100 objets du British Museum - Une histoire du monde en - Musée de Valenciennes
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
Une histoire du monde en 100 objets du British Museum Dossier pédagogique Madée Carbonnelle Julien Dochez 1
Sommaire Introduction ................................................................................................. 3 Fiches Objets .............................................................................................. 4 Sarcophage de Nesperennub ............................................. 5 Dessin d’un bison à l’ère glaciaire ................................. 8 La dame de Karpathos .......................................................... 10 Lyre de la Reine ......................................................................... 12 Tablette du Déluge .................................................................... 14 Masque Olmèque ........................................................................ 16 Statue de Ramsès II ................................................................. 18 Relief Assyrien ............................................................................... 29 Ouchebti de Taharqa ............................................................... 22 Monnaie à l’effigie d’Alexandre ......................................... 24 Buste d’Auguste et buste de Sophocle ....................... 26 Statue de Mithra ......................................................................... 30 Main arabe en bronze ............................................................. 32 Bouddha assis de Gandhara .............................................. 34 Cristal de Lothaire ..................................................................... 36 Pot en forme de guerrier Moche .................................. 38 Sculpture d’un esprit aztèque ............................................ 40 Pièces du jeu d’échecs de Lewis .................................... 42 Plat chinois bleu et blanc .................................................... 44 Le Rhinocéros d’Albrecht Dürer ......................................... 46 Christ ................................................................................................... 48 Camée double face ................................................................... 50 Plaque du bénin : l’Oba avec des Européens ........ 52 Cinquante Manillas ................................................................ 54 Robe d’enfant sioux .................................................................. 56 Hokusai Manga ....................................................................... 58 Contrefaçon d’un maillot de football ............................ 60 La question de l’objet .......................................................................... 62 Le corps au centre de la relation sujet/objet...................... 66 2
L’ exposition présentée au Musée des de production pendant plus de 1000 ans Beaux-Arts de Valenciennes est une avec une croissance exponentielle à partir invitation à voyager dans le temps de la révolution industrielle qui débuta en et dans l’espace, à se projeter sur toute Europe et aux États-Unis au XIXème siècle. la surface de la Terre à la rencontre des La création d’objets de consommation se objets considérés comme des marqueurs de généralise au cours du XXème siècle, le civilisations. modernisme le porte aux nues et notre dépendance savamment et stratégiquement Elle raconte ainsi une histoire du orchestrée par le marketing et la publicité fait monde à travers 100 pièces issues des entrer l’objet et son propriétaire dans l’ère collections du British Museum selon un postmoderne de la mondialisation actuelle. parcours chronologique déterminé dans les salles du musée. La sélection des objets s’est L’intérêt de cette exposition, dont portée sur l’incarnation d’un discours pour l’objectif est de favoriser une mise à chacun d’entre eux selon une problématique proximité d’objets aussi divers, est de du décentrement qui est de voir l’autre à mettre en parallèle à la fois les différences travers ce qu’il a de commun avec nous. et les points communs entre des cultures géographiquement éloignées, et /ou reliées En interrogeant ces objets, on se rend dans l’échelle du temps, sans occulter la compte des liens qu’ils entretiennent avec résonance de notre propre rapport à l’objet les hommes et leur mode de pensée : liens dans nos sociétés occidentales postmodernes. affectifs, spirituels, ludiques ou domestiques. Ils témoignent des migrations, des échanges Car les objets font réfléchir, interrogent, et des liens qui ont contribué à façonner enchantent ou amusent. notre présent. Dans les sociétés premières, nomades Les collections du British Museum ou tribales, l’objet sert de vecteur pour s’étalent sur plus de 2 millions d’années. Le raconter des histoires et illustrer des mythes visiteur de l’exposition remontra lentement là où l’écrit n’existe pas encore. Ces mêmes le temps selon un parcours découpé en dix objets nous permettent aujourd’hui d’étudier sections pour découvrir toutes les richesses les pratiques de ces peuples à leur égard. de l’humanité et son évolution jusqu’à nos La sédentarité, la création des jours. grandes Cités et des États ont favorisé l’invention de l’écriture qui tisse des liens pragmatiques ou spirituels avec les objets. Les progrès scientifiques et techniques ont ensuite contribué à l’émergence de nouveaux matériaux, de nouveaux modes 3
