Comment survivre à la prochaine crise? - Une nouvelle approche de l'investissement socialement responsable (ISR)
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Comment survivre à la prochaine crise? Une nouvelle approche de l’investissement socialement responsable (ISR) Avril 2011
Sommaire 3 Introduction 5 De la durabilité extra-financière à la durabilité financière 8 Résultats 10 Conclusion 12 Résumé
1. Introduction Les leçons de la crise Au-delà des ravages qu’elle aura causés sur l’ensemble du globe, la crise financière aura apporté deux enseignements importants aux investisseurs socialement responsables. Premièrement, les portefeuilles en actions investis selon les principes de l’ISR ont dégagé des performances comparables à celle du marché et n’ont par conséquent pas offert une protection beaucoup plus efficace contre les mouvements de baisse. Deuxièmement, les indicateurs extra-financiers utilisés jusqu’à aujourd’hui n’ont pas permis de détecter ou de prévenir certaines externalités aux effets particulièrement néfastes pour le système financier et l’économie dans son ensemble. Le but de cette publication est donc de tirer les conclusions de ces enseignements et de faire de l’ISR une stratégie d’investissement plus stable et plus efficace. Bien que la grande récession, comme certains l’ont appelée, eût de fait accrédité de nombreux principes chers aux investisseurs socialement responsables, elle n’a pas vu, comme nous l’avons mentionné, une surperformance financière notable des portefeuilles ISR. Une étude récemment conduite par l’EDHEC, école de commerce et de gestion française1, arrive d’ailleurs à la même conclusion. Selon ses auteurs, même si huit indices ISR sur dix se sont mieux comportés que les indices classiques entre janvier 2007 et décembre 2009, la différence de performance n’apparaît pas statistiquement significative. Par ailleurs, sur les 120 fonds verts et ISR pris en considération, aucun n’a été en mesure de générer une surperformance. Des risques ESG comptant parmi les causes premières de la crise Des pratiques commerciales non durables comme l’octroi de crédits à des personnes n’étant pas en mesure de les rembourser, l’encouragement de prises de risques excessives motivées par des programmes d’incitation dysfonctionnels et des standards insuffisants en termes de gouvernance d’entreprise figurent certainement parmi les facteurs à l’origine de la crise financière. On aurait donc pu penser que les portefeuilles ISR, précisément construits sur la base de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), offriraient une meilleure protection contre un choc de marché d’une telle ampleur. Bien sûr, les portefeuilles actions ISR demeurent des portefeuilles actions avant tout et ne peuvent, par conséquent, demeurer stables alors que le reste du monde chavire. Néanmoins, l’absence d’écart de performance significatif suggère que les portefeuilles ISR n’étaient pas moins risqués que les portefeuilles conventionnels. Faut-il en déduire que les filtres ESG n’ont pas produit les résultats attendus? Nous ne le pensons pas. Une sélection extra-financière nécessaire... Si elle est bien effectuée, la sélection de sociétés en fonction de critères ESG peut diminuer les risques réglementaires et opérationnels et contribuer de façon quantifiable à l’atténuation des effets externes négatifs qui y sont associés. Nous avons par exemple pu montrer qu’investir dans des portefeuilles dits «best-in-class» axés sur l’efficience énergétique et la responsabilité sociale pouvait 1 The performance of Socially Responsible Investment sensiblement réduire les émissions de CO2 et créer plus d’emplois par unité de and Sustainable Development in France: An Update capital investi qu’un investissement de même montant dans un portefeuille after the Financial Crisis. Noël Amenc and Véronique Le Sourd. EDHEC 2010. traditionnel 2. Mais diminuer l’impact environnemental et social des entreprises 2 Le paradoxe de la performance ISR ou comment n’est pas seulement une cause louable; c’est aussi une condition nécessaire à une évaluer et mesurer la performance extra-financière approche ISR crédible. Une étude récente effectuée dans le cadre des Principes de l’investissement socialement responsable. Pictet Asset Management 2008 des Nations Unies pour l’investissement responsable (UNPRI) a passé en revue 3 http://www.unpri.org/files/6728_ES_report_ les 3000 plus grandes sociétés cotées à l’échelle mondiale et estimé leurs seuls environmental_externalities.pdf dommages environnementaux à plus d’USD 2 billions par année 3. Introduction De la durabilité extra-financière à la durabilité financière Résultats Conclusion Résumé 3
