BIODIVERSITÉ Continentale - GIEC NORMAND
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#3 GIEC NORMAND BIODIVERSITÉ Continentale et Marine Synthèse réalisée par l’ANBDD à partir de la note produite par Estelle Langlois (Université de Rouen Normandie), Loïc Chéreau (GRETIA), Nathalie Niquil (CNRS Université de Caen Normandie), Jean-Claude Dauvin (Université de Caen Normandie) w w w. n o r m a n d i e . f r
INTRODUCTION UN GIEC POUR LA NORMANDIE La Région Normandie à l’Université de Rouen Normandie et membre du GIEC international. Il a confié à un groupe de regroupe climatologues, géographes, 23 chercheurs et experts écologues, géomorphologues, normands l’étude des agronomes, écophysiologistes, conséquences locales du géologues, biologistes, océanologues, changement climatique, épidémiologistes… pour éclairer l’action politique et mieux 9 DOMAINES D’ÉTUDE informer le grand public. e janvier à décembre 2020, ils D ont établi un diagnostic dans neuf domaines d’étude : MÊME COMBAT les changements climatiques et aléas n référence au Groupe d’experts E météorologiques, la qualité de l’air, l’eau, intergouvernemental sur l’évolution la biodiversité, les sols et l’agriculture, du climat mis en place en 1988, à la pêche et la conchyliculture, les la demande des sept plus grandes territoires (habitat et mobilités), les puissances économiques de la planète, systèmes côtiers, la santé (pollutions, la Région Normandie a créé un nouvelles maladies). GIEC normand. À l’image de son aîné, il associe les meilleurs experts ÉTAT DES LIEUX pour appréhender les conséquences possibles du changement climatique a somme de leurs travaux est traduite L en Normandie. au sein d’un corpus de documents de synthèse à destination de tous les décideurs de la région et du grand 23 SPÉCIALISTES public. Grâce à ce travail de projection, e GIEC normand est composé de L le GIEC normand endosse 23 chercheurs et experts, tous issus le rôle de lanceur d’alerte d’universités et agences normandes. auprès des normands. Il est coprésidé par Stéphane Costa, professeur de Géographie Physique et environnement à l’Université de Caen POUR EN Normandie, également président du SAVOIR Conseil scientifique de la stratégie nationale de gestion du trait de Suivez l’évolution de travaux de côte, et Benoit Laignel, professeur recherche du GIEC normand sur en géosciences et environnement normandie.fr GIEC NORMAND 2 B I O D I V E R S I T É I #3
BIODIVERSITÉ Continentale et Marine Caractéristiques générales du thème support de l’expression d’une for- midable biodiversité, qu’elle soit animale, végétale, microbienne ou fongique. Le changement climatique, au tra- vers de la hausse des températures mais également de la hausse des niveaux des océans, exerce une pression indéniable sur la biodiver- sité continentale et marine, pres- sion qui risque de s’accentuer dans le futur si des mesures drastiques ne sont pas prises. Les effets de ce changement climatique (CC) sur la biodiversité s’accumulent avec d’autres facteurs de pression sur la biodiversité liés aux activi- tés humaines, comme les change- ments d’occupation du sol ou de pratiques, les pollutions, la frag- mentation des habitats ou encore l’implantation d’espèces invasives. La région Normandie n’échappe E n France (métropole et outre- mer), la richesse biologique est estimée à 182 854 espèces, répar- remarquable richesse de milieux plus ou moins anthropisés, se dé- clinant en forêts, bocages, plaines, pas à ces constats et des aug- mentations de températures sont d’ores et déjà simulées pour les an- tie en différents règnes : animal, falaises et cordons de galets, cor- nées à venir, notamment en saison végétal, fongique et microbien dons de dunes, estuaires, prés sa- estivale, associées à des diminu- (Annexe 2, INPN 2019). lés et milieux saumâtres, prairies tions de précipitations en été (DA- et bas-marais tourbeux, vallées et TAR 2013 a,b). Dans ce contexte, En Normandie, le contraste géolo- prairies alluviales, landes sèches, quelles seront les conséquences gique qui divise en deux grandes pelouses et forêts sur sols acides, sur le maintien et