L'enjeu social des questions environnementales dans le champ d'action des CSE - CGT
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
L’enjeu social des questions environnementales dans le champ d’action des CSE LOI CLIMAT
LOI CLIMAT L’enjeu social des questions environnementales dans le champ d’action des CSE 9 septembre 2021 Conception / Réalisation : la CGT Impression Rivet – 4 000 exemplaires
Édito L’enjeu social des questions environnementales dans le champ d’action des CSE La loi « portant lutte contre le dérè- Parce que cette loi va avoir des ef- glement climatique et renforcement fets très concrets dans nos vies et de la résilience face à ses effets » a au travail, nous avons décidé de les été adoptée le 20 juillet dernier par anticiper et d’y discerner tout ce qui le Parlement. Bien loin d’être la « véri- peut constituer un levier en faveur table bascule culturelle globale » pro- des salariés au sein de leurs entre- mise par la ministre de la Transition prises dans le cadre de la transition écologique, ce nouveau texte de loi écologique. est profondément antisocial et lar- Telle est la finalité de ce guide por- gement insuffisant quant à l’urgence tant sur l’enjeu social des questions climatique. environnementales dans le champ À la CGT, nous pensons qu’une loi d’action des CSE. issue des travaux de la Convention En effet, dans le cadre de l’article 40 citoyenne pour le climat, et ce sans de la loi « climat et résilience », les revenir sur ce que nous avons pu dire enjeux environnementaux figureront concernant la mise en place d’une désormais parmi les attributions gé- telle convention, était l’opportunité nérales des CSE. de bâtir une politique de dévelop- Certes, rien n’interdisait jusqu’alors pement humain durable telle que aux élus des CSE d’aborder ces ques- nous la construisons et la défendons tions, mais ils le feront désormais en en tout lieu depuis de nombreuses toute légitimité et dans un rapport années. Une vraie « loi climat » au- de force posé clairement vis-à-vis rait dû être une politique de justice de l’employeur. sociale veillant à combattre les iné- Ce rapport de force, bien que fra- galités sociales et environnementales gile – parce que la loi ne donne pas et construite avec l’ensemble des les moyens nécessaires au dialogue travailleurs pour revaloriser le travail social qu’exige la transition sociale tant dans son contenu qu’en termes et écologique – doit être conforté de salaire et de conditions de travail, et amplifié. en vue de mener une vie digne et de En effet, dans un contexte qualifié redonner sa juste place au collectif. de « transition écologique » qui, à P4
SOM notre sens, appelle urgemment une mutation des modes de production et de consommation, il est essentiel que la dimension environnemen- MAI tale acquière une place réelle dans le dialogue social car il ne saurait y avoir de transition juste sans que les travailleurs et leurs représentants ne RE soient impliqués de bout en bout et sans que la responsabilité des entre- prises ne soit pleinement engagée. Ce guide vise ainsi à dresser les modalités d’action, anciennes et nouvelles, dont peuvent se saisir les élus des CSE pour contraindre la responsabilité sociale et environne- mentale des entreprises en faveur I.Les enjeux environnementaux appréhendés de la préservation de l’emploi et vers sous l’angle des risques 4 davantage de justice sociale. a. L’obligation d’informer les travailleurs 5 Ce guide doit être aussi dans les b. Le droit d’alerte en matière de santé publique et entreprises un point d’appui reven- d’environnement des CSE 5 dicatif de notre démarche CGT au c. Le droit d’expertise des CSE 6 service du progrès social. d. La santé environnementale 6 Aussi, en complément de ce guide, nous avons rédigé une série de II. Les commissions « environnement » 8 fiches qui expliquent le contenu et III. Les « activités sociales et culturelles », outil les conséquences de certains des ar- de sensibilisation et de revendication sur les ticles de la loi « Climat et résilience » enjeux sociaux et environnementaux 10 et ce que la CGT y oppose en termes de véritable politique sociale et en- IV. La Responsabilité sociétale des entreprises vironnementale1. (RSE) 13 Pour que la transition écologique V. S’emparer des apports de la loi « climat et rési- soit l’opportunité de bâtir un avenir lience » pour valoriser l’emploi 16 différent, restons mobilisés ! a. La dimension environnementale devient obliga- Véronique Martin toire et omniprésente dans les débats entre organi- sations syndicales et les employeurs 17 b. L’accord GEPP (ex GPEC) pour mieux anticiper la transition écologique 19 Les questions à poser à l’expert 22 1. Cf. https://analyses-propositions.cgt.fr P5
