12 AVRIL 2021 - Biocodex Microbiota Institute

 
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12   NEWSLETTER biocodex   AV R I L 2 0 2 1
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Sommaire

                                             Articles
                                             commentés

                                             Rubrique adulte
                                             Rubrique enfant

synthèse
                                                8
Dialogue entre
le microbiote intestinal
et les réponses
immunitaires de l’hôte
…

    4
                                                                                                 UNE PEAU SOUS TRIPLE
                                                                                                      INFLUENCE :
                           revue de presse                                                        INTESTIN, CERVEAU ET
                                                                                                   MICROBIOTE CUTANÉ
                                                 Document réservé aux professionnels de santé.

Microbiote
                             16                 PRO-Skin-Microbiota.indd 1

                                             Actualités
                                                                                                                         26/03/2021 15:02

& Covid-19
                                             Biocodex Microbiota
retour de congrès                            Institute

    12                                          19
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ÉDITO

                                 C          hers lecteurs,

                                 Depuis plus d’un an, notre actualité tourne en boucle autour d’un mot de deux
                                 syllabes auquel on a greffé un nombre : Covid-19. Pas un jour ne passe sans
Dr Maxime Prost, MD              un article de presse, sans un flash info, sans une émission radiophonique
Directeur Affaires médicales     ou télévisée consacrés à cette pandémie planétaire. Le moteur de recherche
France
                                 Google est un bon indicateur : 5,6 milliards de requêtes pour « Covid-19 »,
                                 43 millions pour « symptômes Covid-19 », 10 millions pour « microbiota and
                                 Covid-19 ». L’actualité médicale n’est pas en reste. Tentez une expérience
                                 en tapant « Covid-19 microbiota » dans le moteur de recherche PubMed
                                 et ce sont près de 300 publications qui sortent !

                                 Cette émulation scientifique est une bonne nouvelle : la recherche progresse.
                                 Vite. Elle permet une meilleure compréhension de la pandémie : mode
                                 de transmission, symptômes, prévention, traitements… Que d’avancées
Marion Lenoir, PhD               en à peine un an ! Mais de nombreuses questions demeurent, notamment
Responsable Affaires médicales   sur le lien entre Covid-19 et microbiote. Ce virus impacte-t-il l’homme via
internationales                  une perturbation de son microbiote ? Ou alors les modifications du microbiote
                                 sont-elles la conséquence de l’infection par le virus ? Certaines publications
                                 montrent que la dysbiose intestinale persiste durablement après la disparition
                                 des symptômes, mais jusqu’à quand ? Quid du rôle du microbiote dans les
                                 cas de Covid long ? L’article du Professeur Tao Zuo donne quelques pistes.
    À N’EN PAS DOUTER,
DANS LES MOIS QUI                D’autres questions demeurent notamment sur l’implication du microbiote
VIENNENT, DE NOU-                intestinal dans la réponse immunitaire vis-à-vis de l’infection par le virus
                                 ainsi que sur la sévérité des symptômes. L’occasion de se replonger dans
VELLES PUBLICATIONS              les fondamentaux du dialogue entre microbiote et immunité intestinale qui
LÈVERONT DAVANTAGE               commence dès la vie fœtale. À n’en pas douter, dans les mois qui viennent,
LE VOILE SUR CETTE               de nouvelles publications lèveront davantage le voile sur cette « jeune »
« JEUNE » PANDÉMIE               pandémie et ses interactions avec le microbiote intestinal. Et qui sait,
                                 de potentiels moyens de prévention émergeront peut-être. De nouvelles
ET SES INTERACTIONS
                                 connaissances à découvrir dans les prochains numéros de Microbiota !
AVEC LE MICROBIOTE
INTESTINAL.
                                 Bonne lecture.
12 AVRIL 2021 - Biocodex Microbiota Institute
Photo : Shutterstock.
SYNTHÈSE

  DIALOGUE ENTRE LE MICROBIOTE
INTESTINAL ET LES RÉPONSES
IMMUNITAIRES DE L’HÔTE POUR
LUTTER CONTRE LES INFECTIONS
   Les êtres vivants ont évolué depuis des millions d’années dans des environnements complexes occupés par des écosystèmes
   microbiens, et ont ainsi forgé des relations symbiotiques régulées par le système immunitaire. Les nouvelles techniques de
   séquençage ont révolutionné nos connaissances et ont permis de mettre en évidence que chaque individu héberge un microbiote
   qui lui est propre, ainsi que son rôle dans la physiologie de l’hôte et de nombreuses maladies telles que les infections. Le dialogue
   entre le microbiote intestinal et le système immunitaire débute dès la vie fœtale. L’organisation spécifique du microbiote – séparé
   de l’hôte par une monocouche cellulaire – pose un défi particulier pour le système immunitaire, dont le rôle est de reconnaître le
   « non-soi » comme un potentiel signe d’infection pour initier les cascades immunitaires. Par conséquent, les échanges continuels
   avec le microbiote ont un impact considérable sur le système immunitaire de l’hôte. La réponse immunitaire, qui doit tolérer le
   microbiote, a également un impact sur la composition et la fonction du microbiote. Ainsi, les échanges bidirectionnels et constants
   entre ces deux entités façonnent à la fois l’immunité de l’hôte et le microbiote intestinal pour protéger des infections et de
   nombreuses pathologies.

