CONSTRUIRE UN PROJET D'ESPACE-TEST AGRICOLE DANS LE GERS - Guide méthodologique - Guide réalisé par l'ADEAR du Gers et financé par le Conseil ...
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
CONSTRUIRE UN PROJET D'ESPACE-TEST AGRICOLE DANS LE GERS Guide méthodologique Guide réalisé par l’ADEAR du Gers et financé par le Conseil Général du Gers dans le cadre du Programme départemental d’insertion 1
Avant propos La profession agricole est confrontée à la problématique du renouvellement de ses générations. Depuis les années 50, la diminution du nombre d'agriculteurs est constante et parallèlement on observe un accroissement de la taille des exploitations et de leur valeur. Dans le Gers, le nombre d'agriculteurs a été divisé par deux (soit près de 10 000 agriculteurs en moins) entre 1970 et 2010 (source recensement agricole AGRESTE). La transmission des fermes est de plus en plus difficile. Moins d’enfants d'agriculteurs désirent reprendre l’exploitation familiale. Une part importante d'agriculteurs sont sans successeurs connus et ces exploitations, toujours plus grandes, sont inabordables pour bien des candidats. Les acteurs du territoire sont de plus en plus conscients de l'importance de la question de l'installation agricole. Cette diminution du nombre d'actifs a des incidences sur l'économie du département, sur l'accès aux populations à des productions locales de qualité mais aussi sur la dynamique et l'entretien d'un territoire rural comme le Gers. Il existe pourtant un réservoir d'installations possibles, viables, avec un marché porteur, mais qui ne se concrétisent pas par un manque de soutien adapté. En effet, les porteurs de projet, candidats à l'installation hors cadre familial, rencontrent des difficultés car ils ne correspondent pas à la « norme » : installation progressive sur des petites fermes diversifiées, candidat en reconversion professionnelle ou de plus de 40 ans... Au delà des difficultés communes à tout projet d'installation (formation, étude économique, commercialisation...), s'ajoutent des problèmes particuliers inhérents aux spécificités de l'agriculture (accès au foncier), aux difficultés d'accès au service d'accompagnement classique (parcours aidé notamment) et au caractère souvent « atypique » des projets ne s'insérant pas dans des filières organisées. Espace-test, encore appelé couveuse agricole, est un dispositif qui permet à des porteurs de projet de tester une activité agricole grandeur nature avant une véritable installation. Il s'agit de sécuriser le parcours d'installation par la mise à disposition d'une période et d'un lieu nécessaires au test de l'activité. Actuellement, il n'existe pas dans le département gersois d’espace-test agricole. Si ces dispositifs ont montré leur efficacité dans les secteurs de l'artisanat ou des services, les espaces-test agricoles sont relativement récents et offrent, aujourd’hui seulement, les premiers retours d’expériences sur le plan national. Les structures souhaitant créer un espace-test agricole se trouvent confrontées aux importantes spécificités du milieu agricole (statuts, besoin de foncier, formation agricole...) sans avoir nécessairement les contacts de professionnels pour les aborder. Le Conseil Général du Gers s'intéresse de près à la question des espaces-test agricoles pour notre territoire et particulièrement pour l’ouest du département gersois. L’étude d’opportunité réalisée par l'ADEAR du Gers a permis l’élaboration de ce guide destiné à fournir un appui méthodologique aux structures intéressées par la création d’un espace-test agricole dans le Gers. Les acteurs des espaces-test agricoles s'entendent sur une définition commune à cet outil : « un dispositif levier pour l'installation de nouveaux agriculteurs qui répond à une vision commune pour le développement des territoires : produire une alimentation de qualité dans un environnement préservé, relocaliser la fonction alimentaire et créer de l'emploi durable ». Pour relever le défi de l'installation, il est nécessaire de construire des stratégies innovantes qui valorisent la compétitivité des installations qui restent encore marginalisées sous le terme d'atypique. Cette orientation doit s'appuyer sur la cohérence projet-candidat-territoire. Ce travail de fond nécessite le renforcement et la concertation des acteurs mobilisés sur la question de l'installation et de l'emploi sur le territoire. 3
Table des matières Espace-test : principes et enjeux .....................................................................................................................................................................7 Éléments de définition.................................................................................................................................................................................7 Enjeux de l'espace-test agricole..................................................................................................................................................................7 Les étapes à la création d'un espace-test agricole......................................................................................................................................8 Quelle volonté, quels objectifs ?.................................................................................................................................................................8 Quelle gouvernance ?....................................................................................................................................................................................8 Dans quelles conditions mettre en œuvre l'espace-test ?....................................................................................................................8 Quelles gestion et organisation au sein de l'espace-test ?...................................................................................................................8 Quelles modalités en sortie d'espace-test ? ............................................................................................................................................8 Missions de la couveuse agricole....................................................................................................................................................................9 Ses finalités .....................................................................................................................................................................................................9 Ses objectifs ....................................................................................................................................................................................................9 Ses fonctions ..................................................................................................................................................................................................9 Le Contrat d'appui au projet d'entreprise (CAPE).....................................................................................................................................10 Principe..........................................................................................................................................................................................................10 Bénéficiaire du CAPE..................................................................................................................................................................................10 Le début d'activité économique du couvé............................................................................................................................................10 Contenu du CAPE.........................................................................................................................................................................................11 Montage juridique, fiscal et social de la couveuse agricole...................................................................................................................12 Statuts juridiques de la couveuse agricole............................................................................................................................................12 Fiscalité applicable à l'espace-test...........................................................................................................................................................14 Spécificité du volet social..........................................................................................................................................................................15 Statut et droits du porteur de projet......................................................................................................................................................17 Gestion de la couveuse agricole ...................................................................................................................................................................18 Gestion comptable......................................................................................................................................................................................18 Relation entre le couvé et la couveuse...................................................................................................................................................18 Responsabilité vis à vis des tiers.............................................................................................................................................................18 Risque professionnel..................................................................................................................................................................................18 Couverture d'assurance.............................................................................................................................................................................19 Diversité des espaces-test agricoles.............................................................................................................................................................20 Le test d'activité chez des agriculteurs..................................................................................................................................................20 Les coopératives d'activités et d'emploi (CAE)......................................................................................................................................21 Le profil des porteurs de projet et leur accompagnement....................................................................................................................22 Profils des porteurs de projet...................................................................................................................................................................22 Les compétences d'un chef d'exploitation............................................................................................................................................23 Phases de maturation du projet..............................................................................................................................................................24 