’asloca par Carlo Sommaruga Secrétaire général, ASLOCA Romande LIBRE CIRCULATION La libre circula- une réflexion de fond. Une journée de travail tion des person- aura lieu le 2 juin 2012 à Lucerne pour ses nes a un impact membres. A cette occasion seront discutées économique for- les diverses mesures d’accompagnement pos- tement positif. sibles en matière de contrat de bail, d’amé- Toutefois, elle a nagement du territoire ou de subventionne- aussi un impact ment du logement d’utilité publique. Lors de social. Celui-ci cette journée sera également discutée la po- e st n et te me nt sition que devra adopter l’ASLOCA, dans le moins favorable. Sur le marché du travail, l’im- cadre du débat en 2013 sur la libre circulation pact social négatif s’exprime par le dumping des personnes autour de l’initiative de l’UDC salarial, phénomène qui résulte des salaires en et l’extension à la Croatie, si les revendications dessous des conditions de la branche proposés des locataires ne devaient pas être prises en aux travailleurs étrangers. Lors de la prochai- considération. notre assemblée des délégués ne session parlementaire, les mesures d’ac- de novembre de cette année ratifiera au final compagnement destinées au marché du travail la position politique et les diverses mesures seront de nouveau à l’ordre du jour avec l’in- qui seront soumises dans le débat parlemen- troduction de nouveaux moyens. D’une part, taire par nos représentants au Conseil national des sanctions pour les employeurs qui abusent et au Conseil des Etats. et, d’autre part, la responsabilité solidaire afin de garantir le versement de salaires confor- Une chose est d’ores et déjà certaine, pour mes par les sous-traitants. conserver au sein de la population une ma- jorité favorable à la libre circulation, les Sur le marché du logement, la libre cir- autorités politiques doivent prendre des culation a pour conséquence le renforce- mesures protectrices du cadre social. Il ment de la pénurie et la cherté des loyers est indispensable de protéger de manière ef- dans les pôles de développement économi- ficace non seulement le marché du travail, que. Cette préoccupation, si elle a été évoquée mais également le marché du logement, cela au Parlement lors du traitement de l’exten- pour éviter que la frustration des locatai- sion de la libre circulation à la Roumanie et res ne croisse encore et ne se transforme à la Bulgarie en 2008, n’a pas été réellement en position de rejet de principe de la libre prise au sérieux par le Conseil fédéral et le circulation. Parlement. néanmoins, les études qui se suc- cèdent sur cette question montrent que la libre circulation a un réel impact sur le marché du logement. L’ASLOCA Suisse a mis en route Droit au logement • Mai 2012 - n° 205 — 3
suisse votations fédérales du 17 juin 2012 épargne-logement: encore une fois NON! Le 17 juin 2012, le d’être les pays porteurs du pas l’instrument adéquat pour 1670 francs par mois, pen- peuple votera pour succès économique de l’Eu- promouvoir l’accession à la dant dix ans, affectée uni- rope. Par contre, l’Allemagne, propriété et la rejettent pour quement au logement, inter- la quatrième fois sur moteur économique envié de ce motif. venant le plus souvent après l’épargne-logement. l’Europe, dispose du taux de la contribution au troisième Ce sera la seconde propriétaires le plus bas de Système rigide pilier, constitue un effort fi- fois cette année, l’Union européenne à 43%. Il L’initiative qui est soumise nancier considérable. C’est étant rappelé que, est proche de celui de la Suisse, à votation le 17 juin impose à la même inatteignable pour une qui est de 36%. Confédération et aux cantons famille avec 100 000 francs de le 11 mars 2012, l’obligation de la déduction revenu annuel. l’épargne-logement Un instrument inadéquat fiscale pour l’épargne-loge- a été rejetée à 56%. L es faits prouvent de ment. Soulignons que la pré- Seul 0,3% des contribuables manière évidente que l’épar- cédente initiative était plus Selon une étude comman- Carlo Sommaruga gne-logement n’est pas un ins- souple, puisqu’elle permettait dée par les milieux immobi- Secrétaire général trument adéquat. Au cours des à chaque canton de décider liers sur la situation de Bâle- Asloca Romande années 1970-2000, la crois- s’il souhaitait ou non intro- Campagne, ce ne sont que sance du taux de propriétai- duire un tel avantage fiscal. 0,3% des contribuables ayant Le 17 juin 2012, le peuple res dans le canton de Bâle- Elle a pourtant été sèchement un revenu brut de moins de votera pour la quatrième fois Campagne, connu pour être refusée par le peuple. 