                                               MICROBIOTE                                       peptides antimicrobiens PAMs (RegIIIg,
                                                                                                b-defensins et cathelicidin) [2]. Grâce à
                                               INTESTINAL ET                                    la reconnaissance des motifs molécu-
                                                                                                laires associés aux micro-organismes
                                               BARRIÈRE INTESTINALE                             (Microbe-Associated Molecular Patterns,
                                               Le microbiote intestinal constitue une pre-      MAMPs) par des récepteurs spécifiques
                                               mière barrière pour protéger la muqueuse         (dont les Toll-Like-Receptors, TLR), ces
Par le Dr Dorota Czerucka                      intestinale des pathogènes. Cet écosys-          cellules seront capables de transduire le
Biologie médicale, Équipe écosystèmes          tème complexe habite de manière stable           signal en cytokines et chemokines pour
et immunité, Centre scientifique               le tractus gastro-intestinal et limite l’ac-     signaler une infection et recruter les cel-
de Monaco, Monaco                              cès aux niches de l’intestin ainsi qu’aux        lules immunitaires (Figure 2). Les cellules
                                               nutriments nécessaires à la multiplication       de Paneth participent à la résistance à la
                                               des bactéries exogènes à celui-ci par le         colonisation en sécrétant également des
                                               phénomène de « résistance à la coloni-           PAMs (lysosyme, a-defensins, RegIIIg) [2].
                                               sation » [1] (Figure 1). Les entérocytes,        Les cellules caliciformes – sécrétrices de
                                               qui assurent une barrière physique entre         mucus – et les cellules M ont la capacité de
                                               la lumière intestinale et l’hôte, absorbent      faire passer des antigènes intacts et cap-
                                               l’eau et les nutriments, et sécrètent des        tés au hasard dans la lumière intestinale
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FIGURE     1                                                                                                              à la capacité des SFB à stimuler la syn-
Fonctions du microbiote intestinal contribuant à la résistance à la colonisation                                            thèse d’IL-22 par Th17, cytokine connue
                                                                                                                            pour stimuler la synthèse des PAM [6]. Les
       Compétition au niveau des niches                   Stimulation des défenses immunitaires                             CD, quant à elles, sont capables, grâce à
       Inhibition direct   Utilisation des nutriments   Maintien de la barrière          Effet sur l’immunité                une extension de leurs dendrites entre les
                                    Nutriments
                                                                                                                            cellules épithéliales, de phagocyter des
                                                                                                                            bactéries présentes dans la lumière intes-
                                                                                                                            tinale. Ces bactéries commensales sont
                                                                                                                            ensuite transportées jusqu’aux ganglions
                                                                                                                            lymphatiques mésentériques pour induire
                                                                                                                            la production d’IgA sécrétées par les plas-
                                                                                                                PAM         mocytes [1]).
                                                         Mucus
                                                                                                                            Les cellules lymphoïdes innées (Innate
                                                                                                                            Lymphoid Cells, ILC) jouent également un
                                                                                                                            rôle important dans l’homéostasie intesti-
                                                                                                                            nale, lié à leur capacité à initier et orienter
                                                                                  Anti                                      les réponses immunes intestinales. Plus
     Entérocyte                  Cellule de Paneth                                                                          particulièrement, les ILC de type 3 (ILC3)
                                                                                                        Pro
                                                                                                                            ont une place à part dans l’interaction avec
                                 Microbiote                                          Inflammation
     Cellule caliciforme                                                                                                    le microbiote intestinal. Au travers de syn-
     (en gobelet)                Bactérie pathogène                                                                         thèse d’IL-22, ces cellules stimulent la pro-
                                                                                         (réalisée avec BioRender.com)      duction de mucus, de PAM ainsi que la
                                                                                                                            sécrétion de chemokines et le recrutement
provenant des bactéries commensales                     ainsi la différenciation en Treg [4] ainsi que                      de cellules polymorphonucléaires (PMN)
ou des pathogènes ou des antigènes ali-                 la maturation des lymphocytes Th17 via                              (Figure 2) [1].
mentaires. Ceux-ci seront ensuite apprêtés              l’implication de bactéries commensales :
par les cellules dendritiques (CD) et pré-              les bactéries segmentées filamenteuses
sentés aux cellules de l’immunité adap-                 (Segmented Filamentous Bacteria, SFB).
tative. Cette fonction est primordiale pour             Celles-ci ont la particularité d’adhérer aux
la tolérance intestinale et l’induction des             cellules épithéliales intestinales entrainant
réponses immunitaires mucosales [2] : une               une active stimulation du système immu-
balance entre des réponses pro- et anti-in-             nitaire [5] (Figure 3). Une étude montre
flammatoires s’opère donc en permanence                 que la colonisation de souris par ces SFB

                                                                                                                                                                                   Photo : Shutterstock.
(Figure 2). Cela a été notamment démontré               induit la différenciation de Th17 et exerce
dans des modèles murins de colite induite               ainsi une protection vis-à-vis de Citrobacter
et chez des souris déplétées en récepteurs              rodentium (équivalent murin des EPEC et
TLR : l’absence de microbiote ou de recon-              EHEC). Cette protection serait attribuée
naissance de celui-ci réduit la prolifération
des cellules épithéliales intestinales ou la
                                                           FIGURE        2
réparation de la barrière [2]. Enfin, le mu-
cus assure aussi une protection en captu-               Réponse du système immunitaire face aux infections
rant les PAM qui vont maintenir les patho-
gènes éloignées de l’épithélium. Dans un                   Lumière intestinale
modèle de souris déficiente en Muc2 (gène
codant pour une des protéines composant
le mucus), on observe une augmentation
de la translocation de bactéries commen-                  Couche externe
                                                          de mucus
sales et ces animaux développent des
maladies inflammatoires intestinales [3].                 Couche interne
                                                          de mucus
                                                                                                                                           PAM

DIALOGUE ENTRE                                                                                                           TLR
                                                                                                                         MYD88

LE MICROBIOTE INTES-
                                                                                                                           NF-ΚB
TINAL ET LE SYSTÈME                                                                        TLR                        Synthèse de cytokines
IMMUNITAIRE INNÉ                                             CXC-
                                                                                                                                                    IgA
                                                          chemokines                     Mϕ                      IL-23
Parmi les acteurs du système immunitaire
inné qui participent à l’homéostasie intes-                                        IL-1β, IL-23,               Th17      ILC3      NK      IELγδT
                                                                                   TNF-α                                                            Plasmocyte
tinale, les cellules présentatrices d’anti-                              IL-10
gènes (CPA), tels que les macrophages                     ROS
(Mj) et les CD ont un rôle majeur. Les Mj                                                                                 IL-17 et IL-22

et les CD synthétisent l’IL-10 et favorisent                                                                                                              (réalisée avec BioRender.com)

                                                                                                                                                                                                           5
12 AVRIL 2021 - Biocodex Microbiota Institute
SY N T H È SE                               DIALOGUE ENTRE LE MICROBIOTE INTESTINAL ET LES RÉPONSES IMMUNITAIRES DE L’HÔTE POUR LUTTER CONTRE LES INFECTIONS

                                FIGURE   3
                                                                                                                                                   LES MÉTABOLITES
    Métabolites produits ou synthétisés par le microbiote intestinal et leurs impacts
    sur les réponses immunitaires                                                                                                                  MICROBIENS : D’IMPOR-
                                                                                                                                                   TANTS MÉDIATEURS
                                                                                                                                                   DU DIALOGUE ENTRE
                                 Microbiote
                                 intestinal
                                                                                                                                                   LE MICROBIOTE ET
                                                                                                                               B. fragilis         L’IMMUNITÉ ADAPTATIVE
                                                                                                                  Clostridia                       Les acides gras à chaîne courte (AGCC),
                                                 Butyrate                                    Métabolites                                           les métabolites dérivés du tryptophane
                                                                                            du tryptophane                                         et les sels biliaires sont les principaux
                                                                                                               Butyrate                      PSA   métabolites issus du microbiote intestinal
                                                                                                                                                   exerçant un effet protecteur contre les in-
                                SFB    GPR43 GPR109A                          Maintient l’intégrité
                                                                              de l’épithelium
                                                                                                                                                   fections [9, 10]. Le butyrate, propionate,
                                                                                                                                                   et succinate sont connus pour leurs ac-
                                       Inflammasome HDAC
                                                                                                                                                   tions sur l’homéostasie intestinale, sur la
                                                                    Mucus                                                                          sécrétion du mucus, mais également sur
                                                          NB-ΚB                                                                                    les différentes cellules du système immu-
                                                                                                                                                   nitaire. Le butyrate exerce entre autres
                                                                                                                                                   des effets anti-inflammatoires et anti-mi-
                                              IL-18 Homéostasie intestinale                                                                        crobiens. Cette action passe par les ré-
                                                                                                                                                   cepteurs couplés aux protéines G (GPR)
                                                                                                                                                   retrouvés sur les cellules épithéliales et
                                                                                                         AHR                                       les macrophages [9]. F. prausnitzii est un
                                                                                                                                                   grand producteur de butyrate ce qui peut
                                                                                                                                                   en partie expliquer son effet anti-inflamma-
                                                              Th 17                            ILC 3              HDAC                             toire. En effet, il inhibe l’activation de NF-kB
                                                                                                                                                   et inhibe ainsi la synthèse de cytokines
                                                                                                                                  Treg
                                                                                                                                                   pro-inflammatoires IFN-g, TNF-a, IL-1b, IL-8
(réalisée avec BioRender.com)

