ENM 2018 - Extrait du polycopié de droit public Fiche 4 : Le Parlement - Groupe ISP

 
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ENM 2018 – Extrait du polycopié de droit public

                                  Fiche 4 : Le Parlement

Institution à la fois « toute puissante et impuissante » (G. Carcassonne) sous les Troisième et
Quatrième Républiques, le Parlement a vu ses prérogatives sensiblement limitées par la
Constitution de 4 octobre 1958.

Il a d’ailleurs fallu attendre la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 pour que ses
fonctions soient consacrées ! L’article 24 C. dans sa rédaction issue de cette révision dispose
désormais que : « le Parlement vote la loi. Il contrôle l'action du Gouvernement. Il évalue les
politiques publiques. Il comprend l'Assemblée nationale et le Sénat (…) ».

Propos liminaire

Le Parlement assure traditionnellement la fonction législative dans un système de séparation
des pouvoirs. Son rôle est de créer la loi. Il ne faut pas pour autant assimiler
systématiquement Parlement et législateur. S’il en est l’acteur principal, il n’en est pas pour
autant le seul auteur. La loi est plus généralement le fruit d’une collaboration entre les
chambres composant le Parlement et le gouvernement qui projette des lois et participe à la
procédure législative. Egalement, de manière générale, le Président de la République ou le
Chef de l’Etat a une fonction de promulgation de la loi. La chaine de création de la loi n’est
donc pas une œuvre appartenant uniquement au Parlement.

Le Parlement est une institution composée d’une ou plusieurs assemblées le plus souvent
d’élus représentants une légitimité politique. L’histoire britannique est à l’origine des
parlements modernes. Dès 1215, après la signature de la Magna Carta (Charte de Jean Sans
Terre), le contrat passé entre le Roi et les barons anglais s’est manifesté par la création de
deux assemblées ou conseils (magnum concilium et commune concilium) qui furent les
prémisses du Parlement britannique moderne.

On peut également citer en France, les Etats généraux crées en 1302 sous Philippe le Bel qui
constituaient également une première assemblée représentative. Leur fonction était
principalement de donner l’assentiment des représentants des ordres de la société d’Ancien
Régime (Clergé, noblesse et tiers-état).

Si la fonction principale des Parlements est aujourd’hui d’élaborer et de voter la loi, leur
fonction initiale demeurait celle d’un garde-fou de la société contre l’autorité royale par
l’assentiment donné à un prélèvement financier. Sur la Magna Carta, Jean Sans Terre
s'engage à garantir les libertés de l'Eglise et des villes, à se soumettre à la décision du
Commun Conseil pour établir un impôt et aussi à ne plus arrêter les hommes libres de façon
arbitraire. En France, les Etats généraux devaient être convoqués lorsque le Roi devait faire
face à une crise militaire ou financière. C’est avant tout les « cordons de la bourse » que
détenaient les assemblées d’Ancien Régime. Ce rôle perdure aujourd’hui avec le vote annuel
de la loi de finance permettant l’action de l’Etat.

A l’origine, le Parlement est une assemblée délibérative et consultative servant d’aide à la
Couronne. Peu à peu, il se posera en représentant du bien commun. La démocratisation de
l’institution parachèvera de le placer au centre du pouvoir et de la légitimité de l’Etat (en
particulier la chambre basse dont la primauté est incontestablement affirmée par rapport à
la chambre haute dans les Parliament Act de 1911 et 1949 en Grande Bretagne).

Il est à noter que la notion de Parlement sous l’Ancien régime en France est différente de
l’acception actuelle. Leurs fonctions étaient avant tout juridictionnelle (Montesquieu était
magistrat au Parlement de Bordeaux) mais dont les décisions avaient une portée normative.
Ils statuaient par arrêts de règlement (prohibés aujourd’hui à l’article 5 du Code civil et
l’article 1351 du même Code qui dispose de l’autorité relative de chose jugée).

Plus particulièrement en France, le Parlement républicain a toujours été bicaméral (sauf sous
la Convention et la Seconde République composé d’une chambre unique : l’assemblée
nationale législative). Sous la Troisième République, il était composé du Sénat et la Chambre
des Députés réunis en Assemblée nationale ; sous la Quatrième République, du Conseil de la
République et de l’Assemblée nationale réunis en Parlement et sous la Cinquième
République, il est composé du Sénat et de l’Assemblée nationale réunis en Congrès ou
éventuellement en Haute Cour (v. supra le statut du chef de l’Etat et l’article 68 C.).

I. Structure et statut du Parlement et des parlementaires

A/ La structure du Parlement

L’article 24 de la Constitution du 4 octobre 1958 pose le principe d’un Parlement bicaméral.
Celui-ci est composé de l’Assemblée nationale et du Sénat. Il s’agit d’un bicaméralisme
inégalitaire puisque la Chambre basse (Assemblée nationale) est élue au suffrage universel
direct alors que la Chambre haute (Sénat) est élue au suffrage universel indirect. Cette
différence de légitimité explique que l’Assemblée nationale puisse avoir le dernier mot dans
la procédure législative et qu’elle puisse seule renverser le Gouvernement en engageant sa
responsabilité (art. 49 C.).

                                    Pour aller plus loin

Bicaméralisme ou bicamérisme : il s’agit d’une composition du Parlement en deux
chambres ayant une représentativité différente. Les Etats ayant un bicaméralisme sont
majoritaires. On dénombre les Etats-Unis (Sénat et chambre des Représentants),
l’Angleterre (chambre des Lords et chambre des Communes), la France (le Sénat et
l’Assemblée nationale), l’Allemagne (le Bundesrat et le Bundestag). Selon les pouvoirs des
chambres, le bicaméralisme peut être inégalitaire (dans la plupart des cas au bénéfice de la
chambre basse) ou égalitaire (plus rarement, c’est le cas en Italie ou en Suisse).

