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Impacts des tiers lieux de fabrication sur la grande distribution Motivations, mutations et critique de l’intégration d’espaces de fabrication personnelle aux magasins de la grande distribution
Impacts des tiers lieux de fabrication sur la grande distribution Motivations, mutations et critique de l’intégration des espaces de fabrication personnelle aux magasins de la grande distribution Olivier DAIRIEN Sous la direction de Fabien EYCHENNE Mastère spécialisé Innovation by Design ENSCI - Les Ateliers 2014 3
Sommaire Rem erciem ents! 5! Résum é! 6! Abstract! 7! Introduction! 8! ère 1 partie : Le client, la grande distribution & le contexte socio- économ ique actuel! 14 ! Une relation quasi-unilatérale! 14 Vers un modèle plus complexe! 15! Un modèle bousculé par le web 2.0! 17! L’impact des réseaux sociaux! 18! La grande distribution à l’ère de l’économie collaborative! 20! 2ème partie : Du client consommateur au client collaborateur! 25 ! Initiatives et projets favorisant cette évolution! 25! Les tiers lieux de fabrication, terreau de cette évolution! 28! Typologie des futurs clients! 35! Le rôle du designer dans ce nouveau contexte! 36! Le designer concepteur et animateur de plate-forme 36 Le designer rassembleur 37 Le designer d’outils et d'objets ouverts 38 3 ème partie : Conditions et critiques d’un tel m odèle! 41 Les mutations internes à la grande distribution! 41! De nouveaux métiers 41 Des lieux horizontaux dans un contexte vertical 43 L’intégration au sein d’un écosystème 44 Les mutations externes! 45! Juridiction et responsabilité 45 Rentabilité pour la grande distribution 46 Ce modèle est-il souhaitable et désirable du point de vue de l’utilisateur ?! 47! Conclusion! 48 Bibliographie! 49 ! W ebographie! 49 ! 4
Remerciements ! Je tiens tout d’abord à remercier Fabien Eychenne pour son suivi, ses conseils ainsi que sa disponibilité et ce malgré la distance qui nous séparait physiquement tout au long de ce mémoire. Les échanges que nous avons pu avoir, m’ont permis de compléter et d’élargir de manière significative ma connaissance du monde des Fablabs et de l’écosystème dans lequel ils s’insèrent. J’ai d’ailleurs la chance de continuer à exploiter ce savoir dans le poste que j’occupe actuellement en tant que fabmanager du FabMake au sein de L’Institut de Recherche Technologique Jules Verne aussi lui en suis-je d’autant plus reconnaissant. Je souhaiterais de plus remercier tous les collaborateurs du magasin Leroy Merlin d’Angers avec qui j’ai eu la chance de travailler sur le projet de mise en place de l’Atelier. Merci à Karine Gaudinière et Adeline Paillier pour la confiance et l’autonomie qu’elles ont su m’offrir durant la durée de mon stage. Je remercie de plus Sophie, Cyril et Emmanuel pour leur motivation, leur soutien et la bonne humeur qu’ils ont su nous communiquer à moi et aux clients dans l’animation de cet espace. Mes remerciements vont aussi à l’ensemble de l’équipe du mastère IbD, Sylvie Lavaud, Katie Cotellon, Olivier Hirt et Muriel Zerafa, ainsi qu’à tous les intervenants qui ont participé à rendre cette formation aussi intéressante et riche et épanouissante tant d’un point de vue professionnel que personnel. Ce mastère m’a non seulement permis de découvrir et d’explorer les champs d’une discipline qui à mon sens est et restera un atout fort pour notre société. J’ai eu la chance de côtoyer les élèves et les enseignants qui font cette école et j’espère sincèrement continuer à être en contact avec eux durant les années à venir. Je conclus en remerciant l’ensemble des personnes qui auront lu ce mémoire jusqu’au bout et je l’espère apprécié. 5
Résumé La grande distribution est actuellement en quête de renouveau et d’innovation, le contexte ultra compétitif et l’essoufflement des stratégies consistant à conquérir de nouvelles parts de marché en s’implantant sur des territoires nouveaux poussent les acteurs de ce secteur à se démarquer en proposant de nouveaux modèles de consommation, services ou produits. Les enseignes de la grande distribution se confrontent de plus à une évolution des attentes des consommateurs en partie explicable par l’avènement du web 2.0 et de son aspect collaboratif, des réseaux sociaux et des communautés qui s’y fédèrent ainsi que de ce que l’on appelle généralement la consommation collaborative. Tous ces facteurs poussent la grande distribution à réévaluer et à modifier les interactions qu’elle a avec ses clients en faisant évoluer le rôle de ce dernier, à savoir celui de consommateur vers un mode de relation plus forte et plus complexe, celui de collaborateur. Dans ce contexte un mouvement intéresse particulièrement les enseignes de la grande distribution et plus précisément celles du secteur du bricolage, le mouvement des makers et du Do It Yourself. Une solution envisagée pour intégrer ce type de pratique aux services proposés par la grande distribution est la mise en place d’espaces type Fablab au sein ou à proximité des magasins. Dans le cadre de ce travail nous nous interrogeons sur l’impact que pourrait avoir ces tiers lieux de fabrication au sein des magasins et notamment sur leur capacité à faire évoluer la place du client, de consommateur à collaborateur. L’analyse du contexte actuel de la grande distribution ainsi que des différents facteurs sociaux-économiques qui l’affectent nous permet de mieux comprendre l’intérêt que suscite le développement de dispositifs de « mise en capacité à faire » du client pour ce secteur. En plaçant l’humain au cœur de ses préoccupations et en intégrant le consommateur en amont de la chaine de création de valeur économique, la grande distribution renforce le lien avec ses clients et établit avec eux de nouvelles interactions. L’étude des initiatives et projets qui favorisent cette