I. Les enjeux environnementaux appréhendés sous l’angle des risques P6
La dimension environnementale directement la question de la santé dans le périmètre d’action des ins- environnementale au travail. tances représentatives du personnel Cette section propose de faire le est historiquement apparue sous point sur les leviers existants quant l’angle des risques pour la santé des aux risques liés à l’environnement et travailleurs. les espaces de dialogue social à créer La loi « Climat et résilience », bien pour imposer la responsabilité des qu’elle inscrive les enjeux environ- entreprises quant à la santé environ- nementaux parmi les attributions nementale au travail. générales des CSE, n’aborde pas a. L’obligation d’informer les travailleurs L’employeur doit dispenser « une tion utilisés ou mis en œuvre par l’éta- information des travailleurs sur les blissement ainsi que sur les mesures risques que peuvent faire peser sur prises pour y remédier » (article la santé publique ou l’environnement L. 4141-1 du Code du travail). les produits ou procédés de fabrica- b. Le droit d’alerte en matière de santé publique et d’environnement des CSE Tout travailleur ou le CSE peut ployeur de la nature des événe- alerter l’employeur dès lors qu’il ments ; estime que les produits ou les pro- • l’alerte est consignée par écrit ; cédés de fabrication utilisés par • l’employeur examine la situation l’entreprise peuvent engendrer un conjointement avec le représen- risque grave pour la santé publique tant du personnel au CSE qui lui ou pour l’environnement (articles a transmis l’alerte et l’informe de L. 2312-60 et L. 4133-2 du Code du la suite qu’il réserve à celle-ci ; travail). • en cas de divergence entre l’em- En cas de risque pour la santé ployeur et le CSE, le salarié ou publique et pour l’environnement, le représentant du personnel le CSE doit suivre la procédure sui- au CSE ou en cas d’absence de vante : réponse de l’employeur dans un • le représentant du personnel au délai d’un mois, le CSE peut saisir CSE constate, par l’intermédiaire le représentant de l’État dans le d’un salarié, qu’il existe un risque département (article L. 4133-3 du grave pour la santé publique ou Code du travail) ; pour l’environnement ; • si le préfet ne réagit pas, la com- • il alerte immédiatement l’em- mission nationale de la déonto- P7
logie et des alertes en matière une organisation syndicale de de santé publique et d’environ- salariés représentative au niveau nement pourra être saisie par national. c. Le droit d’expertise des CSE Dans les entreprises de 50 salariés et biologiques (cf. nouvelles exigences plus, la loi donne aux CSE une pré- en matière de certification issues de rogative d’expertise dans le cadre l’arrêté du 7 août 2020). de leur mission en santé et sécurité Le coût de la mission est dans ce cas au travail, notamment « lorsqu’un intégralement mis à la charge de risque grave, identifié et actuel, révélé l’employeur. ou non par un accident du travail, une L’employeur peut agir en justice dans maladie professionnelle ou à caractère un délai de dix jours à compter : professionnel est constaté dans l’éta- • de la date de délibération de blissement » dans lequel est implan- l’instance en réunion plénière s’il tée l’instance (article L. 2315-94 du entend contester la nécessité de Code du travail), mais également l’expertise ; en cas d’introduction de nouvelles • de la désignation de l’expert par technologies ou de projet important le CSE s’il entend contester le modifiant les conditions de santé et choix de l’expert ; de sécurité ou les conditions de tra- • de la notification à l’employeur vail. du cahier des charges s’il entend Dans ce cas, le CSE peut prendre une contester la durée, l’étendue ou délibération et désigner un expert le coût prévisionnel de l’exper- habilité au regard de sa compétence, tise ; notamment dans le domaine de l’en- • de la notification à l’employeur vironnement de travail y compris les du coût final de l’expertise s’il expositions chimiques, physiques et entend contester son coût. d. La santé environnementale La santé environnementale est un mentale concernerait en effet « les concept difficile à délimiter, comme relations entre des variables envi- l’ont montré les récents travaux de ronnementales (pollution, nuisances la commission d’enquête sur l’éva- environnementales…), des facteurs luation des politiques publiques de concernant la qualité de l’alimenta- santé environnementale à l’Assem- tion, de l’environnement intérieur blée nationale. La santé environne- (bruit, qualité de l’air…) et de travail P8
