Aperçu des politiques du climat, de l'énergie et des transports au Québec - Document de travail du JCCTRP, série 2019-1

 
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Document de travail du JCCTRP, série 2019-1

Aperçu des politiques du climat, de l'énergie et des
             transports au Québec

                                 PAR

          LOUIS-CHARLES CODERRE, MYRIAM GOULET ET MARK PURDON

                  ESG-UQÀM & UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL

                               JUIN 2019
Aperçu des politiques du climat, de l'énergie et des transports au Québec - Document de travail du JCCTRP, série 2019-1
À PROPOS DU JCCTRP
Le Partenariat de recherche conjoint sur le climat et les transports (JCCTRP) est un nouveau partenariat de
recherche réunissant des universités, instituts de recherche privés, entreprises et organisations à but non
lucratif de premier plan. Venant du Québec, de la Californie, de l'Ontario et du Vermont ces derniers
travaillent sur les politiques de transport et de lutte contre le changement climatique. Le secrétariat du
JCCTRP est basé à l'École des sciences de la gestion de l'Université du Québec à Montréal (ESG-UQÀM).
L’objectif ultime du JCCTRP est d’identifier les facteurs techniques, économiques et politiques qui
conditionnent le potentiel des politiques relatives au climat et aux transports efficaces sur le plan
environnemental, efficientes économiquement et politiquement viables, et de comprendre leurs
implications pour l’échange de droits d’émission.
                  WWW.JCCTRP.ORG                                   SECRETARIAT@JCCTRP.ORG

DIVULGATION FINANCIÈRE
Le JCCTRP bénéficie du soutien du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) et du
National Center for Sustainable Transportation (NCST) du programme University Transportation Centers
(UTC) du US Department of Transportation.

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CONTENU
Résumé ......................................................................................................................................................... 1
Introduction ................................................................................................................................................. 2
Politiques climatiques, énergétiques et acteurs clefs au Québec ............................................................. 2
   Politiques fédérales ................................................................................................................................... 3
       Politiques sur le climat .......................................................................................................................... 3
       Prix sur le carbone ................................................................................................................................ 4
       Politiques de l’énergie........................................................................................................................... 4
   Politiques québécoises .............................................................................................................................. 5
       Politiques sur le climat .......................................................................................................................... 5
       Marché du carbone ................................................................................................................................ 6
       Politiques de l’énergie......................................................................................................................... 10
       Électricité : production et exportations ............................................................................................... 10
   Politiques municipales ............................................................................................................................ 12
Politiques en transport et acteurs clés au Québec .................................................................................. 13
   Politiques fédérales ................................................................................................................................. 13
       Standards sur les combustibles propres .............................................................................................. 13
       Norme Véhicule Zéro-Émission (VZE) .............................................................................................. 14
       Standards d’émissions des véhicules .................................................................................................. 14
   Politiques provinciales ............................................................................................................................ 14
       Norme Véhicule Zéro-Émission (VZE) .............................................................................................. 15
       Modélisation en transport.................................................................................................................... 15
   Politiques municipales ............................................................................................................................ 17
Synthèse et discussion ............................................................................................................................... 17
Références .................................................................................................................................................. 20
Documentations pertinentes ..................................................................................................................... 24

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RÉSUMÉ
Ce document de travail dresse un portrait des politiques québécoises en matière d’énergie, de transport et
d’atténuation des changements climatiques. Une attention particulière est accordée au cadre institutionnel
et aux différents acteurs clefs à différents paliers gouvernementaux. Cela comprend un examen des
principales politiques des gouvernements fédéral et provincial ainsi que de celle de la ville de Montréal, la
plus grande agglomération urbaine de la province. La vue d’ensemble présentée ici permet d’illustrer les
interactions complexes entre les différentes institutions au Québec, au Canada et sur le continent nord-
américain. Il permet également de mettre en lumière un certain chevauchement entre les acteurs et leurs
programmes respectifs. Ce chevauchement et la diversité des politiques et des acteurs impliqués
compliquent à l’occasion une vision d’ensemble de la situation. C’est en partie à quoi tente de répondre ce
document de travail. Il détaille aussi les cibles fixées en matière de réduction des gaz à effets de serre
(GES) et l’état l’avancement des juridictions concernées. Il présente l’état de la situation sur les mesures
adoptées ou planifiées par les gouvernements ainsi que les investissements envisagés, notamment
concernant les réglementations et la tarification sur le carbone, l’électrification des transports et le
développement des infrastructures et du transport en commun. Cette ébauche aborde notamment les
pratiques en modélisation et l’importance des modèles dans l’élaboration de politiques publiques. Un regard
particulier est aussi porté sur le rôle du Québec en tant que grand producteur d’énergie propre sur le nord-
est du continent américain. Hydro-Québec est un fournisseur d’électricité pour les États du nord-est des
États-Unis avec lesquels il entretient des relations depuis des décennies.

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Aperçu des politiques du climat, de l'énergie et des transports au Québec - Document de travail du JCCTRP, série 2019-1
INTRODUCTION
Rédigé dans le cadre du Partenariat de recherche conjoint sur le climat et les transports (JCCTRP), ce
document de travail dresse un portrait des politiques québécoises en matière d’énergie, de transport et
d’atténuation des changements climatiques. Parmi les sources d’émissions au Canada et aux États-Unis, le
secteur des transports est le plus important et s’avère être un des secteurs les plus difficiles à réduire
l’ampleur des GES. Une attention particulière est accordée au cadre institutionnel et aux différents acteurs
clefs à différents paliers gouvernementaux. Cela comprend un examen des principales politiques des
gouvernements fédéral et provincial québécois ainsi que de celle de la ville de Montréal, la plus grande
agglomération urbaine de la province. La vue d’ensemble présentée ici permet de mettre de l’avant les
interactions entre les différentes institutions au Québec, au Canada et sur le continent nord-américain. En
2016, le Québec représentait 23% de la population canadienne (Institut de la Statistique du Québec 2018)
et était responsable de 11 % des émissions du pays (MELCC2018b).

