Gagner en maturité pour tenir la cadence - Supply Chain Magazine n 115
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ENQUÊTE Aér on a u tiq u e Gagner en maturité pour tenir Raccordement des ailes au fuselage du 1er A330neo ©AIRBUS-P. MASCLET la cadence La montée en charge de certains programmes aéronautiques exige un maximum de performance bien au-delà des géants du secteur, avionneurs ou autres. Les maillons de toute la Supply Chain sont tenus de monter en maturité, quitte à multiplier les chantiers imbriquant des enjeux de production, d’organisation, de planification ou de collaboration. C’est la condition sine qua non pour participer au boom du secteur, et à sa consolidation. 82 N°115 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JUIN 2017
gression annuelle de 29 %, de 252 à 325 M€ de CA. L’emballement reste pourtant à venir, notamment grâce au contrat signé en janvier avec Spirit Aerosystems pour 600 M$ sur 10 ans. D’ici mars 2020, l’ETI compte doubler son activité ! Philippe « Armandon, R amp-up » : le thème de L’augmentation conjointe Directeur du la montée en cadence a des volumes, du rythme Conseil de émaillé en VO l’interven- et des exigences l’activité Aeroline tion de Fabrice Brégier Les volumes à produire augmentent, de Sopra Steria lors de la présentation des mais c’est aussi le rythme qui accé- ©SOPRA STERIA résultats 2016 d’Airbus lère, indique Clément Pouzoulet, Res- Group, dont il est le N°2 ponsable de la planification centrale en tant que DG délégué et PDG de la chez Figeac Aero. Il prend l’exemple branche Aviation commerciale. Sur un du très long courrier A350 : « 15 ont an, le géant européen a livré 688 appa- été produits en 2015, mais ce sera 10/ reils commerciaux, soit + 8 %. C’est sa mois en 2018, avec un assemblage en Jean-François Michel, 14e année d’augmentation consécutive, 10 semaines, contre 14 pour l’A330 Fondateur et cela va durer vu les 6.874 avions au dont il est l’héritier ». Idem pour le et Associé carnet de commandes fin 2016, pour moteur Leap, pour lequel le fournisseur de Freelog un montant dépassant 1.000 Md€. a été retenu par Safran il y a 3 ans. D’autres s’y ajouteront lors du Salon Les 1ers exemplaires ont volé dès 2016, du Bourget, de même que pour Boeing, mais 1.100 devraient être produits dès dans une situation similaire. Dans ces 2018 (voir encadré ci-dessous). Afin ©C.POLGE conditions, leur rivalité commerciale se d’augmenter et sécuriser ces cadences, joue aussi en termes de délais de livrai- les donneurs d’ordre élèvent leur son. D’où l’accélération des cadences, niveau d’exigence. « Beaucoup nous notamment dans le match A320 vs. challengent désormais sur un taux de B737 (voir encadré p. 87). livraison à temps de 100 % », note- Des livraisons et Le grand saut pour Leap des perspectives record Le moteur Leap (Leading Edge Aviation Propulsion) est développé par CFM (JV entre En 2017, Airbus vise plus de 700 livrai- Safran Aircraft Engines et General Electric). Plus économe en carburant et plus vertueux en sons, à quelques encablures du record termes d’émission, il va équiper nombre de moyen-courriers, dont une partie des nouvelles de 765 établi par l’Américain en 2015. déclinaisons des A320 et B737, ou le futur C919 de l’avionneur chinois Comac. Son prédé- Reste que sur les 20 ans à venir, l’évo- cesseur, le CFM 56, avait mis 30 ans pour atteindre les 1.800 moteurs produits/an. Entré lution du trafic passagers laisse augurer en service mi-2016, avec une centaine de livraisons, le Leap sera produit à 500 exemplaires plus de 35.000 mises en service dans cette année, et 1.100 dès 2018 ! ■ MR le monde, selon une projection établie par Deloitte mi-2016. Le contexte est très favorable, et l’industrie française y prend sa part : le bilan annuel du Gifas (Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales) indique que le secteur a franchi le cap des 60 Md€ de CA en 2016, en augmentation de 4,1 %. Certains fournisseurs aux savoir-faire bien positionnés profitent à plein de cette dynamique, et affichent une ©CYRIL ABAD/CAPA PICTURES/SAFRAN croissance très supérieure : + 23 % en moyenne depuis 4 ans pour Figeac Aero, spécialiste des éléments de struc- ture et des pièces de moteurs, trains d’atterrissage et autres sous-ensembles. Et l’accélération s’y confirme : l’exer- cice clos fin mars marque une pro- JUIN 2017 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE ■ N°115 83
ENQUÊTE Aér on a u tiq u e ©AIRBUS-P.MASCLET Le 1er A330neo entame son assemblage final sur le site de Toulouse - sept 2016 t-il, en soulignant l’équilibre à trouver SC de Michelin. Signe des temps : son étions attendus sur les indicateurs deve- entre ces nouveaux impératifs d’OTD profil automobile se retrouve chez le nus classiques dans le secteur, que tous (On Time Delivery), le développement directeur de la stratégie, le responsable ont dû mettre en place. En l’occurrence de stocks et la maîtrise du BFR. Un lean, ou le directeur de l’usine histo- l’OTD, qui est parti d’un point bas de point essentiel avec une telle crois- rique de Mecachrome. « Un des enjeux 77 % en moyenne pour finir à près de sance. est de converger vers les standards de 88 %, ou la non-qualité, qui a été qua- Pour augmenter sereinement la l’automobile, où le principe d’OTD à siment divisée par 2, en PPM. » Une cadence, Figeac Aero a lancé de nom- 99 ou 100 % remonte à 2 décennies progression qu’il salue tout en mesu- breux chantiers : structuration des pour les fournisseurs de rang 1 ou 2, rant l’écart avec les niveaux d’exigence fonctions support, sécurisation de la alors qu’un taux de 95 % était encore d’un Airbus vis-à-vis de ses fournis- Supply Chain interne, harmonisa- jugé acceptable dans l’aéronautique il y seurs de rang 1 (voir encadré p. 87). tion des SI ou lean management… a 2 ans », observe-t-il. Cette exigence Ce rapport d’étape souligne en tout cas Y compris des projets de planifica- d’excellence porte aussi sur la qualité, les disparités au sein d’une SC aéro- tion DDMRP ou de gestion de stocks généralement mesurée en nombre de nautique particulièrement hétérogène en VMI dont le déploiement pâtit de pièces livrées non-conformes, en PPM en termes de profil et de taille de ses la charge de travail par ailleurs (lire (voir l’interview p. 90). acteurs. Au risque pour certains d’être reportage p. 88). pris entre le marteau et l’enclume vu Des marges de progrès le niveau d’exigence de leurs clients et Des fournisseurs florissants chez les plus petits acteurs celui de performance de leurs fournis- mais sous pression Preuve que tout le secteur a en tout cas seurs, à en croire Philippe Armandon, Les préoccupations sont similaires chez adopté ces indicateurs : ils étaient au Directeur du Conseil de l’activité Aero- Mecachrome, également impliqué dans cœur du programme « Performances line de Sopra Steria. Un cas de figure les programmes-clés du secteur. « La Industrielles 1 » piloté par l’associa- qu’il illustre par les difficultés rencon- Supply Chain aéronautique est sous tion Space, sous le patronage du Gifas. trées par Zodiac Aerospace il y a 2 ans pression car tout l’environnement accé- « Destiné à accompagner la montée pour fournir en temps et en heure les lère, avec des niveaux d’exigence de en maturité des plus petits acteurs de sièges aux lignes d’assemblage d’Air- plus en plus élevés, confirme Vincent la chaîne, il a concerné 400 PME et bus ou Boeing. Avec des retards de Houette, Directeur Supply Chain du TPE (50/50) entre le début 2014 et la livraison aux compagnies aériennes à groupe. L’enjeu est à la fois de suivre fin 2016, dans le cadre