ANALYSE n 5 L'habitat alternatif décent : définitions et argumentaire
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ANALYSE n°5
L’habitat alternatif décent : définitions
et argumentaire
Analyse réalisée dans le cadre des activité d’éducation permanente
avec le soutien de la Fédération Wallonie-BruxellesRENCONTRES INTERREG
JUIN 2011
L’ H A BITAT A LTER NATIF D ECENT :
D E F I N I TI ON S E T A RG U M E N TA I R E
I. UN ESSAI DE DÉFINITION DE L’HABITAT
ALTERNATIF
Au départ, nous étions partis sur l’idée Partant ensuite de travaux réalisés par
qu’un essai de typologie devrait prendre Habitat et Participation dans le domaine de
en compte trois cas de figure : l’habitat l’innovation sociale, un nouveau schéma, un
alternatif subi - l’habitat alternatif choisi nouvel essai de définition de l’habitat
et l’habitat alternatif culturel. Mais à alternatif a été proposé et davantage validé par
l’examen des expériences et des rencontres, il les groupe des travailleurs sociaux belges et
s’est avéré que les cloisons étaient très - trop Français. Certains participants ont également
étanches pour que ce soit un réel découpage souhaité que l’on parle plutôt d’alternatives en
opérationnel. Par exemple, parmi les résidents en matière d’habitat que d’habitat alternatif ...
camping résidentiel, il peut se retrouver les 3
catégories de personnes citées ci-avant. Bref,
cette première approche s’est avérée Voici le schéma proposé :
inopérante.
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DEFINITION ET ARGUMENTAIRE SUR L’HABITAT ALTERNATIFRENCONTRES INTERREG
JUIN 2011
Voici en quelques mots la manière de lire ce - L’innovation enfin peut se situer au
schéma : il est proposé dans la foulée d’une niveau du processus entre acteurs. Dans
réflexion sur l’innovation sociale, réflexion qui le cas de l’habitat alternatif, on pourra y voir
situe l’innovation dans trois «niches» des modes de construction qui génèrent
possibles : d’autres relations entre les personnes (auto-
construction mutuelle), des modes de vie qui
- L’innovation se situe au niveau de créent également des relations différentes
l’objectif poursuivi, à savoir un changement (habitat groupé, jardins familiaux, squat, etc.).
de société. Dans le cas qui nous occupe, Ces «autres» manières de vivre ensemble
l’habitat alternatif serait celui qui interroge nos peuvent aussi renvoyer à d’autres modèles de
«modèles» de société. Par exemple, parce société, mais pas forcément.
qu’une partie de notre liberté d’existence tient
au fait de voyager (gens du voyage), parce que L’habitat alternatif ou alternatives en
nous estimons que cette société devrait être plus matière d’habitat sont donc infinies en variétés,
sobre dans sa consommation (Quartier de la en diversités d’appropriation. La question de
Baraque et simplicité volontaire au delà du la gouvernance est à nouveau posée : ce
simple logement), etc. type d’habitat doit-il être toléré ?
- L’innovation se situe au niveau des Contrôlé ? Soutenu ? Et quels sont les outils
solutions novatrices en matière d’habitat. dont dispose le politique et les administrations
dans le cas de l’habitat alternatif, citons toutes pour ce faire ? Peut-on imaginer des normes de
les formes de logement qui explorent des salubrité, d’habitat digne qui soient applicables à
matériaux nouveaux ou de récupération, des ce type de logement ? Est-ce que ce type
formes originales de plans architecturaux, d’habitat doit être considéré uniquement comme
proposent dans une société donnée un type de une réponse à la crise (du logement) ou est-ce
logement que l’on a l’habitude de rencontrer aussi un phénomène normal de redéploiement de
dans d’autres sociétés (Yourtes, habitat sous l’esprit inventif humain ?
tente, habitat troglodyte, etc.)