                                                                                                                   DC
                                                          IL 17                                                                   IL-10            par les entérocytes [8] (Figure 3). Il induit
                                                                                                                                                   également des modifications métaboliques
                                                                                                                                                   et épigénétiques (via les histones dea-
                                                                                                 IL 22
                                                                                                                                                   cétylases HDAC) des macrophages chez
                                                         Pro-inflammatoire                                      Anti-inflammatoire                   la souris, amplifiant ainsi leurs activités
                                                                                                                                                   anti-microbiennes in vitro et in vivo [11].
                                                                                                                                                   Les bactéries commensales peuvent aus-
                                                                                                                                                   si métaboliser le tryptophane et produire
    DIALOGUE ENTRE                                                                            immunitaires adaptatives : un mélange
                                                                                              de 17 souches de Clostridia, isolée d’un
                                                                                                                                                   des substances antimicrobiennes. Ainsi,
                                                                                                                                                   les Lactobacilli l’utilisent comme source
    LE MICROBIOTE ET LE                                                                       échantillon fécal humain et introduit chez           d’énergie pour synthétiser un indole qui
                                                                                              la souris induit une réponse anti-inflamma-          se lie aux récepteurs aryl hydrates de car-
    SYSTÈME IMMUNITAIRE                                                                       toire en stimulant les Treg [7]. Faecalibac-         bone (AhR) présents sur les ILC3. AhR va
    ADAPTATIF                                                                                 terium prausnitzii a aussi été identifié pour        induire la sécrétion d’IL-22 par les ILCs et
                                                                                              son action anti-inflammatoire in vitro et in         par la suite la sécrétion d’AMP et induire
    La maturation finale du système immuni-                                                   vivo en agissant sur le facteur NF-kB, les           une protection vis-à-vis des infections [9].
    taire adaptatif se caractérise par le peuple-                                             CD et Mj qui sécrète de l’IL-10 et favorise
    ment de la muqueuse intestinale par des                                                   la différenciation des Treg au détriment des
    lymphocytes matures effecteurs T pro-in-                                                  Th17 [8]. Parmi les Bacteroidetes, Bacte-
    flammatoires (Th17), anti-inflammatoires                                                  roides fragilis et B. thetaiotaomicron ont
    (Treg) et des lymphocytes B (Figure 2).                                                   aussi été décrits comme exerçant une acti-
    En dehors des effets sur les macrophages                                                  vité anti-inflammatoire. B. fragilis synthétise
    et la différenciation des Th17, les SFB                                                   un polysaccharide A (PSA) qui supprime
    stimulent également le développement                                                      la production pro-inflammatoire d’IL-17, et
    des organes lymphoïdes et participent                                                     stimule la sécrétion anti-inflammatoire d’IL-
    à la différenciation des lymphocytes B en                                                 10 (Figure 3). Dans un modèle spécifique
                                                                                                                                                                                                Photo : Shutterstock.

    plasmocytes producteurs d’IgA qui vont                                                    de colite induite par Helicobacter hepati-
    contenir les bactéries pathogènes dans                                                    cus, PSA stimule le développement des
    le mucus [5]. D’autres bactéries com-                                                     organes lymphoïdes, stimule le lymphocyte
    mensales peuvent stimuler les réponses                                                    Treg et protège les souris [9].
12 AVRIL 2021 - Biocodex Microbiota Institute
FIGURE       4

A : différents types cellulaires pour la fixation des virus entériques, B : réponses antivirales au sein des cellules épithéliales intestinales
en cas d’infection

A                                                                                                                B

  Lumière intestinale                                                                                              Lumière
                                                                                                                   intestinale                                                 IFN type III             TLR3

                                     Rotavirus

                                     Novovirus CR6                               Plaque de Peyer

                                    Enterovirus 71
                                                                      Follicule                                                                        ARN viral       ARNdb
                                                                    lymophoïde

                                                                                                                                                               Récepteurs
                                                                                                                                                             intracellulaires
                                                             ILC3       NK

                                                                                                                                                                   NF-ΚB                    STAT       NF-ΚB Effecteurs
                                                                                  Macrophage                                                                                                                 antiviraux

         Entérocyte                                                                                                                                                             IFNλ                                IL-15
                                                                                                                                                                                IL-1α
                                                                                                                   Entérocytes
                                       Cellule caliciforme
         Cellule de Paneth             (en gobelet)
                                                                                                                        IFN type I
                                        Cellule                                                                                                                       ILC3                                 NK
         Cellule souche                 entéroendocrine              Cellule M           Cellule de touffe                                    CD
                                                                                                                                                  IFNβ
                                                                                                                                                                                 IL-22

(réalisée avec BioRender.com)                                                                                            Microbiote               Virus            STAT : Signal Transducers and Activators of Transcription

DIALOGUE MICROBIOTE-                                                      détection virale peut induire IL-la qui active
                                                                          les ILC3 pour produire l’IL-22. Cette IL                                              CONCLUSION
SYSTÈME IMMUNITAIRE                                                       protège des infections virales entériques
INTESTINAL POUR                                                           et agit en synergie avec les IFN de type
                                                                                                                                                           L’étude des relations entre
                                                                          III pour induire l’expression d’effecteurs
SE PROTÉGER DES                                                           antiviraux et d’IL-15. La reconnaissance
                                                                                                                                                           le microbiote intestinal et
                                                                                                                                                           l’immunité intestinale constitue
INFECTIONS VIRALES                                                        virale par les TLR-3 conduit à l’activation
                                                                          de la voie NF-kB et également à la produc-
                                                                                                                                                           une grande avancée dans la
                                                                                                                                                           recherche en gastroentérologie.
Parmi les virus entériques, le norovirus et                               tion d’IL-15. L’IL-15 active les lymphocytes
                                                                                                                                                           L’homéostasie intestinale
le rotavirus sont les principales causes de                               cytotoxiques (cellules NK). Les virus ayant                                      est maintenue grâce à la
gastro-entérites [12]. Les virus entériques                               traversé la barrière intestinale induisent la                                    reconnaissance de bactéries
infectent différents types cellulaires :                                  production d’IFN de type I par les macro-                                        commensales par les cellules
les entérovirus 71 infectent spécifique-                                  phages de la lamina propria (Figure 4B).                                         du système inné et les cellules
ment les cellules caliciformes, tandis                                    Certains virus entériques (rotavirus, réo-                                       de l’épithélium intestinal, soit
que le tropisme des rotavirus est dirigé                                  virus, entérovirus) sont capables de se lier                                     par un contact direct (cas de
vers les entérocytes principalement [13]                                  aux bactéries intestinales, favorisant la                                        SFB), soit via la synthèse de
(Figure 4A). Le microbiote intestinal agit                                pénétration dans les cellules épithéliales                                       métabolites issus du microbiote.
comme une barrière contre les infections                                  intestinales [13]. Les SFB, qui permettent                                       La rupture de l’homéostasie
virales entériques. Les virus ont évolué et                               un renouvellement épithélial, entraînent                                         (dysbiose intestinale, infections
se sont adaptés à leur hôte pour mettre                                   une protection à l’infection par le rotavirus                                    etc..) entraine une stimulation
en place des mécanismes qui leur per-                                     chez la souris en expulsant les cellules                                         des réponses innées et une
mettent de passer la barrière intestinale et                              infectées [14]. Les acides biliaires méta-                                       activation du système adaptatif.
d’échapper à l’immunité de barrière : en                                  bolisés par le microbiote intestinal jouent                                      Une mauvaise « gestion » de
effet, il est difficile d’infecter efficacement,                          également un rôle en protégeant l’intestin                                       l’inflammation pourrait entrainer
par voie orale, les souris par des virus                                  grêle (mais pas le côlon) de l’infection                                         l’apparition de maladies, telle
entériques humains [13]. La pénétration                                   aiguë par le norovirus chez la souris en                                         que le syndrome de l’intestin
du virus dans l’entérocyte entraîne la sé-                                favorisant la production d’IFN de type III au                                    irritable post-infectieux.
crétion d’interféron (IFN) de type III. La                                niveau du grêle [15].