évolution nous permet de dresser un panorama des différentes tentatives concrètes qui impulsent et accompagnent ce changement de paradigme. Le cas précis de Leroy Merlin et de son magasin d’Angers en est un bon exemple puisque la mission professionnelle inhérente à ce mémoire visait à la mise en place d’un laboratoire de fabrication en son sein. Cette analyse nous permet d’élaborer une typologie des futurs clients- collaborateurs et est l’occasion de s’interroger sur l’évolution du rôle de designer dans ce nouveau contexte. La mise en place de laboratoire de fabrication au sein des magasins nécessite des mutations internes et externes à la grande distribution afin d’en assurer la pérennité, si certaine paraissent triviales, d’autres représentent néanmoins des difficultés majeures pouvant freiner, voir empêcher le passage de client-consommateur à client- collaborateur. De plus, au vu des enjeux et des motivations qui poussent la grande distribution à s’engager sur cet axe de développement, il est important de s’interroger sur la légitimité et l’intérêt de tels espaces du point de vue de l’usager. En effet puisqu’il existe déjà des espaces dédiés à ces activités et que la philosophie de ces derniers est bien plus proche du mouvement maker que ne peut l’être la grande distribution, seule la force de diffusion et les moyens financiers des enseignes représentent un avantage notoire pour le particulier. Si ce mémoire n’a pas pour vocation de trancher définitivement la question, il souhaite apporter des éléments de réponse et d’analyse permettant de mieux comprendre les prémices de ce que pourrait être les futures relations et interactions entre le particulier et les enseignes de la grande distribution. 6
Abstract ! The mass retail sector is currently seeking for inovation and renewal, due to the higly competive environment and the shortness of extensive strategy, which is to win new market shares by moving into new territories, the actors of the retail sector are compeled to stand out by offering new consumption patterns, services or products. Large retailers are facing changes in consumers’ expectations. Those changes can be partly explained by the advent of Web 2.0 and its collaborative aspect, social networks and communities that unite them and what is generally called collaborative consumption.!All those factors lead large retailers to reassess and modify the interactions it has with its clients by modifying the role of the consumer into a role of collaborator which is a stronger and more complex relationship.! In this context a specific movement draws the attention of the retail stores and especialy those of the DIY sector, the movement of makers and DIY. One solution to integrate this type of practices into the services currently offered by supermarkets is the implementation of spaces as fablabs within or close to the shops. As part of this work, we wonder about the potential impact of these new kind of manufacturing places, located within stores and in particular their ability to change the place of the client from consumer to collaborator. The analysis of the current retail context and the several socio-economic factors affecting this sector allows us to better understand the interest in the development of features of "setting ability to" customer. By placing people at the center of its concerns and by integrating the consumer upstream of the economic value creation chain, retails strengthen the bond with customers and establish with them new interactions. The study of initiatives and projects which promote this development allows us to provide an overview of different concrete attempts that impulse and support this paradigm shift. The specific case of Leroy Merlin and its store in Angers is a good example, since the inherent professional mission to this master’s thesis was the establishment of a manufacturing laboratory within it. This analysis allows us to develop a typology of future customers and is an opportunity to question the changing role of the designer in this new context. The establishment of sustainable manufacturing laboratory in stores requires internal and external mutations for the mass distribution sector. If some of them seem trivial, others still represent major difficulties that may prevent the shift of customer client to collaborator client. Moreover, given the challenges and motivations that grows large retailers to commit to this axis of development, it is important to question the legitimacy and relevance of such spaces from the user’s point of view. Indeed there are already dedicated spaces for these activities and the philosophy of them is much closer to the Maker movement compared to the mass distribution spirit. The only benefits to the individual are the wide presence on the territory of mass retail stores and their financial resources. This memory is not intended to permanently settle the question, we only want to bring some answers and analysis in order to better understand the beginnings of what could be the future relations and interactions between the individual and the retail sector. 7