(exposition à des produits dangereux, ter pour notre santé et celle des stress…) et la santé »1. écosystèmes ; Depuis 2004, la France élabore tous • réduire les expositions environ- les cinq ans un Plan national san- nementales affectant la santé té-environnement (PNSE) qui se humaine et celle des écosys- décline en plans régionaux pour tèmes sur l’ensemble du terri- observer ces phénomènes qui lient toire ; santé et environnement. Le qua- • démultiplier les actions trième PNSE, intitulé « Un envi- concrètes menées par les collec- ronnement, une santé », couvre la tivités dans les territoires ; période 2021-20252 et se décline en • mieux connaître les expositions 4 grands axes : et les effets de l’environnement • s’informer, se former et informer sur la santé des populations et sur l’état de mon environne- des écosystèmes. ment et les bons gestes à adop- Les CSE peuvent légitimement s’appuyer sur les données et les actions énumérées dans ce plan pour imposer dans le dialogue social les questions relatives aux conditions de travail ainsi qu’à la prévention de la santé des travailleurs et de la population environnante. C’est aussi l’opportunité pour la CGT de faire valoir largement au sein et en dehors de l’entreprise ses positions en matière de politique industrielle : des productions répondant aux besoins de la population avec des emplois de qua- lité, une meilleure répartition des richesses, une prévention active de la santé de tous les salariés ainsi que de celle des populations avoisinantes. En d’autres termes, il est possible de produire sans négliger l’humain et les ressources naturelles dès lors que l’on sort d’une logique de rentabilité à tout prix. L’article 280 de la loi « Climat et résilience » prévoit la création d’un délit géné- ral de pollution de l’eau, de l’air et des sols avec la qualification d’« écocide » lorsque les faits sont commis de manière intentionnelle et qu’ils entraînent des « atteintes graves et durables à la santé, à la flore, à la faune ou à la qualité de l’air, du sol ou de l’eau ». Au-delà de l’atteinte à l’environnement et à ses ressources, la santé des travailleurs constitue un enjeu important de cette disposition. 1. Commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur l’évaluation des politiques publiques de santé environnementale, décembre 2020 https://www2.assemblee- nationale.fr/15/autres-commissions/commissions-d-enquete/commission-d-enquete-sur- l-evaluation-des-politiques-publiques-de-sante-environnementale/(block)/RapEnquete/ (instance_leg)/15/(init)/0-15 2. https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/4_Plan-Sante-Environnement_ Synthese_BAT.pdf P9
II. Les commissions « environnement » P10
En pratique, des CSE se sont empa- porter sur la mise en place d’un rés depuis plusieurs années de la plan de mobilité, la réduction de la dimension environnementale en consommation d’énergie des bâti- créant des commissions dites « envi- ments ou le tri des déchets. ronnement », ou « éthique » ou Les « activités sociales et cultu- encore « écologie/développement relles » (ASC) peuvent en faire partie durable », composées d’élus et de pour inciter à une consommation salariés référents. « écoresponsable » (cf. page 13). Leur champ d’action peut aussi bien Ces commissions, facultatives, nécessitent la signature d’un accord d’entreprise (article L. 2315-45 du Code du travail). Les commissions ont permis à de nombreux CSE d’isoler et d’impo- ser la question environnementale au sein de leur entreprise, ce qui n’est pas négligeable. Aujourd’hui, l’article 40 de la loi « Climat et résilience » incluant de fait et de droit les enjeux environnementaux dans toutes les consultations/informations, on peut se demander quelle peut être encore la pertinence de ces commissions environnement. Les commissions mises en place avant la loi doivent sans doute être mainte- nues pour consolider la sensibilisation et l’expertise acquises sur ces sujets. Mais les CSE doivent alors sans doute veiller à ce que l’entreprise n’utilise pas cette commission pour opérer un partage ou une dilution des sujets sociaux et environnementaux. Dit autrement, il faut être vigilant : la commission envi- ronnement doit être un outil supplémentaire pour traiter les sujets sociaux et environnementaux mais elle ne peut en aucun cas se substituer aux nouvelles obligations du patronat en la matière. P11
III. Les « activités sociales et culturelles », outil de sensibilisation et de revendication sur les enjeux sociaux et environnementaux P12
