ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : POUR UNE COORDINATION RÉGIONALE - CESER Auvergne-Rhône-Alpes

 
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Juin 2018

ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT :
ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : POUR UNE
COORDINATION RÉGIONALE
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Le CESER en quelques mots…

Le Code Général des collectivités territoriales précise en son article L 4134-1 :
« Le conseil économique, social et environnemental régional est, auprès du conseil régional
et du président du conseil régional, une assemblée consultative.
Il a pour mission d'informer le conseil régional sur les enjeux et conséquences économiques,
sociaux et environnementaux des politiques régionales, de participer aux consultations
organisées à l'échelle régionale, ainsi que de contribuer à des évaluations et à un suivi des
politiques publiques régionales. »
Le CESER est l’assemblée consultative, représentative de la vie économique, sociale et
environnementale de la région. Elle émet des avis (saisines) et contributions (autosaisines).
Expression de la société civile organisée dans toute sa diversité, les propositions du CESER
éclairent les choix des décideurs régionaux.
Ainsi, le CESER concourt à l’administration de la région aux côtés du Conseil régional et de
son Président.

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Avis n°2018-03

Rapporteure
Mme Anne-Marie ROBERT
Présidente du Groupe de travail B

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                                    RESULTATS

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                                         POUR                            CONTRE               ABSTENU.E     pris part au
                                                                                                                vote

                                                                Cet avis a été adopté par le
                                      Conseil, Economique, Social et Environnemental régional Auvergne-Rhône-Alpes
                                                     lors de son Assemblée Plénière du 12 juin 2018.

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Sommaire

Sommaire
Préambule _________________________________________________________________ 1
Introduction ________________________________________________________________ 2
1.     Rappel des idées-forces et des interrogations du CESER depuis 2016 ____________ 4
     1.1. L’accès au très haut débit numérique : accès à un réseau stratégique et clé de
     l’équité territoriale ________________________________________________________ 4
     1.2. Le bon débit est celui dont on ne se soucie plus lorsqu’on en a besoin, au bon
     moment, au bon endroit, à un prix acceptable __________________________________ 5
     1.3. De nombreuses interrogations et inquiétudes exprimées en juillet 2016 par
     le CESER ________________________________________________________________ 7
     1.4. Comparaison des recommandations du CESER avec la feuille de route du Conseil
     régional de février 2017____________________________________________________ 8
2.     La donne nationale actuelle de la couverture en très haut débit numérique ______ 10
     2.1. Réseaux filaires et hertziens, deux systèmes imbriqués mais répondant à deux
     logiques économiques différentes __________________________________________ 10
       2.1.1. Le système français de financement des réseaux filaires fixes : un système
       mixte public-privé ______________________________________________________ 10
       2.1.2.   Le système de financement des réseaux hertziens, une logique globalement
       privée   _____________________________________________________________ 12
     2.2.   L’état des déploiements _____________________________________________ 13
     2.3. La question clé de l’ouverture concurrentielle pour l’accès des entreprises à la
     fibre optique ____________________________________________________________ 16
     2.4.   Les récentes dispositions de l’État sur les réseaux fixes et mobiles _________ 19
       2.4.1. Le gouvernement a annoncé trois jalons pour le déploiement toutes
       technologies __________________________________________________________ 19
       2.4.2.   Une impasse budgétaire pour achever les réseaux FttH ? _____________ 21
       2.4.3. L’investissement privé sur réseau fixe appelé à relayer l’apport public : les
       appels à manifestation d’engagements locaux (AMEL) ________________________ 21
       2.4.4. Pour les opérateurs en zone privée, passer des intentions de déploiement
       des opérateurs de réseau fixe aux engagements de résultat ___________________ 22
       2.4.5.   Les nouvelles dispositions sur le réseau hertzien à très haut débit ______ 22
3.     La donne régionale en Auvergne-Rhône-Alpes _______________________________ 27
     3.1.   Peu d’éléments d’informations sur les technologies autres que la fibre optique 27
     3.2.   Le déploiement en fibre optique ______________________________________ 28

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    3.2.1.      Données générales _____________________________________________ 28
    3.2.2. Des réseaux d’initiative publique au profil contrasté dans la relation avec
    les opérateurs _________________________________________________________ 31
  3.3.   La politique régionale en matière de couverture mobile ___________________ 38
4. Préconisations du CESER pour la meilleure couverture d’Auvergne-Rhône-Alpes en
très haut débit numérique ___________________________________________________ 39
  La Région et les collectivités locales doivent exercer toutes leurs responsabilités. ___ 40
  La Région doit interpeller l’État et/ou l’ARCEP. ________________________________ 44
  La Région doit développer une relation de réciprocité avec les opérateurs. _________ 46
Conclusion ________________________________________________________________ 47
Bibliographie     ___________________________________________________________ 48
Glossaire des sigles ________________________________________________________ 51
Déclarations des groupes____________________________________________________ 53
Annexes __________________________________________________________________ 62
Contributeurs _____________________________________________________________ 74
Remerciements ____________________________________________________________ 75
Contacts _________________________________________________________________ 76

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         Préambule

         Consulté par le Président du Conseil régional sur les voies et moyens d’optimiser la
         couverture numérique régionale en Très Haut Débit, le CESER considère ce dossier comme
         de la plus haute importance. Il s’inscrit en effet de manière parfaitement emblématique
         dans le « fil rouge » qu’il retient pour ses travaux de la nouvelle mandature : l’équilibre des
         territoires.
         Enrichissant son expérience, accumulée depuis plusieurs années, l’assemblée représentant
         les forces vives tente d’abord dans le présent avis de démêler l’imbrication nationale entre
         les deux systèmes de réseaux filaires et hertziens. La compréhension de ces systèmes, ainsi
         que du jeu des acteurs et de modèles économiques différents, est fondamentale pour
         appréhender les marges de manœuvre régionale et locale.
         Au vu du panorama d’un avancement différencié des déploiements au sein d’Auvergne-
         Rhône-Alpes, le CESER formule des préconisations très concrètes à l’intention de
         l’ensemble des parties prenantes pour réussir la couverture numérique au bon débit avec
         le meilleur rapport qualité-prix.
         Il appelle notamment la Région à jouer un rôle clé de coordination, dans le respect du
         principe de subsidiarité.

