D'où vient l'électricité que j'utilise ? - Qui Est Vert
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Préambule 01 Préambule S elon l’Agence Internationale de l’énergie, 33% des émissions de CO2 liées à l’utilisation d’énergie en Europe sont attri- buables à l’utilisation du réseau électrique. La production d’élec- tricité contribue significativement au réchauffement climatique et une transition énergétique rapide du réseau électrique est nécessaire. Pour ce faire, il est proposé aux consommateurs d’agir en optant pour de l’électricité de source renouvelable via notamment des offres d’électricité vertes. Au sein du marché intérieur de l’énergie1 regroupant les pays membres de l’Espace économique européen, ces offres sont encadrées par la directive 2018/2001. L’outil phare de ce mé- canisme de traçabilité de l’énergie est la garantie d’origine. Il s’agit d’un document électronique permettant de faire l’équi- valence entre l’électricité injectée et l’électricité soutirée au ré- seau. Il octroie un droit exclusif de revendication de l’origine de l’énergie utilisée et évite ainsi le double comptage. Sa vocation est de valoriser une énergie respectueuse de l’environnement et d’inciter à son développement. Depuis sa mise en place, ce mécanisme a souffert de nom- breuses critiques. Celles-ci, plus ou moins recevables, ont en- gendrées un discrédit envers ce mécanisme ayant pour effet de ralentir la progression de la demande et de pénaliser la transi- tion énergétique. Une grande part des idées reçues découle de la difficulté de compréhension ou de la mécompréhension des concepts phy- siques liés à l’emploi d’un réseau électrique. Il est donc logique que des raisonnements erronés aient émergés du fait de l’in- compréhension de ce qui est offert par le marché de l’électricité. Le principal obstacle à la compréhension de ces phénomènes tient à ce que la réalité juridique du marché se superpose à la 1 : Parlement Européen ; « Marché intérieur de l’énergie », 2020
Préambule 02 Préambule réalité physique du système électrique. Or, ces deux ensembles ne coïncident pas : ils ne reposent pas intrinsèquement sur des logiques comparables. Le réseau électrique est régi par des lois physiques alors que le système marchand est régi par des conventions et des textes juridiques, qui simplifie grossièrement la réalité physique. Le sujet est technique d’un point de vue physique et juridique. Il nous a paru nécessaire de joindre les efforts d’experts de ces différents domaines afin de produire un document péda- gogique à l’usage de décideurs politiques et également pour servir les organisations publiques et privées dont les premières concernées, les grandes entreprises cherchent des solutions pour contribuer positivement à la transition énergétique. Les connaissances apportées ont pour vocation d’aider les lec- teurs à mettre de côté leurs idées reçues en apportant plus de transparence sur des notions clés, de convaincre des bienfaits d’un mécanisme de consommation volontaire d’électricité re- nouvelable et enfin d’apporter un regard critique pertinent sur les améliorations possibles.
Sommaire 03 Sommaire Que dit la physique ? 04 Distinction entre signal électrique (vitesse très rapide) et charge électrique (vitesse très lente) ? 05 L’effet joule et autres effets générant des pertes. 07 Courant continu versus courant alternatif. 10 Les lois de kirchhoff : que signifie le fait que l’électricité suit le chemin de moindre résistance ? 15 Infrastructure : la construction d’un réseau électrique européen. 17 Le métier des gestionnaires de réseau. 21 Comment l’électricité circule-t-elle dans le réseau ? 24 Que dit le droit ? 26 Le marché de l’électricité est constitué de conventions : la responsabilité d’équilibre et la garantie d’origine. 28 Outre les garanties d’origine, quelles sont les notions juridiques liées au traçage légal de l’électricité ? 36 Attention : certaines notions ne garantissent ni le traçage légal, ni le traçage physique de l’électricité. 43 Conclusion 49
Que dit la physique ? 05 On ne consomme pas de l’électricité ! On utilise de l’énergie électrique dont la mesure est assurée par un comp- teur et dont l’unité d’usage est le kilowatt-heure (kWh). Pour mieux com- prendre, il est nécessaire de faire quelques rappels de physique essentiels et souvent amenés lors de débats. DISTINCTION ENTRE SIGNAL ÉLECTRIQUE (VITESSE TRÈS RAPIDE) ET CHARGE ÉLECTRIQUE (VITESSE TRÈS LENTE). L ’électricité est souvent définie par le déplacement des charges élec- triques dans les matériaux conduc- laire situé à 10 mètres, il faudrait plus de 22 heures aux électrons situés au niveau du panneau pour arriver au teurs tels que le cuivre ou l’aluminium filament de l’ampoule. Ce n’est donc et seules les charges négatives, les pas les charges mises en mouvement électrons, se déplacent. Or leur vi- près du panneau qui circulent dans le tesse moyenne de déplacement est filament lorsque l’on ferme le circuit. très faible (les électrons s’agitent en Ce sont les électrons présents dans le permanence et ils subissent beau- filament et près du filament qui sont coup de collisions qui les ralentissent). mis en mouvement « poussés » par le Cette vitesse moyenne dépend de l’in- champ électrique que génère le pan- tensité du courant électrique qui est neau solaire et médié par l’ensemble mesuré en ampère (A). Ainsi dans un de tous les électrons du circuit. On fil de cuivre de 1 mm2, sans courant, parle alors d’onde électromagné- cette vitesse moyenne est nulle. tique, en fait de l’énergie, qui se dé- place infiniment plus vite. Lorsque l’on Pour un courant continu de 1 A, elle ferme le circuit, le temps d’établisse- est seulement de 45 cm/h. Si une am- ment de ce courant continu est quasi- poule électrique était alimentée en ment instantané. courant continu par un panneau so-
