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ETUDE DIAGNOSTIQUE DES ‘’EAUX ET FORETS’’ (1291-2012) AGISSONS ENSEMBLE POUR LA RENAISSANCE D’après une recherche bibliographique conduite par l’Inspecteur des E/F ZOURE Ouniyida Léonard Avril 2013
Dédicace A Traoré Moise Alassane, A Sagnon Pertiou, A Ouédraogo Tinoaga Blaise et Sawadogo K. Simon A Zongo Mathieu et Zidwemba A Coulibaly Gaston et Somé K. Christophe, A Coulibaly Issa et Kaboré Tambi A Mantoro Martin et Poda Urbain A Zampaligré Issa et Kondé Benjamin, A Zan Tahirou et Yaméogo Mathieu… A tous les frères d’armes qui ne sont plus de ce monde et qui depuis leur tombe, les balles meurtrières des braconniers ou les germes de la maladie toujours dans leur chair, je demande de comprendre les forestiers vivants et de leur pardonner leurs conduites autant meurtrières que ces balles assassines, après tant de vies perdues et tant de sang versé. La nature de l’homme est ainsi faite, il ne se souvient de rien jusqu’au moment où pour un rien il se souvient de tout. 2
AVANT PROPOS Le présent document est le fruit d’une longue recherche bibliographique et de multiples rencontres avec d’anciens fonctionnaires du corps des Eaux et Forêts et du développement rural. Il se veut une synthèse analytique de la situation du corps des Eaux et Forêts depuis les années de sa création à 2012. Ce document ne prétend pas avoir épluché toutes les questions relatives à la genèse du corps ni à son état actuel des lieux encore moins aux solutions idoines devant permettre sa réorganisation et sa redynamisation. Il reste bien entendu que de 1875 à 2012, des informations pourraient avoir été omises par l’auteur. Il compte sur la compréhension des lecteurs pour excuser toute imperfection de cette œuvre qui reste tout de même humaine. Infiniment merci 3
GENESE-ETAT DES LIEUX 4
I. kINTRODUCTION Le corps des Eaux et Forêts doit sa naissance au Roi Philippe II Auguste ou Philippe le Conquérant. Il est né à Paris en l’an de grâce 1165 de Louis VII le Jeune (roi de 1137 à 1180), et de sa troisième épouse Adèle de Champagne. Philippe Auguste est sacré du vivant de son père, le 1er novembre 1179. En 1180, alors qu’il n’avait que 15 ans le 18 septembre, il devient roi, en succédant à son père.1223). Photo 1. Le Roi Philippe II Auguste ou Philippe-Auguste le Conquérant Source : Archives bibliothèque Université Paris XII 5
II. CHRONOLOGIE GENERALE 2.1. Le 13eme siècle ou le temps des gruyers C’est au 13ème siècle qu'apparaît pour la première fois l’appellation « Eaux et Forêts », dans une ordonnance de 1219, à la demande du roi Philippe II Auguste. On trouve pour la première fois une ébauche d’organisation du service des Eaux et Forêts grâce à l’ordonnance du roi Philippe IV Le Bel, en août 1291, mettant au jour les Maîtres des Forêts lors de son ordonnance définissant leur rôle (enquêteurs, inquisiteurs et réformateurs). 2.2. Le 14eme siècle ou l’âge des Souverains maitres Au 14ème siècle, le roi Philippe V le Long élabore en 1318 une ordonnance réglant les problèmes des officiers des Eaux et Forêts. Par la suite, à cause de la pénurie de bois et de l’agrandissement du royaume de France, Philippe VI de Valois crée alors la première administration forestière, par l’ordonnance de Brunoy de 1346. Les forestiers doivent alors surveiller le domaine royal dans les matières forestières, des eaux et de la chasse. Le roi Charles V le Sage, fait élaborer en 1376 une ébauche de « Code forestier » traitant alors des assiettes, de marteaux, de police et du règlement d’exploitation des bois de marine. Les coupes sont délimitées par l’arpenteur, à la craie rouge ou noire. 2.3. Le 15eme siècle ou la forêt pourvoyeuse de richesses Au 15ème siècle, la réglementation des forêts et des droits d’usages rapporte beaucoup d’argent au royaume. Les forestiers sont renforcés. S’intéressant beaucoup à la chasse, Charles VI rédige une ordonnance sur la chasse, les eaux et les forêts. 2.4. Le 16eme siècle ou l’essor de l’organisation des services forestiers Au 16ème siècle le corps des Eaux et Forêts voit ses missions élargies. Il a désormais en charge la surveillance des autres forêts du royaume et la réglementation de la chasse. Une ordonnance de 1516 rénove l’administration forestière et réglemente la chasse tandis que trois autres ordonnances traitent de la conservation des forêts, dans l’intérêt public. Il s’agit des ordonnances : - de 1518 sur le Code Pénal Forestier ; - de 1520 comportant des mesures autoritaires à l’égard des particuliers ; - de 1537 relative aux hautes futaies appartenant au corps ecclésiastique. Henri IV en 1597 instaure par un édit un Règlement Général des Eaux & Forêts. Le tiers en réserve est rétabli et les forêts royales sont bornées et aménagées. 2.5. Le 17eme siècle ou sicle des réformes de maître Colbert Au 17ème siècle la forêt française vit un grand chambardement. En peu de temps, les revenus de la forêt royale se voient multipliés par 10, lorsque Colbert entreprend une grande réforme de l’administration forestière qui dure près de 20 ans. En 1694, l’administration royale chargée des forêts attribue aux sergents et gardes la surveillance et la police de la forêt, et aux officiers de la maîtrise la tenue des audiences forestières. 6