Monocaméralisme ou monocamérisme : Le Parlement n’est composé que d’une seule
chambre. C’est le cas souvent dans les Etats monarchiques comme le Danemark ou la Suède
mais on peut compter la Chine, l’Arabie saoudite, la Mongolie….

La tendance gaullienne en 1969 était de supprimer le Sénat pour le fusionner avec le
Conseil économique et social (devenu Conseil économique, social et environnemental ou
CESE). Ce dernier n’est pas une chambre parlementaire mais un organe consultatif qui ne
participe pas à la procédure législative directement. L’effet eut été de structurer le
Parlement de manière monocamérale.

1. Les règlements d’assemblées

Chacune des assemblées édicte elle-même son règlement de fonctionnement. Comme l’a
souligné Paul BASTID en 1954, « le Règlement, c’est la loi intérieure de chaque chambre,
fixée par elle-même. La chambre agit en établissant son règlement non comme une branche
du pouvoir législatif mais à titre de corporation autonome dotée d’un pouvoir d’organisation
et possédant sur ses membres une autorité disciplinaire ». D’une manière générale, les
règlements des assemblées parlementaires sont destinés à organiser le fonctionnement
interne des assemblées, à préciser les procédures de délibération et à déterminer les règles
disciplinaires s’appliquant à leurs membres.

Ces règlements sont la source du « droit parlementaire » et constituent matériellement des
règles de droit constitutionnel sans avoir pour autant valeur constitutionnelle. Le règlement
appartient à la catégorie juridique des mesures d’ordre intérieur, c’est-à-dire que la validité
des règles qu’il édicte est limitée à leur objet interne et ne pourrait faire l’objet d’un recours
pour excès de pouvoir devant une juridiction administrative. Seuls les parlementaires ont
l’initiative de la modification des règlements de leur assemblée respective en raison du
principe d’autonomie.

Il est à noter qu’en vertu de l’article 61 C., les règlements d’assemblées sont, à l’instar des
lois organiques, systématiquement contrôlés par le Conseil constitutionnel au regard de la
Constitution et des lois organiques. C’est une nouveauté de la Cinquième République qui
marque une atteinte profonde à la souveraineté du Parlement. L’objectif était d’éviter que le
Parlement puisse contourner les mécanismes de rationalisation du parlementarisme et
s’octroyer des pouvoirs accrus dans ses rapports avec le Gouvernement. Le Conseil
constitutionnel ne mit d’ailleurs pas longtemps pour censurer les dispositions du règlement
de l’Assemblée nationale qui autorisait cette dernière à adopter des résolutions dans des
conditions non prévues par la Constitution (CC, 24 juin 1959, Règlement de l’Assemblée
nationale).

La Constitution renvoie fréquemment aux règlements des assemblées notamment depuis la
réforme du 23 juillet 2008. En effet, celle-ci modifie le droit d’amendement de l’article 44 de
la Constitution (il s’exerce en séance ou en commission selon les conditions fixées par les
règlements d’assemblées). L’article 51-1 de la Constitution fait également référence aux
règlements d’assemblées pour déterminer les droits des groupes parlementaires et
notamment ceux des groupes d’opposition et des groupes minoritaires. Enfin, l’article 51-2
qui prévoit que les règlements des assemblées fixeront les conditions de création des
commissions d’enquêtes.

2. Les organes des assemblées

Les organes des assemblées se distinguent à raison de leurs fonctions soit administratives
soit politiques.

   •   Les organes administratifs
           o Le président de l'Assemblée

Il est élu pour la législature (5 ans) à l'Assemblée nationale :

   -   En 1958 : Jacques Chaban-Delmas                   -   2 avril 1993 - 21 avril 1997 :
   -   25 juin 1969 - 1er avril 1973 :                       Philippe Seguin
       Achille Peretti                                   -   12 juin 1997 - 27 mars 2000 :
   -   2 avril 1973 - 2 avril 1978 : Edgar                   Laurent Fabius
       Faure                                             -   27 mars 2000 - 18 juin 2002 :
   -   3 avril 1978 - 21 mai 1981 : Jacques                  Raymond Forni
       Chaban-Delmas                                     -   25 juin 2002 - 2 mars 2007 : Jean-
   -   2 juillet 1981 - 1er avril 1986 :                     Louis Debré
       Louis Mermaz                                      -   7 mars 2007 - 19 juin 2007 : Patrick
   -   2 avril 1986 - 12 juin 1988 :                         Ollier
       Jacques Chaban-Delmas                             -   26 juin 2007 – 19 juin 2012 :
   -   23 juin 1988 - 21 janvier 1992 :                      Bernard Accoyer
       Laurent Fabius                                    -   21 juin 2012 : Claude Bartolone
   -   22 janvier 1992 - 1er avril 1993 :                -   27 juin 2017 : François de Rugy
       Henri Emmanuelli

Il est élu pour 3 ans au Sénat :

   -   1958 – 1968 : Gaston Monnerville
   -   1968 – 1992 : Alain Poher
   -   1992 – 1998 : René Monory
   -   1998 – 2008 : Christian Poncelet
   -   2008 – 2011 : Gérard Larcher
   -   2011 : Jean-Pierre Bel
   -   2014 : Gérard Larcher
Chaque président occupe le « perchoir » de son assemblée respective et ses compétences
sont importantes. En dehors de l'enceinte parlementaire, il a des compétences
constitutionnelles. Le Président de la République doit les consulter lorsque sont mis en
œuvre le droit de dissolution (article 12 de la Constitution) et les pouvoirs exceptionnels de
l’article 16 de la Constitution. Ils nomment trois membres du Conseil constitutionnel et
peuvent le saisir à leur seule initiative.