...mais non suffisante pour prévenir certaines externalités Cela étant, l’analyse extra-financière ne constitue pas une condition suffisante pour permettre une stratégie d’investissement véritablement durable. Par le passé, l’ISR ne s’est ainsi probablement pas assez consacré à l’identification des sociétés produisant des externalités financières et économiques négatives majeures. Il n’a pas suffisamment agi pour privilégier les sociétés et promouvoir Selon The Economist, les pratiques contribuant à rendre le système économique et financier plus un emprunteur durable et plus résistant aux chocs. américain sur quatre est «sous l’eau». Les effets externes négatifs sur le système économique et financier causés par Plus de 4 millions de la récente crise financière sont en effet stupéfiants: l’effondrement de l’économie ménages ont des dettes totalisant au moins réelle dû à l’assèchement du crédit, la nécessité de programmes de relance deux fois la valeur massifs entraînant une augmentation de la dette publique à la charge des de leur logement 4 générations à venir, la perte de millions d’emplois, et un nombre très élevé de personnes qui ont vu la valeur de leur propriété réduite à néant et qui sont aujourd’hui confrontées à des saisies. Un défi pour l’avenir de l’ISR Ainsi, si l’ISR veut être à la hauteur de son ambition et devenir une stratégie d’investissement reconnue, il se doit de faire plus pour prévenir ce type de risque financier et économique. La crise financière a donc, entre autres choses, soulevé certaines questions quant à l’efficacité et à la légitimité de l’ISR tel qu’il 4 Economics focus. Drowning or waiving. est pratiqué aujourd’hui. L’approche que nous allons présenter ici cherche à The Economist. 23-29 octobre 2010 répondre à ce défi. 4 Comment survivre à la prochaine crise?
2. De la durabilité Des notations ESG devenues facilement accessibles Compte tenu de l’essor de l’investissement durable observé dans la deuxième extra-financière à la partie des années 1990 et de la décennie de consolidation qui a suivi (en termes durabilité financière de méthodes mais aussi, plus récemment, de fournisseurs de recherche), les investisseurs et les gérants qui le souhaitent peuvent aujourd’hui se procurer aisément des informations de durabilité sur les sociétés, que ce soit par le biais d’unités spécialisées au sein de maisons de courtage sell-side, de fournisseurs de recherche indépendants ou, comme c’est de plus en plus souvent le cas, via des agences de recherche financière telles que Bloomberg, Reuters et MSCI. Et si la recherche ESG actuelle est toujours essentiellement qualitative, évaluant les politiques et les systèmes de gestion des sociétés par exemple, des approches plus quantitatives (données relatives à l’empreinte carbone notamment) gagnent progressivement du terrain. Des critères ESG offrant une protection contre les risques de réputation... Les notations ESG indiquent à l’investisseur si une société est bien préparée pour répondre aux défis de durabilité futurs. Ainsi, une notation ESG élevée témoigne généralement d’une société bien gérée, peu susceptible d’être mêlée à des controverses majeures ou d’être confrontée à des risques opérationnels ou réglementaires significatifs, et donc de compromettre la réputation de l’in- vestisseur ou du gérant. L’application de filtres ESG appropriés peut indiquer de façon raisonnablement fiable que les titres détenus en portefeuille satisfont aux critères de durabilité élémentaires. Et en écho à ce que nous disions plus haut, ces filtres peuvent – s’ils sont bien conçus – également promouvoir de meilleures pratiques réduisant ou limitant à terme les externalités sociales et environnementales. ...mais non contre les externalités économiques plus larges Comme nous le disions plus haut toutefois, aucune donnée empirique ne prouve que le seul fait de sélectionner et de combiner au sein d’un portefeuille des sociétés dotées d’une notation ESG élevée puisse protéger les investisseurs contre une baisse majeure du marché. Par ailleurs, le cadre ESG conventionnel ne donne pas non plus de «vue d’ensemble», autrement dit d’informations permettant de mettre l’ISR en lien avec le concept plus large de stabilité économique et