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 De l'importance des régimes alimentaires dans les stratégies de
 reterritorialisation de l'alimentation. Le cas de la stratégie alimentaire de
 Charleroi Métropole : Food.C

 Auteur : Dullier, Bastien
 Promoteur(s) : Vereecken, Nicolas; Dufrêne, Marc
 Faculté : Gembloux Agro-Bio Tech (GxABT)
 Diplôme : Master en agroécologie, à finalité spécialisée
 Année académique : 2020-2021
 URI/URL : http://hdl.handle.net/2268.2/13234

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RESUME

Depuis 2021, Charleroi Métropole s'est doté d'une stratégie alimentaire, dénommée Food.C,
dédiées à la reterritorialisation de son alimentation. A l'instar de nombreuses stratégies
alimentaires belges, celle-ci fût lancée sans ne rien connaitre du potentiel du territoire en termes
de relocalisation alimentaire.
Nous appuyant sur le modèle de production et de consommation alimentaire développé par
Bueno Arruda Costa (2018) nous analysons, dans un premier temps, la répartition actuelle de
la surface agricole du territoire. Dans un second temps, nous calculons le potentiel
d'autosuffisance alimentaire de Charleroi Métropole, en faisant varier les régimes alimentaires
de la population, et le mettons en parallèle avec les enjeux portés par la stratégie Food.C.
Nos résultats démontrent que Charleroi Métropole possède le potentiel foncier agricole pour
reterritorialiser son alimentation. Nos résultats révèlent également que ce potentiel grandit
lorsque l'on incorpore, dans le modèle, des régimes alimentaires plus sains : Au plus la stratégie
alimentaire Food.C travaillera sur la modification des régimes alimentaires de la population,
pour aller vers des régimes plus adéquats pour la santé, au plus il sera aisé pour cette dernière
de répondre aux enjeux qu'elle porte.

 SUMMARY

Since 2021, Charleroi Metropole has implemented a food strategy, called Food.C, dedicated to
the reterritorialization of its food. Like many Belgian food strategies, this one was launched
without knowing anything about the territory's potential in terms of food relocation.
Based on the food production and consumption model developed by Bueno Arruda Costa
(2018), we first analyze the current distribution of the territory's agricultural surface. In a second
step, we calculate the food self-sufficiency potential of Charleroi Métropole, by varying the
diets of the population, and put it in parallel with the issues carried by the Food.C strategy.
Our results show that Charleroi Metropole has the potential for agricultural land to
reterritorialize its food. Our results also show that this potential grows when healthier diets are
incorporated into the model: the more the Food.C strategy works on modifying the diets of the
population, to move towards diets that are more adequate for health, the easier it will be for the
latter to respond to the issues it raises.

 V
VI
LISTE DES ACRONYMES

APPO : l’Association pour la Promotion des Protéagineux et des Oléagineux
AWAF : l’Association pour l’agroforesterie en Wallonie et à Bruxelles
CATL : Ceinture Aliment-Terre Liégeoise
CNRS : Centre national français de la recherche scientifique
CRA-W : Centre wallon de Recherches agronomiques
FAO : Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture
FWA : Fédération wallonne d’agriculture
GES : Gaz à effet de serre
MAEC : Méthodes Agro-Environnementale et Climatiques
MGS : Maraicher sur grande surface
MMS : Maraicher sur moyenne surface
MPA : Matière première agricole
MPS : Maraicher sur petite surface
ONG : Organisation non gouvernementale
PAC : Politique agricole commune
PGC : Producteur sur grande culture
PMC : Produit modèle de consommation
PMCd : Produit modèle de consommation effectivement disponible
PPP : Produit phytopharmaceutique
RATav : Réseau Aliment-Terre de l’arrondissement de Verviers
S3A : Système agroalimentaire alternatif
SAT : Système alimentaire territorialisé
SAU : Surface agricole utile
SDT : Schéma de développement territorial
UE : Union Européenne
UGB : Unité de Gros Bétail

 VII
VIII
TABLE DES MATIERES

1. CONTEXTE GENERAL
 1.1. Introduction
 1.2. Charleroi Métropole
 1.2.1 La stratégie alimentaire Food.C
 1.3. Objectifs de recherche
2. CADRE THEORIQUE
 2.1. Reterritorialisation
 2.2. Concepts clefs
 2.2.1. Régime alimentaire sain
 2.2.2. Autonomie alimentaire
3. MATERIEL ET METHODE
 3.1. Le territoire de Charleroi Métropole – Subdivision
 3.1.1. Plateau Hesbignon
 3.1.2. Plateau urbain
 3.1.3. Plateau du Condroz
 3.1.4. Plateau de la Fagne
 3.1.5. Plateau des Ardennes
 3.2. La démarche méthodologique
 3.3. Le modèle de consommation alimentaire et de production agricole
 3.4. Les scénarios exploratoires
 3.4.1. Scénario 1 : Relocalisation simple
 3.4.2. Scénario 3 : Transition Welfariste
 3.4.3. Scénario 5 : Transition Abolitioniste
 3.4.4. Scénarios 2, 4 et 6
 3.5. Données supplémentaires
 3.5.1. Cuisine Centrale
 3.5.2. Production légumière
 3.5.3. Modèle alternatif
 3.5.3.1. Paramétrage du modèle
4. RESULTATS & DISCUSSION
 4.1. L'empreinte alimentaire per capita