Le CSE assure ou contrôle la gestion avec l’urgence sociale et environ- de toutes les activités sociales et nementale. culturelles établies dans l’entreprise Les ASC sont en effet l’opportunité au bénéfice des salariés, anciens de s’émanciper des critères du mar- salariés, de leur famille et des sta- ché pour mettre en œuvre concrète- giaires (article L. 2312-78 et article ment une autre manière de réfléchir R. 2312-35 du Code du travail). et de consommer selon une logique Dans le cadre de la transition éco- de circuits courts, de proximité. logique, la mise en place d’activi- C’est, par exemple, le choix opéré par tés sociales et culturelles durables des CSE qui proposent des séjours est un levier d’action important qui ne sont plus calqués sur l’offre pour répondre d’une part à des du marché mais imaginés avec des préoccupations croissantes des acteurs locaux mobilisés sur des salariés de consommer autrement, formes de tourisme alternatives ou plus sobrement, et d’autre part animant des réseaux territoriaux en pour faire passer auprès des sala- matière de « transition touristique ». riés des messages revendicatifs sur Ce peut être aussi des partenariats la nécessité de s’émanciper dans avec des producteurs locaux pour des actions quotidiennes d’un favoriser l’accès à une nourriture système capitaliste incompatible saine et de qualité pour tous. D’une manière plus globale, il s’agit pour les CSE de questionner leur positionnement social et environnemental dans leurs ASC. Pour ce faire, il convient de raisonner en « coût global ». Le coût global d’un bien ou d’un service est le coût cumulé d’un produit tout au long de sa vie, depuis sa conception jusqu’à son démantèle- ment. Le coût global oblige à sortir de la logique à court terme du marché pour considérer les conditions de travail de fabrication et d’exploitation d’un pro- duit, la pollution générée dans la fabrication et l’usage, la qualité des emplois, etc. P13
Exemples de critères sociaux et environnementaux pour mettre en œuvre une poli- tique d’achats responsables • Prévention de la pollution • Utilisation durable des res- • Implication auprès des commu- sources nautés • Atténuation des changements • Éducation et culture climatiques et adaptation • Création d’emploi • Protection de l’environnement, • Développement des technolo- biodiversité et réhabilitation des gies habitats naturels Environnement Communautés et • Création de richesses et revenus développement local • Santé • Investissement dans la société • Pratiques loyales en matière d’in- formation et de contrats • Protection de la sécurité des GOUVERNANCE DE • Emploi et relations employés/ consommateurs L’ORGANISATION employeurs • Consommation durable • Conditions de travail et protec- • Assistance, résolution des tion sociale réclamations et des litiges • Dialogue social Questions relatives Relations • Protection des données et de la aux consommateurs • Santé et sécurité au travail et conditions vie privées des clients • Développement du capital de travail • Accès aux services essentiels humain • Éducation et sensibilisation • Lutte contre la corruption • Devoir de vigilance • Engagement politique respon- • Situation présentant un risque sable pour les droits de l’homme • Concurrence loyale • Prévention de la complicité Respect des Loyauté des • Promotion de la responsabilité • Remédier aux atteintes aux droits humains pratiques sociétale dans la chaîne de valeur droits de l’Homme • Respect des droits de propriété • Discrimination et groupes vulnérables • Droits civils et politiques • Droits économiques et sociaux • Principes fondamentaux et droit au travail Exemples de critères de politique d’achats responsables Source : Actuel CE/CSE, 30/04/2021 P14
IV. La Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) P15
La loi Pacte du 22 mai 2019 a modi- des conséquences de leur acti- fié l’article 1833 du Code civil en pré- vité sur la société et l’environne- cisant que l’entreprise « est gérée ment. Elles ont donc des comptes dans son intérêt social, en prenant en à rendre aux populations sur l’en- considération les enjeux sociaux et semble des impacts de leur activité. environnementaux de son activité ». Cette responsabilité concerne ainsi Cela revient à dire que les entre- l’ensemble des dimensions de la vie prises ne choisissent pas d’être sociale, mais elle s’exerce de manière socialement responsables, elles particulière à l’égard des salariés qui exercent une responsabilité sont au cœur du fonctionnement de sociale objective du fait même l’entreprise. Pour la CGT, cela implique que les salariés doivent avoir un ensemble de droits d’intervention concernant l’ensemble des dimensions de la RSE allant jusqu’à l’intervention sur la stratégie de l’entreprise. La RSE n’a de sens que si elle fait l’objet d’une appropriation collective et citoyenne afin d’échapper à la forme qu’elle prend trop souvent : celle d’un engagement unilatéral et auto-administré, servant bien souvent principale- ment les objectifs de communication interne et externe des firmes multina- tionales et masquant l’incompatibilité des aspirations des actionnaires avec celles d’autres acteurs, en particulier celles des salariés. Pour