Votez encore une fois non à l'épargne-logement - Asloca

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Votez encore une fois non à l'épargne-logement - Asloca
Droit au logement
Le journal de l’ASLOCA                    No 205 / mai 2012
                                          www.asloca.ch

                                                                           1211 GENèVE 1
                                                              POSTCODE 1

                                                                                 JAB
                                                 dossier

                                                              Tiré à 94 000 exemplaires
                                                              No 205/ mai 2012
                                                              JOURNAL DE L’ASLOCA
                                                              DROIT AU LOGEMENT
                                             l’habitat
                                            des seniors
                                             Témoignages

 votations fédérales du 17 juin 2012
 «Accéder à la propriété grâce à l’épargne-logement»
                                                              1211 genève 1
                                                              CASE POSTALE 2104
                                                              FéDéRATION ROMANDE
                                                              ASLOCA

 Votez encore une fois non
 à l’épargne-logement
 Genève
 votations cantonales du 17 juin 2012

 Non à la loi sur les
 institutions publiques
Votez encore une fois non à l'épargne-logement - Asloca
droit au logement
Le journal de l’ASLOCA

sommaire                                                                  l’édito
n 205 / mai 2012
 o

le message de l’asloca                      p.3                                              «Mourir, cela n’est rien/Mourir, la belle
                                                                                             affaire!/Mais vieillir… Oh! vieillir.» Les
suisse                                                                                       paroles de cette chanson de Jacques Brel
Votations du 17 juin 2012:                p.4-5                                              illustrent parfaitement les difficultés que
NON à l’épargne-logement!                                                                    l’on peut rencontrer en prenant de l’âge,
                                                                                             notamment concernant notre lieu de vie,
genève                                                                                       qui peut un jour ne plus être adapté à notre
Votations du 17 juin 2012:                  p.6                                              état de santé. Les témoignages du dossier
NON à la loi sur les institutions                                         (pages 8-9) prouvent qu’il existe toutes sortes de possibilités et
publiques                                                                 qu’il est important de choisir celle qui nous convient le mieux.
                                                                          Le faire avant que d’autres doivent en prendre l’initiative à
dossier                                                                   notre place relève sans doute d’une certaine sagesse.
Vieillir, c’est... aussi                  p.7-10
redéfinir son lieu de vie                                                 Dans ce journal, vous trouverez l’argumentaire qui vous
                                                                          prouvera une fois encore qu’il faut voter nOn à l’initiative
fribourg                                                                  sur l’épargne-logement le 17 juin 2012. Depuis 1999, soit en
Changements au comité cantonal              p.11                          un peu plus de dix ans, ce sera la quatrième fois que le peuple
                                                                          suisse doit se prononcer sur ce sujet!
genève
Les coopératives d’habitation         p.12-13                             vous pourrez noter aussi les changements survenus ces
                                                                          dernières semaines au sein des ASLOCA de Fribourg et
valais                                                                    du valais et lire l’hommage rendu par l’ancien président de
Hommage à Pascal Perraudin                 p.14                           l’ASLOCA valais à Pascal Perraudin, que vous avez souvent
                                                                          lu dans ces colonnes et qui a disparu tragiquement au début
permanences asloca                         p.15                           du mois d’avril dans un accident de voiture.

international                                                             Le comité de rédaction du journal fait part à sa compagne, à sa
L’Europe veut accélérer                    p.16                           mère et à ses enfants de toute sa sympathie.
les économies d’énergie

                                                                                                                 Claire-Lise Genoud
                                                                                                                  Rédactrice en chef

(en couverture) Nouvelle initiative sur l’épargne-logement vue par Pellet.

  DROIT
    ROIT AU LOGEMENT
  Journal de l’ASLOCA
                                           Rédactrice en chef:            Diffusion:                        Comité de rédaction:
                                           Claire-Lise Genoud             Membres des sections de           Anne Baehler Bech, Christian
                                           Case postale 2104              l’ASLOCA Romande et abonnés       Dandrès, Christelle Guélat Koller,
                                           1211 Genève 1                                                    xavier Guillaume, Marie-Claire
                                                                          Graphisme:                        Jeanprêtre-Pittet, Emilie Moeschler,
                                           claire-lise.genoud@asloca.ch
                                                                          Madame Paris/Alexandra Ruiz       Marc Oran, Carlo Sommaruga,
                                                                          Correction:                       François Zutter
                                           Editeur:                       Elisabeth Gobalet                 Ont contribué à ce numéro:
                                           ASLOCA Romande                                                   Caro, Damien Chervaz, Gaston
  Paraît cinq fois par année               Case postale 2104              Impression:                       Guex, xavier Guillaume, Pellet,
  Abonnement 13 francs/an                  1211 Genève 1                  Imprimerie Saint-Paul, Fribourg   Pierre Reymond

2 — Droit au logement • Mai 2012 n° 205
Votez encore une fois non à l'épargne-logement - Asloca
le message
de l’asloca                                  par Carlo Sommaruga
                                             Secrétaire général, ASLOCA Romande

                                LIBRE CIRCULATION
                                La libre circula-       une réflexion de fond. Une journée de travail
                                tion des person-        aura lieu le 2 juin 2012 à Lucerne pour ses
                                nes a un impact         membres. A cette occasion seront discutées
                                économique for-         les diverses mesures d’accompagnement pos-
                                tement positif.         sibles en matière de contrat de bail, d’amé-
                                Toutefois, elle a       nagement du territoire ou de subventionne-
                                aussi un impact         ment du logement d’utilité publique. Lors de
                                social. Celui-ci        cette journée sera également discutée la po-
                                e st n et te me nt      sition que devra adopter l’ASLOCA, dans le
  moins favorable. Sur le marché du travail, l’im-      cadre du débat en 2013 sur la libre circulation
  pact social négatif s’exprime par le dumping          des personnes autour de l’initiative de l’UDC
  salarial, phénomène qui résulte des salaires en       et l’extension à la Croatie, si les revendications
  dessous des conditions de la branche proposés         des locataires ne devaient pas être prises en
  aux travailleurs étrangers. Lors de la prochai-       considération. notre assemblée des délégués
  ne session parlementaire, les mesures d’ac-           de novembre de cette année ratifiera au final
  compagnement destinées au marché du travail           la position politique et les diverses mesures
  seront de nouveau à l’ordre du jour avec l’in-        qui seront soumises dans le débat parlemen-
  troduction de nouveaux moyens. D’une part,            taire par nos représentants au Conseil national
  des sanctions pour les employeurs qui abusent         et au Conseil des Etats.
  et, d’autre part, la responsabilité solidaire afin
  de garantir le versement de salaires confor-          Une chose est d’ores et déjà certaine, pour
  mes par les sous-traitants.                           conserver au sein de la population une ma-
                                                        jorité favorable à la libre circulation, les
  Sur le marché du logement, la libre cir-              autorités politiques doivent prendre des
  culation a pour conséquence le renforce-              mesures protectrices du cadre social. Il
  ment de la pénurie et la cherté des loyers            est indispensable de protéger de manière ef-
  dans les pôles de développement économi-              ficace non seulement le marché du travail,
  que. Cette préoccupation, si elle a été évoquée       mais également le marché du logement, cela
  au Parlement lors du traitement de l’exten-           pour éviter que la frustration des locatai-
  sion de la libre circulation à la Roumanie et         res ne croisse encore et ne se transforme
  à la Bulgarie en 2008, n’a pas été réellement         en position de rejet de principe de la libre
  prise au sérieux par le Conseil fédéral et le         circulation.
  Parlement. néanmoins, les études qui se suc-
  cèdent sur cette question montrent que la libre
  circulation a un réel impact sur le marché du
  logement. L’ASLOCA Suisse a mis en route