SARCOPHAGE DE NESPERENNUB Bois peint Vers 800 av. J.-C. Louxor, Égypte Dépourvus d’explications scientifiques sur l’organisation de l’univers et de la vie, les prêtres inventèrent une cosmogonie peuplée des formes environnementales. La nature de l’art égyptien fut ensuite d’élaborer un système iconographique cohérent, capable d’expliquer les réalités de manière ordonnée et compréhensible en s’appuyant sur les textes qui les nourrissaient. Cette créativité est liée au dieu Ptah de Memphis, le créateur représenté par un artisan à tête de bélier confectionnant l’humanité sur son tour de potier. Le grand prêtre de Ptah a été appelé « le plus grand des artisans ; il a souvent été responsable de la conception et de l’exécution des œuvres d’art durant l’Ancien et le Moyen Empire. L’artiste-artisan égyptien reproduisait inlassablement un système de représentation, érigé dès les premières dynasties, auquel il était obligé d’obéir au risque de mettre en péril ce fragile équilibre du monde et de causer des désordres catastrophiques. L’image tournait essentiellement autour de la figure humaine, et entretenait des liens étroits avec les signes hiéroglyphiques sans lesquels elle ne signifie rien. Les textes fixent les dogmes, décrivent les manières d’accomplir les rituels. L’art égyptien traduit cette quête de permanence associée au besoin d’éternité de l’homme. Les Égyptiens étaient persuadés que la mort n’était qu’un passage obligé vers la vie éternelle. L’art demeurait de ce fait entièrement tourné vers cette pensée supérieure, celle de sa survie dans l’au-delà. Un système d’écriture et de représentations fut élaboré pour s’assurer la vie éternelle. De fait, tout objet, toute représentation d’un être participait de lui-même, d’où le pouvoir des amulettes placées sur la momie qui protégeaient le mort. L’image est donc toujours une vie en puissance. La palette des couleurs est limitée chez les Égyptiens : les pigments sont naturels. L’ocre rouge est la couleur de Seth, associée au sang et à la vitalité, au pouvoir et à la 5
force. Ici, le bois a été teinté en rouge, partie des classes dominantes de la société probablement dans le but de souligner le égyptienne. lien étroit du défunt avec le dieu du soleil. Les prêtres n’ont pas cependant Les couleurs de la peau relevaient aussi la vocation à prêcher ni à répondre à de conventions iconographiques : le brun- une angoisse spirituelle des fidèles. Ce rouge était utilisé pour la représentation des sont les serviteurs des dieux qui résident hommes. physiquement dans les statues. Ils assurent la survie matérielle des dieux, en administrant La troisième période intermédiaire les biens des temples mais assurent aussi Le Nouvel Empire, (XVIème-Xème siècles avant la sécurité de la statue. La fonction des J.-C.) qui a connu son apogée sous la prêtres est essentielle car en entretenant les XIXème dynastie, celle des Ramsès et de édifices religieux, ils assurent l’harmonie du leurs réalisations grandioses, s’achève dans monde, l’ordre universel et le maintien d’une l’anarchie au cours du XIème siècle avant notre création ordonnée. Les prêtres agissent par ère. L’Égypte, royaume si brillant, véritable délégation royale. Ils sont nommés par le « don du Nil » selon la célèbre expression Pharaon afin d’exécuter les rites sacrés et de l’historien grec Hérodote, sombre dans les cérémonies religieuses. une période de troubles qui s’achève avec Le clergé égyptien est très hiérarchisé. l’avènement de la XXIIème dynastie d’origine Au sommet se trouvent les grands prêtres des libyenne et du Pharaon Seshonq. Il rétablit temples, dont le plus important d’Égypte est son autorité sur la Basse-Égypte, c’est-à-dire celui du dieu Amon à Karnak. Nesperennub la région du Delta du Nil, et sur la moyenne est ainsi est des personnages majeurs Égypte. de l’Égypte de la XXIIème dynastie et son La Haute-Égypte échappe alors au riche sarcophage témoigne de sa position pouvoir de Pharaon pour être administrée privilégiée auprès du Pharaon. Le prêtre de façon de plus en plus autonome par les égyptien doit également respecter des règles grands prêtres d’Amon. Les Libyens apportent très strictes de vie. D’après l’historien grec avec eux leurs coutumes et mœurs politiques Hérodote, il doit procéder à des ablutions en s’appuyant davantage sur un système régulières tous les jours y compris la nuit. féodal qui promeut les grands aristocrates Il doit être entièrement rasé et tondu et et propriétaires terriens. La dynastie libyenne s’abstenir de toute relation sexuelle durant sera ainsi confrontée au cours du VIIIème les prières et les services religieux. Il est siècle à un véritable délitement du pouvoir vêtu d’une étoffe de lin et de sandales de central et à une montée de plusieurs palmier et ne doit pas manger de viande, entités territoriales qui fragmentent le grand de poisson, d’ail, de fèves, d’huile d’olive et royaume d’Égypte et le font retomber dans ne doit pas boire de vin. Il est un véritable l’anarchie. L’unité ne reviendra véritablement intermédiaire entre le monde des dieux et qu’en 660 avant Jésus Christ, à l’avènement celui des hommes. du Pharaon Psammétique Ier et la XXVIème dynastie. Les rites funéraires Les sarcophages font l’objet d’un travail Le clergé égyptien artisanal très attentif et sont souvent Si les Libyens gouvernent pour la première extrêmement bien décorés puisqu’ils fois l’Égypte et apportent avec eux une recueillent le corps du défunt momifié. Ce certaine originalité politique, ils maintiennent processus de préservation du corps qui a largement le vieux cadre administratif et tant fasciné dès l’Antiquité, nous est connu religieux en se fondant totalement dans la grâce à l’historien grec Hérodote qui s’est culture égyptienne qui demeure brillante. Les rendu en Égypte dès le Vème siècle avant J.-C. Pharaons libyens imitent leurs prédécesseurs « Quand on leur apporte un mort, en nommant un tjaty, que l’on peut traduire ils montrent à leurs clients des maquettes par « vizir », sorte de premier ministre de cadavres, en bois, peintes avec une aux pouvoirs très élargis, chef de toute exactitude minutieuse. Le modèle le plus l’administration. Le clergé, quant à lui, fait soigné représente, disent-ils celui dont je 6
