Black-out électrique: l'UVCW auditionnée par le Parlement wallon

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Black-out électrique: l’UVCW auditionnée par le Parlement wallon
Tom De Schutter - Octobre 2014

Le 23 octobre dernier, l’Union des Villes et Communes de Wallonie a été auditionnée
par la Commission des Pouvoirs locaux, du Logement et de l'Energie du Parlement
wallon concernant les conséquences du risque de black-out électrique. Elle a ainsi pu
faire part de ses inquiétudes et des problématiques qui se font jour actuellement dans le
cadre de la perspective de situations de pénurie d'électricité durant cet hiver.

L’UVCW y a souligné le travail conséquent qui est en cours au sein des communes
wallonnes afin d'assurer la vue la plus complète possible des conséquences potentielles
d'un délestage, les constats étant à cet égard partiels puisque les communes travaillent
encore en ce moment à préparer cette situation, qui, si elle n'est pas inédite, n'en sera pas
moins exceptionnelle à plus d'un titre, notamment au regard de son ampleur potentielle.
Trois points ont ainsi été soulignés par l’UVCW devant le Parlement wallon.

La gestion de crise électrique en général

Cette gestion de crise implique fortement toutes les communes, qu'elles soient
concernées par le plan de délestage automatique ou manuel, ou non, le black-out
complet restant une hypothèse à laquelle les communes doivent se préparer.

Les communes ont ainsi l'obligation, de par l'article 135 de la nouvelle loi communale,
de faire jouir leurs habitants d'une bonne police et d'assurer la sécurité, la salubrité et la
santé publique. De cette responsabilité de moyen, les communes se sont vues
corollairement chargées de la responsabilité d'élaborer des plans d'urgence et
d'intervention, spécifiques, c’est-à-dire relatif à une matière ou à un périmètre en
particulier, comme la planification d'urgence au niveau des sites SEVESO, par exemple,
ou généraux, pour faire face à des crises d'ampleur, comme des épisodes d'inondations
ou de grands rassemblements de personnes, par exemple.

La planification d'urgence et d'intervention est régie par un arrêté royal du 16 février
2006, qui impose aux communes certaines modalités de mise en œuvre des plans
d'urgence et d'intervention et de planification de la gestion de crise. L’UVCW réclame
d’ailleurs, depuis cette date, aux autorités fédérales, une prise en charge des coûts liés à
la mise en œuvre des modalités imposées à cet égard.

Le Bourgmestre doit ainsi, selon cet arrêté royal, établir un plan général communal
d'urgence et d'intervention, qui prévoit les mesures à prendre et l'organisation des
secours en cas d'évènements calamiteux, de catastrophes ou de sinistres. Ce plan doit
être adopté par le Conseil communal et approuvé par le Gouverneur. Le Roi peut
déterminer les risques pour lesquels les communes doivent établir des plans particuliers
d'urgence et d'intervention, qui complètent de manière spécifique le plan général
communal.

Le plan d'urgence et d'intervention détermine les modalités de mise en œuvre des
différentes missions (appelées disciplines dans le jargon) qui doivent être assurées lors
d'un évènement nécessitant la mise en œuvre dudit plan. Il s'agit des opérations de
secours (mises en œuvre par les services d'incendie assistés par la protection civile), des
secours médicaux, sanitaires et psychosociaux (incluant l'intervention de l'aide médicale
urgente), de la police du lieu de la situation d'urgence (permettant notamment le
rétablissement de l'ordre public ou le dégagement des voies d'accès et d'évacuation par la
police), de l'appui logistique (notamment afin d'assurer l'acheminement du matériel de
sauvetage et d'organiser la communication technique entre les intervenants) et de
l'information à la population, notamment le cas échéant, pour assurer la diffusion de
mesures de précautions à prendre suite à un évènement. Un centre de coordination de ces
différentes disciplines doit être mis en place afin d'assurer la bonne organisation du
dispositif.

Ces plans sont adaptés à la prise en charge d'évènements ponctuels, généralement non
programmés et donc imprévus, amenant à des situations de péril d'ampleur pour les
personnes et les biens et qui nécessitent une action coordonnée des acteurs pour assurer
le rétablissement de l'ordre. A cet égard, la planification d'urgence et d'intervention telle
qu'elle est envisagée actuellement dans le cadre d'un épisode de pénurie d'électricité ne
relèvent aucunement d'une planification d'urgence au sens strict. Le caractère
programmé et relativement prévisible de la pénurie d'électricité et le caractère diffus de
la réponse à apporter par les autorités laissent à penser que nous sommes face à un
évènement, qui certes a et aura des conséquences en termes d'ordre public, mais dont la
gestion est imposée aux communes par défaut.