2.6. Le 18eme siècle ou les grands bouleversements Au 18eme siècle vinrent la Révolution française et le Directoire. Les forêts, royales ou non, se font piller, et les défrichements sont nombreux du fait de l’évolution de la population française. Plus de 500 000 hectares disparaissent. L’administration forestière demande de l’aide à l’armée. Les avancées, sylvicole et d’aménagement forestier sont considérables. Beaucoup de nobles se mirent à étudier la forêt et son fonctionnement. Un édit de Louis XV du 13 décembre 1719 instaurait la peine de mort contre ceux qui allumeraient un feu en forêt et dans les bruyères. C’est ce roi qui instaura la séparation de la police des cours d’eau (1740). Des hommes comme Buffon, Réaumur et Jacques Le Ray de Chaumont, Grand Maître des Eaux et Forêts de France et Intendant des Invalides ont été des forestiers de talent à cette époque. Une loi du 29 septembre 1791 sur le régime forestier instaure la liberté totale des propriétaires. Et une autre porte création d’une Conservation Générale des Eaux et Forêts de la France. La Révolution fait changer toutes les empreintes de marteaux : - Le marteau royal devient marteau de l’Etat, dont l’empreinte est BN (Bois Nationaux) avec au milieu un faisceau de licteur surmonté d’un bonnet phrygien ; - A la Restauration, le marteau de l’Etat, servant au martelage et balivage, est représenté par une Fleur de Lys avec le numéro de conservation. Puis arrive le Directoire, avec l’arrêté du Jeudi 4 avril 1793 sur l’uniforme vert des Eaux et Forêts. 2.7. Le 19eme siècle ou la belle époque mouvementée Le 19eme siècle est l’âge d’or des Eaux et Forêts. Sous le Consulat, quelques textes paraissent, tantôt sur les ventes de bois, tantôt sur la restitution de biens. En 1801 paraît un décret législatif, qui crée une nouvelle Administration Générale des Forêts, composée de 5 administrateurs, 30 conservateurs, 300 sous-inspecteurs, 500 gardes principaux et 8 000 gardes. En 1806, sous l’Empire de Napoléon Ier : - les cinq administrateurs des forêts sont remplacés par un Directeur général ; - le marteau de l’État change d’empreinte pour arborer l’Aigle impérial avec le numéro de Conservation ; - les marteaux particuliers des agents changent aussi : o Conservateurs (Lettre C et n° de conservation dans une empreinte hexagonale ; o Inspecteurs (Lettre I et n° de conservation dans une empreinte pentagonale) ; o Sous-inspecteur (Lettre SI et n° de conservation dans une empreinte octogonale) ; o Garde Général (Lettres GG et n° de conservation dans une empreinte ronde de diamètre max. 28 mm) ; o Garde particulier (Lettres GP et n° de conservation sans forme déterminée) ; o Arpenteurs un rectangle à angles coupés avec la lettre A et le n° de conservation comme empreinte. Dans son ordonnance du 22 janvier 1817 Louis rattache les services forestiers au Service des Domaines. Refusant l’affaiblissement des Eaux et Forêts. 7
Charles X restaure l’administration forestière avec son ordonnance du 26 avril 1824 crée une Direction Générale. Par ordonnance du 1er décembre 1824, l’Ecole Royale Forestière de Nancy est créée grâce au Sous-inspecteur Bernard Lorentz. En 1827 naquit le premier Code Forestier. Sous Louis-Philippe Ier, le Ministre de la guerre créa l’ordonnance du 4 août 1831 afin d’utiliser les Gardes forestiers deviennent Guides forestiers et appelés au front. Il commanda également 3 lois sur la forêt, dont la loi du 3 mai 1844 instituant le permis de chasse. Le marteau de l’État sera modifié en forme de cercle avec empreinte les lettres capitales gothiques AF (Administration Française) suivis du n° de Conservation et celui de l’Inspection (ex. AF.23.6). Napoléon III, restaure l’Administration Civile des Eaux et Forêts, qui est devenue une valeur sûre, dont les compétences techniques sont connues dans d’autres pays. Il rattache en 1862 le Service des Dunes, des Ponts et Chaussées à l’Administration forestière. En 1870 sont nés les Chasseurs Forestiers. Les forestiers obtinrent un statut militaire en tant de guerre et sont alors soumis aux lois militaires (loi du 27 juillet 1872 [recrutement de l’armée], décret du 24 juillet 1873 [relatif à la réorganisation de l’armée]). Le décret du 13 mars 1875 institut un véritable corps militaire « les chasseurs forestiers ». Le décret du 2 avril 1875 [relatif à l’organisation militaire du corps forestier] incorpore le personnel forestier dans les forces militaires. Il existe alors des conservations, compagnies, sections et détachements forestiers. L’instruction militaire entre alors à l’école de Nancy, et les élèves sortent avec le grade de sous- lieutenant, et affectés dans une unité de chasseurs forestiers. C’est un officier désigné par le ministre de la guerre qui donne cette instruction à hauteur de 7 heures par semaine. Lors de la revue de l’armée du 14 juillet 1880, il a été distribué de nouveaux drapeaux à l’armée. Le président de la République tenait en bonne place les chasseurs forestiers, et remit alors au lieutenant-colonel Carraud, Inspecteur général des Eaux et Forêts, Commandant du régiment des forestiers à Paris en 1870, un drapeau flambant neuf. Le porte-drapeau désigné est le sous- lieutenant Panisset, garde général-adjoint des Eaux et Forêts. Ce jour là, le corps militaire des forestiers a défilé en tête d’armée. Le décret 18 novembre 1890 oblige les élèves de Nancy à s’engager pour 3 ans, dont une année comme sous-lieutenant dans une unité d’infanterie. Ce décret modifie également l’organisation, distinguant alors les conservateurs, les inspecteurs, les inspecteurs adjoints, les gardes généraux et gardes généraux stagiaires. 2.8. Le 19eme siècle ou le tournant En 1903, le titre de Directeur général est rétabli. Un grand inventaire forestier voit le jour en 1908. Mais les deux grandes guerres prennent une importance capitale dans l’administration forestière. La 1re compagnie de chasseurs forestiers, basée à Épinal en 1914 rassemble les préposés forestiers âgés de 25 à 48 ans. Cette compagnie comprend 4 officiers et 220 chasseurs. Elle a pris part aux combats dans les Vosges et dans le nord de la France. Le 4e bureau de l’état-major de l’armée crée une commission des forêts dont le travail est principalement de préparer par tous voies et moyens la constitution des approvisionnements des bois de toutes espèces pour les besoins de l’armée. En 1914, le ministre de la Défense modifie le fonctionnement des chasseurs forestiers. Les préposés doivent avoir moins de 48 ans. Les chasseurs forestiers font partie des troupes d’élites et en portent les signes distinctifs. 8
