Activités artistiques pour les enfants hospitalisés en Région bruxelloise - Premièreédition 2003
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Sommaire Editorial p 3 Introduction p 6 Philosophie du Projet p 8 Présentation des cinq associations p 11 2
Edito Il n’y a pas longtemps encore, parler d’activités ludiques ou Je souhaite encourager cette démarche et permettre aux artistiques pour les enfants hospitalisés relevait, pour beau- associations qui œuvrent en ce domaine de bénéficier tout coup, de l’incongruité la plus totale. Fort heureusement, de à la fois d’une reconnaissance effective de leur travail et de nombreuses expériences démontrent aujourd’hui que l’im- moyens de fonctionnement leur permettant d’amplifier ce pact sur le bien-être de l’enfant, voire sur sa guérison, est travail. Je souhaite enfin que cette brochure de présentation tout à fait notable. Voici donc les clowns, conteurs et constitue, pour chacun des acteurs de ce domaine si parti- marionnettistes invités à intégrer le plan de soins des culier et si utile, un hommage rendu aux qualités humaines enfants gravement malades ; et c’est une évolution dont je déployées au quotidien auprès des plus petits. me réjouis ! Lorsque l’enfant et sa famille doivent affronter l’angoisse, la douleur, la séparation, l’unique préoccupation d’un “ tiers ”, qui ne soit pas identifié à l’équipe soignante, est d’apporter à l’enfant cette petite part du bonheur qu’il a laissé à la maison. J’ai entendu, à de nombreuses reprises, ces témoignages d’enfants et de parents, qui disaient tout le soulagement d’avoir pu, avec l’artiste, rompre l’isolement Didier GOSUIN, ou sortir enfin une angoisse non exprimée, qui ronge sou- Ministre, vent, autant, que la maladie elle-même… En jouant, en Membre du Collège de la Commission communautaire s’amusant, en faisant son “ métier ” à lui, l’enfant redevient française chargé de la Santé ainsi sujet à part entière, capable de participer à son propre projet de soins. Mon département soutient ainsi une gamme d’initiatives – présentées dans cette brochure – qui permettent d’apporter de la diversité, de la bonne humeur, mais également cette humanité si précieuse et si souvent absente de l’ hôpital. 3
Le développement d’activités culturelles K ensuite, offrir à chacun la possibilité de s’exprimer et de créer, de découvrir en soi des capacités parfois insoupçonnées que l’hospitalisation permet de mettre en milieu hospitalier en lumière. Le malade passe de l’état de personne assistée, vulnérable et dépendante, à celui d’individu libre de choisir, de s’exprimer, recouvrant la dignité et une autonomie que la maladie affaiblit ; La nécessité de faire de l’hôpital un lieu plus humain, ouvert à la cité, doit être une priorité dans le domaine de K enfin, l’hôpital, par la diversité des populations qu’il la santé. reçoit, les malades mais aussi les familles, les amis, est un carrefour exceptionnel où se croisent des La culture peut jouer un rôle essentiel pour améliorer hommes et des femmes aux origines et horizons l’environnement des personnes hospitalisées et contribuer culturels différents. à favoriser la relation de l’hôpital avec l’extérieur. L’hôpital constitue parfois, le seul lieu où l’art dans sa La culture, loin d’être un supplément d’âme facultatif, réalité vivante, concrète, palpable est approché par donne à la vie sa qualité. C’est en ce sens que le combat certains. pour la vie qui est mené dans les hôpitaux rencontre naturellement le geste culturel. Derrière cette dimension essentielle de culture et de divertissement, les pratiques artistiques collaborent à la La présence de l’art et de la culture en milieu hospitalier fonction thérapeutique : le théâtre à travers les saynètes et satisfait trois exigences : les jeux de rôle, la musique, la danse mais aussi la sculpture, le dessin viennent soutenir le besoin d’exprimer K d’abord permettre au malade, d’oublier pour un le vécu, parfois très douloureux, du moment. La palette instant la maladie, l’environnement souvent froid et est immense des disciplines artistiques qui concourent à la normalisé du contexte médical, pour goûter comme guérison des malades ou à l’atténuation de la souffrance. toute personne humaine la joie de découvrir une peinture, d’écouter une musique, de se plonger dans un livre, d’écouter des histoires,…. ; 4
Depuis de nombreuses années, la Commission Les actions développées visent à procurer aux enfants un communautaire française subventionne des associations bien-être et une meilleure communication vis-à-vis de qui développent dans le milieu hospitalier des activités leur entourage. artistiques. Le public cible touché par ces projets sont les enfants malades. L’hôpital est dans la ville, un lieu où l’homme vit dans une autre relation avec le temps et avec lui-même. C’est peut- Alors que l’hospitalisation reste pour ces enfants un être parce qu’il est dans un moment de fragilité, de moment difficile, les activités artistiques constituent, dans rupture avec le rythme ordinaire des actifs, qu’il peut un milieu peu familier, un espace de liberté, un temps de s’ouvrir à des curiosités nouvelles, découvrir sa propre partage. sensibilité. Des ateliers et des rencontres avec des artistes aident les Service Santé de la enfants à mieux s’exprimer et à dépasser l’espace de Commission communautaire française rupture et de solitude qui constitue parfois le milieu hospitalier. 5
