DOSSIER PÉDAGOGIQUE JOCHEN GERNER - Cache-oeil 11 janv - 09 mars 2019 - Ville de Thonon
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DOSSIER PÉDAGOGIQUE Jochen Gerner, contemporary postcards, 2017, série Stockholm, 14,5 x 10,5 cm, © Galerie Anne Barrault JOCHEN GERNER 11 janv – 09 mars Cache-œil 2019 La chapelle est membre du réseau Altitudes - Art contemporain en territoire alpin
« Les sons émis par la voix sont les symboles des états de l’âme, et les mots écrits les symboles des mots émis par la voix. Et de même que l’écriture n’est pas la même chez tous les hommes, les mots parlés ne sont pas non plus les mêmes, bien que les états de l’âme dont ces expressions sont les signes immédiats soient identiques chez tous, comme sont identiques aussi les choses dont ces états sont les images. » Aristote, De l’interprétation Harry Staute, de Jochen Gerner, Editions du Rouergue, 1999, Rodez
SOMMAIRE I – Jochen Gerner……………………………………………………………………………….p. 4 II – Le dessin du début jusqu’à la fin………………………………………………………p. 5 III – Le maximal minimalisme du « Less is more »…………………………………...…..p. 6 IV– L’OuBaPo des contraintes …………………………………………………………..…….p.12 V – Liens avec les programmes d’enseignement de l’histoire des arts et pistes pédagogiques…………………………………….……………………………………….……..p.17 VI – Bibliographie et ressources ……………………………………………………….….….p.19 VII – Médiation ……………………………………………………...………………………….…p.20 VIII – Autour de l’exposition………………………………………………………….……….p.21 IX – Informations pratiques …………………………………………………………..………..p.22
« Avant tout, je me définis comme dessinateur-auteur qui travaille par le biais de l’image, du dessin, sur les rapports entre l’écrit et l’image, et ça, ça peut s’adapter à tous les cas de figure de mes interventions. » « Je suis dans une observation des choses. Aussi bien des choses du monde dont on nous parle, des gens, toutes sortes de choses. Je peux m’intéresser à des choses qui ne m’intéressent pas. J’ai toujours eu ce réflexe d’aller vers les choses que je ne connais pas, pour essayer de faire des découvertes, d’aller vers des territoires. » « Et j’aime bien travailler à partir de contraintes. Travailler à partir d’une matière première donnée, qui va décider après de la forme du livre. » Extraits d’entretien de Jochen Gerner par Xavier Guilbert
I – Jochen Gerner - Illustrateur bédéiste artiste Jochen Gerner est né le 12 septembre 1970. Il vit et travaille à Nancy. Diplômé de l'École nationale supérieure d'art de Nancy où il étudie de 1988 à 1993, Jochen Gerner reçoit en 1990 l'Alph'Art scolaire au festival d'Angoulême alors qu'il est encore étudiant. Jochen Gerner se fait connaître grâce à ses premières publications dans la presse, entre Libération, Le Monde, Les Inrockuptibles, Snark Park ou le New York Times. Son trait minimaliste s’est rapidement retrouvé chez les éditeurs jeunesse. Après la publication du Petit monde, il trouvera sa place aux Editions du Rouergue où il publie ses ouvrages en tant qu’auteur (Harry Staute, Berlin (Jochenplatz)) puis en tant qu’illustrateur de la collection de romans ‘DoAdo’. En 1993, Jochen Gerner rejoint des collectifs d'auteurs dont le collectif expérimental OuBaPo (Ouvroir de bande dessinée potentielle). En 2001, Olivier Douzou cofonde la maison d'édition L'Ampoule, et invite Jochen à y éditer TNT en Amérique. Si jusque-là les travaux de publications et les exercices graphiques étaient bien plus séparés chez l'auteur, l'ouvrage estampillé OuBaPo marquera les liens entre bande dessinée et art contemporain. L'auteur est repéré par la galerie Anne Barrault à Paris pour ces expérimentations graphiques. Les œuvres de Jochen Gerner sont alors visibles lors des foires d’art contemporain et ses œuvres intègrent le Fonds national d'art contemporain (FNAC) du ministère de la Culture. Jochen Gerner participe à de nombreux collectifs (OuBaPo, Arts Factory/La Superette...) pour mettre en œuvre une critique du langage et de l'image tout en détournant les codes visuels. Il dessine sur des pages de journaux, des listes de noms, du papier peint, des pages de catalogues, des manuels scolaires, d'anciennes bandes dessinées, ou plus simplement dans des cases. Jochen Gerner est lauréat du prix Drawing Now (Paris) en 2016.