de 69 grappes la clé, d’où les remontrances publiques la cadence imprimée par les clients en menées par un donneur d’ordre », pré- du 1er et l’introduction d’un challenger améliorant nos performances et de tra- cise Christophe Cabaret, Directeur des chez le 2e. Mais l’exemple illustre égale- vailler sur la maîtrise des délais et de la Opérations de Space. Au programme, ment les difficultés d’un acteur victime qualité, en interne et avec nos propres avec l’appui de 45 consultants sélec- de son succès et d’un carnet de com- fournisseurs ». Et comme 80 % de l’ac- tionnés par l’association : des échanges mandes trop fourni, sur fond d’acqui- tivité de Mecachrome relève de l’aéro- collaboratifs sur les problématiques de sitions multiples et de réorganisation nautique, à parité entre aérostructures planification des ressources de produc- de l’entreprise. Le tout aura mis plus et pièces moteur, la montée en charge tion MRP2, de qualité et méthodes, de de 18 mois à se résorber, et conduit se traduit dans la progression du CA : il lean management ou de gestion des l’entreprise dans les bras d’un repre- est passé de 315 à 341 M€ entre 2013 et approvisionnements. « A l’entrée, un neur, en l’occurrence Safran. A bon 2015, puis à 400 M€ en 2016, et le cap questionnaire avait permis d’établir entendeur, salut ! des 500 M€ se profile dès 2018. pour chacun un indice de maturité Ici, l’accent est mis sur l’amélioration reprenant ces thématiques, assorties Prendre le relais de de la performance en travaillant sur les de 4 niveaux de maîtrise : fondation, l’accompagnement fournisseurs process, l’organisation ou le pilotage de basique, maturité et excellence. Cela a Ces écueils, Figeac Aero et Mecachrome l’activité. C’est l’objet de la « Roadmap permis de préciser les sujets prioritaires tâchent à leur échelle de s’en prémunir, Supply Chain » élaborée sous la gou- dans chaque grappe, et aux entreprises notamment en se préoccupant de la verne de Vincent Houette depuis son de mieux cerner les sujets à approfon- montée en maturité de leurs fournis- arrivée mi-2016 en provenance de la dir par la suite, poursuit-il. Mais nous seurs. Le 1er s’est mobilisé sur le sujet SUITE PAGE 86 84 N°115 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JUIN 2017
ENQUÊTE Aér on a u tiq u e Aéron SUITE DE LA PAGE 84 en s’inspirant de la démarche engagée sant à l’autre bout de la chaîne. Dans ragée par les avionneurs et les grands il y a plus de 5 ans par Airbus avec ce dernier cas, il y a des arbitrages à fournisseurs, qui y voient la perspec- son programme SQIP (Supply Chain & faire, sans la possibilité de connaître le tive d’une réduction des risques, avec Quality Improvement Program), dont retard induit in fine par les différentes un nombre plus resserré d’acteurs la logique a ensuite essaimé chez la options : privilégier les livraisons de disposant de reins plus solides pour plupart des acteurs de 1er plan : des pièces à un grand donneur d’ordre sur augmenter les cadences. Des acteurs équipes dédiées assurant un accom- la fin de la chaîne, ou à un autre plus comme Figeac Aero ou Mecachrome y pagnement structuré des fournisseurs petit beaucoup plus en amont ? », inter- ont pris leur part ces dernières années, pour améliorer leur performance. roge Jean-François Michel. Difficile le 1er en reprenant Auvergne Aéronau- « Depuis 3-4 ans, Figeac Aero compte de distinguer la meilleure solution, la tique en novembre dernier, notam- une équipe baptisée Supplier Perfor- moins perturbante pour le reste de la ment. Après plusieurs opérations en mance Manager qui monte des projets chaîne et pour la livraison de l’avion 2012 et 2014, le 2e a opté pour une for- avec certains acteurs de notre propre dans les temps au client final. mule intéressante qui concourt à cette Supply