Intro Animer : donner la vie, communiquer de l’ardeur, insuffler atteint d’une affection de longue durée ou d’une anomalie un supplément d’âme malformative qui va perdurer toute une vie. (dictionnaire Robert de la langue française) Il importe dès lors que l’équipe soignante tout entière soit attentive à l’enfant et pas seulement à sa maladie ou à son Promouvoir une animation dans un milieu hospitalier, qui déficit. plus est dans un service de pédiatrie, semble à première Cette attention à “ l’enfant global ” et à sa famille, cette vue paradoxal. collaboration à établir entre l’enfant, sa famille et le En effet, tout hôpital est un lieu où des êtres humains personnel soignant, est un véritable défi. rencontrent d’autres êtres humains pour les aider avec Défi parce que les nécessités techniques multiplient les tous les moyens techniques et humains soit à retrouver la intervenants. santé, soit à atténuer les conséquences physiques et Défi aussi parce que le cadre budgétaire restreint semble psychiques des maladies, accidents, malformations, parfois vouloir cantonner les soignants au rôle de difficultés familiales majeures etc. distributeurs de prestation, au détriment de leur totale Et donc logiquement ce lieu ne devrait pas exiger un activité de soignants. supplément de vie ou d’âme. Dans ce cadre, quelle est la place des équipes d’animation intra-hospitalières ? Cependant, l’extraordinaire développement des sciences Leur rôle se limite-t-il à occuper les enfants hospitalisés ? biologiques et des techniques, développement qui a But honorable en soi que de lutter contre l’ennui, le permis des guérisons et réhabilitations il y a peu encore sentiment d’éloignement dans le monde hospitalier impensables, risque de transformer l’hôpital en une sorte souvent perçu comme étrange. de super station service. Mais nous, les soignants, espérons beaucoup plus des La communication interpersonnelle risque alors d’être équipes d’animation. Nous pensons que celles-ci font négligée et l’effort de prise en considération des difficultés partie intégrante de la prise en charge intra-hospitalière de des personnes, réduit à une addition d’actes techniques, l’enfant. s’adressant au fragment défectueux de la personne Ces équipes d’animation devraient pouvoir organiser consultante. leurs interventions à l’intérieur d’un plan de prise en Les conséquences d’un tel glissement sont lourdes charge des enfants hospitalisés. notamment chez l’enfant : en effet chez lui tout L’école organisée à l’hôpital permet certainement la dysfonctionnement d’un organe a une répercussion poursuite d’un cursus scolaire mais fournit aussi à l’enfant immédiate sur l’organisme entier et entrave les un lieu de rencontre soustrayant ainsi celui-ci, à certains acquisitions motrices, psychiques, émotionnelles et moments de la journée, aux contraintes de l’hôpital. sociales. Le même résultat peut être obtenu par diverses activités Ces conséquences sont encore plus lourdes si l’enfant est d’animation. 6
Le fait de réintroduire des rythmes d’activités scolaires et Il faut également que ces animateurs fassent preuve d’une d’animation permet à l’enfant de mieux vivre la durée de grande discrétion, s’habituent à rencontrer des situations façon optimiste. En effet, tant pour l’enfant que pour ses strictement confidentielles et à respecter les consignes du parents, le fait d’inciter cet enfant à reprendre des activités secret. scolaires et d’animation signifie que l’avenir n’est pas Jamais les animateurs ne doivent tenter d’interpréter et envahi par la maladie mais reprend un cours chargé de surtout de résoudre seuls des difficultés perçues chez les signification. enfants ou chez les parents. Les immenses capacités créatrices des enfants, si elles sont Enfin, les animateurs doivent pouvoir vivre et gérer à la bien guidées par des professionnels avertis, peuvent fois la proximité indispensable et la distance à respecter permettre une expression organisée des peurs, tristesses, pour que l’enfant puisse poursuivre son chemin. inquiétudes. Espoir difficilement exprimé autrement. Voici donc bien des conditions pour remplir correctement le rôle si utile d’animateur socioculturel dans un service Bien souvent, les ateliers d’art ou les activités théâtrales de pédiatrie. ont permis de dédramatiser certaines situations mais ont En échange, ces animateurs doivent pouvoir bénéficier aussi permis d’ouvrir des horizons méconnus à des talents d’un recours à un membre du personnel soignant qui leur ainsi découverts. sert de référence. Ils doivent aussi pouvoir s’appuyer sur Mais l’on comprend dès lors que participer à l’animation des personnes de support pour métaboliser les émotions, dans un service de pédiatrie exige un réel profes- inquiétudes et tristesses que la confrontation répétée des sionnalisme non seulement dans le domaine spécifique du situations de maladies, d’accidents, de malformations, de métier exercé mais aussi au niveau de connaissances difficultés intra familiales majeures engendrent. particulières dans le domaine de l’organisation de Il ne faut pas que l’engagement de ces animateurs se solde l’hôpital, dans le domaine des contraintes indispensables par des plaies personnelles difficiles à cicatriser. d’hygiène et de précautions à prendre dans certaines situations. De plus, les animateurs doivent absolument avoir acquis Hadelin Hainaut, pédiatre hospitalier, certaines notions concernant la psychologie des enfants, professeur à l’école d’infirmières et des enfants malades, des parents d’enfants hospitalisés. professeur invité à la Faculté de Médecine de Liège 7