Il y a un intérêt croissant pour la tarification du carbone comme instrument politique de réduction des
émissions de gaz à effet de serre, tel que les marchés du carbone et les taxes sur le carbone de même que
leurs liens avec d’autres efforts de régulation pour atténuer les changements climatiques. En Amérique du
Nord, le Québec et la Californie (et, pour les premiers six mois de 2018, également l’Ontario), jouaient un
rôle clé en termes de politiques climatiques à travers la liaison de leurs systèmes d’échange de droits
d’émissions opérant sous l’égide de la Western Climate Initiative (WCI). En 2016, le gouvernement fédéral
canadien a fait de la tarification du carbone la pierre angulaire de son plan d’action pour le climat. De la
même manière, les états du nord-est des États-Unis, incluant le Vermont, ont établi la Regional Greenhouse
Gas Initiative (RGGI). Récemment, presque tous les États membres de la RGGI ont annoncé leur intention
de développer un cadre régional pour adresser les GES dans le secteur des transports (Commonwealth of
Massachusetts 2018). Malgré l’importance de la tarification du carbone comme instrument politique pour
combattre les émissions, ce n’est pas le seul instrument de réduction des émissions. D'autres instruments
réglementaires ont aussi été développés pour lutter contre les émissions dans le secteur des transports
comme les standards de carburant à faible teneur en carbone ou les mandats de véhicules à zéro émission.
Les collaborations inter- et transdisciplinaires impliquées dans la tarification du carbone à travers les
juridictions –et plus particulièrement celles en lien avec les systèmes d’échange d’émissions—promettent
d’apporter un éclairage sur plusieurs questions auxquelles font face les gouvernements, les entreprises et
d’autres acteurs des politiques dans les juridictions concernées.

POLITIQUES CLIMATIQUES, ENERGETIQUES ET ACTEURS CLEFS AU QUEBEC
Au Canada, l’environnement et plus spécifiquement les changements climatiques sont des domaines de
compétence partagée entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. Cela explique un
certain chevauchement entre les politiques, stratégies et réglementation de chaque juridiction concernant
les émissions (Becklumb 2013). En ce qui concerne l’énergie, les provinces ont la prérogative sur la gestion
des ressources sur leur territoire et donc des ressources énergétiques. La production d’électricité relève ainsi
de la compétence provinciale. Cependant, Ottawa détient la prérogative sur les questions de sécurité
énergétique et des projets énergétiques à l’échelle du territoire canadien, tels que des oléoducs. De manière
générale, le gouvernement fédéral détient les compétences sur les questions à caractère transfrontalier. Il
est nécessaire de noter les variations entre les provinces en terme d’émissions de GES (Figure 1). Depuis
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2005, les provinces des maritimes, comme la Nouvelle-Écosse, ont vu leurs émissions décliner de 33%
alors que celles de l’Alberta ont augmenté de 18% (ECCC 2019).

    F IGURE 1. É MISSIONS DE GES PAR PROVINCE ET TERRITOIRE AU CANADA , EN 1990, 2005 ET 2016

Adapté du « Rapport d'inventaire national 1990-2016 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada, » par Environnement
et Changement climatique Canada. 2018, Récupéré de https://www.canada.ca/fr/environnement-changement-
climatique/services/indicateurs-environnementaux/emissions-gaz-effet-serre.html

Politiques fédérales

Politiques sur le climat
Établi suite à la signature de l’Accord de Paris, l’objectif 2030 canadien cible une réduction de 30% des
émissions de GES par rapport à 2005 (Government of Canada 2015). Afin d’atteindre cet objectif, le
gouvernement canadien a élaboré le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements
climatiques est un large cadre réglementaire visant l’établissement de nouvelles réglementations,
notamment concernant l'industrie, la tarification carbone et les standards de carburants à faible teneur en
carbone (Gouvernement du Canada 2018). Le programme met également à disposition des ressources
fédérales pour le développement d'énergies renouvelables, l'élimination des centrales au charbon et la
modernisation des réseaux électriques. Les investissements fédéraux significatifs visent à compléter et à
accélérer les investissements des provinces et des territoires selon les critères applicables du programme.
Le cadre implique la collaboration de plusieurs ministères fédéraux, notamment Environnement et
Changements Climatique Canada, Infrastructure Canada, Transport Canada, Ressources Naturelles Canada
et Innovation, Sciences et Développement Économique Canada. Le partage des compétences entre le
gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux dans les domaines de l’environnement, du
transport, de l’énergie et des ressources naturelles a favorisé une approche collaborative entre les deux
paliers de gouvernements. Le Gouvernement du Canada n’émet pas d’exigences concernant la modélisation
des politiques au niveau provincial. Toutefois, les transferts financiers fédéraux sont conditionnels à des
investissements de la part d’un gouvernement provincial.

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Prix sur le carbone
L’établissement d’un prix national sur le carbone se retrouve au centre du programme fédéral climatique
canadien. La stratégie fédérale vise à instaurer une taxe dans la mesure où les provinces n’aient pas déjà
mis en vigueur un système de tarification carbone. Dans une telle situation, la taxe fédérale commencerait
à 10 dollars par tonne d’équivalent CO2 (t éq CO2) en 2018 et atteindrait 50 $/t éq. CO2 à l'horizon 2022.
Chaque gouvernement provincial est libre d’instaurer une taxe sur le carbone ou un système d'échange de
droits d'émission pour se conformer. Les provinces qui ne se conformeront pas à cette règle se verraient
imposer une taxe sur le carbone par Ottawa en 2019 (MacNeil et Paterson 2018). La taxe se veut sans
incidence sur les revenus des ménages. Les revenus générés par le gouvernement fédéral reviendraient
respectivement aux contribuables de chaque province.