50 000 francs qui recourent sur l’épargne-logement. Cette le seul canton avec un système L a nouvel le i n iti ative à l’épargne-logement. Or répétition de votations résulte d’épargne-logement, est infé- prévoit que la déduction cette tranche de revenu re- d’une obstination idéologique rieure au taux de croissance fiscale est au maximum de présente 37% des contribua- malvenue des milieux immo- de la propriété individuelle du 10 000 francs par année pour bles. Le taux de contribuables biliers. Ceux-ci persistent à qui recourent à l’épargne-lo- réclamer l’épargne-logement dans le but d’augmenter le taux de propriétaires en Suisse, en arguant que la promotion de “ Au cours des années 1970-2000, la croissance du taux gement passe à 0,8% pour la tranche de revenu entre 50 000 francs et 60 000 francs et atteint 2% pour la tranche la propriété individuelle est de propriétaires dans le canton e n t r e 14 0 0 0 0 f r a n c s e t un facteur favorable à l’écono- 180 000 francs. En résumé, mie, que l’épargne-logement de Bâle-Campagne, connu pour plus le revenu est élevé, plus il en est le juste instrument et être le seul canton avec un système y a de participants à l’épargne- qu’enfin la Confédération n’en logement. fait pas assez. Dans les faits, d’épargne-logement, est inférieure les milieux immobiliers oc- au taux de croissance de la propriété Système inutile cultent les points essentiels Cette étude montre aussi derrière la batterie de leurs individuelle du logement dans que 66% des bénéficiaires de arguments fallacieux: l’épar- gne-logement n’est aucune- d’autres cantons voisins, comme l’épargne-logement n’écono- misent l’argent que pendant ” ment efficace pour promou- Soleure, Berne ou Fribourg deux ans. 39% n’économisent voir l’accession à la propriété même qu’une seule année. La et elle est avant tout un ins- durée moyenne générale de trument fiscal permettant une l’épargne est de 2,5 ans dans optimisation fiscale aux plus logement dans d’autres cantons une personne seule et de toutes les classes de revenu. riches de la société. voisins, comme Soleure, Berne 20 000 francs pour un couple. Cela prouve que ces contri- Tout d’abord, un taux ou Fribourg. Cela montre Faut-il rappeler que cette dé- buables disposaient déjà d’une élevé de propriété du loge- que l’accession à la propriété duction fiscale vient de fait fortune pour acquérir le lo- ment dans un pays n’est aucu- ne dépend pas de l’épargne- s’ajouter à celle déjà possible gement. Il apparaît aussi que nement le signe de la garan- logement, mais d’autres fac- pour l’épargne, sans affec- 78% des bénéficiaires auraient tie de son succès économique. teurs comme la disponibilité tation spéciale, du troisième acheté, même sans l’épargne- Ainsi, l’Espagne avec son des terrains ou leur prix. Le pilier. logement! Le fait que l’épar- taux de 83% de propriétai- Conseil fédéral et les cantons Il ne fait pas de doute gne-logement ne puisse béné- res, la Roumanie avec 82% et ont toujours souligné que qu’une part de revenu de ficier qu’aux classes moyennes la Grèce avec 73% sont loin l’épargne-logement n’était 20 000 francs par année, soit supérieures et aux plus riches 4 — Droit au logement • Mai 2012 n° 205
suisse votations fédérales du 17 juin 2012 a été également souligné par le sera d’autant plus douloureux Aucune nécessité mographique, et non en raison Conseil fédéral dans son op- pour la majorité de la popu- de stimuler la construction d’un manque d’offres de loge- position à l’initiative. lation que nous sommes ac- Selon les milieux immobi- ments en propriété. De plus, dans le cadre de Importantes pertes fiscales L’initiative pour l’épargne- logement, si elle est adoptée, “ Si, malgré l’augmentation de l’offre en logements, la pénurie la production actuelle de loge- ments, la part dévolue à la pro- priété est importante. Il n’y a donc aucune raison de stimu- aboutira à des pertes fisca- persiste, c’est en raison de la ler ce segment. En raison de les de 70 millions de francs l’arrivée importante de sala- pour la Confédération et de croissance démographique, et non riés hautement qualifiés avec 250 millions de francs à la en raison d’un manque d’offres de hauts revenus depuis la charge des cantons. Ces pertes mise en œuvre de la libre cir- ” fiscales constituent de fait une de logements en propriété culation des personnes, c’est subvention individuelle aux bien plus la préservation des plus riches pour acheter un tuellement dans un contexte liers, l’initiative pour l’épar- terrains bon marché et la logement. Leur financement de baisse importante des ren- gne-logement aurait le mérite construction de logements se fera de manière évidente trées fiscales en raison de la de stimuler la construction. bon marché, répondant aux au détriment d’autres besoins crise économique. Soulignons Relevons tout d’abord que la besoins des classes populai- prépondérants de la popula- aussi que la Confédération, les construction fonctionne à plein res et moyennes, qui sont es- tion, telles que la construc- cantons, et la Conférence des régime sans aucune nécessi- sentielles et qui doivent être tion de crèches, la rénovation directrices et directeurs can- té de la stimuler. Il n’a jamais stimulées. ou l’extension d’écoles, l’amé- tonaux des finances, comme le été autant construit que ces lioration des services hospita- PDC, les verts et le PS, s’op- dernières années. Si, malgré liers ou sanitaires, l’amélio- posent ouvertement à l’initia- l’augmentation de l’offre en votez et faites voter ration des transports publics, tive, également en raison des logements, la pénurie persis- nOn à l’initiative sur etc. Le financement de ce pri- pertes fiscales produites par te, c’est tout particulièrement l’épargne-logement le vilège pour les plus nantis cet instrument inutile. en raison de la croissance dé- 17 juin 2012. Droit au logement • Mai 2012 - n° 205 — 5