Créativité en service de pédiatrie Franchir les portes d’un hôpital, pour une heure, un jour, lées depuis le berceau. Il se nourrit tant que dure la vie. En une semaine, un mois, ou pire encore, pour une période travail étroit avec l’imagination, il contribue grandement au indéterminée, n’est jamais agréable pour un adulte. Encore développement des moyens d’expression et de communi- moins pour un enfant. Repères quotidiens, cadre familial, cation, et, par-là même, à l’épanouissement de chacun animal de compagnie, promenades à vélo, cour de récréa- d’entre nous. tion, jeux avec les amis, tout cela peut se trouver en un rien de temps remplacé par le blanc immaculé des murs de cli- S’exprimer, communiquer et rire sont essentiels dans la vie niques et des blouses de médecins. de tous les jours. Pour un mieux être et un mieux devenir, ils le sont d’autant plus quand la maladie s’est installée. L’hôpital est un univers restreint. Un monde dans le monde. Nombre de pédiatres et de psychopédagogues affirment Au sein de cet environnement clos, l’angoisse de l’enfant aujourd’hui que ce sont là des critères favorables à une peut être considérable. Celle de la famille tout autant. guérison plus rapide et/ou à une meilleure acceptation de Parfois même difficile à surmonter, tout comme la maladie la maladie et des soins. elle-même et les soins procurés. Cela doit être pris en considération. Aussi, pour mieux vivre cette phase difficile, Des professionnels compétents dans le domaine de l’en- il est important à la fois de dédramatiser la situation, de fance l’ont bien compris et mettent à la disposition des sécuriser les familles et d’encourager aux mieux les jeunes jeunes patients un éventail d’outils pour une créativité épa- patients à s’exprimer. nouie. Notons que, si les concepts de créatif et récréatif se confondent souvent tant ils sont liés, il est bon d’établir une Si la fonction des équipes médicales doit impérativement différenciation entre créativité et récréation. Car, si la rester prioritaire et s’il est primordial de ne jamais se sub- récréation permet de distraire, distraire seulement, impli- stituer, en aucune manière aux psychologues, il n’en reste quant une relation de communication unilatérale allant de pas moins avéré qu’en ce domaine, la créativité globale celui qui «distrait» vers celui qui reçoit l’activité de manière active trouve sa place. En tout cas, il y a prise de conscien- généralement passive, la créativité va plus loin. Elle incite à ce en la matière depuis une trentaine d’années. De plus en une possibilité d’interaction. Les activités proposées aux plus, des associations autonomes développent des projets enfants hospitalisés n’excluent pas l’aspect récréatif, elles continus de créativité artistique en services hospitaliers. privilégient les démarches créatives. La créativité, propre à l’être humain, est la résultante de ses Ainsi, musique, marionnettes, théâtre, mime, poésie, art du ressources imaginatives et de son potentiel d’adaptation conte, cirque, modelage, peinture, clown… ont fait leur aux circonstances. L’imaginaire, ce bagage sensoriel porté entrée dans les services de pédiatrie. Le blanc immaculé par chaque individu, est constitué à la fois d’images des murs a fait place à des peintures murales et des pan- visuelles, auditives, gustatives, olfactives diverses, accumu- neaux décoratifs. 8
Créativité en service de pédiatrie Des projets créatifs pour les enfants hospitalisés mêmes, pour mieux comprendre les motivations profondes qui les poussent à œuvrer dans un milieu qui regroupe sou- “ Introduire et réintroduire obstinément la dimension rela- vent des populations fragilisées. Lors de supervisions, ils tionnelle, la parole et l’art, pour secouer la passivité, la rou- travaillent les peurs ou les malaises personnels qui font tine et les automatismes… L’implication nouvelle des écran à la relation avec l’enfant qui vit déjà une situation artistes dans les lieux de soins et d’accueil des enfants est difficile. bien plus qu’une mode : c’est une nouvelle forme de civisme. ” (1) En résumé, les animateurs culturels possèdent une éthique Depuis la Charte des droits de l’enfant hospitalisé (2), l’hu- de travail vis-à-vis des malades, vis-à-vis des structures hos- manisation des soins et le bien-être du petit patient sont au pitalières mais surtout vis-à-vis d’eux-mêmes. centre des préoccupations des acteurs sociaux, médicaux Ce qu’ils recherchent principalement est une “ qualité et culturels présents à l’hôpital. L’hospitalisation des enfants d’être ”. en pédiatrie connaît des transformations essentielles. Accueillir dans un local convivial, rendre la confiance et Ils sont engagés dans leur projet, responsables de leurs libérer la parole, accompagner et rassurer l’enfant, lui offrir actes dans le respect de la dignité, de la personnalité et de des moments de jeux et de détente sont des actions deve- l’intimité de l’enfant et de sa famille. Ce qui fait de ces nues indissociables du soin médical proprement dit (3). intervenants particuliers tout autre chose que des guignols Cela fait quelques années que la Commission Communau- de service ou des amuseurs publics, c’est leur profession- taire Française subventionne des associations, cinq actuel- nalisme et ce, qu’ils soient rémunérés ou bénévoles. lement, qui développent des activités artistiques en milieu Ils ne pourront jamais pallier un déficit qualitatif ou quanti- hospitalier. Les intervenants culturels qui travaillent dans tatif de soignants par exemple. ces associations possèdent en plus d’une formation artis- tique une connaissance de la psychologie de l’enfant, tout “ Ne cloisonnons pas la prise en charge de projets artis- particulièrement de l’enfant malade. tiques aux seules mains des représentants socioculturels. Raconter une histoire, chanter, jouer avec un enfant fait Ils ont appris, parfois sur le tas, quelques notions élémen- aussi partie du travail des soignants en relation avec l’en- taires des techniques hospitalières (par ex., ne pas être hor- fant. Ne dépossédons pas les soignants de tâches rifié de voir un enfant installé en perfusion intraveineuse, “ agréables ” qui leur sont reconnues mais qui viennent savoir adapter sa présence à un enfant inconscient, etc.) Ils trop souvent en bout de course. L’humanisation des ser- ont également, en tant que citoyens, un minimum de vices de pédiatrie est une priorité, la culture représente un notion de l’organisation de l’hôpital dans lequel ils inter- des vecteurs de cette humanisation, lorsque les culturels viennent. sont des partenaires. Cela nécessite un projet global de ser- Mais ils ont surtout accepté de faire un travail sur eux- vice ” (4). 9