Introduction La grande distribution est un acteur clé de notre économie, elle suit et impulse les tendances de notre société, s’adapte à ses mutations. Dès sa création, la grande distribution a été vecteur d’innovation, elle a bouleversé les modes de consommation préexistants en instaurant le libre-service, en occupant des surfaces de vente de plus en plus grandes ou encore en instaurant le discompte, discount ou encore hard-discount, modèle économique basé sur de faibles marges sur les produits qui sont, par conséquent, vendus à bas prix mais en très grande quantité1. Selon l’enquête « Innovation générale » menée par l’Insee en 2002, près de 64% des entreprises de la grande distribution ont innové de 1998 à 20002.Tous ces changements ont profondément impacté notre société aussi bien du point de vue du client que de celui des producteurs et fournisseurs de ces espaces dédiés à la consommation. Philippe Moati, dans son ouvrage L’avenir de la grande distribution 3, décrit l’ouverture en 1916 aux Etats Unis du premier magasin en libre-service à Memphis sous l’enseigne Piggly Wiggly, ce modèle se développera durant les trente années suivantes outre-Atlantique et débarquera en Europe au début des années cinquante. Image 1: Le premier magasin Piggly-wiggly à Memphis, Tennessee. Source Clarence Saunders, via Library of Congress. Le libre-service permet de réduire les frais de fonctionnement en laissant au client la responsabilité de se servir lui-même. Ce qui nous paraît aujourd’hui familier et évident est pourtant un véritable changement dans le monde du commerce et affecte fortement les habitudes du consommateur. En effet, auparavant ce dernier était obligé de passer par le vendeur afin d’accéder aux biens de consommation. Ce nouveau mode de distribution permet en éloignant le vendeur de rapprocher le client du produit et ainsi de lui offrir une plus grande liberté facilitant l’acte d’achat. On peut facilement concevoir la gêne que le client pouvait ressentir lors du choix de ses produits et aussi le plaisir que celui-ci a pu trouver lorsqu’il a été en mesure de toucher, de manipuler, d’observer la marchandise mise à sa disposition à l’abri du regard et du jugement d’autrui, le vendeur en l’occurrence. En revanche ce modèle de distribution n’a pas, pour autant, supprimé purement et simplement le rôle du vendeur. Il l’a plutôt fait évoluer vers un rôle de conseiller de vente en retrait !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1!Définition de l’académie française. Vocabulaire de l’économie et des finances [en ligne]. Termes, expressions et définitions publiés au Journal officiel, 2012. 89 p. Disponible sur [Consulté le 2 Avril 2015). 2 Jean Baptiste Berry, Innovation et marchés de la grande distribution, Le commerce en France, décembre 2006.! 3 Philippe Moati, L’avenir de la grande distribution, éd. Odile Jacob, 2001, p. 13. 8
mais disponible pour toutes remarques, questions, renseignements. Ce dernier conservant un rôle de confiance auprès de la clientèle mais uniquement si cette dernière en émet le souhait. Une autre innovation majeure en terme de distribution a été l’évolution de la taille des points de vente. Au début du XXème siècle les points de vente se réduisaient dans la grande majorité à de petits commerces, épiceries de quartier, quincailleries, magasins de mode… Peu de temps après l’invention du libre-service le premier « supermarché » apparaît (toujours aux Etats Unis). En 1930 à New York, M. Cullen ouvre dans un ancien garage le supermarché King Kullen proposant des marchandises en vrac. En France c’est en région Parisienne qu’apparaît le véritable premier « supermarché » : l'Express- Marché de la société Goulet-Turpin, en 1958. Ces espaces de vente sont caractérisés par leur taille entre 400 et 2500m2 en France (cette définition varie quelque peu en fonction des pays), ils fonctionnent en libre-service et propose un large panel de produits à prédominance alimentaire 1 . Ces « supermarchés » ont ouvert la voie vers ce que l’on appelle communément des « hypermarchés » qui leurs sont supérieurs en superficie (plus de 2500m2) et disposent généralement de parkings de stationnement. Ces derniers conservent cependant le même mode de fonctionnement que leurs petits frères (libre-service, type de produits). Cette évolution de superficie a contribué à l’avènement de la consommation de masse en proposant un large choix de produits et en abaissant leurs prix, les rendant ainsi plus accessibles au grand public. Le client s’est vu proposer un choix encore plus varié de produits à des prix relativement bas et tout cela dans un seul et unique lieu. De ce fait la relation produit/consommateur a évolué vers une relation point de vente/client comme le précise George Chetochine dans son essai Quelle distribution pour 20202. Les acteurs de la grande distribution ont ainsi porté une attention particulière au bien-être de leurs clients au sein de ces espaces bien éloigné de l’atmosphère extrêmement compétitive et agressive qui régnait et qui règne encore entre les entités de ce secteur économique. Ces innovations liées aux concepts de vente et à l’organisation de ces espaces ont été accompagnées par la création des codes barres et de l’étiquetage systématique des produits, par la mise à disposition de caddies, la disposition des marchandises sur des linéaires, la création des lignes de caisses et des tapis roulants, la diversification et l’augmentation des promotions et de leurs supports, la création des cartes de fidélité et plus récemment l’introduction des caisses automatiques… Ces objets et services ayant tous pour objectif de faciliter la visibilité, le choix, l’attractivité et l’achat de la marchandise du point de vue du client. La grande distribution a été en mesure d’accompagner les changements sociétaux et d’instaurer de nouveaux modes de consommation de part son contact direct avec les clients qui constituent une part considérable des membres de notre société. Elle a su détecter les tendances et les attentes du consommateur et lui proposer les modes de distribution, les produits et les services adaptés. Dans une logique darwinienne, ce nouveau modèle s’est imposé, dans la majeure partie des cas, au détriment d’autres modèles de distribution. Ceux qui n’ont pas su saisir ces opportunités se sont bien souvent fait écraser par les géants que sont devenus les groupes de distribution. Ces derniers se mènent par ailleurs une guerre fratricide acharnée afin de rester en tête de la !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Définition de l’Insee. 2 George Chetochine, Quelle distribution pour 2020 ? Les nouveaux enjeux du commerce : Les hypermarchés vont-ils disparaître ?, éd. Liaison, 1998. 9