Chain, notamment dans la simplification : la création d’une JV perspective de montée en cadence. Elle Mieux interpréter les signaux entre Mecachrome et Aubert & Duval, compte aujourd’hui une demi-douzaine S’agissant d’une Supply Chain qui une filiale de pointe du groupe Eramet. de personnes », fait valoir Clément Pou- fonctionne pour l’essentiel en flux Baptisée MKAD, celle-ci s’est dotée de zoulet. Et des diagnostics de maturité tirés, un des axes d’amélioration doit son propre site de production, inauguré sont aussi bien établis en interne, pour porter, selon lui, sur l’expression de la à l’automne dernier, où elle intègre les les différents sites, que chez certains demande et la qualité du signal com- spécialités de chacun : la forge et l’usi- fournisseurs avec plan de progrès et de muniqué aux fournisseurs, et répercuté nage. En l’occurrence pour produire de suivi à la clé. Chez Mecachrome, on aux maillons suivants. « Les pistes à grandes pièces en titane, notamment souligne aussi le volontarisme d’Air- explorer reposent moins sur l’évolution pour l’A350. La formule permet notam- bus pour aiguillonner la maturité des des outils que sur celle des pratiques. ment de réduire le cycle de production, industriels de l’aéronautique. Pas seu- L’émetteur du signal doit se préoccuper d’une semaine sur un total de 2 mois. lement en les challengeant sur l’OTD, de la justesse de l’interprétation qui va Même des acteurs de moindre impor- mais en leur consacrant du temps et en être faite par son interlocuteur. Le tance participent à cette consolidation, des ressources. « Airbus s’adresse à un récepteur doit de son côté s’interroger à l’image des 3 PME familiales qui ont volant gérable de ses fournisseurs de sur la bonne compréhension du signal joué la carte de l’intégration pour for- rang 1 ou 2, et nous demande de cas- qui arrive dans ses SI et sa traduc- mer WeAre Aerospace, en mars 2016. cader la démarche auprès des nôtres », tion côté production », explique-t-il. L’ensemble affichait 110 M€ de CA fin indique Vincent Houette. On notera que le sujet figure juste- 2016, mais avec l’ambition d’appro- ment parmi les axes de travail du plan cher les 300 M€ en 2020. A la fois en Un mode de collaboration « Performances Industrielles 2 » de décrochant de nouveaux marchés et en inadapté ? Space, lancé à l’occasion du Bourget. continuant d’élargir le cercle puisque Quand bien même la maturité est en Autre point positif à souligner, d’après 2 acteurs supplémentaires ont rejoint marche, la phase de ramp-up risque de Jean-François Michel : l’existence de l’initiative fin mai. La nouvelle société mettre en lumière certains problèmes la plate-forme AirSupply comme canal s’est dotée d’une équipe réduite en cen- patents de la Supply Chain aéronau- unifié de circulation de ces informa- tral, mais y figure en bonne place une tique, selon Jean-François Michel, tions sur la demande et ses évolu- direction de la performance, confiée à Fondateur et Associé du cabinet Free- tions. D’autant que celle-ci est sur le un ancien responsable du développe- log. L’un d’entre eux, selon lui, est point d’évoluer, nous confie-t-on chez ment fournisseur chez Latécoère (voir qu’il s’agit d’une industrie qui conti- son maître d’œuvre, BoostAerospace. encadré p. 87). nue à reposer sur des collaborations Jusque-là, sa véritable utilisation était Montée en maturité et consolidation point par point entre ses acteurs : un réservée aux grands donneurs d’ordre, semblent devoir aller de pair dans 1er produit un composant, le transmet leurs fournisseurs ne s’y connectant la Supply Chain aéronautique, sous à un 2e qui en assure le traitement de que pour récupérer les informations. Le le regard bienveillant des donneurs surface, et le transmet à son tour à un principe de mise à disposition