                                                                              Droit au logement • Mai 2012 - n° 205 — 3
Votez encore une fois non à l'épargne-logement - Asloca
suisse
votations fédérales du 17 juin 2012

épargne-logement:
encore une fois NON!
Le 17 juin 2012, le                       d’être les pays porteurs du         pas l’instrument adéquat pour       1670 francs par mois, pen-
peuple votera pour                        succès économique de l’Eu-          promouvoir l’accession à la         dant dix ans, affectée uni-
                                          rope. Par contre, l’Allemagne,      propriété et la rejettent pour      quement au logement, inter-
la quatrième fois sur                     moteur économique envié de          ce motif.                           venant le plus souvent après
l’épargne-logement.                       l’Europe, dispose du taux de                                            la contribution au troisième
Ce sera la seconde                        propriétaires le plus bas de        Système rigide                      pilier, constitue un effort fi-
fois cette année,                         l’Union européenne à 43%. Il            L’initiative qui est soumise    nancier considérable. C’est
étant rappelé que,                        est proche de celui de la Suisse,   à votation le 17 juin impose à la   même inatteignable pour une
                                          qui est de 36%.                     Confédération et aux cantons        famille avec 100 000 francs de
le 11 mars 2012,                                                              l’obligation de la déduction        revenu annuel.
l’épargne-logement                        Un instrument inadéquat             fiscale pour l’épargne-loge-
a été rejetée à 56%.                          L es faits prouvent de          ment. Soulignons que la pré-        Seul 0,3% des contribuables
                                          manière évidente que l’épar-        cédente initiative était plus            Selon une étude comman-
        Carlo Sommaruga                   gne-logement n’est pas un ins-      souple, puisqu’elle permettait      dée par les milieux immobi-
        Secrétaire général                trument adéquat. Au cours des       à chaque canton de décider          liers sur la situation de Bâle-
        Asloca Romande                    années 1970-2000, la crois-         s’il souhaitait ou non intro-       Campagne, ce ne sont que
                                          sance du taux de propriétai-        duire un tel avantage fiscal.       0,3% des contribuables ayant
Le 17 juin 2012, le peuple                res dans le canton de Bâle-         Elle a pourtant été sèchement       un revenu brut de moins de
votera pour la quatrième fois             Campagne, connu pour être           refusée par le peuple.              50 000 francs qui recourent
sur l’épargne-logement. Cette             le seul canton avec un système          L a nouvel le i n iti ative     à l’épargne-logement. Or
répétition de votations résulte           d’épargne-logement, est infé-       prévoit que la déduction            cette tranche de revenu re-
d’une obstination idéologique             rieure au taux de croissance        fiscale est au maximum de           présente 37% des contribua-
malvenue des milieux immo-                de la propriété individuelle du     10 000 francs par année pour        bles. Le taux de contribuables
biliers. Ceux-ci persistent à                                                                                     qui recourent à l’épargne-lo-
réclamer l’épargne-logement
dans le but d’augmenter le taux
de propriétaires en Suisse, en
arguant que la promotion de
                                             “  Au cours des années 1970-2000,
                                                    la croissance du taux
                                                                                                                  gement passe à 0,8% pour
                                                                                                                  la tranche de revenu entre
                                                                                                                  50 000 francs et 60 000 francs
                                                                                                                  et atteint 2% pour la tranche
la propriété individuelle est                 de propriétaires dans le canton                                     e n t r e 14 0 0 0 0 f r a n c s e t
un facteur favorable à l’écono-                                                                                   180 000 francs. En résumé,
mie, que l’épargne-logement                   de Bâle-Campagne, connu pour                                        plus le revenu est élevé, plus il
en est le juste instrument et               être le seul canton avec un système                                   y a de participants à l’épargne-
qu’enfin la Confédération n’en                                                                                    logement.
fait pas assez. Dans les faits,             d’épargne-logement, est inférieure
les milieux immobiliers oc-                au taux de croissance de la propriété                                  Système inutile
cultent les points essentiels                                                                                         Cette étude montre aussi
derrière la batterie de leurs                  individuelle du logement dans                                      que 66% des bénéficiaires de
arguments fallacieux: l’épar-
gne-logement n’est aucune-
                                             d’autres cantons voisins, comme                                      l’épargne-logement n’écono-
                                                                                                                  misent l’argent que pendant

                                                                                                  ”
ment efficace pour promou-                    Soleure, Berne ou Fribourg                                          deux ans. 39% n’économisent
voir l’accession à la propriété                                                                                   même qu’une seule année. La
et elle est avant tout un ins-                                                                                    durée moyenne générale de
trument fiscal permettant une                                                                                     l’épargne est de 2,5 ans dans
                                                                                                                                              

optimisation fiscale aux plus             logement dans d’autres cantons      une personne seule et de            toutes les classes de revenu.
riches de la société.                     voisins, comme Soleure, Berne       20 000 francs pour un couple.       Cela prouve que ces contri-
    Tout d’abord, un taux                 ou Fribourg. Cela montre            Faut-il rappeler que cette dé-      buables disposaient déjà d’une
élevé de propriété du loge-               que l’accession à la propriété      duction fiscale vient de fait       fortune pour acquérir le lo-
ment dans un pays n’est aucu-             ne dépend pas de l’épargne-         s’ajouter à celle déjà possible     gement. Il apparaît aussi que
nement le signe de la garan-              logement, mais d’autres fac-        pour l’épargne, sans affec-         78% des bénéficiaires auraient
tie de son succès économique.             teurs comme la disponibilité        tation spéciale, du troisième       acheté, même sans l’épargne-
Ainsi, l’Espagne avec son                 des terrains ou leur prix. Le       pilier.                             logement! Le fait que l’épar-
taux de 83% de propriétai-                Conseil fédéral et les cantons          Il ne fait pas de doute         gne-logement ne puisse béné-
res, la Roumanie avec 82% et              ont toujours souligné que           qu’une part de revenu de            ficier qu’aux classes moyennes
la Grèce avec 73% sont loin               l’épargne-logement n’était          20 000 francs par année, soit       supérieures et aux plus riches