croirais sacrilège de prononcer le nom de natron dissout les chairs et il ne reste que pareille matière [Osiris] ; ils montrent ensuite la peau et les os du cadavre. Après quoi, le second modèle, moins cher et moins les embaumeurs rendent le corps sans lui soigné, puis le troisième, qui est le moins consacrer plus de soins. Voici la troisième cher de tous. Après quoi, ils demandent méthode d’embaumement, pour les plus à leurs clients de choisir le procédé qu’ils pauvres : on nettoie les intestins avec de la désirent voir employer pour leur mort. syrmaia (huile de raifort], on sale le corps La famille convient du prix et se retire ; pendant les soixante-dix jours prescrits, puis les embaumeurs restent seuls dans leurs on le rend aux parents qui l’emportent. » ateliers, et voici comment ils procèdent à Hérodote, Histoire, II, 86-88 Traduit par l’embaumement le plus soigné : tout d’abord Andrée Barguet. à l’aide d’un crochet de fer ils retirent le Paris, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard. cerveau par les narines ; ils en extraient 1964 une partie par ce moyen, et le reste en injectant certaines drogues dans le crâne. Puis avec une lame tranchante en pierre d’Éthiopie [silex], ils font une incision le long du flanc, retirent tous les viscères, nettoient l’abdomen et le purifient avec du vin de palmier et de nouveau avec des aromates broyés. Ensuite, ils remplissent le ventre de myrrhe pure broyée, de cannelle, et de toutes les substances aromatiques qu’ils connaissent, sauf l’encens, et le recousent. Après quoi, ils salent le corps en le couvrant de natron pendant soixante-dix jours ; ce temps ne doit pas être dépassé. Les soixante-dix jours écoulés, ils lavent le corps et l’enveloppent tout entier de bandes découpées dans un tissu de lin très fin et enduites de la gomme dont les Égyptiens se servent d’ordinaire au lieu de colle. Les parents reprennent ensuite le corps et font faire un coffre de bois, taillé à l’image de la forme humaine, dans lequel ils le déposent ; et ils conservent précieusement ce coffre dans une chambre funéraire où ils l’installent debout, adossé contre un mur. Voilà pour le procédé le plus coûteux. Pour qui demande l’embaumement à prix moyen et ne veut pas trop dépenser, voici leurs méthodes : les embaumeurs chargent leurs seringues d’une huile extraite du cèdre et emplissent de ce liquide le ventre du mort, sans l’inciser et sans en retirer les viscères ; après avoir injecté le liquide par l’anus, en l’empêchant de ressortir, ils salent le corps pendant le nombre de jours voulu. Le dernier jour ils laissent sortir de l’abdomen l’huile qu’ils y avaient introduite ; ce liquide a tant de force qu’il dissout les intestins et les viscères et les entraîne avec lui. De son côté, le 7
DESSIN D’UN BISON DE L’ÈRE GLACIAIRE Pierre calcaire 12 000 -11 000 av. J.-C. Montastruc, France Dans la période qui s’étale de 33 000 à les conditions d’une éclosion artistique. 8000 ans avant J-C, d’importants progrès L’invention du dessin remonte aux viennent enrichir le patrimoine culturel de Aurignaciens il y a 30 000 ans. Ces hommes l’humanité : apogée de la taille de pierre, gravent, sculptent, peignent surtout des apparition de l’outillage en os, premiers animaux avec un grand réalisme. Leurs éléments de parures. Homo Sapiens Sapiens images révèlent un remarquable sens de invente l’Art. Les pièces retrouvées témoignent l’observation, une capacité à mémoriser et du développement d’une pensée symbolique retranscrire avec précision les morphologies et de préoccupations religieuses. animales. Il s’agit d’un art vibrant, caractérisé Les hommes vivent alors dans un par une conception dynamique de l’animal. environnement dominé par le froid et des La gravure est exécutée à l’aide de sols gelés qui facilitent les migrations. Ils se pointes de silex, de lames de burins et parfois, constituent en petits groupes pour traquer le pour réaliser des sillons plus profonds sur gibier et les grands animaux à poils laineux les parois, des pics de silex. comme le bison. Une hypothèse accorde à cette chasse en commun le début d’une économie tribale de subsistance qui laisse des plages libres pour la réflexion et le développement des contacts humains, créant 8
Le Paléolithique magique, tout comme les grottes décorées On appelle Paléolithique la période qui qui peuvent faire penser à des sanctuaires s’étend de 2,6 millions d’années à 10 000 ou des espaces plus ou moins sacrés. Les avant notre ère et qui signifie « ancienne âge petites sculptures et les outils sculptés de la pierre ». On doit ce terme au savant sont également placés dans les tombes John Lubbock et il renvoie à l’usage de la (qui apparaissent vers 80 000 ans avant pierre par les premiers hommes en Afrique notre ère) à mesure que les rites funéraires orientale. On l’appelle aussi « l’âge de la deviennent de plus en plus complexes. pierre taillée », par opposition au Néolithique (période comprise entre 10 000 et 3500 L’ère glaciaire avant notre ère), « l’âge de la pierre polie ». Le peuplement de la vallée de la Dordogne, On distingue plusieurs périodes au sein du d’où provient la hache au bison, est Paléolithique : le Paléolithique inférieur, entre étroitement lié à la période de glaciation 2,6 millions d’années et 20 0000 ans avant que connaît le continent européen lors notre ère, où l’on voit apparaître les premiers de la période glaciaire du « Würm ». Les silex grossiers, taillés par les premiers hommes se protègent alors du froid dans australopithèques ; le Paléolithique moyen, des abris sous roche ou dans des grottes ensuite, entre 20 0000 ans et 30 000 ans (généralement à l’entrée). À partir de 17 000 où l’homme de Néandertal colonise l’Europe avant J.