est revu d’ordre. Mais mener les 2 de front autre en charge d’un sous-ensemble… pour que les autres acteurs puissent à n’a rien d’une sinécure. La consolida- ainsi jusqu’aux grands fournisseurs de leur tour l’utiliser comme canal à des- tion ouvre peut-être la perspective de rang 1 et aux chaînes d’assemblage des tination de leurs propres fournisseurs. plus gros marchés, le ramp-up laissant avionneurs. « Les maillons de la chaîne augurer des opportunités, mais elle ne se connaissent qu’aux charnières, et La maturité en mode consolidé ajoute aussi une couche de difficultés c’est un problème quand survient un Reste qu’une autre dynamique est à supplémentaires pour gagner en per- aléa, qu’il s’agisse d’un réordonnance- l’œuvre pour simplifier les probléma- formance, avec de nouveaux sites, des ment sur une ligne d’assemblage d’Air- tiques d’aléas et de circulation d’infor- organisations à revoir ou des SI d’au- bus, ou d’un approvisionnement en mations au sein de la Supply Chain : sa tant plus hétérogènes. ■ matières premières qui s’avère insuffi- consolidation. Elle est d’ailleurs encou- MAXIME RABILLER 86 N°115 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JUIN 2017
Space met les questions WeAre Aerospace joue la carte de demande et de signal au programme de l’intégration Créée il y a 10 ans, l’association a d’abord soutenu Associées depuis plusieurs années, les PME Chatal, les initiatives des grands du secteur pour faire pro- Farella, Espace et Armor Meca ont décidé de consti- gresser tel ou tel de leurs fournisseurs. « A partir de tuer un groupe industriel aéronautique fin 2015, bien- 2011, la formule a pris un tour collaboratif qui s’est tôt rejoint par Prismadd, spécialiste de la fabrication illustré avec le 1er plan Performances Industrielles, additive métallique. L’ensemble réunit une large palette entre 2014 et 2016. A charge pour nous de mobi- de spécialités du tournage/fraisage au traitement de liser les consultants qui ont accompagné le travail surface, jusqu’à l’assemblage, au service des grands des 69 grappes, regroupant une demi-douzaine de donneurs d’ordre de l’aéronautique, notamment pour PME/TPE autour d’un donneur d’ordre », indique leurs programmes en ramp-up. Dans la foulée de la Christophe Cabaret, Directeur des Opérations de création de WeAre au printemps 2016, Patrick Gauthié Space. Les progrès ont été significatifs en termes a été recruté pour créer en central une direction de la ©SPACE de respect des délais (+ 10 points sur la moyenne performance. Ancien Responsable du Développement d’OTD), comme de qualité (non-conformité divisée par 2). Sans Christophe Fournisseur chez Latécoère, il avait alors participé à compter la satisfaction affichée par plus de 90 % des partici- Cabaret, différents programmes d’accompagnement, dont les Directeur pants. Avec « Performances Industrielles 2 », dont le lancement premiers de Space mettant l’accent sur le lean mana- des sera officialisé lors du Bourget, l’accent sera mis sur la gestion de opérations gement, ou PI1 comme Responsable d’une grappe. la demande et la qualité du signal. « Beaucoup de PME gérant de Space « Une des entreprises à l’origine de WeArearospace mal le lien entre leurs opérations et l’évolution de la demande à avait aussi participé à PI1, ainsi qu’au programme Sqip moyen et long terme, un des axes porte sur les processus de PIC d’Airbus, et ses performances cadraient avec les niveaux (Plan Industriel et Commercial) et de PDP (Programme Direc- d’excellence désormais exigés. La progression affichée teur de Production). Pour ces fournisseurs, Il s’agit d’intégrer et à l’échelle de WeAre est également à souligner : vis- d’analyser les prévisions en provenance de leurs différents don- à-vis d’Airbus, l’OTD atteint 98 %, contre 93 % un an neurs d’ordre, afin