Jane Austen de dos, aquarelle de sa soeur Cassandra
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La personne, homme ou femme, qui n'éprouve pas de plaisir à la lecture d'un bon roman ne peut qu'être d'une bêtise intolérable. (Northanger Abbey) 2013 marque le bicentenaire de la publication d’Orgueil et Préjugés, le chef-d’œuvre de Jane Austen. C’est l’occasion pour les bibliothèques Mouffetard et Jean-Pierre Melville de s’associer pour vous faire (re)découvrir Austen, son œuvre et son époque. Les livres de Jane Austen, qui comptent parmi les beaux romans d’amour de la littérature mondiale, sont aussi de fines peintures de leur époque, porteurs d’une critique sociale teintée d’ironie. Nous espérons que vous serez conquis et que vous viendrez grossir les rangs des « janéites », les inconditionnels d’Austen. Les documents présentés ici sont empruntables à la bibliothèque Mouffetard ou à la médiathèque Jean-Pierre Melville. Sommaire sa vie 2 son œuvre 5 les arts et lettres à son époque 10 à la recherche de ses lectures 19 des romanciers sur ses traces 26 Jane Austen à l’écran 29 ~1~
sa vie Jane Austen est née le 16 décembre 1775 dans un village du Hampshire. Fille du recteur de la paroisse, elle a six frères et une sœur. Après un séjour en pension, elle poursuit son éducation en lisant librement essais et romans dans la bibliothèque de son père qui possède environ 500 ouvrages. Les Austen encouragent la créativité de leurs enfants et la liberté de parole. Jane est proche de son père. Celui-ci, pour compléter les portrait de Jane Austen revenus de la famille, s’essaye à l’agriculture et donne des cours à des enfants des environs. Jane commence à écrire en 1787 : poèmes, courts récits, pièces de théâtre… Ces écrits sont variés, empreints de gaieté et d’humour. Le soir, elle lit ses œuvres à haute voix à sa famille, qui apprécie beaucoup ce divertissement. le presbytère de Steventon ~2~
Entrée dans l’âge adulte, elle séjourne à Londres, Bath, Southampton. Elle aime les bals et le théâtre. Dès 1793, elle prend la décision de devenir écrivain professionnel. la valse, caricature de James Gillray Fin 1800, le père de Jane décide que la famille entière ira vivre à Bath, station thermale à la mode. Sa maison du Hampshire manque beaucoup à Jane, qui cesse pratiquement d’écrire. En 1805, le révérend Austen tombe malade et meurt, laissant son épouse et ses filles dans une situation difficile. Elles sont soutenues par les frères de Jane, et séjournent chez divers membres de la famille. En 1809, l’un des frères de Jane met à la disposition de sa mère et de ses sœurs un cottage où l’auteur retrouve le calme qui lui convient. Elle se remet à écrire très activement. Entre 1811 et 1815, quatre romans sont publiés : Sense and Sensibility en 1811, Pride and Prejudice en 1813, Mansfield Park en 1814 et Emma en 1815. la maison de Jane Austen à Chawton En 1816, Jane termine une première version de Persuasion. Mais la faillite de la banque de son frère met la famille entière en grande difficulté financière. Jane doit repousser la publication de Persuasion, ainsi que de Susan. Cette même année, sa santé se dégrade. Il est difficile de dire avec certitude de quel mal elle souffrait. Jane Austen meurt le 18 juillet 1817, à l'âge de quarante- et-un ans. ~3~
Alors que le mariage est au centre de la plupart de ses romans, Jane Austen ne s’est jamais mariée. Elle a fréquenté à l’âge de vingt ans un certain Thomas Lefroy. Il semble que les jeunes gens souhaitaient se marier, mais leur situation financière rendait ce projet impossible. Quelques années plus tard, Jane accepta la demande en mariage d’un homme riche qu’elle n’aimait pas avant de se rétracter le lendemain. illustration de Persuasion par Chris Hammond harmonie avant le mariage, caricature harmonie matrimoniale, caricature de de James Gillroy James Gillroy David Cecil, Un portrait de Jane Austen, Payot Claire Tomalin, Jane Austen, passions discrètes, Autrement Isabelle Ballester, Les nombreux mondes de Jane Austen, Les Moutons électriques ~4~