le devenir des parties le domaine terrestre de la landes humides et tourbières différents groupes taxonomiques région (partie Ouest située essen- acides, pelouses et boisements terrestres, aquatiques et marins tiellement sur le massif Armoricain calcicoles, ainsi que des zones présents en Normandie, et quelles et partie Est située elle sur le bas- bocagères, agricoles et urbaines. problématiques et actions peuvent sin Parisien) est à l’origine d’une L’ensemble de ces milieux est le émerger de ces constats ? DOnnées et mOdèles utilisés dans le cadre de cette étude L’ensemble des sources utilisées pour chacun des trois domaines traités, sont détaillées en annexe 1 : • Biodiversité floristique terrestre de Normandie, • Biodiversité des invertébrés continentaux terrestres et aquatiques de Normandie, • Biodiversité marine. BIODIVERSITÉ I #3 3 GIEC NORMAND
BIODIVERSITÉ Continentale et Marine État des cOnnaissances et premières ObservatiOns de cOnséquences avérées du changement climatique sur la biOdiversité de NOrmandie = LES CONSTATS 1 2 portés par les espèces selon les ré- gions, certains taxons bénéficient d’un statut de protection national. En Normandie, 30 espèces portent BIODIVERSITÉ ce statut soit 7% des espèces pro- BIODIVERSITÉ FLORISTIQUE tégées nationalement. DES INVERTÉBRÉS TERRESTRE DE La richesse floristique de la Nor- CONTINENTAUX NORMANDIE mandie s’explique d’une part par TERRESTRES ET les faciès géologiques et pédolo- giques contrastés mais également AQUATIQUES DE en raison d’un climat très contrasté NORMANDIE à l’échelle du territoire notamment en termes de précipitations (Sa- vouret et Cantat, 2008). Les zones actuellement les plus riches identifiées (appelées aussi hotspot de diversité) sont locali- sées dans les vallées de Seine, de l’Epte, de l’Iton et de la Laize. A contrario, les milieux présen- À l’échelle de la Normandie, il tant les richesses floristiques les L est recensé 1 856 espèces vé- a faune invertébrée normande gétales. Cette richesse normande plus faibles sont les milieux les comporte de l’ordre de 15 000 représente plus de 30 % de la plus homogènes où les pratiques à 20 000 espèces (Mouquet, flore vasculaire métropolitaine. agricoles s’exercent régulièrement communication personnelle). (plateaux cultivés essentiellement) L’Union Internationale pour la ou encore les milieux à fortes Le phénomène d’expansion vers le Conservation de la Nature (UICN) contraintes écologiques exerçant Nord de l’aire de répartition d’es- définit une Liste Rouge des espèces une pression de sélection sur les pèces d’invertébrés continentaux menacées comme un indicateur et espèces les plus adaptées (bas n’est pas nouveau en Normandie. Il un outil de référence ayant pour marais salés). semble cependant qu’il s’accélère but de dresser un bilan objectif du particulièrement depuis le début degré de menace des espèces pré- À l’heure actuelle aucune étude du XXIème siècle et prend de l’am- sentes sur un territoire donné. Sur n’est réalisée à l’échelle régio- pleur (Simon, 2016). les 421 taxons menacés à l’échelle nale pour comprendre comment la nationale, 49 espèces indigènes flore normande évolue face à des Aujourd’hui, le déplacement d’es- sont présentes en Normandie modifications climatiques de plus pèces en voie d’expansion via cer- (Douville et Zambettakis, 2019). en plus prégnantes : sécheresses tains corridors géographiques se estivales, températures de plus en précise, notamment en empruntant En complément de cette classifi- plus chaudes en été, hiver doux, les corridors thermophiles, sculptés cation mettant en avant les risques baisse des nappes phréatiques… par les grands fleuves du sud / sud- GIEC NORMAND 4 BIODIVERSITÉ I #3