de lisser la charge et de mieux maîtriser leur auparavant », se félicite-t-il, en mentionnant le travail activité », souligne Christophe Cabaret. Le tout exigeant des mené sur la standardisation du management de projet, donneurs d’ordre de communiquer des prévisions plus précises ou l’homogénéisation des méthodes et des outils qui et qualitatives. permet de consolider la performance des différentes Un autre axe portera sur l’élargissement du dialogue entre PME structures sur la base des mêmes éléments. Le tout et donneurs d’ordre à des sujets plus opérationnels, au-delà sous le contrôle de la direction de la performance, qui des échanges entre service commercial et direction achats. centralise désormais les commandes et les relations « L’idée est de mettre en relation leurs bureaux d’études, leurs avec les clients sur les plans opérationnel et commer- équipes logistique ou qualité, car il y a d’importants gisements de cial, comme pour la résolution des problèmes. Et même productivité dans l’approfondissement des relations, au-delà de si l’OTD approche l’excellence, il veut sortir d’un mode l’amélioration de la performance interne », selon lui. Egalement de gestion correctif et déployer des outils d’anticipation programmé sur 3 ans, PI2 vise une cinquantaine de grappes pour passer en mode préventif, et atteindre les 100 % regroupant 300 PME, dont 50 % de nouvelles. ■ MR demandés par Airbus. ■ MR Airbus et Boeing dans la course aux livraisons Sur le segment majeur des moyen-courriers monocouloir, le plus important en volume et le plus profitable, la rivalité fait rage entre les déclinaisons de l’A320 d’Airbus et celles du Boeing 737. Les annonces d’aug- mentation de cadence se multi- BOEING 737 plient, l’Européen visant 2 avions/j 57 en 2019 (voir ci-contre). Il a même /MONTH IN 2019 sondé certains fournisseurs sur un 47 53 /MONTH IN 2017 /MONTH IN 2018 scénario de 63 livraisons/mois en 2020, à partir de ses lignes d’as- SOURCE : MAZARS, 2016 COMMERCIAL AEROSPACE STUDY semblage d’Hambourg, Toulouse, FEBRUARY 2014 OCTOBER 2015 Mobile (USA) et Tianjin (Chine), OCTOBER 2013 OCTOBER 2014 JANUARY 2016 par ordre de capacité. ■ MR 46 /MONTH IN 2016 60 /MONTH IN 2019 AIRBUS A320 JUIN 2017 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE ■ N°115 87
ENQUÊTE Aér on a u tiq u e Figeac Aero Structuré pour la croissance L’ETI décolle avec les programmes en ramp-up. Sa croissance va continuer d’accélérer pour doubler le CA d’ici 3 ans, avec un objectif de 650 M€ en nication et de sécuriser la SC interne 2020. Un challenge en termes d’organisation ou de planification. en travaillant sur un même modèle et des informations partagées, via un outil C réé en 1989, Figeac Aero change fourni par Agilea. L’objectif est de concilier l’amé- de dimension. La dynamique lioration de l’OTD et la maîtrise des stocks et du s’est engagée en 2011 avec l’ou- BFR, en intégrant différents facteurs de variabi- verture d’un site proche de son client lité, pas seulement internes », résume Clément Stelia en Picardie, puis en zone à Pouzoulet. Ce système auto-apprenant fait évo- bas-coûts en Tunisie. Elle se poursuit luer le modèle dans le temps, avec des résultats depuis 3 ans avec des implantations à probants en termes d’optimisation de stocks et Saint-Nazaire, aux USA, au Mexique d’OTD, ou d’absorption de la variabilité. Une tren- et au Maroc. Sans oublier l’acquisition taine de personnes ont été formées dans le cadre d’Auvergne Aéronautique fin 2016. En de quelques projets, mais le déploiement reste parallèle, le groupe s’est structuré en mesuré vu les changements que cela implique, et BU par spécialités métier, dotées de faute de temps et d’énergie à y consacrer. services support : logistique, méthodes, qualité, planification... Cette dernière Le VMI au programme