compétition. Toujours selon Philippe Moati 1 , dans ce contexte compétitif il existe différentes stratégies permettant de se démarquer de ses concurrents et d’accroitre sa puissance : des stratégies extensives qui consistent à conquérir de nouvelles parts de marché en s’implantant sur de nouveaux territoires et des stratégies intensives qui visent à se développer dans un territoire donné en augmentant son nombre de clients, son volume de vente et ses marges. Dans le cadre de cette seconde stratégie, il est particulièrement important de savoir innover et c’est sans doute parce que les stratégies extensives ont tendance à s’essouffler au bout d’un certain temps que les nouveaux modèles, services et produits suscitent un réel intérêt pour les acteurs de la grande distribution. Pour cela, ils portent une attention particulière aux différents mouvements sociétaux émergents et c’est dans cette optique que la grande distribution suit de près ce que l’on appelle l’économie collaborative mue dans une certaine mesure par la volonté du particulier d’être en prise direct avec ses modes de consommation. Un mouvement dans ce contexte est particulièrement observé, celui du DIY et plus spécifiquement celui en plein essor des Makers et des Fablabs. Cet intérêt est particulièrement fort chez les enseignes du bricolage de part leur cœur de métier. Le mouvement des Makers issu entre autre de la culture du DIY (« Do It Yourself » ou à la française « fais le toi-même ») est un mouvement qui promeut l’apprentissage par le « faire », en particulier en réutilisant, en réparant ou en détournant les objets de la vie quotidienne. Comme le font remarquer Véronique Routin et Mathilde Berchon dans l’article « Maker : Faire société » 2 , le « faire » permet à la fois de se réapproprier le monde en acquérant une meilleure connaissance des processus de fabrication, de prendre confiance en soi et en sa capacité de compréhension et de création, enfin il permet le partage au sein d’une communauté et ce pour le bénéfice de tous ses membres. Ces trois aspects font la richesse et la force du mouvement des Makers. De nouvelles applications aux technologies existantes et les opportunités créées en réunissant des disciplines habituellement distinctes les unes des autres sont ainsi explorées. Les membres de ce mouvement porte un intérêt particulier aux nouveaux modes de fabrication numérique et aux outils de prototypage rapide. En effet la démocratisation des machines telles que les imprimantes 3D, fraiseuses numériques ou encore les machines laser ont eu un impact considérable sur la mise en capacité de faire du grand public. En abaissant les coûts de ces machines et en rendant leur utilisation relativement simple via des interfaces et des protocoles d’utilisation conçus non pas pour des techniciens experts mais pour le grand public, ces machines sont devenues accessibles à la grande majorité. Ces améliorations ont, en partie, été à l’initiative des membres des communautés de Makers comme l’atteste l’exemple de l’imprimante 3D MakerBot qui s’appuie sur le projet collaboratif RepRap. Cette démocratisation a donc contribué à renforcer le mouvement des Makers qui eux même continuent de développer des projets rendant plus accessibles les machines et technologies autrefois réservées à l’industrie. Ce mouvement s’appuie de plus sur la notion de partage dont les moyens ont été décuplés par l’avènement du web 2.0 et des réseaux sociaux. Des communautés, à travers le monde, peuvent collaborer, échanger, partager, concevoir formant ainsi une base d’informations et de connaissances accessibles au plus grand nombre. !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Philippe Moati, Op. Cit. 2 Véronique Routin & Mathilde Berchon. Maker : Faire société. Internet Actu, 2011. Disponible sur: . [Consulté le 4 Juin 2014] 10
L’essor de ce mouvement tient aussi à la multiplication de lieux physiques, (temporaires ou permanents) où les membres de ces communautés se retrouvent, conçoivent, partagent, apprennent, fabriquent. Il en existe différents types, les hackerspaces, les fablabs et de manière plus générale les makerspaces ou tiers lieux de fabrication. Les Maker Faire, évènements ponctuels à l’initiative du magazine Make, sont organisés afin de réunir pendant quelques jours les membres des communautés à travers le monde. Image 2: MakerFaire de Rome, Septembre 2014. Source makerfairerome.eu. Ces espaces tangibles viennent en complément des espaces d’échange virtuels que sont les plateformes web. C’est donc la réunion de ces différents facteurs technologiques et organisationnels avec le besoin exprimé par le particulier d’être acteur de sa propre consommation qui a donné une telle ampleur au mouvement du DIY. Au vu de ce rapide descriptif on comprend facilement l’appréhension mais aussi l’intérêt que peut susciter un tel mouvement pour la grande distribution. En effet la culture du DIY ainsi que le mouvement des Makers ont, dans une certaine mesure, contribué à promouvoir une alternative aux modes de consommation classiques et en particulier à celui de la grande distribution. Ils s’appuient sur le partage et l’échange, comme le fait remarquer Hubert Guillaud dans un article intitulé « Industrie et nouveaux bricoleurs : faire ensemble ? »1, « L’autre chose est de comprendre les motivations qui donnent au mouvement maker son énergie. Et cette motivation, c’est l’intérêt général. La plupart des gens ne pensent pas que les ingénieurs qui travaillent dans l’industrie sont poussés par l’intérêt général, et c’est peut-être cela qui manque à l’industrie : le partage, la culture du partage ». Ce qui est vrai pour l’industrie l’est tout autant pour la grande distribution. Si certains acteurs de ce secteur y voient une menace d’autres souhaitent au contraire accompagner ce mouvement voir en devenir un acteur. La relation qui résulterait d’un rapprochement entre Makers et grande distribution ne peut donc qu’être complexe puisque historiquement antagoniste. !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Hubert GUILLAUD. Industrie et nouveaux bricoleurs : faire ensemble ?. Internet Actu, 2013. Disponible sur: . [Consulté le 5 Juin 2014] 11