Le Gouvernement du Canada exige que les instruments de tarification des provinces soient équivalents et
correspondent aux standards minimums concernant les réductions de GES et le prix du carbone. Le marché
carbone du Québec étant déjà en vigueur, il faudra attendre l’examen de révision officiel en 2022 pour
confirmer que le système de plafonnement et d’échange de droits d’émissions (SPEDE) est conforme aux
critères fédéraux (Kyriazis 2017). Cependant, les détails de ces critères demeurent sujets à des discussions.
Il n’est pas encore établi dans quelle mesure les critères considéreront l’équivalence en fonction du prix du
carbone et de la quantité d’émissions réduites par une tarification carbone.

Politiques de l’énergie
Sur le plan énergétique, le Gouvernement du Canada adopte une approche collaborative tenant compte du
partage des compétences entre le fédéral et le provincial. Du fait de l’héritage politique du Programme
énergétique national de 1980, le gouvernement fédéral canadien demeure réticent à tout ce qui ressemble à
une stratégie énergétique nationale (Doern et al., 2015 : 149). L’annonce en 2015 d’une Stratégie
canadienne de l’énergie a donc été confiée au Conseil de la Fédération (CdF), une organisation qui réunit
les gouvernements provinciaux. La Stratégie vise l’amélioration de la conservation et de l’efficacité de
l’énergie, l’accroissement des technologies d’énergie propre ainsi que l’acheminement de l’énergie à la
population et aux marchés mondiaux (Conseil de la Fédération 2015). Le Tableau 1 présente les thèmes
clés et les axes de travail de cette stratégie. Le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les
changements climatiques intègre un volet sur l’électricité (Gouvernement du Canada 2016) qui s’appuie
principalement sur les initiatives des provinces et de cette Stratégie.

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TABLEAU 1. THEMES ET AXES DE TRAVAIL DE LA STRATEGIE CANADIENNE DE L’ENERGIE DE 2015
          Viabilité et conservation                       Technologie et innovation                          Acheminement de l’énergie
 1. Promouvoir l’efficacité énergétique et la     4. Accélérer le développement et le                7. Créer et améliorer un ensemble de réseaux
 conservation de l’énergie.                       déploiement de la recherche et des                 modernes, fiables et sans danger pour
 2. Passer à une économie plus faible en          technologies de l’énergie qui favoriseront une     l’environnement pour la transmission et le
 carbone.                                         production, une transmission et une utilisation    transport de l’énergie à l’échelle canadienne ou
 3. Améliorer l’information sur l’énergie et la   plus efficace de sources d’énergie propre et       pour l’importation et l’exportation.
 sensibilisation à cet égard                      conventionnelle.                                   8. Améliorer la rapidité et la prévisibilité des
                                                  5. Élaborer et mettre en œuvre des stratégies      processus décisionnels et d’approbation
                                                  visant à répondre aux besoins en ressources        réglementaire tout en maintenant des normes
                                                  humaines du secteur de l’énergie, actuellement     rigoureuses de protection de l’environnement et
                                                  et tout au long du                                 en protégeant l’intérêt public.
                                                  XXIe siècle.                                       9. Favoriser la diversification du marché.
                                                  6. Faciliter l’exploitation de sources d’énergie   10. Viser la participation officielle des provinces
                                                  renouvelable, verte et/ou plus propre afin de      et des territoires aux discussions et aux
                                                  répondre à la demande future et contribuer aux     négociations internationales sur l’énergie.
                                                  objectifs et aux priorités sur le plan
                                                  environnemental.
Adapté du Conseil de la Fédération (2015), p.9

Politiques québécoises

Politiques sur le climat
Le Gouvernement du Québec s’est fixé comme objectifs en 2020 et 2030 une réduction de 20% et de 37,5%
respectivement de ses émissions globales par rapport à 1990 (MELCC 2018a). Le Plan d’action sur les
Changements Climatiques 2013-2020 (PACC 2013-2020) prévoit également pour une réduction entre 80 à
95% des GES d’ici 2050 par rapport à 1990. Selon Environnement et Changement Climatique Canada, en
2016, la province avait réduit de 11% ses émissions (ECCC 2018).

Le PACC 2013-2020 est un programme                             F IGURE 2. Répartition DES éMISSIONS DE GES AU QUé BEC,
vaste d’atténuation et d’adaptation aux                                     EN 2016, PAR SECTEUR D ’ACTIVIT é
changements climatiques impliquant la
participation de 15 ministères et
organismes               gouvernementaux
provinciaux. L’ensemble des programmes
concerne principalement les secteurs des
transports, du bâtiment, de l’industrie, de
l’agriculture et des matières résiduelles.
Le Ministère des Transports, de la
Mobilité durable et de l’Électrification
des transports (MTMDET), Transition
énergétique Québec (TEQ) et le Ministère
de l’Environnement et de la Lutte aux
changements climatiques (MELCC)
constituent les principaux acteurs du plan.                   Adapté de « Inventaire québécois des émissions de gaz à effet de serre
Le budget pour la période 2013-2020                           en 2016 et leur évolution depuis 1990, » par le MELCC, 2018, p. 7.
                                                              Récupéré de
s’élève à près de 4 G$ (Conseil de gestion
                                                              http://www.environnement.gouv.qc.ca/changements/ges/2016/inventair
du Fonds vert 2018). Celui-ci est alimenté                    e1990-2016.pdf

                                                                                                                                                           5
principalement par les revenus du Fonds vert, qui est lui-même financé en majorité par les revenus issus
des ventes aux enchères de droits d’émissions du marché carbone. Entre 2013 et 2018, ce sont près de 2,25
G$ qui ont été amassés par les ventes aux enchères, ce qui explique l’évolution du budget du PACC depuis
2013 (MELCC 2018). Les autres financements du PACC 2013-2020 sont issus d’organismes provinciaux,
du gouvernement fédéral, des municipalités et de sources privées.