En temps de paix, le personnel sert à assurer la continuité du service forestier et sa surveillance. En temps de guerre, les chasseurs forestiers sont alors intégrés dans les 1re lignes, et servent de guides et d’informateurs de l’armée. C’est pourquoi on trouve aujourd’hui sur le monument aux morts de l’école nationale de Nancy, le nom de 96 anciens élèves, jeunes officiers, tués pendant la Grande Guerre. Les chasseurs forestiers furent rattachés au Génie militaire, dans le service forestier des armées (SFA) à la demande du Général en Chef Maistre, dans son Instruction du 25 juillet 1915. Un grand nombre de chasseurs forestiers fut décoré et l’école forestière de Nancy reçoit la Légion d'Honneur et la Croix de Guerre 14/18. La moitié des fonctionnaires supérieurs mobilisés des 87e, 88e, 89e, et 90e promotions sont décorés de la Croix de guerre, et trois sont faits chevaliers de la Légion d’honneur. Les chasseurs forestiers défilèrent sur les Champs-Élysées le 14 juillet 1919 pour le défilé de la victoire avec le drapeau qui leur avait été remis le 14 juillet 1880. Les chasseurs forestiers de l’armée sont dissous le 3 juin 1939, et redeviennent l’Administration Civile des Eaux et Forêts. Le drapeau est remis à la garde de l’école forestière de Nancy. Pendant soixante quatre années, les forestiers sont restés aux côtés de leurs frères d’arme français. C’est là l’ultime compréhension de la militarisation du corps des Eaux et Forêts dans les colonies françaises outre-mer. C’est cela qui justifie également le port par les forestiers des mêmes formes de galons et parements. 2.9. La page ONF Les IVème et Vème Républiques ont élaboré plusieurs textes sur les mesures de protection de l’environnement en général, donnant encore plus de pouvoir de constatation au personnel de l’administration des Eaux et Forêts. Sous le Général De Gaulle, le Ministre de l’agriculture Edgard Pisani inspire la loi du 23 décembre 1964, instaurant au 1er janvier 1966 en lieu et place de l’administration forestière, un Etablissement Public Industriel et Commercial, l’Office National des Forêts (EPIC/ONF). III. CHRONOLOGIE EN AOF ET AU BURKINA FASO 3.1. En AOF L’AOF fut créée par le décret du 16 Juin 1895. Le 4 juillet 1935, un décret fixe le régime forestier en AOF (JOAOF du 3 Août 1935, p. 611, son rectificatif dans le JOAOF du 14 septembre 1935, p. 723) complété par le décret du 12 Avril 1954, article 23 bis (JOAOF du 8 Mai 1954, p.844), signés, Albert Lebrun Président de la République Française, Louis Rollin Ministre des colonies, Léon Bérard Garde des Sceaux Ministre de la Justice. Ce Décret a été le véritable précurseur du corps des Eaux et Forêts en AOF. Les services forestiers sont énoncés en son article 8 comme suit : « Le service forestier, après entente avec l’administrateur commandant le cercle, procède avec les représentants des villages intéressés à une reconnaissance générale du périmètre à classer et des droits d’usage ou autres s’exerçant sur la forêt….». Le corps des Eaux et Forêts dont il est fait cas est bien celui de l’AOF dont l’Inspection Générale était basée à Saint-Louis puis plus tard à Dakar au Sénégal. Au Burkina 9
Faso des Inspections existaient respectivement au niveau des cercles, qui sont aujourd’hui nos chefs-lieux de régions ou de provinces. Mais si en France dès le 3 juin 1939 les chasseurs forestiers de l’armée sont dissous, et le corps des Eaux et Forêts redevenu une administration civile des Eaux et Forêts, il en a été autrement dans les colonies dont l’administration forestière est demeurée un corps paramilitaire. La raison était purement d’ordre logique. Les populations noires de l’AOF avaient une autre logique vis-à-vis des ressources naturelles que les françaises déjà conquises à la sauvegarde de leur environnement, parce qu’ayant déjà perçu les bénéfices actuels et futurs. La forêt étant comprise comme un don de Dieu, et étant une divinité en elle-même avec ses esprits, son exploitation n’était basée que sur des interdits localisées. A l’époque les feux courants, les battues et la collecte du gibier par les pièges et autres moyens laissant à désirer pour la survie de l’espèce, la répression et l’imposition étaient des moyens nécessaires à l’aboutissement des objectifs coloniaux. Des espèces étaient strictement protégées (animales comme végétales) en plus des bois sacrés qu’entretenaient jalousement les sages. De manière souple mais quand même obligeante, des millions d’hectares sont extraites de la pression humaine. Et n’eut été cette répression et cette vision des ressources naturelles, l’on est en droit de se demander si de nos jours en AOF nous aurions de la forêt et de la faune. Dans toute l’AOF, l'application du décret du 4 juillet 1935 portant Régime Forestier des Territoires de l'Afrique Occidentale Française nécessite la formation de plus de personnels pour les classements et la surveillance des formations forestières, des cours et plans d’eau. - d'une part des Gardes forestiers et des Préposés des Eaux et Forêts, le plus souvent anciens militaires, auxquels l'on a inculqué des connaissances rudimentaires leur permettant de remplir des missions de police, d’arpentage , de pose de bornes, de conduite des discussions avec les autochtones pour leur arracher le oui pour le classement, de pratique de feux précoces, de cynégétique et de pisciculture ; - d'autre part des Contrôleurs des Eaux et Forêts, cadres moyens qui reçoivent à l'Ecole Forestière du Banco en Côte d'Ivoire un enseignement technique et professionnel leur permettant d'assurer la gestion des services forestiers locaux sur toute l'étendue de l’AOF. Les années des indépendances ont été aussi celles de la création d’un certains nombre d’écoles forestières. En 1963 au Sénégal, au Burkina Faso, au Mali, en Côte d’Ivoire, au Bénin, au Niger, en Guinée, des écoles de cadres d’exécution ont été crées en vue de pourvoir les services forestiers locaux en techniciens chargés d'assurer la relève des gardes et des préposés coloniaux. Il faut noter cependant que l’Ecole forestière du Burkina a ouvert ses portes en 1953 pour la formation des préposés avec la promotion Yéré Lassina. Des techniciens supérieurs seront ultérieurement à l’IPR de Katibougou au Mali, à l’Ecole forestière du Banco en Côte d’Ivoire. Les ingénieurs rejoindront l’Ecole prestigieuse des Barres en France puis plus tard aussi dans d’autres pays (URSS, Canada, USA, Allemagnes, Belgique) 3.2. Au Burkina Faso 3.2.1. Bref historique 10