parvenir à cette appropriation collective, les salariés doivent faire pas- ser la RSE d’une logique unilatérale (initiatives volontaires décidées par la seule direction de l’entreprise) à une logique contractuelle avec les parties prenantes. Si la loi fixe la liste des informations à fournir, elle laisse l’employeur libre de la méthode pour y répondre et libre aussi du niveau d’exigence pour se déclarer socialement responsable. S’approprier la RSE suppose ainsi de ne plus laisser la direction de l’entreprise seule juge de la méthode. L’article 116 du Code du commerce et Les entreprises et sociétés concernées le décret du 24 avril 2012 sur les obli- sont les suivantes : gations des entreprises en matière • les entreprises cotées ; sociale et environnementale exi- • les entreprises non cotées ayant gent un reporting sur « la façon un bilan ou un chiffre d’affaires dont les entreprises prennent en d’au moins 100 millions d’euros compte les conséquences sociales et employant 500 salariés au et environnementales de leur acti- moins. vité et s’acquittent de leurs enga- Sur le plan environnemental, il s’agit gements sociétaux en faveur du de : développement durable ». • la politique environnementale P16
générale ; tendent faire de la RSE leur ligne • la prévention des pollutions et la de conduite sont tenues de le jus- gestion des déchets ; tifier sur la base d’engagements • l’utilisation durable des res- explicites et avec des critères de sources (eau, matières pre- résultats établis et reconnus. mières, énergies) ; Les salariés peuvent ainsi contrôler • les mesures évitant les effets la véracité de leurs engagements négatifs sur le changement cli- et le cas échéant, dénoncer ce qui matique (gaz à effet de serre, relève de la seule communication respect de la biodiversité). (greenwashing dans le cas de l’envi- Ainsi, les entreprises qui pré- ronnement par exemple). À l’occasion notamment du rapport annuel d’activité remis au conseil d’administration, la consultation se fera normalement avec les représentants du comité d’entreprise au conseil d’administra- tion, s’il y en a : « Les IRP et les parties prenantes participant à des dialogues avec les entreprises peuvent présenter leur avis sur les démarches de RSE des entreprises en complément des indicateurs présentés » (article L. 225- 102-1 du Code du commerce). Il s’agit donc d’un avis officiel, intégré au rapport et accessible aux tiers. Dans les autres entreprises, les IRP doivent exiger de la direction qu’elle solli- cite officiellement l’avis de représentants du personnel. Dans ce cadre, il faut : • engager un vrai travail méthodique de fond pour établir un diagnostic de départ partagé sur les enjeux et les risques de l’entreprise sur les plans sociaux, environnementaux et sociétaux, et sur ses forces et faiblesses ; • clarifier les niveaux d’exigences à se donner par rapport à des standards de bon niveau et reconnus. Il faut donc se documenter sur les différents domaines de la RSE, chercher des comparaisons, travailler avec les autres parties prenantes (associations locales par exemple) ; • lister, par domaines, les bonnes questions à poser pour vérifier que l’en- treprise assume bien ses obligations (qu’est-ce que l’entreprise doit avoir fait ou atteint, dans chaque domaine, pour pouvoir prétendre être socia- lement responsable ?). POUR ALLER PLUS LOIN : • Le site de l’ORSE (Observatoire de la responsabilité sociétale des entre- prises) : www.reportingrse.org • Le site du ministère de la Transition écologique : https ://www.ecologie.gouv.fr/responsabilite-societale-des-entreprises P17
Le radar environnemental : l’Ugict-CGT et Secafi ont élaboré un outil d’autodiagnostic environnemental pour permettre aux sala- rié.e.s d’exercer une lecture critique de la stratégie environnemen- tale de leur entreprise. Cet outil vous permettra de repérer les points faibles et d’identifier les bonnes pratiques de votre entreprise. Il vous permettra aussi de mesurer le rythme des améliorations en cours et d’expri- mer vos suggestions. Il y a 7 thèmes dans ce questionnaire, le compléter prend environ 20 minutes. Chaque réponse a une valeur qui lui est attribuée afin d’obtenir un score global par chapitre et une représentation sous forme de radar. Pour en savoir plus : https://ugictcgt.fr/radar/ P18
V. S’emparer des apports de la loi « Climat et résilience » pour valoriser l’emploi P19