4 — Droit au logement • Mai 2012 n° 205
Votez encore une fois non à l'épargne-logement - Asloca
suisse
                                                                        votations fédérales du 17 juin 2012

a été également souligné par le    sera d’autant plus douloureux     Aucune nécessité                   mographique, et non en raison
Conseil fédéral dans son op-       pour la majorité de la popu-      de stimuler la construction        d’un manque d’offres de loge-
position à l’initiative.           lation que nous sommes ac-           Selon les milieux immobi-       ments en propriété.
                                                                                                            De plus, dans le cadre de
Importantes
pertes fiscales
    L’initiative pour l’épargne-
logement, si elle est adoptée,
                                          “  Si, malgré l’augmentation
                                      de l’offre en logements, la pénurie
                                                                                                        la production actuelle de loge-
                                                                                                        ments, la part dévolue à la pro-
                                                                                                        priété est importante. Il n’y a
                                                                                                        donc aucune raison de stimu-
aboutira à des pertes fisca-            persiste, c’est en raison de la                                 ler ce segment. En raison de
les de 70 millions de francs                                                                            l’arrivée importante de sala-
pour la Confédération et de           croissance démographique, et non                                  riés hautement qualifiés avec
250 millions de francs à la            en raison d’un manque d’offres                                   de hauts revenus depuis la
charge des cantons. Ces pertes                                                                          mise en œuvre de la libre cir-

                                                                                       ”
fiscales constituent de fait une        de logements en propriété                                       culation des personnes, c’est
subvention individuelle aux                                                                             bien plus la préservation des
plus riches pour acheter un        tuellement dans un contexte       liers, l’initiative pour l’épar-   terrains bon marché et la
logement. Leur financement         de baisse importante des ren-     gne-logement aurait le mérite      construction de logements
se fera de manière évidente        trées fiscales en raison de la    de stimuler la construction.       bon marché, répondant aux
au détriment d’autres besoins      crise économique. Soulignons      Relevons tout d’abord que la       besoins des classes populai-
prépondérants de la popula-        aussi que la Confédération, les   construction fonctionne à plein    res et moyennes, qui sont es-
tion, telles que la construc-      cantons, et la Conférence des     régime sans aucune nécessi-        sentielles et qui doivent être
tion de crèches, la rénovation     directrices et directeurs can-    té de la stimuler. Il n’a jamais   stimulées.
ou l’extension d’écoles, l’amé-    tonaux des finances, comme le     été autant construit que ces
lioration des services hospita-    PDC, les verts et le PS, s’op-    dernières années. Si, malgré
liers ou sanitaires, l’amélio-     posent ouvertement à l’initia-    l’augmentation de l’offre en               votez et faites voter
ration des transports publics,     tive, également en raison des     logements, la pénurie persis-              nOn à l’initiative sur
etc. Le financement de ce pri-     pertes fiscales produites par     te, c’est tout particulièrement            l’épargne-logement le
vilège pour les plus nantis        cet instrument inutile.           en raison de la croissance dé-     17 juin 2012.

                                                                                                    Droit au logement • Mai 2012 - n° 205 — 5
genève
votations cantonales du 17 juin 2012

non à la loi sur les
institutions publiques!
Pour que le service                       Cinq grandes régies                 portante du pouvoir entre les       les lois concoctées par l’Enten-
public reste sous                             Pour mener une politi-          mains du Conseil d’Etat et du       te. La votation populaire a eu
                                          que sociale du logement, le         magistrat en charge du dé-          lieu le 1er juin 2008.
contrôle démocratique,                    canton compte aujourd’hui           partement concerné. Il est es-           Le 15 juin 2010, deux ans
l’ASLOCA recommande                       cinq grandes régies publi-          sentiel de permettre à toutes       plus tard, le Conseil d’Etat
de voter le 17 juin                       ques: les Hôpitaux universi-        les tendances politiques du         refuse de prendre acte de la
prochain NON à la loi                     taires de Genève, l’aéroport        canton de participer à la mise      volonté des citoyens et décide
sur l’organisation des                    de Genève, les Transports           en œuvre des politiques publi-      de remettre le couvert en dé-
                                          publics genevois, l’Hospice         ques, via leurs représentants       posant un nouveau projet de
institutions publiques.                   général et les Services indus-      au sein des conseils d’admi-        loi allant dans le même sens:
                                          triels de Genève ainsi que six      nistration de ces régies.           la loi sur l’organisation des
       Christian Dandrès
                                          fondations immobilières de              En 2007, le Grand Conseil       institutions de droit public
       Avocat
                                          droit public (FIDP). Toutes         avait adopté trois lois qui déjà    (L 10679). La majorité du
       Asloca Genève

                                                                                  “
                                          ces institutions sont dirigées
Le 17 juin 2012, les Genevois             par des personnes nommées
sont appelés à se prononcer sur           par le Parlement et le gouver-              Avec cette loi, le Conseil d’Etat
une modification de la légis-             nement. Celles-ci sont issues              pourrait nommer à sa guise
lation garantissant le contrô-            de la société civile, des milieux
le démocratique des institu-              intéressés, des partis politi-            un quarteron de bureaucrates
tions de droit public. Deux               ques et des travailleurs des         à sa botte. Ceux-ci n’ayant de comptes
ans après avoir été remis en              dites entreprises.
place en votation populai-                                                         à rendre à personne, excepté au
re, le Conseil d’Etat entend à
nouveau faire main basse sur
                                          Un système vertueux
                                              Le système actuel permet
                                                                                  magistrat qui les aurait nommés,
la direction des établissements           un fonctionnement efficace              c’en serait fini de la transparence
publics.                                  et un contrôle démocratique
                                          sur le patrimoine de la col-
                                                                                    et de la démocratie au sein des