Références
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Microbe 2020 ; 27 : 329-44. • 14. Shi Z, Zou J, Zhang Z, et al. Segmented filamentous bacteria prevent and cure rotavirus infection. Cell 2019 ; 179 : 644-658.e13. • 15. Grau KR, Zhu S, Peterson ST, et al. The
intestinal regionalization of acute norovirus infection is regulated by the microbiota via bile acid-mediated priming of type III interferon. Nat Microbiol 2020 ; 5 : 84-92.

                                                                                                                                                                                                                               7
12 AVRIL 2021 - Biocodex Microbiota Institute
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AR T I C L E CO MME N TÉ
RU B R I Q UE A D ULTE

  L’ANALYSE MULTI-OMIQUE                                                                          Par le Pr Harry Sokol
                                                                                                  Gastro-entérologie et nutrition,
LONGITUDINALE RÉVÈLE DES MÉCANISMES                                                               Hôpital Saint-Antoine,
                                                                                                  Paris, France
SPÉCIFIQUES DE SOUS-GROUPES
DE PATIENTS AU COURS DU SYNDROME
                                                                                                  crobiome intestinal [2]. De plus, les symp-
DE L’INTESTIN IRRITABLE                                                                           tômes du SII sont affectés par le régime
                                                                                                  alimentaire, la génétique de l’hôte et l’en-
Commentaire de l’article original de Mars et al. Cell 2020 [1]                                    vironnement, qui sont également connus
                                                                                                  pour moduler le microbiome intestinal hu-
                                                                                                  main [2]. Les preuves expérimentales sou-
   Le microbiome intestinal est impliqué dans de multiples troubles gastro-                       tenant le rôle du microbiome intestinal dans
   intestinaux chroniques humains. Or le manque de symétrie entre les études                      le SII sont basées sur des expériences de
   animales et humaine et l’absence d’une vue multi-omique intégrée des                           transplantation du patient vers des souris
   changements physiologiques spécifiques à la maladie rendent la détermination de                gnotobiotiques où sont reproduit certains
   son rôle difficile. Les auteurs ont intégré les données multi-omiques longitudinales           symptômes associés au SII-C et au SII-D
   du microbiome intestinal, du métabolome, de l’épigénome de l’hôte et du                        (temps de transit, sensation de douleur,
   transcriptome dans le contexte de la physiologie de l’hôte du syndrome                         perméabilité intestinale…). Cependant,
   de l’intestin irritable (SII). Ils ont identifié des variations de la composition              en l’absence de modèles animaux SII ro-
   et des fonctions microbiennes, spécifiques à des sous-types de SII et reliées                  bustes des études sur l’homme sont né-
                                                                                                  cessaires pour découvrir les interactions
   à la symptomatologie. Un sous-ensemble de changements identifiés dans les
                                                                                                  entre le microbiome intestinal et les voies
   métabolites microbiens correspond à des mécanismes physiologiques de l’hôte
                                                                                                  pathologiques spécifiques à l’homme. Les
   qui sont pertinents pour le SII. En compilant une succession de données, les
                                                                                                  études humaines sur le SII sont limitées
   auteurs ont identifié le métabolisme des purines comme une nouvelle voie du                    par un échantillonnage transversal le plus
   métabolisme hôte-microbiote dans le SII, avec une application thérapeutique                    souvent et un manque de stratification en
   potentielle. Cette étude souligne l’intérêt de l’échantillonnage longitudinal                  sous-groupes de patients, ce qui se re-
   et de l’intégration de données multi-omiques complémentaires pour identifier                   flète par un manque de concordance des
   les mécanismes fonctionnels qui peuvent servir de cibles thérapeutiques dans                   résultats obtenus dans le grand nombre
   une stratégie de traitement globale des maladies intestinales chroniques.                      d’études sur le microbiome [4]. L’influence
                                                                                                  bien décrite du transit gastro-intestinal sur
                                                                                                  le microbiome intestinal augmente encore
QUE SAIT-ON DÉJÀ                                fréquence des selles ; et c’est leurs formes      la variabilité des études. En outre, le SII,
À CE SUJET ?                                    qui définiront les sous-types du SII : à          comme d’autres troubles gastro-intesti-
                                                constipation prédominante (SII-C), à diar-        naux chroniques, est caractérisé par des
Le syndrome de l’intestin irritable (SII) est   rhée prédominante (SII-D) ou mixte (SII-M).       périodes de rémission et d’exacerbation
un trouble répandu dans le monde ca-            La pathogenèse du SII implique des modi-          des symptômes, et les échantillons trans-
ractérisé par une douleur ou un inconfort       fications de la motilité gastro-intestinale, de   versaux ne tiennent donc pas compte de la
abdominal récurrent. Principalement ob-         la sécrétion intestinale, de l’hypersensibilité   variabilité temporelle de la maladie. Enfin,
servé chez les femmes, le SII est associé       viscérale et de la perméabilité intestinale,      les différences inhérentes à la physiologie
à des changements dans la forme ou la           qui peuvent toutes être modifiées par le mi-      de l’hôte entre les études sur l’homme et
12 AVRIL 2021 - Biocodex Microbiota Institute
FIGURE 1 Altération des métabolites microbiens au cours du SII: Taux de tryptamine,
                                                                                 d’acide biliaire primaire et d’hypoxanthine dans les selles

      POINTS CLÉS                                                                                                      Tryptamine                                                  Acide biliaire primaire                                                  Hypoxanthine

                                                                                                                                            sum (log10 (abondance relative)
                                                                        log10 (ng/mg matières fécales)
                                                                                                         2                 **                                                                                                                                          *
      • Les fonctions du microbiote                                                                                                                                                                   ***                                          1
                                                                                                                                                                                                                                                                 **
                                                                                                                                                                                                  *