Le Président du Sénat exerce les fonctions de président de la République en cas de vacance
(v. fiche sur le Président de la République). Cette hypothèse s’est produite à deux reprises
suite à la démission du général de Gaulle en 1969 et suite au décès du président Pompidou
en 1974.

Au sein de l'Assemblée nationale, le Président dirige les débats et fait observer le règlement,
réparti le temps de parole, donne et retire la parole aux députés. Il coordonne les activités
de l'Assemblée notamment en procédant à la convocation de la conférence des présidents
ou des commissions.

            o Le bureau

C'est un organe collégial réunissant le président de l'Assemblée les 6 vice-présidents, les 3
questeurs et les secrétaires (12 à l'Assemblée nationale et 8 au Sénat).

                    ▪   Il interprète et applique le règlement ;

                    ▪   S’occupe des problèmes administratifs et matériels ;

                    ▪   Statue sur les incompatibilités : Les incompatibilités se distinguent des
                        inéligibilités (interdiction de se présenter) car elle impose simplement
                        une fois élu à faire un choix entre deux activités (v. infra
                        développements sur le statut des parlementaires et le cumul des
                        mandats) ;

                    ▪   En matière criminelle ou correctionnelle et sauf en cas de flagrant délit
                        ou de condamnation définitive, il doit autoriser l’arrestation toute
                        autre mesure privative ou restrictive de liberté.

            o La Conférence des présidents

Son rôle est déterminant dans la fixation de l'ordre du jour. Elle est composée du président
de l’assemblée, des vice-présidents, des présidents des Commissions permanentes et des
présidents des groupes parlementaires. La Conférence se réunit chaque semaine pour
déterminer le calendrier du travail parlementaire (organisation des débats). Toutefois,
l’ordre du jour prioritaire est fixé par le gouvernement, mais la Conférence influe sur l'ordre
du jour complémentaire.

    •   Les organes du travail politique
            o Les commissions législatives :

Il y en a plusieurs types :
▪   Les commissions spéciales : elles sont constituées de droit à la
    demande du gouvernement ou à l'initiative d'une commission
    permanente. Leur rôle est très réduit.

▪   Les commissions permanentes : composées de députés ou sénateurs
    élus à la proportionnelle des groupes parlementaires, leur rôle est
    d’examiner les projets ou propositions de lois non soumis à une
    commission spéciale. Elles peuvent auditionner le ministre compétent
    ainsi que des personnalités qualifiées. La fonction de rapporteur au
    sein de la commission est essentielle puisqu’il rédige le rapport qui
    dont l’objet est d’informer l'ensemble des parlementaires. En 1958,
    ces commissions étaient limitées à 6 et la réforme de 2008 a
    augmenté leur nombre à 8 commissions permanentes maximum. Il est
    à noter que les commissions permanentes se sont vues reconnaître un
    droit de regard pour les nominations présidentielles les plus
    importantes : après audition de la personnalité pressentie, elles
    émettent un avis public. Toutefois celui ne lie pas le chef de l’Etat sauf
    s’il est exprimé à la majorité qualifiée des trois-cinquième. A
    l’Assemblée nationale, le chiffre des 8 commissions maximum a été
    atteint : la commission des affaires culturelles et de l’éducation, la
    commission des affaires économiques, la commission des affaires
    étrangères, la commission des affaires sociales, commission de la
    défense nationale et des forces armées, la commission du
    développement durable et de l’aménagement du territoire, la
    commission des finances, de l’économie générale et du contrôle
    budgétaire, la commission des lois constitutionnelles, de la législation
    et de l’administration générale de la République.

    Au Sénat, il existe 7 commissions permanentes depuis la résolution
    du 19 décembre 2011 : la commission des affaires économiques, la
    commission des affaires étrangères, de la défense et des forces
    armées, la commission des affaires sociales, la commission de la
    culture de l’éducation et de la communication, la commission du
    développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de
    l’aménagement du territoire, la commission des finances et la
    commission des lois constitutionnelles.

▪   Les commissions d'enquête : Elles sont constituées à la demande d'un
    député après le vote d'une résolution par l'Assemblée. Elles
    participent au droit de contrôle des assemblées et doivent recueillir
    des informations pour se prononcer sur des évènements particuliers
    tels que la gestion d'un service public ou d’une entreprise publique
    (des commissions d’enquêtes ont été ainsi constituées dans le cadre
    de la situation du Crédit Lyonnais en 1994, des sectes en 1995 ou
    encore sur les causes des inondations en 2001). C'est une base de
    travail pour le débat public : informer l'opinion publique et
    éventuellement légiférer.
Depuis 1988, un « droit de tirage » annuel permettant l’inscription à
                       l’ordre du jour d’une proposition de résolution tendant à la création
                       d’une commission d’enquête, a été reconnu conventionnellement à
                       chaque groupe politique. Ce droit de tirage, qui était tombé en
                       désuétude, a été renforcé et consacré par la réforme du Règlement de
                       l’Assemblée nationale du 27 mai 2009. Désormais, chaque président
                       de groupe d’opposition ou de groupe minoritaire peut demander une
                       fois par session ordinaire, à l’exception de celle précédant le
                       renouvellement de l’Assemblée, qu’un débat sur la création d’une
                       commission d’enquête ait lieu en séance publique. Pour être rejetée,
                       la création de la commission d’enquête doit faire l’objet d’un vote
                       négatif des trois cinquièmes des membres de l’Assemblée, seuls les
                       députés qui y sont défavorables prenant part au vote.

