100 objets du British Museum - Une histoire du monde en - Musée de Valenciennes

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100 objets du British Museum - Une histoire du monde en - Musée de Valenciennes
Une histoire du monde en

100 objets
du   British Museum

     Dossier pédagogique
        Madée Carbonnelle
          Julien Dochez

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100 objets du British Museum - Une histoire du monde en - Musée de Valenciennes
Sommaire
    Introduction .................................................................................................     3
    Fiches Objets ..............................................................................................       4
          Sarcophage de Nesperennub .............................................                                      5
          Dessin d’un bison à l’ère glaciaire .................................                                        8
          La dame de Karpathos ..........................................................                              10
          Lyre de la Reine .........................................................................                   12
          Tablette du Déluge ....................................................................                      14
          Masque Olmèque ........................................................................                      16
          Statue de Ramsès II .................................................................                        18
          Relief Assyrien ...............................................................................              29
          Ouchebti de Taharqa ...............................................................                          22
          Monnaie à l’effigie d’Alexandre .........................................                                    24
          Buste d’Auguste et buste de Sophocle .......................                                                 26
          Statue de Mithra .........................................................................                   30
          Main arabe en bronze .............................................................                           32
          Bouddha assis de Gandhara ..............................................                                     34
          Cristal de Lothaire .....................................................................                    36
          Pot en forme de guerrier Moche ..................................                                            38
          Sculpture d’un esprit aztèque ............................................                                   40
          Pièces du jeu d’échecs de Lewis ....................................                                         42
          Plat chinois bleu et blanc ....................................................                              44
          Le Rhinocéros d’Albrecht Dürer .........................................                                     46
          Christ ...................................................................................................   48
          Camée double face ...................................................................                        50
          Plaque du bénin : l’Oba avec des Européens ........                                                          52
          Cinquante Manillas ................................................................                          54
          Robe d’enfant sioux ..................................................................                       56
          Hokusai Manga .......................................................................                        58
          Contrefaçon d’un maillot de football ............................                                            60
    La question de l’objet ..........................................................................                  62
    Le corps au centre de la relation sujet/objet......................                                                66

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L’
        exposition présentée au Musée des         de production pendant plus de 1000 ans
        Beaux-Arts de Valenciennes est une        avec une croissance exponentielle à partir
        invitation à voyager dans le temps        de la révolution industrielle qui débuta en
et dans l’espace, à se projeter sur toute         Europe et aux États-Unis au XIXème siècle.
la surface de la Terre à la rencontre des         La création d’objets de consommation se
objets considérés comme des marqueurs de          généralise au cours du XXème siècle, le
civilisations.                                    modernisme le porte aux nues et notre
                                                  dépendance savamment et stratégiquement
       Elle raconte ainsi une histoire du         orchestrée par le marketing et la publicité fait
monde à travers 100 pièces issues des             entrer l’objet et son propriétaire dans l’ère
collections du British Museum selon un            postmoderne de la mondialisation actuelle.
parcours chronologique déterminé dans les
salles du musée. La sélection des objets s’est           L’intérêt de cette exposition, dont
portée sur l’incarnation d’un discours pour       l’objectif est de favoriser une mise à
chacun d’entre eux selon une problématique        proximité d’objets aussi divers, est de
du décentrement qui est de voir l’autre à         mettre en parallèle à la fois les différences
travers ce qu’il a de commun avec nous.           et les points communs entre des cultures
                                                  géographiquement éloignées, et /ou reliées
       En interrogeant ces objets, on se rend     dans l’échelle du temps, sans occulter la
compte des liens qu’ils entretiennent avec        résonance de notre propre rapport à l’objet
les hommes et leur mode de pensée : liens         dans nos sociétés occidentales postmodernes.
affectifs, spirituels, ludiques ou domestiques.   Ils témoignent des migrations, des échanges
Car les objets font réfléchir, interrogent,       et des liens qui ont contribué à façonner
enchantent ou amusent.                            notre présent.
      Dans les sociétés premières, nomades               Les collections du British Museum
ou tribales, l’objet sert de vecteur pour         s’étalent sur plus de 2 millions d’années. Le
raconter des histoires et illustrer des mythes    visiteur de l’exposition remontra lentement
là où l’écrit n’existe pas encore. Ces mêmes      le temps selon un parcours découpé en dix
objets nous permettent aujourd’hui d’étudier      sections pour découvrir toutes les richesses
les pratiques de ces peuples à leur égard.        de l’humanité et son évolution jusqu’à nos
       La sédentarité, la création des            jours.
grandes Cités et des États ont favorisé
l’invention de l’écriture qui tisse des liens
pragmatiques ou spirituels avec les objets.
Les progrès scientifiques et techniques
ont ensuite contribué à l’émergence de
nouveaux matériaux, de nouveaux modes

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Fiches objets

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SARCOPHAGE DE NESPERENNUB
Bois peint
Vers 800 av. J.-C.
Louxor, Égypte

Dépourvus d’explications scientifiques sur
l’organisation de l’univers et de la vie, les
prêtres inventèrent une cosmogonie peuplée
des formes environnementales. La nature
de l’art égyptien fut ensuite d’élaborer un
système iconographique cohérent, capable
d’expliquer les réalités de manière ordonnée
et compréhensible en s’appuyant sur les
textes qui les nourrissaient.

