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« L’hydrogène
européen :
l’autre enjeux de
la crise Russo-
ukrainienne »
Raphaël Cario
Animateur du GT Hydrogène européen

Sous la direction de Dr Élise Bernard et Edouard Gaudot
L’hydrogène européen :
l’autre enjeux de la crise
Russo-ukrainienne

FÉVRIER 2022

AUTEUR

Raphaël Cario, animateur du GT Hydrogène européen

COMITÉ DE RELECTURE

Edouard Gaudot, Directeur des relations extérieures EuropaNova

Elise Bernard, Directrice des études EuropaNova

ATTRIBUTION
No Commercial Use - No Modification 3.0 France (CC BY-NCND 3.0 FR)

PROPOSITION DE CITATION
Cario, R. L’hydrogène européen: l’autre enjeux de la crise Russo-ukrainienne.
Paris:EuropaNova Academia [En Ligne]

PHOTO DE COUVERTURE
© Russian Defense Ministry Press Service/Raphaël Cario

GRAPHISME
Design : www.klar.graphics
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                                                           2
Abstract :
Il y a aujourd’hui une menace militaire aux frontières de l’Europe pour les enjeux
de production d’hydrogène renouvelable. L’Ukraine est directement citée par les
stratégies européennes comme pouvant représenter près de 8 GW d’hydrogène
aux vues d’une importation (10% de la consommation prévue en 2050). En effet,
elle dispose d’un important potentiel de production d’électricité décarboné,
solaire et éolien, par exemple le réservoir de Kakhovka et ses 4 GW de capacité
potentielle. Situé dans l’Est du pays, il est à moins de 200 km de Donetsk la
“capitale” informelle des indépendantistes du Donbass et à 150 km de la Crimée
menacée directement par la Russie. De plus, cette dernière vise à se hisser en
tête de la nouvelle catégorie des exportateurs mondiaux d’hydrogène décarbo-
né, principalement toujours produite par des technologies à gaz couplées avec
un captage carbone. Maintenir la dépendance européenne aux exportations ga-
zières russes est centrale pour le maintien d’une influence de la Russie à l’Est de
l’Europe et notamment, limiter le développement d’une production énergétique
ukrainienne à l’export. Le soutien commercial à long terme à l’Ukraine en matière
énergétique ne saurait remplacer un soutien diplomatique immédiat et ne peut
pas être une distraction face aux besoins directs de l’Ukraine contre la menace
russe. Les menaces militaires à court terme pour l’Europe seront les causes des
futures crises énergétiques. La diplomatie européenne ne peut se passer de
combattre les deux.

Introduction
Le conflit avec l’Ukraine et la crise du gaz qui l’a précédée a mis en lumière
la dépendance commerciale, et spécifiquement énergétique, de l’Union
Européenne face à la Russie. Aujourd’hui, la Russie est le premier fournisseur
de gaz naturel et de pétrole de l’UE (en 2018, respectivement 40 % et 27 %
de leurs importations extracommunautaires (1) ). Cette dépendance est de-
venue un moyen de pression russe face à la diplomatie européenne, divisant
la réponses des États membres et générant des conflits internes, notamment
par la hausse des prix (2) . Face à cette dépendance au gaz et aux considé-
rations climatiques d’une consommation de combustibles fossiles parmi les
plus polluants, la question se pose: décarboner, mais comment. La diversifi-
cation et le verdissement de la consommation énergétique européenne sont
un des objectifs majeurs de l’UE, notamment dans le paquet Fit for 55 (3).

La production et consommation d’hydrogène comme vecteur énergé-
tique sont au centre des stratégies européennes, nationales et suprana-
tionales. Les progrès technologiques du secteur peuvent laisser entrevoir
une solution dans les domaines non-electrifiables de l’économie (4).

Massivement utilisé dans l’industrie métallurgique, la production d’engrais, le
raffinage, il trouve de nouvelles applications aujourd’hui dans la perspective
d’une consommation énergétique tournée vers l’électrification. Cependant,
la production d’hydrogène est actuellement massivement d’origine fos-
sile, peut être produite à partir d’électricité et d’eau (électrolyse), et donc
de manière décarbonée pour peu que cette électricité soit bas carbone.

La production et consommation d’hydrogène comme vecteur énergétique sont
au centre des stratégies européennes, nationales et supranationales. Les progrès
technologiques du secteur peuvent laisser entrevoir une solution dans les do-
maines non-electrifiables de l’économie . Massivement utilisé dans l’industrie mé-
tallurgique, la production d’engrais, le raffinage, il trouve de nouvelles applications
aujourd’hui dans la perspective d’une consommation énergétique tournée vers
l’électrification. Cependant, la production d’hydrogène est actuellement massive-
ment d’origine fossile, peut être produite à partir d’électricité et d’eau (électrolyse),
et donc de manière décarbonée pour peu que cette électricité soit bas carbone.