-C., ils savent tailler de petites alors que l’homme savant ou moderne, aiguilles en os et peuvent commencer à Homo Sapiens se trouve en Afrique et en coudre des peaux avec des fibres végétales Asie ; et, enfin, le Paléolithique supérieur, qui ou des tendons d’animaux. Ils peuvent s’étend de 30 000 ans à 10 000 ans avant ainsi tendre des peaux cousues dans les notre ère, qui voit le triomphe définitif de grottes qui les protègent du froid et de l’Homo Sapiens et la disparition de l’homme l’humidité. À cette époque, tout le nord de de Néandertal. C’est aussi le moment où l’Europe au niveau du parallèle de Londres l’outillage est de plus en plus perfectionné et et d’Amsterdam est recouvert d’immenses que les premières formes d’art apparaissent. glaciers, rendant le climat particulièrement rude. Dans les régions plus hospitalières du Les premiers artistes sud de l’Europe, les campements en plein air L’art apparaît au Paléolithique supérieur, demeurent la règle, avec l’usage de tentes il y a environ 30 000 ans. D’abord, très en peaux ou des cabanes de branchage. simples, souvent quelques traits tracés, les Les hommes de cette période sont encore représentations deviennent plus évoluées nomades et suivent le gibier qui se déplace comme celles d’animaux ou de silhouettes. au gré des conditions climatiques. Des statues féminines sont mêmes sculptées : les fameuses « Vénus préhistoriques ». D’autre part, il existe un peu moins de 200 grottes où l’on peut admirer de l’art dit « pariétal » c’est-à-dire sur les parois des grottes habitées, datant de 20 000 à 18 000 avant notre ère. On note une exceptionnelle concentration en France dans les vallées de la Dordogne et de la Garonne où se trouvait une importante concentration humaine au Paléolithique supérieur. Les hommes gravent des parois avec des motifs qui leur sont proches comme les animaux qu’ils chassent. Ainsi les bisons et les rennes sont-ils surreprésentés. L’art se développe en concomitance avec les pratiques religieuses et il semble que les premières représentations d’animaux aient une très forte dimension 9
LA DAME DE KARPATHOS Pierre calcaire 4 500 à 3 200 av. J.-C. Carpathes, Grèce Dans les Cyclades, mer Égée, c’est seulement Dans les Cyclades, on peut constater des au début du Néolithique récent (4700 à premières traces d’occupation dès le Vème 3200 avant J-C) qu’une occupation humaine millénaire. Ce sont des cultivateurs-éleveurs est attestée pour la 1ère fois : un petit pour la plupart, mais on voit apparaître groupe vivant d’agriculture et d’élevage, mais également des traces de travail des métaux aussi de pêche et de chasse, habite de comme le cuivre mais aussi la taille de pierres petites maisons au soubassement de pierre, un peu plus précieuses comme l’obsidienne. peut-être protégées par une enceinte ; il Dès le Néolithique s’organise un véritable maîtrise particulièrement bien les techniques commerce entre les îles de la mer Égée et la du façonnage de l’obsidienne et produit une Grèce continentale, fondé autour d’échanges céramique originale à décor peint en blanc. entre produits agricoles et minerais. Le Les objets retrouvés les plus nombreux développement de la céramique connaît alors sont des figurines féminines, généralement un essor fulgurant car elle facilite le transport nues, aux formes plantureuses, aux caractères et le stockage des marchandises échangées. sexuels accusés et à l’attitude stéréotypée. Il semblerait qu’à partir du développement du Celle qui est présentée ici est assez commerce et de l’artisanat, apparaissent les rustre, avec des caractéristiques à peine formes d’une plus grande disparité sociale esquissées. Les formes iront en s’épurant et un début de hiérarchisation de la société avec le temps et ces statuettes féminines dans cet espace égéen. C’est en Grèce et des Cyclades influenceront l’iconographie de dans les îles que se développe une première l’art moderne dans leur représentation de culture avancée sur le continent européen. la femme comme chez Modigliani et Henry Moore. Les cultes féminins à la préhistoire La statue de la femme de Karpathos Le peuplement des îles grecques est la plus ancienne statue grecque des Karpathos est une île grecque de l’archipel collections du British Museum. On peut du Dodécanèse, non loin de Rhodes et de supposer qu’il s’agisse d’une divinité féminine la côte turque. Si le peuplement de la Grèce comme il en existe beaucoup à la fin du continentale remonte à presque 40000 ans, Paléolithique et au cours du Néolithique. Les pour le site le plus ancien découvert, le premières « Vénus » apparaissent en Europe peuplement des îles est, quant à lui plus entre 30 000 et 20 000 avant notre ère et récent, remonte probablement à la fin du se caractérisent dans un premier temps par Néolithique. Les techniques maritimes de l’exagération des parties du corps féminin l’époque permettent alors la colonisation des ayant un rapport direct avec la procréation et îles de la mer Égée. Les gens du Néolithique la maternité. Beaucoup de ces figurines ont sont en effet très mobiles et colonisent les été retrouvées sur tout le continent européen îles par étapes. Karpathos connaît donc et étaient sculptées par les chasseurs qui vraisemblablement un premier peuplement parcouraient alors toute l’Europe. Les seins vers 4000 avant J-C. Ils emportent avec sont protubérants et renvoient sans doute à eux des animaux domestiqués et des la fécondité et à l’abondance de la chasse. plantes qu’ils savent croiser, comme le blé Le sexe féminin est également représenté tendre, et cultiver. C’est aussi le moment de façon explicite, tout comme pour la où les sociétés commencent une évolution femme de Karpathos. Cependant, avec la technique avec le passage de la pierre taillée sédentarisation des sociétés, les statues (Paléolithique) à la pierre polie (Néolithique). deviennent plus élaborées, plus grandes et Les haches deviennent plus tranchantes, plus lourdes. Au-delà de l’image de la femme, les forêts plus facilement défrichées et les on peut y voir une référence à la mère objets sculptés d’une façon plus raffinée. nourricière, qui protège la communauté, lui apporte l’abondance et perpétue l’espèce. 11