Créativité en service de pédiatrie L’activité est proposée sans obligations à l’enfant et une pla- L’hôpital est dans la ville un lieu où l’enfant peut dévelop- quette ou une affiche ou un livret l’informe de la nature de per un autre rapport avec le temps et avec lui-même. C’est l’activité. peut-être dans ces moments de fragilité, de rupture avec le “ Une information du contenu de l’activité, où elle se rythme du monde actif du dehors qu’il s’ouvrira à des passe, à quelle rythme, si elle est gratuite, quand il aura curiosités nouvelles, qu’il découvrira un sens à l’aventure l’occasion d’y participer, s’il sera seul, s’il peut refuser une humaine qu’il traverse. proposition et comment. Il est toujours utile de lui laisser le temps de poser ces questions, d’offrir des alternatives pour (1) “ La prise en charge de l’enfant malade ” par Didier qu’il puisse réellement choisir ou marquer son opposition Cohen Salmon, médecin anesthésiste in : les cahiers et lui laisser un temps et un lieu pour prendre des initia- Dajep n°27, septembre 1996. tives, manifester verbalement ou non verbalement ses (2) Charte élaborée en 1988 par EACH (European désirs et ses refus. ” (5) Association for Children in Hospital). (3) “ L’accompagnement de l’enfant et de sa famille Alors seulement, la bulle d’oxygène, le petit vent de folie, dépasse largement le plan strictement médical. l’instant magique, la note suspendue se déposera, comme L’ensemble de ses besoins éducatifs, affectifs, un voile léger, dans l’éphémère de l’instant présent. ludiques… doivent être pris en considérations quelles Du côté médical, on s’est vite aperçu des conséquences que soient les circonstances ”. Actes du colloque : positives à long terme qu’offraient ces activités artistiques Bien-être de l’enfant à l’hôpital - Laurette Onkelinx, surtout lorsqu’il existe une collaboration avec les médecins, 1996. les infirmières, le personnel soignant et bien sûr, les (4) Marie-Madeleine Leurquin et Anne Malice, Centre parents. Sans oublier que pour certains enfants, l’hôpital d’éducation du patient. constitue le lieu où l’art est approché, pour la première fois, (5) Anne Debra, psychologue clinicienne, formatrice au dans sa réalité vivante et palpable. Cefem. 10
Des contes, des chansons et des marionnettes en pédiatrie «Libr’AIRE» a.s.b.l. a) L’équipe siège social : rue Floris, 47, 1030 Bruxelles Tél. et fax : 02/245 28 42 Un duo d’artistes, formé à la fois aux métiers du spectacle adresse E.mail : libr.aire@wanadoo.be (marionnettiste, conte, chant et musique) et, à ceux de la santé et des communications «déboule» trois fois par Dans différents services de l’Hôpital Universitaire des semaine en pédiatrie. Enfants Reine Fabiola Notre équipe approfondit et questionne son travail d’acti- 15, Av. J. J. Crocq - 1020 Bruxelles vité artistique au moyen de formations continues et de supervisions avec des professionnels de l’enfance et/ou du 1. Présentation de l’asbl Libr’AIRE spectacle, de lecture et de recherche. Libr’AIRE a été créée en 1992. La démarche de l’asbl s’inscrit dans un mouvement au sein Le projet «Conte, chant et marionnette en pédiatrie» est même de l’hôpital : celui d’adoucir le séjour de l’enfant en l’un de ses projets majeurs depuis 1998. Il comprend pédiatrie : il nécessite une collaboration avec le personnel l’activité de terrain, la recherche, la création d’outils, la soignant et les éducatrices. formation continue et la supervision. 2 . Objectifs généraux a. le plaisir de l’enfant b. faire rêver, offrir un moment d’évasion c. divertir, stimuler le plaisir de jouer 3. Description de l’activité Pourquoi les enfants jouent-ils ? Par plaisir. Pour exprimer de l’agressivité. Pour maîtriser l’angoisse. Pour accroître leur expérience. Pour établir des contacts sociaux. Intégration de la personnalité. Communiquer avec les autres. D.W. WINNICOTT, L’enfant et le monde extérieur, Chap. 4, p.123-128, Petite Bibliothèque Payot,1978. Photo © : Alina Santos 11
Des contes, des chansons et des marionnettes en pédiatrie b) Sur le terrain Depuis 1998 l’asbl Libr’AIRE intervient à l’hôpital Reine Fabiola à Bruxelles. Marionnettistes, passeuses d’his- toires, enjôleuses de notes et de rythmes, les artistes profession- nelles vont à la rencontre des enfants, des adolescents et de leur famille pour partager entre quatre yeux ou en groupe un moment de jeu. Le duo coloré pointe le bout de Photo © : Alina Santos son nez dans les services d’uro- logie, médecine interne, chirur- gie, dialyse, soins semi-intensifs, neurologie et oncologie. Il pousse un carrosse à chapeau. Des regards curieux se retour- nent, les enfants savent… «Il était une fois…» La bande à Popol et Louise Un air d’accordéon dans le couloir d’une salle. Des petites et des grandes oreilles se dressent. Embarquement immé- Du chapeau surgissent de «vraies» marionnettes. Avec diat aux quatre coins du rêve. La salle de jeu se fait pays du Popol et Louise, ça rigole, dérape, console, s’adoucit pour conte et les enfants sont du voyage. La dévoreuse et tis- se faire confidence au creux de l’oreille. Pour les cha- seuse d’histoires ensorcelle avec deux doigts de magie et touillis et les jeux de doigts, Léo l’escargot, Taupinette la entortille les yeux et les oreilles de rubans de mots et taupe et Titine la coccinelle sont de la partie. d’images. 12