                   ▪   La Commission aux Affaires européennes : A l’ origine, il s’agissait
                       d’une délégation parlementaire créée en 1979 afin d’examiner les
                       projets de règlement et de directive relevant du domaine de la loi. La
                       révision constitutionnelle de 1992 lui permettait d’élaborer des
                       propositions de résolution sur les projets de normes européennes.
                       L’article 88-4 issu de la révision de 2008 lui donne un statut de
                       commission et permet un dialogue entre les commissions de chaque
                       assemblée et le Gouvernement sur les projets et propositions d’acte
                       de l’Union européenne dès leur transmission au Conseil de l’Union
                       européenne.

           o Les délégations parlementaires

Ces délégations ont en charge la surveillance d'un domaine précis de la vie politique ou d'un
phénomène tel que l'Union Européenne ou les questions démographiques.

           o Les groupes politiques

Les groupes sont constitués au minimum de 15 députés (ou 10 sénateurs) réunis en fonction
de leurs affinités politiques. La constitution d’un groupe donne lieu à une déclaration
politique signée par ses membres et remise à la Présidence, déclaration dans laquelle le
groupe peut faire état de son appartenance à l’opposition. Les groupes ne se déclarant pas
d’opposition, à l’exception de celui dont l’effectif est le plus nombreux, sont appelés «
groupes minoritaires ».

Les groupes politiques jouent un rôle majeur dans le fonctionnement de l’Assemblée.
Ainsi:

- les présidents de groupe siègent à la Conférence des présidents ;

- les commissions sont composées en proportion de l’importance numérique des groupes ;

- le temps de parole est distribué en fonction de l’effectif des groupes.
RQ : La réforme du 23 juillet 2008 prévoit également que les règlements des assemblées
doivent déterminer des droits spécifiques pour les groupes d’opposition et pour les
groupes minoritaires (notamment à propos de la présidence des commissions d’enquête et
des missions d’information ou encore pour la répartition du temps de parole).

B/ Le mandat des parlementaires

1. L’élection des parlementaires

   •   L’Assemblée nationale

Les députés sont élus au suffrage universel direct, au scrutin uninominal majoritaire à deux
tours par tous les Français âgés de 18 ans au moins, jouissant de leurs droits civils et
politiques et n'étant pas dans un cas d'incapacité prévu par la loi. Pour être élu dès le
premier tour, il faut obtenir la majorité absolue, c'est-à-dire plus de la moitié des suffrages
exprimés, et un nombre de suffrages au moins égal au quart des électeurs inscrits. Si aucun
candidat n'y parvient, il y a lieu de procéder à un second tour de scrutin auquel ne peuvent
se présenter que les candidats ayant obtenu au premier tour un nombre de suffrages au
moins égal à 12,5 % des électeurs inscrits. Pour être élu au second tour, la majorité relative
suffit : le candidat ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages l'emporte.

RQ : La commission Jospin de 2012 a proposé une modification du mode de scrutin faisant
entrer une dose de proportionnelle pour l’élection de certains députés (10% d’entre eux soit
58 députés). Cette proposition n’a pas encore débouché sur une modification de la loi
électorale.

Les circonscriptions dans le cadre desquelles se déroule l’élection de chaque député sont
délimitées par le code électoral à l’intérieur de chaque département, en fonction de
l’importance de la population. Afin d’éviter les manipulations à des fins politiques, le Conseil
constitutionnel exige que les découpages électoraux soient effectués sur des bases
« essentiellement démographiques ». (CC, 2 juillet 1986, Loi relative à l'élection des députés
et autorisant le Gouvernement à délimiter par ordonnance les circonscriptions électorales).

       Pour aller plus loin : le découpage électoral opéré par la loi du 23 février 2010

Le découpage électoral appliqué pour les élections législatives de 2012 est issu de la loi du
23 février 2010 (le précédent découpage électoral datait de 1986). En attribuant un siège de
député "par tranche" de 125 000 habitants, le nombre de circonscriptions par département
varie désormais de 1 à 21. 33 circonscriptions ont été supprimées, autant de nouvelles
circonscriptions ont été créées (dont 22 dans 15 départements métropolitains, trois
collectivités d’outre-mer et 11 pour les Français de l’étranger) et de nombreuses
circonscriptions ont vu leurs contours modifiés.

Désormais, les 577 sièges de députés sont répartis de la façon suivante : 558 pour les
départements, 8 pour la Nouvelle-Calédonie et les collectivités d’outre-mer, 11 pour
l’élection de députés par les Français de l’étranger.
Ainsi, pour la première fois en 2012, les Français de l’étranger inscrits sur les listes
électorales consulaires, soit plus d’un million de personnes, ont été amenés à élire 11
députés à l’Assemblée nationale. En effet, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a
notamment prévu que les Français établis hors de France soient représentés à l’Assemblée
nationale et au Sénat. En vertu de la loi du 23 février 2010, ces nouvelles circonscriptions se
situent pour 6 d’entre elles en Europe, 2 sont en Amérique, 2 en Afrique et 1 en Asie.
S’agissant des circonscriptions des députés représentant les Français de l’étranger, le
Conseil constitutionnel a admis que le principe d’un écart démographique maximal entre la
circonscription la plus peuplée et la moins peuplée ne soit pas respecté, cette exception
étant notamment justifiée par les contraintes géographiques.