         Antoine QUADRINI,
         Président du CESER Auvergne-Rhône-Alpes

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                Introduction

               Par courrier en date du 26 janvier 2018, le Président du Conseil régional a sollicité le CESER
     SAISINE   pour formuler constats et propositions sur l’accès à Internet à très haut débit et à la 4G. Il
               soulignait alors combien « dans un paysage très dynamique, la coordination des initiatives
               publiques et privées est nécessaire pour lutter contre les fractures territoriales en matière
               de télécommunications, résorber les zones blanches et assurer la couverture de tout notre
               territoire, dans des coûts maitrisés ».

               De par sa formulation, cette saisine est donc centrée sur les réseaux d’infrastructures ; elle
    RAPPELS    fait suite à celle dont le CESER avait fait l’objet en mars 2016 pour faire converger les
               politiques publiques numériques (réseaux et usages) et à laquelle il avait répondu dans son
               avis « Pour une dynamique numérique en Auvergne-Rhône-Alpes » adopté le 5 juillet 2016.
               Le CESER avait à l’époque concentré sa réflexion sur les réseaux fixes à très haut débit.

               La réflexion à conduire en la matière s’inscrit par ailleurs pleinement dans le cadre de
    CONTEXTE   l’élaboration du SRADDET (schéma régional d’aménagement, de développement durable et
               d’égalité des territoires). Comme indiqué dans la délibération du 29 mars 2018 du Conseil
               régional : « La thématique des infrastructures numériques sera traitée de manière
               transversale dans l’ensemble du schéma Ambition Territoires 2030. ». L’aménagement
               numérique restera donc au centre des préoccupations de la Région avec pour objectif d’être
               utile pour les habitants, les territoires, le rayonnement régional et l’avenir.

               Dans le présent avis, le CESER s’est donc interrogé sur les stratégies à privilégier en matière
    QUESTION   de réseaux fixes et mobiles pour parvenir à la meilleure couverture numérique en très haut
               débit en Auvergne-Rhône-Alpes.

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               Répondre au mieux à cette question suppose tout d’abord une bonne compréhension des
    DEMARCHE   enjeux que soulève la couverture numérique en très haut débit du territoire régional,
               amplement analysés dans des travaux récents du CESER : les principales conclusions
               dégagées par ceux-ci sont ci-après brièvement rappelées.
               Puis, pour déterminer les marges de manœuvre de la Région et fonder des propositions, le
               CESER procéde successivement à :
                  -   l’analyse des mécanismes et de la politique nationale relatifs à l’imbrication
                      complexe entre les deux systèmes de réseaux filaires et hertziens,
                  -   l’établissement d’un panorama régional sur la couverture en très haut débit,
                      notamment par fibre optique.
               Il en déduit ensuite un certain nombre de préconisations à l’intention de la Région d’abord,
               des autres acteurs concernés ensuite, pour assurer la meilleure couverture
               d’Auvergne-Rhône-Alpes en très haut débit.

                Pour faciliter la lecture de cet avis, n’hésitez pas à commencer par lire le glossaire des
                sigles et les fiches en annexes.

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Pg. 04                         Rappel des idées-forces et des interrogations du CESER depuis 2016

         1. Rappel des idées-forces et des interrogations du
            CESER depuis 2016

         Pour permettre au plus grand nombre une première compréhension des enjeux
         d’aujourd’hui, le CESER capitalise brièvement en premier lieu les messages issus de ses
         travaux passés les plus récents sur le très haut débit numérique :
             -   quel enjeu ?
             -   de quoi parle-t-on ?
             -   quels questionnements ?

             1.1.   L’accès au très haut débit numérique : accès à un
                réseau stratégique et clé de l’équité territoriale

         La révolution numérique est la plus rapide de tous les temps. Le numérique joue un rôle
         majeur dans la croissance économique et une politique de développement de ses usages
         est essentielle pour les entreprises et les particuliers. D’ici une décennie, les usages du très
         haut débit seront vraisemblablement liés à la demande exponentielle en flux d’informations
         et toute erreur ou tout retard dans les décisions en matière de réseau aura des
         conséquences encore insoupçonnées.
         L’ambition exprimée par la Région est forte en ce domaine pour transformer les atouts
         d’Auvergne-Rhône-Alpes en « bouillon de culture » du numérique. Mais le CESER a souligné
         combien elle peut se révéler illusoire si les infrastructures ne sont pas performantes ni
         adaptées. Les usages et les infrastructures demeurent indissociables et interdépendants.
         L’accès à Internet est désormais en passe de devenir un accès à un équipement aussi
         essentiel que l’eau ou l’électricité. Ce qui est vrai pour un particulier l’est davantage encore
         pour une entreprise qui pourrait être pénalisée voire disparaitre si elle devenait un « SDF du
         numérique ». L’accès au très haut débit est aujourd’hui une des premières conditions
         d’implantation économique. La prévention des zones de non droit à un tel accès constitue
         une condition sine qua non d’aménagement du territoire. Une responsabilité majeure des
         collectivités locales est engagée. La Région en particulier doit l’assumer même si la loi
         NOTRe n’a pas clarifié le niveau de collectivité compétent en matière de numérique : elle
         est en charge de l’équité territoriale. La Région a par ailleurs une responsabilité particulière
         en matière de développement économique et se trouve pleinement concernée par le fait
         qu’à l’échelle nationale seules 9 % des entreprises de moins de 50 salariés ont un accès à
         la fibre optique.