Au Burkina Faso, comme dans les autres pays de l’A.O.F., les premiers personnels du corps des Eaux et Forêts furent recrutés parmi les anciens militaires libérés de la seconde guerre mondiale. La création du corps colonial des Eaux et Forêts précède partout celle de nos armées nationales en AOF. Tableau 1. Quelques dates de l’armée nationale du Burkina Faso Dates Evènements de création 1895 Création de l’AOF avec le corps colonial des Eaux et Forêts avec base à Saint-Louis 1939 Création de la Gendarmerie du Territoire de Haute Volta 1960 Création de l’Armée Nationale par la loi n°74-60/AN du 03 août 1960 1960 Création du 1er Bataillon de Haute-Volta (1er BHV) 1961 Transfert de commandement aux autorités voltaïques (le 1er Novembre 1961) 1965 Création de l’Escadrille militaire, plus tard la Base aérienne 1968 Création du 2ème Bataillon de Haute-Volta (2ème BHV) 1970 Création de l’Etat Major de l’armée (EMA) 1983 l’EMA devient le Haut Commandement des Forces Armées Populaires 1985 Création des Régions Militaires 1994 Réduction du nombre des régions militaires 1995 Création de l’Etat Major de l’Armée de Terre (EMAT) 1995 Création de l’Etat Major de la Gendarmerie Nationale 1996 Le HCFAP devient l’Etat Major Général des Armées (EMGA) 1997 Création de l’Etat-major de l’Armée de l’Air (EMAA). Ce n’est pas un fait de hasard si les galons et grades respectifs sont identiques à ceux des militaires. Les appellations et les galons des personnels des Eaux et Forêts, même des collègues militaires et des autres corps paramilitaires n’en perçoivent pas l’histoire, il reste entendu que ce n’était pas un fait du hasard. Ce n’est pas parce que -comme certains le prétendent- les premiers agents des Eaux et Forêts étaient recrutés au sein des anciens militaires, mais cela date depuis 1870. C’est en effet en 1870 que sont nés les Chasseurs Forestiers. Les forestiers obtinrent un statut militaire en tant de guerre et sont alors soumis aux lois militaires (loi du 27 juillet 1872 [recrutement de l’armée], décret du 24 juillet 1873 [relatif à la réorganisation de l’armée). L’organisation était la suivante : Tableau 2. Appellations en 1870 au sein de l’infanterie française Dénominations Grade de commandement Fonction afférente Régiment Colonel ou Lt-Colonel Commandant de régiment Bataillon Commandant Chef de bataillon Compagnie Capitaine Commandant de compagnie Section Lieutenant / Sous-lieutenant Chef de section Tableau 3. Appellations en 1870 au sein des chasseurs forestiers dans l’infanterie française Dénominations Grade de commandement Fonction afférente Profession 11
Conservation Colonel ou Lt-Colonel Commandant de régiment Inspecteur Général Compagnie Commandant Commandant de compagnie Inspecteur Section Lieutenant Chef de section Garde général Détachement Sous-lieutenant Chef de détachement Garde général/adj. Chez les chasseurs forestiers à l’époque, les appellations distinguaient : La fonction liée à la nomination.....…….…….……..Commandant du Régiment des Forestiers La profession liée aux études et diplômes ……………... Inspecteur général des Eaux et Forêts Le grade lié aux avancements dans la carrière ………...……………………Lieutenant-colonel Exemple 1: Le Lieutenant-colonel Carraud, Inspecteur général des Eaux et Forêts, Commandant du Régiment des forestiers de Paris en 1870. Exemple 2 : Le sous-lieutenant Panisset, Garde général-adjoint des Eaux et Forêts, Porte- drapeau du Régiment des forestiers à Paris en 1870. 3.2.2. Les différents schémas d’animation du corps de 1875 à 2013 Pour saisir la problématique du corps des Eaux et Forêts aujourd’hui, il faut une rétrospective des schémas institutionnels et des hommes qui l’on animé. Né de la volonté du colonisateur français, le corps connaitra dès sa création en AOF, une structuration paramilitaire mais avec malheureusement un effectif très réduit, donnant ainsi un véritable embryon de corps. Après les indépendances du fait des multiples changements institutionnels, le corps des Eaux et Forêts ne sera pas épargné des tumultueuses ballades de ministère en ministère selon le gré des politiques. Cette instabilité institutionnelle peut se présenter comme suit. CONSERVATION COMPAGNIE COMAPGNIE COMPAGNIE SECTION SECTION DETACHEMENT DETACHEMENT Graphique 1. Schéma organisationnel des Eaux et Forêts en 1875-1935 Etat du commandement : Corps bien structuré et commandé avec rigueur dans la cohésion, l’esprit de corps et la discipline depuis Dakar par des officiers coloniaux. Missions : conservation et recettes. 12
INSPECTION GENERALE INSPECTION INSPECTION INSPECTION CANTONNEMENT CANTONNEMENT POSTE FORESTIER POSTE FORESTIER Graphique 2. Schéma organisationnel de l’AOF à 1966 Etat du commandement : Corps bien structuré et commandé avec rigueur dans la cohésion, l’esprit de corps et la discipline depuis Dakar par des officiers coloniaux. Missions : conservation et recettes. DIRECTION EF et CS INSPECTION INSPECTION INSPECTION CANTONNEM. CANTONNEM. POSTE POSTE FORESTIER FORESTIER Graphique 3. Schéma organisationnel de 1966 à 1970-75 Etat du commandement : Corps bien structuré et commandement mitigé. Emergence du syndicat avec le début des luttes syndicales Missions : conservation et recettes. SECRETARIATF GENERAL Inspection Inspection Inspection CANTONNEMENT CANTONNEMENT POSTE FORESTIER POSTE FORESTIER Graphique 4. Schéma organisationnel de 1976 à 1983 Etat du commandement : Corps bien structuré mais début de la sclérose dans le commandement. Forte action syndicale. Missions : aménagement, reboisement, recettes et sensibilisation. 13