Cependant l’intégration d’un tel écosystème représente de réels enjeux pour la grande distribution ainsi que pour ses clients. En plus de capter et de fidéliser de nouveaux consommateurs, la grande distribution pourrait faire évoluer le rôle du client ou du moins, tester de nouveaux modes relationnels avec ce dernier. Une des propositions envisagées pour intégrer cet écosystème est de mettre en place des tiers lieux de fabrication au sein des magasins et à la disposition des clients. Ces derniers pourraient alors profiter de l’infrastructure technique et logistique du magasin tout en ayant accès aux produits ainsi qu’aux conseils et savoir-faire des vendeurs. Ces espaces, situés en magasin ou à proximité permettraient aux enseignes de les utiliser comme des laboratoires afin d’élaborer et de tester de nouveaux services, produits, modes de contribution, de collaboration avec leurs utilisateurs. L’intégration et la participation du client aux nouvelles initiatives, produits, services développés par la grande distribution représentent une perspective d’évolution prometteuse et en accord avec les tendances de société actuelles. Si en 1916 on donnait au client la responsabilité de choisir ses produits, aujourd’hui on tend à lui conférer la possibilité de les concevoir et de les fabriquer, cette évolution s’applique aussi bien aux biens matériels qu’aux services. Dans le cadre de ce mémoire nous souhaitons nous questionner sur l’impact de ces espaces du point de vue du client et de sa relation avec la grande distribution. Les tiers lieux de fabrication, au sein des magasins des enseignes de la grande distribution, peuvent ils permettre le passage de client-consommateur à client- collaborateur ? Nous reviendrons dans un premier temps sur les rapports qu’entretiennent aujourd’hui la grande distribution et ses clients, en particulier sur l’aspect quasi- unilatéral de cette relation. Nous aurons de plus l’occasion d’évoquer plus en détail le contexte extrêmement compétitif de ce secteur et par conséquent l’importance qu’y occupe l’innovation. Enfin, nous nous intéresserons au modèle du web 2.0 et son impact sur le monde de la distribution en nous interrogeant sur les enjeux et perspectives que représente la transposition d’un tel modèle à la grande distribution. Dans un second temps, nous traiterons de l’évolution possible du rôle du client passant de consommateur à contributeur voire collaborateur en nous appuyant sur des initiatives favorisant un tel changement de paradigme. Nous tenterons d’identifier la typologie des futurs clients issus de cette mutation ainsi que les potentiels rôles dont pourrait s’emparer le designer dans ce nouveau contexte. Enfin, nous souhaitons définir les hypothétiques évolutions qu’entrainerait la mise en place de tiers lieux de fabrication aussi bien du point de vue du client que du distributeur, en abordant en particulier les mutations internes et externes nécessaires à la viabilité d’un tel modèle dans le contexte de la grande distribution. Ce sera de plus, l’occasion d’une prise de recul en s’interrogeant sur l’intérêt de ce type d’initiative pour l’utilisateur ainsi que pour les acteurs constituant actuellement l’écosystème de ce mouvement : ces espaces sont ils réellement souhaitables et désirables pour l’utilisateur? 12
1 ère partie : Le client, la grande distribution & le contexte socio-économique actuel ! 13
1 ère partie : Le client, la grande distribution & le contexte socio-économique actuel Une relation quasi-unilatérale ! La relation qui lie actuellement le client à la grande distribution réside dans un modèle d’échange relativement simple : la grande distribution propose des produits/services, le consommateur en dispose. Les interactions et échanges qui constituent cette relation sont donc très limités et ils le sont d’autant plus que l’organisation des magasins de la grande distribution tend à réduire ces échanges via le libre-service ou plus récemment les caisses automatiques. Les échanges entre le consommateur et le distributeur s’inscrivent dans une chaine plus étendue qui inclut le producteur en amont. Les acteurs de cette chaine sont parfaitement distincts et clairement identifiables. Le producteur fournit au distributeur les biens de consommation en échange d’argent, le distributeur diffuse et vend alors à son tour cette marchandise au consommateur. Producteur Argent Produit Relation «marketée» Grande distribution Produit Argent Consommateur Image 3: Schéma des échanges grande distribution, producteur, consommateur actuels La limite entre producteur et distributeur a cependant eu tendance à se complexifier avec l’arrivée des marques de distributeur (MMD), on peut citer l’exemple d’Oxylan et de sa marque de vélo B’twin. Le distributeur est devenu dans une certaine mesure producteur, cette extension de son activité lui a permis d’augmenter son contrôle sur la partie amont de la chaine des échanges commerciaux et d’élargir son spectre d’activité. L’extension de producteur à producteur/distributeur s’est elle aussi développée, dans le cas de l’automobile (via les concessionnaires). C’est, cette fois le producteur qui est devenu distributeur et dans certain cas financeur en proposant aux clients des solutions de crédit facilitant l’acte d’achat. Si cette limite entre producteur et distributeur est aujourd’hui parfois floue, la différenciation entre distributeur et consommateur reste très visible, et ces deux acteurs parfaitement distincts. 14