En d'autres termes, les communes sont appelées à gérer une situation qui aurait pu ou
aurait dû trouver d'autres types de réponses. A cet égard, l’UVCW s’interroge, non pas
sur la légitimité d'une intervention communale en la matière, qui ne fait pas de doute (le
service rendu aux citoyens et le maintien de l'ordre reste une préoccupation majeure des
bourgmestres), mais bien sur la légitimité des mesures qui sont imposées aux
bourgmestres dans le cadre de l'activation du plan de délestage, et des attentes que la
communication dans ce dossier à fait naître à l'égard de la population, et de la nécessaire
prise en charge des frais liés à ces mesures par l'autorité fédérale.

Rappelons aussi le principe de responsabilité édicté par les directives du Centre fédéral
de Crise concernant l'organisation de la planification en cas d'activation du plan de
délestage, lequel insiste sur la grande autonomie et proactivité dont doivent faire preuve
chaque niveau de pouvoir au vu de l'étendue géographique et de l'ampleur des
conséquences socio-économiques d'une activation du plan de délestage. Les communes
et les gouverneurs sont singulièrement invités à gérer les conséquences locales en
matière d'ordre public, de sécurité civile et de santé publique.

Les responsabilités spécifiques incombant aux gouverneurs relèvent notamment le suivi
de l'impact du délestage sur les prisons et les centres d'accueil fermés, les cours d'eau et
ouvrages d'art, les principaux systèmes d'évacuation des eaux et le fonctionnement des
systèmes d'égouts et des installations d'épuration des eaux au niveau de la province,
l'approvisionnement en eau potable au sein de la province, ainsi que les éléments routiers
régionaux cruciaux.

Le Bourgmestre, quant à lui, doit suivre l'impact du délestage sur le fonctionnement des
institutions et infrastructures vitales, dont notamment les établissements de soins de
santé, l'approvisionnement en eau potable, les égouts et les pompes d'épuisement des
zones sensibles aux inondations.
Il est évidemment également chargé d'analyser au niveau de son territoire la situation en
matière d'ordre public, de sécurité civile et de santé publique et de suivre son évolution,
et de mettre en œuvre les mesures de protection adéquate pour la population et/ou
nécessaires pour assurer la continuité de services essentiels. A cet égard, la commune
doit mettre en œuvre les mesures décidées par le centre de crise national et le gouverneur.

La gestion en matière de trafic ferroviaire relève du centre de crise national.

Plus spécifiquement, et parmi les mesures envisagées et relevant des communes, on
souligne les mesures suivantes:

-    Un centre de crise fonctionnel doit être disponible durant le délestage (soit équipé
en électricité grâce à un générateur de secours, soit installé sur une partie de territoire non
délestée), et les dispositifs de communication doivent y être concentrés;

-    Un centre d'accueil chauffé, au sein duquel des informations relatives à la situation
d'urgence sont disponibles et joignable par les services de secours est installé par les
bourgmestres dont le territoire est entièrement impacté par le délestage;

-    Pour les communes qui ne sont touchées que partiellement par le délestage, un lieu
où les citoyens peuvent obtenir de l'information sur la situation et un ou plusieurs lieux
où les citoyens peuvent contacter les services de secours doivent être prévus;

-    La disponibilité d'un service médical restreint (médecin et pharmacien de garde
notamment) doit être assurée par le bourgmestre en concertation avec les autorités
fédérales;

-    Une vigilance accrue doit être assurée par les autorités locales au niveau des lieux
sensibles à la criminalité tribunaux, établissements financiers, et aux troubles à l'ordre
public. Des patrouilles doivent ainsi être assurée par la police;

-    Le bourgmestre est également chargé d'établir une image au niveau communal de
l'impact sur le fonctionnement des institutions et infrastructures vitales dont font
notamment partie les établissements de soins de santé, l'approvisionnement en eau
potable, les égouts et les pompes d'épuisement des zones sensibles aux inondations;

-    Le centre de crise demande enfin aux gouverneurs de coordonner les dispositions
prises au niveau des écoles quant à l'heure de fermeture des établissements en cas de
délestage programmé et d'accueil des enfants durant la période de délestage.

Les directives du centre de crise concernent l'ensemble des aspects de notre vie en
société et une large palette de mesures doit être assurée par les autorités locales pour faire
face à l'activation du délestage. Le Centre fédéral de crise, pour ce qui concerne le
black-out ou le délestage automatique n'est par contre pas explicite sur les mesures à
mettre en place.

L’UVCW comprend, à la lecture de la circulaire relative à l'organisation de la
planification en cas d'activation du plan de délestage, que le centre de crise entend que
ces mesures soient également applicables lors d'un délestage non programmé ou d'un
black-out, ce qui semble de prime abord complexe.