12
LYRE DE LA REINE Coquillage, lapis lazuli, pierre calcaire rouge, or et bitume Vers 2500 av. J.-C. Ur, Irak La cité d’Ur Les tombes royales et leur découverte La Mésopotamie, ce « pays entre les deux En 1926, alors que l’Irak se retrouve sous mandat fleuves » comme le décrit Polybe, voit éclore dès britannique, l’archéologue anglais Sir Leonard le IVème millénaire une civilisation brillante, celle Wooley, effectue des fouilles importantes dans des Sumériens, qui inventent l’écriture, posant le cimetière d’Ur. Il finit par mettre au jour des ainsi les fondements de la littérature, des textes tombes d’une extraordinaire richesse. Cette sacrés, des sciences et du droit. Cette région découverte a un grand retentissement car elle du croissant fertile, englobant les fleuves Tigre, révèle au monde les pratiques macabres et l’Euphrate et le Nil, est très tôt façonnée par les tragiques des hauts dignitaires de la première hommes, qui canalisent les fleuves, apprennent dynastie d’Ur, vers 2500 ans avant J.-C. Les 16 à dompter les crues, et irriguent les champs. tombes renferment 74 victimes, soit 6 soldats en Une trentaine de cités, jalouses de leur armes et 68 femmes (64 dames de compagnie indépendance, se partagent donc cette riche et 4 joueuses de harpe), tous accompagnent terre. Elles sont dirigées chacune par un Roi, dans la mort leurs maîtres. Sur les cadavres, véritable prêtre ou « vicaire » (Ensi) du dieu de aucun signe de violence n’a été retrouvé, ce la cité. Ce souverain doit également composer qui laisse penser à des suicides collectifs par avec un clergé très puissant, dépositaire de empoisonnement. Ces tombes royales renferment nombreux biens mobiliers et immobiliers, également des produits précieux provenant de administrés au nom de la divinité. La religion des très loin, du bassin méditerranéen et du Proche- Mésopotamiens tend à s’unifier vers 2500 avant Orient, ce qui témoigne dès le IIIème millénaire d’une J-C, avec des dieux vénérés dans toute la région intense activité commerciale, reposant sur le troc. comme Enlil (Seigneur du vent) dieu souverain, L’importance des découvertes archéologiques et Anu (le dieu du ciel et de l’univers) et Enki (le l’action de l’aventurière anglaise Gertrude Bell, dieu de l’intelligence et de la connaissance). véritable Lawrence d’Arabie au féminin, poussent Parmi ces cités, Ur est une des plus les Britanniques à inaugurer en Irak un musée des plus importantes. Au milieu du IIIème des antiquités à Bagdad. Ce dernier, avec le millénaire, la ville, édifiée au bord de l’Euphrate, British Museum, accueille une grande partie des atteint la surface de 50 hectares. Sa situation trésors de la Mésopotamie antique. géographique en fait sans doute un carrefour commercial prospère. Au centre de la ville, se La lyre, un chef d’œuvre trouve le temple dédié à la divinité protectrice de la ville, le dieu-lune Nanna. Jusqu’à la fin du Cet instrument est surtout connu pour la tête IIIème millénaire, la documentation reste faible à de taureau placé à son extrémité. Dans le propos d’Ur. La découverte des tombes royales monde mésopotamien, il symbolise la force et d’où provient la lyre de la Reine, est un des la fécondité. Cette tête est faite de feuilles d’or témoignages capitaux du milieu du IIIème millénaire, martelées sur une pièce de bois. La toison et appelé aussi Dynastique archaïque III. Il faut la barbe sont ciselées dans du lapis-lazuli, une attendre la période dite de UR III, (2110-2000 pierre très appréciée depuis la fin du Néolithique avant J-C) pour que l’archéologie révèle une et qui fait l’objet d’un commerce dynamique dans grande quantité de tablettes mais aussi exhume tout le Proche-Orient antique. Sur le devant, toute la vaste enceinte sanctuaire organisée on distingue des incrustations de nacre et de autour de la fameuse Ziggourat, grand édifice bitume, représentant des dieux ou des animaux. à base rectangulaire, constitué en paliers, de À Ur, on a retrouvé au total, neuf lyres-taureau quatre à sept étages, et dont la Bible évoquera mais seulement quatre ont été restaurées. Les le souvenir avec la fameuse histoire de la Tour cordes étaient en boyaux naturels de vache. En de Babel s’élançant vers le ciel. C’est aussi le Mésopotamie, on trouvera également les toutes moment où Ur devient la capitale d’un puissant premières partitions musicales de l’Histoire. empire unifié en basse Mésopotamie. 13
TABLETTE DU DÉLUGE Argile 700-600 av. J.-C. Kouyunjik (Ninive), Irak L’écriture cunéiforme aux nécessités administratives des États L’écriture apparaît vraisemblablement en naissants. Des scribes utilisent ainsi la Mésopotamie au IVème millénaire à Uruk, première écriture à Uruk pour l’usage d’une cité du bord de l’Euphrate. C’est ici qu’ont comptabilité de temple. été trouvées les tablettes d’argile les plus On grave toujours sur de petites anciennes contenant une première forme tablettes en argile à l’aide de roseaux d’écriture, véritable support à la mémorisation pointus. Ensuite, on cuit les tablettes dans d’une comptabilité plus précise liée à un four ou au soleil, afin que l’écriture soit l’expansion des échanges commerciaux et définitivement fixée. Les premières écritures sont faites de pictogrammes représentant 14