II – Le dessin du début jusqu’à la fin Des pictogrammes aux peintures rupestres Dans les illustrations de Jochen on peut cheminer depuis une ligne graphique souvent noire pour remonter aux origines de l’art comme si nous marchions sur un fil reliant l’empreinte rupestre à l’empreinte contemporaine, sans transition. Par l’entremise du pictogramme, (aussi appelé pictographe), les visuels de Gerner ne sont jamais loin d’un texte auquel ils apportent une lecture immédiate humoristique, critique… Il utilise ce dessin figuratif stylisé en tous supports, qu’il s’agisse d’illustration, de bande dessinée, d’œuvre plastique…. Illustration de Jochen Gerner face à une citation de Spinoza, « Pourquoi les hommes font-ils la guerre » de Myriam Revault d’Allones, Gallimard Jeunesse. Le panneau des phoques rouges de la grotte Nerja en Andalousie. Ces peintures rupestres sont les uniques créées par l'homme de Neandertal connues jusqu'à ce jour. Leur origine a été datée entre 42300 et 43500 ans d'ancienneté, ce qui en fait les œuvres d'art les plus anciennes du monde. Aujourd’hui et dans toutes les langues du monde avec un système graphique, les pictogrammes servent à expliquer une information d'ordre général dans de très nombreux domaines : cartes géographiques, routes, informatique, téléphonie, santé, sécurité, chimie, textile, environnement, … Enlevant le superflu, le pictogramme nous permet alors de déambuler d’un monde à l’autre, sans nécessité de maîtriser un langage lettré. Il nous permet d’accéder à une information essentielle qui parfois relève de la survie, nous donne accès à un savoir-faire, ou favorise notre autonomie.
L’humain est placé au cœur de ces créations certes standardisées mais utilisables et appréhendables par tous. Cette envie de rassembler en simplifiant la forme se découvre très tôt dans l’histoire des arts. Le travail typographique d’Herbert Bayer en est le meilleur exemple. En 1925, ce responsable du département d’imprimerie du Bauhaus réalise son Alphabet Universel : 26 caractères standards, déclinés selon les mêmes figures. Le graphiste s’affranchit de l’héritage des typographies à empattement, ces lointaines descendantes des alphabets latins, cyrilliques et grecs. En somme, simplifier la forme pour augmenter l’impact du message, voilà la démarche du Bauhaus. III - Le minimalisme maximal du « Less is more » Le mouvement du minimalisme, aussi connu sous le nom d’art minimal, émerge à New- York dans les années 1960, animé par des artistes de renom, tels Robert Morris, Dan Flavin et Donald Judd. Ce courant abstrait découle en partie du Modernisme, et puise son inspiration dans le Bauhaus dont l’un des artistes phares, l’architecte Mies Van der Rohe, avait proclamé « Less is more » (« moins c’est plus »). Les artistes adeptes du minimalisme optent pour des formes géométriques dépouillées, basiques (ronds, carrés, lignes) et une limitation des couleurs (les œuvres sont quasi monochromes). Dans une sobriété extrême et une grande économie de moyens, les artistes évitent à tout prix le décoratif et la création d’illusions. L’expression d’Art Minimal est utilisée pour la première fois en 1965 par le philosophe anglais Richard Wollheim dans la revue Arts Magazine. Mies Van der Rohe, la Farnhouse, 1951