POUR INFO :
EN 2009, EN FRANCE, UNE PROPOSITION DE LOI EST DEPOSEE PAR MESSIEURS MAMèRE, COCHET ET
RUGY, POUR TENTER DE FAIRE RECONNAÎTRE LE TIERS SECTEUR DE L’HABITAT PARTICIPATIF, DIVERSIFIE
ET ECOLOGIQUE (rejet de la proposition fin 2009)
Entre un habitat privé, livré aux mains des promoteurs immobiliers et l’habitat public structuré autour du
mouvement HLM, les auteurs auraient voulu faire reconnaître un tiers secteur, celui qui recouvre le logement des
ménages les plus défavorisés, le parc social de fait et l’habitat hors normes. En particulier, le titre I veut permettre
de développer l’habitat participatif, avec un droit à l’expérimentation et l’innovation dans la construction via un label
de qualité et le titre III propose la reconnaissance du statut de l’habitat mobile, diversifié et écologique, pensant
tout spécialement aux populations de Roms migrants et des personnes qui résident à l’année en camping.
DEFINITION ET ARGUMENTAIRE SUR L’HABITAT ALTERNATIFRENCONTRE INTERREG
JUIN 2011
II. UN ARGUMENTAIRE
TRANSFRONTALIER EN FAVEUR DE
L’HABITAT ALTERNATIF
Les travailleurs sociaux sont également aller Au nom du respect de l’initiative
un pas plus loin, se demandant ce qui pourrait - citoyenne. Il faut combattre l’assistanat et
aux yeux des politiques - justifier la co-existence pousser les personnes à être actrices de leurs
de l’habitat alternatif et de l’habitat plus solutions de logement. Il faut donc promouvoir
«classique». l’investissement personnel, l’initiative, la
participation qui permettront une réelle
DE MANIERE GENERALE, au nom appropriation du logement.
de quoi devrait-on accepter ou tolérer
l’habitat alternatif ou les alternatives en Au nom de l’innovation sociale :
matière d’habitat ? Face aux critères de pouvoir développer des projets pilote dans le
salubrité et d’habitat digne, existe-t-il des respect des normes sociales. L’innovation doit
arguments permettant de tolérer d’autres être permise en termes d’habitat, de social et
alternatives de logement ou d’habitat sur les d ’ a rc h i t e c t u r e. Pe r m e t t r e d e s z o n e s
territoires français et belges ? d’expérimentation et de créativité. Valoriser ce
qui est méconnu et autoriser le droit à l’erreur.
Au nom de la liberté de choisir sa
forme de logement, dans une optique de Au nom de la capacité à ‘faire’ selon
choix de vie telle que définie dans la Déclaration ses moyens (culturels – financiers – techniques).
universelle des Droits de l’Homme. Le contraire Il s’agit de respecter les solutions de logement
serait anti-démocratique. Chacun devrait avoir le que le personnes mettent elles-mêmes en place,
droit d’habiter selon ses propres normes à dans un contexte où le logement social ne
condition de respecter les normes sociétales parvient plus à remplir ses missions.
générales.
Au nom des limites financières des
Au nom du refus de la norme (habitat acteurs. Il s’agit de proposer des solutions qui
‘classique’ ou des ‘classes moyennes’). Il est tiennent compte des facteurs économiques et
important de respecter les idéaux de chacun. Il budgétaires des personnes. L’accessibilité
s’agit du respect de l’altérité, du droit à la financière est une priorité que le partage de
différence. certains frais (quand il s’agit d’habitat alternatif
de type collectif) permet de rencontrer.
Au nom d’un droit à la résistance, à la
contestation dans un contexte de normalisation Au nom du besoin relationnel des
et de cadres réglementaires sans cesse accrus. Un acteurs : entraide, partage, vie en communauté,
exemple : faut-il donner à ce point autant de son solidarité, ... (re)création de liens sociaux face à
temps de vie pour pouvoir habiter décemment ? l’isolement et resocialisation dans les habitats
alternatifs ayant une dimension collective.