DGEF SEVICES DIRECT. PROJETS ET CENTRAUX REGIONALES CONVENT. DIRECTIONS DIRECTIONS PROVINCIALES PROVINCIALES SERVICES SERVICES DEPARTEMENT. DEPARTEMENT. Graphique 5. Schéma organisationnel 1995-2003 Etat du commandement : Corps structuré avec un commandement efficace. Action syndicale assez marquée. Missions : Début de la double casquette d’agent de développement rural et de répression. SG SEVICES DIRECT. PROJETS ET CHEF DE CENTRAUX REGIONAL. CONVENT. CORPS E DIRECTIONS DIRECTIONS PROVINCIALES PROVINCIALES SERVICES SERVICES DEPARTEMENT. DEPARTEMENT. Graphique 6. Schéma organisationnel 2004-2010 Etat du commandement : Corps mal structuré avec un commandement peu efficace. Action syndicale assez marquée mais étouffée politiquement. Renforcement de la politisation. Missions : Elles restent les mêmes sauf que rare de forestiers y font encore foi. CAB DNEF SG DIRECT. REGION. SERVICES CENT. ET TOUS LES PROJETS DIRECT.PROV. DIRECT. PROV PROJETS SERVICES DEPART. POSTES Graphique 7. Schéma organisationnel développement durable 14
Etat du commandement : Corps mal structuré administrativement et avec un commandement peu efficace. Action syndicale assez marquée. Renforcement de la politisation. Accentuation des impairs à tous les niveaux. Missions : Troubles avec plusieurs objectifs souvent non concordants. 3.2.3. Les hommes ayant été aux destinées du corps Pour que les forestiers prennent conscience de la nécessité de restructuration de leur corps et de leur cohésion, il a fallu des assassinats en série dans leurs rangs. Dans le parc de Po, à Nazinga, à Dano, à Kongolékan, à Nako…des forestiers ont versé leur sang et perdu leur vie de façon atroce et indigne. A chaque fois ce fut suite à des traquenards ou des mauvaises approches de situation militaires que ces camarades sont tombés dans l’exercice de leur fonction. A chaque coup le commandement se ressaisi juste le temps des funérailles des agents car il faut noter qu’aucun cadre supérieur n’avait encore péri. Ils ne sont pas concernés -pour la plupart d’entre eux- par la rude épreuve de la police forestière. Tableau 4. Les hommes qui ont commandé le corps Date Chef de corps Durée 1988-1989 Joseph Zongo 1 1989-1991 Djiri Dakar 2 1991-1992 Mantoro Martin 1 1992-1994 Sawadogo Albert 2 1994-1995 Korsaga Gérard 0,7 1995-1996 Zan Tahirou 1,4 1996-1997 Coulibaly Sambou 1 1997-1999 Yaméogo Mathieu 2, 2 1999-2002 Zouré O. Léonard 2,10 2002-2004 Soudré Yamba Félix 1, 9 2004-2006 Traoré C. Alamoussa 1, 9 2006-2009 Goungounga Justin 2,8 2009-2012 Drabo Adama 2 2012-2013 Traoré C. Alamoussa 1 2013 à 2015 ZALLE Daouda 2 2015 à 2016 Drabo Adama 1 2016 à nos jours Guigemdé Paul 3.2.4. Les causes de la léthargie du corps 3.2.4.1. Causes politico-institutionnelles La principale cause politico-institutionnelle est la ballade institutionnelle du corps des Eaux et Forêts. De 1960 à 2013 (53 ans), le corps aurait passé sous neuf (9) départements de tutelle soit un changement de tutelle tous les six (06) ans selon la situation qui suit. Et qui dit changement de tutelle dit perturbation dans les missions et dans les manières de servir. A cela il faut ajouter la fréquence des changements de gouvernements et des remaniements ministériels. Un fait marquant est l’année 1958, durant laquelle il eut trois remaniements ministériels en 11 mois. Ce fut la conséquence des querelles politico-idéologiques. Le pays connaitra en effet trois 15
gouvernements de février à décembre 1958. Ce fut d’ailleurs la seul fois que le corps des Eaux et Forêts est nommément cité dans un département ministériel. La même année le Ministère de l’Elevage et des Eaux et Forêts, sera successivement dirigé par Monsieur Traoré Bakary (1er et 2ème gouvernement de 58) et Monsieur Palé Welté (3ème gouvernement de 58). Tableau 5. Situation institutionnelle du corps de 1875 à 2013 Années Nom du Département de tutelle Premier organe dirigeant 1875-1935 Défense National (France) Inspection Générale 1935-1957 France Outre-mer / Colonies Inspection Générale Février 1958 Elevage et des Eaux et Forêts Inspection Générale Octobre 1958 Elevage et des Eaux et Forêts Inspection Générale Décembre 1958 Elevage et des Eaux et Forêts Inspection Générale 1960-1967 Economie Nationale DGEF/CS 1967-1970 Agriculture et Elevage DGEF/CS 1970-1975 Plan, Dévelop. Rural, Environnement Tourisme DGEF/CS 1976-1982 Développement Rural DGEF/CS 1983-1987 Transports, Environnement et Tourisme Inspection Générale des EF 1987-1994 Ministère Environnement et Tourisme Secrétariat Général 1995-2001 Environnement et Eau Direction Générale des EF 2002-2010 Environnement et Cadre de Vie Secrétaire Général 2011-2013 Environnement et Développement Durable Secrétaire Général Novembre 2014 Environnement et Ressources Halieutiques Secrétaire Général 3.2.4.2. Causes intrinsèques aux ministres et premiers dirigeants du département Rares sont les ministres et autres dirigeants du département (Secrétaires généraux, Inspecteurs techniques, Conseillers techniques influents…), qui n’ont pas connu de compromissions avec des forestiers qui sont soit au devant des projets soit aux commandes de certaines directions ‘’juteuses’’. Que peut-on bien attendre comme attitude de ces ministres et dirigeants lorsque ces genres de cadres et agents corrupteurs et serviles commettent des impairs. Si vous avez déjà bénéficié de dessous de tables sous forme de quantités énormes de bons de carburant ou d’enveloppes lourdement remplies de billets de banque sans que vous ne vous inquiétiez de l’origine de l’argent qui a servi à ces dépenses. S’il vous a été acheté et aménagé des terres agricoles à Gonsé, Sapouy et ailleurs, sans que vous ne vous inquiétiez de l’origine de l’argent qui a servi à ces dépenses. S’il vous a été acheté des tracteurs équipés ou des véhicules, sans que vous ne vous inquiétiez de l’origine de l’argent qui a servi à ces dépenses. S’il est convoyé des bovins, ovins et caprins de valeur ainsi que des balles de foins et des sacs de tourteaux dans votre ferme sans que vous ne vous inquiétiez de l’origine de l’argent qui a servi à ces dépenses. 16