financière. La crise financière a été très instructive à cet égard. Selon nous, l’investissement Quels indicateurs et quels facteurs faut-il durable doit encore explorer un champ totalement nouveau, à savoir celui de utiliser pour identifier déterminer les indicateurs et facteurs qu’il convient d’utiliser pour identifier les sociétés qui les sociétés qui parviennent à assurer leur survie économique, mais contribuent contribuent le plus à également à la stabilité du système économique dans son ensemble. Nous devons la stabilité économique? dans ce cadre avoir pour objectif de construire des portefeuilles véritablement durables qui puissent être plus que des portefeuilles refuges pour les investisseurs dans les périodes difficiles, tout en promouvant les sociétés les plus susceptibles de limiter ou d’atténuer les externalités économiques négatives de par leur propre niveau de stabilité. Introduction De la durabilité extra-financière à la durabilité financière Résultats Conclusion Résumé 5
La quête de «durabilité financière» Dans cette optique, nous avons passé en revue une multitude de facteurs d’analyse financière fondamentale censés engendrer des bénéfices et atténuer les risques pour les entreprises et les investisseurs, ainsi que pour la société et le système économique dans leur ensemble. Nous avons ensuite analysé leur performance historique pour ne retenir que les facteurs qui avaient été associés à des rendements ajustés au risque positifs. C’est cette caractéristique doublement favorable qui définit selon nous la «durabilité financière». Notre recherche dans le domaine de la durabilité financière se poursuit. Il n’y a pas – et il n’y aura certainement jamais – de liste finie et exhaustive des facteurs avec lesquels nous travaillons. Nous continuerons plutôt de rechercher et d’évaluer des critères potentiels de manière à améliorer notre modèle de durabilité financière. Cela étant, pour donner au lecteur une idée plus précise et plus concrète de notre approche, nous aimerions mettre en évidence deux facteurs fondamentaux de durabilité. Un faible niveau d’endettement, facteur fondamental de durabilité Bien que nous soyons loin d’un consensus quant à la cause réelle de la crise financière, il est probablement juste de dire que l’endettement excessif, en particulier dans le secteur financier, en a été l’un des principaux éléments déclencheurs. En outre, un endettement élevé entraîne automatiquement une plus forte volatilité des bénéfices d’une société, et donc de son titre en bourse. Cette relation peut être particulièrement néfaste en période de récession. Un endettement excessif ne présente pas seulement un grand risque pour les sociétés elles-mêmes, mais peut aussi – comme nous l’avons tous vu – déstabiliser les marchés financiers et, au final, l’économie dans son ensemble. Ainsi, dans la mesure où il ne concerne pas seulement le risque individuel d’une société donnée, mais où il s’inscrit dans une perspective sociétale plus large, un endettement faible ou modéré constitue-t-il un facteur potentiel favorable, susceptible d’accroître la durabilité financière au sein du système. Autre donnée particulièrement intéressante pour notre modèle de durabilité, la littérature financière montre qu’un endettement faible génère en soi de l’alpha5. Une croissance modérée des actifs, autre facteur de durabilité La croissance du bilan reflète la croissance globale d’une entreprise. Une croissance stable des actifs peut généralement être associée à un modèle d’affaires focalisé sur une croissance régulière et organique. Les sociétés qui recherchent la croissance par le biais de fusions-acquisitions se trouvent quant à elles souvent confrontées à terme à des problèmes. Opter pour une croissance externe répond en effet avant tout au désir d’exploiter des synergies, à savoir rationaliser et éliminer les structures redondantes – ce qui conduit généralement à des suppressions d’emplois ou à d’autres frictions –, mobilisant des ressources de gestion précieuses qui pourraient être investies ailleurs. Des taux de croissance élevés ou très élevés ne sont donc pas compatibles avec l’idéal de la croissance durable. Ils sont davantage la marque d’une plus grande vulnérabilité et 5 Voir, par exemple: Fama and French, «The Cross-Section of Expected Stock constituent des signes avant-coureurs d’instabilité en cas de turbulences des Returns”,. Journal of Finance 47, 1992 marchés. 6 Comment survivre à la prochaine crise?