                                        ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : POUR UNE COORDINATION RÉGIONALE
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Pg. 05                                         Rappel des idées-forces et des interrogations du CESER depuis 2016

                        1.2.    Le bon débit est celui dont on ne se soucie plus
                           lorsqu’on en a besoin, au bon moment, au bon endroit,
                           à un prix acceptable

                   La demande en débit dans le monde décuple environ tous les 10 ans. Or la définition du
   Débit montant   très haut débit est floue voire insaisissable. En 2025, le débit montant nécessaire au plus
   = en émission   grand nombre pour un accès confortable sera probablement de 100 Mbits/s. C’est ce
                   qu’avait retenu le CESER dès juillet 2016.

   Débit           À l’automne 2016, soit quelques mois après l’adoption de la contribution du CESER, la
   descendant =    Commission européenne a affiché une ambition pour 2025 de la « société du Gigabit », à
   en réception    savoir un Gigabit/s pour les pôles d’activité, mais seulement 100 Mbits/s descendants pour
                   les particuliers.
                   Seule la fibre optique permet d’y répondre en qualité, grâce à un débit dédié symétrique
                   élevé et stable. Dans l’état actuel des connaissances, les limites techniques n’ont pas été
                   atteintes pour la capacité de transport de l’information par la lumière, à l’aide de la fibre
                   optique.

                   Source : M LAGET, Vice-Président du Syndicat Intercommunal des Énergies de la Loire, intervention en Commission 4 du CESER
                   le 10 mars 2017

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                    À l’horizon 2025, il apparaît clairement que le fil de cuivre supportant la technologie DSL,
                    même « boosté » à plusieurs dizaines de Mbit/s par une technique de « montée en débit »,
                    sera disqualifié. Ce sera également le cas du câble coaxial (installé dans le Rhône depuis
                    1995) qui admet des débits descendants de 100 Mbit/s, mais des débits montants d’à
                    peine quelques Mbit/s.

   Point haut =     Les solutions hertziennes, hormis les ponts hertziens (faisceaux de point à point) pour les
   toit             « autoroutes de l’information », apportent des solutions en mode dégradé, puisque ce sont
   d’immeuble,      des technologies à débit partagé. La propagation des ondes est en effet limitée par le
   château          partage de débit. Le degré de finesse du maillage des « points hauts » devra être corrélé à
   d’eau, pylône,   la densité des usagers. Il devra aussi permettre de réduire les dysfonctionnements résultant
   tour
                    du passage d’une antenne-relais à une autre. Cette technique est aussi pénalisée par les
   hertzienne
                    phénomènes d’écran physique lié au relief, à la végétation, etc.
                    Quant à la 5G, beaucoup plus performante que la 4G pour les réseaux mobiles, elle
                    nécessitera un maillage très serré de « points hauts » et autres points d’accès
                    obligatoirement alimentés par un réseau fibre optique.
                    Pour l’heure, en Europe et en France notamment, le seuil de définition du très haut débit
                    est selon l’autorité de régulation (ARCEP) un débit de 30 Mbits/s descendants non garantis,
                    c’est-à-dire avec interruptions, et un débit de 5 Mbit/s montants. Compte tenu de la
                    faiblesse des débits montants, le terme de « très haut débit » est surqualifié.

                    Un temps d’avance non pris est, en matière numérique, un temps de retard.
                    Le CESER avait néanmoins souligné en 2016 combien le temps d’une connexion aux seuls
                    points fixes est révolu, alors que l’accès à Internet se fait à plus de 80 % par des terminaux
                    mobiles (smartphones, tablettes tactiles, terminaux portatifs). L’Internet mobile
                    s’intensifiera encore demain à l’ère des objets connectés, de l’informatique dématérialisée
                    et des mégadonnées.
                    L’avenir réside dans la combinaison optimale entre fibre optique et techniques hertziennes,
                    malgré les limites inhérentes à ces dernières. En menant une telle politique, on n’obérera
                    pas la capacité d’investir pour satisfaire les besoins de demain.
                    Le CESER soulignait par ailleurs que pour les zones les plus isolées, les technologies
                    satellitaires pourraient être utilisées, en admettant un service dégradé par le partage de
                    débit et le temps important de latence du signal.