clairement les choses que l’on souhaite On sait désormais lire le cunéiforme. Il faut indiquer, comme le dessin d’épis de blé encore attendre le début du XXème siècle et pour signifier les récoltes ou les dessins le français F. Thureau-Dangin pour que l’on d’animaux. En associant les pictogrammes, déchiffre les pictogrammes sumériens qui on arrive à exprimer des formes de pensée ponctuent encore de nombreuses tablettes plus complexes. On écrit de façon verticale, cunéiformes. sur toutes les faces de la tablette. À la fin du IVème millénaire, on voit apparaître des L’épopée de Gilgamesh caractères qui forment des sons : c’est le Parmi les textes les plus célèbres que nous phonétisme. Chez les Sumériens, on peut ont légué les Mésopotamiens, l’épopée de ainsi dénombrer plus de 600 caractères et Gilgamesh est un véritable monument de la on voit progressivement l’écriture devenir littérature mondiale. Elle nous est connue horizontale. par les douze tablettes en argile découvertes Au milieu du IIIème millénaire, on taille dans les ruines de la bibliothèque du roi les pointes de roseaux en triangle, donnant assyrien Assurbanipal à Ninive, dans le nord alors une écriture plus nette en forme de de l’actuel Irak et datent du VIIIème siècle coin. On l’appellera désormais cunéiforme (du avant J.-C. Elles sont écrites en akkadiens et latin cuneus, le coin, ou le clou). L’épopée conservées actuellement au British Museum, de Gilgamesh est écrite sous cette forme. après leur découverte en 1862. Lorsque Les pictogrammes sumériens du début l’on parvient à déchiffrer dans les années continueront à être utilisés pour la liturgie 1870, c’est un véritable choc. La tablette XI, et les textes religieux. Écrire reste l’apanage traduite pas l’assyriologue Georges Smith, des scribes, qui conservent jalousement ce révèle au monde un récit du déluge plus privilège qui leur donne une importance ancien que celui de la Bible, démontrant capitale dans l’administration des cités-États ainsi qu’il s’agit d’un mythe très répandu de la Mésopotamie. dans le Moyen-Orient antique. Les certitudes autour du texte biblique commencent alors Le déchiffrement de l’écriture cunéiforme à vaciller. Ce texte écrit sans doute au L’usage de cette écriture se perd au début XVIIIème siècle avant J.-C. relate l’histoire du de notre ère. Des tablettes vont circuler Prince Gilgamesh, roi légendaire d’Uruk, et dans tout le Proche-Orient et en Europe de son compagnon Enkidu. Ensemble, ils sans qu’on sache les déchiffrer. Elle reste entreprennent un long voyage d’aventure donc un mystère jusqu’au XIXème siècle. Alors vers « le pays des cèdres » et doivent que Champollion réussit seul à décrypter les affronter toute une série d’épreuves et de hiéroglyphes, on attribue le déchiffrement de monstres, comme le terrible Humbaba ou l’écriture cunéiforme à plusieurs protagonistes. encore le taureau-céleste, envoyé par les Tout comme Champollion qui a pu utiliser la dieux pour ravager la cité d’Uruk. Dans pierre de Rosette avec une même inscription la seconde partie du récit, Gilgamesh est en trois langues (hiéroglyphes, démotique, anéanti par la mort d’Enkidu, terrassé par et grec), les premiers déchiffreurs utilisent une maladie. Le prince d’Uruk se lance alors les inscriptions trilingues des tombes dans la quête de l’immortalité auprès de la perses à Persépolis (vieux perse, élamite et déesse mais il ne parvient pas à l’obtenir et akkadien). Dans la première moitié du XIXème, retourne à Uruk à la fin du récit, sans avoir à partir du vieux perse, un militaire anglais pu ressusciter Enkidu. Rawlinson, parvient à déchiffrer l’élamite sur un bas-relief commémorant les succès de Darius Ier (empereur perse de à 480 avant J-C). En 1857, la Royal Society de Londres demanda à Rawlinson, Fox-Talbot, et Jules Oppert, de traduire un même texte akkadien. Un mois plus tard chacun fit parvenir une traduction coïncidente et sans aucune concertation entre les trois. 15
16
MASQUE OLMÈQUE Pierre verte 900-400 av. J.-C. Mexique Les Olmèques constituent le premier peuple d’Amérique à développer un style de sculpture sur pierre sophistiqué. Les « masques olmèques » en pierre sont ainsi appelés car aucun n’a encore été excavé dans des circonstances permettant une identification archéologique correcte. Ils présentent à la fois des similitudes et des différences avec les têtes colossales. Ces objets d’art sont clairement destinés à une élite. Celui qui est présenté dans l’exposition est en pierre dure gris-vert à surface patinée et brillante. L’iconographie est proche des têtes colossales en ronde-bosse. Le visage est beau, juvénile, de forme arrondie. Les yeux sont grands ouverts, en creux, recouverts autrefois d’un élément de coquillage ou de pyrite. Le nez court épaté, les lèvres charnues et entrouvertes dont la lèvre supérieure est fortement retroussée et le menton arrondi sont caractéristiques du style olmèque. Sur les côtés, deux larges rubans soulignent les oreilles. Le revers concave lui donne ce nom de masque qui dégage malgré sa petite taille une impression de monumentalité. Les masques olmèques symbolisent l’homme-jaguar, omniprésent dans l’art olmèque. Le jaguar, animal le plus puissant de cette région, était considéré comme la personnification de la force surnaturelle du chaman ou du guide spirituel ; ce dernier était susceptible de se métamorphoser en jaguar lors d’un état extatique. Le masque est scarifié sur les joues et des trous ont été pratiqués pour y incruster des éléments de chaque côté de la bouche. 17