BIODIVERSITÉ Continentale et Marine est vers le nord / nord-ouest de la ré- Orthoptèroïdes : pèces sont peu sensibles à la quali- gion, ainsi que le long des littoraux et Des observations inhabituelles d’es- té écologique des milieux. sur les coteaux calcicoles de la Nor- pèces méridionales emblématiques, Araignées : mandie. Si des flux d’espèces de l’est telle la Mante Religieuse. Cette année Plusieurs espèces ont récemment vers l’ouest sont aussi détectés, leurs (2020), pour la première fois, elle a colonisé la Normandie, telle Zorop- couloirs de déplacement demeurent été observée au cœur du frais bocage sis spinimana encore cantonnée au encore méconnus. ornais, en marge du département de tiers sud de la France il y a une quin- la Manche, en situation urbaine. De nombreuses premières men- zaine d’années (Le Péru, 2007). Les tions d’espèces aux échelles dé- Odonates : araignées concernées sont ther- partementales, voire régionales, Progressivement de nouvelles mo-xérophiles et peu exigeantes ont été réalisées ces dernières espèces gagnent du terrain et quant à leurs habitats. années. Pour un nombre croissant semblent s’installer. En 2020, la d’espèces d’invertébrés continen- Coléoptères coprophages : forte colonisation d’une espèce le cas remarquable de l’expansion taux, l’impact du CC se confirme méridionale, Orthetrum albistylum, de Coprimorphis scrutator, espèce progressivement. a été observée par plusieurs odo- découverte en Normandie en 2008 natologues. Les témoignages pro- Le CC est aussi identifié comme un et qui a progressé en cinq ans de viennent de nombreuses localités. facteur favorable à la dissémination 40 km vers le nord a été bien carac- Le Perche est un lieu privilégié d’ob- et à la prolifération des espèces térisé (Simon, 2012). Seul le CC est servations, véritable porte d’entrée exotiques envahissantes, tel le fre- envisagé comme cause probable pour ce type d’espèce vers l’Orne et lon asiatique. de l’évolution de son aire de répar- le Calvados. À défaut de programmes de suivi tition. scientifique spécifique des effets Lépidoptères : du CC sur les faunes normandes et En 2020, près d’une dizaine d’es- leurs rôles fonctionnels, de nom- pèces de papillons de jour ont vu breuses observations sont réali- leur aire de répartition s’étendre sées ponctuellement. Quelques vers le Nord ou leur fréquence d’oc- exemples de faits marquants de currence s’accroître sensiblement cette dernière décennie en Nor- en Normandie. Il s’agit presque mandie sont évoqués ci-dessous. systématiquement d’espèces ther- mo-xérophiles. A noter que ces es- 3 et Vaz et al. (2016) 80 espèces pour tout le bassin oriental de la Manche. algues de l’archipel de Chausey qui compte 384 espèces, celle du nord Cotentin environ 200 et celles de la baie de Seine n’atteint BIODIVERSITÉ L e nombre d’oiseaux présents pas la centaine (Rusig et Mussio, en Normandie s’établit à 276 es- MARINE pèces, parmi eux 90 espèces communications personnelles). À l’échelle de la Normandie, les connaissances sur la biodi- versité marine sont importantes marines dont 30 sont nicheuses sur le littoral. D es habitats marins exception- nels, comme les récifs d’her- melles (ver marin), les herbiers de D eux espèces de pinnipèdes, le en raison de nombreux recense- zostères, les bancs de maërl sont phoque gris et veau marin, ont ments qui ont été faits depuis le présents en Normandie. des populations prospères ; une 18ème siècle : dizaine d’espèces de cétacés D elavenne et al. (2013) ont don- C ’est probablement près de 3 000 sont potentiellement observables né une classification du plancton espèces d’invertébrés qui ont en Normandie. avec cinq zones présentes en été recensées dans les eaux Normandie : estuaire de Seine, ur les sept espèces de tortues S marines normandes. côtes du Calvados, eaux cô- marines actuellement connues tières en baie de Seine-Seine- P our les poissons, Le Mao (2009) dans le monde, cinq ont été Maritime, eaux du large en baie de comptabilise 179 espèces dans le recensées en Normandie. Seine-Seine-Maritime et eaux du golfe normand-Breton, alors que D u point de vue des espèces vé- large du nord Cotentin. Maurin et al. (2010) recensent 74 gétales, il convient de souligner espèces dans l’estuaire de la Seine l’exceptionnelle biodiversité des BIODIVERSITÉ I #3 5 GIEC NORMAND