Sélection des porteurs de projet..............................................................................................................................................................25 Rôle de l’accompagnement et conditions d'accueil...........................................................................................................................26 Sortie de l'espace-test.................................................................................................................................................................................28 Exemple de la Coopérative d'Installation en Agriculture Paysanne (CIAP) en Loire-Atlantique..............................................28 Le Foncier et les moyens de production.....................................................................................................................................................29 Adaptation des moyens de production au test...................................................................................................................................29 Conditions d'exploitation et de mise à disposition ............................................................................................................................29 Acquisition des moyens de production par le porteur de projet....................................................................................................30 Les financements possibles............................................................................................................................................................................33 Définition des besoins de l'espace-test..................................................................................................................................................33 Financements publics................................................................................................................................................................................33 Autres financements mobilisables..........................................................................................................................................................34 Stabilité financière de l'espace-test ........................................................................................................................................................34 La gouvernance dans l'espace-test................................................................................................................................................................35 Rôle de la gouvernance au sein des espaces-test................................................................................................................................35 Montage d’un espace test agricole multi-partenarial........................................................................................................................35 Les acteurs du territoire............................................................................................................................................................................36 le Projet et son insertion territoriale ...........................................................................................................................................................37 Composantes du territoire........................................................................................................................................................................37 Conditions de pérennisation de l'installation agricole.......................................................................................................................39 Moyens d’action des collectivités............................................................................................................................................................41 Bibliographie et références utiles.................................................................................................................................................................43 5
Espace-test : principes et enjeux Éléments de définition La définition du terme espace-test agricole recouvre un périmètre important de dispositifs existants appelés : couveuse, pépinière d'entreprise, nids d'activités, ferme-école, coopérative d'activité et d'emploi... De façon générale, tous ces termes indiquent des dispositifs d'accompagnement de porteurs de projet candidats à la création d'entreprise basés sur le test de l'activité. Selon le Réseau National des Espaces-Test Agricole (RENETA), le test d'activité consiste à développer de manière autonome et responsable une activité agricole en grandeur réelle sur une durée limitée et dans un cadre qui réduit la prise de risque. Il permet d'évaluer le projet et la capacité de la personne à le mener, dans le but de décider de la poursuite, de l'ajustement ou de l'abandon du projet. A noter : Ce guide met en lumière la diversité des dispositifs espace-test ; toutefois, il a été choisi de développer plus spécifiquement la forme couveuse agricole. On distingue le terme de couveuse par le fait qu'il y a obligatoirement un contrat spécifique liant le porteur de projet et la structure couveuse : le Contrat d'Appui au Projet d'Entreprise (CAPE). Le Réseau National des Espaces-Test Agricole (RENETA) rassemble une diversité d'acteurs dynamiques autour des valeurs communes de l'économie sociale et solidaire et de l'éducation populaire. Il a pour mission de promouvoir le test d’activité pour l’installation agricole, de gérer, d’animer le réseau et de représenter ses membres. L'espace-test agricole