 IX
4.2. Répartition de la SAU et Autosuffisance alimentaire du territoire
 4.2.1. Faiblesse du modèle
 4.2.2. Biais d'interprétation
 4.3. Mise en perspective de l'autosuffisance alimentaire du territoire de Charleroi
 Métropole
 4.4. Scénarios exploratoires
 4.5. Croisement entre scénarios et enjeux globaux de la stratégie Food.C
 4.5.1. Bien-être animal
 4.5.2. Enjeu de santé
 4.5.3. Enjeu de réduction des émissions de GES liées au système
 agroalimentaire
 4.6. Les groupes alimentaires dont la production doit augmenter
 4.6.1. Les céréales
 4.6.2. Les légumes
 4.6.2.1. Quelles opportunités spatiales pour le devenir de cette
 production ?
 4.6.3. Les fruits
 4.6.4. Oléagineux et Protéagineux
 4.7. Les groupes alimentaires à diminuer – Pomme de terre
 4.8. Empreinte alimentaire de la Cuisine Centrale
5. CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE
Annexe A - Rendements
Annexe B - Utilisation des terres agricoles
Annexe C - Production animale
Annexe D - Données de consommation
Annexe E - Surfaces extérieure (porcs et volaille) en production biologique
Annexe F - Systèmes de production légumier

 X
XI
XII
1. CONTEXTE GENERAL

 1.1. Introduction

Au sein du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne (UE) se trouvent les articles
numéros 34 et 35. Le premier interdit aux états membres de poser des restrictions quantitatives
à l’importation entre membres de l’UE, le deuxième interdit d’en poser sur les exportations
(Union Européenne, 2012), faisant de l’Europe un immense marché agricole (entre-autres)
ouvert au sein duquel les régions se spécialisent de plus en plus.
Si ce grand marché nous a jusqu’ici nourri sans trop faillir, il n’est pourtant en rien à l’abri de
phénomènes imprévisibles ayant la capacité de le déstabiliser. En statistiques, on nomme ces
phénomènes des "cygnes noirs".
En 2020, ce système agroalimentaire européen et mondial a d’ailleurs montré certaines de ses
faiblesses suite à l’apparition de l’épidémie de SARS-CoV-2 ayant contraint les états européens
à fermer leurs frontières nationales, non seulement aux personnes mais également aux
marchandises.
Face à ce marché de plus en plus vaste et à la délocalisation de notre alimentation (dissociation
entre la demande et l’offre à l’échelle d’un territoire), certaines agglomérations (New-York,
Toronto, Londres, Bristol, Almere, Romes, etc.) ont depuis une bonne décennie, entrepris la
mise en place de stratégies alimentaires afin de relocaliser leur alimentation et augmenter leur
autonomie alimentaire. Pour la Belgique francophone, citons la ceinture Aliment-Terre
liégeoise (CATL), la ceinture alimentaire de Namur, celle de Tournai, la stratégie GoodFood
bruxelloise et la très récente stratégie Food.C de Charleroi Métropole, qui fera l’objet de ce
travail.
Si les agglomérations non Belges, précédemment citées, ont entamé leurs démarches après la
réalisation de travaux portant sur le potentiel de relocalisation de leur alimentation, les
agglomérations belges que nous venons d’énumérer ont ; quant-à-elles, entamé leurs projets
sans ne rien connaitre de ce potentiel.

Malgré le souhait de ces villes et territoires belges de rétablir un lien plus étroit entre
consommation alimentaire et productions locales, nous constatons un manque d’outils
nécessaires à l’objectivation des données essentielles ainsi qu’à l’élaboration d’objectifs précis
et atteignables. Un bon exemple pour expliciter cela est celui des objectifs de la stratégie

 1
bruxelloise GoodFood et de ses 30% de la consommation en fruits et légumes des bruxellois
produits localement à l’horizon 2035 - objectif qui fut démontré comme irréalisable par deux
études de Boutsen et al. (2018) et Terre-en-vue (2018). L’histoire se poursuit jusqu’à l’année
passée et la vive polémique quant à l’achat de terrains agricoles par la Région bruxelloise dans
les Brabants (BX1, 2020).
Un autre exemple marquant est celui de la Ceinture Aliment-Terre liégeoise. Initialement
planifiée sur l’ensemble de la Province de Liège, celle-ci s’est vu restreinte à son
arrondissement administratif suite, entre-autre, à la naissance du Réseau Aliment-Terre de
l’arrondissement de Verviers (RATaV). Ce qui nous intéresse ici, ce sont les propos de Vincent
Laviolette1, président du RATaV, expliquant la mise en place de cette structure en partie en
opposition à la CATL, par peur de voir l’arrondissement Verviétois se vider de sa production
au profit de l’alimentation des Liégeois. Nous retrouvons dans ces propos une problématique
récurrente lors de la mise en place de stratégies alimentaires puisque ces dernières, mises en
place à l’initiative d’agglomérations urbaines, sont souvent perçues par les communes rurales
comme un énième rapport de domination du monde urbain sur la campagne. Problématique
qu’analyse aujourd’hui le champs de l’agroécologie politique urbaine (Tornaghi & Dehaene,
2021; Van Dyck et al., 2018).
Derrière ces deux exemples, nous pointerons un manque de données objectives qui
permettraient d’établir des objectifs acceptables et, dans certains cas également, d’apaiser les
tensions entre les différents acteurs d’un territoire2. L’identification des besoins réels des
consommateurs ainsi que des disponibilités qu’offre le territoire est pourtant un élément
déterminant dans l’élaboration de stratégies visant à la mise en place de systèmes
alimentaires alternatifs (Bousbaine & Bryant, 2016).
Un autre des problèmes auquel doivent faire face ces stratégies de relocalisation concerne
l’utilisation des terres agricoles ou, plus précisément, la question de leur réaffectation puisque
l’augmentation de l’autonomie alimentaire d’une région passera par une plus grande
diversification des cultures. Aujourd’hui, pour ces stratégies, cela se traduit par l’augmentation
de l’offre en fruits et légumes et donc par la mise en place de maraîchages, projets qui se

1
 Propos recueilli lors d’une interview réalisée dans le cadre du cours de Kevin Maréchal "Séminaire sur
la dimension territoriale de l’agroécologie" de l’Université de Liège.
2
 Un rapide calcul, par exemple, permet de mettre en perspective certains propos entendus lors de notre
interview avec M. Laviolette sur le non potentiel d’autosuffisance de la Province de Liège. La Province
compte 160 000ha de SAU, 1 100 000 habitants avec une empreinte alimentaire de plus ou moins 1
300m²/habitant (Bueno Arruda Costa, 2019). La province de Liège a donc un potentiel de production de
20 000ha supérieur à sa SAU dans le cas d’une relocalisation de la production.