                                                  ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : POUR UNE COORDINATION RÉGIONALE
Pg. 07                        Rappel des idées-forces et des interrogations du CESER depuis 2016

             1.3.    De nombreuses interrogations et inquiétudes
                exprimées en juillet 2016 par le CESER

         Depuis 2010, la problématique de desserte de la fibre à l’usager a mobilisé les CESER
         d’Auvergne et de Rhône Alpes.
         Le CESER Rhône-Alpes a montré comment, jusqu’en 2011, certains territoires français
         comme la Manche ou l’Ain (à travers le syndicat intercommunal de l’énergie de l’Ain, SIEA)
         avaient été pionniers pour porter un réseau ouvert d’initiative publique (RIP), dont le plan
         d’affaires était fondé sur la péréquation entre zone denses rentables (Pays de Gex, par
         exemple) et zones peu denses. À titre d’exemple, ceci avait permis à une grande entreprise
         (MGI Coutier) de préserver son siège à Champfromier dans la montagne bugiste grâce à un
         apport de la fibre à un prix de 500 € mensuels au lieu des 8000 € proposés par Orange.
         Mais l’État a cassé ce modèle en invoquant le droit européen de la concurrence et en
         soutenant les grands opérateurs privés bien au-delà des obligations européennes, au
         détriment de l’aménagement du territoire et de l’équité territoriale. Les grands opérateurs
         ont depuis la possibilité d’écrémer les zones très denses et les zones moyennement denses,
         dites zones d’appel à manifestation d’intention d’investissement (AMII) agréées par l’État.
         Pour 90 % des communes françaises et pour les deux tiers d’Auvergne-Rhône-Alpes, ce sont
         les collectivités territoriales qui sont les variables d’ajustement avec leurs réseaux ouverts
         d’initiative publique.

         Les réseaux d’initiative publique des ex-Régions Rhône-Alpes et Auvergne présentent des
         modèles économiques différents.
         En ex-Rhône-Alpes, ce sont six RIP qui sont à l’œuvre. Dans la situation la plus répandue (en
         dehors du Rhône, de l’Ain et depuis peu de la Savoie qui vient de dénoncer sa DSP), c’est
         le concessionnaire qui supporte le risque des recettes commerciales. Et la Région acquiert
         à terme une part de copropriété sur une des fibres du faisceau, au titre d’une formule
         conventionnelle de vente à terme conclue en 2015.
         En ex-Auvergne, c’est le contribuable régional qui prend le risque commercial à travers un
         contrat de partenariat public-privé (PPP) avec Orange, l’opérateur n’ayant pas de pression
         pour commercialiser le réseau. Le CESER Auvergne s’est d’ailleurs interrogé dès juin 2013,
         puis le CESER Auvergne-Rhône-Alpes à nouveau en 2016, sur les éléments financiers de ce
         contrat auxquels il n’a pas été autorisé à accéder ; le secret des affaires ayant été invoqué.
         Dans son avis de 2016, le CESER a manifesté une grande inquiétude face au risque de
         fracture territoriale en Auvergne-Rhône-Alpes en matière de desserte de la fibre optique à

                                       ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : POUR UNE COORDINATION RÉGIONALE
Pg. 08                        Rappel des idées-forces et des interrogations du CESER depuis 2016

         l’usager (FttH). Cette inquiétude n’a fait que grandir avec la dénonciation récente de sa DSP
         par la Savoie.

         Les questions du déploiement et de la commercialisation doivent faire l’objet de réponses
         claires :

            •   Le CESER constate l’écart important entre les annonces, les prévisions et les
                réalisations du raccordement effectif à l’usager. Il a appelé de ses vœux une
                connaissance très précise et à l’avance des plannings de déploiements (publics et
                privés), zone par zone, pour les co-financeurs publics comme pour les usagers.
                Les données ne doivent pas porter sur les seules prises raccordables mais aussi sur
                les raccordements chez le client en termes de prix, de calendrier et de qualité du
                service.
            •   Le CESER considère la commercialisation comme étant cruciale, sauf à ce que la
                parole politique ne soit pas tenue et à ce que les usagers demeurent hors-jeu. Il a
                souligné l’importance d’une politique d’ouverture concurrentielle aux opérateurs
                commerciaux fournisseurs d’accès pour réduire non seulement le prix de vente
                notamment pour les entreprises, mais aussi la fracture territoriale.

            1.4.   Comparaison des recommandations du CESER
               avec la feuille de route du Conseil régional de février
               2017

         Un certain nombre d’intentions exprimées convergent bien avec les préoccupations du
         CESER :

               Faire entendre sa voix et s’assurer de la tenue des engagements des opérateurs,
                notamment en zone privée
               Favoriser les échanges de bonnes pratiques pour accélérer le déploiement
               Soutenir la complétude de l’adressage dans les zones rurales
               Informer les usagers sur le déploiement et l’éligibilité

         Mais la problématique de la commercialisation et de l’ouverture concurrentielle, notamment
         pour le secteur des entreprises, n’est pas abordée par la feuille de route.
         Par ailleurs, le Conseil régional annonce une couverture totale du territoire à 30 Mbits/s
         descendants au moins d’ici 2021 à l’aide de toutes technologies, dont les solutions
         hertziennes et la montée en débit sur cuivre. Si le CESER apprécie la volonté exprimée d’un
         avancement assez rapide, il se demande, comme de nombreux experts, pourquoi soutenir

                                       ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : POUR UNE COORDINATION RÉGIONALE
Pg. 09                         Rappel des idées-forces et des interrogations du CESER depuis 2016

         la montée exponentielle en débit sur fil de cuivre, qui est une technologie obsolète. Il
         renouvelle combien il s’agit d’un investissement inutile à long terme, qui obérera
         l’investissement de demain, alors même que certains RIP ont fait le choix de l’exclure par
         principe dans leur schéma d’ingénierie initial ; un retour en arrière avec cette technologie
         ne pouvant en aucun cas préfigurer la fibre.
         De plus, le Conseil régional adopte dans sa feuille de route un engagement budgétaire
         moyen annuel à bon niveau de 45 M€ sur 10 ans, à travers un cofinancement à 150 € la
         prise FttH déployée en Rhône-Alpes et un cofinancement non précisé en ex-Auvergne.
         L’opacité persistante de l’engagement régional contractualisé pour équiper les prises
         publiques (estimées à environ 300 000) de la régie THD Auvergne avec un fort risque du
         contribuable, notamment régional, appelle une nouvelle interrogation.
         L’effort de la Région consacré à l’ex-Auvergne risque-t-il d’obliger les autres RIP d’Auvergne-
         Rhône-Alpes à réduire leurs objectifs de déploiement ? Ceci ne serait il pas étrange,
         s’agissant de RIP pour lesquels la Région n’assume pas de risque commercial et peut
         obtenir à terme une part de copropriété sur une des fibres du faisceau ?