En peinture, l’art minimal, se démarque par sa simplicité, ses lignes droites et régulières et son refus de l’interprétation. Le minimalisme émerge en réaction à l’excès d’ironie figurative du Pop art et au lyrisme de l’expressionnisme abstrait. Également héritier de Malevitch et des suprématistes russes, les minimalistes recherchent la pureté et l’efficacité par la peinture. Parmi les peintres minimalistes célèbres, on Robert Morris, Untitled (corner compte Agnes Martin, Robert Mangold, Robert Ryman, piece), 1964 Frank Stella ou Sol LeWitt. En musique, les artistes comme La Monte Young, Terry Riley, Philip Glass ou Steve Reich privilégient aussi le dépouillement formel, le réductionnisme et la neutralité. L’art minimal est éminemment présent aujourd’hui par les communications visuelles qui fleurissent dans nos quotidiens avec l’usage du Flat design dans les communications web et sur écran. En supprimant tous les effets et éléments superflus, il propose un rendu très épuré pour une plus grande clarté et lisibilité. Il s’agit de simplifier pour gagner en impact et en élégance. Les jeunes designers amènent cette mini-révolution en interrogeant en profondeur la notion d’UX (User eXperience) et jouent avec les inconscients de chacun pour provoquer des actions/réactions instinctives. En optant pour une représentation symbolique des objets, ils se basent sur les couleurs, les formes et la mise en page pour réveiller chez l’internaute des stimuli qui l’aideront dans sa navigation. La typographie a un rôle central, car elle sert à structurer l’espace.
Jochen Gerner le minimaliste Chez Jochen Gerner les interventions graphiques sont faites de dessins lignés dont l’épure relève de l’exigence minimaliste. Jochen s’embarque donc naturellement dans l’édition d’un livre décortiquant ce courant artistique avec le musicien Christian Rosset, dans lequel chacun nous confirme son lien avec cette esthétique. Gerner y affirme être « à la fois potentiellement minimaliste dans la recherche de formes graphiques et étrangement exubérant dans le caractère encyclopédique et prolixe de mise en place de ces formes ». « En tous cas je travaille en «Le minimalisme », La petite bédéthèque des savoirs, Editions permanence à la recherche de formes simples. » Lombard, 2016 Si le minimalisme s’attache à faire surgir des lignes brutes, strictes, essentielles, le propos n’en est pas moins riche. Dans ce livre, Gerner et Rosset déroulent l’histoire de ce courant artistique, en passant par ses origines, ses influences, ses répercussions dans différents domaines d’expression, nous rappelant Satie, Hergé, Matisse, les Haïkus japonais, les Shadoks, Robert Bresson, Jacques Tati, Le Corbusier, … allant jusqu’à y intégrer l’électro, la techno et le hip hop. Ce livre pourrait être considéré comme un exemple de « métaminimaliste » puisqu’il nous donne à comprendre l’histoire et la pensée minimale par la forme et le graphisme de Gerner le minimaliste.