       Cette créativité est liée au dieu Ptah
de Memphis, le créateur représenté par
un artisan à tête de bélier confectionnant
l’humanité sur son tour de potier. Le grand
prêtre de Ptah a été appelé « le plus grand
des artisans ; il a souvent été responsable de
la conception et de l’exécution des œuvres
d’art durant l’Ancien et le Moyen Empire.
       L’artiste-artisan égyptien reproduisait
inlassablement un système de représentation,
érigé dès les premières dynasties, auquel il
était obligé d’obéir au risque de mettre en
péril ce fragile équilibre du monde et de
causer des désordres catastrophiques.
       L’image tournait essentiellement autour
de la figure humaine, et entretenait des
liens étroits avec les signes hiéroglyphiques
sans lesquels elle ne signifie rien. Les textes
fixent les dogmes, décrivent les manières
d’accomplir les rituels.
       L’art égyptien traduit cette quête de
permanence associée au besoin d’éternité
de l’homme. Les Égyptiens étaient persuadés
que la mort n’était qu’un passage obligé
vers la vie éternelle. L’art demeurait de ce
fait entièrement tourné vers cette pensée
supérieure, celle de sa survie dans l’au-delà.
Un système d’écriture et de représentations
fut élaboré pour s’assurer la vie éternelle.
De fait, tout objet, toute représentation
d’un être participait de lui-même, d’où le
pouvoir des amulettes placées sur la momie
qui protégeaient le mort. L’image est donc
toujours une vie en puissance.
       La palette des couleurs est limitée chez
les Égyptiens : les pigments sont naturels.
L’ocre rouge est la couleur de Seth, associée
au sang et à la vitalité, au pouvoir et à la

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force. Ici, le bois a été teinté en rouge,         partie des classes dominantes de la société
    probablement dans le but de souligner le           égyptienne.
    lien étroit du défunt avec le dieu du soleil.              Les prêtres n’ont pas cependant
    Les couleurs de la peau relevaient aussi           la vocation à prêcher ni à répondre à
    de conventions iconographiques : le brun-          une angoisse spirituelle des fidèles. Ce
    rouge était utilisé pour la représentation des     sont les serviteurs des dieux qui résident
    hommes.                                            physiquement dans les statues. Ils assurent
                                                       la survie matérielle des dieux, en administrant
    La troisième période intermédiaire                 les biens des temples mais assurent aussi
    Le Nouvel Empire, (XVIème-Xème siècles avant       la sécurité de la statue. La fonction des
    J.-C.) qui a connu son apogée sous la              prêtres est essentielle car en entretenant les
    XIXème dynastie, celle des Ramsès et de            édifices religieux, ils assurent l’harmonie du
    leurs réalisations grandioses, s’achève dans       monde, l’ordre universel et le maintien d’une
    l’anarchie au cours du XIème siècle avant notre    création ordonnée. Les prêtres agissent par
    ère. L’Égypte, royaume si brillant, véritable      délégation royale. Ils sont nommés par le
    « don du Nil » selon la célèbre expression         Pharaon afin d’exécuter les rites sacrés et
    de l’historien grec Hérodote, sombre dans          les cérémonies religieuses.
    une période de troubles qui s’achève avec                  Le clergé égyptien est très hiérarchisé.
    l’avènement de la XXIIème dynastie d’origine       Au sommet se trouvent les grands prêtres des
    libyenne et du Pharaon Seshonq. Il rétablit        temples, dont le plus important d’Égypte est
    son autorité sur la Basse-Égypte, c’est-à-dire     celui du dieu Amon à Karnak. Nesperennub
    la région du Delta du Nil, et sur la moyenne       est ainsi est des personnages majeurs
    Égypte.                                            de l’Égypte de la XXIIème dynastie et son
           La Haute-Égypte échappe alors au            riche sarcophage témoigne de sa position
    pouvoir de Pharaon pour être administrée           privilégiée auprès du Pharaon. Le prêtre
    de façon de plus en plus autonome par les          égyptien doit également respecter des règles
    grands prêtres d’Amon. Les Libyens apportent       très strictes de vie. D’après l’historien grec
    avec eux leurs coutumes et mœurs politiques        Hérodote, il doit procéder à des ablutions
    en s’appuyant davantage sur un système             régulières tous les jours y compris la nuit.
    féodal qui promeut les grands aristocrates         Il doit être entièrement rasé et tondu et
    et propriétaires terriens. La dynastie libyenne    s’abstenir de toute relation sexuelle durant
    sera ainsi confrontée au cours du VIIIème          les prières et les services religieux. Il est
    siècle à un véritable délitement du pouvoir        vêtu d’une étoffe de lin et de sandales de
    central et à une montée de plusieurs               palmier et ne doit pas manger de viande,
    entités territoriales qui fragmentent le grand     de poisson, d’ail, de fèves, d’huile d’olive et
    royaume d’Égypte et le font retomber dans          ne doit pas boire de vin. Il est un véritable
    l’anarchie. L’unité ne reviendra véritablement     intermédiaire entre le monde des dieux et
    qu’en 660 avant Jésus Christ, à l’avènement        celui des hommes.
    du Pharaon Psammétique Ier et la XXVIème
    dynastie.                                          Les rites funéraires
                                                       Les sarcophages font l’objet d’un travail
    Le clergé égyptien                                 artisanal très attentif et sont souvent
    Si les Libyens gouvernent pour la première         extrêmement      bien    décorés    puisqu’ils
    fois l’Égypte et apportent avec eux une            recueillent le corps du défunt momifié. Ce
    certaine originalité politique, ils maintiennent   processus de préservation du corps qui a
    largement le vieux cadre administratif et          tant fasciné dès l’Antiquité, nous est connu
    religieux en se fondant totalement dans la         grâce à l’historien grec Hérodote qui s’est
    culture égyptienne qui demeure brillante. Les      rendu en Égypte dès le Vème siècle avant J.-C.
    Pharaons libyens imitent leurs prédécesseurs              « Quand on leur apporte un mort,
    en nommant un tjaty, que l’on peut traduire        ils montrent à leurs clients des maquettes
    par « vizir », sorte de premier ministre           de cadavres, en bois, peintes avec une
    aux pouvoirs très élargis, chef de toute           exactitude minutieuse. Le modèle le plus
    l’administration. Le clergé, quant à lui, fait     soigné représente, disent-ils celui dont je
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croirais sacrilège de prononcer le nom de           natron dissout les chairs et il ne reste que
pareille matière [Osiris] ; ils montrent ensuite    la peau et les os du cadavre. Après quoi,
le second modèle, moins cher et moins               les embaumeurs rendent le corps sans lui
soigné, puis le troisième, qui est le moins         consacrer plus de soins. Voici la troisième
cher de tous. Après quoi, ils demandent             méthode d’embaumement, pour les plus
à leurs clients de choisir le procédé qu’ils        pauvres : on nettoie les intestins avec de la
désirent voir employer pour leur mort.              syrmaia (huile de raifort], on sale le corps
La famille convient du prix et se retire ;          pendant les soixante-dix jours prescrits, puis
les embaumeurs restent seuls dans leurs             on le rend aux parents qui l’emportent. »
ateliers, et voici comment ils procèdent à          Hérodote, Histoire, II, 86-88 Traduit par
l’embaumement le plus soigné : tout d’abord         Andrée Barguet.
à l’aide d’un crochet de fer ils retirent le        Paris, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard.
cerveau par les narines ; ils en extraient          1964
une partie par ce moyen, et le reste en
injectant certaines drogues dans le crâne.
Puis avec une lame tranchante en pierre
d’Éthiopie [silex], ils font une incision le long
du flanc, retirent tous les viscères, nettoient
l’abdomen et le purifient avec du vin de
palmier et de nouveau avec des aromates
broyés.
       Ensuite, ils remplissent le ventre de
myrrhe pure broyée, de cannelle, et de
toutes les substances aromatiques qu’ils
connaissent, sauf l’encens, et le recousent.
Après quoi, ils salent le corps en le couvrant
de natron pendant soixante-dix jours ;
ce temps ne doit pas être dépassé. Les
soixante-dix jours écoulés, ils lavent le
corps et l’enveloppent tout entier de bandes
découpées dans un tissu de lin très fin et
enduites de la gomme dont les Égyptiens
se servent d’ordinaire au lieu de colle. Les
parents reprennent ensuite le corps et font
faire un coffre de bois, taillé à l’image de la
forme humaine, dans lequel ils le déposent ;
et ils conservent précieusement ce coffre
dans une chambre funéraire où ils l’installent
debout, adossé contre un mur. Voilà pour le
procédé le plus coûteux. Pour qui demande
l’embaumement à prix moyen et ne veut pas
trop dépenser, voici leurs méthodes : les
embaumeurs chargent leurs seringues d’une
huile extraite du cèdre et emplissent de ce
liquide le ventre du mort, sans l’inciser et
sans en retirer les viscères ; après avoir
injecté le liquide par l’anus, en l’empêchant
de ressortir, ils salent le corps pendant le
nombre de jours voulu. Le dernier jour ils
laissent sortir de l’abdomen l’huile qu’ils y
avaient introduite ; ce liquide a tant de force
qu’il dissout les intestins et les viscères
et les entraîne avec lui. De son côté, le