son œuvre Jane Austen a consacré sa courte vie à l’écriture, nous laissant des œuvres de jeunesse pleines de vivacité, six romans majeurs publiés entre 1811 et 1818 et deux romans restés inachevés à sa mort. Jane Austen, Juvenilia Œuvres précoces de Jane Austen, écrites entre 1787 et 1810. Courts romans, poèmes, parodies… ces textes divers manquent certes de maîtrise, mais on y trouve déjà les thèmes qui seront au centre de l’œuvre de l’auteur. Un recueil qui déborde d’humour et d’énergie. Jane Austen, Lady Susan Lady Susan Vernon, veuve désargentée séductrice et égoïste, mère d’une fille adolescente qu’elle tyrannise, intrigue pour trouver de riches maris pour elles deux. Court roman épistolaire écrit entre 1793 et 1795. Sans doute pas le meilleur roman d’Austen, il fait toutefois un bon portrait de manipulatrice, version féminine de personnages de séducteurs sans scrupules qu’on retrouvera dans les romans suivants. ~5~
Jane Austen, Raison et sentiments À la mort de leur père, Elinor et Marianne Dashwood, deux sœurs aux caractères opposés, sont forcées de quitter Norland, leur riche demeure du Sussex. Elles s’installent avec leur mère et leur jeune sœur dans un modeste cottage du Devonshire. Marianne, qui se laisse guider par ses sentiments, tombe sous le charme de Willoughby tandis que la raisonnable Elinor est malheureuse d'avoir laissé Edouard Ferrars à Norland. Éauché avant 1796, d’abord intitulé Elinor and Marianne, ce roman fut publié en 1811. Il connaît immédiatement un succès critique, et le premier tirage est vite épuisé. Il est vite devenu un classique de la littérature mondiale. Jane Austen, Orgueil et préjugés Dans l'Angleterre de la fin du XVIIIe siècle, la famille Bennet a cinq filles à marier. Elisabeth, la plus vive, souhaite faire un mariage d’amour. Mais saura-t-elle voir au-delà de ses préjugés ? Jane Austen écrit First Impressions entre 1796 et 1797. C’est en 1813 que Pride and Prejudice, version remaniée de First Impression, est publié. C’est le chef-d’œuvre d’Austen. ~6~
Jane Austen, Mansfield Park Fanny Price, la deuxième des dix enfants d’un lieutenant de marine, est recueillie à Mansfield Park par Sir Thomas, un oncle fortuné. Timide et sensible, elle s’intègre avec difficulté. Elle peut compter sur le soutien et la gentillesse de son cousin Edmund auquel elle porte un amour profond. Alors que Sir Thomas est absent, les séduisants Crawford arrivent à Mansfield Park. Paru en 1814, suite au succès des romans précédents. Moins apprécié par la critique de l’époque, il trouve pourtant un large public. L’action de ce roman s’étend sur près de dix ans. De l’enfance à l’entrée dans l’âge adulte, Fanny reçoit une éducation, fait des choix, se construit. Peut-être plus encore que le thème du mariage, c’est ici le choix de valeurs morales et l’éducation des filles qui sont au cœur de Mansfield Park. Jane Austen, Emma La belle et vive Emma Woodhouse vit avec son riche père veuf dans le petit village de Highbury. Pour se distraire, elle décide de jouer les entremetteuses au profit des célibataires de son entourage. Elle se consacre tout spécialement à Harriet Smith, sa protégée. Mais on ne joue pas impunément avec les sentiments d’autrui… Roman publié en 1815. Emma, aux occupations futiles, est un personnage moins sympathique que les autres héroïnes d’Austen. Le roman peut être perçu comme moralisateur, mais il offre une peinture sans concession de la vie d’un village anglais. ~7~