Le plus intéressant, c’est que les investisseurs semblent partager notre point de vue. Car si les mécanismes exacts font toujours l’objet de débats, un corpus toujours plus important de données empiriques suggère que les événements d’entreprises liés à une expansion des actifs (acquisitions, offres publiques d’actions, offres publiques d’obligations et émissions de crédits bancaires) sont souvent suivis de périodes caractérisées par des performances anormalement faibles6. De toute évidence, il s’agit là d’un autre facteur de stabilisation des systèmes associé à des rendements ajustés au risque plus élevés. Définir et combiner les portefeuilles de facteurs Tenons-nous-en pour l’heure à ces exemples de facteurs de durabilité financière et observons ce qui se passe quand ces facteurs sont combinés au sein d’un portefeuille durable diversifié. Dans cette optique, nous avons construit un certain nombre de portefeuilles types, reflétant chacun un facteur de durabilité 6 Voir par exemple: Cooper et al.: »Asset Growth and the Cross Section of Stock Returns”, Journal financière particulier, que nous avons ensuite combinés de manière à obtenir of Finance 68, 2008 le meilleur profil de risque/rendement pour les investisseurs. Introduction De la durabilité extra-financière à la durabilité financière Résultats Conclusion Résumé 7
3. Résultats La vérification de notre hypothèse Afin de vérifier si l’approche de durabilité financière proposée pouvait délivrer les résultats souhaités, nous avons simulé la performance de plusieurs portefeuilles construits de cette manière pour les principaux marchés actions entre janvier 1999 et fin novembre 2010. La période choisie inclut la phase finale et l’éclatement de la bulle internet, le marché haussier prolongé de 2003 à 2007 et, surtout, la crise financière et ses conséquences. Elle couvre donc des environnements de marché particulièrement variés, voire extrêmes. Partant d’un univers restreint par des critères ISR, nous avons construit quatre portefeuilles actions responsables – soit un global et trois régionaux (Monde développé, Europe, Amérique du Nord et Pacifique), puis calculé leur performance relative cumulée par rapport à leurs indices de référence MSCI respectifs. Les portefeuilles de facteurs de durabilité ont été calculés sur une base semestrielle correspondant à un rebalancement semi-annuel 7. Les portefeuilles de durabilité que nous avons évalués représentent des portefeuilles d’actions diversifiés, dotés d’une erreur de suivi (tracking error) d’approximativement 3% par rapport aux indices MSCI sous-jacents. PERFORMANCE RELATIVE DES PORTEFEUILLES DURABLES (1999-2010) 20% 15% MSCI Monde, rendements mensuels 10% 5% 0% -5% Portefeuilles durables Monde -10% Amérique du Nord Europe -15% Bassin pacifique -20% 01.1999 01.2000 01.2001 01.2002 01.2003 01.2004 01.2005 01.2006 01.2007 01.2008 01.2009 01.2010 Portefeuilles durables pour les principaux marchés actions par rapport aux indices de référence MSCI classiques correspondants La surperformance des portefeuilles durables Toutes nos simulations générent une forte Le graphique ci-dessus présente les résultats de notre simulation. Les quatre surperformance au portefeuilles durables ont assez largement surperformé leurs indices respectifs plus fort de la crise sur la période considérée. A l’exception du portefeuille Amérique du Nord, qui financière a accusé un léger repli, les portefeuilles ont affiché des performances en ligne avec celles du marché au sens large durant la phase finale du boom internet. Les quatre portefeuilles durables ont en revanche commencé à clairement dépasser leurs indices respectifs après l’éclatement de la bulle. Il est par ailleurs intéressant de noter que les portefeuilles ont continué de générer de la valeur durant la phase de marché haussier qui a suivi jusqu’en 2005, pour marquer ensuite une performance étale. 7 Seules des informations disponibles, connues, De 2005 au début de la crise financière, ces portefeuilles ont à nouveau évolué et publiées au moment de chaque rebalancement ont été utilisées, ce de manière à éviter toute en ligne avec le marché. Puis, les quatres portefeuilles ont affiché des surperfor- subjectivité. mances spectaculaires lors du pic de la crise financière et de la chute des marchés 8 Comment survivre à la prochaine crise?