BIODIVERSITÉ Continentale et Marine L’ouest Cotentin se caractérise par des espèces d’eaux froides et une dans les rythmes naturels des es- la présence de huit havres carac- forte augmentation de celui des pèces, phénomène attribué au ré- térisés par de tout petits fleuves espèces d’eaux chaudes. chauffement des températures : côtiers et par un vaste estran dont modification de la période de Quelques faits marquants peuvent les abondances et biomasses de floraison printanière, décalage être observés : la macrofaune sont importants et de la présence du méroplanc- jouent un rôle de nourricerie pour A u Nord-Ouest du Golfe normand- ton (phase larvaire pélagique de les poissons à marée haute de vive- breton, sur des fonds de 0 à 70 m certains organismes benthiques), eau (mulets, bars), aux oiseaux à dans une zone à fort hydrodyna- avec un maximum saisonnier pro- marée basse et en morte-eau ainsi misme se trouvaient des mou- gressant d’un mois entre 1958 que lieux d’hivernage et de halte lières à modioles Modiolus modio- et 2002, changement de proies migratoire pour l’avifaune. lus (habitat prioritaire d’OSPAR) pour les larves et juvéniles de mo- qui étaient en Normandie en limite rues contribuant à la diminution La Manche orientale et l’estuaire méridionale de répartition. Au- de leurs survies. de la Seine constituent un sec- cune modiole n’a été récoltée par En relation aux réductions hydro- teur à enjeu pour la production des Foveau et Dauvin (2017) dans leur logiques liées au CC, on assiste larves de poissons qui alimentent prélèvement de 2015-2016. La à une ‘marinisation’ de l’estuaire en juvéniles les zones côtières de la présence ou l’absence de cette de la Seine avec une pénétration Manche et le bassin Sud de la mer espèce reste à confirmer, sa dis- d’espèces marines dans la par- du Nord. parition dans cette zone pouvant tie aval de l’estuaire et une forte être liée au CC. réduction des biomasses planc- toniques donc des proies pour D es progressions vers l’est liées les juvéniles poissons dans cette aux CC sont attestées chez deux partie de l’estuaire. espèces de crabe, le crabe marbré Pachygrapsus marmoratus (Pezy Poissons : et Dauvin, 2015) et le crabe Asthe- Le projet Eclipse (Ifremer) sur les nognathus atlanticus (Pezy et effets de la pêche et du CC sur Dauvin, 2017). la structure des populations de poissons a montré de fortes mo- ’huître japonaise Crassostrea L difications au cours des années Outre les pressions de pêche, les gigas trouve, depuis une dizaine 1990 dans le bassin oriental de efflorescences algales nuisibles d’années, des conditions de tem- la Manche. Les stocks de pois- (HABs) affectent le fonctionne- pérature favorables à sa reproduc- sons pélagiques ont fortement ment des écosystèmes côtiers. Il tion aboutissant à la création de diminué, parallèlement à leur est donc important d’associer les récifs sur les structures portuaires augmentation en mer du Nord changements des habitats dus au et quelques zones des estrans (Aubert et al., 2015) (cf. fiche CC à ceux dus aux diverses activités normands. Pêche et conchyliculture). humaines et aux risques toxiques qui peuvent d’ailleurs augmenter en relation avec les augmentations de température. Les premières observations de conséquences avérées du change- ment climatique s’observent sur des espèces des groupes ci-dessous. Invertébrés benthiques : L’évolution des températures de Organismes planctoniques : fond au cours des 30 dernières Beaugrand et Goberville (2010) années montre un réchauffe- ont montré des migrations très ment de 0,1 à 0,5°C par décen- rapides du zooplancton le long nie d’ouest en est. Toutefois, ce des côtes européennes entre les réchauffement ne s’est pas tra- latitudes correspondant au sud duit par d’importants déplace- du golfe de Gascogne à l’Islande. ments de l’aire de distribution des Et d’importantes modifications espèces mais par une forte dimi- de la phénologie des espèces, nution du nombre d’occurrences c’est-à-dire des changements GIEC NORMAND 6 BIODIVERSITÉ I #3