Jane Austen, Northanger Abbey La jeune et naïve Catherine Morland part pour Bath, la station thermale à la mode, faire son apprentissage du monde. Elle y rencontre Henry Tilney qui l'invite à séjourner à l'abbaye de Northanger, propriété de son père. Catherine, passionnée par les romans gothiques, croit découvrir un crime. Parue en 1817, après la mort de Jane Austen, cette parodie de roman gothique est aussi un roman d’apprentissage et un tableau des mœurs de la gentry de Bath, où Jane Austen a elle-même séjourné. Jane Austen, Persuasion Deuxième des trois filles du vaniteux Sir Elliot, Anne n’est toujours pas mariée à l’âge de vingt-sept ans. Huit ans plus tôt, sur les conseils de sa marraine, elle avait refusé la demande en mariage de Frederick Wentworth, jeune officier de marine pauvre dont elle était pourtant éprise. Quand Wentworth, ayant fait fortune, reparaît dans sa vie, Anne est bouleversée. La première version, intitulée The Elliots, est achevée en 1816 malgré les problèmes de santé de l’auteur. Jane Austen est alors en mauvaise position financière et ne peut pas le faire publier. Il paraîtra après sa mort, fin 1817. Roman d’un ton plus grave que les œuvres précédentes de l’auteur, il s’attache à la vie intérieure de sa protagoniste. ~8~
Jane Austen, Sanditon Une jeune fille est invitée à séjourner à Sanditon, petite station balnéaire dont certains habitants voudraient faire la nouvelle ville à la mode. Roman inachevé, écrit par Austen alors qu’elle était déjà malade, Sanditon est une comédie qui ne dédaigne pas la caricature. On peut lui trouver des similitudes avec Northanger Abbey. Jane Austen, Les Watson Suite au remariage de la tante qui l’a élevée, Emma Watson revient auprès de sa famille après quatorze ans d’absence. Le fossé s’est creusé entre eux, Emma ayant reçu une éducation rafinée. Elle peut heureusement compter sur le soutien de sa sœur aînée. Jane Austen a abandonné l’écriture de ce roman après la mort de son père. À chacun d’imaginer une fin. illustration d’Orgueil et préjugés par Hugh Thompson ~9~
les arts et lettres à son époque Quels contemporains d’Austen, écrivains, peintres ou musiciens ont marqué leur temps ? Petit tour de la sphère culturelle géorgienne. LITTÉRATURE Un certain nombre de romanciers, essayistes et poètes britanniques de la fin du XVIIIe sont encore renommés de nos jours, dans leur pays ou dans le monde entier. Voici les principaux d’entre eux. Fanny Burney (1752 – 1840) D’abord adepte du roman épistolaire, Fanny Burney écrit ensuite des romans féministes avant l’heure qui s’agrémentent d’une pointe d’ail gothique. Inconnue en France bien qu’ayant épousé un Français, elle est une romancière populaire en Grande-Bretagne, et le journal qu’elle a tenu pendant soixante- douze ans est un témoignage intéressant sur son époque. ~ 10 ~
Byron (1788 – 1824) L’un des plus illustre poète britannique et propagateur du modèle du héros romantique. Voyageur, amoureux passionné, homme libre, il est auréolé d’une réputation sulfureuse. Samuel Taylor Coleridge (1772 – 1834) Poète et critique, ami de Wordsworth et Charles Lamb, auteur du fameux poème Kubla Khan, inspiré par un rêve dû à l’opium, et de la Ballade du vieux marin. Féru de philosophie, il a nourri dans sa jeunesse le rêve de fonder une colonie égalitaire en Pennsylvanie. William Hazlitt (1778 – 1830) Surtout connu pour ses essais et ses ouvrages de critique littéraire, notamment sur Shakespeare. Penseur radical, fuyant tout compromis, il était également peintre. John Keats (1795 – 1821) Poète romantique anglais, mort de la tuberculose, maître de la poésie narrative inspirée de la mythologie grecque. Bien que peu apprécié de la critique de son vivant, sa popularité a rapidement grandi : il est le poète britannique le plus lu. ~ 11 ~
Charles Lamb (1775 – 1834) Poète et critique littéraire d’origine galloise, il écrivit avec sa sœur Mary Lamb un grand classique de la littérature pour la jeunesse : Contes d’après Shakespeare. Il s’occupa de sa sœur, atteinte de folie, et gagna sa vie comme comptable pour la compagnie des Indes orientales. Matthew G. Lewis (1775 – 1818) Romancier et dramaturge, auteur du grand classique du roman gothique le Moine. Issu d’une famille fortunée, il était destiné à devenir diplomate. Un temps attaché d’ambassade puis député, il a choisi la littérature. Thomas de Quincey (1785 -1859) Essayiste fameux, opiomane lucide (Les Confessions d’un mangeur d’opium anglais lues et commentées par Baudelaire). Ses titres parlent pour lui : De l’assassinat considéré comme un des beaux-arts… Ann Radcliffe (1764 – 1823) Ses livres très populaires dans l’aristocratie et la bourgeoisie mettent en scène d’innocentes et héroïques jeunes femmes dans un décor gothique. Leur succès a contribué à légitimer un genre jusque-là mal vu. ~ 12 ~