genève votations cantonales du 17 juin 2012 non à la loi sur les institutions publiques! Pour que le service Cinq grandes régies portante du pouvoir entre les les lois concoctées par l’Enten- public reste sous Pour mener une politi- mains du Conseil d’Etat et du te. La votation populaire a eu que sociale du logement, le magistrat en charge du dé- lieu le 1er juin 2008. contrôle démocratique, canton compte aujourd’hui partement concerné. Il est es- Le 15 juin 2010, deux ans l’ASLOCA recommande cinq grandes régies publi- sentiel de permettre à toutes plus tard, le Conseil d’Etat de voter le 17 juin ques: les Hôpitaux universi- les tendances politiques du refuse de prendre acte de la prochain NON à la loi taires de Genève, l’aéroport canton de participer à la mise volonté des citoyens et décide sur l’organisation des de Genève, les Transports en œuvre des politiques publi- de remettre le couvert en dé- publics genevois, l’Hospice ques, via leurs représentants posant un nouveau projet de institutions publiques. général et les Services indus- au sein des conseils d’admi- loi allant dans le même sens: triels de Genève ainsi que six nistration de ces régies. la loi sur l’organisation des Christian Dandrès fondations immobilières de En 2007, le Grand Conseil institutions de droit public Avocat droit public (FIDP). Toutes avait adopté trois lois qui déjà (L 10679). La majorité du Asloca Genève “ ces institutions sont dirigées Le 17 juin 2012, les Genevois par des personnes nommées sont appelés à se prononcer sur par le Parlement et le gouver- Avec cette loi, le Conseil d’Etat une modification de la légis- nement. Celles-ci sont issues pourrait nommer à sa guise lation garantissant le contrô- de la société civile, des milieux le démocratique des institu- intéressés, des partis politi- un quarteron de bureaucrates tions de droit public. Deux ques et des travailleurs des à sa botte. Ceux-ci n’ayant de comptes ans après avoir été remis en dites entreprises. place en votation populai- à rendre à personne, excepté au re, le Conseil d’Etat entend à nouveau faire main basse sur Un système vertueux Le système actuel permet magistrat qui les aurait nommés, la direction des établissements un fonctionnement efficace c’en serait fini de la transparence publics. et un contrôle démocratique sur le patrimoine de la col- et de la démocratie au sein des ” De quoi parlons-nous? lectivité. Les administrateurs établissements publics G e nève d i sp o s e d’u n des régies publiques repré- service public étendu dont les sentent les courants politiques prestations sont servies prin- du canton présents au Grand cipalement par des établisse- Conseil. Cette composition prévoyaient de supprimer le Grand Conseil fait allégean- ments propriété de la collec- est essentielle puisque ces éta- principe de participation. La ce et une loi est votée en no- tivité (Etat, communes). Les blissements et leur fortune droite au Grand Conseil en- vembre 2011 (voir encadré ci- habitants du canton peuvent ont été constitués au moyen tendait se tailler la part du dessous). ainsi bénéficier à moindre des impôts et des émoluments lion et diriger selon sa conve- Si cette loi ne touche pas coût de services qui vont de la versés par la population et les nance le patrimoine de la col- pour l’instant les fondations santé à l’énergie en passant par générations antérieures. Ce lectivité. Le peuple a rappelé immobilières de droit public, l’accueil des aînés (FSASD et système permet aussi d’éviter à l’ordre cette majorité en re- il est certain qu’à bref délai EMS). une concentration trop im- jetant à de très larges majorités ces dernières seront également soumises à ce régime. Bientôt seraient évacués les représen- tants des usagers-locataires et, une loi anti-démocratique avec eux, la gestion de proxi- mité qui fut plébiscitée par la La loi sur l’organisation des institutions publiques (L 10679) va plus loin encore que les trois lois refu- population. sées par le peuple en 2008. Elle supprime tout pouvoir au Grand Conseil pour nommer les adminis- trateurs des institutions publiques et rejette le principe selon lequel les milieux intéressés et les colla- L’ASLOCA appelle les borateurs participent à la définition des orientations stratégiques de ces entreprises. Avec cette loi, le locataires de Genève Conseil d’Etat pourrait nommer à sa guise un quarteron de bureaucrates à sa botte. Ceux-ci n’ayant à refuser et à faire de comptes à rendre à personne, excepté au magistrat qui les aurait nommés, c’en serait fini de la refuser la loi sur l’organisa- transparence et de la démocratie au sein des établissements publics. tion des institutions publiques (L 10679), à l’occasion des vo- tations du 17 juin 2012. 6 — Droit au logement • Mai 2012 n° 205