Selon la version 2018 du Bilan mi-parcours du PACC 2013-2020 (MELCC 2018), le Québec est en voie de
rater sa cible de réduction pour 2020. Le potentiel de réduction des mesures actuelles s’élève à 2,3 Mt éq
pour 2020. Établies en 2013, les cibles initiales de réduction du plan d’action étaient fixées à 6 Mt éq. CO2
pour 2020. Le Conseil de gestion du Fonds vert (CGFV) a effectué une révision de l’allocation des fonds
du PACC 2013-2020 et de sa performance. Les mesures actuelles impliquent des coûts par tonne de GES
réduite variant de 200$ à 1300$. Ainsi, le CGFV recommande l’abandon de certaines mesures permettant
de bonifier à d’autres ayant un meilleur rendement (Conseil de gestion du Fonds vert 2018).

Cependant, encore une fois, l’analyse ci-dessus ne tient pas compte des droits d’émission achetés par les
entreprises québécoises à leurs homologues californiennes et donc des réductions d’émissions réalisées hors
du Québec. Comme nous le verrons plus loin, il est probable qu’une partie importante des réductions
d’émissions du Québec a été réalisée en Californie. Il demeure important de discuter de la possibilité pour
les Gouvernements du Québec et du Canada reconnaître et de prendre en compte ces réductions en
Californie dans le calcul des émissions canadiennes et québécoises. Le Québec et la Californie ont lié en
2013 leurs efforts dans un marché du carbone conjoint au moyen d’une entente administrative entre les
deux gouvernements, l’Entente entre le gouvernement du Québec et le California Air Resources Board
concernant l’harmonisation et l’intégration des programmes de plafonnement et d’échange de droits
d’émission de gaz à effet de serre, laquelle a été ratifiée par décret par le Gouvernement du Québec en 2013
(Trudeau 2018). Selon l’article 8 de l’Entente Québec-Californie de 2017, incluant initialement l’Ontario,
il est prévu qu’un mécanisme de répartition des réductions des émissions entre les juridictions soit mis en
œuvre. Ce mécanisme servira à comptabiliser les réductions attribuables à chaque juridiction afin d’éviter
un double comptage (Government of Ontario et al. 2017). Comme il sera discuté plus bas, il est envisageable
qu’une part des émissions du Québec furent réalisées en Californie.

F IGURE 3. RÉPARTITION BUDGÉTAIRE ENTRE LES              F IGURE 4. RÉPARTITION DU BUDGET DU PACC
PRINCIPAUX MINISTÈRES PARTENAIRES DU PACC                      2013-2020 ALLOUÉ PAR SECTEUR
                2013-2020

Adapté de MELCC (2018a)                                 Adapté de MELCCC (2018a).

                                                                                                           6
Marché du carbone
Sous les auspices de la Western Climate Initiative (WCI), les gouvernements du Québec et de la Californie
ont lié leurs marchés du carbone respectifs, avec une première vente aux enchères conjointe ayant lieu en
novembre 2014. Le marché commun couvre près de 85% des émissions globales de la province, à travers
les secteurs des transports, industriel, résidentiel, commercial, institutionnel ainsi que de l’agriculture. La
part non couverte des émissions globales se retrouve principalement dans les secteurs des déchets, des
fertilisants, de l’aviation et du transport maritime (Ministère des Finances du Québec 2017). À la dernière
vente aux enchères commune en mai 2019, le prix de la tonne de carbone fut fixé à 17 US$, soit 23 CAN$
(CARB 2019 & MELCC).

      F IGURE 5 : ÉVOLUTION DU PRIX DU MARCHÉ PRIMAIRE ET SECONDAIRE, NOV 2014 À JUIN 2018

            Adapté de « Evolution of the joint carbon market in 2018 : impact of the entry and potential exit of
            Ontario, » par B. Cloarec et M. Purdon, 2018, IQCarbone, Montréal, p.3.

Tel que mentionné plus haut, lorsqu'on considère la contribution du marché du carbone aux efforts du
Québec pour atteindre ses objectifs de réduction des émissions pour 2020 et 2030, il est important de
distinguer les réductions d'émissions réalisées au Québec de celles des entreprises québécoises en
Californie, qui est actuellement la seule juridiction liée par marché. Le marché carbone lié a été le sujet
d’effort considérable de modélisation. Par exemple, les scénarios de réductions de GES et des impacts
économiques du marché carbone lié entre le Québec et la Californie ont été projetés à l’aide du Modèle
d’Équilibre Général du Ministère des Finances du Québec (MEGFQ). Voir le tableau 2 ci-dessous. Le
ministère des Finances a modélisé deux scénarios de tarification du carbone, l'un dans lequel les prix
augmentent progressivement et l'autre dans lequel les prix augmentent plus rapidement. Dans le premier
scénario, les prix passeraient de 21 $ CAN / téq. CO2 en 2020 à 59 $ CAN / t éq. CO2 en 2030. Selon le
deuxième scénario, où les prix augmentent plus rapidement, le prix des quotas d'émission augmenterait de
22 $ CAN / t éq. CO2 en 2020 à 93 $ CAN / t éq en 2030. Les scénarios génériques étaient respectivement
d'une réduction de 3,6 Mt éq et de 5,3 Mt CO2 sur le territoire du Québec à l'horizon 2030. En d’autres
mots, on estime que le marché carbone contribuera entre 14% et 20% des efforts de réduction sur le territoire
du Québec pour l’atteinte de la cible de 2030. Les efforts pour effectuer les 80% à 86% des réductions
restantes seraient réalisés à travers d'autres mesures politiques ainsi que par l'achat de droits d'émission à
                                                                                                             7
l'extérieur du Québec par des entreprises québécoises. Selon le modèle North American TIMES Energy
Model (NATEM), considérant l’état actuel de la technologie au Québec, des changements technologiques
auraient lieu seulement à des prix relativement plus élevés, soit au-dessus de 100 $/t éq. CO2 (Ministère
des Finances du Québec 2017).