Des contes, des chansons et des marionnettes en pédiatrie Elle sort aussi de sa besace des mots savoureux pour un fes- c) Le jeu : un plaisir partagé entre l’enfant et l’artiste tin de conte merveilleux à deux. Sur le chemin, elle invite l’enfant à inventer son histoire . Un certain degré dans le choix, une absence de contrainte dans la façon conventionnelle de traiter les objets, les maté- «Trois petites notes de musique» riaux et les idées , sont inhérents au concept de jeu . C’est ce qui le rattache principalement à l’art et aux autres formes «L’enchanteuse» vient partager avec l’enfant un moment de de création . musique pétaradant ou apaisant, jouer avec lui ou pour lui Susanna Millar, La psychologie du jeu chez les enfants des rythmes crépitants, des textes vivants et des mélodies et les animaux, p.24 Petite Bibliothèque Payot, 2003. caressant les papilles sonores. En chœur et à plusieurs, on roucoule des ballades, on ros- Notre expérience de terrain a fait surgir une question: quel signole des ritournelles, on ramage à tout bout de «chant». est le lien entre le «jeu» de l’artiste et le jeu de l’enfant ? Et certains, mine de rien, nous suivent des oreilles. A suivre… En duo, on choisit les mots, on les malaxe, on les secoue, on les émiette pour créer une chanson et l’enregistrer. 13
Théâtre de baladins dans les couloirs de l’hôpital Les Messagers du Cœur asbl Ce qui caractérise sans doute le plus cette association, c’est 39 rue de Livourne son Théâtre des rues “ Balladino ”. L’idée est venue du fait 1050 Bruxelles que ce serait à la fois plus sécurisant et dédramatisant pour Tél. : 0475/98 15 60 les enfants malades si les couloirs de l’hôpital devenaient E.mail : julie.river@lesmessagersducoeur.be des rues, avec des plaques nominatives, des décors muraux Site : www.lesmessagersducoeur.be et, des baladins qui les animent. Ainsi, est né un théâtre basé sur les principes d’improvisation de la commedia Objectifs dell’arte. Plusieurs personnages aux costumes excentriques et très colorés se produisent dans les couloirs, salles d’at- Donner la parole à l’enfant, tente et chambres. A côté de Tom Poucillo (monsieur catas- lui faire prendre conscience de ses responsabilités. trophe), Fée Gora aux histoires féeriques et Loupino le dis- Lui apprendre à communiquer. trait, ces dames “ Cressonnette ” et “ Ciboulette ”, héroïnes L’amener à s’exprimer par le texte, le dessin… toutes en verdure, promènent herbes et fleurs, sans oublier Le faire réfléchir sur le maintien de la paix dans le monde. leur marionnette Vanille, la petite vache. Avec des histoires Lui faire prendre conscience des problèmes humanitaires et un peu prairie, un peu légumes, on peut dire que, dans le sociaux. monde clos de l’hôpital, elles donnent un fameux coup de Par la créativité, aider l’enfant hospitalisé à mieux suppor- fraîcheur. ter la maladie et les soins et établir des échanges artistiques entre des établissements de soins pour enfants. Mais, Balladino, poète troubadour devenu l’ami des enfants Amener les artistes, journalistes et responsables d’institu- hospitalisés, reste incontestablement le personnage central tions à écouter l’enfant. de ce théâtre. Pas moins de onze personnages participent parfois à cette L’imaginaire en services de pédiatrie petite troupe. Cela quand s’y ajoutent quelques étudiants de l’Académie des Arts de Bruxelles qui apportent un L’association existe depuis 1988, mais c’est depuis sept ans excellent soutien au projet. maintenant qu’elle œuvre au sein des services de pédiatrie. Avec Balladino, on mime, on joue, on écrit, on s’exprime, Son but est d’y aider les jeunes patients à mieux supporter on ose. On découvre aussi, tantôt avec de la musique, tan- la maladie et les soins en leur offrant des ateliers d’expres- tôt avec les marionnettes, tantôt avec des accessoires rela- sion artistique dans lesquels créatif et récréatif se conju- tifs aux rythmes et à l’apprentissage de l’espace. Avec cette guent. Ainsi, tous les moyens d’expression sont abordés par approche théâtrale interactive, c’est le monde de l’imagi- des animateurs professionnels qui possèdent à la fois, une naire qui a franchi les portes du microcosme hospitalier. formation relative à l’enfance (assistants sociaux, éduca- teurs, instituteurs,…) et une compétence artistique exigée. 14
Théâtre de baladins dans les couloirs de l’hôpital eux, l’hôpital s’est un peu dépeuplé et les petits malades ont souvent le cœur bien serré. L’amertume s’installe. Les Messagers du Cœur ont mis au point des “ veillées ” lors desquelles Balladino, accompagné d’un ou deux autres person- nages rassemblent les petits patients. Cela pour une animation très feutrée, très cha- leureuse. Chaque veillée est préparée et réalisée sur un thème qui varie selon la saison ou les événements vécus et les fêtes : carnaval, halloween, noël, l’es- Photo © : Julie River pace, les musiques du monde… Il arrive fréquemment que les enfants malades y participent après avoir réalisé chacun sa propre marionnette au travers Ce travail est réalisé en accord avec les équipes médicales. de laquelle on raconte ses bobos, ses chagrins. Tous les projets leur sont préalablement soumis. Important aussi de dire que ces équipes sont convaincues du bien En service d’oncologie, là où les traitements sont lourds, les fondé de telles démarches. parents restent plus souvent auprès de leurs petits pour la Les animations données par “ Les Messagers du Cœur ” nuit. Ce sont alors des veillées très familiales qui y sont s’adressent à chaque enfant, quel que soit son âge, sa cul- données une fois par semaine. ture et sa pathologie. Rues et décors Les veillées Comme il a été dit plus haut, ces animations se déroulent Quand papa et maman s’en vont, Balladino reste… aussi bien dans les chambres (individuellement) qu’en salles (collectives) et que dans les couloirs, devenus rues. Vers 18 heures, quand les parents rejoignent leurs autres Ainsi, à l’Hôpital Reine Fabiola, presque tous les couloirs enfants à la maison et que les amis s’en retournent chez ont maintenant leur nom, sur une plaque bleue et bilingue, 15