STATUE DE RAMSÈS II Granit Vers 1280 av. J.-C. Temple de Khnoum, Éléphantine, Égypte Le Nouvel Empire (1550 à 1069 avant J-C) frontières. Il est considéré comme l’âge est marqué par une nouvelle reconstruction d’or de l’art égyptien, celui dans lequel se politique et religieuse du pays, menée manifeste une haute maîtrise technique. Trois par des Pharaons audacieux, soucieux du dynasties se partagent l’Égypte pendant près rayonnement culturel de leur civilisation de 500 ans, gagnée par une prospérité à l’intérieur comme à l’extérieur de leurs inégalée depuis sa création, entièrement 18
tournée vers la glorification du souverain proportions de la figure humaine dans les et des dieux. L’enrichissement de toutes bas-reliefs. Composée de 18 poings jusqu’à les couches de la société à l’exception la XXVIème dynastie, elle augmenta à 21 des paysans, se manifeste dans le culte poings par la suite. L’artiste égyptien traçait d’Osiris, la multiplication des tombes privées donc une grille avec un nombre approprié richement décorées, groupées autour de de 18 carreaux en hauteur pour composer celle des rois. les parties de son personnage. Cette taille Après le règne d’Akhénaton, Ramsès correspondait à celle d’un homme debout se réconcilie avec le clergé et rétablit les dans le sens de la marche, du sommet de anciennes croyances. Il manœuvre en fin la tête à la plante des pieds. Le modèle, limier politique avec ses voisins et donne toujours tracé sur une feuille de papyrus ou à l’Égypte une opulence inégalée. Les une pierre, divisé en 18 rangs de carreaux, statues juxtaposent les emblèmes divins aux était conçu dans les ateliers royaux puis accessoires du pouvoir et se couvent de distribué dans les centres provinciaux. hiéroglyphes. Ce canon imaginé à l’aube de la civilisation égyptienne recouvrait un contenu Pharaon et sa représentation idéologique et religieux. Pharaon, comme les La représentation essentielle de Pharaon est dieux, apparaît toujours en marche ou assis celle de sa triple fonction, telle qu’elle le dans des poses hiératiques sauf dans le fut définie dès l’époque thinite : politique, culte osiriaque. Son corps d’athlète, jeune religieuse et militaire. et élancé, ne révèle aucun défaut physique. L’image du souverain, omniprésente Incarnation d’Horus, son image demeure en Égypte, est l’expression même du pouvoir intemporelle, épurée. C’est un être immortel absolu. Pour symboliser tous les aspects de à la jeunesse éternelle, investi d’une fonction la royauté héritée des dieux, il fallut imaginer divine. un canon, à la fois réaliste et stylisé, qui permettait son identification immédiate. La statuaire royale Cette image idéalisée par le canon Dans la ronde-bosse, c’est la double demeure quasi intacte pendant des millénaires, nature de Pharaon, homme et dieu, qui est immuable et stéréotypé. Néanmoins, le roi exprimée. Comme leurs voisins, les Égyptiens doit pouvoir être reconnu, c’est pourquoi sont fortement influencés par la magie et la ses traits sont personnalisés tout en restant croyance en des forces omniprésentes qu’il sereins et immobiles, le visage juste animé faut se concilier, pour obtenir leur aide ou de l’esquisse d’un sourire. La représentation neutraliser pour les rendre inoffensives. Seul de Pharaon est donc l’équivalent d’une forme un culte constant, rendu à ces puissances humaine magnifiée et déchiffrable par tous. mystérieuses, peut garantir l’équilibre La figure de Pharaon, qu’elle soit en deux ou nécessaire à la vie de l’homme. Le Pharaon, trois dimensions, était toujours accompagnée roi divin, affirme constamment qu’il est le de sa titulature, ou nom à rallonge qui restaurateur et le garant de l’harmonie permettait de l’identifier et qui le distinguait originelle qui peut être rompue par la des hommes du commun. négligence des hommes. Il est exceptionnel qu’une œuvre ne Le canon de proportions soit pas accompagnée d’une inscription qui Les Égyptiens se servaient des mathématiques situe la scène, décrive l’action ou définisse pour construire les temples, mesurer les l’objet et le nom des acteurs. Une statue n’est surfaces (cadastre, superficie des nomes…) complète qu’avec son inscription, car seul ce et dessiner. Le corps humain constituait qui est nommé existe. Une fois achevées, les principales mesures. Le canon de les œuvres devaient subir un rituel religieux, l’iconographie s’appuyait sur l’étalon du « l’ouverture de la bouche » , cérémonie au système « oncial », c’est-à-dire la coudée cours de laquelle une âme était insufflée à sacrée (meh djeser) elle-même divisée en 12 la statue. Elle devenait alors la divinité. pouces répartis en 3 poings. La « brasse » (hepet) correspondait au canon des 19
20