BIODIVERSITÉ Continentale et Marine COnséquences attendues du L’exemple des invertébrés conti- nentaux permet de souligner la crainte de voir les effets des CC, changement climatique sur la cumulés aux autres causes d’éro- sion de la biodiversité, conduire à la réduction du domaine vital d’es- biOdiversité de NOrmandie = LE FUTUR pèces aujourd’hui communes en Normandie, et à la régression pro- gressive des effectifs de leurs po- pulations, voire à des phénomènes de dérive génétique associés. L es modifications du climat (sé- cheresses estivales, tempéra- tures de plus en plus chaudes Milieux alluviaux : la diminution des précipitations entraînant un déficit hydrique sur Ces déclins sont particulièrement préoccupants du point de vue des en été, hiver doux, baisse des le bassin versant et donc une perte services écosystémiques, notam- nappes, etc.) qui s’enregistrent d’alimentation en eau douce de ment de la pollinisation et de son de l’échelle mondiale à l’échelle la vallée et de la nappe alluviale. importance capitale. Ce déclin des régionale (voir locale) vont en- Ce déficit hydrique entraîne- populations, notamment de rho- traîner dans les prochaines années rait de fait une modification des palocères, et globalement des in- des modifications de répartition végétations méso-hygrophiles sectes, reste toutefois insuffisam- géographique des espèces avec vers des végétations plus méso- ment quantifié. dans le meilleur des cas une re- philes ; montée vers le nord des espèces Des conséquences sont également Milieux estuariens : prévisibles dans le domaine marin. capables de coloniser de nouveaux augmentation du niveau de la Lenoir (2011), à l’aide d’un modèle territoires et dans le pire des cas mer entraînant une remontée d’habitat appelé le Non-Parametric une extinction de celles qui ne du front salin dans l’estuaire et Probabilistic Ecological Niche Model pourront trouver refuge dans des donc un impact sur la flore des (NPPEN), a montré qu’une majori- niches écologiques leur permettant milieux associés (roselières, prai- té de la cinquantaine d’espèces de de se maintenir. Des modifications ries sub-halophiles, prairies mé- poissons, dont la répartition géo- physiologiques et phénologiques so-hygrophiles). La flore pourrait graphique a été modélisée, vont ef- sont également à craindre pouvant ne pas supporter l’augmentation fectuer un déplacement vers le nord en retour modifier les interactions des teneurs en sels et se voir pour rester dans un environnement entre certains organismes. Des contrainte à la colonisation de conforme à leur niche écologique. modifications jusqu’à l’échelle gé- nouveaux milieux dans le meilleur Ces changements altèrent le fonc- nétique de certaines populations des cas ou bien à disparaître ; tionnement du réseau trophique peuvent à plus long terme s’en- visager, comme évoqué dans la Falaises : en modifiant la disponibilité et la synthèse de Massu et Landmann élévation du niveau de la mer et qualité des ressources en poissons (2011). recul des falaises ; pour les consommateurs supérieurs comme les oiseaux marins. Plusieurs types de milieux nor- Milieux dunaires : mands sont susceptibles de subir élévation du niveau de la mer et Des modèles de niche écologique des modifications de leur fonc- érosion des cordons dunaires si (Ecological Niche Models) ont été tionnement écologique en raison la végétation n’est plus présente utilisés pour déterminer la répar- du changement climatique et de pour jouer son rôle de fixateur du tition potentielle d’espèces ben- ses conséquences : substrat. thiques à l’horizon 2100 (modèle NPPEN, Rombouts et al., 2012). Les Coteaux calcaires : À titre d’exemple, au niveau des répartitions probables en tenant élévation de la température, havres de l’Ouest du Cotentin, les compte d’un scénario de change- risque d’un déficit hydrique plus ruptures de cordons dunaires lors ment climatique intermédiaire du important et disparition de cer- des tempêtes hivernales en lien aus- GIEC pour deux périodes 2050- taines espèces ou bien une ac- si avec l’élévation du niveau marin, 2059 et 2090-2099 montrent des climatation voire une adaptation se traduisent par un ensablement déplacements généraux des es- progressive (Dujardin, 2012) ; des havres et pourrait réduire leur pèces benthiques de la Manche forte productivité par une perte (coquille Saint-Jacques et amande Milieux humides et tourbeux : conséquente des surfaces des de mer par exemple) vers la déficit hydrique, minéralisation prés salés et des vasières, zones mer du Nord et la côte sud de la de la matière organique, assè- les plus productives de ces milieux. Norvège. chement et affaissement des sols BIODIVERSITÉ I #3 7 GIEC NORMAND