Théâtre de baladins dans les couloirs de l’hôpital comme celles des rues de nos villes. Rue des Sparadraps, prend toute une série de panneaux décorés par plusieurs avenue des plâtres, petite rue du thermomètre, jardin des artistes plasticiens sur base de poèmes, dessins, modelages, orties (prises de sang), clos du cornet (téléphone)… clic- peintures et collages d’enfants malades. clac square (radiographie)…, autant de noms imaginés par D’autres décors enjolivent petit à petit les chambres du ser- les enfants eux-mêmes, guidés par les animateurs. Noms vice de cancérologie. qui d’ailleurs ne manquent pas d’humour. Un projet de plan a même été fait pour le rez-de-chaussée Appréciée pour son professionnalisme et sa régularité, cette de ce même hôpital. asbl compte à son actif pas moins de trois cent cinquante D’autres hôpitaux ont également leurs plaques de rues. Le animations par an, dont trois cent environ à l’Hôpital des même projet est en cours de réalisation à l’Hôpital Erasme. Enfants Reine Fabiola (cinq à six par semaine). Les autres constituent des projets plus ponctuels dans d’autres institu- Décors d’artistes tions hospitalières comme Erasme et St-Pierre à Bruxelles, St-Pierre à Ottignies, Braine-l’Alleud et La Louvière. Enfin, l’association, très soutenue par de nombreux artistes, a réalisé déjà plusieurs décors à l’Hôpital Reine Fabiola. Tant de projets qui contribuent à adoucir davantage l’uni- Ainsi, le “ Chemin d’Art ” créé il y a quelques années com- vers de l’hôpital. Photo © : Eliane Janin 16
Les clowns à l’hôpital Asbl “ Fables rondes ” L’écoute Contact clowns : Rue de l’Autruche, 25 - 1170 Bruxelles La principale qualité du clown est une grande écoute. Il Tél. : 02/675 05 43 - Fax : 02/538 92 58 arrive, attend, ajuste à tout moment ses actions sur ce qu’il Email : cat.vanandruel@skynet.be perçoit et y répond quand il peut. Il ne sait pas ce qui est Site web : www.hopiclowns.be.tf bon ou juste pour l’autre, il agit sans juger ni critiquer, dans le plus grand respect de l’individu. Il réunit ces conditions Pour les enfants hospitalisés à l’Hôpital Erasme : de cœur et de talent avec en plus, une bonne dose de sta- Service de pédiatrie, 2ème étage bilité. Le clown à l’hôpital doit savoir aussi simplement Route de Lennik, 808 - 1070 Anderlecht accepter les “ bides ” ou les moments de déprime. Tél. : 02/555 35 45 Qu’est-ce qui se passe, alors ? Lors de l’animation, l’enfant est sorti de son quotidien, c’est Fables Rondes existe depuis 1996 et a été créée par une un moment privilégié dans sa journée. Car le clown a un comédienne, un clown chanteur et un médecin généraliste statut bien particulier dans sa tête, c’est celui qui fait rêver, dans le but d’offrir aux enfants hospitalisés la présence qui dit des bêtises, qui l’emmène ailleurs. Et cela est dû au d’animateurs spécialisés. succès des clowns de cirque auprès de la plupart des enfants. Deux clowns ! A l’hôpital, il en va de même, l’attrait est grand pour cette visite insolite. L’enfant est émerveillé de voir ce clown en Devenir clown à l’hôpital ne s’improvise pas, les artistes vrai, soudain si proche physiquement, s’occuper de lui en qui sont engagés par l’asbl sont des professionnels du spec- particulier. C’est tout un monde féerique qui vient à lui. Car tacle qui ont, en outre, été formés à l’écoute. Ni soignants pouvoir rire ou sourire, dans les moments difficiles, permet ni thérapeutes mais compagnons de jeux, leur terrain d’ac- à l’enfant d’être plus détendu ou plus alerte, en tout cas, tion est la partie la plus saine de chaque enfant qui, même l’oblige à se resituer et à envisager différemment sa pré- très malade, retrouve une capacité de rêver, d’espérer et de sence à l’hôpital. se battre. Le travail de clown se fait en improvisation, en tenant Concrètement, lors d’une séance clownesque de soins, il compte de l’état, de la réceptivité de chaque enfant. Heu- peut y avoir, selon l’attention de l’enfant ou son souhait : de reusement, ce travail se fait toujours en duo, une manière la magie, de l’accordéon musette, des fils et des ficelles, d’enrichir le jeu, de rebondir sur le partenaire. Les clowns des sketches de soins sur un nounours ou une poupée, des se recyclent dans leur art par des stages, des séminaires, des histoires sans queue ni tête, des globules de savon et des lectures, des rencontres ou tout autre moyen d’adaptation ballons. Avec beaucoup de douceur et d’écoute, il y a une et de progression professionnelle et personnelle. recherche, en compagnie de l’enfant, de la piste qui lui 17
Les clowns à l’hôpital La déontologie Les clowns ont toujours un rapport avec le personnel médical avant de commencer le travail, afin de s’informer de l’évolution de certains enfants, de reprendre le contact avec la vie du service. Une façon aussi de se glisser dans l’univers médical sans pour autant demander à connaître tout le passé de l’enfant. Que doivent- ils savoir et que vaut-il mieux ignorer pour oser approcher en toute décontraction et sérénité ? Quelle est la juste distance pour chaque enfant en particulier ? Pour préserver cet esprit de bienveillance et d’attention dans leur travail, ils ont établi Photo © : Daniel Cap un code de déontologie qui définit le professionnalisme, la plaît et alors commence réellement l’animation d’une responsabilité des actes créatifs, le respect des convictions durée de 10 à 15 minutes par chambre. et des religions, les limites de l’expression artistique. Comme il est difficile de rire dans les moments très dou- La présence régulière loureux, il n’y a jamais d’acharnement zygomatique. Les parents et les proches présents dans une chambre sont En effectuant une visite par semaine dans le service de automatiquement inclus dans l’animation s’ils le souhai- pédiatrie, cela fait, en une année, près de 1000 interven- tent. tions de clowns auprès d’enfants hospitalisés pour des rai- Ce moment de jeu aura permis de diminuer l’angoisse et sons fort diverses. La régularité de ces prestations est une les inquiétudes liées à la maladie ou un accident. des garanties du bon déroulement de l’activité. La visite des 18