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DESSIN D’UN BISON DE L’ÈRE GLACIAIRE
    Pierre calcaire
    12 000 -11 000 av. J.-C.
    Montastruc, France

    Dans la période qui s’étale de 33 000 à            les conditions d’une éclosion artistique.
    8000 ans avant J-C, d’importants progrès                  L’invention du dessin remonte aux
    viennent enrichir le patrimoine culturel de        Aurignaciens il y a 30 000 ans. Ces hommes
    l’humanité : apogée de la taille de pierre,        gravent, sculptent, peignent surtout des
    apparition de l’outillage en os, premiers          animaux avec un grand réalisme. Leurs
    éléments de parures. Homo Sapiens Sapiens          images révèlent un remarquable sens de
    invente l’Art. Les pièces retrouvées témoignent    l’observation, une capacité à mémoriser et
    du développement d’une pensée symbolique           retranscrire avec précision les morphologies
    et de préoccupations religieuses.                  animales. Il s’agit d’un art vibrant, caractérisé
           Les hommes vivent alors dans un             par une conception dynamique de l’animal.
    environnement dominé par le froid et des                  La gravure est exécutée à l’aide de
    sols gelés qui facilitent les migrations. Ils se   pointes de silex, de lames de burins et parfois,
    constituent en petits groupes pour traquer le      pour réaliser des sillons plus profonds sur
    gibier et les grands animaux à poils laineux       les parois, des pics de silex.
    comme le bison. Une hypothèse accorde à
    cette chasse en commun le début d’une
    économie tribale de subsistance qui laisse
    des plages libres pour la réflexion et le​​
    développement des contacts humains, créant

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Le Paléolithique                                    magique, tout comme les grottes décorées
On appelle Paléolithique la période qui             qui peuvent faire penser à des sanctuaires
s’étend de 2,6 millions d’années à 10 000           ou des espaces plus ou moins sacrés. Les
avant notre ère et qui signifie « ancienne âge      petites sculptures et les outils sculptés
de la pierre ». On doit ce terme au savant          sont également placés dans les tombes
John Lubbock et il renvoie à l’usage de la          (qui apparaissent vers 80 000 ans avant
pierre par les premiers hommes en Afrique           notre ère) à mesure que les rites funéraires
orientale. On l’appelle aussi « l’âge de la         deviennent de plus en plus complexes.
pierre taillée », par opposition au Néolithique
(période comprise entre 10 000 et 3500              L’ère glaciaire
avant notre ère), « l’âge de la pierre polie ».     Le peuplement de la vallée de la Dordogne,
On distingue plusieurs périodes au sein du          d’où provient la hache au bison, est
Paléolithique : le Paléolithique inférieur, entre   étroitement lié à la période de glaciation
2,6 millions d’années et 20 0000 ans avant          que connaît le continent européen lors
notre ère, où l’on voit apparaître les premiers     de la période glaciaire du « Würm ». Les
silex grossiers, taillés par les premiers           hommes se protègent alors du froid dans
australopithèques ; le Paléolithique moyen,         des abris sous roche ou dans des grottes
ensuite, entre 20 0000 ans et 30 000 ans            (généralement à l’entrée). À partir de 17 000
où l’homme de Néandertal colonise l’Europe          avant J.-C., ils savent tailler de petites
alors que l’homme savant ou moderne,                aiguilles en os et peuvent commencer à
Homo Sapiens se trouve en Afrique et en             coudre des peaux avec des fibres végétales
Asie ; et, enfin, le Paléolithique supérieur, qui   ou des tendons d’animaux. Ils peuvent
s’étend de 30 000 ans à 10 000 ans avant            ainsi tendre des peaux cousues dans les
notre ère, qui voit le triomphe définitif de        grottes qui les protègent du froid et de
l’Homo Sapiens et la disparition de l’homme         l’humidité. À cette époque, tout le nord de
de Néandertal. C’est aussi le moment où             l’Europe au niveau du parallèle de Londres
l’outillage est de plus en plus perfectionné et     et d’Amsterdam est recouvert d’immenses
que les premières formes d’art apparaissent.        glaciers, rendant le climat particulièrement
                                                    rude. Dans les régions plus hospitalières du
Les premiers artistes                               sud de l’Europe, les campements en plein air
L’art apparaît au Paléolithique supérieur,          demeurent la règle, avec l’usage de tentes
il y a environ 30 000 ans. D’abord, très            en peaux ou des cabanes de branchage.
simples, souvent quelques traits tracés, les        Les hommes de cette période sont encore
représentations deviennent plus évoluées            nomades et suivent le gibier qui se déplace
comme celles d’animaux ou de silhouettes.           au gré des conditions climatiques.
Des statues féminines sont mêmes sculptées :
les fameuses « Vénus préhistoriques ».
D’autre part, il existe un peu moins de
200 grottes où l’on peut admirer de l’art
dit « pariétal » c’est-à-dire sur les parois
des grottes habitées, datant de 20 000
à 18 000 avant notre ère. On note une
exceptionnelle concentration en France dans
les vallées de la Dordogne et de la Garonne
où se trouvait une importante concentration
humaine au Paléolithique supérieur. Les
hommes gravent des parois avec des motifs
qui leur sont proches comme les animaux
qu’ils chassent. Ainsi les bisons et les rennes
sont-ils surreprésentés. L’art se développe en
concomitance avec les pratiques religieuses
et il semble que les premières représentations
d’animaux aient une très forte dimension
                                                                                                    9
100 objets du British Museum - Une histoire du monde en - Musée de Valenciennes
10
LA DAME DE KARPATHOS
Pierre calcaire
4 500 à 3 200 av. J.-C.
Carpathes, Grèce