Enfin, par dérogation au droit commun électoral, les Français de l’étranger ont, pour la
première fois eu la possibilité de voter par internet, outre les autres modalités de vote qui
leur sont "traditionnellement" proposées : vote à l’urne en personne, vote par procuration,
vote par correspondance sous pli fermé.

On distingue les élections générales et les élections partielles. Les premières interviennent à
l’expiration de la législature des 5 ans ou lorsque le Chef de l’Etat dissout l’Assemblée
nationale (article 12 de la Constitution). Le mandat expire le troisième mardi de juin de la
cinquième année qui suit l’élection des députés. Les élections générales doivent avoir lieu
dans les 60 jours précédant l’expiration du mandat.

Les élections partielles sont une hypothèse limitée puisque l’élection d’un député suppose
également l’élection d’un suppléant pouvant le remplacer en cas de décès ou
d’incompatibilité avec une nomination gouvernementale ou au Conseil constitutionnel. Les
élections partielles interviennent donc en cas d’annulation de l’élection par le juge
constitutionnel, déchéance, démission ou élection du député au Sénat ou au Parlement
européen. Elles ne peuvent être organisées dans l’année précédant l’expiration du mandat
parlementaire.

   •   Le Sénat

La Chambre Haute est composée de 348 sénateurs depuis le 1 er octobre 2011 et la loi
organique du 30 juillet 2003 a réduit la durée du mandat des sénateurs. Aujourd’hui le
mandat dure 6 ans et le Sénat est renouvelé par moitié tous les 3 ans (contre 9 ans
renouvelé par tiers tous les 3 ans avant 2003). La majorité requise pour être élu au Sénat est
fixée à 24 ans depuis 2011 contre 35 antérieurement. Ils sont élus au suffrage universel
indirect par un collège de 150 000 électeurs d’élus et représentent les collectivités
territoriales.

Ce collège est composé de :

           o des députés,

           o des conseillers régionaux élus dans le département,

           o des conseillers généraux,
o des délégués des conseils municipaux qui représentent 95 % des 150 000
             électeurs.

                   ▪   - 9 000 habitants : variation des délégués de 1 à 15 en fonction du
                       nombre de membres au Conseil municipal.

                   ▪   + 9 000 habitants : tous les conseillers municipaux sont délégués de
                       droit.

                   ▪   + 30 000 habitants : élections de délégués supplémentaires à raison de
                       1 délégué pour chaque tranche de 1 000 habitants au-dessus de
                       30 000.

Le mode de scrutin est à la proportionnelle pour désigner les délégués dans les communes
de + 3 500 habitants et au scrutin majoritaire pour les communes de – 3 500 habitants (Loi
du 10 juillet 2000).

Le mode de scrutin pour élire les sénateurs est également complexe. Dans les
circonscriptions élisant moins de 4 sénateurs, le scrutin est majoritaire à deux tours. Dans les
circonscriptions élisant plus de 4 sénateurs, le scrutin est proportionnel avec répartition des
restes à la plus forte moyenne.

RQ : Le rapport Jospin de 2012 a proposé de modifier les règles des élections sénatoriales en
favorisant le vote des conseillers généraux et régionaux par rapport aux conseillers
municipaux ainsi que d’abaisser l’âge d’éligibilité des sénateurs de 24 à 18 ans.

Les réformes récentes touchant à l’élection des sénateurs ont modifié la composition du
Sénat qui s’est urbanisé, rajeuni et féminisé.

2. Le statut des parlementaires

   •   Caractère représentatif du mandat

Les parlementaires ont un mandat représentatif (l’article 27 de la Constitution prohibe le
mandat impératif) ce qui assure l’indépendance des parlementaires par rapport aux
électeurs et exclut toute procédure de révocation. Ainsi le parlementaire représente la
Nation et est élu dans une circonscription et non par une circonscription. Ce mandat est
acquis par l'élection sous réserve d'annulation par le Conseil constitutionnel. Il prend fin soit
à l'expiration des pouvoirs de l'Assemblée, soit selon une forme individuelle (décès,
démission, déchéance). La démission doit être acceptée par l'Assemblée à laquelle
appartient le parlementaire (Démission tacite dans le cas où le parlementaire a accepté une
fonction incompatible avec sa fonction). La déchéance est prononcée par le Conseil
constitutionnel en raison d'une incapacité ou d'une indignité établie par la loi.

   •   L'indemnité parlementaire

L’article 17 de la loi du 30 novembre 1875 édicte en substance que n'importe qui doit
pouvoir accéder à la fonction parlementaire quelle que soit sa fortune ou sa situation,
l’indemnité assurant une vie décente au parlementaire pour l'éloigner de la corruption.
L’indemnité est fixée par l'ordonnance du 12 novembre 1958 :
▪   Indemnité principale : calculée sur la base de la catégorie hors échelle et égale à la
       moyenne entre le traitement la plus basse et la plus haute de cette catégorie
   ▪   Indemnité de résidence
   ▪   Indemnité de fonction représentant un quart de l'indemnité principale
   ▪   Indemnité spéciale de secrétariat

En principe, l’indemnité parlementaire est exclusive de toute autre rémunération publique
sauf si le parlementaire est titulaire d'un autre mandat électoral (maire, conseiller général,
député européen…). Le cumul est alors autorisé dans la limite d’une fois et demie
l'indemnité parlementaire de base.