                                                                                                                                                                                                                    log10 (abondance relative)
        intestinale sont altérées                                                                                                                                             10
                                                                                                         1                                                                                  **
                                                                                                                                                                                                                                                 0,8
        au cours du SII avec des                                                                         0                                                                    8
        différences entre SII-C et SII-D                                                                                                                                                                                                         0,6
                                                                                                         -1                                                                   6
      • L’augmentation de la                                                                                                                                                                                                                     0,2
        production de tryptamine et la                                                                   -2                                                                   4
                                                                                                                                                                                                                                                   0
        diminution de la transformation                                                                  -3                                                                   2
        des acides biliaires pourraient                                                                                                                                                                                                          -0,2
        jouer un rôle dans le SII-D                                                                           Sujets      SII-C     SII-D                                          Sujets        SII-C      SII-D                                       Sujets        SII-C   SII-D
      • Une surconsommation                                                                                   sains                                                                sains                                                                sains
        d’hypoxanthine par le
        microbiote et les cellules
        de l’hôte pourraient jouer                                               analyse métabolomique a été réalisée sur                                                                        une réponse compensatrice avec augmen-
        un rôle dans le SII en altérant                                          les échantillons de selles. Une analyse mé-                                                                     tation de la récupération des purines. Les
        le niveau énergétique des                                                tabolomique et les mesures des cytokines                                                                        faibles niveaux de nucléotides puriques
        cellules épithéliales intestinale                                        ont été réalisées sur les échantillons de                                                                       pourraient entraîner une diminution de l’état
                                                                                 sérum. Enfin, un séquençage 16S, et des                                                                         d’énergie épithéliale et de la capacité à ré-
                                                                                 analyses du métabolome, du transcrip-                                                                           parer la muqueuse, pouvant en partie jouer
                                                                                 tome et du méthylome ont été réalisées sur                                                                      un rôle dans la physiopathologie du SII.
l’animal ont été un obstacle à l’avancement                                      les biopsies coliques.
de notre compréhension des rôles méca-                                                                                                                                                           QUELLES SONT
nistiques du microbiome intestinal dans                                          Les auteurs ont identifié des différences                                                                       LES CONSÉQUENCES
le SII. Les auteurs ont réalisé une étude                                        dans la composition et la diversité du mi-                                                                      EN PRATIQUE ?
longitudinale dans des sous-groupes de                                           crobiote intestinal entre les sujets sains et
patients avec SII, intégrant des mesures                                         les patients SII-C ou SII-D.                                                                                    Ces données suggèrent un rôle du micro-
multi-omiques, y compris le métagénome                                                                                                                                                           biote intestinal dans la physiopathologie du
microbien, le transcriptome de l’hôte et le                                      L’analyse métabolomique des selles a ré-                                                                        SII avec des différences entre le SII-C et le
méthylome avec évaluation des fonctions                                          vélé une augmentation de la tryptamine,                                                                         SII-D. D’autre part, ces résultats pointent
de l’hôte. Cela a permis d’identifier des mé-                                    un métabolite du tryptophane produit par                                                                        vers le potentiel rôle d’un défaut en nu-
canismes spécifiques au sous-type de SII,                                        certaines bactéries intestinales, chez les                                                                      cléotides puriques, notamment via une
induits par un métabolisme microbien alté-                                       patients avec SII-D (Figure 1). La tryp-                                                                        surconsommation d’hypoxanthine par le
ré, qui correspondait à des changements                                          tamine ayant un effet d’accélération du                                                                         microbiote et les cellules de l’hôte. Ces ré-
simultanés dans la physiologie de l’hôte.                                        transit par une action sur le récepteur à la                                                                    sultats ouvrent la voie vers des traitements
                                                                                 sérotonine 5-HT4, pourrait ainsi jouer un                                                                       stimulant la production d’hypoxanthine
QUELS SONT LES PRINCIPAUX                                                        rôle dans le phénotype de ces patients.                                                                         microbienne ou inhibant la xanthine oxy-
RÉSULTATS APPORTÉS                                                               De manière similaire, la proportion d’acide                                                                     dase localement dans l’intestin.
PAR CETTE ÉTUDE ?                                                                biliaire primaire était plus élevée chez les
                                                                                 patients avec SII-D, témoignant d’un défaut
Ici, les auteurs ont conduit une étude pros-                                     de transformation par le microbiote. Des
pective observationnelle longitudinale avec                                      expériences in vitro suggéraient que les
analyse multi-omique portant sur le micro-                                       acides biliaires primaires augmentent la                                                                                   CONCLUSION
biome intestinal et l’hôte. Des sujets sains                                     sécrétion colique et pourraient donc aussi
ont été comparés à des patients avec SII-C                                       participer au phénotype.                                                                                                Cette étude multi-omique
et SII-D. Un total de 77 participants ont
                                                                                                                                                                                                         longitudinale intégrée montre
fourni au moins un échantillon de selles                                         Enfin, l’intégration des données mul-
                                                                                                                                                                                                         l’intérêt des études humaines
(au total 474 échantillons de selles ont été                                     ti-omiques a identifié un nouveau méca-
obtenus), et 42 participants ont eu une                                          nisme potentiel dans le SII. Les résultats                                                                              longitudinales et met en
sigmoïdoscopie permettant d’obtenir des                                          suggèrent qu’il existe chez les patients SII                                                                            lumières des altérations
biopsies du côlon. Pour identifier les fac-                                      une dégradation accrue des nucléotides                                                                                  fonctionnelles du microbiote
teurs microbiens déterminant les symp-                                           puriques, et notamment de l’hypoxanthine,                                                                               au cours du SII qui sont
tômes spécifiques des sous-types de SII,                                         par le microbiote et l’hôte, ce qui induit un                                                                           possiblement impliqué dans la
un séquençage métagénomique et une                                               stress au niveau colique. Cela conduirait à
                                                                                                                                                                                                         physiopathologie. Les nouvelles
                                                                                                                                                                                                         pistes identifiées pourraient
Références                                                                                                                                                                                               représenter de nouvelles cible
• 1. Mars RAT, Yang Y, Ward T, et al. Longitudinal multi-omics reveals subset-specific mechanisms underlying irritable bowel syndrome. Cell
2020 ; 182 : 1460-73.e17. Erratum in : Cell 2020 ; 183 : 1137-40. • 2.Bhattarai Y, Muniz Pedrogo DA, Kashyap PC. Irritable bowel syndrome: a                                                             thérapeutiques.
gut microbiota-related disorder? Am J Physiol Gastrointest Liver Physiol 2017 ; 312 : G52–G62. • 3. Edogawa S, Edwinson AL, Peters SA, et
al. Serine proteases as luminal mediators of intestinal barrier dysfunction and symptom severity in IBS. Gut 2020 ; 69 : 62-73. • 4. Pittayanon
R, Lau JT, Yuan Y, et al. Gut microbiota in patients with irritable bowel syndrome- a systematic review. Gastroenterology 2019 ; 157 : 97-108.