          Question essentielle pour l’avenir d’Auvergne-Rhône-Alpes, le bon débit
          numérique appelle des interrogations multiples auxquelles la « feuille de route »
          de la Région a apporté des réponses incomplètes.

         Appréhendant la donne nationale de cette thématique, le CESER a compris combien
         le contexte national exerce un poids fondamental dans les capacités des acteurs
         régionaux et locaux à intervenir dans les réseaux à très haut débit. Il était dès lors
         essentiel de décortiquer au mieux un système complexe et de tenter de le rendre
         intelligible.

                                       ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : POUR UNE COORDINATION RÉGIONALE
Pg. 10

         2. La donne nationale actuelle de la couverture en très
            haut débit numérique

             2.1.   Réseaux filaires et hertziens, deux systèmes
                imbriqués mais répondant à deux logiques
                économiques différentes

                 2.1.1. Le système français de financement des réseaux filaires
                     fixes : un système mixte public-privé

         Il faut distinguer en France :

                les zones d’initiative privée, d’un coût estimé en 2017 entre 6 et 7 milliards d’euros,
                 où les collectivités locales n’ont pas le droit d’intervenir,
                les zones publiques privées dites d’initiative publique, d’un coût estimé en 2017
                 entre 13 et 14 milliards d’euros, dont la moitié finançable par le contribuable local,
                 national ou européen.

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Pg. 11                   La donne nationale actuelle de la couverture en très haut débit numérique

         L’IDATE présentait leur répartition lors du colloque de la FIRIP du 4 juillet 2017 :

         Les zones d’initiative privée concernent 55 % de la population, mais 10 % du territoire. Elles
         sont partagées en deux catégories :

             • Les zones « très denses » sont les grands centres urbains où les quatre grands
               opérateurs (Orange, SFR, Free, Bouygues) se font concurrence par les
               infrastructures sur leurs deniers. Ceci concerne 148 villes et un potentiel éligible de
               5,5 millions de logements et locaux professionnels. Selon l’AVICCA, en mars 2018,
               22 communes sont raccordables en FttH à 95 %, mais 26 communes ont encore
               moins de la moitié de leurs locaux raccordables.
             • Les zones moyennement denses (3400 communes) pour lesquelles l’État a appelé
               les investisseurs privés à manifestation d’intérêt d’investissement (AMII) sans
               garantie de déploiement. Selon Pierre MANIÈRE (journal latribune.fr du
               28/06/2016), en 2011, Orange et SFR se sont partagé ces zones et ont promis de
               rendre éligibles au très haut débit d’ici 2020 respectivement 7,5 et 2,3 millions de
               logements et locaux professionnels. Les quatre grands opérateurs ont signé un
               accord de co-investissement.

                                       ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : POUR UNE COORDINATION RÉGIONALE
Pg. 12                    La donne nationale actuelle de la couverture en très haut débit numérique

         Les zones couvertes par les réseaux ouverts d’initiative publique sont portées en maîtrise
         d’ouvrage par les collectivités locales. Elles concernent 45 % de la population, mais 90 %
         du territoire. La mise en place des zones AMII, en réduisant pour les RIP les capacités de
         péréquation entre zones rentables et moins rentables, a fragmenté le marché et fragilisé
         les plans d’affaires.
         Pour sauvegarder l’efficacité des efforts des collectivités locales, l’État a mis en place en
         2013 un plan de soutien aux projets de RIP très haut débit, le plan France très haut débit
         qui fixe à 2022 l’échéance pour atteindre 100 % de couverture des foyers en très haut débit,
         dont 80 % en fibre optique.
         Pour mettre en œuvre ce plan, l’agence du numérique instruit les demandes des porteurs
         de projets dans la limite d’une enveloppe de 3,3 milliards d’euros affectée au Fonds national
         pour la société numérique (FSN) géré par la Caisse des dépôts. Le plan France Très haut
         débit permet ainsi d’accélérer la livraison des prises optiques des RIP « raccordables ». Mais
         les prises raccordables au point de branchement optique ne doivent pas être confondues
         avec des prises raccordées chez le client : il faut que la commercialisation soit au rendez-
         vous.

                 2.1.2. Le système de financement des réseaux hertziens, une
                     logique globalement privée

                                 Le hertzien mobile 2G, 3G et 4G

         Le client mobile doit pouvoir disposer du mobile où qu’il soit et ne peut donc être en liaison
         qu’avec un opérateur. Le service mobile est ainsi un service d’un opérateur privé à la
         population au regard d’une autorisation de l’État, à savoir une licence sur une bande de
         fréquences. Cette licence est un bien immatériel de l’État utilisable par l’opérateur en
         échange :
             -   du respect d’un cahier des charges fixant des obligations de couverture,
             -   du versement d’une redevance annuelle.
         Ce type de hertzien peut être utilisé à partir d’un boîtier multiservice fixe.

         Une collectivité publique ne doit pas apporter à l’opérateur une aide financière susceptible
         de créer une distorsion de concurrence sanctionnable par la Cour de justice européenne au
         titre des aides d’État.