dossier l’habitat des seniors vieillir, c’est... aussi redéfinir son lieu de vie La population d’un vironnement privé, intime encore en pleine possession de courses ou manger dans une pays comme le nôtre et social. Parce que vieil- ses moyens physiques et psy- trop grande solitude. On peut lir, cela signifie perdre au fil chiques. On pourra ainsi dé- aussi prévoir d’échanger son vit de plus en plus des années son autonomie de terminer concrètement et avec logement contre un plus petit. longtemps. Mais la mouvement, de déplacement, précision le lieu où l’on va se Il y a aussi les gens de l’im- vieillesse implique de discernement… Et souf- sentir en sécurité, entouré de meuble avec qui on peut se aussi une dépendance frir, parfois beaucoup. Peu y personnes que l’on apprécie rendre des services. La per- croissante à l’autre, et échappent. Un homme disait tout en se simplifiant la vie sonne âgée devrait pouvoir la maison de retraite récemment: «Il y a ce que l’on quotidienne au maximum. conserver le plus longtemps dit et ce que l’on vit. On ne possible son autonomie tout en n’est pas l’unique peut pas imaginer ce que cela y penser à temps organisant sa vie pour le jour solution à envisager. peut être physiquement dou- Tout le monde peut organi- où tout deviendra plus difficile loureux de vieillir. La plupart ser sa vie en tenant compte des pour elle. Claire-Lise Genoud du temps, on n’ose même pas années qui passent. Pourquoi D’autant qu’avec l’augmen- Rédactrice en chef en parler. On sait bien que rien ne pas prendre contact avec tation de la population de plus Droit au logement ne peut nous soulager.» les services sociaux de sa de 65 ans – on parle de +30% On ne devrait pas avoir commune et chercher en- d’ici à 2020 – les maisons de Où vieillir? Cette question, peur de prendre conscience de semble différentes solutions? retraite ne sont probable- chacun d’entre nous devrait cette perspective et oser anti- On peut aussi saisir l’occasion ment pas l’unique solution. A se la poser un jour afin d’évi- ciper en se concoctant un plan de partager son grand appar- chacun de prendre sa vieilles- ter de se voir imposer son en- retraite réaliste lorsqu’on est tement pour ne pas faire les se en main! Droit au logement • Mai 2012 - n° 205 — 7
dossier l’habitat des seniors couple séparé par l’ems «on n’a pas eu le choiX!» toujours chez elle, grâce à sa famille «On est séparé, je vis seul dans Elle devenait alors très jalouse et On peut dire qu’elle a eu une «elle ne veut notre appartement à Lausanne pouvait être agressive avec moi. vraie vie d’aventure. Elle orga- pas entendre depuis deux ans.» André, 86 Durant plus d’un an, je n’ai rien nisait aussi des soirées concerts. parler de l’ems» ans, n’a pas eu d’autre choix. Sa dit à personne. Et puis, un jour, Tout cela, c’était avant que la femme, Laurette, 95 ans, est at- elle m’a lancé une potiche à la pub n’envahisse les écrans de teinte de la maladie d’Alzheimer, tête. Un autre, elle s’est ouvert télévision. De mon côté, j’ai Ida a fêté ses 100 ans en dé- affection neurodégénérative in- la tête parce que je l’ai poussée aussi voyagé, je travaillais pour cembre 2010. Mais il n’est curable. Elle se porte encore bien pour passer et qu’elle est tombée les Minoteries, je vendais de la toujours pas question pour physiquement, mais dans sa tête, entre le lit et l’armoire. J’ai alors farine aux boulangers.» elle de quitter son appar- c’est plus difficile. Lors d’un séjour compris qu’il fallait que j’en parle Depuis qu’elle vit à l’EMS, l’état de tement au centre-ville de à l’hôpital, la décision a été prise à son médecin. Il a tout de suite Laurette s’est stabilisé, mais «elle Sierre (Valais). Heureusement, de la faire admettre dans un EMS pris des mesures, d’autant qu’il me fait encore parfois des crises. Eliane, sa fille, vit sur le même médicalisé. «Ce n’est pas moi qui savait qu’elle était atteinte de la Elle n’en fait jamais au person- palier. «Je dois lui donner trois “ nel, seulement à moi. Pourtant je fois par jour deux gouttes viens tous les jours.» André passe Mon épouse est beaucoup mieux en effet prendre le thé avec son d’un médicament qui fluidifie le sang dans le cerveau, cela ici qu’à la maison. Je ne pourrais plus épouse tous les jours entre 16 h me donne l’occasion de voir et 18 h. «Quand le repas du soir comment elle va et depuis peu ” faire tout ce qu’on fait pour elle ici arrive, c’est le moment où moi je elle mange à midi chez moi», m’en vais. Le matin, je n’arrive explique cette dernière. Il y a ai pris la décision et pas elle non maladie d’Alzheimer et que sa pas à venir. Il faut que je m’oc- aussi des infirmières du Centre plus, poursuit André, ce sont trois santé pouvait se modifier. Mais, cupe de mon ménage. Mais médico-social qui viennent lui personnes qui la suivaient au vous savez, ma femme a eu une depuis quelque temps je me sens faire sa toilette deux matins niveau de sa santé. Il y a eu l’in- vie de château. Elle est ce que fatigué. Mon médecin dit que par semaine et une dame qui firmière qui nous visitait réguliè- l’on appelait à l’époque propa- je devrais essayer d’espacer un lui tient compagnie le mardi rement, son médecin personnel gandiste et démonstratrice. Elle peu mes visites. Pour le moment, et le jeudi. «Cela me permet et un médecin du CHUV, spécia- a même conduit une voiture pu- je n’y arrive pas. J’ai pris l’ha- de faire de petites escapades lisé en gériatrie.» blicitaire avec des haut-parleurs. bitude. C’était une bonne solu- sans me faire trop de souci La vie était devenue