                                                                                                                                                                                                                                                                                      9
12 AVRIL 2021 - Biocodex Microbiota Institute
Photo : Shutterstock.
AR T I C L E CO MME N TÉ
RU B R I Q UE E N FA N T

  LE MICROBIOTE DUODÉNAL D’ENFANTS
AYANT UNE DÉNUTRITION CHRONIQUE                                                                 Par le Pr Emmanuel Mas
                                                                                                Gastro-entérologie et nutrition,
AVEC RETARD DE CROISSANCE                                                                       Hôpital des Enfants, Toulouse, France

SECONDAIRE À UNE ENTÉROPATHIE
Commentaire de l’article original de Chen et al.
(N Engl J Med 2020)[1]                                                                          QUELS SONT LES PRINCIPAUX
                                                                                                RÉSULTATS APPORTÉS
   L’entéropathie environnementale (EE) est un trouble énigmatique de l’intestin grêle          PAR CETTE ÉTUDE ?
   qui jouerait un rôle dans la sous-nutrition infantile, un problème de santé mondial          Cette étude a inclus 110 nourrissons âgé
   majeur. La définition de l’incidence de ce trouble a été entravée par la difficulté          en moyenne de 18 mois, originaires de
   de prélever directement des échantillons de la muqueuse de l’intestin grêle et du            Dhaka, Bengladesh, qui avaient une dénu-
   microbiote.                                                                                  trition chronique avec retard de croissance,
   Cette étude se concentre sur 110 jeunes enfants présentant un retard de croissance           définie par intervention nutritionnelle. Les
   linéaire et vivant dans un bidonville du Bangladesh, et n’ayant pas bénéficié                biopsies duodénales confirmaient une EE
   d’une intervention nutritionnelle. Les auteurs ont pratiqué une endoscopie chez              chez 80 d’entre eux. Le microbiote d’aspi-
   80 enfants dont la biopsie avait confirmé la présence d’une EE et qui disposaient            rations duodénales a pu être analysé pour
   d’échantillons de plasma et de duodénum.                                                     36 de ces nourrissons ; un groupe de 14
   Parmi les souches bactériennes obtenues chez les enfants, les niveaux                        taxa bactériens était présent chez plus de
   absolus d’un groupe de 14 taxa communs (non typiquement classés comme                        80 % de ceux-ci et corrélé négativement au
   entéropathogènes) ont été négativement corrélés avec la croissance linéaire                  rapport taille/âge (r = – 0,049, p = 0,003)
                                                                                                (Figure 1). L’étude protéomique des biop-
   et positivement corrélés avec les protéines duodénales impliquées dans les
                                                                                                sies duodénales a montré une corrélation
   réponses immuno-inflammatoires. La représentation de ces 14 taxa duodénaux
                                                                                                positive entre ces 14 taxa et 10 protéines
   dans le microbiote fécal était significativement différente de celle des échantillons
                                                                                                dont 2 peptides antimicrobiens, un mar-
   provenant d’enfants en bonne santé. L’entéropathie de l’intestin grêle s’est
                                                                                                queur de l’inflammation intestinale (LCN2),
   développée chez des souris gnotobiotiques qui avaient été colonisées à partir d’une          et négative avec 10 protéines produites par
   culture de souches bactériennes duodénales provenant d’enfants atteints de DEE.              des entérocytes (Figure 2).
   Ces résultats confirment l’existence d’une relation de cause à effet entre le retard de
   croissance et les composants du microbiote de l’intestin grêle et l’entéropathie, et         Chez les 80 nourrissons ayant une EE
   justifient la mise au point de thérapies ciblant ces contributions microbiennes à l’EE.      prouvée, l’étude protéomique plasmatique
                                                                                                a montré une corrélation positive forte avec
                                                                                                REG3A et LCN2.
QUE SAIT-ON DÉJÀ                                entité caractérisée par une atrophie villosi-
À CE SUJET ?                                    taire associant une diminution de la surface    La comparaison du microbiote fécal de
                                                intestinale et des capacités d’absorption,      nourrissons ayant une EE et de 27 témoins
La proportion de dénutrition chronique avec     une altération de la barrière intestinale et    a mis en évidence une augmentation signi-
ralentissement statural est de 25 % chez les    une inflammation de la muqueuse. Des            ficative des espèces du genre Veillonella,
nourrissons qui ont eu préalablement plus       données plus récentes suggèrent qu’une          bactéries qui étaient corrélées le plus forte-
de 5 épisodes diarrhéiques. Ces infections      dysbiose du microbiote du tractus digestif      ment aux protéines duodénales impliquées
intestinales répétées entraînent une EE,        haut serait présente dans l’EE.                 dans l’inflammation digestive.
FIGURE               1

 Corrélation entre la dénutrition chronique avec retard de croissance (z-score du rapport taille/âge) et la quantité de Veillonella, Streptoccocus
 et Rothia mucilaginosa .
                                       • Veillonella sp.                                              • Streptoccocus sp.                                                  • Rothia mucilaginosa
                       1                                                                     -1                                                                   -1
lors de l’endoscopie

                                                                      lors de l’endoscopie

                                                                                                                                           lors de l’endoscopie
 Rapport taille/âge

                                                                       Rapport taille/âge

                                                                                                                                            Rapport taille/âge
                       2                                                                     -2                                                                   -2

                       3                                                                     -3                                                                   -3
                                           r = -0,44                                                      r = -0,40                                                                 r = -0,45
                       4                   P = 0,007 ; Q = 0,06                              -4           P = 0,015 ; Q = 0,10                                    -4                P = 0,006 ; Q = 0,06

                           0       1       2       3          4   5                               3       4         5            6                                     1    2       3        4           5
                                          Taux absolu                                                    Taux absolu                                                              Taux absolu
                                        (normalisé log10)                                              (normalisé log10)                                                        (normalisé log10)

 Après avoir cultivé 39 souches bacté-                                      fonctionnel, les résultats montraient chez
 riennes à partir d’aspirations duodénales                                  ces souris une augmentation des ARNm
 de nourrissons ayant une entéropathie                                      de peptides anti-microbiens (Reg3b et
 environnementale, dont 11 des 14 taxa,                                     Reg3g), d’une métalloprotéinase (MMP8)                                                POINTS CLÉS
 celles-ci ont été administrées par gavage                                  et une diminution des ARNm codant pour
 oral à des souris nourries avec une alimen-                                des protéines des jonctions serrées. Ces                                              • L’entéropathie environne-
 tation similaire à celle d’un nourrisson de                                altérations de la réponse immunitaire innée                                             mentale est favorisée par
 18 mois de Dhaka. Vingt-trois de ces bac-                                  et de la barrière épithéliale pourraient                                                une perturbation du micro-
 téries étaient retrouvées à une abondance                                  expliquer la translocation systémique de                                                biote intestinal au niveau du
 relative > 0,1 % à au moins un niveau du                                   bactéries dans la rate (Escherichia coli et                                             duodénum
 tractus digestif. Les souris témoins rece-                                 Enteroccocus hirae).                                                                  • Cette dysbiose duodénale
 vaient un gavage oral du microbiote caecal                                                                                                                         est corrélée à la dénutrition
 de souris conventionnelles. À la différence                                QUELLES SONT LES CONSÉ-                                                                 chronique
 des souris témoins, il existait chez les souris                            QUENCES EN PRATIQUE ?                                                                 • La pathologie est transmissible
 recevant les bactéries « entéropathie envi-                                                                                                                        à la souris, ce qui pourra
 ronnementale » un infiltrat inflammatoire                                  Cette étude montre qu’il est utile de réali-                                            aider dans la connaissance
 de la lamina propria de l’intestin grêle à                                 ser une endoscopie digestive haute avec                                                 des mécanismes physio-
 cellules mononucléées, ainsi que des ano-                                  biopsies pour confirmer l’existence d’une                                               pathologiques impliqués
 malies épithéliales et des anomalies archi-                                entéropathie environnementale.                                                          (inflammation intestinale,
 tecturales avec allongement des cryptes.                                                                                                                           anomalies de la barrière
 Ces anomalies avaient une localisation                                     Cependant, il n’est pas encore possible de                                              épithéliale et altérations
 par plaques dans l’intestin grêle mais elles                               recommander une prise en charge théra-                                                  immunitaires de la
 ne touchaient pas le côlon. Au niveau                                      peutique spécifique.                                                                    reconnaissance bactérienne)
                                                                                   n                                                 ica
                                                                                ge
                                                                                 s