 2
heurtent à ceux de nos agriculteurs traditionnels. D’autant plus que comme nous l’avons abordé,
en ce qui concerne les projets de relocalisation belges, aucune donnée n'est accessible
concernant les surfaces à réallouer à cette production.

Parallèlement à la mise en place de ces stratégies de relocalisation, les Nations Unies lançaient,
en 2016, la "Décennie d’actions pour la nutrition", redéfinissant au passage la notion de
"Régime alimentaire sain " comme étant: " One that is human health promoting and disease
preventing, and safeguarding of planetary health by (1) Providing adequacy without excess, of
nutrients from foods that are nutritious and healthy and (2) by Avoiding the introduction of
health-harming substances, through all stages of the value chain. Healthy diets must be
affordable, culturally acceptable. They must progressively change towards originating from
sustainable production and processing systems that do not adversely affect local and regional
ecologies” (Neufeld et al., 2021, p. 3). Ce faisant, elles intègrent dans la définition d’un régime
alimentaire sain les problématiques environnementales en lien avec la production de notre
alimentation.
Ce sujet, le lien entre régime alimentaire, santé, production agricole et environnement, s’il est
traité depuis un certain temps (Beddington et al., 2014; Evans, 2009; FAO, 2013; Paillard et
al., 2014; Senker, 2011; Steinfeld et al., 2006; Subak, 1999; Tilman & Clark, 2014; UNEP,
2012) prend, depuis 2016, une autre tournure avec de nombreuses publications l’analysant à
travers une approche prospective, basées sur une modélisation du système agroalimentaire
mondial, produisant des scénarios exploratoires dans lesquels les variables d’ajustement sont
les régimes alimentaires et les pratiques agricoles (Aleksandrowicz et al., 2016; Bruinsma,
2009; Clune et al., 2017; Davis et al., 2016; Erb et al., 2016; Fanzo, n.d.; Gephart et al., 2016;
Godfray et al., 2018; HLPE, 2017; Poore & Nemecek, 2018; Springmann et al., 2018; Theurl
et al., 2020; Willett et al., 2018). Ces modèles démontrent, entre-autres choses, que la
modification des régimes alimentaires est la variable ayant le plus d’incidences en termes de
réduction des impacts environnementaux de nos systèmes agroalimentaires.
Toutefois, bien que ces modèles soient utiles afin de pointer des enjeux à large échelle, ils
demeurent inadéquats lorsqu’il s’agit d’entreprendre l’opérationnalisation de leurs lignes

 3
directives, ces modèles et scénarios faisant fi des spécificités propres aux territoires et à leur
système de production agricole3.

Pourtant, au regard des impacts environnementaux de notre système agroalimentaire,
principalement en raison des émissions de gaz à effet de serre (GES) qui lui sont liées (en
Belgique la part du secteur agroalimentaire dans les émissions de GES étant de 12.7% (FPS
Public Health & DG Environment, 2021)) mais également en raison d’autres indicateurs comme
la perte de biodiversité, l’eutrophisation et l’acidification des écosystèmes, etc., ces enjeux
semblent ne plus pouvoir être délaissés.

C’est à partir de ce contexte général : d’un côté le développement de stratégies de relocalisation
ne se basant sur presqu’aucune donnée préalable et de l’autre, le lien entre régime alimentaire,
santé, environnement et production agricole, qu’il nous a semblé opportun de travailler à
l’objectivation d’un projet de stratégie alimentaire, tout en analysant comment le potentiel de
cette même stratégie pouvait évoluer suite à des modifications dans la manière de s'alimenter
de la population.

Nous travaillerons dès lors sur la stratégie alimentaire de Charleroi Métropole, dénommée
Food.C. Nous commencerons par présenter le contexte général dans lequel la stratégie s'est
constituée avant d'enchainer sur les enjeux liés à sa mise en oeuvre ainsi que ses objectifs, étape
suite à laquelle nous pourrons formuler nos questions de recherches.

 1.2. Charleroi Métropole

Ce travail portera donc sur Charleroi Métropole, c’est-à-dire le territoire s’étendant sur 29
communes (30 dorénavant), du Nord-Est au Sud-Est de la Province du Hainaut, et
comptabilisant une superficie de près de 2000km² pour 551 798 habitants (IWEPS, 2021). Une
population qui devrait d’ailleurs demeurée stable jusqu’à l’horizon 2039 (IWEPS, 2021) malgré
le fait que le territoire est destiné à subir des mouvements de population intercommunaux (Idea
Consult & BUUR, 2018).

3
 Voir, par exemple, la polémique (Garcia et al., 2019; Haigh, n.d.) créée par la publication du rapport
"Food Planet Health" de EAT-The Lancet (Willett et al., 2018).