doit (extrait de la charte RENETA) : - prendre en compte la diversité des parcours des porteurs de projet ; - veiller à la prise en compte du parcours personnel et professionnel du porteur de projet dans sa globalité ; - travailler dans le sens de l'autonomie de la personne ; - favoriser la transmission des savoirs, des compétences et des pratiques ; - être un outil d'intégration dans un réseau local et dans la profession agricole. Enjeux de l'espace-test agricole Les évolutions de l'agriculture ont des conséquences importantes sur le département gersois fortement empreint par ce secteur. Le Gers a besoin de rendre attractif son territoire par le développement d'emplois. Dans ce domaine, tout reste à créer et, c'est bien là, la richesse et le potentiel des zones rurales. La mise en place d'espace-test agricole constitue un challenge pour l'agriculture de demain. Fruit d'une volonté partagée sur le territoire, ce dispositif d'appui à la création d'activité s'insère dans une politique de développement durable contribuant à l'émergence d'une nouvelle économie plus écologique, plus humaine et une dynamique économique d'échelle relocalisée. 7
Les étapes à la création d'un espace-test agricole Les espaces-test sont des dispositifs spécifiques qui allient à la fois un outil complémentaire de professionnalisation pour l'installation agricole et un outil pour développer une agriculture en adéquation avec les besoins du territoire. Le cheminement à parcourir pour construire un espace- test cohérent et performant passe par la réponse à plusieurs questions : Quelle volonté, quels objectifs ? En s'intégrant dans une logique d'économie sociale et solidaire, l'espace-test va s'adresser à un public en difficulté dans l'accès à l'installation. Il convient de définir les besoins de ce public et ainsi le champ d'actions mis en œuvre par l'espace-test. En parallèle, il s'agit de déterminer l'ambition du territoire sur la question de l'installation et d'optimiser les initiatives déjà existantes. Quelle gouvernance ? Plusieurs acteurs intervenant sur des secteurs différents et complémentaires peuvent s'allier dans cette ambition commune pour le montage, l'animation et le suivi de l'espace-test. La concertation des acteurs permet de déterminer le rôle et les apports de chacun, mais aussi d'envisager les évolutions des dispositifs actuels. Dans quelles conditions mettre en œuvre l'espace-test ? La diversité des espaces-test existants laisse une latitude importante dans les conditions de mise en œuvre. La question renvoie à ce que l'espace-test peut offrir aux porteurs de projet, par définition : un espace physique et une période ressource adaptés au profil des porteurs de projet. Une série de choix dépendants des opportunités créées sur le territoire seront réalisés afin d'optimiser les conditions d'accueil : Sur quel foncier sera réalisé le test ? Quels équipements seront mis à disposition ? Il peut s'agir d'un lieu fixe dédié au test ou d'un lieu pérenne pour l'installation des porteurs de projet. Le lieu va aussi réunir des caractéristiques adaptés au projet tant sur le plan agronomique que sur sa localisation géographique (proximité des acteurs, des débouchés...). Quelles compétences sont nécessaires pour la gestion de l'espace-test et l'accompagnement des porteurs de projet ? Il sera opportun sur ce point d'associer des acteurs complémentaires et de créer ainsi des conditions favorables à l'insertion territoriale du projet. Avec quelles ressources financières ? Le montage financier, souvent complexe, de l'espace-test cherche à optimiser et à sécuriser le dispositif en répartissant les risques et en diversifiant les ressources mobilisées. Quelles gestion et organisation au sein de l'espace-test ? Les espaces-test étant des dispositifs très spécifiques, le cadre légal dans lequel s'exerce l'hébergement juridique des activités de test entraîne une gestion particulière. La question des statuts et de la relation entre le porteur de projet et l'espace-test doivent être formalisées et nécessitent des outils de gestion et d’organisation appropriés et personnalisés. Quelles modalités en sortie d'espace-test ? L'espace-test est un lieu d'échange favorisant l'insertion sociale et territoriale du porteur de projet. Le réseau d'acteurs mobilisés peut créer des conditions favorables pour pérenniser l'installation des porteurs de projet en sortie d'espace-test, notamment sur la question de l'accès au foncier. 8
Missions de la couveuse agricole La création d'une couveuse agricole revêt un caractère novateur, notamment dans le secteur agricole. Cette démarche vient, de façon complémentaire, renforcer les dispositifs existants de soutien à la création d'entreprise. L'esprit dans lequel ces dispositifs sont mis en œuvre a fait l'objet d'une circulaire du Ministère de l'emploi et de la solidarité1. Ses finalités La couveuse vise dans sa mise en œuvre à soutenir des initiatives qui favorisent la création d’activités agricoles et répond aux réels besoins des candidats à l'installation. La couveuse n'est pas créée aux fins même de l'activité de la structure d'appui pour aboutir à une main d’œuvre gracieuse ou à des subventions, ni pour tester le porteur de projet en vue de la transmission d'une exploitation agricole. Ces derniers cas représentent, en effet, plus des contournements à des cadres juridiques existants qu'à une réelle volonté d'apporter un appui aux porteurs de projet et à leur installation par le test d'activités agricoles. Ses objectifs La couveuse est un support transitoire pour le candidat à l'installation qui se confronte à la réalité de son projet professionnel. La couveuse agricole doit garantir aux