Vers un modèle plus complexe ! Revenons désormais aux échanges et aux interactions qui existent aujourd’hui entre le distributeur et son client. Il en existe de différentes natures. Tout d’abord, évoquons l’échange majeur à savoir le bien de consommation que le distributeur lègue au consommateur en échange d’argent : la transaction. C’est le pilier de la relation qui lie le distributeur au client. Le distributeur sélectionne, fixe un prix, met à disposition, diffuse les produits ; le consommateur peut acquérir ces produits en échange d’argent. On voit ici que la notion de prix relève d’une haute importance aux yeux du client et du distributeur, et c’est en effet sur cette notion que s’est développé le modèle économique de la grande distribution : proposer un large choix de produits aux prix le plus bas. Si ce modèle a connu un fort engouement avec notamment les magasins de hard- discompte, il est cependant simpliste de penser que la relation distributeur/consommateur puisse se résumer à ce simple axiome. Si cette attente de la part du client a été, et reste, prépondérante, il ne s’est très vite plus satisfait uniquement d’acheter un produit à son prix le plus bas possible, les notions de diversité de produit, de goût, de qualité, de rapports humains, d’éthique ou de plaisir d’achat ont progressivement émergés obligeant le distributeur à prendre en compte ces attentes dans un objectif de satisfaction- client et ainsi de compétitivité vis à vis des autres acteurs de la distribution. De ce fait, les distributeurs ont eu tendance à s’intéresser aux autres échanges qui pourraient leur apporter un avantage concurrentiel. Une des attentes des clients a été de se voir proposer le produit répondant le mieux à ses besoins personnels. Aussi, la grande distribution s’est tournée vers les moyens de les identifier au mieux en acquérant les informations pertinentes et en sachant les traiter de manière adéquate pour en extraire les donnés désirées. Ces informations concernant le comportement de leurs clients lors de l’acte d’achat a donc très tôt suscité un vif intérêt, mais c’est grâce à l’apparition des cartes de fidélité et les progrès dans le traitement de l’information que l’acquisition de ces données a pu être menée de manière efficiente aussi bien en terme d’échelle que de précision. La grande distribution ne s’est plus intéressée aux clients de manière générale mais a été en capacité de détenir des informations relatives à chacun d’entre eux. Ces informations lui ont permis de cibler son marketing et pré-marketing (terme utilisé pour qualifier l'ensemble des actions marketing menées préalablement à la commercialisation d'un bien ou d'un service et destinées à sensibiliser les consommateurs à la disponibilité prochaine du produit 1 ) et d’affiner ses propositions en fonction de chaque individu, en d’autres termes, de segmenter son marché et de pouvoir ainsi répondre de manière plus pertinente aux attentes de ces différentes cibles. Dans cette remontée d’informations, le consommateur reste relativement passif et contribue presque à son insu à cette création de valeur, si ce n’est qu’en échange de ces informations, il se voit recevoir des avantages promotionnels. Il ne sait pas quelles informations sont récupérées ni comment elles sont traitées par la suite. C’est sans doute pour cela que certains clients refusent ce genre d’offre préférant rester maitre de leur données, anonymes aux yeux de la grande distribution. Ces cartes de fidélité, comme leur nom l’indique, ont eu de plus pour vocation de fidéliser le client en l’incitant à revenir régulièrement chez le même distributeur afin d’accumuler ces avantages, il intègre ainsi la communauté des clients du magasin. Un autre moyen, plus actif de la part du client et donc plus acceptable, pour récupérer ces informations a été la mise en place de questionnaires et d’études de satisfaction en magasin. Le client est sollicité en sortie de caisse à !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Emarketing. Le magazine des nouvelles tendances marketing. 2013. Disponible sur : . [Consulté le 10 Juin 2014] 15
donner son avis sur les produits, l’organisation du magasin ou encore l’accueil et les conseils que lui ont réservé les conseillers de vente, il faut d’ailleurs noter que le terme « conseiller de vente » ou « conseiller-vendeur » est préféré à « vendeur » laissant ainsi une autonomie et une liberté dans l’acte d’achat plus importante au client. Ces études restent aujourd’hui utilisées dans la grande distribution mais paraissent quelques peut obsolètes vis à vis des possibilités en terme de support et de diffusion offertes par les médias numériques. Ces méthodes ont par conséquent aujourd’hui évolué vers des supports virtuels plus efficaces à l’ère du numérique. La mise en place de plateformes d’échange sur internet afin que le client puisse donner son avis sur les produits, services, organisation de la grande distribution a permis de maximiser et d’optimiser cette remontée d’information. La maitrise des informations et échanges qui peuvent se faire entre clients s’est d’ailleurs avérée obligatoire face à l’émergence de plateformes et de forums indépendants mettant directement en relation les consommateurs entre eux et ce, à grande échelle sans que le distributeur puisse contrôler les dites informations diffusées dans ces espaces. Or, ces avis positifs ou négatifs ont pu avoir un lourd impact sur l’image des enseignes. Il est évident que le consommateur a bien davantage confiance en un autre consommateur qu’en un acteur de la grande distribution dont l’avis