 4
Plus qu’un simple agglomérat de communes, Charleroi Métropole s’annonce comme un projet
de territoire qui débute en 2007, avec la constitution du Comité de développement stratégique
de Charleroi Métropole (Charleroi Métropole, n.d.). S’en suit la publication d’une série de plans
stratégiques, comme le schéma stratégique 2015-2025 pour Charleroi Métropole, mais les
choses s’accélérèrent réellement à l’année 2017 suite à la création de la Conférence des
Bourgmestres visant à "renforcer la dynamique supracommunale du bassin de vie de Charleroi
Métropole" (Charleroi Métropole, n.d.). S’en est suivi la publication, en 2018, d’un diagnostic
pour la création d’un Schéma de Développement Territorial (SDT) pour enfin aboutir, en mars
2021, à la parution d’un document traduisant la vision prospective des 29 communes pour le
territoire : le Projet de territoire de Charleroi Métropole (Charleroi Métropole, 2021).

Parallèlement à cela, la Métropole fait face à un autre évènement majeur, en 2016, avec
l’annonce de la fermeture du site de production de l’entreprise Caterpillar, à Gosselies. En
réponse à cette annonce économiquement et socialement désastreuse pour la région, le
gouvernement wallon mandate un groupe d’experts, qui formeront la cellule CATCH, chargé
de définir des "axes d’accélération de la croissance de l’emploi dans la région de Charleroi "
(CATCH, n.d.). Courant, 2019 la cellule défini le secteur de l’agriculture ainsi que ceux de la
transformation et de la distribution de l’alimentation comme secteurs d’avenir pour la création
d’emplois non délocalisables (comm.pers. d'Hélène Hainaut, Conseillère en Transition
Ecologique à la ville de Charleroi).

A la fin de leur mandat, en 2020, émerge alors la stratégie alimentaire de Charleroi Métropole,
Food.C, qui est aujourd’hui intégrée dans le Projet de territoire de Charleroi Métropole afin de
concrétiser l’axe 1.3 de leur vision stratégique : "Passer du Territoire au Terroir" (Charleroi
Métropole, 2021, p. 63).

 1.2.1. La stratégie alimentaire Food.C

Par stratégie alimentaire il faut ici comprendre une " Stratégie coupole " servant à fédérer et
structurer les différents projets émergents ainsi que les différents acteurs du monde
agroalimentaire dans le but, à terme, de relocaliser l’alimentation en proposant des produits plus
sains, plus durables et évidemment locaux (Food C, 2021).

 5
Cette stratégie émerge donc milieu de l’année 2020 des suites des travaux de la cellule CATCH
et si, entre temps, la stratégie à évoluée vers plus d’indépendance, celle-ci reprend tout de même
dans sa vision stratégique les trois chantiers énumérés par cette cellule (Charleroi Métropole,
n.d.), à savoir :

 1. Faire croitre la demande en aliments sains et durables par la mise en place d’une
 stratégie de communication dédiée et par la création, dans un premier temps, du projet
 de cuisine centrale, projet vitrine qui produirait 23 000 repas par jour à partir d’une
 production locale.
 2. Faire croitre l’offre en aliment sains et durables via un accompagnement renforcé des
 producteurs, via la mise en place d’un Marketplace digital et coopératif ainsi que par le
 développement de la Ceinture Alimentaire de Charleroi Métropole, projet lancé en 2017
 par la SAW-B ayant aujourd’hui vocation à renforcer la partie logistique de la stratégie.
 3. Développer des activités et des services de support à la croissance de l’écosystème en
 structurant l’offre de formations ainsi que les projets de recherche sur le territoire, en
 structurant les programmes de sensibilisation et d’accessibilité sociale à l’alimentation,
 en structurant l’offre d’accompagnement et de financement pour les producteurs et en
 mettant en place de nouveaux lieux et outils de transformation alimentaire sur le
 territoire. (Charleroi Métropole, n.d.; Food C, 2021)

En plus de tout cela, la stratégie Food.C repose également sur quatre enjeux globaux, liés à
l’alimentation, servant de guide à son déploiement (Food C, 2021) :

 • Un enjeu de développement socio-économique. Il s’agit de préserver et de développer
 l’emploi tout au long de la chaine de production-transformation-distribution de
 l’alimentation.
 • Un enjeu environnemental de lutte contre le réchauffement climatique, en souhaitant
 diminuer les émissions de gaz à effet de serre du secteur agroalimentaire.
 • Un enjeu d’amélioration du bien-être animal.
 • Un enjeu de santé.

 6
Auxquels il faut encore ajouter un enjeu majeur (selon les propos de Denis Cariat, Coordinateur
de la Stratégie Food.C) : Celui de travailler à la modification des régimes alimentaires des
citoyens, en lien donc avec les chantiers stratégiques précédemment énumérés.

 1.3. Objectifs de recherche

Un programme conséquent qu’est donc celui de Food.C quand on sait qu’à l’heure actuelle très
peu de données ont été objectivées et rendues accessibles au coordinateur du projet qui demeure
d’ailleurs, aujourd’hui encore, l’unique personne en charge de la coordination de la stratégie.
L'étape d'analyse du territoire alimentaire, tant du côté de l'offre agricole que de la
demande alimentaire émanant de la population, est pourtant une étape primordiale dans
la mise en place de nouveaux systèmes alimentaires (Bousbaine & Bryant, 2016).

Le but de ce travail sera dès lors la réalisation de cette étape d'analyse du territoire, de manière
à objectiver le potentiel de relocalisation alimentaire de Charleroi Métropole. Pour cela nous
souhaitons répondre à plusieurs questions de recherche :
 • Quelles est l’autonomie alimentaire actuelle du territoire de Charleroi Métropole ?
 • La métropole de Charleroi dispose-t-elle du capital foncier agricole pour relocaliser
 l’entièreté de son alimentation ?
 • Il y a-t-il adéquation entre ce potentiel et les quatre enjeux globaux de la stratégie
 Food.C ?