S’il est mis gracieusement à votre disposition et à celle de votre suite des chambres luxueuses lors de vos sorties sans que vous ne vous inquiétiez de l’origine de l’argent qui a servi à ces dépenses. Si vous demandez des chevaux ou des bœufs à un directeur régional et qu’il les à Ouagadougou sans que vous ne lui ayez remis aucun centime ni au début ni à la fin de l’opération, sans que vous ne vous inquiétiez aussi de l’origine de l’argent qui a servi à ces dépenses. Si des forestiers sont arrêtés et jetés en prison pour des prétendus détournements, faux et usage de faux, faux en écriture publique, et qu’un ministre s’arroge le droit de faire virer le reste des fonds à problème (plusieurs millions) dans un compte privé et sans se soucier de que sera demain….Etc. Alors vous êtes désormais un ministre ou un directeur, muselé, de qui le département et la Nation ne peuvent attendre que de la figuration. Vous ne pouvez plus prétendre à un remplacement de ce type de cadre ou d’agent, car vous avez désormais vos mains dans la gueule d’un chien. Il faut le caresser dans le sens des poils sinon il vous mordra d’une morsure politiquement mortelle. En réalité lorsque tels agents ou cadres vous en donne deux et que vous acceptiez, il se sert six puisqu’il se dit désormais sous un parapluie. Aucun conseil de discipline dans ces conditions ne se tiendra pas par manque de textes d’application mais par manque de cadres capables de se tenir devant les accusés pour interroger et sanctionner. L’indiscipline et la pagaille au sein du corps est avant tout dû à tout cela car ne dit-on pas que le poisson pourrit toujours par la tête. 3.2.4.3. Causes intrinsèques au corps lui même La première cause intrinsèque au corps est l’infiltration de cadres tous azimuts sans formation militaire de base. Dès les années 70 ont commencé à affluer des cadres forestiers. Ces cadres sont rentrés dans le corps pas pour son aspect paramilitaire mais pour la recherche de l’emploi surtout qu’à l’époque foisonnaient des projets financés à coup de milliards. Ces cadres étaient particulièrement issus des grandes écoles de l’ex-URSS, du Canada, des Etats Unis, de la France, de l’Allemagne, mais également d’universités d’Afrique (Ouagadougou, Abidjan, Niamey, Dakar, Mauritanie, Bénin et Mali). Ils découvraient pour la première fois les rudes épreuves du cadre paramilitaire. Si certains optèrent pour combler leurs déficits de formation militaire et s’insérer dans le corps, d’autres par contre se sont illustrés en véritables poisons humains pour le devenir heureux du corps. La deuxième cause intrinsèque est liée au recrutement de candidats libres au sein de l’Ecole Nationale des Eaux et Forêts de Dindéresso (ENEFD) et au manque de rigueur dans les enquêtes de moralité lors des intégrations. Comme dans l’armée, des parents envoient aussi leurs rejetons très incontrôlables et qui leur donnent des insomnies, à notre école forestière. Une fois formés et intégrés par un test de recrutement sur mesures nouvelles, il est très difficile de distinguer la bonne graine de l’ivraie. C’est alors que ces éléments dangereux entrent dans nos rangs. Ils ne sont pourtant pas tous des mauvaises graines. Il existe bien dans les rangs des recrutés sur concours directs des cas notoirement connus. 17
3.2.4.4. Causes liées à la moralité des personnels Plusieurs comportements sont sources d’impairs au sein du corps. Les plus remarquables sont : - l’implication personnelle de forestiers dans le commerce du bois et dérivés. Des forestiers sont aussi directement ou par prête-noms, impliqués dans la carbonisation dévastatrice de nos formations naturelles. - la location à des fins personnelles des forêts classées, parcs et réserves de faune, à des orpailleurs comme mines à ciel ouvert ou à des éleveurs comme pâturages bovins. - la coopération avec des bandits de grand chemin, soit par des prêts d’armes et/ou de munitions, soit en jouant aux indicateurs et assistants, soit encore par des prêts de logistique de mobilité. - le détournement de recettes forestières ou organisation subtile et complice de coupes illégales dans les forêts. - le faux et usage de faux, faux en écriture publiques par falsification des carnets de recettes ou par fabrication de carnets parallèles. - l’abandon de poste suivi de rackets et de rançonnements des populations par voie de polices parallèles et clandestines. - le détournement des primes contentieuses des subalternes par les cadres responsables et appelés à commander ces mêmes agents. - Le bâillonnement des personnels par abus d’autorité provocant de l’hypertension artérielle puis une désintégration de la personne humaine qui devient vite une loque au service des maquis, des bars et d’autres gargotes. Aucun conseil de discipline ne se tiendra dans ces conditions puisque les subalternes peuvent dénoncer des membres du conseil eux-aussi dans la nasse et souvent aux fautes plus lourdes que celles de l’agent appelé à la barre. C’est là la raison de l’inapplicabilité du décret sur le code de déontologie. Le soldat est à l’image de son chef dit un adage militaire. 3.2.4.5. Causes juridiques Assez moribond et géré par le syndicat devenu seul défenseur des droits des personnels, le corps des Eaux et Forêts connaitra un regain de fierté au cours des années de la révolution. A la création du Comité de Garnison de Ouagadougou (CGO) et du Conseil Révolutionnaire de Discipline des Armées, au sein des forces armées populaires dès 1983, un officier des Eaux et Forêts secondait le délégué de garnison et un autre secondait le Président du Comité Révolutionnaire de Discipline des Armées (CRDA). En 1984 les officiers des Eaux et Forêts qui étaient auprès du Haut Commandement des Forces Armées Populaires (HC/FAP), avaient saisi l’opportunité pour résoudre une bonne fois pour toutes les questions relatives à la formation militaire, à la tenue, aux galons et appellations. 18