RELIEF ASSYRIEN Gypse 700-695 av. J.-C. Kouyunjik (Ninive), Irak À la fin du IIème millénaire, les Assyriens arrivent progressivement au pouvoir et jetent les fondements d’un Empire qui allait prospérer jusqu’au VIIème siècle avant J.-C. en prenant le contrôle de la majeure partie du Moyen-Orient. Assour et Ninive représentaient de fameuses cités gouvernées par des monarques puissants tels Assurbanipal (668-631 avant notre ère). Ninive fut bâtie au VIIème siècle sur la rive est du Tigre. Les arts visuels exaltaient alors la grandeur et les exploits de ces rois. Les palais, construits à des fins militaires et domestiques, occupaient donc une importance fondamentale. Leurs architectures se composaient de briques d’argile, matériau abondant dans le croissant fertile entre le Tigre et l’Euphrate. Les Assyriens y développèrent un style aux programmes narratifs extrêmement importants dans des bas-reliefs très finement détaillés, en pierre ou en albâtre, originellement peints. Leur particularité n’offre qu’un faible relief se détachant de la paroi. Disposées le long d’une bande horizontale sur les murs intérieurs du palais couraient ainsi des représentations de scènes diverses de chasse ou militaires, ou encore les silhouettes debout des occupants du palais tels ici les gardes, identifiables grâce à leur vêtement et leurs armes : arcs, lances et boucliers. Ils arborent la barbe comme le voulait la coutume chez les hommes. On retrouve dans la représentation des personnages des similitudes avec l’art égyptiens, quoique modifiées par des traditions locales. Ici les hommes sont aussi en marche, les deux jambes raides et séparées l’une de l’autre et les épaules ne sont pas de face mais de profil comme le visage, dont l’œil est lui dessiné de face. Les muscles des mollets sont nettement circonscrits par des lignes. L’iconographie est nettement descriptive. 21
22
OUCHEBTI DE TAHARQA Granit Vers 664 av. J.-C. Nouri, Soudan La Basse époque (664 à 341 avant J-C) Le Royaume de Koush fait renaître les anciennes traditions, sous Ce que l’on appelle le Royaume de Koush l’influence des princes Saïtes qui s’installent correspond peu ou prou à l’Éthiopie actuelle. dans le Delta. Au VIIIème siècle avant J.-C., une dynastie Les Ouchebtis, petits objets dont nubienne venue de ce pays s’empare de l’iconographie reprend l’apparence momifiée toute l’Égypte après en avoir chassé les de la statue du défunt, étaient utilisés dans Libyens. Piankhi le nubien (environ 752 à 721 les rites funéraires et faisaient partie du avant J.-C.) parvient à unifier le pays sous mobilier funéraire du défunt. Ils symbolisaient son autorité mais ses successeurs doivent les serviteurs funéraires qui répondaient à affronter les terribles Assyriens venus de l’appel d’Osiris pour remplacer le mort dans l’Est qui font finalement la conquête de la les travaux des champs, voilà pourquoi ils vallée du Nil au début du VIIème siècle avant sont équipés de houe afin de travailler la J.-C. La période nubienne ou la domination terre. des Koushites en Égypte correspond à l’ère Au nombre de un par jour, ils étaient de la XXVème dynastie. Pour mieux asseoir encadrés par des chefs, surveillants ou leur domination précaire sur la Haute et scribes selon que le défunt soit fortuné ou la Basse Égypte, les Koushites ont adopté non. Pour cette même raison le matériau sans difficulté les rites et les coutumes varie de simple terre cuite, bronze, pierre égyptiennes y compris pour les pratiques dure ou bois. funéraires. Aussi se mettent-ils à utiliser également les ouchebtis dans leurs propres Les Ouchebtis tombes. Dans la religion égyptienne et dans les rites funéraires, l’ouchebti tient un rôle majeur et a une très grande importance. Ce sont en effet des statuettes placées dans le tombeau auprès du défunt et censées prendre sa place lors des travaux des champs exécutés dans l’au-delà. Ils ont souvent avec eux des outils pour travailler la terre, comme l’exige Osiris, le dieu des morts. En fonction du statut social et donc de la richesse de la famille du défunt, les ouchebtis seront plus ou moins nombreux mais aussi réalisés d’une façon plus ou moins raffinée. Ils sont souvent en terre cuite ou en bois pour les plus pauvres mais aussi en bronze, en pierre ou en émail pour les plus riches. Ce sont souvent ces statuettes égyptiennes dont on dispose le plus. Il y en avait ainsi quatre cent treize dans le tombeau du pharaon Toutankhamon. 23
MONNAIE AU VISAGE D’ALEXANDRE Argent Battue entre 305-281 av. J.-C. Lapseki (Lampsacus),Turquie Alexandre et son Empire Philippe II, roi de Macédoine, meurt assassiné en 336 avant J.-C. Son fils Alexandre hérite alors d’un royaume prestigieux et agrandi, qui domine la Grèce depuis la bataille de Chéronée de 338 avant J.-C. Il dispose surtout d’une armée puissante de 38 000 hommes, organisée en de redoutables phalanges et arborant les fameuses sarisses, de longues piques d’environ six mètres. Son armée est à la fois composée de Macédoniens et de Grecs. Formé par le philosophe Aristote, Alexandre rêve de reproduire les exploits d’Achille, le héros de l’Illiade. Or, de l’autre côté du détroit du Bosphore, l’Empire Perse apparaît désormais comme une proie facile. L’Empereur perse Darius III est réputé pour disposer de richesses légendaires, gardées à l’abri dans ses palais de Suse et de Persépolis. Enfin, il s’agit pour Alexandre et pour les Grecs de délivrer toutes les cités hellènes de la côte égéenne de l’Asie mineure et qui sont sous le joug perse depuis le début du Vème siècle. En quelques batailles décisives, comme au Granique, à Issos et à Gaugamèle, il met en déroute l’armée perse de Darius III et fait la conquête de son empire. Il conquiert la Syrie, l’Égypte et la Perse proprement dite, en faisant main basse, nous dit l’historien grec Arrien sur plus d’un milliard de drachmes. Entre 330 et 327 avant J.-C., les armées macédoniennes et grecques pénètrent dans les régions reculées de Bactriane et de Sogdiane, c’est-à-dire dans l’actuel Afghanistan. Alexandre se dirige vers l’Inde et fait la conquête de la vallée de l’Indus entre 326 et 325 avant J.-C. Cependant, il doit renoncer à avancer plus car son armée, épuisée, souhaite rentrer en Macédoine et en Grèce. Une partie de l’armée rebrousse chemin par le désert brûlant de Gédrosie (Sud de l’Iran actuel), l’autre partie, revient par l’Océan Indien et le golfe persique, sous les ordres de l’amiral Néarque. C’est la première fois qu’une armée grecque est allée si loin. 24
Vous pouvez aussi lire