En sus de l’indemnité de base s’ajoutent :

   ▪   Une indemnité de fonction : en raison de la participation aux travaux de l'assemblée.
   ▪   Des avantages annexes : pour rémunérer une aide dactylographique (deux
       collaborateurs ne devant pas appartenir à la famille du parlementaire).
   ▪    Un droit de circulation sur tous les réseaux et franchise postale.
   ▪   Une caisse de retraite spéciale et une pension versée par l'Assemblée après leur
       mandat.

Les parlementaires ont renoncés aux avantages fiscaux prévus par la loi.

   •   Les incompatibilités : considérations générales

L’incompatibilité représente les fonctions qui ne peuvent se cumuler avec le mandat
parlementaire selon la loi. L’incompatibilité n'empêche pas l'élection (sinon on parle
d’inéligibilité) mais le candidat doit faire un choix. Ces incompatibilités ont pour but
d’empêcher que l'occupation (privée ou publique) vienne fausser le rôle du parlementaire en
tant que représentant de la nation. Le régime des incompatibilités est prévu par les articles
LO 137 et suivants du code électoral.

Sont incompatibles :

           ▪   Les mandats de député et de sénateur ou de membre du Conseil économique
               et Social.
           ▪   Fonctions de membre du Conseil constitutionnel (art. 57 de la Constitution).
           ▪   Toutes les fonctions publiques non électives. Cette incompatibilité est issue
               de la révolution de 1848 car de nombreux fonctionnaires siégeaient à la
               Chambre des députés sous la monarchie de Juillet. Cela permettait des
               pressions du gouvernement qui était en même temps maître de leurs
               carrières. Dès lors, lorsqu’un fonctionnaire est élu à une fonction
               parlementaire, il ne démissionne pas de son poste mais en est détaché.

Par exception, sont compatibles les fonctions suivantes :

           ▪   Fonctionnaires de ministre des cultes dans les départements du Haut Rhin, du
               Bas Rhin, de la Moselle (Concordat toujours en vigueur).
           ▪   Professeur de l'enseignement supérieur ou chargé de direction de recherche
               dont l'avancement ne dépend pas du gouvernement.
▪   Missions temporaires données par le gouvernement si elle n'excède pas 6
               mois.
           ▪   Profession d’avocat dès lors que le parlementaire ne plaide pas contre l’Etat,
               une société nationale ou entreprise publique, une collectivité territoriale ou
               un établissement public.

Les fonctions privés sont compatibles en principe avec le mandat. L’objectif de
l'incompatibilité est de mettre le parlementaire à l'abri des pressions du gouvernement ce
qui n'est pas le cas des fonctions privées. Toutefois, des incompatibilités existent avec les
fonctions privées pour éviter les scandales créant des collusions du politique et de la finance.
Les lois du 30 octobre 1928, du 6 janvier 1950, l’ordonnance du 24 octobre 1958 et la loi du
1972 renvoient à l’article LO 146 du Code électoral qui crée de nouvelles incompatibilités :

           ▪   président, membre de conseil d'administration et directeur général exercée
               dans les entreprises nationales et établissements publics nationaux. Ou
               conseil auprès de ces établissements ;
           ▪   chef d'entreprise, président de conseil d'administration, administrateur
               délégué, DG, ou gérant dans :
                  ▪ les entreprises ou établissements jouissant sous forme de garantie
                       d'intérêt, de subvention ou d'avantages assurés par l'État ou une
                       collectivité publique sauf dans les cas où ces avantages découlent
                       d'une réglementation générale ;
                  ▪ société ayant exclusivement un objet financier faisant appel public à
                       l'épargne ou au crédit (CC, 6 mars 1990, à propos de la société Bernard
                       Tapie Finance : l'incompatibilité est d'interprétation stricte et elle se
                       comprend même si l'objet social comprend des activités non
                       financières ;
                  ▪ sociétés ou entreprises dont l'activité consiste principalement dans
                       l'exécution de travaux ou prestation de fourniture ou de service sous
                       contrôle de l'État ou pour son compte (CC, 7 novembre 1989 :
                       l’incompatibilité subsiste, même si la société n'a pas de but lucratif ou
                       si le gérant est bénévole) ;
                  ▪ Société à but lucratif dont l'objet est l'achat ou la vente de terrains
                       destinés à la construction ou qui exercent une activité de promotion
                       immobilière.

RQ : Les incompatibilités ne visent pas les actionnaires. On peut citer par exemple le cas de
Marcel Dassault, actionnaire majoritaire de plusieurs entreprises de construction
aéronautique pour le compte de l'État. Selon le Conseil constitutionnel, on ne peut leur
étendre l'incompatibilité sauf s'il est démontré qu'ils participent en fait à l’activité de
l’entreprise.