Dans les Cyclades, mer Égée, c’est seulement       Dans les Cyclades, on peut constater des
au début du Néolithique récent (4700 à             premières traces d’occupation dès le Vème
3200 avant J-C) qu’une occupation humaine          millénaire. Ce sont des cultivateurs-éleveurs
est attestée pour la 1ère fois : un petit          pour la plupart, mais on voit apparaître
groupe vivant d’agriculture et d’élevage, mais     également des traces de travail des métaux
aussi de pêche et de chasse, habite de             comme le cuivre mais aussi la taille de pierres
petites maisons au soubassement de pierre,         un peu plus précieuses comme l’obsidienne.
peut-être protégées par une enceinte ; il          Dès le Néolithique s’organise un véritable
maîtrise particulièrement bien les techniques      commerce entre les îles de la mer Égée et la
du façonnage de l’obsidienne et produit une        Grèce continentale, fondé autour d’échanges
céramique originale à décor peint en blanc.        entre produits agricoles et minerais. Le
       Les objets retrouvés les plus nombreux      développement de la céramique connaît alors
sont des figurines féminines, généralement         un essor fulgurant car elle facilite le transport
nues, aux formes plantureuses, aux caractères      et le stockage des marchandises échangées.
sexuels accusés et à l’attitude stéréotypée.       Il semblerait qu’à partir du développement du
       Celle qui est présentée ici est assez       commerce et de l’artisanat, apparaissent les
rustre, avec des caractéristiques à peine          formes d’une plus grande disparité sociale
esquissées. Les formes iront en s’épurant          et un début de hiérarchisation de la société
avec le temps et ces statuettes féminines          dans cet espace égéen. C’est en Grèce et
des Cyclades influenceront l’iconographie de       dans les îles que se développe une première
l’art moderne dans leur représentation de          culture avancée sur le continent européen.
la femme comme chez Modigliani et Henry
Moore.                                             Les cultes féminins à la préhistoire
                                                   La statue de la femme de Karpathos
Le peuplement des îles grecques                    est la plus ancienne statue grecque des
Karpathos est une île grecque de l’archipel        collections du British Museum. On peut
du Dodécanèse, non loin de Rhodes et de            supposer qu’il s’agisse d’une divinité féminine
la côte turque. Si le peuplement de la Grèce       comme il en existe beaucoup à la fin du
continentale remonte à presque 40000 ans,          Paléolithique et au cours du Néolithique. Les
pour le site le plus ancien découvert, le          premières « Vénus » apparaissent en Europe
peuplement des îles est, quant à lui plus          entre 30 000 et 20 000 avant notre ère et
récent, remonte probablement à la fin du           se caractérisent dans un premier temps par
Néolithique. Les techniques maritimes de           l’exagération des parties du corps féminin
l’époque permettent alors la colonisation des      ayant un rapport direct avec la procréation et
îles de la mer Égée. Les gens du Néolithique       la maternité. Beaucoup de ces figurines ont
sont en effet très mobiles et colonisent les       été retrouvées sur tout le continent européen
îles par étapes. Karpathos connaît donc            et étaient sculptées par les chasseurs qui
vraisemblablement un premier peuplement            parcouraient alors toute l’Europe. Les seins
vers 4000 avant J-C. Ils emportent avec            sont protubérants et renvoient sans doute à
eux des animaux domestiqués et des                 la fécondité et à l’abondance de la chasse.
plantes qu’ils savent croiser, comme le blé        Le sexe féminin est également représenté
tendre, et cultiver. C’est aussi le moment         de façon explicite, tout comme pour la
où les sociétés commencent une évolution           femme de Karpathos. Cependant, avec la
technique avec le passage de la pierre taillée     sédentarisation des sociétés, les statues
(Paléolithique) à la pierre polie (Néolithique).   deviennent plus élaborées, plus grandes et
Les haches deviennent plus tranchantes,            plus lourdes. Au-delà de l’image de la femme,
les forêts plus facilement défrichées et les       on peut y voir une référence à la mère
objets sculptés d’une façon plus raffinée.         nourricière, qui protège la communauté, lui
                                                   apporte l’abondance et perpétue l’espèce.
                                                                                                       11
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LYRE DE LA REINE
Coquillage, lapis lazuli, pierre calcaire rouge, or et bitume
Vers 2500 av. J.-C.
Ur, Irak