Par ailleurs, dans son rapport "Nutrition and Food System" le HLPE (2017) note que la priorité
numéro une pour engager une réforme d’un système alimentaire est de définir comme cible un
régime alimentaire plus adéquat. Le constat est le même du côté de GLOPAN dans leur
rapport "Food System and diet" (Global Panel on Agriculture and Food Systems for Nutrition,
2016).
Appliquant les constats de ces deux rapports et nous appuyant sur le souhait de la stratégie
Food.C de mener un travail sur la modification du régime alimentaire de la population
carolorégienne, nous analyserons comment la transition vers d'autres régimes alimentaires
influence le potentiel d'autonomie alimentaire de notre territoire d'étude.

 7
Les différentes données obtenues, nous tenterons de les mobiliser afin de mettre en perspective
les discours portés par certains des acteurs du territoire et ainsi, nous tenterons de lever le voile
sur différents points d’achoppement et problématiques qui ont émergés durant l'élaboration de
la stratégie.

 8
2. CADRE THÉORIQUE

 2.1. Reterritorialisation

Jusqu’alors nous avons utilisé la notion de " relocalisation de l’alimentation " pour parler de la
reconnexion entre la demande et l’offre alimentaire à l’échelle d’un territoire. Il nous semble
cependant plus pertinent pour notre cas d’étude d’utiliser le terme de reterritorialisation de
l’alimentation, faisant intervenir la notion de territoire4.
Pour tout un chacun, le terme de "territoire" renvoie à une entité géographique qui se confond
souvent avec un territoire administratif, il y a derrière ce terme l’idée qu’un territoire peut être
considéré comme un espace de référence situé à l’intérieur de frontières bien définies. Le
territoire est vu comme un espace physique.
Pour les experts, selon qu’ils soient écologues, géographes, éthologues, urbanistes, etc. le terme
de territoire ne correspondra pas non plus à la même définition et les éléments qui seront utilisés
pour déterminer un territoire ne seront pas identiques. Ce qui nous fait dire que l’espace n’est
rien de plus qu’un support à la création d’un territoire et un territoire le résultat d’une volonté
de vivre ensemble qui est construit par le jeu des différents acteurs. Le territoire est donc une
construction (Campagne & Pecqueur, 2014). Reterritorialiser quoi que ce soit implique donc la
construction d’un projet intégrant la diversité des acteurs du territoire.

Créer un territoire peut donc se faire de deux manières différentes : soit nous pouvons analyser
le jeu des acteurs et identifier le territoire que ceux-ci construisent, soit des pouvoirs publics
peuvent délimiter des frontières géographiques et choisir de fédérer les acteurs de cet espace
pour faire territoire. Pour reterritorialiser l’alimentation (ce qui revient à créer un territoire
alimentaire), il faudrait donc que soit présent, dans les limites géographiques propres à ce
territoire, l’entièreté des acteurs du systèmes agroalimentaire utile à la production-
transformation-distribution-consommation de l’alimentation (Lamine, 2015). Ce que nous dit
également la théorie sur la création de systèmes de production locaux c’est qu’en plus de la
nécessité de créer une proximité géographique entre les acteurs, il faille aussi mettre en place
une proximité dite organisée, se définissant comme "la capacité qu’offre une organisation à

4
 Nous utiliserons, pour parler de ces concepts, une définition des termes co-construite par les étudiants
(m'incluant) du cours "Séminaire sur la dimension territoriale de l'agroécologie" dispensé par Kevin
Maréchal pour l'Université de Liège, durant l'année académique 2020-2021.

 9
faire interagir ses membres et à les fédérer autour de valeurs qui leur sont communes" (Corade,
2021), de manière à créer un sentiment d’appartenance commun (Dubuisson-Quellier, 2018;
Lamine and Perrot, 2008).

Si de plus en plus de villes et régions travaillent à la reterritorialisation de leur alimentation,
c’est justement parce qu’il apparait que le marché agroalimentaire a créé une déconnexion entre
l’endroit où la nourriture est produite et là où cette dernière est consommée et, ce faisant, a créé
une séparation entre les consommateurs et les impacts environnementaux engendrés par leurs
choix alimentaires (Bousbaine & Bryant, 2016; Davis et al., 2016). Aujourd’hui, cette
déconnexion entre en conflit avec une volonté naissante des consommateurs de
s’approvisionner de manière plus saine. Les consommateurs, devenu "méfiants vis-à-vis de la
manière dont leurs aliments sont produits" (Bousbaine & Bryant, 2016, p. 1), tendent à se
détourner de plus en plus de l’agriculture productiviste qu’ils jugent synonyme d’externalités
négatives (Caplat, 2014; Griffon, 2006). Il y a donc à la fois une déconnexion géographique qui
se mêle à une déconnexion dans les valeurs et nous observons ainsi les consommateurs partir à
la recherche d’une manière de posséder un nouveau pouvoir sur leur manière de s’alimenter.

C’est ainsi que, comme le note Bousbaine & Bryant (2016), nous voyons émerger depuis un
certain nombre d’années le concept de " système alimentaire territorialisé (SAT) " définissant
le système alimentaire comme "un ensemble interdépendant d’acteurs orientés vers la
satisfaction des besoins alimentaires d’un groupe de consommateurs" (Bousbaine & Bryant,
2016; Rastoin & Ghersi, 2012) et mettant en avant ce qu’ils nomment des systèmes
agroalimentaires alternatifs (S3A), comme le sont les ceintures alimentaires et les stratégies de
reterritorialisation de l’alimentation, dont la principale caractéristique est le souhait de
rapprocher producteurs et consommateurs "à travers des systèmes de production agricoles en
filière courte" (Bousbaine & Bryant, 2016, p. 3).
Pour ce travail, nous prenons à parti le fait que le concept de régime alimentaire sain tel que
nous allons le définir peut servir à la définition des valeurs nécessaires à la reterritorialisation
de l’alimentation.