diffici- Elle faisait aussi des confé- tion tout de même. Je peux dire pour elle», poursuit sa fille. le pour le couple. André se sou- rences et a obtenu un brevet que je revis un peu. Je me sens vient: «Dans sa tête, elle voyait pour projeter des films, des plus tranquille. Elle est mieux ici bien entourée des gens qui venaient nous 16 millimètres sonores. Elle voya- qu’à la maison. Moi, je ne pour- La centenaire peut aussi trouver pour moi, pas pour elle, geait dans toute la Suisse et sé- rais plus faire tout ce qu’on fait compter sur d’autres membres et qui venaient durant la nuit. journait dans les meilleurs hôtels. pour elle ici.» de sa famille, comme deux de ses petites-filles qui habi- CLG tent la région et se relayent chaque mercredi après-midi PHOTOS : pour prendre le thé chez elle. Son beau-fils lui rend égale- ment visite tous les lundis. Quant à ses fils qui vivent en dehors du Valais, ils passent régulièrement les fins de semaine chez elle avec leurs femmes. Ils en profitent pour l’emmener chez le médecin le vendredi après-midi ou lui faire certaines courses. Il faut dire que Ida vieillit tout de même chaque jour un peu plus et qu’elle n’ose plus des- cendre toute seule les esca- liers depuis que son médecin lui a fait prendre conscien- ce qu’elle pourrait facilement tomber en perdant l’équili- bre. Cela réduit considéra- blement son rayon d’action et la confine entre son apparte- ment et celui de sa fille. André, 86 ans, passe tous les après-midi à l’EMS où séjourne son épouse, Laurette, 95 ans. (suite page 9) 8 — Droit au logement • Mai 2012 n° 205
dossier l’habitat des seniors colocation entre sŒurs «nous sommes devenues veuves à trois mois d’intervalle» Les deux sœurs, Marie-Antoinette, 87 ans et Edith, 78 ans, habitent désormais sous le même toit. «Tout s’est passé tellement lors d’une visite médicale que les environs pour continuer entendue. «La décision s’est vite, je dois dire que je n’ai pas Henri est atteint d’un cancer. à vivre dans cette région où imposée à moi, se souvient- vraiment l’impression d’avoir Il décède au mois d’août. elle s’est très bien intégrée et elle. D’autant que ma sœur décidé de venir m’installer Edith se retrouve avec une où elle se sait entourée d’amis souffre de problèmes de à Lausanne chez ma sœur grande maison située dans de longue date. A quelques mémoire. Ma présence chez Marie-Antoinette.» Edith, 78 un endroit magnifique mais jours d’intervalle, elle trouve elle au quotidien lui permet ans, vivait dans le vaucluse assez sauvage et difficilement d’ailleurs un acheteur et une de conserver des repères (France) depuis qu’Henri, accessible durant l’hiver. petite maison à louer dans un dans le temps. C’est vraiment son mari, avait atteint l’âge C’est en se réveillant village à proximité. Mais ses idéal. Le plus dur a été de de la retraite. Il y a ainsi plus un matin qu’elle comprend projets prennent une autre quitter la région du vaucluse. de trente ans qu’ils avaient qu’elle va devoir vendre direction lorsqu’elle apprend Mais nous y sommes déjà re- décidé de quitter Genève. cette maison beaucoup trop à la fin de novembre le décès tournées ensemble plusieurs Tout se passe à merveille grande pour elle toute seule. d’Alfred, le mari de sa sœur fois, et cela me permet ainsi jusqu’au printemps de l’an Elle se met alors en quête Marie-Antoinette, avec qui de rester en contact avec mes passé. Le couple apprend d’un autre logement dans elle s’est toujours très bien amis de là-bas.» (suite) Lorsqu’elle est seule, elle a tendance ne plus très bien savoir où elle se trouve, ni DR à somnoler et perd même parfois l’envie de trop comment elle s’appelle. Elle est alors per- regarder Roger Federer à la télé, c’est dire! suadée que quelqu’un vient lui prendre une Elle n’a cependant pas raté l’élection françai- robe dans son armoire ou lui a apporté de se du 6 mai dernier et lâche avec un grand l’argenterie dans son salon. Dans ces mo- sourire: «Je ne sais pas comment ça s’est fait, ments-là, seule la perspective d’appeler son mais tout à coup il était minuit et j’étais tou- médecin – qui se déplace à domicile – réussit jours devant la télé!» Elle s’inquiète d’ailleurs à l’apaiser et à lui faire reprendre pied dans beaucoup pour Carla... Mais ça, c’est une la réalité. Ce sont bien sûr les effets classiques autre histoire. Ce qu’elle ne manque cepen- dus à son grand âge, mais l’organisation fa- dant sous aucun prétexte, c’est «d’écouter», miliale mise en place petit à petit permet comme elle dit, la messe à télévision. Tout néanmoins à cette centenaire de continuer à cela ne permet pas d’éviter qu’il lui arrive de vivre dans son propre appartement. Ida, 101 ans, et l’une de ses petites-filles. Droit au logement • Mai 2012 - n° 205 — 9