Dans la série Minimum, le dessin permet à l’artiste autant qu’au lecteur de jouer au maximum des liens qui se trament entre le texte écrit sur la page du cahier d’écolier et le dessin noir à l’encre comme une pictographie efficace par tant de simplicité. Alors aisément on s’amuse à découvrir la poule de Poussin, la droite de Courbet et le poids lourd de Léger, sans oublié l’effet miroir de Goya en Iago. Jochen Gerner n’oublie jamais les artistes, l’histoire des arts car ils sont aussi une matière dans laquelle puiser pour mieux les investir, se les approprier. « Ce n’est pas que j’ai un amour ou que j’ai un parcours d’historien, je m’intéresse énormément à ce qui se fait actuellement. Mais pour pouvoir comprendre ce qui se fait aujourd’hui, il faut avoir intégré tout ce qui se fait avant ». JG
Accumuler / classifier / dessiner Si le dessin est schématique, chez Gerner il s’envisage souvent en série et propose ainsi une lecture encyclopédique d’un sujet. Le refus du bavardage visuel permet une production d’objets raffinés par le refus d’en faire trop comme porté par une force brute presque primitive mais qui nous emmène dans une étude approfondie. L’un des exemples de cet engagement est visible dans une compilation de dessins éditée en 2017 chez Casterman intitulée Repères – 2000 dessins pour comprendre le monde. Chaque semaine depuis 2014, Jochen Gerner explique en bande dessinée dans le journal le 1 différentes notions qui permettent de mieux comprendre l’histoire, la science, l’économie, la Vasco de Gama politique, l’actualité, et donc le monde. « Chaque semaine, la rédaction du "1" choisit le sujet du "Repères" et m'en fournit les textes. A moi de chercher la documentation et l'iconographie. Il me faut trois ou quatre images pour avoir une idée de "Repères". Il doit y avoir du rythme entre les personnages et les éléments. J'adore utiliser les pictogrammes et les logos. J'ai aussi appris à faire des portraits, tout en restant toujours dans mon style. Il y a des sujets plus faciles pour moi comme l'art ou la géographie et puis d'autres qui sont plus ardus, comme l'économie ou la politique. » S’approprier les quotidiens Dans cette manière d’ausculter le monde, l’artiste intervient dans nos quotidiens, supports premiers de nos gestes de lecture à répétitions. Il sévit dans Libération, Le Monde, Wall street Journal, L’expansion, Télérama … Agents immobiliers : profession émiettée recherche Les hypers font la loi, rentabilité, Le Monde, Libération, dessin de une, 29 mars 2011. 28 avril 2008. Nortel network’s hunt, The Wall Street Journal, 22 mai 2001.
Collectionner les répétitions Gerner travaille des récurrences du monde mais il donne aussi à voir les répétitions de ses propres moments de vie. De 2005 à 2008 lors de ses voyages en train, il va dessiner les différentes vues qui s’offrent à lui par la fenêtre de son wagon. Chaque dessin correspond à un fragment de paysage. L’ordre des dessins est donc dicté par le voyage et par la trajectoire du train. Cette capture à grande vitesse d’un fragment du décor vu est passée au crible d’une fulgurante sélection pour être en transmission directe sur le papier. Il s’agit d’instantanés successifs qui une fois assemblés soumettent notre œil à un déplacement sur la page similaire au déplacement de l’artiste lors de son voyage. Grande Vitesse est son carnet de dessins réalisés lors de ses voyages en TGV entre 2005 et 2008, et publié en 2009 par L’association. Il livre aussi son carnet intitulé Branchages, dont il a rempli les pages lors de conversations téléphoniques, entre 2002 et 2008.
IV –L’OuBaPo des contraintes – faire apparaître et disparaître L’OuBaPo, mais Kézako ? L'Ouvroir de bande dessinée potentielle (OuBaPo) a été fondé en novembre 1992 au sein de l'Ou-X-Po et à travers la maison d'édition L'Association. Ce comité crée des bandes dessinées sous contrainte artistique volontaire à la manière de l'Ouvroir de littérature potentielle (OuLiPo) créé par Raymond Queneau. Les contraintes formelles que s'imposent les auteurs dans la réalisation d'un album à caractère OuBaPien peuvent être classifiées. Une première classification fut publiée dans le premier Oupus par Thierry Groensteen en 1996 et s'intitule Un premier bouquet de contraintes. On peut distinguer contraintes génératrices (ambigramme, pliage, restriction graphique, pluri-lecture, palindrome..) et contraintes transformatrices (expansion de l’histoire, réduction de cases, réinterprétation graphique, substitution…). Fidèle depuis le début au procédé OuBaPien, Jochen Gerner caviarde tout ce qui lui tombe sous le pinceau. Il recouvre ou camoufle pour faire apparaître des sens subliminaux derrière les histoires des BD qu’il déniche. Ainsi, dans la série intitulée Panorama du feu, une cinquantaine de fascicules de bandes dessinées des années 50’s,60’s,70’s, sert de base au projet. Il travaille directement sur les couvertures avec de l’encre de Chine, et insère des pictogrammes. Il fait apparaître un grand champ de bataille nocturne, zébré de tirs et de déflagrations, comme un écran d’observation d’une salle d’état-major. Par ce traitement, il analyse l’esthétique de la bande dessinée de la période de la guerre froide, où la menace d’un conflit était un sujet récurrent des médias d’alors.