La cité d’Ur                                            Les tombes royales et leur découverte
La Mésopotamie, ce « pays entre les deux                En 1926, alors que l’Irak se retrouve sous mandat
fleuves » comme le décrit Polybe, voit éclore dès       britannique, l’archéologue anglais Sir Leonard
le IVème millénaire une civilisation brillante, celle   Wooley, effectue des fouilles importantes dans
des Sumériens, qui inventent l’écriture, posant         le cimetière d’Ur. Il finit par mettre au jour des
ainsi les fondements de la littérature, des textes      tombes d’une extraordinaire richesse. Cette
sacrés, des sciences et du droit. Cette région          découverte a un grand retentissement car elle
du croissant fertile, englobant les fleuves Tigre,      révèle au monde les pratiques macabres et
l’Euphrate et le Nil, est très tôt façonnée par les     tragiques des hauts dignitaires de la première
hommes, qui canalisent les fleuves, apprennent          dynastie d’Ur, vers 2500 ans avant J.-C. Les 16
à dompter les crues, et irriguent les champs.           tombes renferment 74 victimes, soit 6 soldats en
        Une trentaine de cités, jalouses de leur        armes et 68 femmes (64 dames de compagnie
indépendance, se partagent donc cette riche             et 4 joueuses de harpe), tous accompagnent
terre. Elles sont dirigées chacune par un Roi,          dans la mort leurs maîtres. Sur les cadavres,
véritable prêtre ou « vicaire » (Ensi) du dieu de       aucun signe de violence n’a été retrouvé, ce
la cité. Ce souverain doit également composer           qui laisse penser à des suicides collectifs par
avec un clergé très puissant, dépositaire de            empoisonnement. Ces tombes royales renferment
nombreux biens mobiliers et immobiliers,                également des produits précieux provenant de
administrés au nom de la divinité. La religion des      très loin, du bassin méditerranéen et du Proche-
Mésopotamiens tend à s’unifier vers 2500 avant          Orient, ce qui témoigne dès le IIIème millénaire d’une
J-C, avec des dieux vénérés dans toute la région        intense activité commerciale, reposant sur le troc.
comme Enlil (Seigneur du vent) dieu souverain,          L’importance des découvertes archéologiques et
Anu (le dieu du ciel et de l’univers) et Enki (le       l’action de l’aventurière anglaise Gertrude Bell,
dieu de l’intelligence et de la connaissance).          véritable Lawrence d’Arabie au féminin, poussent
        Parmi ces cités, Ur est une des plus            les Britanniques à inaugurer en Irak un musée
des plus importantes. Au milieu du IIIème               des antiquités à Bagdad. Ce dernier, avec le
millénaire, la ville, édifiée au bord de l’Euphrate,    British Museum, accueille une grande partie des
atteint la surface de 50 hectares. Sa situation         trésors de la Mésopotamie antique.
géographique en fait sans doute un carrefour
commercial prospère. Au centre de la ville, se          La lyre, un chef d’œuvre
trouve le temple dédié à la divinité protectrice
de la ville, le dieu-lune Nanna. Jusqu’à la fin du      Cet instrument est surtout connu pour la tête
IIIème millénaire, la documentation reste faible à      de taureau placé à son extrémité. Dans le
propos d’Ur. La découverte des tombes royales           monde mésopotamien, il symbolise la force et
d’où provient la lyre de la Reine, est un des           la fécondité. Cette tête est faite de feuilles d’or
témoignages capitaux du milieu du IIIème millénaire,    martelées sur une pièce de bois. La toison et
appelé aussi Dynastique archaïque III. Il faut          la barbe sont ciselées dans du lapis-lazuli, une
attendre la période dite de UR III, (2110-2000          pierre très appréciée depuis la fin du Néolithique
avant J-C) pour que l’archéologie révèle une            et qui fait l’objet d’un commerce dynamique dans
grande quantité de tablettes mais aussi exhume          tout le Proche-Orient antique. Sur le devant,
toute la vaste enceinte sanctuaire organisée            on distingue des incrustations de nacre et de
autour de la fameuse Ziggourat, grand édifice           bitume, représentant des dieux ou des animaux.
à base rectangulaire, constitué en paliers, de          À Ur, on a retrouvé au total, neuf lyres-taureau
quatre à sept étages, et dont la Bible évoquera         mais seulement quatre ont été restaurées. Les
le souvenir avec la fameuse histoire de la Tour         cordes étaient en boyaux naturels de vache. En
de Babel s’élançant vers le ciel. C’est aussi le        Mésopotamie, on trouvera également les toutes
moment où Ur devient la capitale d’un puissant          premières partitions musicales de l’Histoire.
empire unifié en basse Mésopotamie.