                                                                                                                                 ”
De quoi parlons-nous?                     lectivité. Les administrateurs               établissements publics
    G e nève d i sp o s e d’u n           des régies publiques repré-
service public étendu dont les            sentent les courants politiques
prestations sont servies prin-            du canton présents au Grand
cipalement par des établisse-             Conseil. Cette composition          prévoyaient de supprimer le         Grand Conseil fait allégean-
ments propriété de la collec-             est essentielle puisque ces éta-    principe de participation. La       ce et une loi est votée en no-
tivité (Etat, communes). Les              blissements et leur fortune         droite au Grand Conseil en-         vembre 2011 (voir encadré ci-
habitants du canton peuvent               ont été constitués au moyen         tendait se tailler la part du       dessous).
ainsi bénéficier à moindre                des impôts et des émoluments        lion et diriger selon sa conve-         Si cette loi ne touche pas
coût de services qui vont de la           versés par la population et les     nance le patrimoine de la col-      pour l’instant les fondations
santé à l’énergie en passant par          générations antérieures. Ce         lectivité. Le peuple a rappelé      immobilières de droit public,
l’accueil des aînés (FSASD et             système permet aussi d’éviter       à l’ordre cette majorité en re-     il est certain qu’à bref délai
EMS).                                     une concentration trop im-          jetant à de très larges majorités   ces dernières seront également
                                                                                                                  soumises à ce régime. Bientôt
                                                                                                                  seraient évacués les représen-
                                                                                                                  tants des usagers-locataires et,
   une loi anti-démocratique                                                                                      avec eux, la gestion de proxi-
                                                                                                                  mité qui fut plébiscitée par la
   La loi sur l’organisation des institutions publiques (L 10679) va plus loin encore que les trois lois refu-    population.
   sées par le peuple en 2008. Elle supprime tout pouvoir au Grand Conseil pour nommer les adminis-
   trateurs des institutions publiques et rejette le principe selon lequel les milieux intéressés et les colla-           L’ASLOCA appelle les
   borateurs participent à la définition des orientations stratégiques de ces entreprises. Avec cette loi, le             locataires de Genève
   Conseil d’Etat pourrait nommer à sa guise un quarteron de bureaucrates à sa botte. Ceux-ci n’ayant                     à refuser et à faire
   de comptes à rendre à personne, excepté au magistrat qui les aurait nommés, c’en serait fini de la             refuser la loi sur l’organisa-
   transparence et de la démocratie au sein des établissements publics.                                           tion des institutions publiques
                                                                                                                  (L 10679), à l’occasion des vo-
                                                                                                                  tations du 17 juin 2012.

6 — Droit au logement • Mai 2012 n° 205
dossier
                                                                                                  l’habitat des seniors

vieillir, c’est... aussi
redéfinir son lieu de vie
La population d’un                vironnement privé, intime          encore en pleine possession de    courses ou manger dans une
pays comme le nôtre               et social. Parce que vieil-        ses moyens physiques et psy-      trop grande solitude. On peut
                                  lir, cela signifie perdre au fil   chiques. On pourra ainsi dé-      aussi prévoir d’échanger son
vit de plus en plus               des années son autonomie de        terminer concrètement et avec     logement contre un plus petit.
longtemps. Mais la                mouvement, de déplacement,         précision le lieu où l’on va se   Il y a aussi les gens de l’im-
vieillesse implique               de discernement… Et souf-          sentir en sécurité, entouré de    meuble avec qui on peut se
aussi une dépendance              frir, parfois beaucoup. Peu y      personnes que l’on apprécie       rendre des services. La per-
croissante à l’autre, et          échappent. Un homme disait         tout en se simplifiant la vie     sonne âgée devrait pouvoir
la maison de retraite             récemment: «Il y a ce que l’on     quotidienne au maximum.           conserver le plus longtemps
                                  dit et ce que l’on vit. On ne                                        possible son autonomie tout en
n’est pas l’unique                peut pas imaginer ce que cela      y penser à temps                  organisant sa vie pour le jour
solution à envisager.             peut être physiquement dou-            Tout le monde peut organi-    où tout deviendra plus difficile
                                  loureux de vieillir. La plupart    ser sa vie en tenant compte des   pour elle.
        Claire-Lise Genoud        du temps, on n’ose même pas        années qui passent. Pourquoi          D’autant qu’avec l’augmen-
        Rédactrice en chef        en parler. On sait bien que rien   ne pas prendre contact avec       tation de la population de plus
        Droit au logement         ne peut nous soulager.»            les services sociaux de sa        de 65 ans – on parle de +30%
                                      On ne devrait pas avoir        commune et chercher en-           d’ici à 2020 – les maisons de
Où vieillir? Cette question,      peur de prendre conscience de      semble différentes solutions?     retraite ne sont probable-
chacun d’entre nous devrait       cette perspective et oser anti-    On peut aussi saisir l’occasion   ment pas l’unique solution. A
se la poser un jour afin d’évi-   ciper en se concoctant un plan     de partager son grand appar-      chacun de prendre sa vieilles-
ter de se voir imposer son en-    retraite réaliste lorsqu’on est    tement pour ne pas faire les      se en main!

                                                                                                   Droit au logement • Mai 2012 - n° 205 — 7
dossier
l’habitat des seniors

 couple séparé par l’ems «on n’a pas eu le choiX!»                                                                               toujours chez elle,
                                                                                                                                 grâce à sa famille
 «On est séparé, je vis seul dans         Elle devenait alors très jalouse et     On peut dire qu’elle a eu une                  «elle ne veut
 notre appartement à Lausanne             pouvait être agressive avec moi.        vraie vie d’aventure. Elle orga-               pas entendre
 depuis deux ans.» André, 86              Durant plus d’un an, je n’ai rien       nisait aussi des soirées concerts.             parler de l’ems»
 ans, n’a pas eu d’autre choix. Sa        dit à personne. Et puis, un jour,       Tout cela, c’était avant que la
 femme, Laurette, 95 ans, est at-         elle m’a lancé une potiche à la         pub n’envahisse les écrans de
 teinte de la maladie d’Alzheimer,        tête. Un autre, elle s’est ouvert       télévision. De mon côté, j’ai                  Ida a fêté ses 100 ans en dé-
 affection neurodégénérative in-          la tête parce que je l’ai poussée       aussi voyagé, je travaillais pour              cembre 2010. Mais il n’est
 curable. Elle se porte encore bien       pour passer et qu’elle est tombée       les Minoteries, je vendais de la               toujours pas question pour
 physiquement, mais dans sa tête,         entre le lit et l’armoire. J’ai alors   farine aux boulangers.»                        elle de quitter son appar-
 c’est plus difficile. Lors d’un séjour   compris qu’il fallait que j’en parle    Depuis qu’elle vit à l’EMS, l’état de          tement au centre-ville de
 à l’hôpital, la décision a été prise     à son médecin. Il a tout de suite       Laurette s’est stabilisé, mais «elle           Sierre (Valais). Heureusement,
 de la faire admettre dans un EMS         pris des mesures, d’autant qu’il        me fait encore parfois des crises.             Eliane, sa fille, vit sur le même
 médicalisé. «Ce n’est pas moi qui        savait qu’elle était atteinte de la     Elle n’en fait jamais au person-               palier. «Je dois lui donner trois