Que dit la physique ? 06 Pour un courant alternatif, les élec- nous utilisons et qui se déplace très trons oscillent de quelques microns vite : 200 000 km/s pour les câbles autour de leur position moyenne et à très haute tension que gère RTE (le leur vitesse moyenne est aussi qua- réseau français de transport d’élec- si nulle (quelques millimètres par tricité). La conséquence est que cette heure), il n’y a pas de déplacement énergie vient de centres de produc- d’ensemble. Par contre, il faut de tion qui peuvent être très éloignés l’énergie pour les faire osciller. C’est du compteur. Elle se déplace de gé- ce que mesure le compteur. nérateurs en transformateurs portée par le réseau de câbles électriques Autrement dit les électrons que l’on jusqu’à l’utilisateur final. Au contraire « utilise » à chaque instant sont quasi- des électrons, qui ne servent que de ment fixes, ce n’est que l’énergie qu’ils passeurs de l’énergie et restent en transportent de proche en proche moyenne sur place. par leurs oscillations collectives que -- - Equivalent des électrons Equivalent du signal électrique vitesse ≈ quelques fractions vitesse ≈ 2X108m/s de millimètre par s. Note Pour illustrer le courant électrique, le pendule de Newton est un bon exemple. Les électrons - ici représentés par les boules au centre, restent quasiment immobiles lors du passage du signal électrique. Le signal électrique - ici représenté par la poussée sur la dernière boule, est quasi instantané (il équivaut quasiment à la vitesse de la lumière). A noter que la vitesse des charges électriques est de quelques fractions de millimètre par seconde pour un courant continu mais quasi nulle pour un courant alternatif. A retenir L’énergie se déplace dans un réseau électrique à une vitesse proche de celle de la lumière. Elle peut provenir quasiment instantanément de moyens de production situés à des milliers de kilomètres. Il ne faut pas confondre le déplacement de l’énergie avec celui de l’électron, beaucoup plus lent, et qui est un passeur de l’énergie.
Que dit la physique ? 07 L’EFFET JOULE ET AUTRES EFFETS GÉNÉRANT DES PERTES. S oumis à une différence de poten- tiel, les électrons qui se déplacent dans un fil (aussi bien en continu, que lorsqu’ils oscillent sur place) intera- gissent entre eux et avec les atomes du fil (en fait avec les phonons, des oscillations collectives des atomes liées à la température). Dans le cadre d’un modèle simple, le temps moyen entre collisions défini la conductivité du matériau, plus ce temps est long, plus la conductivité est grande (les électrons sont plus « libres » de se dé- placer, il y a moins de « viscosité ») et plus la résistivité est faible. D’autre part, si la section du fil diminue locale- ment avant de reprendre sa taille ini- tiale, on comprend que la résistance augmente localement car le flux d’électrons devant rester constant, ils subissent plus de collisions lorsque la section devient plus faible. Au final, la résistance est d’autant plus grande que la section est faible, et que les durées entre collisions sont faibles. Ce couplage avec la matière se traduit par une élévation locale de tempéra- ture, c’est l’effet Joule.
Que dit la physique ? 08 A noter qu’en alternatif, pour des sec- liés à la physique mais également des tions de fil très grandes, il entre en fraudes ou des erreurs de comptage. jeu ce que l’on appelle les effets de En fait, nous pouvons considérer que peau. Le courant, en fait la densité de le réseau électrique est lui-même uti- courant, décroit depuis la surface, où lisateur d’une part de l’énergie qui est la densité de courant est forte, vers transportée en raison de ces phéno- l’intérieur, où elle est faible, voire nulle mènes. Cela signifie concrètement au-delà de quelques cm pour un fil que si un producteur doit satisfaire en cuivre à une fréquence de 50 Hz. un besoin de 1000 kWh d’un utilisa- Du point de vue résistif, tous se passe teur, il devra produire 1000 + x kWh, comme si la section du fil était plus x étant l’énergie utilisée par le réseau petite et donc que le fil présentait une électrique du fait de l’effet Joule no- « résistance » plus grande que celle tamment. RTE, le réseau de transport que l’on attendrait. Pour le cuivre à 50 de haute tension, déclare un taux de Hz, cette épaisseur est d’environ 1 cm. pertes de 2,2% en 2018 soit 11 TWh. Ceci prend de l’importance pour des Sur les réseaux de distribution, le câbles à très haute tension (400 kV) gestionnaire Enedis annonce que les où le rayon intérieur est de quelques pertes s’élèvent au total à près de 6 centimètres, mais négligeable pour % de l’énergie acheminée soit 23,3 les tensions domestiques (230 V) où TWh. On note d’ailleurs que les pertes le rayon est de l’ordre du millimètre. sont d’autant plus faibles que la ten- sion est élevée, d’où l’utilisation des Les pertes d’énergie se calculent et lignes à très haute tension pour le d’autres facteurs que l’effet Joule en transport de l’énergie sur de grandes entrainent, à savoir l’effet de cou- distances2 et 3. ronne pour ce qui est des impacts Note Nous avons ici la représentation d’un câble électrique. Lors du passage de l’énergie électrique, les électrons oscillent avec une plus grande amplitude et une partie de l’énergie est dissipée sous forme de chaleur du fait de l’augmentation des collisions entre les électrons. 2 : Rte, Bilan électrique 2020 3 : Enedis, Bilan électrique 2018
Que dit la physique ? 09 A retenir Le transport d’énergie au sein du réseau électrique engendre des pertes notamment en raison de l’effet Joule mais celles-ci sont limi- tées. Si l’énergie d’un producteur est da- vantage respectueuse de l’environ- nement, il peut-être censé d’avoir des moyens de production éloi- gnés, quite à ce qu’une partie de l’énergie injectée soit perdue lors de son transport. En réalité ce sont des millions d’uti- lisateurs et producteurs qui par- tagent le réseau. Un producteur est relié au réseau, point. Un utilisa- teur est relié au réseau, point final. C’est l’ensemble du réseau qui perd de l’énergie, et c’est l’ensemble des producteurs qui doivent compen- ser ces pertes, bien sûr au prorata de l’énergie qu’ils auraient injectée en l’absence de pertes. L’utilisateur ne sollicite pas un producteur, il sollicite le réseau.