                                                                                                                 13
TABLETTE DU DÉLUGE
     Argile 700-600 av. J.-C.
     Kouyunjik (Ninive), Irak

     L’écriture cunéiforme                             aux nécessités administratives des États
     L’écriture apparaît vraisemblablement en          naissants. Des scribes utilisent ainsi la
     Mésopotamie au IVème millénaire à Uruk,           première écriture à Uruk pour l’usage d’une
     cité du bord de l’Euphrate. C’est ici qu’ont      comptabilité de temple.
     été trouvées les tablettes d’argile les plus              On grave toujours sur de petites
     anciennes contenant une première forme            tablettes en argile à l’aide de roseaux
     d’écriture, véritable support à la mémorisation   pointus. Ensuite, on cuit les tablettes dans
     d’une comptabilité plus précise liée à            un four ou au soleil, afin que l’écriture soit
     l’expansion des échanges commerciaux et           définitivement fixée. Les premières écritures
                                                       sont faites de pictogrammes représentant
14
clairement les choses que l’on souhaite             On sait désormais lire le cunéiforme. Il faut
indiquer, comme le dessin d’épis de blé             encore attendre le début du XXème siècle et
pour signifier les récoltes ou les dessins          le français F. Thureau-Dangin pour que l’on
d’animaux. En associant les pictogrammes,           déchiffre les pictogrammes sumériens qui
on arrive à exprimer des formes de pensée           ponctuent encore de nombreuses tablettes
plus complexes. On écrit de façon verticale,        cunéiformes.
sur toutes les faces de la tablette. À la fin
du IVème millénaire, on voit apparaître des         L’épopée de Gilgamesh
caractères qui forment des sons : c’est le          Parmi les textes les plus célèbres que nous
phonétisme. Chez les Sumériens, on peut             ont légué les Mésopotamiens, l’épopée de
ainsi dénombrer plus de 600 caractères et           Gilgamesh est un véritable monument de la
on voit progressivement l’écriture devenir          littérature mondiale. Elle nous est connue
horizontale.                                        par les douze tablettes en argile découvertes
        Au milieu du IIIème millénaire, on taille   dans les ruines de la bibliothèque du roi
les pointes de roseaux en triangle, donnant         assyrien Assurbanipal à Ninive, dans le nord
alors une écriture plus nette en forme de           de l’actuel Irak et datent du VIIIème siècle
coin. On l’appellera désormais cunéiforme (du       avant J.-C. Elles sont écrites en akkadiens et
latin cuneus, le coin, ou le clou). L’épopée        conservées actuellement au British Museum,
de Gilgamesh est écrite sous cette forme.           après leur découverte en 1862. Lorsque
Les pictogrammes sumériens du début                 l’on parvient à déchiffrer dans les années
continueront à être utilisés pour la liturgie       1870, c’est un véritable choc. La tablette XI,
et les textes religieux. Écrire reste l’apanage     traduite pas l’assyriologue Georges Smith,
des scribes, qui conservent jalousement ce          révèle au monde un récit du déluge plus
privilège qui leur donne une importance             ancien que celui de la Bible, démontrant
capitale dans l’administration des cités-États      ainsi qu’il s’agit d’un mythe très répandu
de la Mésopotamie.                                  dans le Moyen-Orient antique. Les certitudes
                                                    autour du texte biblique commencent alors
Le déchiffrement de l’écriture cunéiforme           à vaciller. Ce texte écrit sans doute au
L’usage de cette écriture se perd au début          XVIIIème siècle avant J.-C. relate l’histoire du
de notre ère. Des tablettes vont circuler           Prince Gilgamesh, roi légendaire d’Uruk, et
dans tout le Proche-Orient et en Europe             de son compagnon Enkidu. Ensemble, ils
sans qu’on sache les déchiffrer. Elle reste         entreprennent un long voyage d’aventure
donc un mystère jusqu’au XIXème siècle. Alors       vers « le pays des cèdres » et doivent
que Champollion réussit seul à décrypter les        affronter toute une série d’épreuves et de
hiéroglyphes, on attribue le déchiffrement de       monstres, comme le terrible Humbaba ou
l’écriture cunéiforme à plusieurs protagonistes.    encore le taureau-céleste, envoyé par les
Tout comme Champollion qui a pu utiliser la         dieux pour ravager la cité d’Uruk. Dans
pierre de Rosette avec une même inscription         la seconde partie du récit, Gilgamesh est
en trois langues (hiéroglyphes, démotique,          anéanti par la mort d’Enkidu, terrassé par
et grec), les premiers déchiffreurs utilisent       une maladie. Le prince d’Uruk se lance alors
les inscriptions trilingues des tombes              dans la quête de l’immortalité auprès de la
perses à Persépolis (vieux perse, élamite et        déesse mais il ne parvient pas à l’obtenir et
akkadien). Dans la première moitié du XIXème,       retourne à Uruk à la fin du récit, sans avoir
à partir du vieux perse, un militaire anglais       pu ressusciter Enkidu.
Rawlinson, parvient à déchiffrer l’élamite
sur un bas-relief commémorant les succès
de Darius Ier (empereur perse de à 480
avant J-C). En 1857, la Royal Society de
Londres demanda à Rawlinson, Fox-Talbot,
et Jules Oppert, de traduire un même
texte akkadien. Un mois plus tard chacun
fit parvenir une traduction coïncidente et
sans aucune concertation entre les trois.
                                                                                                       15
16
MASQUE OLMÈQUE
Pierre verte
900-400 av. J.-C.
Mexique

Les Olmèques constituent le premier peuple d’Amérique à
développer un style de sculpture sur pierre sophistiqué.
      Les « masques olmèques » en pierre sont ainsi appelés car
aucun n’a encore été excavé dans des circonstances permettant
une identification archéologique correcte. Ils présentent à la fois
des similitudes et des différences avec les têtes colossales. Ces
objets d’art sont clairement destinés à une élite.

       Celui qui est présenté dans l’exposition est en pierre
dure gris-vert à surface patinée et brillante. L’iconographie est
proche des têtes colossales en ronde-bosse. Le visage est beau,
juvénile, de forme arrondie. Les yeux sont grands ouverts, en
creux, recouverts autrefois d’un élément de coquillage ou de
pyrite. Le nez court épaté, les lèvres charnues et entrouvertes
dont la lèvre supérieure est fortement retroussée et le menton
arrondi sont caractéristiques du style olmèque. Sur les côtés,
deux larges rubans soulignent les oreilles. Le revers concave lui
donne ce nom de masque qui dégage malgré sa petite taille
une impression de monumentalité.
       Les masques olmèques symbolisent l’homme-jaguar,
omniprésent dans l’art olmèque. Le jaguar, animal le plus puissant
de cette région, était considéré comme la personnification de la
force surnaturelle du chaman ou du guide spirituel ; ce dernier
était susceptible de se métamorphoser en jaguar lors d’un état
extatique.

                                  Le masque est scarifié sur les joues et des
                                  trous ont été pratiqués pour y incruster des
                                  éléments de chaque côté de la bouche.