         FIGURE
                                                          hn s sp an

                               2
                                                        Jo ella ces eleg .
                                                           ti a iu sa
                                                                              p

                                                                             no

                                                                                                                                                                       CONCLUSION
                                                        Ge nom tella m s

                                                                 ell sp ii
                                                        Ac ulic cter ino

                                                        Le mop ubfl sp.
                                                        Le otr ilus va
                                                        Gr yne ucil sp.

                                                               ot ia ah

                                                                          ni
                                                        Pr otri hia p.

 Top 10 des corrélations
                                                        Fu son p. .

                                                          pt h a
                                                        Ha seri eriu .

                                                                      ela
                                                                    am .
                                                          an ba ag

                                                            is ct p
                                                            e as m

                                                                        s
                                                          ev ch sh
                                                            r m s
                                                           t co .

                                                        Ne oba lla s
                                                        Ro pto sp
                                                        Co hia ccu

 entre les 14 principaux
                                                          re lla

                                                                    e
                                                            m y

                                                          pt ic

 taxa bactériens et les
                                                        St one

 protéines duodénales.                                                                                                                                            Les résultats de cette étude
                                                           ill

                                                           s
                                                        Ve

                                                                                                                                                                  suggèrent une relation de
                                                                                                                     AK1
                                                                                                                                                                  causalité entre des bactéries
                                                                                                                     ITPA                                         du duodénum, l’entéropathie
                                                                                                                     CAMP                                         environnementale et une
                                                                                                                     CHI3L1                                       dénutrition chronique avec
                                                                                                                     LCN2                                         retard de croissance statural.
                                                                                                                     ICOSLG                                       Il serait donc intéressant pour
                                                                                                                     PGLYRP1                                      ces enfants de développer
                                                                                                                     RETN                                         des traitements ciblant cette
                                                                                                                                                                  dysbiose.
                                                                                                                     VNN2
                                                                                                                     MMP8

                                                                                                                                                  Référence
                                                                                                                                                  1. Chen RY, Kung VL, Das S, et al. Duodenal microbiota in stunted
                                                       -0,7                                   0                   0,7                             undernourished children with enteropathy. N Engl J Med 2020; 383:
                                                                                                                                                  321-33.

                                                                                                                                                                                                                      11
Photo : Shutterstock.
M IC R O B I OT E & COVID -1 9

    COVID-19 ET MICROBIOTE INTESTINAL                                                             Par le Pr Tao Zuo
                                                                                                  Institut de recherche en gastroentérologie
                                                                                                  de SYSU, Institut de gastroentérologie
   Le microbiote intestinal, avec ses fractions bactériennes, fongiques et virales,               du Guangdong, sixième hôpital affilié
   colonise les intestins humains et régule l’immunité de l’hôte contre l’invasion                de l’Université Sun Yat-Sen, Guangzhou,
   d’agents pathogènes. La composition largement hétérogène du microbiote                         Chine
   intestinal (MI) entre les personnes pourrait influencer les réponses immunitaires
   de l’hôte à l’infection au SARS-CoV-2, conduisant à des symptômes et des issues
   différents de la Covid-19. Par ailleurs, même si l’infection au SARS-CoV-2 provoque            terium prausnitzii (connue pour être une
   principalement des symptômes respiratoires, elle dérègle profondément l’immunité               bactérie anti-inflammatoire) et la sévérité
                                                                                                  de la maladie a été observée.
   systémique de l’hôte et affecte le système gastro-intestinal avec des conséquences
   à court comme à long terme sur le microbiote intestinal. Nous passons ici en revue             Le SARS-CoV-2 utilise le récepteur de l’en-
   les preuves actuelles sur l’impact de la Covid-19 sur le MI humain ainsi que les               zyme 2 de conversion de l’angiotensine
   associations entre la composition du GM et la sévérité de la Covid-19.                         (ACE2) pour pénétrer chez l’hôte et ce
                                                                                                  récepteur est fortement exprimé à la fois
                                                                                                  dans les voies respiratoires et dans les
La Covid-19 est une maladie respiratoire        de l’hôte. Il est donc de la plus haute im-       voies digestives [4]. L’ACE2 joue un rôle
provoquée par un nouveau coronavirus            portance de comprendre si le microbiote           important pour contrôler l’inflammation
(SARS-CoV-2) qui touche encore des di-          intestinal module la sensibilité de l’hôte à      intestinale et l’écologie microbienne intes-
zaines de millions de personnes aujourd’hui     l’infection au SARS-CoV-2 et la sévérité de       tinale [5]. Quatre espèces Bacteroides, B.
dans le monde. Même si la majorité des          celle-ci ainsi que l’impact de l’infection au     dorei, B. thetaiotaomicron, B. massiliensis
patients Covid-19 présentent des symp-          SARS-CoV-2 sur le GM de l’hôte et ses effets      et B. ovatus, ont été rapportées comme
tômes respiratoires, près de 20 % d’entre       en aval à long terme sur la santé humaine.        étant inversement associées à l’expression
eux ont des symptômes gastro-intestinaux,                                                         de l’ACE2 dans l’intestin murin [6]. Il est
notamment des diarrhées [1], suggé-             MICROBIOTE BACTÉRIEN                              intéressant de noter que leur abondance
rant que le tube digestif est un site extra-    INTESTINAL ET COVID-19                            respective dans le microbiome fécal a
pulmonaire d’expression de la maladie et                                                          également montré une corrélation inverse
d’infection au SARS-CoV-2. De plus, la Co-      Les patients Covid-19 présentent des al-          avec la charge virale du SARS-CoV-2 dans
vid-19 présente un large éventail de sévéri-    térations importantes du microbiote bac-          les matières fécales chez les patients Co-
té de la maladie, allant de formes asympto-     térien intestinal comparativement aux             vid-19 au cours de l’évolution de la ma-
matiques à des formes légères, des formes       personnes en bonne santé, caractérisées           ladie. Ces observations suggèrent que
sévères et jusqu’à des formes critiques         par une déplétion des commensaux bé-              le MI bactérien humain est affecté par la
associées à une insuffisance respiratoire       néfiques et un enrichissement en agents           Covid-19 et pourrait calibrer les défenses
voire au décès [2]. Le tractus gastro-          pathogènes opportunistes dans l’intestin          de l’hôte contre l’infection au SARS-CoV-2.
intestinal est le plus vaste organe immu-       (Figure 1) [3]. La déplétion des symbiotes
nitaire chez l’être humain, jouant un rôle      intestinaux a persisté y compris après la         MICROBIOME FONGIQUE
essentiel dans la défense de l’hôte contre      résolution de la Covid-19. L’abondance            ET COVID-19
les infections pathogènes. Des milliers         initiale (lors de l’hospitalisation du patient)
de milliards de micro-organismes vivent         des bactéries Coprobacillus, Clostridium          Le tractus gastro-intestinal abrite égale-
dans l’intestin humain et le colonisent – des   ramosum et Clostridium hathewayi a mon-           ment un grand nombre de champignons,
bactéries, des champignons, des virus           tré une corrélation positive avec la sévérité     collectivement connus sous le nom de my-
et d’autres formes de vie, collectivement       de la Covid 19, tandis qu’une corrélation         cobiome (microbiome fongique), qui ont
appelés microbiote – régulant l’immunité        inverse entre l’abondance de Faecalibac-          été impliqués dans l’assemblage du MI
FIGURE          1   Le microbiome intestinal dans la Covid-19
                                  SAIN                                                                             Covid-19 (Altérations prolongées dans le microbiome intestinal)
• Bactéries commensales prévalentes : Eubacterium,                                  • Bactéries symbiotiques commensales
  Faecalibacterium prausnitzii, Lachnospiraceae taxa, Roseburia                       Eubacterium ventriosum, Faecalibacterium prausnitzii, Lachnospiraceae taxa, Roseburia
       Production d’acides gras à chaîne courte                                     • Agents pathogènes opportunistes
       (notamment butyrate)                                                           Bactéries : Clostridium hathewayi, Actinomyces viscosus, Bacteroides nordii
       Maintien de l’immunité                                                         Champignons : Candida albicans, Candida auris, Aspergillus flavus, Aspergillus niger
       Propriétés anti-inflammatoires                                               • Altération du virome
• Mycobiome hétérogène                                                                Virus de la marbrure légère du piment (virus à ARN) et multiples lignées de bactériophages (virus à ADN)
• Virome : virome ARN et virome ADN sans infectivité du SARS-                         Virus à ADN eucaryotes issus de l’environnement
  CoV-2 dans l’intestin                                                                                                                                                                                    SARS-CoV-2
                                                                                                                                                                        Bacteroides dorei