Que dit la physique ? 10 COURANT CONTINU VERSUS COURANT ALTERNATIF. L ’erreur souvent commise de par- ler d’électricité utilisée est liée à la différence entre courant/tension fois le circuit ouvert entre le généra- teur et l’appareil. On peut assimiler le générateur comme une force qui met continus et courant/tension alter- en mouvement un ensemble rigide natifs. En alternatif il peut très bien y d’électrons. Mise en mouvement d’au- avoir des courants qui circulent sans tant plus difficile que la résistance est qu’il y ait utilisation d’énergie, alors élevée (à la limite d’une résistance in- qu’en continu, tout courant qui circule finie, en circuit ouvert, la mise en mou- se traduit in fine en énergie utilisée. vement est impossible). Il est alors plus aisé de parler de puissance (no- Un générateur d’alimentation en ten- tée P, égale à une énergie divisée par sion continue (tension fixe en sortie un temps) consommée par l’appareil. Uc) branchée sur un appareil (de ré- On a P=Uc*I, et si on l’utilise pendant sistance R), l’alimente en ce que l’on une durée H, l’énergie utilisée sera nomme du courant continu (courant E=H*P = H* Uc*I = H*U2c/R= H*R*I2. On I). Lors de la fermeture du circuit, tous voit que E et I2 sont proportionnels, et les électrons sont entrainés dans un comme I est proportionnelle à la vi- mouvement d’ensemble quasiment tesse moyenne en courant continu, au même instant, ils se déplacent en il est tentant de confondre vitesse bloc, et c’est la résistance qui fixe leur moyenne des électrons, intensité vitesse moyenne et donc le courant, I= du courant et transport d’énergie. Uc /R. Plus R est grand, plus I est faible Si en plus d’une résistance, le géné- et, comme on l’a vu plus haut, plus la rateur est raccordé à un appareil qui vitesse moyenne sera faible. On peut contient des condensateurs ou des in- voir la résistance comme un lieu où les ducteurs, certes de l’énergie sera dis- électrons s’agitent beaucoup plus que sipée dans les éléments résistifs, mais dans le câble d’alimentation, tout en de l’énergie sera également stockée ayant la même vitesse moyenne de dans les éléments non-résistifs pour déplacement. En fait, c’est l’énergie être restituée au générateur lorsque nécessaire à l’appareil qui est en flot le circuit sera coupé, ceci sans perte. continu, qui s’arrête de circuler une
Que dit la physique ? 11 Le générateur devra fournir de la puis- triphasée c’est la somme des puis- sance pour compenser uniquement sances sur chaque ligne qui compte. les pertes résistives. On voit dans ce Cette puissance totale est propor- cas, qu’énergie et courant sont liées, tionnelle à Ueff*Ieff*λ où λ est appelé et qu’assimiler transport d’énergie facteur de puissance et compris entre et transport de charge ne pose pas 0 et 1 (Ueff et Ieff sont la tension et de difficulté. Mais cela devient faux le courant efficace) Ainsi, une tension en régime alternatif. efficace Ueff = 230 V est en fait une moyenne sur une période (T=20 mil- Un compteur électrique raccordé au lisecondes) d’une fonction de la ten- réseau, mesure l’énergie qui le tra- sion d’amplitude Ua = 325 V (ampli- verse. Or, en régime alternatif (en tude crête à crête de la tension d’une mono, bi ou triphasé), courant et ten- ligne par rapport à une référence fixe sion oscillent périodiquement sous dans le temps, ce Ueff est la tension forme sinusoïdale, à la fréquence de dite de ligne). On définit Ueff par : 50 Hz en Europe. Comme toute oscil- « la valeur de la tension continue qui lation périodique, leur moyenne sur provoquerait une même dissipation une période est nulle. Aucun courant, d’énergie que la tension variable u(t) aucune puissance ne devrait traver- d’amplitude Ua si elle était appliquée ser le compteur ! L’erreur provient du aux bornes d’une résistance R ». On fait que la puissance est le produit de définit de même l’intensité efficace, la tension par le courant et que ces Ieff , basée sur le courant alternatif deux grandeurs peuvent subir un dé- réelle i(t) d’amplitude Ia. On a ainsi : phasage du fait des appareils raccor- Ua = √2*Ueff et Ia=√2*Ieff. dés au compteur. Pour une distribution