a. La dimension environnementale devient obligatoire et omni- présente dans les débats entre organisations syndicales et l’em- ployeur (art. 40) Dans les entreprises d’au moins ou juridique, les conditions d’emploi, 50 salariés, l’employeur devra « assu- de travail, la durée du travail, et la rer l’expression collective des salariés formation professionnelle etc., l’in- permettant la prise en compte per- formation et la consultation sur ces manente de leurs intérêts dans les mesures devront prendre en compte décisions relatives à la gestion et à leurs conséquences environnemen- l’évolution économique et financière tales. de l’entreprise ainsi qu’à la prise en À l’occasion des consultations récur- compte de leurs conséquences envi- rentes du CSE sur les 3 thèmes : ronnementales » (Code du travail, orientations stratégiques de l’en- article L. 2312‐8 modifié). treprise ; situation économique et Autrement dit, lorsque l’employeur financière de l’entreprise ; politique consultera le CSE sur les questions sociale de l’entreprise, conditions intéressant l’organisation, la gestion de travail et emploi. Il est prévu que et la marche générale de l’entreprise, ces consultations doivent également notamment à l’occasion de mesures tenir compte des conséquences envi- de nature à affecter le volume ou la ronnementales de l’activité de l’en- structure des effectifs, la modifica- treprise. tion de son organisation économique L’information sur les « conséquences environnementales de l’activité de l’entreprise » relèvera de l’ordre public. Un accord d’entreprise ou une convention collective ne pourra donc pas exclure cette infor- mation du champ des trois consultations obligatoires récurrentes. L’absence de moyens ad hoc (ni heures de délégation, ni droit de veto, etc.) pour appréhender un sujet nouveau et vaste dans un champ d’expertise déjà très ample. Qui va conduire la réflexion du CSE sur les questions environnementales ? Le CSE en plénière ou la commission SSCT ? Voire une commission créée spécia- lement sur le sujet ainsi qu’il est déjà possible de le faire ? Le projet de loi ne se positionne pas sur ce point et il appartient donc à chaque CSE d’évaluer la manière optimale de travailler sur ces questions, et d’envisager en interne par exemple de créer en collaboration avec l’employeur une commission dédiée disposant de certains moyens. P20
Les représentants du personnel doivent pouvoir utiliser ces nou- velles dispositions pour participer à l’analyse prospective des inci- dences de la transition environnementale sur les métiers et les emplois et à l’anticipation de leurs effets. Le CSE doit devenir le lieu du débat sur le devenir des emplois et des métiers dans la transition, qui a fait défaut en amont et au cours de l’élaboration de la loi. Que ce soit au niveau des branches expert-comptable à l’occasion des ou des entreprises, les mesures prises 3 consultations récurrentes (article lors des négociations obligatoires sur L. 2312-17 du Code du travail) en la gestion prévisionnelle des emplois vue d’analyser les conséquences et des compétences (GPEC) devront environnementales de l’activité répondre notamment aux enjeux de de l’entreprise. La mission de l’ex- transition écologique. Le stage de for- pert-comptable portera sur « tous mation économique dont bénéficient les éléments d’ordre économique, les membres titulaires du CSE est financier ou social ou environnemen- élargi aux conséquences environne- tal nécessaires à la compréhension des mentales de l’activité des entreprises. comptes, de la stratégie ou de la poli- Le CSE pourra recourir à un tique sociale » de l’entreprise. Les contours de la comptabilité environnementale sont très flous et difficiles à aborder. Afin d’apprécier la qualité sociale et environnementale d’une entre- prise, il y a néanmoins un certain nombre de questions à poser au sujet de la valeur ajoutée, des investissements, de la situation financière, de l’activité et des aides publiques perçues (cf. « Le recours à un expert-comptable », page 24). Le champ de la base de données tations et informations récurrentes économiques et sociales (BDES) est mises à disposition par l’employeur. élargi aux « conséquences environne- Actuellement ce sont les articles mentales de l’activité de l’entreprise » R. 2312-8 et R. 2312-9 qui définissent (article 41). Elle se dénomme désor- le contenu précis de la BDES. L’adop- mais la BDESE, base de données tion d’un décret après la loi sera donc économiques, sociales et environne- nécessaire pour faire évoluer les mentales. La BDES est l’ensemble des rubriques de la BDES. informations nécessaires aux consul- P21