Le projet TNT en Amérique est né des réflexions oubapiennes de l'auteur. Il trouve de nouvelles pistes de lecture par la déstructuration d'une matière première (Tintin en Amérique d'Hergé) pour la reconstruire autrement et mettre ainsi de nouveaux éléments en avant. Par un traitement de noircissement à l'encre de Chine de la quasi-totalité des pages, et en ne retenant sur chacune d'elles qu'une poignée de mots, là où la ligne claire d'Hergé atténuait et lissait, il ne reste, que la répétition d'une vision de la violence extrême des États-Unis. Le noir très noir met en lumière des éléments de la page et donne à traverser comme l’image d’une ville de nuit éclairée de néons clignotants. Il se fait archéologue et déniche des strates de lectures possibles par un procédé de recouvrement qui finalement propose un dévoilement de sens sous-jacent. Jochen ne s’arrête pas à son expérience TNT pour explorer le monde d’Hergé puisqu’en 2016 il publie RG Renseignements Généraux, GERNER & RABU, aux éditions L'Association. « RG est à la fois un livre de création et un essai, une bande dessinée, un poème et un livre d’art. Un hommage à l’œuvre de Hergé, un prolongement de cette œuvre et un travail théorique sur elle. Cinq propositions de relecture de l’ensemble des aventures de Tintin (couleurs imprimées, formes dessinées, subtilités narratives, couleurs mentionnées) ». Fait à quatre mains, par Gerner et Rabu, ce livre s’intitule RG en référence directe aux initiales de Hergé. Enfin, ce titre reprend les initiales des noms des deux auteurs. « Le projet RG est une relecture chromatique littérale des aventures de Tintin. Il est composé de cinq parties: quatre parties image (Mégacycle, Ectoplasme, Supercolor, Cyclotron) et une partie texte (Gyroscope). Chaque titre est bien sûr issu du lexique hergéen ».
« La possibilité infinie de rapports entre l’écrit et l’image est pour moi l’intérêt principal de la bande dessinée : un système de représentation confrontant en permanence, dans une sorte d’alchimie, l’écrit et le visuel. C’est ce domaine-là que je tente d’explorer de mon côté ou au sein de l’OuBaPo. Le projet TNT en Amérique (2002) est né de ces réflexions oubapiennes, d’exercices et d’expériences. Je tente de trouver de nouvelles pistes de lecture. Je déstructure une matière première pour la reconstruire autrement. L’analyse de la bande dessinée Tintin en Amérique de Hergé m’a fait prendre conscience du phénomène de chute (de corps) récurrent dans cet album. Je voulais comprendre l’origine de ce vertige permanent. Début 2001, j’ai commencé à décrypter cette violence (violence toujours adoucie et banalisée par le style de la ligne claire : un coup de poing réel est quelque chose de bien plus violent que ce qui nous est montré dans ce type d’album) et j’ai décidé que cela serait l’occasion de réaliser un exercice oubapien sur un album entier » (JG, entretien pour index graphik). Tous les supports imprimés qui tombent entre ses mains passent au filtre de l’encre ou de la peinture, Jochen s’attaque au catalogue IKEA version Américaine car même s’il n’est pas fan de cette entreprise, le catalogue serait l’ouvrage « qui se vend le plus par le monde, plus que la Bible » ! Dans certaines pages il vide les éléments de décors pour faire la part belle aux espaces et perspectives des pièces, dans d’autres, il pose un voile sur ces mêmes objets créant ainsi un catalogue de formes des plus minimalistes. Home (détails), acrylique sur support imprimé, et encre (catalogue Ikea USA 2008)