Que dit la physique ? 12 On voit que le facteur λ est crucial. sociée à aucune dissipation d’énergie S’il vaut 0, le compteur ne tourne mais à l’équilibrage des phases (afin pas et pourtant il y a bien achemine- d’obtenir λ le plus proche de 1 pos- ment du courant en amont du comp- sible). On a alors deux affichages : teur sans utilisation d’énergie après le l’un pour l’énergie active, celle qui compteur. C’est ce courant « inutile » se dissipe au final en chaleur dans qui s’ajoute au courant « utile » qui les appareils raccordés au compteur, conduit à des pertes d’énergie sup- et l’autre pour « l’énergie » réac- plémentaires en amont des comp- tive, basée sur la puissance réactive, teurs. C’est l’équivalent d’une voiture celle qui demande des moyens tech- dont le moteur fonctionne, le courant niques pour assurer le transport et la circule, mais la pédale d’embrayage stabilité du système d’alimentation. est enfoncée, le véhicule n’avance pas, il n’y a pas d’énergie utile utilisée On constate donc qu’en régime conti- pour faire avancer la voiture. Si λ vaut nu, seules les résistances dissipent de 1 (cas purement résistif), il y a utilisa- l’énergie et « consomme » de l’élec- tion d’énergie (la pédale d’embrayage tricité, alors qu’en alternatif, du fait de est relâchée, le véhicule avance). la présence de transformateur ou de Dans tous les cas il y a bien achemi- moteur par exemple, non seulement nement du courant, on devrait dire les résistances dissipent, mais, en plus, oscillation des intensités sur chaque le circuit en amont du compteur voit ligne ou phase, et donc déplacement circuler des courants qui tout en de- d’énergie à travers les câbles et les vant être équilibrés entre phases, dis- transformateurs en amont des comp- sipent de l’énergie à travers les câbles. teurs. Mais cette triple mise en oscil- lation ne conduit qu’en partie (si λ < 1) à une utilisation effective d’énergie (on parle d’énergie ou de puissance active). En aval du compteur, il y bien utilisation d’énergie liée uniquement aux résistances, alors qu’en amont il faut ajouter à cette énergie, celle dis- sipée dans les câbles, énergie liée uni- quement au fait que les courants ont circulé. Certains compteurs indiquent, en plus de la puissance utilisée, une puissance dite réactive, qui n’est as-
Que dit la physique ? 13 On peut enfin se demander quel (qui élève la tension) puis une ligne est l’intérêt de transporter l’énergie de transport de l’énergie (les câbles électrique en alternatif sur plusieurs électriques) puis un second transfor- phases. La conclusion d’un débat mateur (qui abaisse la tension) et qui historique (dit de la guerre des cou- alimente les utilisateurs. Lors du tran- rants entre Tesla et Edison) a conduit sit entre les deux transformateurs les tous les pays à utiliser ce mode de pertes par effets Joule dans un câble transport de l’énergie pour deux rai- sont de la forme Pperte=R*I2. Où R sons. La principale est l’invention est la résistance totale du fil et I le des transformateurs qui permettent courant qui circule. Si une puissance d’augmenter ou de baisser la ten- Pin=U*I est injectée en sortie du pre- sion à volonté. La seconde tient au mier transformateur, la puissance en- fait que les pertes d’énergie (par ef- trant dans le second transformateur fet Joule) entre le point de production sera plus faible, Pout=Pin-Pperte. (un générateur), et le point de livrai- On comprend que pour diminuer les son (en amont des compteurs) sont pertes il est nécessaire d’avoir I faible, plus faibles lorsque la tension est mais comme on souhaite avoir Pin très élevée. Le schéma typique est le constant, il faut augmenter U, d’où la suivant : un générateur (qui produit très haute tension du réseau de trans- de l’énergie) puis un transformateur port. A retenir Les réseaux de transport et distribution fonctionnent actuellement essen- tiellement en courant alternatif (à noter qu’en Europe il existe quelques ex- ceptions pour les réseaux qui passent sous la mer - exemple : sous la Manche entre la France et le Royaume-Uni). Les électrons oscillent périodiquement, c’est-à-dire qu’ils réalisent des mouvements de va et vient à une fréquence de 50 Hz, soit 50 aller-retours par seconde. On se rend compte que la mise en oscillation des électrons en un point est issue d’un équilibre global et qu’il est donc impossible de déterminer la source de l’énergie utilisée. L’énergie électrique est transmise des producteurs aux utilisateurs via la mise en oscillation des électrons au sein du réseau et toute modification se propage à une vitesse proche de la vitesse de la lumière.
Que dit la physique ? 14 Note Nous avons ici la représentation du courant continu vs le courant alternatif. On constate que dans le cas d’un courant alternatif les électrons changent de sens de déplacement tous les centièmes de seconde. Ainsi, pour une fréquence de 50 Hz, les électrons réalisent 50 allers-retours par seconde.