Il existe déjà une rubrique sur les informations environnementales mais elle est aujourd’hui limitée aux entreprises d’au moins 300 salariés réalisant des déclarations de performance extra‐finan- cière vérifiées par des experts indépendants. b. L’accord GEPP (ex GPEC) pour mieux anticiper la transition écologique L’article 41 de la loi « Climat et rési- métiers et donc le maintien et déve- lience » intègre les enjeux de la tran- loppement de l’emploi durable. sition écologique à la négociation Dans une démarche prospective, l’ac- relative à la Gestion de l’emploi et cord doit s’attacher à cartographier des parcours professionnels (GEPP). les métiers de l’entreprise et établir Cette négociation se déroule tous les passerelles qui existent entre eux. les trois ans dans les entreprises de Une fois identifiés, leur devenir sera plus de 300 salariés et devra donc examiné à l’aune de la stratégie de désormais prévoir la mise en place l’entreprise bien sûr mais désormais d’un « dispositif de gestion prévi- en fonction des évolutions techno- sionnelle des emplois et des compé- logiques et écologiques. Ce travail tences notamment pour répondre aux révèle toute l’importance du contenu enjeux de la transition écologique ». des fiches de postes qui doivent être Ce dispositif peut être complété de élaborées avec ceux qui exercent mesures de formation profession- les métiers, pour obtenir la vision nelle, abondement du compte per- la plus précise du travail prescrit et sonnel de formation, VAE, bilan de réel. L’implication des représentants compétences et accompagnement du personnel élus ou mandatés est de la mobilité géographique ou pro- indispensable tout au long des tra- fessionnelle (hors accord de perfor- vaux pour veiller au bon déroule- mance collective). ment de cette démarche prospective L’objectif essentiel de la GEPP reste d’anticipation. l’anticipation de l’évolution des Une commission ad hoc du CSE pourrait être en charge de la gestion active de l’emploi et des qualifications, pour anticiper les besoins en termes de qualifications et sécuriser les emplois. En effet, l’efficacité des démarches l’évolution quantitative et qualita- d’anticipation est fortement subor- tive de l’emploi et des métiers. donnée à la connaissance et à l’ana- Une fois les métiers identifiés ainsi lyse de la stratégie de l’entreprise que leurs évolutions, l’accord doit et de ses incidences éventuelles sur également organiser le recensement P22
précis des qualifications des sala- peut évaluer ses possibilités d’évo- riés présents dans l’entreprise (leurs lution professionnelle et de faire ins- savoirs, savoir-faire, leur niveau d’ex- crire les formations qui en découlent périence). L’entretien professionnel, dans le plan de développement des s’il est correctement et régulière- compétences de l’entreprise. L’em- ment réalisé dans l’entreprise, peut ployeur mesure les attentes et les servir de support à ce recensement. potentialités du salarié, les évolu- L’entretien professionnel est obli- tions professionnelles qu’il doit lui gatoire pour chaque salarié tous les proposer, compte tenu des perspec- deux ans, dans toutes les entreprises, tives d’évolution de l’emploi et du quelle que soit leur taille. C’est une travail (techniques, technologies…) rencontre formelle entre un salarié de l’entreprise. et son employeur dans une logique La commission ad hoc du CSE peut d’évolution professionnelle. Il ne être destinataire chaque année du doit pas servir à juger le salarié et nombre d’entretiens professionnels ne porte donc pas sur l’évaluation réalisés et des mesures qu’ils ont de son travail. Il relève d’une logique emportées. d’orientation, d’évolution. Le salarié Investir la formation professionnelle Dans les entreprises, la réforme de septembre 2018 a substitué au plan de formation, le plan de développement des compétences. Il s’agit d’un document écrit, obligatoire seulement dans les entreprises de plus de 300 salariés, qui liste l’ensemble des actions de formation, de bilans de compétences et de validation des acquis de l’expérience que l’employeur a décidé de mettre en œuvre de sa propre initiative ou à la suite des propo- sitions des représentants du personnel ou des demandes individuelles des salariés. Il est donc construit unilatéralement par l’employeur. Pour que la formation professionnelle contribue réellement à conju- guer emploi et enjeux environnementaux comme technologiques, il est nécessaire de renforcer le rôle des représentants du personnel en la matière. Pour cela, la commission formation est à mettre en place dans chaque entreprise quel que soit le nombre de salariés. Cette commission doit être associée à la construction du plan ainsi qu’au suivi de sa mise en œuvre. La loi demeure évasive, c’est pourquoi toutes ces préroga- tives sont à revendiquer dans l’accord GEPP. POUR ALLER PLUS LOIN https://analyses-propositions.cgt.fr/guide-sinformer-se-former-semanciper-0 P23