Les clowns à l’hôpital clowns est annoncée à l’accueil et dans les chambres par tif) agit un peu comme un moteur de recherche qui va per- des affichettes murales et un dépliant comprenant le code mettre à l’enfant de s’affranchir de certaines contraintes de déontologie des clowns à l’hôpital est disponible sur liées à son état. Le boulot de l’artiste, c’est aussi de susciter demande. Néanmoins, chaque enfant a le droit de recevoir l’envie chez l’autre de retrouver son propre élan créateur. cette visite ou de refuser l’accès à la chambre. Tout homme, toute femme et tout enfant a un pouvoir de création. L’artiste a juste cette particularité d’avoir le culot Le clown créatif de vouloir le montrer pour partager un moment d’huma- nité. Transportant avec eux des valises remplies de babioles Les clowns à l’hôpital ont aussi travaillé dans les services de diverses, de petites choses drôles ou tendres, ils arrivent, Pédiatrie de l’Hôpital de Braine l’Alleud-Waterloo, du C.H. poussés par un grand courant d’air frais venu du dehors. Le du Bois de l’Abbaye à Seraing et de la Clinique St Jean à processus créatif mis en jeu dans ces animations (l’impro- Bruxelles. visation théâtrale, la magie, la musique et le contact affec- Photo © : Daniel Cap 19
Raconter à l’hôpital Hopi Conte A.S.B.L. Pourquoi raconter à l’hôpital ? 13 avenue du Maréchal, 1180 Bruxelles Tél. : 02/379 01 80 - Fax : 02/375 21 64 L’hospitalisation d’un enfant est un événement souvent stressant tant pour les parents et les proches que pour l’en- Equipe fant lui-même. D’autant plus s’il se trouve en unité d’onco- logie ou en soins intensifs. L’hôpital est un lieu de passage 10 conteuses travaillant prioritairement dans les services obligé où l’enfant est coupé de son quotidien. Sa vie est pédiatriques de certains hôpitaux à Bruxelles (Cliniques “ en panne ” et a besoin d’aide ! Universitaires St Luc – Hôpital Universitaire des Enfants Reine Fabiola), mais également dans le Brabant wallon et le Mais d’abord, que peut-on dire du conte ? Hainaut. Il explore un autre monde, celui de l’invisible, qui affirme Historique et objectif que la vie ne se réduit pas aux apparences. Le conte a traversé des millénaires. Il est vivant de la vie Le projet d’Hopi Conte est né en décembre 1993, à la suite même de tous ceux qui l’ont raconté, du Nord au Sud, de de l’interpellation de l’une d’entre nous. La Présidente de l’Est à l’Ouest. Sa force, c’est sa fragilité. Elle lui vient du fait l’association ayant eu l’occasion de raconter dans un ser- qu’il ne se fixe nulle part. La mort ne peut donc pas l’attra- vice pédiatrique d’oncologie, elle s’est rendue compte que per. certains enfants vivaient difficilement leur maladie et leur Henri Gougaud dans “ Le murmure des contes ”, hospitalisation. Desclée de Brouwer, 2002. Un petit groupe s’est constitué autour de la nécessité d’or- Il pose des questions essentielles : d’où vient la vie, qu’est- ganiser un temps de “ conte à l’hôpital ”. Des contacts ont ce que la mort, qui suis-je et qui est l’autre, quel est mon été pris avec des hôpitaux et l’expérience sur le terrain s’est destin ?… Tout héros de conte est un chercheur de vérité. montrée rapidement positive vis-à-vis de l’enfant et de sa Ignorant au départ, petit, pauvre, orphelin ou mal aimé, il famille. Son importance a été reconnue par le personnel va, poussé par des forces obscures, à la recherche de soignant et les médecins des services. “ l’eau de vérité ”, la source de vie. En situation de “ manque ”, il part pour une aventure risquée au cours de Ces signes ont confirmé à toute l’équipe l’intérêt et la laquelle il va mobiliser toutes ses ressources pour com- valeur de cette initiative, qui s’est peu à peu enracinée. Le battre le géant, le monstre à sept têtes… Et, comme le dit projet s’est structuré en A.S.B.L. le 5 mai 1995. Ce projet Bruno de la Salle, “ marcher, c’est espérer ”. s’adresse prioritairement à l’enfant hospitalisé, du bébé de Devenant progressivement attentif aux signes autour de lui quelques mois au grand adolescent. et à travers l’acceptation de sa propre vulnérabilité, il 20
Raconter à l’hôpital s’ouvre à des forces bienfaisantes (alliés, guides,...) qui lui indiquent comment trouver ce qu’il cherche. Il accède enfin à une vie nouvelle, au bonheur tant cher- ché. Le manque de départ est comblé. Qu’apporte le conte à l’hôpital ? – L’occasion inespérée de “ partir en voyage ”, de “ larguer les amarres ”, tout en restant dans une chambre close. Fameux paradoxe… Car ce qui rend entre autre l’aventure du conte fabu- leuse, c’est l’élargissement soudain de l’espace et du temps : “ il était une fois… à l’extrémité des sept mon- tagnes…dans un pays plus petit qu’un mouchoir de poche… ” Le conte plonge dans l’univers de l’imaginaire poétique : un autre monde, un autre temps, un autre mouvement Pour les tout petits nous faisons appel aux comptines, chan- où tout est possible ! sonnettes, jeux de mains, etc. – La rencontre, par le biais du conte, de l’itinéraire de vie Parfois des petits “ objets magiques ” (caillou, bille, petite du héros qui affronte la solitude, la