Que dit la physique ? 15 LES LOIS DE KIRCHHOFF : QUE SIGNIFIE LE FAIT QUE L’ÉLECTRICITÉ SUIT LE CHEMIN DE MOINDRE RÉSIS- TANCE ? U n circuit électrique sur lequel sont branchés divers appareils (géné- rateurs, résistances ou autres) suit sépare en deux branches qui se recon- nectent plus loin et que les branches aient deux résistances totales diffé- en chaque point de séparation ou en rentes. Par la première loi de Kirch- chaque point de connexion d’un appa- hoff on comprend que le courant se reil ce que l’on appelle la loi de Kirch- sépare en deux, et que ces deux cou- hoff des courants, ou loi des nœuds : rants se recombinent lorsque les deux à chaque instant il y a autant de branches se referment pour reformer charges qui arrivent au nœud, que de le câble. La deuxième loi indique que la charges qui le quittent (une accumula- différence de potentiel aux bornes de tion de charge conduit en général à la chaque résistance est la même. Donc destruction du nœud). Une deuxième bien que la « force » avec laquelle le loi de Kirchhoff concerne les boucles courant est mis en mouvement soit fermées qui connectent des nœuds la même dans chaque branche le entre eux, c’est la loi dite des mailles : courant sera le plus grand dans la à chaque instant la somme totale des branche où les électrons s’agitent le différences de potentiels entre deux moins, celle de plus faible résistance. nœuds consécutifs est nulle : cela découle de la définition de la tension comme différence de potentiel, ain- si pour 3 nœuds formant une boucle fermée, (Va-Vb)+(Vb-Vc)+(Vc-Va) = 0. A noter qu’il est nécessaire d’avoir un nœud particulier comme référence de tout potentiel. Pour du courant al- ternatif monophasé, c’est le fil neutre qui sert de référence. A partir de ces deux lois, on peut com- prendre pourquoi l’on dit que « l’élec- tricité suit le chemin de moindre ré- sistance ». Supposons qu’un câble se
Que dit la physique ? 16 Les lois de Kirchhoff permettent de ment leur rôle est de solliciter les pro- décrire les flux d’énergie électrique ducteurs ou certains gros utilisateurs qui se réalisent selon la capacité du afin que ces derniers agissent de fa- conducteur, c’est-à-dire les câbles çon à ne pas saturer le réseau. Cela électriques, à la transporter. Quand la se fait notamment via l’activation de puissance maximale que ces câbles mécanismes tels que les réserves pri- peuvent supporter est atteinte ils de- maires, secondaires (automatiques) viennent congestionnés. C’est le rôle et tertiaires (manuelles). Ils font donc des dispatcheurs (soit en automa- en sorte que l’énergie électrique em- tique, soit manuellement) de faire en prunte d’autres chemins et cela qua- sorte que cela n’arrive pas. Concrète- siment instantanément. A retenir Attention à ne pas utiliser les lois de Kirchhoff de manière simpliste pour déduire qu’on utilise l’électricité qui provient de la centrale la plus proche. L’idée que l’électricité emprunte le chemin de moindre résistance consiste à prendre en considération les limites des capacités de transport qui existent au sein d’un réseau électrique davantage que les distances géographiques.
Que dit la physique ? 17 INFRASTRUCTURE : LA CONSTRUCTION D’UN RÉSEAU ÉLECTRIQUE A u sortir de la guerre de 39-45, tous les pays européens en reconstruc- tion réalisent que le progrès passe par l’accès à l’électricité. Les compagnies européennes se mettent à coopérer afin que les réseaux électriques trans- cendent les frontières. Cela passe no- tamment par une uniformisation des tensions des réseaux de transports à 400 kV dès 1950. La connexion des ré- seaux européens s’est accompagnée du développement du marché inté- rieur de l’énergie qui inclut le gaz et l’électricité. Le traité de Paris signé en 1951 fut à l’origine d’une série d’ac- cords de coopération dont la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier en 1952 (CECA) et le traité Euratom en 1957. Lors de la conférence de Messine ré- unissant les ministres des six États membres de la CECA, les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg, la RFA, la France et l’Italie affirmèrent leur volonté de développer les échanges de gaz et de courant électriques propres à augmenter la rentabilité des investissements et à réduire le coût des fournitures, pour coordonner les perspectives communes de déve- loppement de la production, de son utilisation d’énergie et pour dresser les lignes générales d’une politique d’ensemble.
Que dit la physique ? 18 Dans le contexte de libéralisation du Depuis 2009, l’UCTE et les autres or- marché de l’énergie, l’arrivée de nou- ganisations régionales européennes veaux opérateurs de production, ont fusionné au sein du réseau euro- d’une part, et l’internationalisation péen des gestionnaires de réseaux des échanges d’énergie, d’autre part, de transport, créé par le règlement ont eu pour effet de modifier considé- 714/2009, et chargé de « promouvoir rablement les flux d’énergie transitant la réalisation et le fonctionnement du sur le réseau, « de les rendre plus im- marché intérieur de l’électricité ainsi prévisibles, et finalement de pousser que les échanges transfrontaliers et toujours au plus près de ses limites un pour assurer une gestion optimale, réseau qui n’a pas encore été adapté une exploitation coordonnée et une à ce changement4 ». évolution technique solide du réseau européen de transport d’électricité5 ». A défaut de consolider immédia- Il s’agit l’ENTSO-E (European Network tement les infrastructures d’inter- of Transmission System Operators for connexion, l’établissement d’un mar- Electricity), formée de 43 gérants de ché intérieur européen de l’électricité réseaux électriques issus de trente- a supposé une coordination des ré- six pays différents dont tous les Etats seaux régionaux d’énergie. En 1951, membres de l’Union européenne6. l’Union pour la Coordination de la Pro- duction et du Transport d’Electricité (UCPTE, devenue UCTE) a été instau- rée sous l’impulsion de l’OCDE en vue de regrouper les gestionnaires de ré- seau de certains Etats membres, aux fins d’organiser les échanges trans- frontières d’électricité dans l’Europe occidentale. 4 : V. Manzo, « Traitement des congestions dans les réseaux de transport dans un environnement dérégulé », thèse, Institut national polytechnique de Grenoble, 2004, pp. 14-15 5 : Règl. n° 714/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 13 juill. 2009, sur les conditions d’accès au réseau pour les échanges transfrontaliers d’électricité, JOUE n° L211/15 du 15 août 2009, p. 15, art. 4. 6 : ENTSOE, Annual report 2018