est forcément biaisé par l’intérêt que ce dernier a à vendre ses produits. Comme un client mécontent le dit à 10 personnes environ alors qu’un client satisfait ne le dit qu’à trois personnes1, la diffusion d’un avis négatif est d’autant plus néfaste. Actuellement, la quasi- totalité des enseignes disposent de plateformes propres et ce système a été amené à un niveau proche de l’optimum. Les distributeurs cherchent par conséquent de nouveaux axes de développement basés sur les échanges possibles entre leur structure et le consommateur. Si les plateformes évoquées précédemment ont dans un premier temps été exploitées pour recueillir des avis, remarques ou suggestions de la part du client elles permettent aujourd’hui d’intégrer progressivement le client au processus de conception. Cette action s’intègre dans celle, à plus grande échelle, de mettre le consommateur dans une position d’acteur à part entière de la grande distribution dans sa globalité et non plus juste en fin de processus. On peut citer le site communautaire «C’vous » (https://www.cvous.com) du groupe Casino lui permettant de commercialiser de nouveaux produits et de mettre en place les services plébiscités par les internautes. Le client voit donc son rôle accru en passant d’acheteur à celui de décideur. L’exemple d’Auchan et de son partenariat avec Quirky (https://fr.quirky.com) va plus loin encore, puisqu’il permet au client non seulement de promouvoir des produits issus de producteurs, fabricants, fournisseurs classiques qui pourront par la suite être mis en vente au sein des magasins de l’enseigne mais aussi de proposer des produits émanant de sa propre conception ou de celle d’un autre client. Cette fois, le client est devenu, en plus d’être celui qui plébiscite, le décisionnaire et le concepteur des produits. Dernièrement à Epinay sur Seine, ont été mis en place « comités de voisinage » afin que les futurs clients du magasin sélectionnent les produits qui constitueront son offre et valident les implantations de rayons 2 . Cette initiative est aussi représentative de la recherche de ce nouvel axe. Les distributeurs cherchent désormais à intégrer en amont le consommateur et ainsi à augmenter les liens de collaboration entre ces deux partis. C’est cette fois l’humain qui est au cœur des interactions entre le distributeur et le consommateur. Les initiatives d’Auchan et de Casino, si elles sont relativement récentes, ne sont pas pour autant des cas isolés dans la grande distribution. L’inauguration du magasin IKEA à Bergens en Norvège a été entièrement !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Chiffres issus d’une étude de l’institut TARP cité par Philippe Détrie, Les réclamations clients, éd. Editions d’Organisation, 2004. 2 Information tirée de la newsletter n°4 de Mars 2014 de L’œil by LaSer. 16
organisée par ses habitants. Par ce type d’initiatives, le consommateur devient de plus en plus acteur de sa propre consommation mais aussi de la distribution voire de la conception des produits. L’étape suivante pourrait être la production, le client serait par conséquent intégré à toutes les étapes qui constituent la chaine producteur-distributeur-consommateur évoqué au début de cette partie. Un modèle bousculé par le web 2.0 ! Si cette évolution est en train de se dérouler, elle résulte de plusieurs facteurs sociaux, économiques et culturels. Le plus évident et sans doute le plus important étant l’arrivée du web et plus particulièrement du web 2.0. L’arrivée du commerce électronique a fortement impacté le secteur de la grande distribution. Pour la première fois depuis trente ans, le volume des ventes dans les super et hyper marchés a chuté en 2008 selon l'institut IRI France1. Cette baisse est imputable à plusieurs facteurs. Outre les aspects économiques liés à la conjoncture actuelle, les changements sociologiques, et l'essoufflement du modèle de l'hypermarché, c’est la montée en puissance de nouveaux canaux de vente, avec le marché d’internet en première position qui a fragilisé le secteur de la grande distribution. Les acteurs de ce dernier se sont relativement rapidement adaptés à ce changement en instaurant de nouveaux services en phase avec cette évolution et les attentes inhérentes du consommateur. Les grandes enseignes de la distribution ont ouvert des sites de vente en ligne, mis en place un service de « drive-in » et de livraison à domicile permettant ainsi à leurs clients de commander leurs produits en ligne et de venir les récupérer rapidement voire de se les faire livrer chez eux. Si ces nouvelles pratiques révèlent une remise en question du modèle de la grande distribution, l’impact du web sur ce secteur va plus loin que ces modifications de fonctionnement et de service apportés aux consommateurs. C’est le client lui même, son comportement et ses attentes qui ont évolué avec l’arrivée du web et plus encore avec celle du web 2.0. Il est à ce stade important de définir précisément ce que l’on entend par web 2.0. En effet ce terme très largement usité reste relativement ambigu et recouvre un large champ de notions. En Septembre 2005, Tim O’Reilly publiait le texte « Qu’est- ce que le web 2.0 ? » 2 sur lequel nous nous appuierons pour définir la caractéristique du Web 2.0 qui nous intéresse. La particularité majeure du web 2.0 réside dans son organisation en plateforme centrée sur les utilisateurs eux même. Il n’a pas de frontières clairement établies mais plutôt un centre de gravité autour duquel les internautes contribuent. À l’inverse de ce que l’on nomme le web 1.0 où le contenu résidait plutôt en des publications que des participations et où les acteurs moteurs étaient des annonceurs, et non les consommateurs, le web 2.0 tend à offrir au plus grand nombre la possibilité d’en devenir contributeur direct. C’est « la force collective des petits sites [qui] représente l’essentiel du contenu du web » selon Chris Anderson dans son ouvrage La longue traîne 3 . Le web 2.0 tire par conséquent parti de l’intelligence collective et c’est l’implication des utilisateurs dans ce réseau qui !