                                        ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : POUR UNE COORDINATION RÉGIONALE
Pg. 13                   La donne nationale actuelle de la couverture en très haut débit numérique

         Il restait à garantir un objectif de couverture globale en Internet mobile, objectif non
         demandé par l’État avant 2017.
         Bercy se satisfaisait d’une certaine liberté accordée aux opérateurs contre le versement par
         ces derniers de licences très onéreuses. L’État a seulement exigé une réponse aux besoins
         les plus critiques par des programmes de type France Mobile ou zones blanches centre
         bourgs.
         Le cahier des charges était quasi inexistant et on se limitait à indiquer qu’une commune
         n’était pas en zone blanche en téléphonie mobile dès lors qu’on pouvait appeler devant la
         mairie.
         La formule de licence bénéfique pour les recettes de l’État ne l’était guère pour
         l’aménagement du territoire. Ainsi les cartes interactives mises en place par l’ARCEP
         (www.monreseaumobile.fr) montrent en décembre 2017 que moins de 60 % du territoire
         français dispose d’une très bonne couverture, que nombre de zones ont une qualité
         aléatoire ou nulle ou ne reçoivent que certains des quatre opérateurs. Aucun des opérateurs
         ne couvre jamais plus des deux tiers du territoire. Cette situation est très pénalisante alors
         que l’usage de l’Internet mobile double chaque année et qu’un statu quo est ainsi de moins
         en moins toléré.

                                 Le THD Radio

         Une exception existe cependant dans les techniques hertziennes pour permettre une
         maîtrise d’ouvrage publique : le THD Radio ou RttH, à vocation transitoire. Cette technologie
         mobile est réservée sur une bande de fréquence dédiée, avec des caractéristiques
         économiques comparables avec celles du mode filaire. Des obligations fortes lui sont
         assorties pour assurer une maîtrise du nombre de clients, de façon à préserver la qualité
         du signal.

             2.2.        L’état des déploiements

         En 2016, le CESER soulignait la difficulté pour connaître précisément l’état des
         déploiements, en distinguant bien les technologies, les foyers éligibles ou raccordables à
         partir d’un boîtier activé ou non, les raccordements effectifs chez l’usager particulier ou
         entreprise.

                                       ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : POUR UNE COORDINATION RÉGIONALE
Pg. 14                   La donne nationale actuelle de la couverture en très haut débit numérique

         Depuis l’adoption de son avis en juillet 2016, l’ARCEP a mis en place un observatoire des
         marchés des communications électroniques, ainsi que des cartes interactives à l’échelle de
         la rue, voire de l’immeuble.
         Ceci constitue un net progrès, avec cependant des limites importantes, faute de précision
         au plus près de l’usager :

                sur la qualité de service (temps de rétablissement, temps de retour d’intervention,
                 temps de latence…),
                sur les technologies conditionnant les débits reçus ou émis par l’abonné, par suites
                 des contraintes du cuivre ou du câble coaxial, comme de la couverture mobile
                 hetzienne ou satellitaire, à débits partagés,
                sur la mutualisation des prises au bénéfice d’au moins deux opérateurs
                 commerciaux permettant une offre concurrentielle et des prix de raccordement
                 abordables.
         Il a été annoncé en décembre 2017 un « choc de transparence » qui se fait attendre.
         Des données globales par technologie sont néanmoins fournies par l’ARCEP : il ressortait
         au 1er décembre 2016 une part encore faible de la fibre optique à l’abonné (FttH) parmi les
         raccordements fixes : sur 15,4 millions de logements éligibles à un débit supérieur à
         30 Mbits/s descendants, seuls 6,95 millions l’étaient en fibre optique, contre 5,5 millions
         en fil de cuivre et 8,8 millions en câble coaxial.
         Malgré la progression du nombre de prises déployées (+13 % de 2016 à 2017) et même si
         la progression du nombre d’abonnés au très haut débit dépasse depuis 2014 celle des
         abonnés au haut débit, la fracture numérique persiste entre zones plus denses et zones
         moins denses. En décembre 2017, lors de la conférence nationale des territoires, il était
         rappelé que plus de 15 % des locaux n’a pas accès à Internet avec un débit filaire
         satisfaisant.
         Selon les données de l’ARCEP sur les prévisions de couverture FttH dans les RIP à l’horizon
         2022, présentées lors de la conférence annuelle du très haut débit organisée par l’agence
         du numérique le 9 avril 2018, une moitié des départements français devrait faire l’objet
         d’une couverture à plus de 90 %. Tel devrait être le cas pour l’Ain, la Loire, la Drôme,
         l’Ardèche et l’Isère. Les départements auvergnats et savoyards risquent toutefois de
         demeurer en deçà d’un taux de couverture de 50 %, selon l’ARCEP.
         La fracture territoriale existe aussi à l’intérieur des zones les plus denses. Ainsi, en 2017,
         Patrick CHAIZE, sénateur de l’Ain et président de l’AVICCA, constate que 5 millions de locaux
         préemptés par les opérateurs sont programmés mais non raccordables. De plus, s’agissant
         du raccordement au client, selon l’entreprise KOSC Telecom, dans une rue de CHATOU, en
         zone dense, des locaux professionnels ne sont pas raccordés alors que des particuliers le

                                       ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : POUR UNE COORDINATION RÉGIONALE
Pg. 15                                La donne nationale actuelle de la couverture en très haut débit numérique

                      sont. Ceci est particulièrement observé si l’usager est incité à se satisfaire d’une
Complétude =          terminaison cuivre amortie par l’opérateur mais rapidement obsolète.
obligation
règlementaire         Pour les zones AMII, l’AVICCA s’inquiète en mars 2018 de ce que 2322 communes sur 3400
destinée à garantir   n’ont encore aucune prise raccordable à moins de 3 ans de l’échéance 2020 promise par
la couverture         les opérateurs.
complète des
zones desservies      Depuis 2010, l’ARCEP a imposé aux opérateurs une obligation dite de complétude hors des
en fibre optique en   zones très denses : ils doivent en principe desservir l’ensemble des locaux situés dans la
dehors des zones      zone desservie par un point de mutualisation (dite « zone arrière »). Mais l’ARCEP indique
très denses           que le manque d’articulation entre ces « zones arrières » entraine des « trous de couverture »
                      très difficiles à combler en raison de l’architecture du réseau.