 TABLEAU 2 : I MPACTS DU SPEDE SUR LE PRIX DE CARBONE ET LES ÉMISSIONS DE GES EN 2023 ET 2030
                      SELON DEUX SCENARIOS DES PRIX DES DROITS D’EMISSIONS

                                                  Unité         Scénario d’augmentation           Scénario d’augmentation
                                                                 graduelle des prix des           plus rapide des prix des
                                                                         droits                            droits
                                                                   2023           2030              2023            2030
 Prix des droits d’émission                   $CAN/t éq. CO2      ~21$             59$              ~22$             93$

 Réductions au Québec attribuables au           Mt éq CO2           2,2            3,6               2,6            5,3
 changement de comportement des agents
 économiques en raison du SPEDE

 Autres mesures et achats de droits d’émission Mt éq CO2          13,8          22,8               13,4             21,2
 à l’extérieur du Québec
 Réductions totales des émissions de GES                          16,0          26,4               16,0             26,4
Adapté de « Impacts économiques du système de plafonnement et d'échange de droits d'émission de gaz à effet de serre du
Québec, » par le Ministère des Finances du Québec, 2017, Gouvernement du Québec, p. 6 et 23.

Il est important de souligner que les prix du carbone au Québec seraient probablement beaucoup plus élevés
sans liaison du marché du carbone avec la Californie. Les efforts de modélisation antérieurs estimaient que,
d’ici 2020, le marché Québec-Californie permettrait aux entreprises québécoises de réduire entre 20% et
47% les coûts nécessaires de conformité, en comparaison avec les coûts effectifs de réduction des émissions
au Québec (Purdon et Sinclair-Desgagné 2015). Pour que le Québec atteigne son objectif 2020 de réduction
des émissions sans liaison de son marché du carbone avec la Californie —avec des réductions effectuées
entièrement sur le territoire québécois — le prix des droits d’émission se situerait entre 79 et 93 $ CAN / t.
CO2 (Purdon et Sinclair-Desgagné 2015, p. 11). Voir la figure 6. Autrement dit, les prix du carbone sur un
marché du carbone québécois non lié en 2020 devraient être des prix comparables sur un marché du
carbone lié Californie-Québec en 2030. De même, on estime que le prix carbone nécessaire au Canada,
pour que le Gouvernement fédéral atteigne son objectif 2030 (présenté dans le cadre de l’engagement du
Canada à l’Accord de Paris), devrait s’élever à 160-200 $ CAN / t éq. CO2 d'ici 2030 (Jaccard, 2016;
Jaccard et al. 2016). Dans l’ensemble, on pourrait s’attendre à beaucoup plus de réductions d’émissions à
des prix carbone moins élevés rendus possibles par la liaison du marché avec la Californie, où les modèles
économiques suggèrent qu’il est relativement moins coûteux de réduire les émissions. Étant donné que
l’économie du Québec est relativement propre, compte tenu du rôle important de l’hydroélectricité, il ne
serait possible de réaliser un changement technologique important au Québec seulement à un prix carbone
très élevé. Bien que cela ne soit pas impossible, il sera très difficile politiquement d'atteindre un prix carbone
élevé.

                                                                                                                             8
F IGURE 6 : GAINS ESCOMPTES DES ÉCHANGES ENTRE LA C ALIFORNIE ET LE QUÉBEC (2013-2020) PAR
                                          RAPPORT A UN SCÉNARIO NON LIÉ

Adapté de « Les retombées économiques prévues du marché du carbone conjoint entre la Californie et le Québec, » par M.
Purdon et N. Sinclair-Desgagné, 2015, Chaire d’études économiques et politiques américaines, p.13.

Il est aussi intéressant de comparer l’impact du prix carbone et des taxes sur les prix de l’essence dans les
différentes juridictions. Dans le Tableau 3, nous comparons les prix du carbone entre le Québec et la
Colombie-Britannique (C.-B.), y compris les deux régions métropolitaines de Montréal et de Vancouver.
La Colombie-Britannique est bien connue pour sa taxe sur le carbone, qui s'élevait à 35 $ par t éq. CO2 en
2018, ce qui est nettement supérieur au prix de 23 $ par t éq. CO2 observé récemment sur le marché du
carbone Californie-Québec. Cependant, il existe une distinction entre le prix de l’essence avant taxes,
l’impact de la tarification carbone et l’impact des autres taxes sur le prix à la pompe. Premièrement, nous
observons que malgré la hausse considérable du prix du carbone, les taxes sur l’essence sont plus élevées
au Québec qu’en Colombie-Britannique. Cela inclut Montréal et Vancouver, où les taxes sur l’essence
s’élevaient respectivement à 55 ¢ le litre et 51 ¢ le litre. À l'extérieur des deux principales régions
métropolitaines, les taxes sur l'essence s'élevaient respectivement à 51 ¢ et à 38 ¢ le litre au Québec et en
Colombie-Britannique. En ce qui concerne les prix de l'essence, en 2018, les prix du carbone dans les deux
juridictions ne représentaient que 4 ¢ le litre au Québec et 8 ¢ le litre en Colombie-Britannique. La taxe de
transit de Vancouver seulement contribue notamment à environ 17 ¢ le litre, soit environ le double de la
taxe sur le carbone.