                                                                                                                                                                        Bacteroides thetaiotaomicron

                                                                                                                                                                        Bacteroides massiliensis

                                                                                                                                                                        Bacteroides ovatus
                                                                                                                                                                                                                   ACE2

                                                                                                                                                                        Erysipelotrichaceae

                                                                                                                                                                         Multiples espèces                        Sévérité
                                                                                                                                                                         de bactériophages
                                                                                                                                                                                                                  Âge

et le développement immunitaire [7]. Les                                   « quiescente » au SARS-CoV-2 dans le                                       de neutrophiles, indiquant que les virus
patients atteints de la Covid-19 présen-                                   tractus gastro-intestinal et un risque poten-                              intestinaux pourraient adapter la réponse
taient également une altération du myco-                                   tiel de transmission féco-orale. Les patients                              immunitaire de l’hôte à l’infection au SARS-
biome intestinal, caractérisée par un en-                                  avec une telle activité gastro-intestinale                                 CoV-2. Parmi les espèces de virus à ADN
richissement en Candida albicans et des                                    du SARS-CoV-2 avaient un MI ayant une                                      associées à la sévérité de la Covid-19,
configurations du mycobiome hautement                                      composition et des fonctions anormales,                                    40 % ont montré une corrélation inverse
hétérogènes (Figure 1) [8]. La diversité                                   avec notamment une abondance élevée                                        avec l’âge, ce qui pourrait étayer l’obser-
du mycobiome fécal chez les patients at-                                   d’agents pathogènes opportunistes et une                                   vation selon laquelle les sujets âgés pré-
teints de la Covid-19 lors de leur sortie de                               capacité renforcée de biosynthèse des                                      sentent un risque plus élevé de dévelop-
l’hôpital était 2,5 fois plus élevée que chez                              nucléotides et des acides aminés et de                                     per une forme plus sévère de la Covid-19.
les personnes en bonne santé. Les agents                                   métabolisme des glucides (glycolyse) [9].
pathogènes fongiques opportunistes, Can-
dida albicans, C. auris et Aspergillus fla-                                Le tractus gastro-intestinal humain abrite
vus, étaient fortement présents dans les                                   également en abondance des virus et des                                                CONCLUSION
fèces des patients Covid-19 au cours de                                    phages collectivement connus sous le nom
l’évolution de la maladie. Deux agents pa-                                 de virome intestinal. Les patients Covid-19                                        En résumé, l’ensemble des
thogènes fongiques associés à des symp-                                    avaient une sous-représentation du virus de                                        preuves disponibles suggère
tômes respiratoires, A. flavus et A. niger,                                la marbrure légère du piment (virus à ARN)                                         que le MI humain (microbiote
ont été détectés dans les échantillons fé-                                 et de multiples lignées de bactériophages                                          bactérien, mycobiome
caux d’un sous-ensemble de patients at-                                    (virus à ADN) ainsi qu’un enrichissement en                                        et virome) est altéré dans la
teints de la Covid-19, y compris après la                                  virus à ADN eucaryotes issus de l’environ-                                         Covid-19. Ce dérèglement
                                                                                                                                                              persiste, y compris après
résolution de la maladie. Un mycobiome                                     nement dans les échantillons fécaux com-
                                                                                                                                                              la résolution de la maladie,
intestinal instable et une dysbiose prolon-                                parativement aux patients non-Covid-19                                             ce qui fait potentiellement peser
gée ont persisté chez environ 30 % des                                     (Figure 1) [10]. Le virome fécal dans l’in-                                        une menace à long terme pour
patients atteints de la Covid-19.                                          fection au SARS-CoV-2 montrait une aug-                                            la santé de l’hôte. La composi-
                                                                           mentation de la capacité de codage des                                             tion du microbiote intestinal est
                                                                           gènes associés au stress, à l’inflamma-                                            associée à la réponse immuni-
VIROME INTESTINAL                                                                                                                                             taire de l’hôte à l’infection au
ET COVID-19                                                                tion et à la virulence. Initialement (lors de
                                                                           l’hospitalisation du patient), l’abondance                                         SARS-CoV-2 et à la sévérité
                                                                                                                                                              de la Covid-19. Des recherches
Grâce au séquençage aléatoire de l’ARN                                     fécale du virus à ARN, le virus des taches
                                                                                                                                                              supplémentaires sont néces-
viral, une signature d’infection virale intesti-                           chlorotiques du piment et de multiples es-                                         saires pour explorer les effets
nale active a été retrouvée chez 47 % des                                  pèces de bactériophages étaient inverse-                                           à long terme de la Covid-19
patients atteints de la Covid-19, y compris                                ment corrélés à la sévérité de la Covid-19.                                        et pour améliorer le MI et l’im-
en l’absence de symptômes gastro-intes-                                    Ces virus étaient également inversement                                            munité de l’hôte face à cette
tinaux et après élimination respiratoire du                                associés aux taux sanguins de protéines                                            pandémie virale sans précédent.
SARS-CoV-2 [9], suggérant une infection                                    pro-inflammatoires, de globules blancs et

Références
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