                                                                                 17
STATUE DE RAMSÈS II
     Granit
     Vers 1280 av. J.-C.
     Temple de Khnoum, Éléphantine, Égypte

     Le Nouvel Empire (1550 à 1069 avant J-C)     frontières. Il est considéré comme l’âge
     est marqué par une nouvelle reconstruction   d’or de l’art égyptien, celui dans lequel se
     politique et religieuse du pays, menée       manifeste une haute maîtrise technique. Trois
     par des Pharaons audacieux, soucieux du      dynasties se partagent l’Égypte pendant près
     rayonnement culturel de leur civilisation    de 500 ans, gagnée par une prospérité
     à l’intérieur comme à l’extérieur de leurs   inégalée depuis sa création, entièrement
18
tournée vers la glorification du souverain         proportions de la figure humaine dans les
et des dieux. L’enrichissement de toutes           bas-reliefs. Composée de 18 poings jusqu’à
les couches de la société à l’exception            la XXVIème dynastie, elle augmenta à 21
des paysans, se manifeste dans le culte            poings par la suite. L’artiste égyptien traçait
d’Osiris, la multiplication des tombes privées     donc une grille avec un nombre approprié
richement décorées, groupées autour de             de 18 carreaux en hauteur pour composer
celle des rois.                                    les parties de son personnage. Cette taille
       Après le règne d’Akhénaton, Ramsès          correspondait à celle d’un homme debout
se réconcilie avec le clergé et rétablit les       dans le sens de la marche, du sommet de
anciennes croyances. Il manœuvre en fin            la tête à la plante des pieds. Le modèle,
limier politique avec ses voisins et donne         toujours tracé sur une feuille de papyrus ou
à l’Égypte une opulence inégalée. Les              une pierre, divisé en 18 rangs de carreaux,
statues juxtaposent les emblèmes divins aux        était conçu dans les ateliers royaux puis
accessoires du pouvoir et se couvent de            distribué dans les centres provinciaux.
hiéroglyphes.                                              Ce canon imaginé à l’aube de la
                                                   civilisation égyptienne recouvrait un contenu
Pharaon et sa représentation                       idéologique et religieux. Pharaon, comme les
La représentation essentielle de Pharaon est       dieux, apparaît toujours en marche ou assis
celle de sa triple fonction, telle qu’elle le      dans des poses hiératiques sauf dans le
fut définie dès l’époque thinite : politique,      culte osiriaque. Son corps d’athlète, jeune
religieuse et militaire.                           et élancé, ne révèle aucun défaut physique.
       L’image du souverain, omniprésente          Incarnation d’Horus, son image demeure
en Égypte, est l’expression même du pouvoir        intemporelle, épurée. C’est un être immortel
absolu. Pour symboliser tous les aspects de        à la jeunesse éternelle, investi d’une fonction
la royauté héritée des dieux, il fallut imaginer   divine.
un canon, à la fois réaliste et stylisé, qui
permettait son identification immédiate.           La statuaire royale
       Cette image idéalisée par le canon          Dans la ronde-bosse, c’est la double
demeure quasi intacte pendant des millénaires,     nature de Pharaon, homme et dieu, qui est
immuable et stéréotypé. Néanmoins, le roi          exprimée. Comme leurs voisins, les Égyptiens
doit pouvoir être reconnu, c’est pourquoi          sont fortement influencés par la magie et la
ses traits sont personnalisés tout en restant      croyance en des forces omniprésentes qu’il
sereins et immobiles, le visage juste animé        faut se concilier, pour obtenir leur aide ou
de l’esquisse d’un sourire. La représentation      neutraliser pour les rendre inoffensives. Seul
de Pharaon est donc l’équivalent d’une forme       un culte constant, rendu à ces puissances
humaine magnifiée et déchiffrable par tous.        mystérieuses,     peut    garantir   l’équilibre
La figure de Pharaon, qu’elle soit en deux ou      nécessaire à la vie de l’homme. Le Pharaon,
trois dimensions, était toujours accompagnée       roi divin, affirme constamment qu’il est le
de sa titulature, ou nom à rallonge qui            restaurateur et le garant de l’harmonie
permettait de l’identifier et qui le distinguait   originelle qui peut être rompue par la
des hommes du commun.                              négligence des hommes.
                                                           Il est exceptionnel qu’une œuvre ne
Le canon de proportions                            soit pas accompagnée d’une inscription qui
Les Égyptiens se servaient des mathématiques       situe la scène, décrive l’action ou définisse
pour construire les temples, mesurer les           l’objet et le nom des acteurs. Une statue n’est
surfaces (cadastre, superficie des nomes…)         complète qu’avec son inscription, car seul ce
et dessiner. Le corps humain constituait           qui est nommé existe. Une fois achevées,
les principales mesures. Le canon de               les œuvres devaient subir un rituel religieux,
l’iconographie s’appuyait sur l’étalon du          « l’ouverture de la bouche » , cérémonie au
système « oncial », c’est-à-dire la coudée         cours de laquelle une âme était insufflée à
sacrée (meh djeser) elle-même divisée en 12        la statue. Elle devenait alors la divinité.
pouces répartis en 3 poings. La « brasse »
(hepet)   correspondait     au  canon    des
                                                                                                      19
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RELIEF ASSYRIEN
Gypse
700-695 av. J.-C.
Kouyunjik (Ninive), Irak

À la fin du IIème millénaire, les Assyriens arrivent progressivement au
pouvoir et jetent les fondements d’un Empire qui allait prospérer
jusqu’au VIIème siècle avant J.-C. en prenant le contrôle de la
majeure partie du Moyen-Orient. Assour et Ninive représentaient
de fameuses cités gouvernées par des monarques puissants tels
Assurbanipal (668-631 avant notre ère). Ninive fut bâtie au VIIème
siècle sur la rive est du Tigre.

       Les arts visuels exaltaient alors la grandeur et les exploits
de ces rois. Les palais, construits à des fins militaires et
domestiques, occupaient donc une importance fondamentale.
Leurs architectures se composaient de briques d’argile, matériau
abondant dans le croissant fertile entre le Tigre et l’Euphrate.
Les Assyriens y développèrent un style aux programmes narratifs
extrêmement importants dans des bas-reliefs très finement
détaillés, en pierre ou en albâtre, originellement peints. Leur
particularité n’offre qu’un faible relief se détachant de la paroi.