dossier l’habitat des seniors CMS-SIERRE A Sierre, les appartements «domino» ont été créés en 1998 déjà pour pallier l’isolement social de certaines personnes âgées. «il est souvent plus facile de vieillir en ville» Vieillir en ville ou vieillir à la campagne. Selon fiter au maximum du temps jours plus lourde à gérer. Filip Uffer, directeur de Pro Senectute Vaud, la mis à notre disposition. Tout tendance serait plutôt à la ville parce que cette devient plus délicat lorsqu’on Que peut-on faire pour met le pied dans le quatrième éviter l’isolement? dernière est souvent mieux desservie par les âge. Ce n’est alors plus une Il importe de s’assurer de dis- soins et les repas à domicile. Les colocations question d’âge – parce qu’il y a poser à sa vieillesse d’un lo- seniors ont, elles aussi, le vent en poupe. des personnes qui font encore gement où l’on se sente bien du ski à 86 ans – mais une entouré socialement et qu’il Entrer en maison de retraite «Nous louons ces appartements question de condition phy- soit bien situé, proche des n’est pas toujours la solution. à des propriétaires privés puis sique ou psychique. On peut commerces, sans obstacles ar- Pour permettre aux personnes les sous-louons à des personnes dire que, dès qu’un problème chitecturaux et accessible faci- âgées de rester le plus long- âgées qui deviennent nos loca- commence à se manifester de lement pour des soins à domi- temps possible à la maison, taires. Si nous avons eu l’idée manière à sérieusement han- cile quotidiens. Si le logement les spécialistes du troisième de créer ce genre de cohabita- dicaper la personne, que, par apporte tous ces avantages, on âge ont cherché d’autres alter- tion c’est avant tout pour pallier exemple, les escaliers devien- sait qu’on va pouvoir prolon- natives. Celle qui a le vent en la solitude et l’isolement social nent un véritable obstacle, on ger considérablement le main- poupe depuis quelques années de certaines personnes âgées.» commence à devoir trouver tien de la personne âgée à son est la colocation entre seniors. Depuis, la plupart des cantons des solutions de vie au quoti- domicile. que cela s’appelle des ap- ont mis sur pied des concepts dien. Et c’est à ce moment-là partements communautaires, similaires et plusieurs projets que la question du logement Cela voudrait-il dire que l’on des appartements protégés ou sont en cours. Interview de devient primordiale. vieillit mieux en ville qu’à la adaptés ou encore «domino» Filip Uffer, directeur de Pro campagne? pour «DOMIcile Nouvelle Senectute vaud. Pour quelles raisons? Si le village où l’on vit possède Option» comme à Sierre, tous On considère principalement cet environnement social, rien sont basés sur une cohabitation Considérez-vous que le loge- deux sortes d’environnement, n’empêche de vivre à la cam- entre personnes de la même ment est une problématique l’un est construit, l’autre est pagne. Mais il est vrai que génération. Chaque «locataire» pour les personnes âgées? social. quand on est jeune, l’on constate chez les person- possède un espace privé et bé- Filip Uffer. Lorsqu’on prend on va chercher à l’extérieur de nes à la retraite une tendance néficie des espaces communs. sa retraite, on entre dans le chez soi les contacts sociaux à revenir vivre en ville. Le premier appartement de troisième âge, mais cela ne si- dont on a besoin, mais, avec le Propos recueillis ce genre a été ouvert à Sierre gnifie pas pour autant que l’on temps, l’espace que l’on gère par Claire-Lise Genoud en juin 1998. Isabelle Pralong ne soit pas en pleine forme sans difficulté se restreint. voide, directrice adjointe du physique. On a souvent à ce Apparaissent alors des problè- Plus d’infos: s’adresser aux services Centre médico-social de la moment-là envie de croquer la mes dus à l’isolement et l’im- sociaux de votre commune ou au région de Sierre, explique: vie à pleines dents et de pro- mobilité «obligée» devient tou- centre médico-social (CMS). 10 — Droit au logement • Mai 2012 n° 205
fribourg changements au comité cantonal pierre mauron à la tÊte de l’asloca fribourg Elu au Conseil fédéral certain temps d’adaptation. le 14 décembre non, car il a vraiment mis cette grande association sur 2011, Alain Berset des rails solides, avec de vraies a été remplacé à structures qui fonctionnent la présidence de bien et le potentiel d’augmen- l’ASLOCA Fribourg tation des membres est réel. par Pierre Mauron. Que comptez-vous faire à xavier Guillaume moyen terme? Secrétaire général Dans un premier temps, il Asloca Fribourg s’agira de s’engager contre l’initiative populaire «Accéder Pour assumer la présidence de à la propriété grâce à l’épar- l’ASLOCA Fribourg, l’assem- gne-logement», qui sera votée blée générale du 4 avril 2012 en juin prochain. La pre- a élu Pierre Mauron, 40 ans, mière mouture a été com- avocat à Bulle. Président de battue avec succès et j’espè- la section ASLOCA Fribourg re qu’il en sera de même pour Sud (Gruyère-Glâne-veveyse- ce nouveau projet, encore plus Broye) depuis une dizaine contraignant. d’années, il a été aussi membre Ensuite, avec le soutien du comité de l’association can- du comité, j’espère que nous tonale et fait partie du collec- pourrons entamer une grande tif d’avocats spécialisés dans la campagne d’information pour défense des locataires créé en que, d’une part les locataires 2003. soient toujours mieux informés L’assemblée générale a éga- de leurs droits et que, d’autre lement élu Matthieu Loup à part, nous puissions augmen- la vice-présidence. Etudiant ter le nombre de membres, ce en droit, 21 ans, il est aussi qui nous permettra de mettre conseiller général à Marly davantage de