 10
2.2. Concepts clefs

 2.2.1. Régime alimentaire sain

En 2010, l’Organisation des Nations-Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO)
définissait le concept de " Régime alimentaire durable " :

'a diet with low environnmental impact which contribute to food and nutrition security and to
healthy life for present and future generations. Sustainable diet are preventive and respectful
of biodiversity and ecosystem, culturally acceptable, accessible, economically fair and
affordable, nutritionally adequate, safe and healthy; while optimizing nature and human
ressources.” (Burlingame et al., 2010)

Une définition qui, comme nous le remarquons, emprunte son vocabulaire à la notion de
développement durable, mais une définition qui, néanmoins, s’avère proche de celle de celle du
concept de "Régime alimentaire sain". Il faut noter qu’à cette époque persistait encore des
doutes considérables quant au fait qu’un régime adéquat du point de vue de l’environnement le
soit également du point de vue de la santé humaine (Global Panel on Agriculture and Food
Fystems for Nutrition, 2016). Suite à la sortie des travaux précédemment cités, établissant le
lien entre santé, transition dans les régimes alimentaires et environnement, ce doute s’est
néanmoins petit à petit délité et nous voyons ainsi apparaitre un concept plaçant la notion de
santé au premier plan.

Le fait qu’une transition vers des régimes alimentaires améliorés soit, d’une part, de plus en
plus considéré comme le premier facteur de réduction des impacts environnementaux de nos
systèmes alimentaires (Willett et al., 2018) et qu’à l’inverse, un régime inadéquat soit de plus
en plus considéré comme le facteur numéro un de risque de morbidité dans le monde (IPES-
Food & GLOPAN, 2017), nous fait penser qu’une transition de notre manière de manger est le
point de départ adéquat pour notre travail.

En nous basant sur ce concept de "Régime alimentaire sain", qui au final n’est pas très éloigné
des considérations des concepts de "Une santé" (Cunningham et al., 2017) et de celui de "Santé
planétaire" (Whitmee et al., 2015) , nous invitons également à un décloisonnement des
structures du monde politique et du monde de la recherche en mettant en avant une approche

 11
systémique de la santé, incluant les facteurs écologiques, sociaux, culturels et économiques. Ce
faisant, nous considérons qu’il est également primordial que les stratégies alimentaires reposent
sur des politiques publique intégrées afin qu’elles puissent surmonter les statu quo traditionnels
des politiques sectorielles (IPES-Food & GLOPAN, 2017, p. 104).

Mettre en avant une approche systémique de la santé, c’est à la fois reconnaitre les impacts
directs liés à notre manière de nous alimenter, et c’est également reconnaitre les impacts
indirects de notre système de production alimentaire sur le bien-être des populations. Des
impacts liés à la pollution des eaux et de l’air, les impacts des perturbateurs endocriniens
présents dans les produits phytosanitaires, les impacts du développement des zoonoses liés à
l’élevage, ceux en lien avec la résistance micro bactérienne, les impacts liés aux inondations en
raison d’une qualité des sols parfois médiocre, etc. (IPES-Food & GLOPAN, 2017) .

Mettre en avant une telle approche, c’est également noter que s’alimenter est un geste culturel
comme l’est tout autant notre manière de pratiquer l’agriculture. Les êtres humains, comme le
note Bouazzouni (2021), se construisent culturellement et socialement par l’alimentation tout
comme nos pratiques culturales construisent, en parallèle, un paysage agricole profondément
ancré dans nos mémoires.
En notant cet aspect culturel de notre alimentation nous relevons qu’une transition dans nos
régimes alimentaires, tout comme la transition qui s’en suivrait dans notre manière de pratiquer
l’agriculture, ne pourra se réaliser sans rassembler autour de la table l’ensemble des acteurs de
notre système alimentaire. Nous pensons donc que ce concept de "Régime alimentaire sain" est
adéquat pour aborder un processus de reterritorialisation de l’alimentation, puisque la définition
même d’un système alimentaire alternatif entérine ce besoin de rapprochement entre acteurs
nécessaire à la création d’un vision commune, basée sur de nouvelles valeurs culturellement
acceptables et acceptées par tous. En faisant cela nous soutenons, comme le fait l’IPES-Food,
que les mesures pour remédier aux impacts de nos systèmes alimentaires n’ont jusqu’ici pas été
à la hauteur et que la santé est un levier sous-exploité pour définir ces nouvelles valeurs et
engager une réforme soutenable de nos systèmes alimentaires.

 12
2.2.2. Autonomie alimentaire

Dans le cadre de ce travail, nous retiendrons le concept d’autonomie alimentaire dans son
acception la plus simple. Il s’agira essentiellement, donc, de regarder, à l’échelle de notre
territoire d’étude, si la production alimentaire rencontre les besoins alimentaires de sa
population.

Pour approcher ce potentiel de correspondance entre offre et demande alimentaire, nous
utiliserons le concept d’autosuffisance alimentaire, définit comme la capacité d’un territoire à
satisfaire la demande en ressources alimentaires de sa population, par l’utilisation de la surface
agricole disponible sur ce même territoire. Nous emploierons aussi ce que ce que nous
appellerons l’empreinte alimentaire per capita correspondant à la quantité de surface agricole
nécessaire à l’alimentation d’une personne.

 13
3. MATÉRIEL ET MÉTHODE

 3.1. Le territoire de Charleroi Métropole – subdivision

Pour ce travail nous reprendrons, pour décrire le territoire, la division par plateaux proposée par
Idea Consult & BUUR (2018) pour leur diagnostic du territoire de la métropole (figure 3.1),
diagnostic faisant également ressortir certains des enjeux propres à ces sous-territoires en lien
avec le secteur agricole.