RQ2 s’agissant de la sanction de l'incompatibilité : c’est une démission d'office si le choix n’a
pas été opéré par le parlementaire dans les 30 jours après l'élection pour se démettre de ses
fonctions incompatibles ou renoncer à son mandat. Le contrôle des activités professionnelles
appartient au Bureau de l’assemblée. En cas de doute, le Bureau, le parlementaire ou même
le Garde des Sceaux peuvent saisir le Conseil constitutionnel.
-   L’encadrement spécifique du cumul des mandats électifs
           ▪ Règles issues de la réforme de 2000

Le cumul des mandats qui consiste dans la possibilité pour les parlementaires d’exercer
simultanément d’autres mandats électifs est une spécificité française rendue problématique
avec la décentralisation. Si ses partisans mettent en avant l’ancrage territorial qu’il procure
aux élus ─ qui serait ainsi plus en prise avec le réel − ainsi que l’indépendance renforcée
qu’ils peuvent en tirer par rapport à la hiérarchie du parti ; ses adversaires dénoncent une
pratique qui contribue aux conflits d’intérêts, à la professionnalisation de la vie politique et à
l’absentéisme parlementaire. Le cumul des mandats à fait l’objet d’un premier encadrement
par la loi organique du 5 avril 2000 relative aux incompatibilités entre mandats électoraux
(qui traite de la situation des parlementaires nationaux) et par la loi ordinaire du 5 avril 2000
relative à la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions électives et à leurs
conditions d'exercice. Ces textes interdisent à un député ou un sénateur de cumuler son
mandat parlementaire avec celui de représentant au Parlement européen. Est également
incompatible avec l'exercice d'un mandat parlementaire l'exercice de plus d'un mandat local
parmi les mandats de conseiller régional, conseiller à l'assemblée de Corse, conseiller
général, conseiller de Paris, conseiller municipal d'une commune d'au moins de 3 500
habitants.

           ▪   Interdiction résultant de la réforme de 2014

Cet encadrement est cependant apparu insuffisant et une interdiction plus générale a été
préconisée successivement par le Comité Balladur en 2007 (proposition n°56) puis par la
Commission Jospin en 2012 (proposition n°15). L’interdiction du cumul d’un mandat
parlementaire avec un mandat d’exécutif local a fait l’objet d’intenses débats et blocages au
Parlement, y compris au sein de la majorité. Il faut dire que cette mesure, promise par
François Hollande lors de la campagne présidentielle de 2012 et inscrite dans le programme
du parti socialiste, affecte principalement… les parlementaires eux-mêmes, dont 60 %
cumulent leurs fonctions avec un mandat d’exécutif local….

Adoptées après 7 mois de débats et validées par le Conseil constitutionnel, la loi organique
et la loi ordinaire du 14 février 2014 viennent traduire l’engagement présidentiel. Elles
interdisent le cumul de l’exercice d’un mandat parlementaire national ou européen avec
l’exercice de fonctions de direction ou de codirection au sein des collectivités territoriales
et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, en
métropole et en outre-mer. L’interdiction est également étendue à certaines fonctions non
exécutives, telles que les présidences des assemblées locales en Corse, Martinique,
Nouvelle-Calédonie et Polynésie française. Afin d’éviter des élections partielles à répétition à
chaque élection locale, le projet de loi organique autorise qu’un parlementaire
démissionnaire pour cause de cumul des mandats soit remplacé par son suppléant.

Pour d’évidentes raisons politiques, ces dispositions ne seront applicables qu’à compter du
premier renouvellement des assemblées concernées suivant le 31 mars 2017. Reste à
vérifier qu’elles ne seront pas remises en question à l’occasion des prochaines élections
législatives par la nouvelle majorité issue des urnes. L’UMP a en effet annoncé qu’en cas de
victoire elle rétablirait le cumul des mandats…

   -   Les immunités parlementaires
En vertu de l’article 26 de la Constitution, les parlementaires bénéficient d’une protection
contre les poursuites judiciaires pour assurer le libre exercice du mandat composée d’une
irresponsabilité et d’une inviolabilité.

           ▪   L’irresponsabilité parlementaire

Elle est prévue à l’article 26 de la Constitution ainsi que par la loi du 29 juillet 1881 et la loi
de 1950. Les parlementaires ont une immunité sur les propos et opinions émis dans
l'exercice des fonctions et cette immunité touche, par ricochet, les journalistes qui
retranscrivent ces opinions. Cette irresponsabilité est perpétuelle et concerne tous les actes
de la fonction parlementaires (votes, discours, enquêtes, rapports) : si l'acte n'est plus en
rapport direct avec la fonction, l'immunité tombe. Le Conseil constitutionnel dans une
décision du 7 novembre 1989 énonce qu’il n’existe pas d'extension de l'irresponsabilité aux
actes des parlementaires dans le cadre d'une mission temporaire car celle-ci est dépourvue
de tout lien juridique avec la fonction de parlementaire.

           ▪   L'inviolabilité parlementaire

Elle vaut pour les actes détachables des fonctions. En matière correctionnelle ou criminelle,
le député ne peut faire l'objet d'une arrestation (y compris détention provisoire et garde à
vue) ou de toute autre mesure privative ou restrictive de liberté (contrôle judiciaire) sans
l'autorisation du Bureau (sauf les cas de crime ou délit flagrant ou de condamnation
définitive). En outre, la détention, les mesures privatives ou restrictives de liberté ou la
poursuite d'un député sont suspendues pour la durée de la session si l'Assemblée le
requiert.

        Actualité : la réserve parlementaire : de l’encadrement à la suppression ?

La réserve parlementaire est un ensemble de subventions d’État votées et modifiées en
lois de finances initiales ou rectificatives.
Par la réserve, les parlementaires soutiennent des investissements de proximité décidés
par des collectivités locales et des activités menées par des associations. La « réserve
institutionnelle » soutient quant à elle des associations ou fondations menant des projets
d’intérêt national et, traditionnellement, des grandes institutions.
Dès son élection à la Présidence de l’Assemblée nationale, le Président Claude Bartolone a
souhaité mettre fin à l’opacité totale de ce dispositif en faisant en sorte que la réserve
parlementaire réponde à des règles d’équité et de transparence. C’est ainsi, pour la
première fois, qu’a été mis en ligne à la fin du mois de janvier 2014 le tableau retraçant
l’utilisation de la réserve parlementaire en 2013. Cette décision a été étendue aux deux
assemblées dans la loi relative à la transparence de la vie publique.
Le projet de loi de moralisation de la vie publique présenté par M. Bayrou (Garde des
Sceaux au moment où nous écrivons) prévoit la suppression pure et simple de la réserve
parlementaire, afin d’éviter toute dérive clientéliste. Elle sera remplacée par un « fonds
d’action pour les territoires et les projets d’intérêt général ».