moyens à dispo- et fait partie de ces jeunes sition des locataires. membres de l’ASLOCA prêts Finalement, il faut toujours à partager leur enthousiasme garder un œil attentif sur le et à mettre leur énergie à dis- prix des loyers, lié au taux position du comité cantonal. hypothécaire de référence. A Enfin, pour assumer les fonc- mon avis, celui-ci ne tardera tions de secrétaire général et pas à augmenter et il faudra que de trésorier, l’assemblée géné- nous soyons prêts à combattre rale a réélu xavier Guillaume, toutes ces hausses de loyer, si qui épaulera ainsi les person- celles-ci sont injustifiées. DR nes nouvellement élues pour gérer cette association, désor- A votre avis, peut-on dire Longtemps responsable de l’ASLOCA Fribourg Sud, Pierre Mauron a été élu président de l’ASLOCA Fribourg. mais forte de 5400 membres. qu’il y a pénurie de loge- ments dans le canton de ménages, contre un quart il y rendements excessifs de leurs N’est-ce pas trop difficile Fribourg et quelles en sont a une décennie. Avec les sa- immeubles. Cela n’est pas ad- de succéder à un conseiller les conséquences? laires moyens qui n’augmen- missible, surtout lorsqu’on fédéral? Oui, à ma connaissance on tent pas, et le renchérissement profite des personnes âgées ou Pierre Mauron. Oui et non. peut parler de pénurie de loge- qui reste stable, il n’y a aucune d’autres catégories de locatai- Oui, car les qualités d’Alain ments depuis 2003. Cela crée raison pour que les prix des res qui n’ont pas toujours les Berset sont unanimement re- une pression sur les loyers, loyers augmentent unique- moyens de se défendre. Mais connues et qu’un tel change- qui représentent désormais ment parce que les bailleurs l’ASLOCA est là pour veiller ment nécessite toujours un jusqu’à un tiers du budget des se sont habitués à obtenir des au grain. Droit au logement • Mai 2012 - n° 205 — 11
Genève les coopératives d’habitation Quand le locataire est acteur de son habitat Solution de logement d’une épargne-logement qui Acteur de son habitat de logement sont dictées par alternatif, les ne bénéficierait qu’aux plus Techniquement, la société des bailleurs poussés par une fortunés, le vote des locataires coopérative est celle que pure logique de profit écono- coopératives genevois doit être interprété forment des personnes (au mique, les coopératives per- permettent au comme un appel au change- minimum sept) et qui pour- mettent à leurs membres de coopérateur de cumuler ment de leur condition, comme suit principalement le but de s’approprier leur lieu de vie les avantages des la traduction d’une volonté de favoriser ou de garantir, par et de fixer eux-mêmes les statuts de locataires devenir acteur de son loge- une action commune, des in- règles du jeu sans craindre des ment plutôt que de rester tri- térêts économiques détermi- représailles. et de propriétaires butaire du bon vouloir de son nés de ses membres (art. 828 Au-delà des avantages pra- sans en subir les bailleur. al.1 du CO). tiques, le fonctionnement des inconvénients. On en devient membre par coopératives d’habitation tel Damien Chervaz Une alternative l’acquisition d’une part sociale qu’il vient d’être décrit encou- Avocat aux abus des bailleurs (remboursable en cas de sortie rage les gens à vivre ensemble Asloca Genève A l’heure où, en raison de de la coopérative), laquel- et leur permet de développer son coût, la propriété demeure le procure au coopérateur un un projet autour de valeurs Comme souligné dans le inaccessible pour le plus grand véritable droit de regard et de communes (écologiques, so- dernier numéro du Droit au lo- nombre, la réponse à cette as- décision. En matière de loge- ciales, culturelles, etc.). Ces gement (DAL 204, avril 2012, piration semble passer né- ment, ce droit permet à son perspectives dépassent la pro- p. 4), le oui «paradoxal» des cessairement par le déve- titulaire de participer active- blématique du logement au Genevois à l’initiative pour loppement de coopératives ment à l’élaboration et à l’évolu- sens strict pour s’inscrire dans l’épargne-logement a indénia- d’habitation sans but lucra- tion de son cadre de vie. Sur la celle, tout aussi essentielle, de blement constitué la grande tif. Sorte de «voie du milieu», base du principe démocratique la qualité de l’habitat. surprise de ce scrutin. ces coopératives permettent selon lequel chaque membre a Dans un canton où, plus au coopérateur de cumuler les droit à une voix, le coopéra- Des loyers bas liés aux encore qu’ailleurs en Suisse avantages des statuts de loca- teur peut émettre des propo- coûts réels de l’immeuble romande, le prix exorbitant taires et de propriétaires tout sitions, faire valoir son point La coopérative d’habita- de l’immobilier rend l’accès à en éliminant une bonne partie de vue, et voter sur des ques- tion est un organisme sans but la propriété illusoire pour une de leurs inconvénients. tions allant de la construction lucratif, qui ne cherche donc très large majorité de la po- pas à réaliser des profits. Ses “ pulation, y compris parmi les loyers sont fixés de manière classes aisées, ce résultat reste Dans une coopérative, à couvrir les charges et l’en- énigmatique, sauf à le considé- tretien de