   “
                                                                                  nel, seulement à moi. Pourtant je              fois par jour deux gouttes
                                                                                  viens tous les jours.» André passe
      Mon épouse est beaucoup mieux                                               en effet prendre le thé avec son
                                                                                                                                 d’un médicament qui fluidifie
                                                                                                                                 le sang dans le cerveau, cela
 ici qu’à la maison. Je ne pourrais plus                                          épouse tous les jours entre 16 h               me donne l’occasion de voir
                                                                                  et 18 h. «Quand le repas du soir               comment elle va et depuis peu

                                                                         ”
 faire tout ce qu’on fait pour elle ici                                           arrive, c’est le moment où moi je              elle mange à midi chez moi»,
                                                                                  m’en vais. Le matin, je n’arrive               explique cette dernière. Il y a
 ai pris la décision et pas elle non      maladie d’Alzheimer et que sa           pas à venir. Il faut que je m’oc-              aussi des infirmières du Centre
 plus, poursuit André, ce sont trois      santé pouvait se modifier. Mais,        cupe de mon ménage. Mais                       médico-social qui viennent lui
 personnes qui la suivaient au            vous savez, ma femme a eu une           depuis quelque temps je me sens                faire sa toilette deux matins
 niveau de sa santé. Il y a eu l’in-      vie de château. Elle est ce que         fatigué. Mon médecin dit que                   par semaine et une dame qui
 firmière qui nous visitait réguliè-      l’on appelait à l’époque propa-         je devrais essayer d’espacer un                lui tient compagnie le mardi
 rement, son médecin personnel            gandiste et démonstratrice. Elle        peu mes visites. Pour le moment,               et le jeudi. «Cela me permet
 et un médecin du CHUV, spécia-           a même conduit une voiture pu-          je n’y arrive pas. J’ai pris l’ha-             de faire de petites escapades
 lisé en gériatrie.»                      blicitaire avec des haut-parleurs.      bitude. C’était une bonne solu-                sans me faire trop de souci
      La vie était devenue diffici-       Elle faisait aussi des confé-           tion tout de même. Je peux dire                pour elle», poursuit sa fille.
 le pour le couple. André se sou-         rences et a obtenu un brevet            que je revis un peu. Je me sens
 vient: «Dans sa tête, elle voyait        pour projeter des films, des            plus tranquille. Elle est mieux ici            bien entourée
 des gens qui venaient nous               16 millimètres sonores. Elle voya-      qu’à la maison. Moi, je ne pour-                  La centenaire peut aussi
 trouver pour moi, pas pour elle,         geait dans toute la Suisse et sé-       rais plus faire tout ce qu’on fait             compter sur d’autres membres
 et qui venaient durant la nuit.          journait dans les meilleurs hôtels.     pour elle ici.»                                de sa famille, comme deux
                                                                                                                                 de ses petites-filles qui habi-
                                                                                                                      CLG

                                                                                                                                 tent la région et se relayent
                                                                                                                                 chaque mercredi après-midi
                                                                                                                      PHOTOS :

                                                                                                                                 pour prendre le thé chez elle.
                                                                                                                                 Son beau-fils lui rend égale-
                                                                                                                                 ment visite tous les lundis.
                                                                                                                                    Quant à ses fils qui vivent en
                                                                                                                                 dehors du Valais, ils passent
                                                                                                                                 régulièrement les fins de
                                                                                                                                 semaine chez elle avec leurs
                                                                                                                                 femmes. Ils en profitent pour
                                                                                                                                 l’emmener chez le médecin
                                                                                                                                 le vendredi après-midi ou lui
                                                                                                                                 faire certaines courses. Il faut
                                                                                                                                 dire que Ida vieillit tout de
                                                                                                                                 même chaque jour un peu
                                                                                                                                 plus et qu’elle n’ose plus des-
                                                                                                                                 cendre toute seule les esca-
                                                                                                                                 liers depuis que son médecin
                                                                                                                                 lui a fait prendre conscien-
                                                                                                                                 ce qu’elle pourrait facilement
                                                                                                                                 tomber en perdant l’équili-
                                                                                                                                 bre. Cela réduit considéra-
                                                                                                                                 blement son rayon d’action et
                                                                                                                                 la confine entre son apparte-
                                                                                                                                 ment et celui de sa fille.
 André, 86 ans, passe tous les après-midi à l’EMS où séjourne son épouse, Laurette, 95 ans.                                                        (suite page 9)

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dossier
                                                                                                                l’habitat des seniors

colocation entre sŒurs «nous sommes devenues veuves à trois mois d’intervalle»

Les deux sœurs, Marie-Antoinette, 87 ans et Edith, 78 ans, habitent désormais sous le même toit.

«Tout s’est passé tellement            lors d’une visite médicale que         les environs pour continuer            entendue. «La décision s’est
vite, je dois dire que je n’ai pas     Henri est atteint d’un cancer.         à vivre dans cette région où           imposée à moi, se souvient-
vraiment l’impression d’avoir          Il décède au mois d’août.              elle s’est très bien intégrée et       elle. D’autant que ma sœur
décidé de venir m’installer            Edith se retrouve avec une             où elle se sait entourée d’amis        souffre de problèmes de
à Lausanne chez ma sœur                grande maison située dans              de longue date. A quelques             mémoire. Ma présence chez
Marie-Antoinette.» Edith, 78           un endroit magnifique mais             jours d’intervalle, elle trouve        elle au quotidien lui permet
ans, vivait dans le vaucluse           assez sauvage et difficilement         d’ailleurs un acheteur et une          de conserver des repères
(France) depuis qu’Henri,              accessible durant l’hiver.             petite maison à louer dans un          dans le temps. C’est vraiment
son mari, avait atteint l’âge              C’est en se réveillant             village à proximité. Mais ses          idéal. Le plus dur a été de
de la retraite. Il y a ainsi plus      un matin qu’elle comprend              projets prennent une autre             quitter la région du vaucluse.
de trente ans qu’ils avaient           qu’elle va devoir vendre               direction lorsqu’elle apprend          Mais nous y sommes déjà re-
décidé de quitter Genève.              cette maison beaucoup trop             à la fin de novembre le décès          tournées ensemble plusieurs
Tout se passe à merveille              grande pour elle toute seule.          d’Alfred, le mari de sa sœur           fois, et cela me permet ainsi
jusqu’au printemps de l’an             Elle se met alors en quête             Marie-Antoinette, avec qui             de rester en contact avec mes
passé. Le couple apprend               d’un autre logement dans               elle s’est toujours très bien          amis de là-bas.»