Essentiellement, le Québec impose depuis longtemps des taxes plus élevées sur l’essence que les autres
provinces canadiennes, la tarification du carbone dans des endroits comme la Colombie-Britannique
commençant à se rapprocher de celle du Québec. Il faut savoir que les autres taxes ont un effet similaire à
une taxe carbone sur le comportement des consommateurs et par le fait même, une fois agrégée, augmentent
théoriquement le prix du carbone sur l’essence. Ainsi, selon la Canadian Taxpayers Federation (Bowes
2018), le prix réel du carbone sur le carburant s’élèverait à 231$/t éq. CO2 à Montréal et 215$/t éq. CO2
dans le reste du Québec. Dans le cas de Vancouver et du reste de la Colombie-Britannique, il s’élèverait
respectivement à 228$/t éq. CO2 et 173$/t éq. CO2. Dans l’ensemble, bien que le prix officiel du carbone
                                                                                                                         9
soit inférieur à celui de la Colombie-Britannique, le total des taxes sur l’essence et, par conséquent, le prix
réel du carbone dans cet important segment du secteur des transports est en réalité plus élevé au Québec.

 TABLEAU 3 : C OMPARAISON DES PRIX DE L’ESSENCE AU QUÉBEC ET EN C OLOMBIE -BRITANNIQUE EN 2018
                                             Montreal    Vancouver    Rest of Quebec    Rest of BC

                   Prix carbone ($/t éq.CO2)     $18.00       $35.00            $18.00       $35.00
                   Prix à la pompe ($/litre)      $1.38        $1.55             $1.32        $1.31
                   Prix avant taxes ($/litre)     $0.83        $1.05             $0.81        $0.92
                   Taxes ($/litre)                $0.55        $0.51             $0.51        $0.38
                     - Prix carbone ($/litre)     $0.04        $0.08             $0.04        $0.08
                     - Taxe de transit ($/litre)  $0.03        $0.17               NA           NA
                     - Autres taxes ($/litre)     $0.48        $0.26             $0.47        $0.30
                   % Taxes                         40%           33%              39%          29%
          Adapté de « 20th Annual Gas Tax Honesty Report » par J. Bowes, 2018, Canadian Taxpayers Federation.

Politiques de l’énergie
En 2016, le Gouvernement du Québec publiait la Politique énergétique 2030 ayant pour objectif
d’améliorer de 15 % l’efficacité avec laquelle l’énergie est utilisée, de réduire de 40 % la quantité de
produits pétroliers consommés, d’augmenter de 25 % la production totale d’énergies renouvelables et
d’augmenter de 50 % la production de bioénergie d’ici 2030. Selon les cibles établies dans la Politique
énergétique 2030, la proportion d’énergie renouvelable consommée du Québec passerait de 48% en 2016
à 61% d’ici 2030 (Gouvernement du Québec 2016). Les réductions prévues par les cibles du programme
entraîneraient une réduction de 16 MT éq. CO2 pour 2030. Cela représente une réduction des émissions de
GES de la province de 18% par rapport à 1990 (Gouvernement du Québec 2016)

La Politique énergétique 2030 a mené à la création de Transition énergétique Québec (TEQ) en 2017,
société d’État ayant pour mandat d’accompagner le Québec pour une transition énergétique efficace et sobre
en carbone. TEQ assure notamment la coordination entre les différents ministères pour la mise en œuvre
des programmes en efficacité énergétique dans le domaine résidentiel, industriel, commercial, institutionnel
et des transports (Gouvernement du Québec 2017). Selon son Plan directeur 2018-2023 (TEQ 2018), TEQ
prévoit des investissements de 6,7 G$, en collaboration avec d’autres ministères (Whitmore et Pineau 2019).
L’organisme anticipe notamment une diminution de la consommation de produits pétroliers de 12 % en
2023 par rapport à 2013 (Transition énergétique Québec 2018).

Électricité : production et exportations
La production d’électricité au Québec est composée à 95% de source hydro-électrique et 3,8% de source
éolienne (Figure 8). L’électricité répond à 36 % de la demande énergétique de la province (Figure 9). Le
Québec demeure, pour sa consommation, dépendant à 64% d’énergie fossile. Le pétrole consommé au
Québec est importé majoritairement de l’Ouest canadien (53%) et des États-Unis (40%). Auparavant, la
vaste majorité du pétrole importé au Québec provenait d’autres pays, notamment l’Algérie. L’inversion du
pipeline 9B d’Enbridge en 2015 et l’expansion du pétrole de schisme américain ont mené à ce changement
d’origine des sources d’approvisionnement en pétrole du Québec (Whitmore et Pineau 2019).

                                                                                                                10
Hydro-Québec, société d’État responsable de la                F IGURE 8. PRODUCTION D’ ÉLECTRICITÉ AU
production, de la vente, de l’achat et du transport de
                                                                     QUÉBEC PAR SOURCE , 2017
l’ensemble de l’électricité au Québec est un des
acteurs énergétique centraux de la province
(Lanoue et Hafsi 2010). La division Transport,
TransÉnergie, gère l’une des plus grandes zones de
transit électrique sur le continent nord-américain,
avec 15 interconnexions la reliant à l’Ontario, le
Nouveau-Brunswick et les États de New York et de
la       Nouvelle-Angleterre         (Hydro-Québec
TransÉnergie 2017). Hydro-Québec collabore ainsi
avec des partenaires américains, tel que le New
York Independent System Operator (NYISO), dans
l’opérationnalisation du transport et des échanges
sur le réseau électrique nord-est américain.