BIODIVERSITÉ Continentale et Marine PrOpOsitiOn CONCLUSION Bien que ciblée sur trois domaines de la biodiversité en Normandie (biodiversité floristique, biodiversité en matière des invertébrés continentaux et biodiversité marine), cette synthèse permet de se faire une bonne idée de recherche et d’actiOn des conséquences du changement climatique sur la biodiversité : la modification des aires de répartition des espèces, la disparition de certains milieux et espèces, la modification de cycles de vie d’espèces… l’ensemble pouvant induire des dérèglements dans le fonctionnement et les équilibres des écosystèmes (notamment par l’altération de la chaîne trophique), À l’heure actuelle, aucune étude sur le lien CC et biodiversité flo- ristique continentale n’est réalisée à démultipliant d’autant les impacts. l’échelle régionale, mais les acteurs Ces atteintes aux milieux naturels et semi naturels locaux engagés dans la protection ainsi qu’à la biodiversité associée auront pour de notre patrimoine naturel esti- conséquence de dégrader les services rendus à l’espèce ment ce type d’action prioritaire. humaine (perte de ressources alimentaires, impacts Des initiatives sont menées pour sur la production primaire, réduction des capacités discuter et mettre en place des d’atténuation des risques…). suivis homogénéisés sur des sites « sentinelles » basés sur des proto- coles communs. Ces constats doivent nous inciter à agir rapidement et de concert : En matière d’invertébrés continen- taux, il reste encore beaucoup de •p our réduire fortement toutes les causes de l’érosion de la biodiversité (ce qui permettra à la fois de limiter travail à accomplir pour identifier l’effet cumulatif du CC et de renforcer la capacité de les stratégies de déplacement des résilience des écosystèmes) espèces et notamment l’existence de corridors écologiques fonction- •p our mettre en œuvre des mesures d’atténuation du nels. Dynamiques d’atlas et mise en CC (réduction des émissions de GES). œuvre de protocoles scientifiques adaptés sont à déployer avec am- pleur. La complexité des mécanismes, l’ampleur et la disparité des ré- ponses au changement climatique exigent le développement d’ob- servatoires de la biodiversité. Il est DOnnées à surveiller capital de prendre en compte à la fois les observations récentes et actuelles, à l’échelle du siècle ou moins, et les observations à l’échelle C artographies et suivis coléoptères saproxylophages, du millénaire et au-delà. d’espèces floristiques ; coléoptères aquatiques, coléoptères carabidae ; Les connaissances doivent encore O bservations d’espèces être développées pour apprécier et d’invertébrés continentaux C olonisation de nouvelles suivre les conséquences du chan- dont espèces ayant valeur espèces en Normandie ; gement climatique sur la biodiver- d’indicateurs écologiques : sité. Ces démarches doivent être O bservations de la « Classiques » = orthoptères, biodiversité marine dans portées par des projets ambitieux. papillons de jours et la zone du nord Cotentin Il importe de rassembler un panel odonates ; (pointe de la Hague ou pointe complet d’acteurs du territoire et de de Barfleur), essentielles pour sciences pour se projeter dans des A utres groupes très comprendre les migrations scénarios futurs de la biodiversité informatifs ou avec de fortes vers l’est de bon nombre et de l’adaptation des socio-écosys- potentialités = gastéropodes, d’espèces. tèmes au changement climatique. GIEC NORMAND 8 BIODIVERSITÉ I #3