qui a suivi la faillite de Lehman Brothers. Ils se sont toutefois inscrits en net repli (en termes relatifs) durant le fort rebond observé au printemps 2009, mais ils n’ont cédé qu’une partie de la surperformance accumulée auparavant, résistant bien mieux à la crise que le marché au sens large. Depuis, les trois portefeuilles régionaux semblent avoir renoué avec une tendance haussière peu marquée mais régulière, alors que le portefeuille global dégageait une performance plus ou moins conforme à celle de l’indice MSCI World. Une durabilité financière offrant bien plus qu’une protection contre les crises Selon nous, il convient surtout de souligner le schéma de surperformance observé, et pas seulement en raison de son rôle protecteur au plus fort de la crise. Intuitivement, on pouvait penser – ou du moins espérer – qu’un portefeuille durable axé sur la diminution des risques extra-financiers et financiers montrerait au final une plus grande résistance face aux chocs du marché. Mais on constate, et c’est une agréable surprise, que les portefeuilles construits dans une optique de durabilité financière ont continué d’ajouter de la valeur durant la phase de marché haussier qui a suivi l’éclatement de la bulle internet et qui s’est prolongée jusqu’au début de la crise financière. Pourtant, nous ne devrions pas être trop surpris non plus. Nous devons en effet Notre nouveau concept de durabilité financière nous souvenir que lorsque nous avions identifié nos facteurs fondamentaux porte l’espérance de durabilité, nous avions explicitement recherché les facteurs générant de de performances l’alpha, autrement dit qui avaient, par le passé, produit une performance supé- supérieures plus rieure à la performance anticipée par la théorie financière. Ainsi, nos résultats importants pour un peuvent être interprétés comme une confirmation des conclusions académiques risque moindre... citées à la section 2 ci-dessus. Alors que des générations d’investisseurs ont appris et intégré que la surper- formance financière ne pouvait découler que de risques élevés, les résultats de notre simulation suggèrent l’inverse, du moins pour la période prise en compte. Il apparaît en effet que dans un contexte de durabilité, le «plus» provient du «moins». Le nouveau concept de durabilité financière semble donc porter l’espoir de performances supérieures via des investissements moins risqués (tant sur le plan extra-financier que financier). Introduction De la durabilité extra-financière à la durabilité financière Résultats Conclusion Résumé 9
4. Conclusion Des résultats confirmant notre hypothèse Nous avons entrepris de créer des portefeuilles ISR non seulement moins risqués sur la base des critères ESG, mais également plus résilients en termes financiers classiques, en associant le concept de la durabilité extra-financière à une approche nouvelle et novatrice que l’on pourrait qualifier de «durabilité financière». Cette approche se base sur des facteurs fondamentaux pour les sociétés susceptibles, selon nous, d’atténuer les risques, d’accroître les perfor- mances et de réduire potentiellement les externalités négatives sur les systèmes financier et économique. Les résultats de cette simulation historique, présentés dans la section précédente, confirment notre hypothèse selon laquelle l’ajout de facteurs financiers fondamentaux à la série de critères extra-financiers et la construction de portefeuilles fondée sur ces facteurs peuvent effectivement offrir aux investisseurs des portefeuilles plus stables, tout en ajoutant de la valeur financière par rapport à un indice de référence standard. Une durabilité financière offrant la meilleure «matérialité» Alors que les «matérialistes de l’ESG» cherchent une surperformance financière dans les indicateurs ESG, nous préconisons une approche différente en cherchant la durabilité dans les indicateurs financiers fondamentaux. Selon les «matérialistes de l’ESG», seuls les critères ESG influençant les résultats des sociétés doivent être pris en compte. Mais tout analyste financier classique qui se respecte prend d’ores et déjà en compte l’ensemble des facteurs – financiers, extra-financiers ou autres – susceptibles d’avoir un impact sur la performance de son investissement. Par conséquent, rechercher la matérialité dans les critères ESG ajoute peu de valeur financière et banalise le concept de l’investissement socialement responsable, qui vise avant tout à mettre des décisions d’investissement en conformité avec un système de valeurs et à promouvoir des pratiques durables dans le monde des affaires. Un véritable filtre ISR devant prendre en compte les externalités Les analystes financiers savent intégrer ce qui est financièrement pertinent pour les sociétés qu’ils couvrent, mais on ne peut généralement attendre d’eux qu’ils étudient le contexte plus large – autrement dit les aspects environnementaux, sociaux et de gouvernance – de leurs investissements. Ainsi, ils ne prennent pas en compte les externalités – positives ou négatives – puisque, par définition, elles n’apparaissent pas dans les comptes des sociétés. Cela relève du champ de l’ISR ou de la recherche extra-financière. Un filtre ISR crédible doit assurer en premier lieu que l’univers d’investissement ne contienne pas de sociétés qui agissent de façon non responsable, qui contribuent à une détérioration sévère de l’environnement, qui occasionnent des torts sur le plan social ou qui ébranlent la confiance des marchés financiers en appliquant des normes de gouvernance d’entreprise insatisfaisantes. Ainsi, le rôle le plus important du filtre extra-financier doit être d’éliminer les sociétés exposant les investisseurs à des 8 Back to Sustainable Development – Or why the ESG materiality debate misses the point... Viewpoint. risques de durabilité potentiellement inacceptables, et de garder celles qui Pictet Asset Management 2006 semblent les mieux armées pour répondre aux grands défis de l’avenir. 10 Comment survivre à la prochaine crise?