Que dit la physique ? 19 La zone couverte par l’ENTSO-E est suffisamment d’électricité dans le ré- quadrillée par 480 000 km de lignes seau européen. En conséquence, la de haute tension. C’est largement as- fréquence était passé de 50 à 49.996 sez de câbles pour lier la terre à la Hz et les secondes se sont faites de lune. Ces lignes peuvent aller de 50 à plus en plus feignantes. Les zones 500 kV pour du courant alternatif. Au synchrones peuvent-être connectées sein de cette organisation nous trou- entre elles par des câbles en cou- vons cinq zones dites synchrones7. La rant continu même si c’est rarement plus importante réunit pratiquement le cas sur l’Europe continentale. C’est toute l’Europe continentale. ainsi que l’IFA 2000, un câble immergé La coopération est étroite entre les d’une puissance de 2000 MW et d’une différents gestionnaires de réseau de tension de 270 kV lie la France au chacune des cinq zones afin que la Royaume-Uni. Sa petite sœur, BritNed fréquence de 50 Hz soit strictement d’une puissance de 1000 MW relie l’île respectée. Une petite perturbation au Pays-Bas en traversant la Manche au sein de cette zone et toute l’Eu- sur 260 kilomètres. rope frémit. Les pays membres de l’ENTSO-E sont Une histoire illustre cela de manière nettement plus interconnectés entre amusante. Au cours du premier tri- eux qu’ils ne le sont avec des pays mestre de l’année 2018, les horloges tiers. En 2018, les capacités de trans- de toute l’Europe ont ralenti jusqu’à port cumulées représentaient 101 GW cumuler six minutes de retard : seules soit 8.7% de la capacité de production les horloges des appareils électriques d’électricité de cette zone alors que les de nos maisons dont le rythme est calé interconnexions avec des pays tiers sur la fréquence du réseau électrique cumulaient 4 GW soit 0,4% de cette ont été concernées. La fréquence du capacité. réseau a été ralenti de la Grèce au Danemark, de la Pologne au Portugal en passant par la France. En cause ? L’Entso-E a informé le public sur le fait que le retard de nos horloges ré- sultait d’un désaccord entre la Serbie et le Kosovo qui refusaient d’injecter 7 : ENTSOE, System Operations Committee
Que dit la physique ? 20 Les cinq zones synchrones d’Europe Source : ENTSOE En conséquence, il arrive souvent que de l’autre de la frontière de produire les capacités de transport entre les de l’électricité pour réponde à la de- pays de l’ENTSOE ne saturent pas, ce mande d’un pays. Dans ce cas, nous qui résulte en une convergence des pouvons déduire que l’énergie circule prix de l’électricité entre ces pays. Or, librement sur cette zone et donc que le fait d’avoir deux pays dont les prix tous les acteurs, utilisateurs et pro- du marché de l’électricité sont égaux ducteurs, sont interdépendants et ap- signifit que le réseau n’est pas satu- partiennent au même système. ré aux frontières et que l’on peut de- mander à un producteur d’un côté ou A retenir Le réseau électrique européen bénéficie de fortes interconnexions entre les pays ainsi que d’une gestion commune au sein de l’ENTSO-E. Il est pos- sible de le considérer comme un système indépendant des autres zones du monde.
Que dit la physique ? 21 LE MÉTIER DES GESTIONNAIRES DE RÉSEAU. L es contraintes physiques évo- quées dans la partie précédente ainsi que les développements tech- nisation est beaucoup plus difficile car il s’agit de synchroniser des ondes qui sont définies par : une amplitude, nologiques ont conduit tous les pays une fréquence, une phase et une sé- à adopter les mêmes structures de quence de phase8. réseau de transport et de distribu- tion. Mais du fait de l’historique des C’est le rôle des dispatcheurs que installations, des raccordements de d’assurer techniquement ces synchro- générateurs successifs, des technolo- nismes à tout instant. Comme il existe gies diverses choisies, et des choix en divers types de tension (de 400 kV à termes de marché de l’énergie élec- 400 V), et que l’équilibre entre phases trique, ce n’est que récemment que les doit être respecté, de nombreux outils régions entre elles, et les pays entre sont à disposition de ces dispatcheurs. eux, peuvent « échanger » de l’éner- Outils qui servent à éviter divers aléas gie produite localement ou à l’échelle tels que, surcharges (I trop grand), nationale. écroulement de tension (pas assez de puissance réactive), écroulement Les principales difficultés à surmon- de fréquence et rupture du synchro- ter ont été de s’accorder sur une nisme des phases (diminution de la fréquence commune et sur la syn- vitesse de rotation des rotors). chronisation lors du raccordement au réseau d’un nouveau générateur ou d’une nouvelle ligne portant elle- même de l’énergie. La fréquence adoptée en Europe a été imposée et est de 50 Hz. On attribue l’origine de ce choix à l’équipementier allemand AEG en 1899 qui souhaitait une valeur « ronde ». Il a fallu attendre les années 1980 pour harmoniser l’Europe grâce au travail du CENELEC qui a abouti au choix d’une tension de 230 V avec une fréquence de 50 Hz. La synchro- 8 : Energie & Développement; « 50Hz ou 60Hz, 220V ou 110V, l’électricité dans le monde »
Que dit la physique ? 22 Organisation du réseau électrique Réseau de transport Réseau de distribution Grand transport Répartition Distribution Lignes haute tension Lignes moyennes tension Lignes haute et basse tension U > 50 kV 1 kV < U < 50 kV U < 1 kV Lieux de production Infrastructures Zones d’utilisation (centrales électriques) spéciales (logements, commerces...) Hôpitaux Energie nucléaire Usines Utilisateurs finaux Energies fossiles Utilisateurs finaux Energies renouvelables Réseau ferroviaire
Que dit la physique ? 23 Source : Rte Centre de dispatching régional de Saint Quentin Ces outils s’appuient, d’une part, duite et énergie utilisée, mais égale- sur la structure du réseau (plusieurs ment les synchronismes. Pour ce faire « chemins » existent reliant généra- des bases de données de prévisions teurs, transformateurs et utilisateurs), servent à anticiper offre et demande, d’autre part, sur la possibilité de dé- à la fois localement mais également connecter certains équipements au nationalement et internationalement. sein du réseau, voire de couper l’ac- En cas de défaut de ce double équi- cès au réseau, soit d’un générateur libre énergie-synchronisme, des res- soit d’un utilisateur (cas assez rare qui sources dites de back-up (stockage) sert à éviter des phénomènes de cas- sont mises en route plus ou moins ra- cades). Les dispatcheurs (régionaux, pidement (batterie de condensateurs, nationaux, et internationaux) utilisent groupes électrogènes, barrages) ainsi à la base des programmes informa- que l’importation ou l’exportation de tiques de pilotage qui permettent non l’énergie électrique, encore une fois à seulement d’équilibrer énergie pro- différentes échelles géographiques. A retenir Ce sont les gestionnaires du réseau électrique qui s’assurent de l’équilibre physique entre injection et soutirage d’énergie. En France il s’agit du Rte. Il est important pour la compréhension de les distinguer des acteurs de mar- chés tels que les entreprises qualifiées de fourniture d’électricité.