 3.1.1. Plateau hesbignon

Composé des communes de Seneffe, Pont-à-Celles, Les Bons Villers et Fleurus, ce sous-
territoire accueille 11% de la population de la métropole avec une densité de 275hab/km².
40% de ce territoire est aujourd’hui dédié à l’agriculture avec des terres agricoles affichant des
rendements élevés (parmi les plus élevés de l’UE), territoire essentiellement dédiées à une
agriculture intensive, à la production de céréales, à la production de cultures industrielles ainsi
qu’à l’horticulture dans un continuum agraire important composé de parcelles remembrées et
d’exploitations de grandes tailles ; exploitations cependant soumises à une pression foncière
croissante et à un phénomène de NIMBY face au nouveaux projets agricoles. (Idea Consult &
BUUR, 2018)

 3.1.2. Plateau urbain

Sous-territoire composé de 9 communes, la ville de Charleroi et son bassin concentre 63% de
la population de la métropole pour une densité de 1216hab/km².
Le taux d’urbanisation du territoire y est bien entendu élevé et peu de terres sont destinées à la
production agricole (moins de 10 000ha) bien qu’un croissant agricole, caractérisé par une
agriculture urbaine et périurbaine principalement composée de culture sous serres, ceinture la
périphérie de Charleroi de l’Ouest au Sud-Est.
Les exploitations agricoles que l’on retrouve sur le territoire sont de moyennes à petites, souvent
mixtes (culture/élevage) ou légumières.

 14
Figure 3.1. Découpage du territoire de Charleroi Métropole, d'après Idea Consult & BUUR (2018)

 15
Pour finir, notons pour ce territoire une demande croissante des citoyens et des pouvoirs
publics pour le développement d’une agriculture de proximité avec d’ores et déjà l’émergence
de jeunes projets maraichers à but productif, pédagogique ou à vocation sociale. (Idea Consult
& BUUR, 2018)

 3.1.3. Plateau du Condroz

Les 4 communes du plateau du Condroz concentrent 8% de la population du territoire d’étude,
affichant une densité de population moyenne de 232hab/km².
Du point de vue du secteur agricole, ce sous-territoire est essentiellement occupé par "une
agriculture périurbaine de culture et d’élevage" (Idea Consult & BUUR, 2018, p. 47). Passé la
ceinture forestière carolorégienne, les exploitations agricoles y sont mixtes et caractérisées par
une vulnérabilité économique importante en raison d’un contexte urbanistique peu favorable dû
à une pression foncière importante – la plus élevée des 5 plateaux.
Emerge également au sein de ce territoire, et de la part des habitants, "une demande de plus en
plus importante pour une agriculture de proximité, couplée à des attentes environnementales
et paysagères importantes" (Idea Consult & BUUR, 2018, p. 53).

 3.1.4. Plateau de la Fagne

Concentrant 11.5% de la population métropolitaine avec une densité de population relativement
faible (92hab/km²), le plateau de la Fagne, dédié à plus de 50% à l’agriculture, est caractérisé
par de nombreuses prairies et cultures fourragères menées sur des sols moins productifs que
ceux des précédents plateaux, par une faible diversité culturale, ainsi que par une topographie
limitant la taille des parcelles agraires.
Les exploitations agricoles du territoire sont décrites, comme socio-économiquement
vulnérables en raison de ces conditions physiques peu favorables au développement d’une
agriculture intensive mais aussi, en raison d’une concurrence spatiale avec la forêt productive
occupant 30% du territoire du plateau.
Le rapport note également une augmentation des cultures fruitières dans le sud du territoire et
relève un potentiel de développement élevé pour les vergers dans cette région. (Idea Consult &
BUUR, 2018)

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3.1.5. Plateau des Ardennes

Derniers des sous-territoires métropolitains, accueillant 6.5% de la population pour une densité
de 57hab/km², le plateau des Ardennes est principalement composé (en ce qui concerne sa
surface agricole) de prairies à sol très pauvres assurant une production carnée de qualité mais
peu productive ; principalement du Blanc-Bleu-Belge mais également une grosse production
porcine.
Les exploitations agricoles sont de tailles modestes et généralement plus pauvres que celles du
Nord du bassin, au sein d’un territoire ou la concurrence spatiale avec la forêt est encore plus
élevé que pour le plateau voisin. (Idea Consult & BUUR, 2018)

 3.2. La démarche méthodologique

Le but de ce travail étant l’objectivation des données concernant l’autonomie alimentaire du
territoire de Charleroi Métropole ainsi que la mise en perspective des possibilités qui s’ouvrent
à ce territoire afin d’engager son processus de reterritorialisation, il nous a semblé pertinent de
reprendre à nos fin l’outils développé par Victor Bueno (2019) pour son travail de fin d’étude
"Nourrir Namur. Reconnectant la production agricole de la commune à sa consommation
alimentaire" ; lui-même inspiré par le travail de Van Dijk et al. (2017) pour la ville d’Almere.
L’outil en question est un modèle de consommation alimentaire et de production agricole
permettant, à la fois, de déterminer l’autosuffisance alimentaire d’un territoire et la
programmation de scénarios exploratoires dans le cadre d’une approche prospective.

Pour mener à bien ce travail, deux jeux d’interviews ont également été menés (Tableau 3.1).

Le premier est constitué de deux interviews semi-directives avec Denis Cariat (coordinateur de
la stratégie Food.C) et Hélène Hainaut (conseillère en Transition Ecologique pour la ville de
Charleroi).
Food.C est une stratégie très récente pour laquelle peu de documents sont aujourd’hui
accessibles concernant ses objectifs, son fonctionnement ainsi que les acteurs impliqués. Ces
interviews étant donc dédiées à la compréhension de la stratégie ainsi qu’à la compréhension
des différents enjeux et tensions liées à son développement.