S’appuyant sur l’épopée du corps et sur le respect dont il jouissait auprès des FAP et avec le concours de nos collègues militaires, le bureau CDR du corps avait sollicité et obtenu la possibilité d’intégration des personnels forestiers dans l’armée nationale comme se fut le cas en France au cours de la IIIème république en 1872 et comme c’est le cas actuellement dans certains pays de la sous région. Des pourparlers furent alors engagés immédiatement avec le HCFAP pour cette l’intégration. Malheureusement, la tentative échouera du fait de deux oppositions qui ont coalisées par la suite et qui ont fini par faire échec à l’initiative. La première opposition du moins insidieuse venait des officiers farouchement hostiles au port de la tenue et à tout ce qui s’apparente au paramilitarisme. La seconde opposition est la réponse du syndicat à la proposition du HC/FAP qui alignait nos agents sur la même durée de service avant la retraite (quinze ans pour les subalternes et un peu plus pour les officiers et officiers supérieurs). Cette situation a été un bon argument au syndicat pour conduire une campagne anti militarisation. Malheureusement quelques années plus tard les textes de l’armée relatifs au départ à la retraite ont été relus et les durées de services revues à la hausse. Sans exclusive les différents documents juridiques de gestion du corps peuvent être recensés comme suit. Le Kiti AN IV 00369/CNR/MATS/REFI/ETOUR du 14 mai 1987, Il porte sur l’harmonisation des galons, tenues et appellations des fonctionnaires du cadre paramilitaire. La Zatu n°AN VI-0008 /FP.PRES du 26 octobre 1988 Elle porte sur le statut général de la fonction publique. L’article 11 stipule que : Pour la gestion des fonctionnaires, sont constitués des cadres et constitue un cadre, l’ensemble des corps de fonctionnaires relevant d’une même technique ou spécialité administrative, allant du corps le moins élevé au corps le plus élevé. L’article 12 stipule que dans chacun des cadres il est créé des corps. Constituent un corps, tous les fonctionnaires soumis aux mêmes conditions de recrutement et ayant vocation aux mêmes grades. Donc en ce qui nous concernait il y avait au moins cinq corps (préposés, assistants, contrôleurs, ingénieurs des techniques et ingénieurs) L’article 12 stipule que « les corps sont classés et répartis suivant leur niveau de recrutement, en cinq (5) catégories subdivisées en échelles et désignées dans l’ordre hiérarchique décroissant par les lettres A, B, C, D et E conformément à l’annexe 1 du présent statut. » L’article 207 stipule que « Sont et demeurent en vigueur : ………. La zatu AN IV-10 CNR.TRAV. du 25 octobre 1986 portant abrogation de la loi 22 AL et ses décrets d’application. ». Le Kiti n° AN VII-0313/FP/MJ du 18 mai 1990 Il porte modification du Kiti AN IV-369/CNR/MATS/REFI/ETOUR du 14 mai 1987 portant l’harmonisation des galons, tenues et appellations des fonctionnaires paramilitaires, Après l’adoption de la Constitution, tous les corps militaires et paramilitaires avaient chacun, soit repris ses anciens attributs, soit adopté de nouveaux, à l’exception de la Garde de Sécurité Pénitentiaire. Ledit décret venait combler ce vide juridique en déterminant, sur la base de la loi 19
n° 013-98 AN portant régime juridique applicable aux emplois et aux agents de la Fonction Publique, les tenues et les galons des personnels de la sécurité pénitentiaire. Le Décret 96-191/PRES/PM/FPMA/ETOUR du 11 juin 1996 Il porte sur le Statut particulier du Cadre paramilitaire des personnels du cadre des Eaux et Forêts. Son contenu est assez bien rédigé mais toujours avec des failles permettant de se soustraire des obligations paramilitaires et de la discipline, seules garantes de la cohésion et de la déontologie. La loi n°013/98/AN du 28 avril 1998, Elle porte sur le régime juridique applicable aux emplois et aux agents de la fonction publique. L’article 245 stipule que « La présente loi abroge toutes dispositions antérieures contraires, notamment la Zatu n°AN VI-0008 /FP.PRES du 26 octobre 1988 portant statut général de la fonction publique, la loi n°50-60/AN du 25 juillet 1960, ensemble et leurs modificatifs ». Concomitamment le statut particulier des personnels du cadre paramilitaire des eaux et Forêts est aussi abrogé. La loi n°019-2005/AN du 18 mai 2005, Elle porte sur la modification de la Loi n°013/98/AN du 28 avril 1998 portant régime juridique applicable aux emplois et aux agents de la fonction publique. Cette loi dit et c’est important, que « …………Les textes d’organisation des emplois paramilitaires (et non corps paramilitaires) peuvent, au regard des spécificités desdits emplois, prévoir d’autres sanctions disciplinaires. On entend par emplois paramilitaires, les emplois de la Police nationale, des Douanes, des Eaux et Forêts et de la Garde de Sécurité Pénitentiaire. Pour la première fois les textes ont cité nommément les emplois paramilitaires mais pas les corps paramilitaires. » IV. Conclusion En parcourant l’ensemble de ces documents, il persiste un vide juridique concernant la création de certains corps paramilitaires. Si la Police nationale et la Garde de Sécurité Pénitentiaire ont été créés par des textes, les autres tels que la Douane et les Eaux et Forêts sont restés accrochés aux textes coloniaux actuellement rendus caduques puisqu’abrogés. Le ‘’Corps des Eaux et Forêts’’ subtilement remplacé par le ‘’Cadre paramilitaire des Eaux et Forêts’’ avec des corps à l’intérieur est une vision et une démarche qui sont plus administratives et ne désignent aucunement et de façon claire un corps paramilitaire. Avant les indépendances les personnels des Eaux et Forêts étaient sous commandement des cadres français affectés dans les colonies. La structuration et le fonctionnement dans l’ex-AOF furent calqués sur le modèle français. Au cours de nos recherches aucun texte ne vise un quelconque texte portant création d’un corps des Eaux et Forêts. 20
IMPERATIFS MAJEURS 21