Walter Scott (1771 -1832) Poète et écrivain écossais, pionnier du roman historique, écrivit notamment Ivanhoé, Quentin Duward ou Rob Roy, romans d’aventures chevaleresques épiques. Percy Byssche Shelley (1792 – 1822) Prototype du poète romantique britannique, diabolisé par ses contemporains, chez qui, dans de longs poèmes cohabitent idéalisme et passion. William Wordsworth (1770 – 1850) Ami proche de Coleridge avec qui il écrira les Lyrical Ballads. Auteur exigeant et fondateur d’une doctrine poétique quasi mystique. illustration de Northanger Abbey, anonyme ~ 13 ~
PEINTURE La peinture britannique à l’époque d’Austen compte des artistes majeurs, toujours reconnus comme tels de nos jours : peintres paysagistes ou portraitistes, romantiques, précurseur de l’impressionnisme. Voici quelques livres pour vous plonger dans leur œuvre. William Vaughan, William Blake Barry Venning, Constable : sa vie et ses chefs-d'œuvre Pierre Wat, Constable : entre ciel et terre Paola Viotto, Tout l'œuvre peint de Fussli John Hayes, Gainsborough : 1727-1788 Sir Joshua Reynolds : 1723-1792 Venetia Morrison, George Stubbs Turner et ses peintres Andrew Wilton, Turner, aquarelles Jean-Jacques Mayoux, La Peinture anglaise de Hogarth aux préraphaélites ~ 14 ~
MUSIQUE La fin du XVIIIe siècle n’est pas une période faste pour la musique anglaise. En effet, pas de grands musiciens qui soient passés à la postérité. Toutefois, on note quelques compositeurs qui ont joui d’un certain prestige à l’époque, et dont on retrouve le nom sur les partitions de Jane Austen. William Boyce (1711-1779) Il est considéré comme le compositeur anglais le plus important du XVIIIe siècle. Après avoir été choriste dans son enfance, il devint organiste et compositeur à la Chapelle royale. Il fut le maître de Thomas Linley. Sa surdité progressive le poussa à abandonner son poste d’organiste. Il se consacra alors à un recueil de musique religieuse de compositeurs britanniques, dont de nombreuses pièces sont encore jouées dans les églises anglicanes. 8 Symphonies David’s Lamentation over Saul and Jonathan Sonates en trio ~ 15 ~
John Stanley (1712-1786) Devenu presque aveugle à deux ans, il commença à apprendre l’orgue à sept ans, et obtint son premier poste d’organiste à onze ans. Il était également excellent violoniste. Il remplaça William Boyce dans sa charge de Master of the Queen’s Music. Il fut l’ami de Haendel dont il finira les oratorios, aidé de Thomas Linley le jeune. Concertos pour orgue / Dominique Ferran Thomas Linley le jeune (1756-1778) Fils du célèbre Thomas Linley le vieux, il fut un enfant prodige, surnommé le « Mozart anglais ». Violoniste, chanteur et compositeur, il fut l’apprenti de William Boyce. Au cours d’un voyage en Italie, il rencontra Mozart alors qu’ils avaient tous deux quatorze ans et les deux jeunes musiciens devinrent amis. Il mourut noyé à vingt-deux ans. Music for the Tempest / Paul Nicholson Lyric Ode / Paul Nicholson ~ 16 ~
Philip Hayes (1738-1797) Organiste, chanteur, compositeur et chef d’orchestre. Sa carrière se déroula à Oxford et Londres. The World’s First Piano Concertos / David Owen Thomas Augustine Arne (1710-1778) Issu d’une famille de tapissiers catholiques, Arne était destiné à devenir avocat. Mais sa passion pour la musique a fini par convaincre son père de le laisser abandonner le droit. Il composa plus de trente opéras, des masques, des musiques de scène, ainsi que des symphonies, sonates et concertos. Son œuvre la plus connue de nos jours est Rule Britania, final de l’opéra Alfred. Artaxerxes, le plus connu de ses masques caricature de James Gillray ~ 17 ~