 17
Tableau 3.1. Résumé des acteurs interviewés

 Institution / Poste Acteur rencontré Date

Ville de Charleroi
 Hélène Hainaut 19 mars 2021
Conseillère en Transition écologique

Réseau Aliment-Terre de l'arrondissement de
Verviers - RATav Vincent Laviolette 29 mars 2021
Président

IGRETEC - Intercommunale pour la Gestion et
la Réalisation d'Etudes Techniques et
Economiques Denis Cariat 31 mars 2021
Coordinateur de la stratégie alimentaire
Food.C

Fédération Wallonne de l'Agriculture - Section
provinciale de Liège Christine Gonay 5 avril 2021
Présidente

IGRETEC - Intercommunale pour la Gestion et
la Réalisation d'Etudes Techniques et
Economiques Denis Cariat 2 juin 2021
Coordinateur de la Stratégie alimentaire
Food.C

Fédération Wallonne de l'Agriculture - Section
provinciale du Hainaut Jean-Marie Clouet 3 juin 2021
Président

SAW-B - Fédération d'économie sociale
Coordinateur de la Ceinture alimentaire de Stéphane Lejoly 22 juin 2021
Charleroi Métropole

Projet CADI - CPA
 Catherine Rousseau 23 juin 2021
Représentante

Fédération Wallonne de l'Agriculture
 Marianne Streel 24 juin 2021
Présidente Nationale

Fédération Wallonne de l'Agriculture - Service
d'étude Aurélie Noiret 24 juin 2021
Conseillère agronome

Le deuxième jeu d’interviews fut réalisé ultérieurement afin de confirmer ou d’infirmer certains
propos, théories ou questionnements. Les interviews étaient constituées de deux parties, la
première était un entretien semi-directif dédié à la compréhension du positionnement des
acteurs dans ou envers la stratégie Food.C. La deuxième partie était quant à elle constituée de
la présentation des premiers résultats publiés par notre modèle, à savoir les données concernant
la répartition du territoire par groupe alimentaire, l'autosuffisance alimentaire par groupe

 18
alimentaire et les scénarios prospectifs. Les discussions ayant découlées de ces présentations
furent utilisées afin d’affiner notre partie matériel et méthode et publier de nouveaux résultats.
La constitution de la partie "Données supplémentaires" de ce chapitre est donc le résultat d’un
procédé itératif et c’est pourquoi certains propos des acteurs interviewés s’y retrouvent.

Nous intégrons également, dans les interviews aillant servi ce travail, deux entretiens
préalablement réalisés dans le cadre du cours de "Séminaire sur la dimension territoriale de
l’agroécologie" dispensé par Kevin Maréchal, professeur à l’Université de Liège. Il s'agit des
entretiens réalisés avec Vincent Laviolette et Christine Gonay.

 3.3. Le modèle de consommation alimentaire et de production agricole

Le modèle fonctionne comme résumé dans la figure 3.2.

Les données de base concernant l’utilisation des terres par cultures5 sont obtenues à partir des
chiffres officiels de la Politique Agricole Commune (PAC) disponibles via le géoportail de la
Wallonie (WalOnMap, n.d.). Ces données sont par la suite regroupées par groupe de culture
puis, sur base d’une simple fonction des rendement (Annexe A), est calculé la production totale
(en masse) par groupe de culture, nommé Matière Première Agricole (MPA). La base de
données obtenu pour les MPA est disponible en annexe B.

Afin de pouvoir croiser ces données avec celles portant sur la consommation alimentaire des
citoyens, ces MPAs sont converties en Produits Modèles de Consommation (PMCs) en
accordant une ou plusieurs denrées représentatives de la consommation alimentaire de chacun
des groupes. Les taux de conversion ainsi que les répartitions des MPAs dans les PMCs sont
accessibles ci-dessous (Tableau 3.2).

5
 Compte tenu des rotations de culture en place dans les régions agricoles étudiées, " l'analyse est fondée
sur une utilisation moyenne des terres par culture nourricière" (Bueno Arruda Costa, 2019) pour les
années 2017, 2018 et 2019.

 19
Figure 3.2. Résumé du fonctionnement du Modèle de consommation alimentaire et de
 production agricole

 20
Tableau 3.2. Liste des Matières Premières Agricoles (MPAs) et Produits Modèles de Consommation
(PMCs) pris en compte et taux de conversion MPAs vers PMCs. Recopié du travail de Bueno Arruda
 Costa (2019)

 Produits Modèles
 Groupes Matières Premières Taux de conversion
 de Consommation
 Alimentaires Agricoles (MPAs) (MPAs → PMCs)
 (PMCs)

Pommes de terre et autres
 Pomme de terre Pomme de terre 1.00a
tubercules

 Carottes, tomate, choux-
Légumes Légume frais 1.00a
 fleurs, oignon, salade

Légumineuses Pois, haricot Pois, haricot 1.00a

 Pomme, noix, fraise,
Fruits Fruits et Noix 1.00a
 framboise

 Lait et Yaourt 1.00a
Produits laitiers Lait
 Fromage 0.10a

 Pain 1.25a
Céréales et produits
 Froment
céréaliers
 Gâteau 2.50a

 Carcasse de porc Viande de porc 0.80a

Viande et préparations à
 Carcasse de poulet Viande de poulet 0.88a
base de viande

 Carcasse de bœuf Viande de bœuf 0.60a

Œufs Œuf Œuf 1.00a

Matières grasses et huiles Colza Huile de colza 0.40a

 Betterave sucrière, chicorée
Sucre Sucre 0.16a,b
 à inuline

 Orge brassicole Bière 5.00a
Boissons alcoolisées
 Raisin Vin 0.74c

a Selon van Dijk et al. (2017)

b Basé sur une teneur en sucre de bettterave de 17.5% et une récupération de sucre de 91%.

c Selon DICO DU VIN (s.d.)

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