       Disposées le long d’une bande horizontale sur les murs
intérieurs du palais couraient ainsi des représentations de scènes
diverses de chasse ou militaires, ou encore les silhouettes debout
des occupants du palais tels ici les gardes, identifiables grâce à
leur vêtement et leurs armes : arcs, lances et boucliers. Ils arborent
la barbe comme le voulait la coutume chez les hommes. On
retrouve dans la représentation des personnages des similitudes
avec l’art égyptiens, quoique modifiées par des traditions locales.
Ici les hommes sont aussi en marche, les deux jambes raides
et séparées l’une de l’autre et les épaules ne sont pas de face
mais de profil comme le visage, dont l’œil est lui dessiné de
face. Les muscles des mollets sont nettement circonscrits par
des lignes. L’iconographie est nettement descriptive.

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OUCHEBTI DE TAHARQA
Granit
Vers 664 av. J.-C.
Nouri, Soudan

La Basse époque (664 à 341 avant J-C)             Le Royaume de Koush
fait renaître les anciennes traditions, sous      Ce que l’on appelle le Royaume de Koush
l’influence des princes Saïtes qui s’installent   correspond peu ou prou à l’Éthiopie actuelle.
dans le Delta.                                    Au VIIIème siècle avant J.-C., une dynastie
        Les Ouchebtis, petits objets dont         nubienne venue de ce pays s’empare de
l’iconographie reprend l’apparence momifiée       toute l’Égypte après en avoir chassé les
de la statue du défunt, étaient utilisés dans     Libyens. Piankhi le nubien (environ 752 à 721
les rites funéraires et faisaient partie du       avant J.-C.) parvient à unifier le pays sous
mobilier funéraire du défunt. Ils symbolisaient   son autorité mais ses successeurs doivent
les serviteurs funéraires qui répondaient à       affronter les terribles Assyriens venus de
l’appel d’Osiris pour remplacer le mort dans      l’Est qui font finalement la conquête de la
les travaux des champs, voilà pourquoi ils        vallée du Nil au début du VIIème siècle avant
sont équipés de houe afin de travailler la        J.-C. La période nubienne ou la domination
terre.                                            des Koushites en Égypte correspond à l’ère
        Au nombre de un par jour, ils étaient     de la XXVème dynastie. Pour mieux asseoir
encadrés par des chefs, surveillants ou           leur domination précaire sur la Haute et
scribes selon que le défunt soit fortuné ou       la Basse Égypte, les Koushites ont adopté
non. Pour cette même raison le matériau           sans difficulté les rites et les coutumes
varie de simple terre cuite, bronze, pierre       égyptiennes y compris pour les pratiques
dure ou bois.                                     funéraires. Aussi se mettent-ils à utiliser
                                                  également les ouchebtis dans leurs propres
Les Ouchebtis                                     tombes.
Dans la religion égyptienne et dans les rites
funéraires, l’ouchebti tient un rôle majeur et
a une très grande importance. Ce sont en
effet des statuettes placées dans le tombeau
auprès du défunt et censées prendre sa
place lors des travaux des champs exécutés
dans l’au-delà. Ils ont souvent avec eux
des outils pour travailler la terre, comme
l’exige Osiris, le dieu des morts. En fonction
du statut social et donc de la richesse de
la famille du défunt, les ouchebtis seront
plus ou moins nombreux mais aussi réalisés
d’une façon plus ou moins raffinée. Ils sont
souvent en terre cuite ou en bois pour les
plus pauvres mais aussi en bronze, en pierre
ou en émail pour les plus riches. Ce sont
souvent ces statuettes égyptiennes dont on
dispose le plus. Il y en avait ainsi quatre
cent treize dans le tombeau du pharaon
Toutankhamon.

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MONNAIE AU VISAGE D’ALEXANDRE
     Argent
     Battue entre 305-281 av. J.-C.
     Lapseki (Lampsacus),Turquie

     Alexandre et son Empire
     Philippe II, roi de Macédoine, meurt assassiné
     en 336 avant J.-C. Son fils Alexandre hérite
     alors d’un royaume prestigieux et agrandi,
     qui domine la Grèce depuis la bataille de
     Chéronée de 338 avant J.-C. Il dispose surtout
     d’une armée puissante de 38 000 hommes,
     organisée en de redoutables phalanges et
     arborant les fameuses sarisses, de longues
     piques d’environ six mètres. Son armée est
     à la fois composée de Macédoniens et de
     Grecs. Formé par le philosophe Aristote,
     Alexandre rêve de reproduire les exploits
     d’Achille, le héros de l’Illiade. Or, de l’autre
     côté du détroit du Bosphore, l’Empire Perse
     apparaît désormais comme une proie facile.
     L’Empereur perse Darius III est réputé pour
     disposer de richesses légendaires, gardées à
     l’abri dans ses palais de Suse et de Persépolis.
     Enfin, il s’agit pour Alexandre et pour les
     Grecs de délivrer toutes les cités hellènes
     de la côte égéenne de l’Asie mineure et qui
     sont sous le joug perse depuis le début du
     Vème siècle.
             En quelques batailles décisives, comme
     au Granique, à Issos et à Gaugamèle, il met
     en déroute l’armée perse de Darius III et fait
     la conquête de son empire. Il conquiert la
     Syrie, l’Égypte et la Perse proprement dite, en
     faisant main basse, nous dit l’historien grec
     Arrien sur plus d’un milliard de drachmes.
     Entre 330 et 327 avant J.-C., les armées
     macédoniennes et grecques pénètrent
     dans les régions reculées de Bactriane
     et de Sogdiane, c’est-à-dire dans l’actuel
     Afghanistan. Alexandre se dirige vers l’Inde
     et fait la conquête de la vallée de l’Indus
     entre 326 et 325 avant J.-C. Cependant, il
     doit renoncer à avancer plus car son armée,
     épuisée, souhaite rentrer en Macédoine et
     en Grèce. Une partie de l’armée rebrousse
     chemin par le désert brûlant de Gédrosie
     (Sud de l’Iran actuel), l’autre partie, revient
     par l’Océan Indien et le golfe persique,
     sous les ordres de l’amiral Néarque. C’est
     la première fois qu’une armée grecque est
     allée si loin.

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