c. Le recours à un expert-comptable L’article 41 de la loi prévoit que les CSE pourront recourir à un expert-comp- table pour analyser les conséquences environnementales de l’activité de l’en- treprise. Les principaux documents comp- ment mobilisables) de l’entre- tables sont les suivants : prise ; • le compte de résultat (retrace • la base de données économiques toutes les recettes et dépenses et sociales, désormais également sur le semestre ou l’année) ; environnementale (BDESE) conte- • le bilan comptable qui décrit ce nant un ensemble de données que détient l’entreprise (l’actif) larges (rémunérations des sala- et les modalités de financement riés, des actionnaires et créanciers, (passif) ; effectif et emploi, investissement, • le tableau de flux de trésorerie égalité pro, flux commerciaux qui analyse la situation de la et financiers et bientôt données trésorerie (sommes immédiate- environnementales). Le problème majeur de la BDES : il n’y a pas de format contraignant, ce qui rend délicat une analyse générale. À partir de ces principaux docu- • le partage de la valeur ajoutée ments, on peut notamment appré- (quelle part revient aux salaires, cier les éléments suivants : aux créanciers, aux action- • la stratégie globale de l’entre- naires ?) et son évolution ; prise (exemple : externalisation, • les stratégies du groupe (prix investissement, modes finance- de transfert, remontées de divi- ment) ; dendes, management fees ou • les productions et ce qu’elles rap- charges déductibles, etc.), si l’en- portent (diversification ou pas ?) ; treprise fait partie d’un groupe. Il ne faut pas se faire prendre au piège de la technique comptable. La production de chiffres est un enjeu politique, de luttes. L’em- ployeur trouvera toujours une manière de montrer qu’il est impos- sible d’investir, d’augmenter les salaires, que la seule stratégie possible est celle présentée, etc. Il ne faut pas laisser les mains libres à l’expert-comptable. L’objectif est de poser les bonnes questions pour orienter le travail de l’expert, qui viendra en retour nourrir la démarche revendicative. P24
Les questions à poser à l’expert Voici un certain nombre de questions qu’on peut se poser et poser à l’ex- pert, via une lettre de mission par exemple : Quelques ratios simples à demander systématiquement : • Valeur ajoutée / chiffre d’af- donnée permet de saisir com- faires : ce ratio permet d’avoir bien l’entreprise et les action- des indications sur les straté- naires gagnent grâce au travail gies d’externalisation. Plus le des salariés. ratio est faible, plus l’entre- • Frais de personnel par sala- prise externalise. rié : cette information donne • Valeur ajoutée par salarié : des indications sur la poli- cette information donne une tique salariale de l’entreprise, indication de la rentabilité de notamment si le turnover est l’entreprise. important. • Résultat net par salarié : cette Des questions à poser à ou avec l’expert- comptable : u Sur la valeur ajoutée tables : • Comment s’est effectué le par- − Quelle part du profit a tage de la valeur ajoutée ? effectivement servi à • Comment ce partage a-t-il financer des investisse- évolué et avec quelle justifi- ments ? cation / pour quelle stratégie ? − Quelle part a servi à rému- u Sur l’investissement nérer les actionnaires ? • Investissement productif ou • Comment l’investissement investissement financier ? a-t-il évolué ? Qu’est-ce que • Quel est le coût du capital ? cela reflète de la stratégie de (selon la CGT, il s’agit de la l’entreprise ? part du profit non réinves- • Quelle part de l’investis- tie, c’est-à-dire la somme des sement correspond à une dividendes et des frais finan- démarche environnemen- ciers) et en termes comp- tale (en vue de détecter le P25
« greenwashing », c’est-à-dire u Sur la situation financière de « faux » investissements en • Quel est l’échéancier de l’em- faveur de l’environnement) ? prunt de l’entreprise ? • Quelles ont été les dépenses • Quelle est la stratégie globale en R & D (et faire le lien avec de financement ? l’environnement) ? • Pourquoi y a-t-il eu un endet- • Quelle est la politique de l’en- tement supplémentaire ? treprise en matière de bre- • Qu’est-ce qui explique la vets ? variation du besoin en fonds de roulement (BFR) ? u Sur l’activité • Quelle est la politique d’amor- de l’entreprise tissement ? • Quels sont les éléments excep- tionnels (charges ou produits) u Sur les aides publiques de l’année et d’où viennent- • Demander le détail des aides ils ? publiques touchées par l’en- • S’il y a eu des provisions, treprise. qu’est-ce qui les justifie ? • À quoi ces aides publiques • À quoi correspondent les ont-elles effectivement servi ? transferts au sein du groupe (il • Comment le Crédit impôt s’agit de débusquer des recherche (CIR) a-t-il été uti- m a n œ u v re s co m pt a b l e s lisé ? visant à diminuer le résultat • Y a-t-il eu des aides publiques pour justifier la pression à la spécifiques pour les enjeux baisse sur les salaires) ? environnementaux et si oui, quel usage en a-t-il été fait ? P26
Vous pouvez aussi lire