La sélection extra-financière comme condition nécessaire mais non suffisante Un filtre extra-financier sérieux demeurera donc la pierre angulaire de toute approche d’investissement durable crédible. C’est là pour nous une condition nécessaire, mais néanmoins insuffisante, à une stratégie d’investissement véritablement durable. Ajouter de la durabilité financière à l’équation ne dilue donc, ni ne pervertit, la durabilité initiale de l’univers d’investissement circonscrit. Au contraire. Cela apporte une autre dimension, largement négligée, à l’analyse ESG traditionnelle (à savoir les externalités négatives sur les marchés financiers et l’économie), tout en permettant en même temps la construction de portefeuilles d’investissement à la fois plus résistants aux chocs et plus performants. Introduction De la durabilité extra-financière à la durabilité financière Résultats Conclusion Résumé 11
5. Résumé Les approches de l’investissement socialement responsable existantes n’ont pas offert aux investisseurs une meilleure protection contre la baisse du marché durant la crise financière, et n’ont pas accordé suffisamment d’attention à certaines externalités financières et économiques particulièrement négatives qui ont contribué à sa gravité. Eliminer les risques environnementaux, sociaux et de gouvernance nous apparaît toujours en soi une condition nécessaire mais non suffisante à une stratégie d’investissement véritablement durable. Pour que l’ISR survive et devienne une stratégie d’investissement de premier Notre approche: chercher la durabilité plan, au-delà de sa niche actuelle, il devra offrir à l’avenir de la durabilité et dans les fondamentaux des rendements ajustés au risque plus élevés. Dans ce but, nous cherchons financiers la durabilité dans les fondamentaux financiers des sociétés. Pour cela, nous identifions et analysons les facteurs qui rendent les sociétés plus stables et pérennes, et contribuent ainsi à l’équilibre des marchés financiers et de l’économie dans son ensemble. Nous privilégions les facteurs de durabilité financière affichant les meilleures caractéristiques historiques en termes de risque/rendement. C’est ce que nous appelons l’approche de «durabilité financière». Nous construisons ensuite des portefeuilles exprimant ces facteurs de durabilité Au vu des résultats obtenus, combiner financière, et utilisons ces «portefeuilles de facteurs» pour construire un durabilité extra- portefeuille global et trois portefeuilles régionaux actions. Nous analysons la financière et financière performance relative de ces portefeuilles intégrant la durabilité financière par pourrait susciter rapport à leurs indices de référence MSCI respectifs sur la dernière décennie. une adhésion beaucoup Les résultats sont encourageants et confirment nos hypothèses selon lesquelles plus large aux stratégies d’investissement des portefeuilles construits dans une perspective de durabilité financière durable. peuvent offrir une meilleure résistance face aux baisses de marché et tendent à surperformer dans la plupart des environnements. Permettre aux portefeuilles axés sur les facteurs ESG d’offrir une plus grande durabilité financière ouvre des perspectives intéressantes, et la promesse de risques moindres et de performances plus élevées (tant en termes financiers qu’extra-financiers) semble enfin à portée de main. Auteurs: Christoph Butz Laurent Nguyen Définition de Pictet Asset Management («PAM»): Aux fins du présent document, Pictet Asset Management désigne l’ensemble des filiales et départements opérationnels du groupe Pictet liés à la gestion institutionnelle: Pictet Asset Management SA, société suisse enregistrée auprès de l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA), Pictet Asset Management Limited, société britannique autorisée et régulée par la Financial Services Authority, et Pictet Asset Management (Japan) Limited, société japonaise régulée par la Financial Services Agency of Japan. Ce document est uniquement destiné à la distribution aux investisseurs professionnels. Il n’est toutefois pas destine à être distribué à des personnes physiques ou à des entités qui seraient citoyennes d’un Etat ou auraient leur résidence dans un lieu, Etat, pays ou juridiction dans lequel sa distribution, sa publication ou son utilisation seraient contraires aux lois ou aux règlements en vigueur. Les infor- mations utilisées dans la préparation de ce document se basent sur des sources réputées fiables, sans que leur exhaustivité ni leur exactitude soient garanties. Toute opinion, estimation ou prévision est susceptible d’être modifiée en tout temps et sans préavis. Avant d’investir dans un fonds, les investisseurs devront prendre connaissance du prospectus ou du mémorandum d’offre. Ce document a été émis en Suisse par Pictet Asset Management SA et/ou Pictet & Cie, et dans le reste du monde par Pictet Asset Management Limited. Il ne peut être reproduit, en totalité ou en partie, sans leur autorisation préalable. 12 Comment survivre à la prochaine crise?
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