Couvrir, dé-couvrir, … le procédé continu au-delà des interventions en BD ou catalogues pour révéler le paysage sous le paysage. Dans le projet Stockholm, Jochen compile une trentaine de cartes postales de la ville. Ici il peint à l’acrylique en aplats bruts ou dilués des zones à camoufler pour faire voir le paysage sous un autre angle. Choisissant des couleurs glacées « norvégiennes » il ne cache pas son sujet scandinave mais le révèle d’autant. Certaines zones effacées nous manquent-elles pour voyager dans ces paysages ? Les architectures grisées semblent prises dans un brouillard, les cours d’eau sont conservés et rehaussés de peinture, les hachures droites vertes rigides et penchées contrastent et ravivent la douceur du paysage interprété. Un livre rassemble les paysages de Stockholm de Jochen Gerner avec un texte de Peter Von Poehl, dont voici un extrait : Mais soudain, les cartes postales délicatement tracées de Gerner prennent un ton légèrement troublant. Il est évident qu’il manque un détail, sans que l’on arrive à savoir lequel exactement, un peu comme dans la scène du rêve dans Les Fraises sauvages de Bergman. C’est peut-être précisément cela qui, dans les dessins de Gerner, fait étonnamment ressurgir mes propres souvenirs d’enfance...
Et si l’on imaginait un dialogue entre Gerner le pirate au cache-œil et Saint-Exupéry l’aviateur, cela pourrait donner ceci : - Jochen G. : « Le cache-œil est ce morceau de tissu rendu célèbre par l’image légendaire du pirate. Il pourrait avoir aussi été inventé pour d’autres raisons que celle de recouvrir une blessure ou un œil perdu. Il se pourrait que cela ait été utilisé pour hyper sensibiliser l’œil caché, afin de faciliter la navigation de nuit et la vision dans les ponts inférieurs sombres des navires. J’aime donc beaucoup cette image et cette idée que le fait de moins montrer, de recouvrir, de cacher, peut aider à mieux voir. » - Antoine S-E : « La perfection est atteinte, non pas lorsqu’il n’y a plus rien à ajouter, mais lorsqu’il n’y a plus rien à retirer. »
V – Liens avec les programmes d’enseignement de l’histoire des arts et pistes pédagogiques Pistes pédagogiques Cycles 1, 2, 3 Établir une relation avec celle des artistes, s’ouvrir à l’altérité Expérimenter, produire, créer Se repérer dans les domaines Mettre en œuvre un projet artistique liés aux arts plastiques, Etre sensible aux questions de l’art Produire un dessin figuratif stylisé Rencontrer des œuvres ● Peinture pariétale préhistorique : ● En créant des pictogrammes pour représenter - Lascaux, grotte Chauvet -les règles de vie de l’école, de la classe - Altamira (Espagne) -des règles de prudence de la vie ● Vassily Kandinsky, Komposition VIII, 1923 quotidienne : en lien avec le dessin de Einige Kreise, 1926 Jochen Gerner « certains médicaments sont dangereux au volant », Le Monde, 24 avril (Schéma des variations de température), 2007. 1925 ● En réalisant un dessin de presse à partir ● Henri Matisse, Les gouaches découpées, de la Une de journaux comme Le Petit 1933 quotidien, Mon quotidien, le Dauphiné des enfants… ● Le Corbusier, le cabanon minimaliste, 1952 ● Dessiner un personnage célèbre en recherchant les éléments importants qui ● Herbert Bayer, Constellation of Six Squares permettent de le reconnaitre (6 works), 1960 ● Dessiner un animal en le simplifiant le ● Ellsworth Kelly Colors for a Large Wall 1951 plus possible ● Les Shadoks, série de Jacques Rouxel de 1968 à 1973 ● Dan Flavin,Untitled (To Donna 5a), 1971 ● Frank Stella, Mas o Menos, 1964