illustration de Raison et Sentiments par Chris Hammond Quelle musique jouait Jane Austen ? On sait qu’elle jouait du pianoforte plusieurs heures chaque matin et prenait la peine de recopier des partitions à la main. Il semble qu’elle avait une préférence pour les chansons et danses populaires de l’époque. Les témoins de l’époque disent qu’elle avait une jolie voix, mais ne chantait que dans le cadre familial. accomplissement, caricature de James Gillray ~ 18 ~
à la recherche de ses lectures La famille Austen lisait beaucoup, pour s’instruire ou se distraire. Les personnages de Jane Austen sont aussi des lecteurs, et les allusions à leurs lectures sont nombreuses. Que lisent Jane Austen et ses personnages ? En voici un aperçu. Frances Burney, Camilla or a picture of Youth Adolescentes de la petite aristocratie, Camilla, ses deux sœurs et leur belle cousine Indiana déclenchent dans la campagne anglaise une tourmente de malentendus et de drames. Une seule issue apaisera la tempête : le choix d’un mari correspondant à leurs espoirs et à leurs sentiments. Dans Northanger Abbey, Jane Austen cite Camilla comme le type même d’œuvre qui déploie les meilleures qualités littéraires, mais que les femmes ont honte de lire parce que le roman est alors considéré comme un genre mineur. ~ 19 ~
Robert Burns, Poésies Sorcières et pèlerins, pasteurs et ivrognes, auberges et églises, gueux et jeunes gens : c’est l’Écosse en plein vent de Burns, aussi colorée que les caractères y sont libres, drôles et spontanés. Dans Sanditon, Sir Edward Denham passe en revue les poètes de l’époque. Selon lui, Burns les dépasse tous : « Si jamais il est un homme qui a ressenti, c’est Burns. » Byron, Contes orientaux Entre la Grèce et la Turquie déchirées par la guerre, Byron puise dans les légendes anciennes et fait surgir des corsaires et des jeunes filles aux amours impossibles, des vampires et de cruels pachas, de belles esclaves et de sombres vengeurs. Dans Persuasion, Anne et un capitaine de marine font connaissance grâce à une discussion passionnée autour des poèmes orientaux de Byron. Daniel Defoe, Robinson Crusoé Un écrivain vieillissant et raté, qui n’a jamais voyagé, jamais écrit un roman, mais qui a des filles à marier et besoin d’argent, propose à un éditeur de reprendre l’histoire vraie d’un marin abandonné sur une île. Sous sa plume naissent alors Robinson, Vendredi et les cannibales : l’un des plus grands succès de la littérature mondiale. Dans une lettre à sa sœur, Jane Austen indique comme conseil de lecture le 1er volume de Robinson. ~ 20 ~
Henry Fielding, Histoire de Tom Jones, enfant trouvé Credo du XVIIIe siècle, la bonté naturelle du cœur triomphant de l’adversité est le sujet de ce volumineux roman picaresque. Une suite ininterrompue de péripéties se succède dans la vie du héros, orphelin adopté, avant qu’il ne conquière enfin amour et réussite sociale. Roman cité dans Northanger Abbey. Jane Austen y fait également allusion dans une lettre à sa sœur : elle écrit que le seul défaut qu’elle trouve à Thomas Lefroy (l’homme qu’elle a aimé dans sa jeunesse) est son manteau, qui ressemble à celui de Tom Jones. William Gilpin, Trois essais sur le beau pittoresque Ces essais paraissent au moment où la classe aisée britannique développe un goût pour le tourisme et le dessin de paysage ; ils deviennent une référence. Gilpin caractérise le type de paysage fournissant « un sujet avantageux à la peinture » : lignes brisées, rudesse et vues en contreplongée. Austen fait des allusions à Gilpin dans quatre de ses textes (Amour et Amitié, l’Histoire d’Angleterre, Orgueil et Préjugés et Raison et Sentiments). Henry Austen écrit que sa sœur Jane a été enchantée par la lecture de Gilpin dans sa jeunesse. ~ 21 ~