                                                                                       Graphique CEREMA juin 2016

                      Paradoxalement, des raccordements peuvent être parfois plus aisés en zone moins dense
                      lorsque le client est aidé pour son raccordement final. L’offre concurrentielle de multiples
                      fournisseurs d’accès est déterminante sur le coût pour l’usager. De plus, le RIP maître
                      d’ouvrage et l’opérateur délégataire partagent parfois avec le client le coût du raccordement

                                                    ACCÈS AU TRÈS HAUT DÉBIT : POUR UNE COORDINATION RÉGIONALE
Pg. 16                                La donne nationale actuelle de la couverture en très haut débit numérique

                      final. Enfin, au nom de l’équité territoriale, des collectivités peuvent décider de pratiquer
                      une péréquation tarifaire en accord avec leur délégataire pour offrir un tarif unique à chaque
                      usager. C’est l’intérêt d’ailleurs des opérateurs de faciliter la commercialisation des lignes
                      FttH s’ils en supportent le risque.
                      Tel est le cas de Drôme-Ardèche ou de la Loire, à titre d’exemples.
                      À cette problématique de commercialisation s’ajoutent des limites opérationnelles pour le
                      déploiement de la fibre optique.
                      À cela deux raisons :
                          -   la tension sur la main d’œuvre notamment en conception-réalisation. Objectif fibre
                              estime que le nombre d’emplois nécessaires au déploiement et à la maintenance
                              de la FttH s’élève à 20 000 en France d’ici 2022 (2300 en Auvergne-Rhône-Alpes).
                          -   la pénurie de fibre. La qualité de fibre G 657 est recommandée en France alors
                              qu’elle ne représente que 3 % du marché mondial et qu’on manque de disponibilité
                              en « préforme » (matière première). Les collectivités n’ayant pas anticipé les
                              commandes se trouvent en difficulté.
                      Un point de vigilance est à observer : ces limites opérationnelles pourraient elles constituer
                      pour les opérateurs une opportunité de justifier des retards pour raison de force majeure et
                      d’échapper ainsi aux pénalités ?

                          2.3.    La question clé de l’ouverture concurrentielle pour
                             l’accès des entreprises à la fibre optique

                      Une bonne couverture du territoire en très haut débit par la fibre optique ne peut se faire
                      que par la concurrence. Il convient d’éviter la situation des États-Unis : selon le régulateur
                      FCC, les usagers n’y ont souvent affaire qu’à un seul opérateur et des pans entiers du
                      territoire sont exclus du déploiement.
    Verticalement
    intégré =         Le CESER a particulièrement analysé la problématique de déficience d’intensité
    opérateur         concurrentielle pour l’équipement en fibre des TPE/PME et du tissu associatif.
    d’opérateurs et
    opérateur         De nombreuses entreprises ont besoin d’un accès fibré avec une plus grande qualité de
    commercial        service au regard du volume de données à échanger : garantie de débit, temps réduit de
                      latence, garantie de rétablissement en cas de panne, sécurité des échanges sont autant de
                      besoins de cette clientèle.
    Pure player =     Or le marché de gros de la fibre optique est concentré sur deux opérateurs « verticalement
    opérateur         intégrés » que sont Orange (49 %) et SFR (26 %) ; les autres acteurs étant surtout des
    commercial        opérateurs de RIP « pure players ». Orange et SFR exercent aussi une activité d’opérateur
    uniquement

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         commercial fournisseur d’accès à Internet (FAI) sur le marché de détail auprès des usagers.
         Leur avantage compétitif en fournissant toute la gamme de services est dénoncé par
         l’autorité de la concurrence du fait de la situation de monopole.
         Orange et SFR n’ont en fait pas intérêt à ouvrir leur réseau à des FAI concurrents, mais à
         activer eux mêmes par leurs équipements sur leur fibre inerte dite « noire » une offre
         spécifique très chère (souvent de l’ordre de 2000 €), la fibre jusqu’au bureau (FttO) sur une
         boucle locale dédiée (BLOD) entre leur nœud de raccordement optique et le client. De
         nombreuses TPE et PME se trouvent ainsi hors-jeu pour raisons financières. En
         conséquence, selon l’ARCEP, seuls 100 000 entreprises ont à ce jour opté pour des offres
         sur fibre optique tandis que 500 000 entreprises continuent à utiliser des solutions sur
         cuivre. Cette situation est un facteur de moindre compétitivité par rapport à certains pays
         européens.