I. INTRODUCTION Le colonisateur en créant le corps des EF avait savamment perçu le danger que comportait le libre accès aux ressources naturelles surtout forestières, fauniques et piscicoles tant marines que continentales. Il décida de prévenir que de guérir et s’engagea tout de suite. Dans les années 1935, en exportant la même vision sur les états colonisés. Il faut remarquer que le terme environnement qui fait fureur aujourd’hui dans le langage de nos illustres experts ne date pas de nos jours puisqu’il fut pris en compte dans le décret du 4 juillet 1935 pour justifier l’intérêt et l’impératif à protéger notre environnement. Si déjà en 1935 la situation était perçue par le colonisateur alors que l’incidence de la population était encore assez insignifiante sur les ressources naturelles en termes de pression, comment devraient se comporter les forestiers au 21ème siècle où tous les indicateurs de stabilisation de nos ressources naturelles sont au rouge. Organisé en corps pour la première fois en 1289 il a fallu à la France 677 ans pour créer en lieu et place d’un corps paramilitaire des Eaux et Forêts, un Office des Forêts (EPIC) en 1966. Le corps des Eaux et Forêts est définitivement rentré dans le domaine commercial et industriel. Donc six siècles mis pour que les français arrêtent la ‘’protection rapprochée’’ des forêts de la faune et des eaux, action ici appelée ‘’répression aveugle’’. II. IMPERATIFS MAJEURS 2.1. Les ‘’Eaux et Forêts’’, corps impeccablement réorganisé L’état de santé d’une institution dépend de la volonté du premier responsable. Le corps des Eaux et Forêts aura parcouru au moins dix (10) cabinets ministériels de 1955 à nos jours. Chaque ministre en son temps y a apposé ses marques tantôt en phase avec les vœux des personnels, tantôt en contradiction totale de ces vœux. Pour le moins que l’on puisse dire, c’est que la période révolutionnaire aura été de loin celle de l’éveil du corps et de son affirmation plus que jamais au plan national et sous régional. Des ministres se sont illustrés pour une dynamique nouvelle du corps des Eaux et Forêts et il importe de les citer ici. 2.1.1. Anatole TIENDREBEOGO Il a été le ministre le plus amoureux des honneurs militaires et était fier du corps des Eaux et Forêts. Il créât ainsi la Division du Cadre Paramilitaire des Eaux et Forêts avec à sa tête un chef de Corps qui, pour la première fois recevra le commandement aussi publiquement à la place de la révolution devant plusieurs ministres et des corps diplomatiques. Le défilé qui a sanctionné cette prise d’armes, sera marqué par la présence des autres corps militaires et paramilitaires. Il voulu d’un corps paramilitaire à la hauteur de ses ambitions mais hélas les forestiers eux-mêmes en avaient décidé autrement par leur jeu favori, équilibrisme entre paramilitaire et de développement rural. Il est reparti laissant le corps en l’état. 2.1.2. Salif DIALLO 22
Il était Ministre d’Etat, puissant politiquement et pouvait à l’époque faire rayonner le corps comme il l’entendait. Il était aussi fier du corps mais s’était vite rendu compte que le vers était dans le fruit. Sous lui en tout cas il y eut un véritable commandement par la création de la DGEF avec toutes les prérogatives qui s’imposaient pour qu’un corps s’affirme aisément. En 1996 il soutiendra avec vivacité la pépinière du corps, l’Ecole Nationale des Eaux et Forêts de Dindéresso, qu’il a pu faire fonctionner en tant qu’Etablissement Publique de l’Etat sans s’en référer à un statut d’érection. Il a été l’un des responsables qui s’était inquiété du port désordonné des galons au sein du corps. Avec un entourage politique encombrant, il a fini par jeter l’éponge et est parti sans apporter au corps le remède qu’il fallait. 2.1.3. Bongnéssan Arsène YE Il était médecin-militaire (Médecin-Colonel) de formation et connaissait bien les attitudes à observer pour venir à bout des dérives au sein du corps. Il a emboité le pas de son prédécesseur avec une volonté de voir mieux émerger ce corps. Il fit également de la DGEF une structure forte avec en plus des Directions techniques la création de la Division du Corps Paramilitaire des Eaux et Forêts chargée des aspects militaires. Ce fut un centre névralgique du commandement avec aussi toutes les prérogatives qui s’imposent. Malheureusement rien n’y fit car des querelles politiques auront raison de la redynamisation du corps. 2.1.4. Laurent SEDOGO Aussi militaire (Colonel) de formation, Laurent SEDOGO, à son arrivée avait donné tant d’espoirs aux forestiers. Il fera organiser (les troisièmes du genre) des journées de réflexions à Bobo-Dioulasso. Les forestiers s’attendaient à une véritable réforme du corps mais hélas le résultat fut décevant. En finalité, ces réflexions auront eu pour seul but de faire freiner une grogne des militaires retraités en les affectant au sein du corps. Néanmoins, à ce ministre il faut reconnaitre le pas géant franchi avec le corps par l’élaboration du texte le plus important pour un corps militaire ou paramilitaire, le Règlement de Discipline Générale et Code de déontologie du Corps des Eaux et Forêts adopté en conseil des ministres par le décret n°2006- 615/PRES/PM/MECV/DEF/MFB /MFPRE /SECU du 12 décembre 2006. Ce décret en tout état de cause aurait du résoudre les problèmes d’indiscipline généralisée qui gangrénaient le corps et limiter les dérives identitaires auxquelles nous assistons malheureusement aujourd’hui. Signé par le Chef de l’Etat (officier des forces armées nationales), le Ministre de la Défense, le Ministre des Finances et du Budget, le Ministre de la Sécurité (officier supérieur des forces armées nationales) le Ministre de la Fonction Publique et de la réforme de l’Etat et le Ministre de l’Environnement et du Cadre de Vie (lui-même officier supérieur des forces armées nationales) ce décret n’était pas un fruit du hasard. Chacun des signataires avait un ou des conseillers surtout le ministre de la défense qui avait le chef d’Etat Major Général des Armées à ses côtés pour le conseiller. Donc, ce sont les premiers responsables politiques et militaires qui ont apposé chacun sa signature sur ce texte. C’est donc être un véritable naïf que de croire que tous ces hommes d’Etat vont signer aveuglément des textes sans s’en référer à des analyses préalables bien cadrées. Son application pose problème au sein du corps et pourquoi ? Il est donc certain que si le ministre actuel décide de faire quelque chose, ‘’des indécrottables manœuvriers’’ demanderont de nouvelles journées de réflexion. Mais vouloir mener des concertations autour de l’avenir de ce corps serait un autre divertissement dont l’aboutissement 23
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