Le Northeast Power Coordinating Council
(NPCC) est l’instance régionale couvrant le
Québec, l’Ontario, les Maritimes ainsi que les États
du      Maine,      Vermont,      New      Hampshire,     Adapté de « État de l’énergie au Québec 2019, » par P.-O.
Massachusetts, New York, Connecticut et Rhode             Pineau et J. Whitmore, 2018, Chaire de gestion du secteur
Island. Le NPCC détient le mandat de créer des            de l’énergie, HEC Montréal, préparé pour Transition
                                                          énergétique Québec, p. 18.
normes régionales pour améliorer la fiabilité du
système d'alimentation interconnecté dans le Nord-
                                                           F IGURE 9. C ONSOMMATION TOTALE PAR FORME
est américain. (Northeast Power Coordinating
                                                                    D ’ÉNERGIE AU Q UÉBEC , 2016
Council s. d.) Il s’agit d’une des huit filiales
régionales, de type « electrical reliabality
organization » (ERO), relié au North American
Electric Reliability Corporation (NERC). Cette
organisation, agissant sous la supervision du
Federal Energy Regulatory Comission (FERC) des
États-Unis et d’autorités gouvernementales
canadiennes, assure la réduction du risque, la
fiabilité et la sécurité des réseaux électriques sur le
continent nord-américain (North American Electric
Reliability Corporation 2017). La structure
institutionnelle est disponible en Annexe A. La
division TransÉnergie d’Hydro-Québec doit donc
répondre aux exigences soumises, notamment
concernant les standards de fiabilité, la transmission
des données et la modélisation des réseaux de
transport (Hydro-Québec TransÉnergie 2018).               Adapté de « État de l’énergie au Québec 2019, » par P.-O.
                                                          Pineau et J. Whitmore, 2018, Chaire de gestion du secteur de
En 2017, la capacité d’exportation d’Hydro-Québec         l’énergie, HEC Montréal, préparé pour Transition
s’élevait près de 6 000 MW. Sur les 205,6 TWh             énergétique Québec, p. 29.

                                                                                                                      11
d’électricité vendue par Hydro-Québec, 34,4 TWh furent exportés vers les marchés extérieurs du Québec.
Plus de 76% de ces exportations étaient destinés aux États de New York et de la Nouvelle-Angleterre
(Hydro-Québec 2018). Hydro-Québec estime que les exportations ont permis d’éviter 8,0 millions de tonnes
éq. CO2 (Hydro-Québec International 2019). Selon le dernier Rapport annuel d’Hydro-Québec publié en
février 2019, les exportations d’hydroélectricité ont atteint un record pour l’année 2018 de 36,1 TWh
(Hydro-Québec 2019).

Trois nouveaux projets d’exportation d’électricité de la société d’État sont actuellement à l’étude et
impliquent la construction de nouvelles lignes (Hydro-Québec International 2019). La ligne Northern Pass,
passant par le New Hampshire, aurait quant à elle un potentiel de 1 090 MW. Ce projet à lui seul permettrait
une réduction de 9% des émissions actuelles de GES de la Nouvelle-Angleterre (Northern Pass
Transmission s. d.). Ce projet est actuellement en suspens suite au refus des autorités du New Hampshire
de remettre le permis de construction au promoteur américain. La ligne New England Clean Energy
Connect (NECEC) à travers le Maine et vers le Massachusetts augmenterait la capacité d’exportation
d’Hydro-Québec de 1 200 MW. La mise en service de la nouvelle ligne est prévue pour 2022 (New England
Clean Energy Connect s. d.). La réalisation du projet NECEC s’avère nécessaire à Hydro-Québec pour
honorer le contrat d’approvisionnement de 9,45 TWh par année sur 20 ans que la société d’État a obtenu
en 2018 des distributeurs d’électricité du Massachussetts (Hydro-Québec 2019). Finalement, le projet
Champlain Hudson Power Express permettrait d’accroître la capacité d’exportation de 1 000 MW vers la
région métropolitaine de New York (Transmission developers Inc 2019). Les opportunités d’exportations
de l’hydro-électricité québécoise s’accentuent par l’intérêt grandissant des États américains envers les
énergies renouvelables.

           F IGURE 10: STRUCTURE INSTITUTIONNELLE DU RÉSEAU ÉLECTRIQUE NORD -AMÉRICAIN

Politiques municipales

Au Québec, le plus grand centre urbain est la ville de Montréal, laquelle a adopté le Plan de réduction des
émissions de gaz à effet de serre de la collectivité́ montréalaise 2013-2020. La ville se fixe ainsi un objectif
de réduction de 30% des GES par rapport à 1990 (Ville de Montréal 2018). Le plan propose 12 pistes de
solutions concernant essentiellement l’efficacité énergétique dans le secteur résidentiel, commercial et
institutionnel ainsi que sur une transition dans les modes de transport et le développement du transport en
commun. Le Rapport Montréal Durable 2016-2020 (Ville de Montréal 2016b) s’inscrit dans la même
lignée, mais comprend une approche plus globale en lien avec les 17 Objectifs de Développement durable

                                                                                                             12
(ODD) des Nations Unies. En 2014, les efforts de la ville de Montréal avaient contribué à une réduction de
23% des GES par rapport à 1990. Cependant, en 2018, la municipalité doute d’atteindre son objectif de
2020. Cela s’explique par la croissance de la motorisation des ménages, l’augmentation des véhicules
polluants et une diminution de la part modale du transport collectif, et ce malgré des investissements
importants (Ville de Montréal 2018).

POLITIQUES EN TRANSPORT ET ACTEURS CLES AU QUEBEC
La compétence quant au secteur des transports au Canada est partagée entre le gouvernement fédéral et les
provinces. Le transport maritime, aérien et des marchandises ainsi que les questions de transport
interprovincial relève du fédéral. La compétence revient aux gouvernements provinciaux à ce qui a trait
aux transports intraprovinciaux. L’ensemble des infrastructures de transport routier et des transports en
commun ainsi que la planification et la réglementation relève donc des provinces et des municipalités.