Le travail préparatoire qui mobilise actuellement les communes

Le travail préparatoire mobilise actuellement les communes dans des conditions délicates
au vu des informations dont elles bénéficient et des marges de manœuvre disponibles
quant aux possibilités d'adaptation du plan de délestage.

Complémentairement à la mise en place de ce dispositif coordonné au niveau fédéral, les
Gouverneurs ont ainsi demandé aux bourgmestres d'identifier les dispositifs critiques qui
nécessitent une attention particulière durant une pénurie électrique, les établissements qui
ne peuvent de prime abord supporter une pénurie, et enfin les situations particulières de
citoyens qui nécessiteraient une prise en charge particulière durant la pénurie.

A cet égard, l’UVCW a souligné le travail colossal actuellement en cours au sein des
communes: il s'agit d'identifier les établissements et les citoyens sensibles aux situations
de pénurie électrique. Les établissements de soins de santé, les maisons de repos, les
personnes sous assistance d'appareillage électrique sont en cours de recensement. Il s'agit
également d'identifier les processus industriels et commerciaux qui nécessitent une
approche particulière préalablement à la pénurie ou une attention accrue après
l'activation du délestage. Il s'agit également de recenser les problématiques particulières
au niveau du fonctionnement d'installations spécifiques ou de réseaux et de systèmes
d'évacuation ou de refoulement des eaux, notamment. II s'agit enfin d'identifier les
éléments pouvant potentiellement demander une attention particulière durant la crise.

Ce travail, conséquent, a deux finalités: permettre une adaptation du plan de délestage
pour éviter à certains établissements de ne pas être concernés. Il conviendra d'être attentif
à ce que cette possibilité, limitée dans son ampleur, soit encore effectivement mise en
place pour les éléments critiques identifiés par les autorités locales. La seconde finalité
est évidemment de permettre aux établissements et aux infrastructures d'être alertés,
préparés et suivis durant le délestage, et aux citoyens d'être pris en charge préalablement
à la crise programmée.

Il revient également que plusieurs institutions, singulièrement dans le domaine des
maisons de repos, mais également au niveau des communes, se sentent forcées de
réaliser des investissements importants dans des groupes de secours, de par les
obligations formelles ou morales qui sont les leurs.

Au regard de ces éléments, l'Union des Villes et Communes n'a pas manqué de rappeler
au Gouvernement fédéral, tant le précédent que l'actuel, que la planification d'urgence et
d'intervention a un coût, conséquent pour les pouvoirs locaux, et que ce coût, dans la
mesure où il s'impose aux communes de par les modalités précises qui sont déterminées
par l'autorité fédérale, doit être pris en charge et compensé par la même autorité. Cette
demande, déjà ancienne, n'a pas trouvé de réponse à ce stade.

En outre, au vu du caractère éminemment particulier de la planification d'urgence et
d'intervention en cas d'activation du plan de délestage programmé, et de l'ampleur des
mesures préventives qui sont mises à charge des communes, l’UVCW a demandé que le
Gouvernement fédéral prenne en charge les dépenses liées à la préparation de cette
situation d’urgence (les jours/homme mais également les investissements, par la mise à
disposition de générateurs électriques notamment) engendrée par la politique fédérale en
matière d’énergie. L'UVCW a également demandé à être associée à l’évaluation des
coûts de ces mesures et a sollicité une rencontre avec le Ministre de l'Intérieur à ce
propos.

Quelques inquiétudes quant au plan de délestage en lui-même

-    Il importe à l’UVCW que les villes et communes soient directement, préalablement
et complètement informées des mesures qui s'imposent à elles et à leur population, et ce
dans les meilleurs délais, et de manière proactive.

-    Il semble essentiel que les demandes des autorités locales puissent être prises en
compte à tout moment dans la mise en place du plan de délestage, notamment au regard
des infrastructures critiques et sensibles en cours de recensement;

-    Enfin, l’UVCW s’inquiète de l'impact du plan de délestage sur l'activité
économique de notre région et il apparait primordial, au vu des zones touchées dans le
cadre du délestage programmé, de déployer tous les efforts utiles pour qu'un tel plan de
délestage ne soit en aucune manière activé. Outre les questions de responsabilité
contractuelle qui se poseront inévitablement, tout retard de la remise en route du tissu
économique wallon ne pourra que pénaliser les efforts de redéploiement de notre
Région. L’UVCW en appelle, à cet égard, à la responsabilité de chaque niveau de
pouvoir afin que toutes les mesures utiles soient prises pour éviter toute situation
dommageable à l'échelle régionale et nationale.

                                 Ce document, imprimé le 17-05-2020, provient du site de l'Union des Villes et Communes de Wallonie (www.uvcw.be).
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