Produire un dessin à la frontière entre figuratif et abstrait en imposant des contraintes ● dessiner au stylo bille à partir d’un mot (nom, adjectif) par exemple chapeau, bateau, colère, violent… pour créer un dessin par accumulation ● dessiner au feutre fin en utilisant des lignes, des points, des formes géométriques, en imposant une couleur ● dessiner sur des supports différents : - papier quadrillé - papier millimétré - plan - quadrillage ● dessiner par recouvrement partiel en laissant des zones apparentes avec de l’encre de Chine, de la peinture acrylique sur divers supports - papier peint - papier cadeau - journaux, revue - publicités, catalogues - atlas - photos, cartes postales - BD - manuel scolaire
● Des vidéos https://www.arte.tv/fr/videos/074719-007-A/jochen-gerner/ https://www.youtube.com/watch?v=EaNOF_7nQ54 https://www.youtube.com/watch?v=Ar0WjNdUTYs https://www.arte.tv/fr/videos/084270-000-A/hommage-au-peintre-ellsworth-kelly/ ● Site qui recense des pictogrammes http://www.arasaac.org/pictogramas_byn.php ● Des dossiers http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-minimalisme/ENS- minimalisme.htm http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-kandinsky/ENS- kandinsky.html https://www.reseau- canope.fr/fileadmin/user_upload/Projets/Je_dessine/pdf/Jedessine_caricature.pdf ● Pour information Le roman Dico dingo de Pascal Garnier illustré par Jochen Gerner est disponible en série pour votre classe à la Bibliothèque pédagogique de l’IEN de la circonscription de Thonon. Pistes pédagogiques Cycle 4 Education de la sensibilité : -se familiariser avec le lieu de diffusion artistique. -développer des attitudes qui permettent d’ouvrir sa sensibilité à l’œuvre d’art -développer des liens entre rationalité et émotion. Compréhension de l’œuvre d’art : -avoir conscience des interactions entre la forme artistique et les autres dimensions de l’œuvre (son format, son matériau, sa fonction…). - distinguer des types d’expression artistique, avec leurs particularités matérielles et formelles, leur rapport au temps et à l’espace. -établir ainsi des liens et distinctions entre des œuvres. -comprendre la différence entre la présence d’une œuvre, le contact avec elle, et l’image que donne d’elle une reproduction, une captation ou un enregistrement. -maitriser un vocabulaire permettant de s’exprimer spontanément et personnellement sur des bases raisonnées. 19
VI - Bibliographie et ressources Livres d'images et bandes dessinées Stockholm, collection Portraits de villes, éditions be-pôles, 2018. Repères, 2000 dessins pour comprendre le monde, éditions Casterman - Le 1, 2017. RG, (coauteur : Emmanuel Rabu), l'Association, 2016. Le Minimalisme, (scénario : C. Rosset), La Petite Bédéthèque des Savoirs, Le Lombard, 2016. Contre la Bande Dessinée, l’Association, 2008. 100.000 milliwatts (printemps), (scénario : Diego Aranega), éditions Delcourt, 2007. Le Saint Patron, l’Association, 2004. En Ligne(s), carnet de dessins téléphoniques (1994-2002), l'Ampoule, 2003. TNT en Amérique, l’Ampoule, 2002. Éditions jeunesse C'est mathématique !, (Texte : C. Louart, F.Pinaud), éditions Actes Sud junior, 2014. Machin-truc, Les Fourmis rouges, 2013. Coloriage !, éditions Milan jeunesse, 2006, 2012. Picto-picoti-paysage, (papier peint), The Mark on the Wall, 2012. Atchoum !, collection Tête de lard, éditions Thierry Magnier, 2005. Harry Staute, éditions du Rouergue, 1999. Ouvrages collectifs Lieux infinis, Encore Heureux architectes, éditions B42, 2018. Dialogue de dessins, (avec Guillaume Chauchat), éditions Central Vapeur, 2017. Maudite !, (coord. Vincent Vanoli), l'Association, 2016. L'art mot à mot, éditions Palette, 2015. Cut, 1985-2015, une courte histoire du cinéma, Mon Œil !, 2015. La France qui gueule, (auteur : Manon Paulic), Milan et demi, 2015. Revues Lapin, Livraison, R de Réel , Fusée, Spoutnik, Jimmy Draht , Dada, Éprouvette, Rouge Gorge, 9° Art, Le Tigre, Écritures, Journal d'anticipation #2, Le Monde diplomatique … Sites internet : http://jochengerner.com/ http://www.galerieannebarrault.com/jochen_gerner/dessins.html Monographie : Jochen Gerner, de Christophe Gallois et Tom Mc Carthy, B42, 2015 20