Que dit la physique ? 24 COMMENT L’ÉLECTRICITÉ CIRCULE-T-ELLE DANS LE RÉSEAU ? O n l’aura compris, contrôler l’éner- gie qui circule dans le réseau nécessite une infrastructure à plu- der à la coordination entre pays afin d’éviter l’isolement électrique forcé, d’une région voire d’un pays. sieurs échelles pour des raisons de contraintes physiques, de maillages, Que déduire de l’origine de l’énergie de technologies, et de choix écono- que nous utilisons lorsqu’on est situé miques. Cependant, il est clair que à Saint Laurent le Minier, dans le Gard l’énergie part toujours d’un point de par exemple ? Si l’on a admis que les production, circule à très grande vi- électrons ne se déplacent pas en bloc tesse sous forme d’ondes à travers en courant alternatif, alors il faut ad- tout le réseau, soumise à la fois aux mettre que l’électricité (l’énergie) que lois de bases (loi des mailles et des l’on utilise en un point A à un certain nœuds, conservation de l’énergie) et instant est issue de la mise en oscil- aux dispatcheurs, pour finir utilisée lation des électrons qui se situent… soit par le réseau lui-même, soit par En ce point. Cette mise en oscillations les utilisateurs. Toute la difficulté tient résulte d’un équilibre entre l’objet qui dans les fluctuations incessantes, i.e. utilise et le premier transformateur en la stochasticité de l’utilisation et de amont de l’objet. De proche en proche, la production, qui peuvent être mai- l’équilibre s’établit entre ce transfor- trisées à divers échelles de temps et mateur et le premier nœud amont, d’espace, mais qui comme dans tout puis les suivants. Comme l’énergie ar- système complexe, peuvent soudai- rivant en chaque nœud est équilibrée nement sortir des bornes admissibles (il en arrive autant qu’il en part), c’est et maîtrisables. C’est le rôle de la re- l’ensemble du réseau qui participe à cherche dans ce domaine que de si- cet équilibre. Finalement, à cet instant muler et de comprendre ces phéno- (moins epsilon), c’est l’ensemble des mènes aléatoires afin de proposer in lieux de production qui, en fonction de fine des évolutions à la fois dans la l’état du réseau, conduisent plus ou structure du réseau (implantation/ moins à l’oscillation des électrons en destruction de lignes et de sources A. de production) mais également d’ai-
Que dit la physique ? 25 A retenir Lorsqu’un réseau électrique est dense (beaucoup d’interconnexions, mail- lage important) l’énergie électrique circule d’autant plus librement. Le fait qu’une centrale électrique puisse répondre instantanément à un besoin d’utilisation aussi loin soit-elle est alors d’autant plus vrai. L’énergie injectée par une centrale électrique se retrouve dans tout le ré- seau et quelques nanosecondes plus tard est utilisée plus ou moins par tous les utilisateurs, et pas seulement celui qui a soudainement augmenté son utilisation.
Que dit le droit ? 26 Partie II ? Que dit le droit
Que dit le droit ? 27 Ce qu’il faut retenir la partie physique avant d’évoquer le droit. Notre réseau électrique est européen ! Les États membres de l’Union européenne ont souhaité créer un marché de l’électricité au profit des consommateurs. En raison de l’impossibilité de tracer et donc de s’échanger directement et bilatéralement de l’énergie, il a été nécessaire de créer des instruments de nature à identifier les sources à partir desquelles l’électricité est produite pour, le cas échéant, privilégier la consommation d’électricité renouvelable. Les flux physiques d’électricité Les flux physiques d’électricité : en substance, 3 acteurs jouent un rôle essentiel sur les flux physiques d’électricité. Avant de poursuivre, il est utile de préciser que la rigueur du physicien au regard du terme consommation concernant toute forme d’énergie ne se retrouve pas dans les textes de lois. Ainsi, l’utilisateur d’énergie sera souvent défini comme un consommateur final d’électricité.