l’immeuble uni- rer comme un vote de «ras-le- les loyers sont fixés quement. Ils demeurent ainsi bol» face à un statut de locatai- de manière à couvrir les plus bas que ceux des loge- re de plus en plus intenable. ments du secteur locatif libre. E n ef fet, G enève e st charges et l’entretien de Ils sont également beaucoup ” peuplée à 80% de locataires subissant en première ligne et l’immeuble uniquement plus stables dans la mesure où, s’agissant de loyers fondés sur de plein fouet les conséquen- les coûts, ils ne sauraient être ces de la pénurie de logements augmentés pour un motif tel qui sévit à travers le canton. Les coopératives consti- (choix de matériaux écologi- que le fameux «ajustement aux Malgré le travail de l’ASLOCA, tuent un excellent outil de po- ques par exemple) en passant loyers du quartier». loyers abusifs, conditions de litique du logement au sens par ses éventuelles rénova- D e même, le proce s- location inacceptables, ap- large, permettant de créer des tions et son exploitation. Tout sus participatif décrit ci-des- partements insalubres, baux à dynamiques de quartier et aussi important, la qualité de sus permet aux coopérateurs durée déterminée, etc. restent de promouvoir un habitat de coopérateur assure en général d’exercer un certain contrôle le lot quotidien de nom- qualité. – et à condition de se compor- sur les coûts à tous les stades breux locataires, qui décident ter normalement et de respec- de vie de la coopérative, de sa souvent de courber l’échine Ce qu’il faut savoir ter les règles fondamentales de conception à sa rénovation en face aux bailleurs, plus que Sans prétendre à l’exhaustivi- la coopérative – un bail à vie à passant par son entretien et jamais en position de force. té, il semble utile de rappeler son détenteur. ses travaux à plus-value. Cette Dans ce contexte, plus quelques qualités propres aux Ainsi, et contrairement au possibilité protège notamment qu’un plébiscite en faveur coopératives d’habitation. marché libre où les conditions les membres de la coopérative 12 — Droit au logement • Mai 2012 n° 205
Genève Les coopératives d’habitation contre des hausses de loyer ré- 1227 francs, contre 909 francs surément. Le problème est lation plus ou moins directe sultant de «rénovations luxueu- dans les coopératives. d’autant plus absurde qu’en avec la taille ou le nombre ses» décidées unilatéralement parallèle d’autres familles de pièces de chaque appar- par le propriétaire et imposées Diminuer la sous- qui s’agrandissent rêveraient tement. Le coopérateur qui au locataire contre son gré et occupation d’échanger leur deux-pièces échange son logement pour un ses intérêts. A Genève, la pénurie de contre un appartement plus autre moins grand bénéficiera logements est accentuée par le spacieux, ce que le marché donc logiquement d’une ré- Un impact sur le niveau nombre d’appartements sous- libre du logement rend prati- duction de loyer plus ou moins général des loyers occupés (suite, par exemple, quement impossible. proportionnelle. Au niveau macro-écono- à un changement dans la En facilitant, voire en exi- mique, le système de fonction- structure du ménage, tel que geant dans certains cas, les Promotion indispensable nement des coopératives a un divorce, départ des enfants), échanges d’appartements A elles seules les quelques impact indéniable sur l’évolu- mais que les locataires conser- entre leurs membres en cas qualités qui viennent d’être tion générale des loyers. Selon vent parce qu’ils ne trouvent de sous-occupation, les coo- citées démontrent la néces- une étude de 2011, la hausse pas d’appartement plus petit pératives d’habitation per- sité de promouvoir et de dé- des loyers est moindre dans ou que, même s’ils en trouvent mettent de lutter efficacement velopper le logement coopé- “ les villes suisses où les coopé- ratif dans l’arc lémanique, où ratives d’habitation sont bien implantées. Ainsi, entre 1970 La hausse des loyers est il ne représente pour l’heure que 4,8% du parc immobilier et 2010, les loyers ont aug- moindre dans les villes suisses total. menté de 408% à Zurich et de 353% à Berne où les coopé- où les coopératives d’habitation C’est d’autant plus le cas que, en donnant aux habi- ” ratives sont bien implantées, sont bien implantées tants la possibilité unique de alors qu’ils ont bondi de 455% devenir partie prenante au sur l’arc lémanique, où elles processus de création de leur sont peu présentes. Toujours un, le loyer demandé est beau- contre cette problématique. habitat, les coopératives d’ha- à Zurich, où les coopératives coup plus élevé que le leur, le C’est d’autant plus le cas que, bitation permettent forcément représentent plus de 20% du bailleur profitant en général comme indiqué précédem- de créer des logements répon- parc immobilier de la ville, le de chaque changement de lo- ment, les loyers sont fixés afin dant aux besoins prépondé- loyer moyen de l’ensemble du cataire pour «optimiser son de couvrir les coûts et se trou- rants de la population… et à parc locatif en 2000 était de rendement», souvent déme- vent donc a fortiori en corré- ses envies. Droit au logement • Mai 2012 - n° 205 — 13
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