VII – Médiation Les enseignants et la chapelle Présentation de l’exposition, des supports et des activités pédagogiques à destination des enseignants le mardi 8 janvier à 17h30. Animations pédagogiques pour les groupes scolaires Pour les élèves de maternelle et d’élémentaire : Visite de l’exposition en s’appuyant sur les réactions des élèves, en les incitant à observer, se questionner et enrichir ainsi leur vocabulaire de quelques mots-clés et notions d’histoire de l’art. Les visites sont suivies, sur demande, d’un atelier plastique permettant aux élèves d’appréhender la technique, les matériaux ou le sujet présenté. Ces travaux pourront ainsi être à la base d’un travail de classe. Pour les élèves de collège et lycée : Visite et discussion autour de la thématique générale de l’exposition en liant les propos avec le programme d’enseignement de l’histoire des arts. 21
VIII – Autour de l’exposition A la chapelle : « Thonon sous la peinture », Atelier créatif pour tous et sans réservation mercredi 6 février à 14h30. Visite en famille, suivi d’un goûter (à partir de 6 ans), mercredi 20 février à 15h Inscription Office de tourisme 04 50 71 55 55. A la médiathèque : « Une histoire à coloriser », Atelier créatif en continu, dès 7 ans et en famille samedis 2 février et 2 mars à 15h. A l’auditorium : Entretien public de Jochen Gerner avec Philippe Piguet jeudi 7 février à 19h sans réservation, dans la limite des places disponibles. Prochaine exposition / Régis Perray et Hicham Berrada Du 29 mars au 25 mai 2019 Dans l’œuvre de Régis Perray, les fleurs accompagnent l’homme dans les épreuves des 7 fléaux. Elles sont l’un des fils conducteurs d’ouvrage tissé unique au monde comme la tapisserie de Bayeux, dont le message est universel et surtout intemporel. Nourri d’une double culture artistique et scientifique, Hicham Berrada est un artiste laborantin qui utilise la science à des fins plastiques et picturales. 22
IX – Informations pratiques Vue de l’exposition Jacques Villeglé Vue de l’exposition Arte Natura Vue de l’exposition Iris Levasseur Vue de l’exposition Clément Bagot © Pierre Vallet © Pierre Vallet © Annick Wetter © Pierre Vallet La chapelle – espace d’art contemporain Pôle culturel de la Visitation 25, rue des Granges 74 200 Thonon-les-Bains La chapelle : 04.50.26.25.13 Service Culture : 04.50.70.69.49 http://www.ville-thonon.fr Entrée libre et gratuite De septembre à mars Du mardi au samedi (sauf jeudi) - De 14h30 à 18h. Fermé les jours fériés. D’avril à juin Du mardi au dimanche (sauf jeudi) - De 14h30 à 18h. Fermé les jours fériés. Juillet et Août Du mardi au dimanche (sauf jeudi) - De 15h à 18h30. Ouvert les 14 juillet et 15 août. Partenaires publics : La chapelle – espace d’art contemporain du Pôle culturel de la Visitation est membre du Réseau Altitudes - Art Contemporain en territoire alpin. Avec l’aimable soutien de : La librairie-papeterie Birmann du groupe Majuscule fournit l’ensemble du matériel Beaux-arts pour les ateliers de pratique artistique à destination des enfants et du grand public. 23
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