fonction s’est également structurée en Au-delà de cette planification interne, une autre ©FIGEAC AERO central pour accompagner la crois- piste est d’actualité pour éviter les ruptures d’ap- sance et le développement internatio- provisionnement des chaînes d’assemblage en Clément nal, et mieux répondre aux exigences des clients aval : un principe de stocks consignés sur le site du Pouzoulet, en matière de délais ou de qualité. Responsable Planification Centrale Mieux planifier en DDMRP Figeac Aero « Nous avons dépassé 95 % d’OTD, mais dans le même temps les niveaux exigés tendent vers 100 %. Or cette dernière marche est la plus dif- ficile », note Clément Pouzoulet, Responsable de la Planification Centrale de Figeac Aero. Il faut dire que ses produits gagnent en complexité, et en ajoutent en interne en impliquant plusieurs BU, sur différents sites. Une des pistes, initiée en cen- tral mi-2015, relève du DDMRP (Demand Driven Material Requirements Planning). L’approche a d’abord été adoptée pour un plancher assemblé en Picardie, avec des pièces complexes en pro- venance de Figeac, et d’autres plus élémentaires de Tunisie. « L’enjeu est de fluidifier la commu- Figeac Aero en bref ■ Production de pièces de structure en alliages légers et métaux durs, de pièces de moteurs, de trains d’atterrissage et de sous-ensembles ■ Participe entre autres aux programmes A320 et A350 ou au moteur Leap ■ Fournisseur R1 d’Airbus et de ses partenaires comme Stelia et Latécoère,ou Safran Aircrafts Engine Sur 7.500 m², l’Usine du Futur joue la carte de l’innovation numérique et de l’automatisation ©FIGEAC AERO 88 N°115 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JUIN 2017
client, gérés et pilotés par Figeac Aero. Cette for- inauguré en avril au sein du site historique de mule de VMI (Vendor Management Inventory) est Figeac. L’enjeu est là-aussi d’améliorer la perfor- explorée avec Stelia depuis 2016 et doit se mettre mance en termes de délais et de qualité, et de en place cet été pour plusieurs produits référencés développer l’activité d’assemblage tout en rédui- relevant de programmes à fort volume. L’avantage sant le BFR de plus de 2 j de CA en année pleine. : plus de flexibilité que le principe de commandes assorties d’OTD, sous réserve de bien maîtriser les A l’heure de l’Usine du Futur niveaux de ces stocks de produits finis. Sur ce même site et dans un esprit d’innovation plus poussé a été mis en route à l’automne der- Innover sans perdre la maîtrise nier un bâtiment labellisé « Vitrine de l’Industrie Si ces innovations procèdent par touches, c’est du Futur ». Figeac Aero a investi 35 M€ dans ce aussi pour ne pas risquer de déstabiliser la SC projet qui met l’accent sur le numérique et l’au- interne et les finances de l’entreprise. Surtout tomatisation afin de produire mieux et plus vite. que d’autres projets sont à l’œuvre, comme la Notamment les pièces de carter du moteur Leap transition des SI engagée en 2015, qui mobi- pour lequel le groupe a remporté 2 contrats long lise jusqu’à 40 personnes. Un nouvel ERP est terme de 500 et 40 M$ avec Safran. A la clé : des en déploiement jusqu’en 2018, avec l’opportu- pièces 20 % moins chères à produire, en 2 fois nité de revoir certains process et outils métier moins de temps. De nouveaux développements qui gravitent autour. Figeac Aero a choisi une sont déjà à l’étude, comme le déploiement de solution d’IFS, mieux adaptée à sa taille et à son cobots d’ici la fin 2017, ou de chariots automati- organisation multisite, qui devrait aussi contri- sés géoguidés. ■ MR buer à fiabiliser la logistique et les flux. L’heure est aussi au lean management, qui a d’abord concerné l’assemblage, puis la produc- tion. Un pôle central s’est mis en place sur le sujet début 2017, et la démarche a présidé à l’organisation d’un nouvel atelier d’assemblage JUIN 2017 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE ■ N°115 89