II. Fonctions du Parlement
Le Parlement a pour fonctions principales de voter la loi et contrôler l’action
gouvernementale, à quoi s’ajoute, depuis 2008, l’évaluation des politiques publiques. Avant
d’étudier les conditions dans lesquelles il exerce ces deux fonctions, il convient d’apporter
quelques précisions sur le « temps parlementaire ».

A/ Le temps parlementaire

L’Assemblée nationale et le Sénat siègent simultanément dans le cadre de sessions.

   •   La session ordinaire : Depuis la réforme du 4 août 1995, les chambres siègent lors
       d’une session unique (et non plus deux sessions séparées). Cette session unique
       (article 28 de la Constitution) commence le premier jour ouvrable d'octobre et prend
       fin le dernier jour ouvrable de juin. L’objectif de la session unique est d’accroître
       l'efficacité du travail et réduire l'absentéisme des parlementaires.
   •   Les autres sessions :
            o Les sessions extraordinaires (article 29 de la Constitution) : Elles se tiennent à
                l'initiative du Premier ministre ou de la majorité des membres composant
                l'Assemblée Nationale, sur un ordre du jour déterminé par décret du
                président de la République. Elles sont motivées par la nécessité d’achever le
                travail législatif en cours ou d’effectuer des réformes complexes. Par exemple,
                suite aux élections présidentielles de 2012, une session extraordinaire a été
                organisée afin de mettre en œuvre certaines mesures contenues dans le
                programme de F. Hollande (dispositions sur les emplois d’avenir et sur le
                logement notamment).
            o Les sessions de plein droit : Ce sont des sessions établies en raison du texte
                constitutionnel. Par exemple en application de l’article 16, lors du message du
                Président de la République, le deuxième jeudi suivant l'élection de
                l'Assemblée nationale ou encore consécutivement à une dissolution (si hors
                session) pour 15 jours.
   •   L’ordre du jour des séances (art. 48 C.) :

L’une des grandes innovations de la Constitution de 1958 a consisté à conférer au
gouvernement le soin de déterminer l’ordre du jour prioritaire, ce qui lui permettait
concrètement de s’assurer de l’examen rapide de ses propres projets…

Pour tempérer cette règle, l’article 48 modifié par la révision du 4 août 1995 prévoyait
qu’une séance par mois était réservée par priorité à l'ordre du jour fixé par chaque
assemblée ce qu’il était convenu d’appeler la « niche parlementaire ». La réforme
constitutionnelle du 23 juillet 2008 va beaucoup plus loin puisqu’elle prévoit que l’ordre du
jour est désormais fixé par principe par les assemblées. Ce principe est en réalité assorti de
multiples exceptions :

           ▪   deux semaines de séance sur quatre sont réservées par priorité à l’ordre du
               jour fixé par le Gouvernement ;
           ▪   une semaine sur quatre est réservée par priorité et dans l’ordre fixé par
               chaque assemblée au contrôle de l’action gouvernementale et à l’évaluation
               des politiques publiques ;
▪   Une journée de séance par mois est réservée à un ordre du jour
               parlementaire à l’initiative des groupes minoritaires et des groupes
               d’opposition.
           ▪   Enfin, les lois de finances (dont les lois de finances rectificatives et de
               règlements), les lois de financement de la sécurité sociale ainsi que les lois
               relatives à l’état de crise (état d’urgence et état de siège) sont prioritaires par
               principe.

B/ La fonction législative du Parlement

1. les domaines de la loi et du règlement et le recours aux ordonnances

L’une des grandes innovations de la Constitution de 1958 a été la délimitation du domaine
de la loi et la consécration d’un pouvoir réglementaire autonome. V. Sur ce point T2 fiche 1.

A cela s’ajoute la faculté offerte au Gouvernement de légiférer par voie d’ordonnances.

                              Addendum
                              Pour approfondir vos connaissances et votre réflexion :
                              « Les ordonnances de l’article 38 C. »

2. La procédure d’adoption de la loi ordinaire

La procédure législative s’inscrit en plusieurs étapes :

   •   L’initiative

Aux termes de l’article 39 de la Constitution, l'initiative appartient concurremment au
Gouvernement (projet de loi) ou aux parlementaires (proposition de loi).

           o Lorsqu’il s’agit d’un projet de loi, celui-ci doit être délibéré en Conseil des
             Ministres. Il s'agit là d'une formalité substantielle puisqu’il exprime la
             solidarité du gouvernement. Il est ensuite soumis au Conseil d'Etat pour avis
             qui ne lie pas le Gouvernement puis déposé par le Premier ministre sur le
             bureau d’une des assemblées (décret de présentation). Il est à noter que les
             projets de loi de finance et de financement de la sécurité sociale sont
             examinés en priorité par l'Assemblée nationale. Cela rappelle la compétence
             particulière que possède la Chambre basse en matière financière. Quant aux
             projets de lois relatifs à l’organisation des collectivités territoriales, ils sont
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