BIODIVERSITÉ Continentale et Marine Annexe 1 Données et modèles utilisés dans le cadre de cette étude 1 BIODIVERSITÉ FLORISTIQUE TERRESTRE DE NORMANDIE Données historiques : • Louis Alphonse de Brébisson : la première Flore régionale de Normandie - 1869 • Louis Corbière : Nouvelle flore de Normandie - 1893 Données contemporaines : • Flore Vasculaire de Basse-Normandie de Michel Provost • Atlas de la flore sauvage de Haute-Normandie (CBN Bailleul, 2015) • Guide des végétations des zones humides de Normandie Orientale (CBN Bailleul, 2019) • Flore rare et menacée de Basse-Normandie (Zambettakis et Provost, 2009) • État des lieux de la Normandie : nombre de données et nombre d’espèces de plantes vasculaires en Normandie, pour l’Observatoire de la Biodiversité de Normandie (Douville, C., Zambettakis C, 2019) Outils de recensement et de localisation des espèces végétales présentes dans la région : • Digitale 2 piloté par le conservatoire botanique national de Bailleul (antenne Haute-Normandie) • Calluna piloté par le conservatoire botanique national de Brest (antenne Basse-Normandie) 2 BIODIVERSITÉ DES INVERTÉBRÉS CONTINENTAUX TERRESTRES ET AQUATIQUES DE NORMANDIE Données historiques : issues des sociétés savantes, notamment les sociétés linnéennes. Données contemporaines : sous forme d’Atlas de répartition (orthoptères, bourdons, rhopalocères, noctuidae, pyralidae et crambidae, cerambycidae, scarbaeoidea). Outils de recensement et de localisation : • ODIN (SINP régional) • Base de données du GRETIA 3 BIODIVERSITÉ MARINE Données historiques : • de nombreux recensements ont été faits depuis le 18ème siècle par des naturalistes, enseignants et chercheurs des universités, et ingénieurs de bureaux d’étude. Données contemporaines : • Inventaires, catalogues, atlas, base de données permettent de dresser un inventaire assez exhaustif des espèces • Projets de recherches et travaux de modélisation (exemple : projet Eclipse (Ifremer) sur les effets de la pêche et du CC sur la structure des populations de poissons) Modèles : • Modèle d’habitat appelé le Non-Parametric Probabilistic Ecological Niche Model (NPPEN) (Lenoir, 2011) • Approche multi-modèles avec une sélection des modèles les plus efficaces (Araignous et al., 2019 ; Ben Rais Lasram et al., 2020) BIODIVERSITÉ I #3 9 GIEC NORMAND
BIODIVERSITÉ Continentale et Marine Annexe 2 La biodiversité en France 100 chiffres clés expliqués sur les espèces (source : INPN 2019) LES ESPÈCES INVENTORIÉES Bien que l’on estime que de la biodiversité 80 % EN FRANCE française se trouve dans les outre-mer, la connaissance des espèces y est encore très incomplète 95 582 France Gilles Boeuf Président du conseil scientifique de espèces en métropole métropolitaine l’Agence française pour la biodiversité 95 582 et professeur à Sorbonne Université & 85 238 Saint-Pierre et-Miquelon 2 331 en outre-mer Saint-Martin - 2 319 Saint-Barthélemy - 2 033 Clipperton Guadeloupe - 10 525 Martinique - 7 077 885 Guyane 27 135 Polynésie française Wallis-et-Futuna Mayotte 12 254 2 822 6 168 Coraux Îles Éparses 1 139 (TAAF) La Réunion Métropole : 84 2 020 12 180 Outre-mer : 1 068 Nouvelle-Calédonie Îles 27 085 Subantarctiques (TAAF) - 2 458 Saint-Paul et Nouvelle-Asterdam Crozet Kerguelen NOMBRE D’ESPÈCES Terre Adélie (TAAF) ACTUELLEMENT RÉPERTORIÉES 982 Mammifères 435 Métropole : 159 Papillons Outre-mer : 319 13 779 Métropole : 5 554 Outre-mer : 8 373 Sauterelles et grillons Poissons 883 5 655 Oiseaux Métropole : 236 Métropole : 822 Outre-mer : 5 039 1 763 Outre-mer : 654 Métropole : 599 Crustacés Outre-mer : 1 432 8 917 Plantes à fleurs Métropole : 3 913 19 273 Outre-mer : 5 234 Métropole : 7 746 Outre-mer : 12 290 Mollusques 11 350 Métropole : 1 985 Champignons à chapeau Araignées Reptiles Amphibiens Lichens Libellules et demoiselles Mousses Coléoptères 2 722 417 176 4 398 Outre-mer : 9 527 478 2 014 22 439 10 385 Métropole : 1 708 Métropole : 43 Métropole : 3 157 Métropole : 96 Métropole : 937 Métropole : 10 862 Métropole : 9 519 Métropole : 46 Outre-mer : 1 036 Outre-mer : 134 Outre-mer : 1 558 Outre-mer : 394 Outre-mer : 1 285 Outre-mer : 11 844 Outre-mer : 1 133 Outre-mer : 377 8 9 GIEC NORMAND 10 BIODIVERSITÉ I #3
Abbaye-aux-Dames • Place Reine Mathilde CS 50 523 • 14035 Caen Cedex 1 Tél. : 02 31 06 98 98 • Fax : 02 31 06 95 95 Direction Énergies, Environnement, Développement Durable DEEDD@normandie.fr • 02 31 06 96 91 www.normandie.fr
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