porteurs de projet les conditions d'une insertion adaptée dans leur environnement social et économique : - en bénéficiant d'un apprentissage de compétences entrepreneuriales (prise d'initiative, gestion d'entreprise...), - par un accompagnement permettant d'évaluer par eux-même leur projet pour vérifier tant sa viabilité économique que sa vivabilité (adéquation du projet avec les finalités du couvé), - par un hébergement physique et juridique pour le test de leur activité en grandeur réelle limitant ainsi la prise de risque économique. Ses fonctions Afin d'assurer un accompagnement personnalisé des porteurs de projet, les structures couveuses doivent réunir les compétences et les moyens adéquats en assurant trois types de fonctions : fonction pédagogique. Le porteur de projet va apprendre à entreprendre. Il s'agit pour la structure espace-test d'accompagner le couvé à l'acquisition de compétences par le vécu de cette expérience et ainsi de le guider progressivement vers son autonomie. fonction de gestion, en structurant et délimitant les différentes activités de la couveuse, principalement : celles propres à la structure (accompagnement, mise à disposition de biens...) et celles de production agricole du porteur de projet hébergée. fonction d’animation, en étant un outil de développement local pour le territoire et d'insertion des porteurs de projet dans leur environnement professionnel. La couveuse agricole vise à accompagner le porteur de projet en définissant un parcours d'apprentissage. L'hébergement juridique du projet est un des moyens mis en œuvre. Ce cadre légal permet aux porteurs de projet de tester leur activité économique sur une période limitée dans le temps. 1 CIR DGEFP n° 2000/16 du 26 juin 2000 relative au pilotage national de l’expérimentation “ couveuses d’activités ou d’entreprises ” 9
Le Contrat d'appui au projet d'entreprise (CAPE) Le CAPE, Contrat d'Appui au Projet d'Entreprise est le cadre reconnu (loi sur l'initiative économique de 2003, décret d'application de 2005 et circulaire administrative de 2006) pour régir les relations entre le porteur de projet et la couveuse agricole. Il permet de contractualiser l'entrée d'un porteur de projet dans la couveuse. Le CAPE ne relève ni d'un contrat de travail, ni du domaine de la formation professionnelle. Principe Le CAPE est un contrat de droit privé écrit par lequel : la structure couveuse s'engage à fournir au bénéficiaire un programme d'actions en mettant à disposition un appui pédagogique, des moyens logistiques et des conseils personnalisés le bénéficiaire s'engage à suivre ce programme de préparation à la création et à la gestion de son activité économique. Bénéficiaire du CAPE Le bénéficiaire du CAPE, appelé communément « couvé » est une personne physique ayant un projet de création ou de reprise d'exploitation agricole. Sont exclus de ce dispositif les salariés à plein temps. Pendant la durée du CAPE, le porteur de projet peut conserver, sous certaines conditions, ses revenus sociaux (indemnités chômage, RSA...). Il bénéficie d’une couverture sociale et d’une protection en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle. Il bénéficie, en outre, des dispositions du code du travail pour l'hygiène, la sécurité et la santé. Le début d'activité économique du couvé On distingue deux temps dans le CAPE qui vont avoir des incidences en terme de responsabilité de gestion entre le couvé et la couveuse : avant le début d'activité économique, après le début d'activité économique. La loi impose au couvé de procéder à l’immatriculation de l’entreprise à partir du « début d’une activité économique », sans toutefois définir ce qu’il faut entendre par « début de l’activité économique ». En pratique, ce sont les parties qui doivent déterminer contractuellement la période de début d’activité en fonction de l’évolution du projet. L'Union des couveuses préconise que cette détermination fasse référence à des capacités, une autonomie et une régularité dans les revenus permettant au couvé de vivre dignement de son travail et de s’émanciper des revenus sociaux de substitution. La déclaration de début d'activité n'est d'ailleurs pas une obligation si les conditions ne le permettent pas. L’immatriculation peut intervenir pendant la durée du contrat d’appui et sans que cela entraîne rupture de celui-ci. 10
Contenu du CAPE Le CAPE est conclu par écrit pour une durée de 12 mois maximum, renouvelable deux fois également par écrit. Ce CAPE mentionne les dispositions prises entre la structure d'appui et le couvé définies à minima par la réglementation2 : - un programme d'actions visant à la préparation à l'installation et à la gestion d'une activité économique ; - les engagements respectifs des parties en distinguant d'une part, ceux prévus au début d'une activité économique et, d'autre part, ceux applicables après le début de cette activité ; - la nature, le montant et les conditions d'utilisation des moyens mis à la disposition du bénéficiaire par la structure ; - la nature, le montant maximal et les conditions des engagements pris par le bénéficiaire couvé à l'égard des tiers au cours de l'exécution du contrat CAPE ainsi que la partie qui en assume la charge financière à titre définitif ; - après le début d'une activité économique, les modalités et la périodicité selon lesquelles la structure d'appui est informée des données comptables du bénéficiaire ; - le montant, les modalités de calcul et le mode de paiement de la rétribution versée par le porteur de projet à la couveuse en contrepartie de ses services; - le cas échéant, les modalités de calcul ou le montant forfaitaire du versement d'une aide financière au créateur sous forme d'une rétribution ainsi que leur évolution éventuelle au cours de l’exécution du contrat. - les modalités d'une rupture anticipée du contrat CAPE. Le Contrat d'Appui au Projet d'Entreprise est une pièce centrale pour déterminer les droits et les obligations entre le porteur de projet et la couveuse. Les engagements convenus reposent essentiellement sur les modalités de l'accompagnement, de la mise à disposition des moyens mais aussi sur les responsabilités des parties et leurs évolutions au cours de cette phase test. Afin de bien cadrer les stipulations prévues, des documents complémentaires nécessitent d'être annexés au CAPE, notamment le règlement intérieur de la couveuse et le contrat d'objectifs personnalisé. 2 décret n° 2005-505 du 19 mai 2005. Art. 1Er 11