Que dit le droit ? 28 LE MARCHÉ DE L’ÉLECTRICITÉ EST CONSTITUÉ DE CONVENTIONS : LA RESPONSABILITÉ D’ÉQUILIBRE ET LA GARANTIE D’ORIGINE. I l a été décidé à l’échelle de l’Union européenne, d’adosser au marché de l’électricité, deux instruments spé- de la production d’énergie électrique soient valorisées. Il est difficile d’avoir un marché avec de la profondeur cifiques : la responsabilité d’équilibre c’est à dire au sein duquel de nom- et la garantie d’origine. breux échanges sont possibles quand la définition du produit est trop élabo- Ces deux instruments ont pour objet rée. Dès lors, ce produit ne peut pas et pour effet de valoriser certains as- être un produit de base ayant des pects des flux d’énergie injectés par références de prix fiables et transpa- les producteurs. S’il a été choisi de re- rentes. courir à ces deux conventions sépa- rément, c’est pour avoir des marchés Attention, aucun de ces deux instru- où les échanges peuvent se faire ments ne doit être confondu avec facilement tout en faisant en sorte l’énergie physique. que les caractéristiques intéressantes Ce que l’on s’imagine... VS La réalité. X Note L’utilisation de l’électricité n’est pas ce que l’on croit. Sur le plan physique, l’électricité est tangible mais difficilement appréhendable par le consommateur final. Nous n’achetons donc pas matérialement de l’électricité. En revanche, nous achetons bien les conventions (la responsabilité d’équilibre et la garantie d’origine) qui permettent de l’utiliser.
Que dit le droit ? 29 Deux caractéristiques propres à l’élec- jectée, il permet aux producteurs de tricité méritent d’être valorisées par percevoir une rémunération lorsqu’ils un marché. produisent de l’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables. Une première caractéristique intéres- sante de la production d’électricité est que celle-ci soit réalisée au moment où il y a une demande. De sorte qu’il est indispensable d’assurer, en perma- nence, un équilibre entre l’offre et la de- mande d’énergie. Couplée à l’impossi- bilité technique de stocker l’électricité à grande échelle, cette singularité du marché de l’électricité impose de dési- gner des « responsables d’équilibre ». C’est là l’objet des conventions de res- ponsabilité d’équilibre : il s’agit d’assu- rer au producteur une rémunération plus élevée de la part des acteurs du marché s’il injecte de l’énergie au mo- ment où la demande est importante. Une deuxième caractéristique intéres- sante tient au caractère fongible de l’électricité. Une fois injectée dans le réseau, il devient impossible d’identi- fier la source de l’énergie qui est trans- portée dans le réseau. Ceci constitue un obstacle technique, pour ainsi dire, A titre d’information, l’Ademe attribue insurmontable pour ceux qui sou- les facteurs d’émission de CO2 équiva- haitent privilégier un type d’énergie en lent par énergie primaire permettant particulier et dans le cas des sources la production d’électricité. Le charbon renouvelables d’énergie, pour réduire, est à 1060g/kWh, le fioul à 730g/kWh, par ce biais, l’empreinte carbone de le gaz à 418g/kWh, le nucléaire à 6g/ leur modèle énergétique. C’est à cette kWh, l’hydraulique 6g/kWh, l’éolien en contrainte technique que répond la mer à 16g/kWh, l’éolien terrestre 14g/ garantie d’origine. Dispositif capable kWh, le photovoltaïque à 55g/kWh, la de certifier l’origine de l’énergie in- géothermie à 45g/kWh9. 9 : ADEME, Bilan GES
Que dit le droit ? 30 LA RESPONSABILITÉ D’ÉQUILIBRE prise ne fournit jamais physiquement de l’énergie. Elle offre une prestation La responsabilité d’équilibre est une de service qui consiste à être respon- convention qui permet de valoriser où sable d’équilibre pour le compte d’un et quand l’électricité a été produite. consommateur final. La Commission de Régulation de l’Énergie définit le rôle du responsable Pour cela, une entreprise doit être d’équilibre de la manière suivante : reconnue auprès du gestionnaire « Les responsables d’équilibre sont du réseau de transport d’électrici- des opérateurs qui se sont engagés té (Rte) ayant la charge d’assurer contractuellement auprès de RTE à l’équilibre physique du réseau élec- financer le coût des écarts constatés trique en France. Rte définie d’ailleurs, a posteriori entre l’électricité injectée à juste titre, ces entreprises comme et l’électricité consommée (injections des « commercialisateurs d’électrici- < soutirages) au sein d’un périmètre té ». Notons un détail important, une d’équilibre. A contrario, en cas d’écarts entreprise se présentant comme four- positifs (injections > soutirages), ils re- nisseur d’électricité peut avoir l’agré- çoivent une compensation financière ment de responsable d’équilibre ou de RTE. Ils peuvent être fournisseurs sous-traiter ce travail à une entreprise d’électricité (français ou étrangers), tierce ayant cet agrément. Dans ce consommateurs (site d’un groupe, cas, le rôle de l’entreprise qui se pré- entreprise désignée par un groupe sente au consommateur en tant que d’entreprises) ou n’importe quel tiers fournisseur d’électricité se limite à un (banque, courtier, etc.). » travail de vente. Être responsable d’équilibre est néces- saire pour être un acteur du marché de La responsabilité l’électricité. L’objectif est de faire le d’équilibre valorise où lien entre producteurs et consomma- et quand l’électricité a teurs. La convention de responsable d’équilibre oblige le consommateur, été produite. en contrepartie de l’énergie qu’il sou- tire du réseau, à veiller qu’une quan- tité équivalente d’énergie soit injectée sur le réseau. En réalité, le consomma- teur final confie généralement cette charge à une entreprise dite de four- niture d’électricité. Une telle entre-
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