William Godwin, Les aventures de Caleb Williams ou les choses comme elles sont Caleb Williams entre au service de Fernando Falkland, aristocrate d’excellente réputation. Mais il se met à douter. Et si Falkland était en fait un meurtrier ? Caleb Williams connaît bientôt la vérité, et devient alors la proie de Falkland. Roman d’aventure, roman noir, brûlot anarchiste… ce roman ambitieux dénonce l’injustice de la société britannique. Jane Austen cite le nom de Godwin dans sa correspondance d’une façon qui suggère qu’elle n’adhère pas à ses idées. Olivier Goldsmith, Le Vicaire de Wakefield Infortuné mais doux, le révérend Primrose fait front contre les épreuves : faillite, prison pour dettes, déshonneur de ses filles. Mais tout finit bien pour ce Pangloss britannique, car ce roman est une œuvre aussi sentimentale que didactique. Dans Emma, alors que l’héroïne suppose que Mr Martin, le fermier, ne lit pas, son amie Harriet lui rétorque qu’il a lu Le Vicaire de Wakefield. Samuel Johnson, Histoire de Rasselas, prince d’Abyssinie Conte philosophique sur le bonheur, souvent comparé à Candide. Jane Austen y fait allusion dans Mansfield Park. Fanny compare Mansfield Park et Portsmouth et pense qu’elle pourrait en dire ce que Samuel Johnson dit du mariage et du célibat : « Quoique Mansfield Park pût avoir quelques peines, Portsmouth ne pouvait avoir de plaisirs ». Le texte de Johnson est le suivant : « Le mariage occasionne de multiples douleurs, mais le célibat n'offre aucun plaisir ». ~ 22 ~
Matthew G. Lewis, Le Moine Mélange de crimes, de satanisme et d’obscénités, ce roman noir, œuvre de jeunesse de l’auteur devenu culte, narre la descente aux enfers du prieur Ambrosio qui s’abandonne sans retenue aux tourments de la chair. Dans Northanger Abbey, la jeune Catherine Morland est très impressionnée par ce roman, tandis que John Thorpe déclare que c’est le seul roman correct paru depuis Tom Jones. John Milton, Le Paradis perdu Jane Austen évoque Le Paradis perdu (poème épique qui se veut une réécriture de la Genèse) dans Mansfield Park. Elle fait aussi une rapide allusion à Milton dans Northanger Abbey, lorsqu’elle se moque des littérateurs à la mode, prompts à compiler les grands auteurs anglais (dont Milton) dans des essais illisibles, et tout aussi prompts à dénigrer le genre nouveau qu’est le roman, dont Austen est un farouche défenseur. Dans un dialogue d’Emma, Austen reprend discrètement un terme de L’Allegro, un autre poème de Milton. Mme Elton se souvient de ses fiançailles et de sa « tunique safran de l’hymen ». Milton avait ainsi personnifié le Mariage dans le vers : « Que souvent l’Hymen apparaisse. En sa robe safran, avec sa torche claire… » ~ 23 ~
Ann Radcliffe, Les Mystères du château d’Udolphe Orpheline, enfermée dans un château, poursuivie par un brigand italien, l’héroïne de ce roman doit affronter ses pires cauchemars avant de trouver l’amour et la fortune. Dans Northanger Abbey, Catherine Morland est enthousiasmée par la lecture d’Udolphe : « Quand je lis Udolphe, il me semble que rien ne peut me rendre malheureuse ». Sir Walter Scott, la Dame du lac Poème narratif situé dans les Highlands d’Écosse, il comporte six chants narrant chacun une journée. Il a inspiré à Rossini un opéra. Dans Persuasion, c’est en parlant de Walter Scott et de Byron avec le capitaine Benwick qu’Anne se prend de sympathie pour lui. William Shakespeare, Hamlet Après la mort du roi du Danemark, son frère Claudius lui succède sur le trône et épouse sa veuve. Le fantôme du roi apparaît à Hamlet, son fils, et lui révèle qu’il a été assassiné par Claudius. Hamlet veut venger son père. Il est beaucoup question de théâtre dans Mansfield Park. Pas moins de sept pièces de Shakespeare y sont citées, dont Hamlet. ~ 24 ~