Montage juridique, fiscal et social de la couveuse agricole On observe sur le territoire national une grande diversité MEMO PRATIQUE des formes et des montages mis en œuvre pour la création ● Le statut juridique est la forme de des couveuses agricoles que ce soit par rapport aux profils l'entité (personne ou groupe de des porteurs de projet, au devenir du foncier mis à personnes) qui va développer une disposition, aux statuts des personnes bénéficiaires, aux activité. La forme juridique choisie va formes juridiques de la couveuse, aux modalités de mise entraîner des formalités administratives en œuvre (structure porteuse au démarrage, conditions de et l'application de certaines contraintes mise en place, coopération-partenariat, etc). posées par le législateur. ● Le statut social est centré sur les L'examen et le choix des statuts juridiques, fiscaux et personnes impliquées dans le projet. Il sociaux sont essentiels car ils induisent des règles de permet aux personnes qui travaillent de fonctionnement, des contraintes de gestion, des déterminer leur affiliation à un régime de protection sociale (maladie, retraite...) formalités et réglementations applicables. En amont, une par une caisse d’assurance. analyse devra être conduite avec un questionnement de ● Le statut fiscal définit le régime fond s'agissant essentiellement du profil des porteurs de d’imposition (application des impôts projet ciblés et de la gouvernance au sein de la couveuse. auxquels la structure est assujettie). Statuts juridiques de la couveuse agricole La couveuse agricole peut être formée à l'initiative d'une structure juridique ou bien être issue de la rencontre entre plusieurs structures qui créent la structure couveuse. Si cette dernière option est choisie, elle naît d'une volonté de gouvernance partagée et de complémentarités d'actions des structures fondatrices. Voir le chapitre consacré « Gouvernance de l'espace-test ». Particulièrement adapté aux couveuses, la législation 3 a régit en 2003 un cadre juridique pour les porteurs de projet couvés en établissant le contrat d’appui au projet d’entreprise (CAPE). Si cette formule est choisie, la réglementation4 impose que la couveuse soit une personne morale. Ainsi, il est possible d'avoir une grande latitude dans le choix de la forme juridique : ● Association de type loi 1901, ● Société de forme civile notamment les sociétés agricoles GAEC, EARL et SCEA, ● Société commerciale type SARL (société à responsabilité limitée) ou SAS (société par actions simplifiée), ● Société coopérative type SCOP (société coopérative de production) ou SCIC (société coopérative d’intérêt collectif), ● Structure de droit public (notamment les établissements publics d'enseignement). D'après les expériences de terrain recueillies, les couveuses agricoles sont généralement constituées sous le statut associatif. Cette forme permet une facilité au démarrage avec des procédures administratives plus simples et un fonctionnement plus souple. Du reste, cette forme juridique pourra, au besoin, évoluer vers un autre statut. 3 LOI n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l'initiative économique 4 Code de commerce - Article L127-1 12
● Cas des associations : Exemple de l'association BIOPOUSSES (50) Objet de l'association : contribuer au développement Fonctionnement : le principe fondamental d'une socio-économique local ; créer et gérer une couveuse association repose sur l’obligation de non- d’entreprises maraîchères biologiques ; accompagner partage direct ou indirect des bénéfices entre ses la préparation de l’installation des "couvés" futurs membres. Cela n'empêche pas l'association chefs d’entreprises maraîchères biologiques ; mettre à d'avoir une activité économique générant des disposition des couvés des moyens ; repérer et bénéfices. Toutefois, il est nécessaire que le développer de nouveaux débouchés de proximité ; couvé ne soit pas membre adhérant de cette contribuer au développement de la consommation de structure associative. légumes bio de proximité notamment dans la restauration collective par la formation et l’accompagnement des évolutions de pratiques Formalités administratives : un dépôt des culinaires, et de conception des menus, par la statuts en préfecture est exigé pour que communication vers les consommateurs des l'association dispose de la personnalité morale. restaurants collectifs, par l’organisation des Les statuts devront mentionner dans l'objet de producteurs fournisseurs locaux et autres démarches l'association l’existence d'une activité appropriées ; tester des techniques de production économique (celle mise en œuvre par le couvé) biologique, des formes de structuration et et d'une activité d'accompagnement. Une d’organisation ; les méthodes d’accompagnement à publication au Journal Officiel est ensuite l’installation via une couveuse ; diffuser largement les réalisée. Les frais d'insertion sont