(suite) Lorsqu’elle est seule, elle a tendance      ne plus très bien savoir où elle se trouve, ni
                                                                                                                                                         DR

à somnoler et perd même parfois l’envie de          trop comment elle s’appelle. Elle est alors per-
regarder Roger Federer à la télé, c’est dire!       suadée que quelqu’un vient lui prendre une
Elle n’a cependant pas raté l’élection françai-     robe dans son armoire ou lui a apporté de
se du 6 mai dernier et lâche avec un grand          l’argenterie dans son salon. Dans ces mo-
sourire: «Je ne sais pas comment ça s’est fait,     ments-là, seule la perspective d’appeler son
mais tout à coup il était minuit et j’étais tou-    médecin – qui se déplace à domicile – réussit
jours devant la télé!» Elle s’inquiète d’ailleurs   à l’apaiser et à lui faire reprendre pied dans
beaucoup pour Carla... Mais ça, c’est une           la réalité. Ce sont bien sûr les effets classiques
autre histoire. Ce qu’elle ne manque cepen-         dus à son grand âge, mais l’organisation fa-
dant sous aucun prétexte, c’est «d’écouter»,        miliale mise en place petit à petit permet
comme elle dit, la messe à télévision. Tout         néanmoins à cette centenaire de continuer à
cela ne permet pas d’éviter qu’il lui arrive de     vivre dans son propre appartement.                   Ida, 101 ans, et l’une de ses petites-filles.

                                                                                                                  Droit au logement • Mai 2012 - n° 205 — 9
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l’habitat des seniors

                                                                                                                                                 CMS-SIERRE
A Sierre, les appartements «domino» ont été créés en 1998 déjà pour pallier l’isolement social de certaines personnes âgées.

«il est souvent plus
facile de vieillir en ville»
Vieillir en ville ou vieillir à la campagne. Selon                          fiter au maximum du temps          jours plus lourde à gérer.
Filip Uffer, directeur de Pro Senectute Vaud, la                            mis à notre disposition. Tout
tendance serait plutôt à la ville parce que cette                           devient plus délicat lorsqu’on     Que peut-on faire pour
                                                                            met le pied dans le quatrième      éviter l’isolement?
dernière est souvent mieux desservie par les                                âge. Ce n’est alors plus une       Il importe de s’assurer de dis-
soins et les repas à domicile. Les colocations                              question d’âge – parce qu’il y a   poser à sa vieillesse d’un lo-
seniors ont, elles aussi, le vent en poupe.                                 des personnes qui font encore      gement où l’on se sente bien
                                                                            du ski à 86 ans – mais une         entouré socialement et qu’il
Entrer en maison de retraite           «Nous louons ces appartements        question de condition phy-         soit bien situé, proche des
n’est pas toujours la solution.        à des propriétaires privés puis      sique ou psychique. On peut        commerces, sans obstacles ar-
Pour permettre aux personnes           les sous-louons à des personnes      dire que, dès qu’un problème       chitecturaux et accessible faci-
âgées de rester le plus long-          âgées qui deviennent nos loca-       commence à se manifester de        lement pour des soins à domi-
temps possible à la maison,            taires. Si nous avons eu l’idée      manière à sérieusement han-        cile quotidiens. Si le logement
les spécialistes du troisième          de créer ce genre de cohabita-       dicaper la personne, que, par      apporte tous ces avantages, on
âge ont cherché d’autres alter-        tion c’est avant tout pour pallier   exemple, les escaliers devien-     sait qu’on va pouvoir prolon-
natives. Celle qui a le vent en        la solitude et l’isolement social    nent un véritable obstacle, on     ger considérablement le main-
poupe depuis quelques années           de certaines personnes âgées.»       commence à devoir trouver          tien de la personne âgée à son
est la colocation entre seniors.       Depuis, la plupart des cantons       des solutions de vie au quoti-     domicile.
  que cela s’appelle des ap-           ont mis sur pied des concepts        dien. Et c’est à ce moment-là
partements communautaires,             similaires et plusieurs projets      que la question du logement        Cela voudrait-il dire que l’on
des appartements protégés ou           sont en cours. Interview de          devient primordiale.               vieillit mieux en ville qu’à la
adaptés ou encore «domino»             Filip Uffer, directeur de Pro                                           campagne?
pour «DOMIcile Nouvelle                Senectute vaud.                      Pour quelles raisons?              Si le village où l’on vit possède
Option» comme à Sierre, tous                                                On considère principalement        cet environnement social, rien
sont basés sur une cohabitation        Considérez-vous que le loge-         deux sortes d’environnement,       n’empêche de vivre à la cam-
entre personnes de la même             ment est une problématique           l’un est construit, l’autre est    pagne. Mais il est vrai que
génération. Chaque «locataire»         pour les personnes âgées?            social. quand on est jeune,        l’on constate chez les person-
possède un espace privé et bé-         Filip Uffer. Lorsqu’on prend         on va chercher à l’extérieur de    nes à la retraite une tendance
néficie des espaces communs.           sa retraite, on entre dans le        chez soi les contacts sociaux      à revenir vivre en ville.
Le premier appartement de              troisième âge, mais cela ne si-      dont on a besoin, mais, avec le                      Propos recueillis
ce genre a été ouvert à Sierre         gnifie pas pour autant que l’on      temps, l’espace que l’on gère                 par Claire-Lise Genoud
en juin 1998. Isabelle Pralong         ne soit pas en pleine forme          sans difficulté se restreint.
voide, directrice adjointe du          physique. On a souvent à ce          Apparaissent alors des problè-     Plus d’infos: s’adresser aux services
Centre médico-social de la             moment-là envie de croquer la        mes dus à l’isolement et l’im-     sociaux de votre commune ou au
région de Sierre, explique:            vie à pleines dents et de pro-       mobilité «obligée» devient tou-    centre médico-social (CMS).