                                                                          Graphique CEREMA août 2017

         L’ARCEP cherche à ouvrir les réseaux à la concurrence en divisant plusieurs fois le prix : elle
         contraint désormais Orange et SFR à ouvrir entre le nœud de raccordement optique (NRO)
         et le point de mutualisation (PM) un réseau de fibres optiques passives, la « boucle locale
         optique mutualisée » (BLOM).
         Sur le point de mutualisation, peuvent se raccorder soit des offres FttH à qualité de service
         standard (sans garantie de débit ni de temps de rétablissement), soit des offres FttE

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         entreprises un peu plus chères avec une meilleure qualité de service, mais très attractives
         par rapport aux liens dédiés.
         Agnès HUET, Vice-Présidente de la FIRIP, le décrit ainsi :

         Contrairement à d’autres pays européens et malgré le souhait de l’autorité de la
         concurrence, l’ARCEP n’a pas demandé à l’opérateur historique Orange une offre activée
         ouverte à la concurrence sur la boucle locale optique mutualisée. Il faut passer par une offre
         de gros passive ; l’ARCEP invoquant le fait que ceci permet aux opérateurs de gros de
         proposer des solutions plus innovantes.
         Pour éviter qu’Orange ne reconstitue un monopole sur la boucle locale optique mutualisée,
         l’ARCEP a décidé :
             -   d’imposer depuis le 1er/01/2018 à Orange la fourniture d’une qualité de service
                 renforcée sur sa fibre noire,

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             -   de permettre l’arrivée d’un acteur intermédiaire, le consortium KOSC TELECOM qui
                 a signé en juillet 2017 avec Orange un accord pour fournir des offres concurrentes
                 sur son réseau activant des fibres.

         Cette solution non encore opérationnelle devrait permette un tarif forfaitaire à 135 € à
         l’extrémité d’une chaîne à trois maillons :
             -   Orange fournissant le réseau à l’amont du bâtiment du NRO,
             -   KOSC opérateur d’opérateurs l’activant (si le bâtiment du NRO est assez bien
                 dimensionné) et le revendant clés en main aux opérateurs de détail,
             -   l’opérateur de détail (FAI) traitant avec le client.
         C’est l’activation des services de gros qui crée la dynamique des prix par la concurrence.
         Selon l’observatoire des RIP mis en place par la FIRIP, en 2017, le taux de souscription à la
         fibre de la part des entreprises est très fort (65 %) sur les RIP actifs et faible (10 %) sur les
         RIP passifs. L’action des collectivités locales privilégiant d’emblée l’activation de la fibre par
         des opérateurs « pure players » a été déterminante. Ce fut le cas dans l’ex-région
         Rhône-Alpes. Il serait opportun de connaître la liste des opérateurs de détail intervenant
         dans le cadre du PPP Auvergne en concurrence avec Orange.
         En zone privée au contraire, l’offre est souvent en « peau de léopard » ; ce qui est d’autant
         plus préjudiciable aux établissements à caractère économique qu’ils ne sont pas distingués
         des logements.

             2.4.    Les récentes dispositions de l’État sur les réseaux
                fixes et mobiles

                 2.4.1. Le gouvernement a annoncé trois jalons pour le
                     déploiement toutes technologies

         En juillet 2017, le Président de la République a souhaité une accélération du déploiement.
         Trois jalons ont été posés :
             -   2020 – Apporter à tous les français un « bon haut débit » de 8 Mbit/s.
             -   2022 – En application du plan France Très haut débit, délivrer à tous les foyers
                 30 Mbit/s descendants dont au moins 80 % en fibre optique.
             -   2025 – Honorer le souhait de la Commission européenne d’un accès à la société
                 du Gigabit, ce qui se traduirait par l’accès de tous à 100 Mbits/s descendants.

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          À l’horizon 2020        En zone privée, 55 % de la population devrait être desservie à
                                  8 Mbit/s selon les annonces des opérateurs. Mais à l’analyse de la
                                  situation actuelle, des retards de couverture parfois importants sont
         d’ores et déjà prévisibles. En effet, en zone d’initiative publique, 2 à 2,5 millions de locaux
         ne devraient pas disposer de desserte fixe (fibre, cuivre, câble) à 8 Mbit/s, en vision
         optimiste. Les solutions hertziennes ou satellitaires, avec leurs limites, sont à l’étude. À
         noter aujourd’hui pour la solution satellitaire une saturation des faisceaux sur la bande
         entre TOULOUSE et la FRANCHE-COMTÉ. Il faudra attendre un nouveau satellite.

          À l’horizon 2022       Compte tenu d’une réelle appétence des usagers pour s’abonner à
                                 la fibre et de la baisse des coûts liés à l’industrialisation du process,
                                 un cercle vertueux s’est instauré récemment avec les investisseurs
         privés qui se déclarent intéressés à s’engager en zone moins dense hors des zones AMII.
         Ceci serait de nature à réduire la pression sur les aides publiques et répondrait ainsi aux
         vœux de la mission Très haut débit.
         Ce contexte nouveau ne réduit pas cependant totalement le risque de certains retards de
         déploiement par les opérateurs, malgré leurs engagements.
         Selon l’ARCEP, fin 2017, le déploiement s’établit comme suit :

                en zone privée très dense
         Sur 6 millions de prises, 4,8 millions sont raccordables. Des lacunes demeureront possibles
         (« fissures » numériques par exemple dans les zones pavillonnaires et les « poches de basse
         densité »).

                en zone privée AMII
         Les opérateurs sont engagés dans un déploiement total d’ici fin 2020, soit 13 millions de
         prises. Depuis 2011, en 8 ans, 4,2 millions ont été déployées, soit un tiers. Réaliser les deux
         tiers restants en 3 ans paraît peu probable.

                en zone d’initiative publique
         Sur 11 millions de prises, seules 1,1 million sont déployées. Restent 10 millions de prises
         FttH à déployer en 5 ans.

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