séparation, la diffé- marionnette) à partir desquels on raconte. rence. Le livre peut servir de support, éventuellement. Or, il s’agit de situations que tout enfant est amené à connaître et l’enfant malade particulièrement. Avec le Qu’observons-nous et que nous dit notre expérience ? message puissant : “ la vie continue, une lampe est allu- mée ! ” Manifestement, le conte agit sur ceux qui l’écoutent. Il les En s’identifiant au héros, l’enfant a la possibilité de place dans un autre état de conscience, dans la mesure où découvrir ou de ranimer en lui des forces intérieures ils acceptent de perdre leurs repères habituels ! insoupçonnées. Dans ce cas, le langage non verbal de l’enfant ou de l’ado- lescent est manifeste : il se cale dans ses oreillers, cherche Matériau employé une position confortable. Quand l’histoire est achevée, il s’étire, baille, se frotte les Le conte “ dans tous ses états ”, le conte merveilleux de yeux comme s’il se réveillait, ou revenait de loin… préférence, mais aussi les légendes, mythes, contes de Il règne dans la chambre un silence d’une qualité particu- sagesse, contes pour rire, proverbes, etc. lière. 21
Raconter à l’hôpital Parfois, l’enfant en dit quelque chose comme : ces adolescents qui nous ont offert leur confiance et avec – “ c’était une belle histoire ” qui nous avons vécu un temps “ magique ” d’intimité et de – “ j’appellerai ce jour, jour de chance ” plaisir partagés. – “ moi aussi, quand je serai grand, je serai un gardien d’histoires ”… Annexes Mais nous sommes aussi confrontées à des refus. Et – un soutien psychologique nous est indispensable afin de essayons de respecter notre proposition et que ce “ non ” clarifier et gérer nos émotions et pouvoir prendre dis- soit vraiment entendu. Particulièrement en milieu hospita- tance par rapport à la maladie, la souffrance et la mort. lier, où les contraintes de soins sont importantes et l’enfant Des supervisions sont programmées régulièrement avec totalement dépendant des décisions médicales. une psychologue travaillant en milieu hospitalier. De même, ce que l’enfant va faire avec l’histoire, c’est-à- – L’équipe de conteuses se réunit régulièrement afin de dire ce qu’il va en garder, en rejeter, en effacer, comment il partager ses expériences et sa pratique sur le terrain et va la réinventer, la recréer, c’est son œuvre de liberté, per- structurer ses projets individuels et collectifs. sonnelle, originale. – Afin que le conte reste vivant en nous, nous le nourris- Tout objectif pédagogique est exclu dans notre type de tra- sons par différentes formations (travail sur la voix, sur le vail. corps, sur la symbolique du conte, etc.). Quant à la famille, elle paraît singulièrement intéressée et Car “ rien n’est acquis, tout est toujours à inventer ” preneuse de ce que nous offrons à leur enfant. C’est dans cette conviction que nous trouvons patiemment, – “ je me suis sentie reposée, comme si j’avais pris un à la fois notre force et notre légèreté de conteuses. bain… ” – “ je me suis retrouvée enfant et ça m’a fait du bien ” Souhaits – “ ça me donne envie de raconter… peut-être, je pourrais essayer… ” Partager notre expérience à d’autres groupes de personnes, formées au conte et désireuses d’investir de nouveaux lieux Nous sommes attentives, en effet, à ce que les parents puis- où séjournent enfants et adolescents malades. Soit un tra- sent à leur tour, prendre le relais de la parole contée et vail de compagnonnage, de partenariat où chaque groupe découvrir leurs propres compétences. reste cependant autonome, développant ses propres spéci- ficités. Et quand c’est fini ? Et voilà, c’est fini… Trente ans de mensonge, sept lieues de Lorsque nous quittons la chambre, nous gardons dans le vérité cœur ce moment privilégié de relation avec ces enfants, Luda Schnitzer «Ce que disent les contes» Ed. du Sorbier 22
Musique en Pyjama Pratique : Une note pour chacun asbl 6 Ancien Dieweg - 1180 Bruxelles Tél. / Fax : 02/374 76 83 Photo © : Frédéric Pauwels Gsm 0476/21 61 43 (répondeur) ou 0475/75 76 07 E-Mail : unenotepourchacunasbl@skynet.be Une note pour chacun a décidé d’agir à l’hôpital avec la musique. Parce qu’elle est belle, qu’elle apporte le calme et la séré- nité, parce qu’elle introduit une dimension créative et ima- Public concerné : ginaire au cœur de l’hôpital et qu’elle donne quelques ins- tants d’oubli dans une émotion constructive. De la néonatologie à la psychiatrie, en passant par l’onco- Il est à noter le caractère à la fois ludique, culturel, éduca- logie, la salle de pré-anesthésie ou les soins intensifs, nos tif et, dans une certaine mesure, d’aide thérapeutique de activités s’adressent aux enfants et jeunes de 0 à 24 ans et notre association. rencontrent des problématiques très différentes. Bref historique et objectif : Etablissements où se déroulent actuellement les activités : Le projet de l’association est parti de la constatation sui- – Hôpital Universitaire des Enfants Reine Fabiola (école, vante : dans toutes les cultures, chant et musique font par- salle 66, service d’oncologie, soins semi-intensifs, pré- tie intégrante de la vie des enfants. anesthésie) Pourquoi devraient-ils en être privé parce qu’ils sont hospi- – Cliniques Universitaires St-Luc (Unités 81, 82, 92 et 96) talisés ? – Hôpital Universitaire St-Pierre de Bruxelles (Unité 90) – Hôpital Erasme (Unité psychiatrique pour adolescents et En avril 92, “ Une note pour chacun ” s’ est constituée en service pédiatrique) asbl avec pour objectif de mettre la musique à la portée – Le Nid “Marcelle Briard” des enfants handicapés et des enfants hospitalisés. – Ecole Escale (Ottignies) Depuis février 94, José Van Dam en a accepté la prési- dence d’honneur. 23
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