10 — Droit au logement • Mai 2012 n° 205
fribourg
                                                                                  changements au comité cantonal

pierre mauron à la tÊte
de l’asloca fribourg
Elu au Conseil fédéral              certain temps d’adaptation.
le 14 décembre                      non, car il a vraiment mis
                                    cette grande association sur
2011, Alain Berset                  des rails solides, avec de vraies
a été remplacé à                    structures qui fonctionnent
la présidence de                    bien et le potentiel d’augmen-
l’ASLOCA Fribourg                   tation des membres est réel.
par Pierre Mauron.
                                    Que comptez-vous faire à
       xavier Guillaume             moyen terme?
       Secrétaire général           Dans un premier temps, il
       Asloca Fribourg              s’agira de s’engager contre
                                    l’initiative populaire «Accéder
Pour assumer la présidence de       à la propriété grâce à l’épar-
l’ASLOCA Fribourg, l’assem-         gne-logement», qui sera votée
blée générale du 4 avril 2012       en juin prochain. La pre-
a élu Pierre Mauron, 40 ans,        mière mouture a été com-
avocat à Bulle. Président de        battue avec succès et j’espè-
la section ASLOCA Fribourg          re qu’il en sera de même pour
Sud (Gruyère-Glâne-veveyse-         ce nouveau projet, encore plus
Broye) depuis une dizaine           contraignant.
d’années, il a été aussi membre        Ensuite, avec le soutien
du comité de l’association can-     du comité, j’espère que nous
tonale et fait partie du collec-    pourrons entamer une grande
tif d’avocats spécialisés dans la   campagne d’information pour
défense des locataires créé en      que, d’une part les locataires
2003.                               soient toujours mieux informés
   L’assemblée générale a éga-      de leurs droits et que, d’autre
lement élu Matthieu Loup à          part, nous puissions augmen-
la vice-présidence. Etudiant        ter le nombre de membres, ce
en droit, 21 ans, il est aussi      qui nous permettra de mettre
conseiller général à Marly          davantage de moyens à dispo-
et fait partie de ces jeunes        sition des locataires.
membres de l’ASLOCA prêts              Finalement, il faut toujours
à partager leur enthousiasme        garder un œil attentif sur le
et à mettre leur énergie à dis-     prix des loyers, lié au taux
position du comité cantonal.        hypothécaire de référence. A
Enfin, pour assumer les fonc-       mon avis, celui-ci ne tardera
tions de secrétaire général et      pas à augmenter et il faudra que
de trésorier, l’assemblée géné-     nous soyons prêts à combattre
rale a réélu xavier Guillaume,      toutes ces hausses de loyer, si
qui épaulera ainsi les person-      celles-ci sont injustifiées.
                                                                        DR

nes nouvellement élues pour
gérer cette association, désor-     A votre avis, peut-on dire               Longtemps responsable de l’ASLOCA Fribourg Sud,
                                                                             Pierre Mauron a été élu président de l’ASLOCA Fribourg.
mais forte de 5400 membres.         qu’il y a pénurie de loge-
                                    ments dans le canton de                  ménages, contre un quart il y       rendements excessifs de leurs
N’est-ce pas trop difficile         Fribourg et quelles en sont              a une décennie. Avec les sa-        immeubles. Cela n’est pas ad-
de succéder à un conseiller         les conséquences?                        laires moyens qui n’augmen-         missible, surtout lorsqu’on
fédéral?                            Oui, à ma connaissance on                tent pas, et le renchérissement     profite des personnes âgées ou
Pierre Mauron. Oui et non.          peut parler de pénurie de loge-          qui reste stable, il n’y a aucune   d’autres catégories de locatai-
Oui, car les qualités d’Alain       ments depuis 2003. Cela crée             raison pour que les prix des        res qui n’ont pas toujours les
Berset sont unanimement re-         une pression sur les loyers,             loyers augmentent unique-           moyens de se défendre. Mais
connues et qu’un tel change-        qui représentent désormais               ment parce que les bailleurs        l’ASLOCA est là pour veiller
ment nécessite toujours un          jusqu’à un tiers du budget des           se sont habitués à obtenir des      au grain.

                                                                                                            Droit au logement • Mai 2012 - n° 205 — 11
Genève
les coopératives d’habitation

Quand le locataire est
acteur de son habitat
Solution de logement                   d’une épargne-logement qui         Acteur de son habitat                de logement sont dictées par
alternatif, les                        ne bénéficierait qu’aux plus           Techniquement, la société        des bailleurs poussés par une
                                       fortunés, le vote des locataires   coopérative est celle que            pure logique de profit écono-
coopératives                           genevois doit être interprété      forment des personnes (au            mique, les coopératives per-
permettent au                          comme un appel au change-          minimum sept) et qui pour-           mettent à leurs membres de
coopérateur de cumuler                 ment de leur condition, comme      suit principalement le but de        s’approprier leur lieu de vie
les avantages des                      la traduction d’une volonté de     favoriser ou de garantir, par        et de fixer eux-mêmes les
statuts de locataires                  devenir acteur de son loge-        une action commune, des in-          règles du jeu sans craindre des
                                       ment plutôt que de rester tri-     térêts économiques détermi-          représailles.
et de propriétaires                    butaire du bon vouloir de son      nés de ses membres (art. 828             Au-delà des avantages pra-
sans en subir les                      bailleur.                          al.1 du CO).                         tiques, le fonctionnement des
inconvénients.                                                                On en devient membre par         coopératives d’habitation tel
       Damien Chervaz
                                       Une alternative                    l’acquisition d’une part sociale     qu’il vient d’être décrit encou-
       Avocat
                                       aux abus des bailleurs             (remboursable en cas de sortie       rage les gens à vivre ensemble
       Asloca Genève
                                           A l’heure où, en raison de     de la coopérative), laquel-          et leur permet de développer
                                       son coût, la propriété demeure     le procure au coopérateur un         un projet autour de valeurs
Comme souligné dans le                 inaccessible pour le plus grand    véritable droit de regard et de      communes (écologiques, so-
dernier numéro du Droit au lo-         nombre, la réponse à cette as-     décision. En matière de loge-        ciales, culturelles, etc.). Ces
gement (DAL 204, avril 2012,           piration semble passer né-         ment, ce droit permet à son          perspectives dépassent la pro-
p. 4), le oui «paradoxal» des          cessairement par le déve-          titulaire de participer active-      blématique du logement au
Genevois à l’initiative pour           loppement de coopératives          ment à l’élaboration et à l’évolu-   sens strict pour s’inscrire dans
l’épargne-logement a indénia-          d’habitation sans but lucra-       tion de son cadre de vie. Sur la     celle, tout aussi essentielle, de
blement constitué la grande            tif. Sorte de «voie du milieu»,    base du principe démocratique        la qualité de l’habitat.
surprise de ce scrutin.                ces coopératives permettent        selon lequel chaque membre a
    Dans un canton où, plus            au coopérateur de cumuler les      droit à une voix, le coopéra-        Des loyers bas liés aux
encore qu’ailleurs en Suisse           avantages des statuts de loca-     teur peut émettre des propo-         coûts réels de l’immeuble
romande, le prix exorbitant            taires et de propriétaires tout    sitions, faire valoir son point          La coopérative d’habita-
de l’immobilier rend l’accès à         en éliminant une bonne partie      de vue, et voter sur des ques-       tion est un organisme sans but
la propriété illusoire pour une        de leurs inconvénients.            tions allant de la construction      lucratif, qui ne cherche donc
très large majorité de la po-                                                                                  pas à réaliser des profits. Ses