Richard Brinsley Sheridan, The Rivals Richard Brinsley Sheridan, L’Ecole de la médisance Des comédies enlevées, intrigues amoureuses à base de mensonges, tromperies et réconciliations, qui ont rencontré un franc succès. Les pièces de Sheridan sont mentionnées dans Mansfield Park, quand les jeunes gens décident de faire du théâtre. Madame de Staël, Corinne ou l’Italie Corinne est une poétesse italienne, talentueuse et libre. Elle est aimée d’Oswald, seigneur écossais. Leur histoire les mène d’Italie en Écosse en passant par la France. Un grand roman, fondateur du romantisme et précurseur du féminisme. Dans une lettre à sa sœur, Jane Austen raconte qu’elle a recommandé ce livre à une connaissance. Laurence Sterne, La vie et les opinions de Tristram Shandy, gentilhomme Ce qui se présente d’abord comme la biographie de Tristram Shandy est surtout l’occasion pour son auteur d’expérimenter toute sa liberté d’auteur. Inspiré de Rabelais, Cervantes, Locke et Montaigne, ce roman mal connu en France est une œuvre majeure de la littérature mondiale. Jane Austen y fait une référence ironique dans une lettre à sa sœur. On trouve également une référence à Voyage sentimental à travers la France et l’Italie dans Mansfield Park, et une allusion à Laurence Sterne dans Northanger Abbey. ~ 25 ~
des romanciers sur ses traces Suites, variations, parodies… l’œuvre de Jane Austen a inspiré à des auteurs plus ou moins talentueux d’innombrables dérivés, dont une quantité de romans sentimentaux médiocres reprenant les personnages d’Austen et jamais traduits en français. Dans cette abondante production, on peut toutefois mettre en avant certaines œuvres dignes d’intérêt, du moins divertissantes. Stephanie Barron, Jane Austen et la sorcière du Derbyshire Jane Austen séjourne chez un cousin dans le beau comté du Derbyshire. Au cours d’une promenade, elle découvre un cadavre. Sorcellerie, franc-maçonnerie, secrets de famille sont les ingrédients de cette enquête dont Jane Austen est l’héroïne. Dans cette série de romans présentés comme des extraits du journal intime de Jane Austen, l’auteur fait une peinture tout à fait crédible de la société anglaise du début XIXe. Stephanie Barron, auteure américaine, a non seulement fait des études d’histoire mais elle a aussi travaillé pour la CIA. On retrouve dans ses romans ce double profil de mystère et de reconstitution historique. ~ 26 ~
Stephanie Barron, Jane Austen et le prisonnier de Wool House Franck Austen, frère de Jane, est capitaine de la Royal Navy en attente d’affectation. Apprenant que son meilleur ami est accusé de meurtre, il enquête avec Jane dans le port de Southampton afin de prouver son innocence. Un roman convaincant, très bien documenté. Stephanie Barron, Jane Austen et les fantômes de Netley 1809. L’Angleterre, en guerre contre la France napoléonienne, est également déchirée par un conflit entre anglicans et catholiques. C’est dans ce contexte que Jane se voit confier une mission de la plus haute importance : déjouer un complot contre le royaume. Crimes, espionnage et manipulation dans le brouillard de Southampton. On retrouve avec plaisir cette série de bonne facture. Helen Fielding, Le Journal de Bridget Jones On ne présente plus Bridget Jones, célibataire trentenaire, gaffeuse et attachante, tenant un journal hilarant de ses aventures et déboires. Quel rapport avec Jane Austen ? La mère de Bridget tient à marier sa fille. Celle-ci, d’abord séduite par son patron, fait la connaissance d’un certain Darcy, qu’elle trouve prétentieux. Bridget saura-t-elle aller au-delà de ses préjugés pour reconnaître l’homme de sa vie ? ~ 27 ~
Karen Joy Fowler, Le Club Jane Austen Six amis (cinq femmes et un homme) forment un club de lecture et décident de lire les six romans de Jane Austen. Chaque chapitre de ce roman à succès est consacré à un membre du club, et bien entendu à un roman d’Austen. Jane Austen et Seth Grahame-Smith, Orgueil et préjugés et zombies Roman parodique qui mêle au roman d’Austen des éléments d’horreur. L’Angleterre est envahie par des morts-vivants. Les sœurs Bennet, formées aux arts de combat par les moines de Shaolin, combattent courageusement, mais n’en doivent pas moins trouver un mari. Hilarant ou ridicule ? À vous de juger. P. D. James, La mort s'invite à Pemberley Six ans après leur mariage, Elisabeth et Darcy, héros d’Orgueil et Préjugés, voient leur vie troublée par un drame : un homme est assassiné dans le parc de Pemberley. George Wickham est aussitôt soupçonné du crime. P.D. James reste fidèle aux personnages d’Austen dans cette suite policière tout à fait réussie. ~ 28 ~