Politiques fédérales

Le domaine des transports est intimement lié à celui des infrastructures. En 2016, Infrastructure Canada
prévoyait, dans son Plan Investir dans le Canada, un investissement de 180 milliards de dollars sur 12 ans
dans les infrastructures du pays (Infrastructure Canada 2018b). De ces investissements, 28,7 milliards et
26,9 milliards de dollars étaient respectivement alloués aux transports en commun et aux infrastructures
vertes. Le Gouvernement du Canada exige des contributions budgétaires des provinces dans le cadre de
transfert fédéral aux provinces et aux municipalités. L’ensemble des exigences est spécifié par l’entremise
d’ententes bilatérales entre Infrastructure Canada, les provinces et territoires (Infrastructure Canada 2018a).

Dans le cadre des infrastructures vertes, l’allocation des fonds aux provinces et municipalités s’effectue en
vertu de l’Optique des changements climatiques rédigé par Infrastructure Canada. Ce document publié en
collaboration avec Environnement et Changement Climatique Canada vise à soutenir le Cadre pancanadien
sur la croissance propre et les changements climatiques. Il présente les exigences en matière d’évaluation
des projets d’atténuation des GES. Les réductions de GES doivent être calculées par des scénarios de
maintien du statu quo, conformément aux normes ISO de quantification, de surveillance et de déclaration
des réductions d'émissions (ISO 2019) ou encore aux procédures du GHG Protocol for Project Accounting
(Infrastructure Canada 2018c).

La Banque d’infrastructure du Canada avec un Fonds de 35 milliards de dollars est également un acteur
clef dans le support aux initiatives des provinces, des municipalités et des acteurs privés dans la réalisation
de projets d’infrastructures transformateurs, notamment en transports en commun, dans les infrastructures
vertes et le commerce (Infrastructure Canada 2016).

En ce qui concerne Transport Canada, il a inclus, dans sa politique Transport 2030, des dispositions sur le
transport écologique et l’innovation technologique en faveur d’un réseau de transport à faible empreinte
carbone en appui au plan climatique canadien. Des investissements sont prévus, notamment dans
l’élaboration de réglementation et en innovation dans les transports et énergies propres.

Standards sur les combustibles propres

                                                                                                            13
Transport Canada collabore avec Environnement et Changements Climatique Canada et Innovation,
Sciences et Développement économique Canada au développement d’un standard de carburant à faible
teneur en carbone, appelé Norme sur les combustibles propres ou Clean fuel standard (Transport Canada
2018). Celle-ci aurait pour objectif de réduire annuellement 30 Mt éq. CO2 d’ici 2030 au Canada. Selon
l’échéancier d’ECCC, le dévoilement de la proposition de réglementation est prévu pour le printemps 2019.
La mise en œuvre, elle, est prévue pour 2022. Le développement de la réglementation se baserait une
analyse d’impact coût-bénéfice d’une telle norme sur les parties prenantes au Canada. De plus, en juillet
2018, ECCC a également procédé à un appel d’offres pour l’acquisition d’un modèle d’analyse de cycle de
vie des carburants pour la conception de la norme. Le dévoilement de la version préliminaire du modèle est
également prévu pour le printemps 2019 (Gouvernement du Canada 2018).

Norme Véhicule Zéro-Émission (VZE)
Inspiré en partie par les mesures québécoises discutées plus haut, Transport Canada a annoncé, en 2017,
son intention d’adopter une norme VZE d’ici la fin de 2018 (Transport Canada 2017). Cependant, cette
mesure se faisait toujours attendre au printemps 2019. Des experts ont démontré, à l’aide du modèle
REspondent-based Preference and Constraint (REPAC), le potentiel d’une norme VZE, d’un incitatif
financier à l’achat et d’un déploiement d’un réseau de bornes de recharge au Canada pour l’électrification
du parc automobile. Le scénario de base prévoit une augmentation des ventes annuelles de véhicules
électriques rechargeable de 6% à 17% au Canada d’ici 2030. Avec l’adoption d’une norme VZE, d’un
incitatif à l’achat de 7 500$ et l’implantation d’un réseau de bornes au Canada, les scénarios établis
prédisent une hausse potentielle des parts de marché des VZE de 30% à 48% au Canada en 2030 (Axsen,
Goldberg, et Wolinetz 2017).

Standards d’émissions des véhicules
En ce qui concerne les standards d’émissions des véhicules à essence pour l’industrie au Canada, la
réglementation canadienne utilise actuellement comme référence les standards américains de la
Environmental Protection Agency (EPA) depuis 2012 (Posada et al., 2018). Devant les discussions de
l’EPA et de l’administration Trump pour réviser la réglementation sur les véhicules à faibles émissions
dans l’industrie automobile américaine, certains avancent que le Canada devrait envisager d’établir sa
propre réglementation dans ce secteur (Bérubé et Turcotte 2018).

Politiques provinciales

En 2018, le Gouvernement du Québec a lancé sa Politique de mobilité durable 2030 : Transporter le
Québec vers la modernité ainsi que son Plan d’action 2018-2023. La politique traite des transports collectif
et actif, routier, maritime, aérien et ferroviaire, ainsi que les interventions sur le réseau routier, dans une
perspective intégrée. Elle met de l’avant neuf cibles à l’horizon 2030, notamment une réduction de 20%
des déplacements en auto solo, une réduction de 40% de la consommation de pétrole en transport, une
réduction de 37,5% des émissions de GES dans le secteur des transports sous le niveau de 1990 et une
réduction de 20% des dépenses brutes des ménages allouées au transport (Gouvernement du Québec 2018)
Le Ministère des Transports du Québec se révèle l’un des acteurs principaux de la mise en œuvre de la
politique. Les investissements prévus par le Plan d’action 2018-2023 sont estimés à plus de 9,7 G$
(Whitmore et Pineau 2019).

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