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1!Etude citée dans l’article « La grande distribution alimentaire se structure sur le web », Martine Fuxa, E-commerce N°17, 2009, disponible sur le site ecommercemag.fr (consulté en Avril 2015).! 2 Tim O’Reilly, « Qu’est-ce que le web 2.0 ? », dont une traduction française par Jean Baptiste Boisseau est disponible sur le site : http://www.internetactu.net/2006/04/21/quest-ce-que-le-web-20-modeles-de- conception-et-daffaires-pour-la-prochaine-generation-de-logiciels/ (consulté en Avril 2014). 3 Chris Anderson, La longue traîne: la nouvelle économie est là, traduit pas Brigitte Vadé et Michel Le Séac’h, éd. Village mondial, 2007. 17
en est le facteur-clé. Il s’appuie sur des modèles de programmation légers avec une conception faite pour être « bidouillable » et « remaniable » laissant ainsi la possibilité aux utilisateurs de devenir co-créateurs. Les applications, en s’appuyant sur une architecture de participation, se démarquent non seulement par leur interface, mais aussi par la richesse des données partagées qu’elles offrent. Le fait de n’être plus centré sur un site mais plutôt sur l’utilisateur a permis l’apparition de nouvelles pratiques et a amené l’utilisateur à prendre conscience qu’il pouvait intervenir directement sur son environnement et occuper une place d’acteur à part entière. Aujourd’hui, cette envie d’être acteur s’exporte à d’autres domaines que celui du web et c’est cette attente que la grande distribution souhaite combler en intégrant le consommateur au cœur de son activité de distribution. L’impact des réseaux sociaux ! Un domaine du web à fortement intéressé et inspiré le monde de la grande distribution : les réseaux sociaux. En effet, ces « médias sociaux » qui utilisent l’intelligence collective dans un objectif de collaboration en ligne sont les parfaits exemples de ce que peut être le web 2.0. Ils incarnent l’esprit de communauté, fédèrent un groupe d’individus et leur permettent d’échanger de manière relativement libre. Les acteurs de la grande distribution se sont par conséquent intéressés à ces médias à la fois pour s’en protéger mais aussi pour les utiliser en leur faveur. Ces outils peuvent s’avérer être très néfaste pour une marque, un produit, une enseigne, de part leur nature et l’ampleur qu’il ont pris durant ces dernières années (selon l’édition 2013 du baromètre des réseaux sociaux de Médiamétrie, la France comptait près de 32 millions d’internautes inscrits sur les réseaux sociaux en 2013, ils étaient 20,3 millions en 2010). En effet, la possibilité d’échanger des informations, d’affirmer et de partager son avis voire de fédérer les internautes autour d’une cause ou d’une idée commune rend ces outils extrêmement puissants en terme d’image de marque. Plutôt que de les nier, les enseignes de la grande distribution se les sont accaparés en créant leur propre page, en travaillant sur leur image via ces médias et en les intégrant de manière complète à leur stratégie de communication. Ces médias deviennent ainsi des vecteurs d’interactions directs entre la grande distribution et ses clients. Followers Abonnés Likes 12,2K 117,5K 246,4K 497,8K 371,4K 34,6M 177,4K 111,2K 1,4M Image 4: Communautés autours des trois géants de la grande distribution, chiffre Mai 2014. 18
Cette forte interaction vis à vis de leurs clients est le socle de lancement de leurs offres promotionnelles, de discussion et de partage d’avis, de remarques, de conseils. Cette position a permis, dans une certaine mesure, de redonner une « âme » à ces géants très éloignés des individus qui forment leur clientèle. De plus, les réseaux sociaux ont permis d’ancrer ces acteurs dans une dimension locale, avec la création de pages dédiées à chaque magasin. Cet ancrage a renforcé l’idée d’une proximité et ainsi recréé un lien à dimension humaine et quotidienne entre consommateur et distributeur1. Sur ces pages, ce sont les conseillers de vente du magasin qui s’expriment. Il existe environs 90 pages Facebook Leroy Merlin « magasin » sur les 119 lieux de vente que compte l’enseigne en France. En plus des pages dédiées au magasin, des pages thématiques ont vu le jour permettant de fédérer les clients autours d’intérêts communs et d’accentuer ainsi la notion de communauté thématique. C’est le cas de pages tel que « Carrefour Voyage » ou « Carrefour Spectacle » avec près de 140 000 fans. Certains des acteurs de la grande distribution vont même plus loin en rachetant des sociétés spécialisées dans le traitement des informations issues des médias sociaux ou dans la création de technologies spécifiques à ces derniers. C’est le cas de Walmart avec le rachat des sociétés Kosmix et One Riot intégrées au sein du WalmartLabs, incubateur de l’enseigne dédié au eCommerce (http://www.walmartlabs.com). Au vu de ce bref descriptif, on mesure l’importance conférée aux médias sociaux par les acteurs de la grande distribution. A l’heure actuelle, cet intérêt reflète le souhait de se rapprocher du client et ainsi de lui donner un rôle d’acteur dans le cadre de sa propre consommation. L’humain est donc bel et bien au cœur de ces nouvelles interactions recherchées aussi bien du coté des enseignes que des consommateurs. !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1!Nicolas Masson. La grande distribution & les réseaux sociaux : analyse des stratégies et performances. In Journal Du Net. L’économie demain [en ligne]. 2014. Disponible sur < http://www.journaldunet.com>. [Consulté le 2 Mars 2015]! 19
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