définis résultats de ces tests techniques, commerciaux, annuellement et variables en fonction du type organisationnels et méthodologiques ; contribuer à la d'insertion (44€ pour une création, 31€ pour une qualité de l’eau, et au respect de l’environnement. modification5). ● Cas des sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) : La préfiguration de cette société est généralement faite par une association. Fonctionnement : la SCIC est une forme sociétaire relativement récente 6. Elle a pour objet la production de biens ou de services d’intérêts collectifs ayant un caractère d’utilité sociale. Cette société a un statut de société commerciale SA ou SARL et s'inscrit dans le fonctionnement des règles coopératives7 : répartition du pouvoir sur le principe 1 personne = 1 voix, affectation des résultats sous forme de réserves impartageables, etc. La spécificité du multi-sociétariat dans la SCIC est d'associer plusieurs catégories d'acteurs (dont obligatoirement salariés et bénéficiaires, et autres comme des collectivités territoriales, des associations, des bénévoles...) permettant ainsi à tous ses sociétaires d'avoir le même rapport à la coopérative et de décider ensemble. Formalités administratives : En amont de la déclaration au CFE (voir paragraphe suivant), la structure SCIC devra élaborer et adopter ses statuts. Un travail important doit être réalisé pour établir la nature et le montant des apports par catégorie d'associés, signer les bulletins de souscription... Ces statuts doivent être enregistrés à la recette des impôts du siège social de la société et publiés dans un journal d’annonce légale. A noter : en pratique, les formes en société d’exploitation agricoles telles que les GAEC ou EARL ne sont pas utilisées. En effet, ce choix comporte des contraintes liées au fait que les associés doivent être des personnes physiques, alors que, dans la plupart des cas, les couveuses agricoles sont généralement à l'initiative de personnes morales (association ou autres). 5 Arrêté du 11 décembre 2012 fixant le montant des rémunérations dues en contrepartie de diverses prestations fournies par la direction de l'information légale et administrative 6 loi 2001-624 du 17 juillet 2001 7 loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération 13
● Déclaration à réaliser : La structure couveuse qui héberge le couvé est exploitante agricole. Elle devra ainsi déclarer son activité auprès du centre de formalité des entreprises (CFE) géré par la Chambre d'agriculture compétente pour le département siège de la structure à partir du formulaire M0 cerfa n° 11927*02. Cette procédure est en effet nécessaire pour que la couveuse puisse : employer un ou plusieurs salariés, avoir une activité économique lucrative l’assujettissant fiscalement et être bénéficiaire d'éventuelles aides publiques mais aussi, dans le cas des sociétés, pour l'immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés. La structure sera inscrite au répertoire SIRENE et titulaire des différents identifiants administratifs délivrés par l’INSEE (numéros SIREN, SIRET et code APE). Fiscalité applicable à l'espace-test En terme fiscal, la couveuse agricole est soumise aux impôts commerciaux, de part l’existence d'une activité dite lucrative au profit du porteur de projet, quand bien même la couveuse ne rechercherait pas de profits pour elle-même8(cas des associations). On distingue trois types d'imposition en matière fiscale : - Impôt sur les sociétés (IS) : la couveuse est redevable de l'impôt sur les sociétés dès lors qu'elle génère un bénéfice. Cet impôt s'élève à 15% du bénéfice jusqu'à 38 120€ de résultat par exercice et à 33% au delà. En absence de bénéfice de la structure, l'impôt n'est pas appelé. Dans tous les cas, la couveuse doit déclarer son résultat (au plus tard dans les 3 mois suivant la clôture de son exercice) à l'aide du formulaire Cerfa n°11084*14 et d'une liasse fiscale. - Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) : La couveuse doit procéder à la facturation de la TVA sur les produits et services vendus. Le taux applicable est variable en fonction du type de produits concernés. D'un autre côté, la structure récupère la TVA facturée par ses fournisseurs. Par ailleurs, si les recettes annuelles ne dépassent pas 46 000 €, la couveuse a la possibilité de ne pas être assujettie à la TVA (sur option). - Contribution économique territoriale (CET) : cet impôt se compose de : une cotisation foncière des entreprises déterminée en fonction de la commune et dont le montant forfaitaire est généralement compris entre 200 et 600 €, une cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises qui est due lorsque le chiffre d’affaires annuel est supérieur à 500 000 €. 8 Instruction fiscale 4 H-5-98 du 15 septembre 1998 14
● Possibilités d'exonération fiscale pour les associations L'exonération fiscale n'est pas toujours recherchée au sein d'une couveuse. En effet, la fiscalité agricole permet de récupérer bien souvent un solde de TVA non négligeable lors de l'achat de fournitures et surtout de matériel. - Sectorisation fiscale des activités de la structure : Pour les associations couveuses, il est possible de créer une sectorisation de leurs activités qui permet d'avoir un traitement fiscal différencié de celles-ci sous certaines conditions. L'intérêt de cette sectorisation est d'être soumis aux impôts commerciaux uniquement pour les activités lucratives de l'association. En pratique, on peut se trouver dans plusieurs cas : soit l'association (sans but lucratif) déjà existante, créant une couveuse, distingue un secteur lucratif pour cette nouvelle activité (comprenant les activités économiques de production