Jane Austen à l’écran Jane Austen et son œuvre sont également présents sur les écrans. De l’adaptation la plus fidèle à la biographie la plus fantaisiste, cinéma et télévision permettent une autre approche du monde d’Austen. adaptations des romans de Jane Austen Robert Z. Leonard, Orgueil et préjugés, 1940, avec Greer Garson, Laurence Olivier, Mary Boland Intégralement tourné dans les studios de la MGM entre février et mai 1940. Il s'agit de la première adaptation cinématographique du roman. Simon Langton, Orgueil et préjugés, 1995, avec Colin Firth, Jennifer Ehle, David Bamber Mini-série britannique en six épisodes de 50 minutes. Cette adaptation se veut une transposition fidèle du roman de Jane Austen, sa longueur lui permettant de garder la plupart des situations et des personnages qui s'y trouvent. Véritable série culte au Royaume-Uni. ~ 29 ~
Joe Wright, Orgueil et préjugés, 2005, avec Keira Knightley, Matthew MacFadyen, Talulah Riley, Donal Sutherland Le film est tourné en Angleterre dans des décors naturels et des demeures du patrimoine historique. D’un réalisme plus cru que les adaptations classiques. Gurinder Chadha, Coup de foudre à Bollywood, 2004 avec Aishwarya Rai, Martin Henderson, Daniel Gillies Orgueil et préjugés transposé à l'époque moderne en Inde et arrangé selon les codes de « Bollywood », le cinéma musical indien : chansons, danses dans des décors grandioses, costumes chatoyants et colorés, coucher de soleil et grands sentiments. Adrian Shergold, Persuasion, 2007, avec Sally Hawkins, Rupert Penry-Jones, Alice Krige, Anthony Head Ce téléfilm, adaptation d’un roman plus centré sur les sentiments et les pensées de l’héroïne que sur de l’action ou des dialogues, doit beaucoup à la finesse de l’interprétation de l’actrice principale. ~ 30 ~
Ang Lee, Raison et sentiments, 1995, avec Emma Thompson, Alan Rickman, Kate Winslet, Hugh Grant Une très belle adaptation sur fond de nature sauvage et grandiose où les sentiments s'exacerbent et se dévoilent, dans une mise en scène où il s'agit d'exprimer le moins pour suggérer le plus. autour de Jane Austen James Ivory, Jane Austen in Manhattan, 2007, avec Anne Baxter, Robert Powell, Michael Wager Deux troupes de théâtre rivales essaient de monter une pièce de Jane Austen, découverte il y a peu de temps, et dont le manuscrit a été acquis par un riche amateur lors d'une vente aux enchères. Julian Jarrold, Jane, 2007, avec Anne Hathaway,J ames McAvoy, James Cromwell, Maggie Smith Un portrait de Jane Austen, au travers de son histoire d'amour vécue, à l'aube de ses vingt ans, avec Tom Lefroy. ~ 31 ~
Robin Swicord, Jane Austen book club, 2008, avec Maria Bello, Amy Brenneman, Jimmy Smits, Emily Blunt, Marc Blucas Un groupe d'hommes et de femmes se réunit pour parler de l'œuvre de Jane Austen. Sharon Maguire, Le journal de Bridget Jones, 2001, avec Renée Zellweger, Hugh Grant, Colin Firth Bridget Jones, trente-deux ans, travaille dans une maison d'édition à Londres. Elle sort avec ses amis, fume et boit (trop). De plus en plus accablée par le poids de son célibat et de ses trente ans, elle a la hantise de finir vieille fille. Elle établit dans son journal intime des listes de ce qu'elle doit faire ou pas, avec deux objectifs : perdre du poids et trouver le prince charmant... Un film tiré d’un roman à succès, lui-même très inspiré d’Orgueil et Préjugés. On retrouve Colin Firth dans le rôle de Darcy. Et pour prolonger votre séance cinéma, les bandes originales de deux films : Dario Marianelli, Orgueil et préjugés Patrick Doyle, Raison et sentiments ~ 32 ~
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