                                                  “
pulation, y compris parmi les                                                                                  loyers sont fixés de manière
classes aisées, ce résultat reste                      Dans une coopérative,                                   à couvrir les charges et l’en-
énigmatique, sauf à le considé-                                                                                tretien de l’immeuble uni-
rer comme un vote de «ras-le-                         les loyers sont fixés                                    quement. Ils demeurent ainsi
bol» face à un statut de locatai-                   de manière à couvrir les                                   plus bas que ceux des loge-
re de plus en plus intenable.                                                                                  ments du secteur locatif libre.
    E n ef fet, G enève e st                       charges et l’entretien de                                   Ils sont également beaucoup

                                                                                           ”
peuplée à 80% de locataires
subissant en première ligne et
                                                 l’immeuble uniquement                                         plus stables dans la mesure où,
                                                                                                               s’agissant de loyers fondés sur
de plein fouet les conséquen-                                                                                  les coûts, ils ne sauraient être
ces de la pénurie de logements                                                                                 augmentés pour un motif tel
qui sévit à travers le canton.             Les coopératives consti-       (choix de matériaux écologi-         que le fameux «ajustement aux
Malgré le travail de l’ASLOCA,         tuent un excellent outil de po-    ques par exemple) en passant         loyers du quartier».
loyers abusifs, conditions de          litique du logement au sens        par ses éventuelles rénova-              D e même, le proce s-
location inacceptables, ap-            large, permettant de créer des     tions et son exploitation. Tout      sus participatif décrit ci-des-
partements insalubres, baux à          dynamiques de quartier et          aussi important, la qualité de       sus permet aux coopérateurs
durée déterminée, etc. restent         de promouvoir un habitat de        coopérateur assure en général        d’exercer un certain contrôle
le lot quotidien de nom-               qualité.                           – et à condition de se compor-       sur les coûts à tous les stades
breux locataires, qui décident                                            ter normalement et de respec-        de vie de la coopérative, de sa
souvent de courber l’échine            Ce qu’il faut savoir               ter les règles fondamentales de      conception à sa rénovation en
face aux bailleurs, plus que           Sans prétendre à l’exhaustivi-     la coopérative – un bail à vie à     passant par son entretien et
jamais en position de force.           té, il semble utile de rappeler    son détenteur.                       ses travaux à plus-value. Cette
    Dans ce contexte, plus             quelques qualités propres aux          Ainsi, et contrairement au       possibilité protège notamment
qu’un plébiscite en faveur             coopératives d’habitation.         marché libre où les conditions       les membres de la coopérative

12 — Droit au logement • Mai 2012 n° 205
Genève
                                                                                  Les coopératives d’habitation

contre des hausses de loyer ré-    1227 francs, contre 909 francs    surément. Le problème est          lation plus ou moins directe
sultant de «rénovations luxueu-    dans les coopératives.            d’autant plus absurde qu’en        avec la taille ou le nombre
ses» décidées unilatéralement                                        parallèle d’autres familles        de pièces de chaque appar-
par le propriétaire et imposées    Diminuer la sous-                 qui s’agrandissent rêveraient      tement. Le coopérateur qui
au locataire contre son gré et     occupation                        d’échanger leur deux-pièces        échange son logement pour un
ses intérêts.                         A Genève, la pénurie de        contre un appartement plus         autre moins grand bénéficiera
                                   logements est accentuée par le    spacieux, ce que le marché         donc logiquement d’une ré-
Un impact sur le niveau            nombre d’appartements sous-       libre du logement rend prati-      duction de loyer plus ou moins
général des loyers                 occupés (suite, par exemple,      quement impossible.                proportionnelle.
    Au niveau macro-écono-         à un changement dans la               En facilitant, voire en exi-
mique, le système de fonction-     structure du ménage, tel que      geant dans certains cas, les       Promotion indispensable
nement des coopératives a un       divorce, départ des enfants),     échanges d’appartements                A elles seules les quelques
impact indéniable sur l’évolu-     mais que les locataires conser-   entre leurs membres en cas         qualités qui viennent d’être
tion générale des loyers. Selon    vent parce qu’ils ne trouvent     de sous-occupation, les coo-       citées démontrent la néces-
une étude de 2011, la hausse       pas d’appartement plus petit      pératives d’habitation per-        sité de promouvoir et de dé-
des loyers est moindre dans        ou que, même s’ils en trouvent    mettent de lutter efficacement     velopper le logement coopé-

                                            “
les villes suisses où les coopé-                                                                        ratif dans l’arc lémanique, où
ratives d’habitation sont bien
implantées. Ainsi, entre 1970
                                              La hausse des loyers est                                  il ne représente pour l’heure
                                                                                                        que 4,8% du parc immobilier
et 2010, les loyers ont aug-            moindre dans les villes suisses                                 total.
menté de 408% à Zurich et de
353% à Berne où les coopé-
                                        où les coopératives d’habitation                                    C’est d’autant plus le cas
                                                                                                        que, en donnant aux habi-

                                                                                   ”
ratives sont bien implantées,               sont bien implantées                                        tants la possibilité unique de
alors qu’ils ont bondi de 455%                                                                          devenir partie prenante au
sur l’arc lémanique, où elles                                                                           processus de création de leur
sont peu présentes. Toujours       un, le loyer demandé est beau-    contre cette problématique.        habitat, les coopératives d’ha-
à Zurich, où les coopératives      coup plus élevé que le leur, le   C’est d’autant plus le cas que,    bitation permettent forcément
représentent plus de 20% du        bailleur profitant en général     comme indiqué précédem-            de créer des logements répon-
parc immobilier de la ville, le    de chaque changement de lo-       ment, les loyers sont fixés afin   dant aux besoins prépondé-
loyer moyen de l’ensemble du       cataire pour «optimiser son       de couvrir les coûts et se trou-   rants de la population… et à
parc locatif en 2000 était de      rendement», souvent déme-         vent donc a fortiori en corré-     ses envies.

                                                                                                   Droit au logement • Mai 2012 - n° 205 — 13
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