et les activités d'accompagnement du porteur de projet), soit, au sein même de l'activité de la couveuse, est créé un secteur lucratif comprenant uniquement les activités économiques du porteur de projet. Ainsi, l'activité d'accompagnement est considérée comme non lucrative et non concurrentielle et de ce fait non fiscalisée. Dans ce dernier cas, il convient d’être assez prudent en demandant préalablement un avis aux services des impôts (rescrit fiscal). En effet, il est possible que la fonction d'accompagnement du porteur de projet soit considérée comme une activité ayant pour objet principal le développement d'une clientèle ou l'accroissement des résultats de l'activité lucrative du porteur de projet. Dans ce cas, d'après une instruction fiscale9, la sectorisation fiscale serait remise en cause. - Régime de franchise fiscale : Les associations qui exercent accessoirement une activité lucrative et dont le montant des recettes d’exploitation encaissées au cours de l’année civile au titre des activités lucratives n’excède pas 60000 € peuvent bénéficier d'une exonération des impôts commerciaux. Ainsi, l'application de cette franchise va s'apprécier en fonction de l'interprétation du périmètre des activités lucratives de l'espace-test. Là aussi, il est conseillé de demander préalablement l'avis des services fiscaux. Spécificité du volet social Le contrat d'appui au projet d'entreprise (CAPE) est le mode de contractualisation le plus adapté pour régir le fonctionnement entre la couveuse agricole et le porteur de projet. Dans ce cadre, le statut social du porteur de projet est très spécifique. En effet, c'est la loi du 1er août 2003 qui va régir, pour une durée limitée, un statut à mi-chemin entre celui d'un salarié et celui d'un chef d'entreprise. La couveuse va donc devoir répondre à des obligations d'affiliation, de déclaration et de paiement de cotisations sociales. Déclaration auprès de la caisse MSA : La déclaration du bénéficiaire du CAPE auprès de la MSA doit être réalisée par la couveuse à l'aide Déclaration de conclusion d'un formulaire spécifique, distinct de la déclaration préalable à d’un CAPE : à télécharger sur www.msa.fr/lfr/documents/98820/0/ l’embauche. En effet, sur le plan juridique, le porteur de projet n'est Formulaire+CAPE.pdf pas considéré comme un salarié puisque non titulaire d'un contrat de travail pour son activité. La couveuse devra également faire part à la MSA des éventuels renouvellements ou/et ruptures du CAPE. 9 Instruction fiscale 4 H-5-06 du 18 décembre 2006 15
Affiliation au régime social agricole : Le porteur de projet, pendant la durée du CAPE, relève du régime social agricole en tant que salarié 10. Cette affiliation va permettre au porteur de projet de bénéficier des prestations sociales en matière d’assurance maladie, maternité, invalidité, décès, vieillesse, accident du travail/maladie professionnelle et assurance chômage. Paiement des cotisations et contributions sociales : Pendant la durée du CAPE, la couveuse doit s'acquitter des cotisations et contributions pour le compte du couvé. Celles-ci sont appelées sur la base des rétributions versées au couvé et du taux commun applicable en fonction des différentes branches (assurances sociales agricoles, cotisations d'allocations familiales, chômage, contributions sociales...). De façon générale, on retiendra : Montant de la cotisation = Assiette X taux applicable L'assiette de base correspond aux éventuelles rétributions versées au porteur de projet. Ces rémunérations prévues dans le CAPE sont : soit celles versées par la couveuse au couvé avant le début de son activité économique, soit des recettes hors taxes générées par l'activité déduction faite des frais liés à l'exercice de l'activité (frais de locations des moyens nécessaires, achats de fourniture et de service...) perçues par le couvé. En l'absence de rémunération versée au couvé ou prévue dans le contrat CAPE, les cotisations ne sont pas dues, à l’exception de la cotisation accident du travail et maladie professionnelle 11. Cette cotisation est calculée sur la base d'une assiette forfaitaire. De part son statut spécifique, le couvé bénéficiaire d'un CAPE, contrairement à un salarié, n'est pas affilié au régime de retraite complémentaire. Chaque trimestre, la couveuse doit déclarer à la MSA le montant de l'assiette servant au calcul des cotisations au moyen de la déclaration trimestrielle des salaires (DTS), ou de la déclaration dématérialisée de données sociales (N4DS). Mesure d'exonération du dispositif de l'ACCRE Le couvé peut, sous certaines conditions 12 liées à son statut, être éligible à l’ACCRE (aide aux chômeurs créateurs et repreneurs d’entreprise). L'ACCRE consiste en une exonération de certaines charges sociales pendant un an. Cette exonération s’applique soit sur les cotisations sociales versées par la structure à compter de la date où le couvé sous contrat CAPE a procédé à sa déclaration de début d'activité, soit sur les cotisations dues par le jeune installé suite à la fin du contrat CAPE lors de son affiliation au régime des travailleurs non-salariés. Cette exonération ne porte que sur certaines cotisations (assurance maladie/ maternité/ invalidité/ décès, prestations familiales et assurance vieillesse de base) et sur la partie des revenus ne dépassant pas 120 % du Smic en vigueur au 1er janvier (20 595€ pour 2013). 10 Article L. 722-20 modifié du code rural 11 Arrêté du 18 février 2008 relatif à la cotisation accidents du travail et maladies professionnelles due pour les personnes bénéficiaires du contrat d'appui 12 voir conditions d'éligibilité définies à l'article L5141-1 du code du travail 16
Vous pouvez aussi lire