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Au nom du Droit au logement, pour gens n’ont même plus le droit de subir le
lutter contre les phénomènes (ou les politiques) camping, ils doivent aller à la rue). Ces
de ségrégations urbaines, sociales et ethniques phénomènes sont indignes d’un pays riche. Le
qui génèrent de la violence. Il s’agit dans un logement social ne remplit plus son rôle.
contexte de crise de prendre des mesures de crise, Au nom de la mise en place de
permettant au personnes d’éviter la rue, le squat solutions ‘tremplin’ pour les personnes
subi. sans logement, lors d’accidents de vie ou de
parcours de vie.
Au nom des besoins vitaux des
personnes : ET plus spécifiquement pour les
- Besoin physique et psychique de sécurité à habitats alternatifs “culturels” :
long terme (face aux formes de précarité des Au nom d’un certain respect de la
logements sociaux). filiation, de l’héritage culturel, des
- Besoin de santé. Les ‘nouveaux’ logements origines, des racines familiales.
n’offrent pas forcément cette sécurité (matériau
comme le formaldéhyde) Au nom de certaines croyances,
- Besoin d’intimité de la personne. identité culturelle, diversité culturelle.
Ces besoins sont aussi des critères minimaux de
salubrité – habitat digne.
Malgré la remarque ci-dessus concernant la E n c o n c l u s i o n , n o u s avo n s i c i u n
typologie habitat alternatif «choisi» «subi» argumentaire POUR un habitat alternatif
«culturel», nous reproduisons ici le résultat de «digne» qui s’ancre dans la réalité de
nos travaux qui s’étaient ancrés dans ce terrain que connaissent les travailleurs sociaux
découpage. Au-delà de ce lui-ci, retenons français et belges qui se sont réunis.
l’argumentaire ‘spécifique’ présenté par les
travailleurs sociaux :
ET plus spécifiquement pour les
habitats alternatifs “choisis” :
Au nom d’une certaine congruence
avec l’environnement et l’écologie (selon les
types d’habitat proposés : matériaux écologiques,
matériaux recyclés, habitats simples).
ET plus spécifiquement pour les
habitats alternatifs “subis” :
Au nom du bon sens car il n’existe
pas d’autres logements disponibles (ex : les
DEFINITION ET ARGUMENTAIRE SUR L’HABITAT ALTERNATIFRENCONTRES INTERREG
JUIN 2011
III. NOTRE DEFINITION DU LOGEMENT
DECENT
Lors de notre journée de rencontre qui s’est Par «besoins vitaux», ils entendaient trois
déroulée le 9 juin, nous avons été à la rencontre choses :
d’habitats alternatifs en Belgique, dans les
campings du Parc résidentiel du Lac de Bambois - Besoins physiques et psychiques de
à Mettet ainsi que de la Cala à Genappe. Nous sécurité à long terme (ce qui s’oppose
reviendrons sur ces visites ultérieurement dans la souvent aux formes de précarité liées aux
partie consacrée aux aleternatives en matière dispositifs de transit et d’insertion, voire même
d’habitat. Pour l’heure, ce qui nous intéresse, les conditions du logement social) ;
c’est de soulever une piste de définition de la - Besoins de santé physique et
décence qui a été proposée par les travailleurs mentale. On notera que certains ‘nouveaux’
sociaux belges et français suite à ces visites. logements n’offrent pas cette sécurité (en
utilisant des matériaux contenant du
En effet, les participants ont estimé que les formaldéhyde) ;
normes de salubrité et de décence sont souvent - Besoin d’intimité de la personne, ce
extrêmement complexes sans prendre en compte qui peut être variable d’un individu à l’autre,
les «besoins vitaux» des personnes. Dans un selon sa culture, son environnement familial,...
contexte de crise, mais aussi par simple souci de
permettre l’habiter autrement, les participants Selon nous, c’est à partir de ces 3 «besoins
ont souhaité que ces normes soient au vitaux» qu’il faudrait pouvoir décliner les critères
plus près des «besoins vitaux» des minimaux de salubrité, d’habitat digne.
habitants.
Les besoins physiques et
psychiques de sécurité à long
terme
Les besoins liés à la Le besoin d’intimité
santé physique et (variable)
mentale
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