ENQUÊTE Aér on a u tiq u e Vincent Houette, Directeur Supply Chain de Mecachrome « Mieux fiabiliser les engagements » Dédié à 80 % à l’aéronautique, Mecachrome travaille surtout en direct avec sur des questions court terme, liées Airbus et d’autres avionneurs, ou pour de grands ensembliers comme Stelia ou à d’éventuels aléas. Il s’agit de bâtir Safran. Depuis mi-2016, Vincent Houette concourt à améliorer la performance du une relation plus axée sur l’anticipa- groupe, avec un accent sur la planification et le pilotage de la demande. tion, où la Supply Chain intervient comme pilote de la demande afin de Supply Chain Magazine : Quels sont la stabiliser. A charge pour les ateliers de prendre les axes de votre Roadmap et tenir les engagements en fonction des capa- Supply Chain ? cités de production, la SC devenant l’interlocu- Vincent Houette : Ce plan élaboré à teur-clé du client. la rentrée 2016 vise à structurer des process et des modes de fonction- SCMag : Vous parlez de pilotage nement plus homogènes au sein du de la demande… groupe, dont l’appareil de production V. H. : Il s’agit de mieux la mesurer et l’anticiper. s’est élargi avec les différentes acqui- Ce n’est pas simple vu le nombre de programmes sitions menées depuis 2012. Il compte en ramp-up, ou en ramp-down [ NDLR comme 10 sites en France et 4 à l’internatio- l’A380 ]. Sans compter l’évolution du mix entre nal (Canada, Maroc, Tunisie et Portu- différentes versions comme pour l’A320, dont la gal). L’accent est mis sur la planifica- nouvelle motorisation Neo prend le pas sur l’an- tion pour mieux gérer les capacités et cienne Ceo. Certes, la circulation du signal béné- gagner en efficacité. Les principaux ficie de canaux plus intégrés, comme la plate- ©MECACHROM axes de travail portent sur la conduite forme AirSupply. Mais reste à améliorer la qualité du PIC (Plan Industriel et Commer- de ce signal. L’idée est d’établir les prévisions de la cial), le pilotage de la demande, la gestion des demande via des process plus collaboratifs, sur la cycles de production et celle de la sous-traitance. base de jeux de données partagés avec les clients. Le tout s’accompagne d’un chantier sur la fiabi- Au-delà des questions d’outils, je crois à la néces- lisation des engagements qui tient du change- sité de créer des passerelles client/fournisseur ment culturel. pour travailler en commun à des scénarios de demande prenant en compte les différents aléas SCMag : Qu’entendez-vous par fiabilisation potentiels. Avec des KPI rendant plus visibles des engagements ? les variations de besoin, de volume, de timing… V. H. : Cela revient à s’objectiver en interne sur la Nous avons fait un benchmark sur le sujet avec possibilité de réaliser un programme de produc- l’automobile, et échangé en janvier avec Airbus. tion, donc de fournir au client une information Un pilote mené sur Toulouse a permis d’améliorer plus fiable sur la livraison. Jusque-là, la produc- significativement l’OTD en 3 mois. ■ tion et le client étaient en interaction régulière PROPOS RECUEILLIS PAR MAXIME RABILLER Un 4 PL à l’échelle internationale Fin avril, Mecachrome a retenu Gefco pour piloter les transports de tous ses sites. Jusque-là, chacun avait la responsa- bilité du sujet, d’où de multiples presta- taires et un faible levier sur l’optimisation des prix ou de la fiabilité. La réflexion se poursuit pour d’autres volets de la logis- tique physique, comme le stockage ou la gestion des conditionnements. ■ MR Pièces d’aérostructure ©MECACHROM fournies par Mecachrome, en aluminium ou titane. 90 N°115 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JUIN 2017
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