S’il est de plus en plus simple et rentable de produire de l’hydrogène par
électrolyse, son utilisation pourrait accentuer l’efficacité des systèmes éner-
gétiques basés sur le renouvelable. Un surplus des production éolien et so-
laire pendant des périodes de faible consommation pourrait être utilisé pour
produire de l’hydrogène, qui serait ensuite brûlé lors des périodes de forte
consommation mais de faible production (par exemple, la nuit est une période
de forte consommation énergétique et de faible production du photovoltaïque).
Cependant, dans ce nouveau secteur central au mix énergétique européen
et à ses objectifs, le conflit entre Russie et Ukraine rejaillit dans la stratégie
de l’Europe, ajoutant une dimension supplémentaire aux tensions actuelles

L’Ukraine comme producteur exportateur aux portes de
l’Union européenne
Dans sa vision stratégique de 2018 sur la neutralité climatique de l’Union (5) , la
Commission européenne prévoit que la consommation d’hydrogène à des fins
énergétiques pourrait passer de 2 % aujourd’hui à 13-14 % du mix énergétique
d’ici 2050. Lors de la publication de sa stratégie hydrogène en juillet 2020 (6) , la
Commission a détaillé pour la première fois ses objectifs de production. Entre 2025
et 2030, la capacité installée des électrolyseurs dans l’Union européenne devrait
atteindre au moins 40 GW, et la production d’hydrogène décarboné, jusqu’à 10
millions de tonnes par an. La capacité installée d’électrolyseurs dans l’UE devrait
atteindre le même niveau dans les pays des Partenariats Oriental et Euromed (7),
sans la production et la coopération desquels l’Europe ne voit pas la réalisation
des objectifs de la stratégie. L’accent est mis sur l’Ukraine qui est directement
citée par la stratégie comme pouvant représenter près de 8 GW aux vues d’une
importation. En effet, elle dispose d’un important potentiel de production d’électri-
cité décarboné, solaire et éolien (notamment dans le réservoir de Kakhovka) (8).

Par conséquent, le 23 juillet 2021, la Banque européenne pour la reconstruction
et le développement (BERD) et le gestionnaire du réseau de transport de gaz de
l’Ukraine (GTSOU) ont signé un accord sur leur coopération dans le domaine de
l’hydrogène bas carbone (9) . Ce positionnement de l’Ukraine à la double utilité
de limiter la dépendance ukrainienne au trafic du gaz russe sur son sol, qui a été
un moyen de pression majeure pendant la guerre de 2014, et de pallier la baisse
des revenus du gaz face aux routes alternatives (10).

Le 22 février, le gouvernement allemand annonce suspendre le Nord Stream
2 à la suite de l’entrée des forces russes dans le Donbass. Les gazoducs vers
l’Allemagne et TurkStream (11) vers la Turquie ont affaibli la position ukrainienne
comme pays de transit du marché du gaz, marquant un manque à gagner
important pour l’économie ukrainienne. La perte engendrée par la mise en
fonctionnement du Nord Stream 2 représente près de 2 milliards d’euros par
an. Un accord passé par l’Allemagne avec les Etats-Unis promettait €149 million
d’investissements allemands en Ukraine pour compenser la perte (12). Au total,
ce sont près d’un milliard de dollars que les États-Unis et l’Allemagne se sont
engagés à mobiliser pour le fonds, avec des investissements du secteur privé.
Thijs van de Graaf, auteur principal du rapport (13) de l’Agence internationale
pour les énergies renouvelables (IRENA) sur la géopolitique de l’hydrogène, a
décrit un changement géostratégique causé par le nouveau marché de l’hydro-
gène «créant une nouvelle classe d’exportateurs d’énergie, et remodelant les
relations géopolitiques et les alliances entre pays» et réduisant la pression sur
des points maritimes clés comme le détroit d’Ormuz. Jusqu’à présent, l’Ukraine
a été l’un des principaux pays de transit du gaz naturel. Elle pourrait devenir
un pays exportateur. Le réseau de gaz ukrainien faciliterait cette transition. Ses
pipelines moins utilisés pourront être convertis pour le transport de l’hydrogène
depuis l’Ukraine vers les régions charbonnières du sud-est de l’Europe et vers
l’ouest via la Slovénie. Une route d’exportation de l’Ukraine vers l’UE pourrait voir
le jour, en passant par les réseaux de la Slovaquie et de la République tchèque
jusqu’en Allemagne. La Hongrie pourrait dès lors devenir une zone de transit
majeur, tant pour sa propre décarbonation que pour le nouveau backbone euro-
péen de l’hydrogène. FGSZ, l’opérateur du réseau de gaz hongrois, exploite un
réseau mature de 5 874 km qui pourrait lier l’Ukraine à la Slovénie et à l’Autriche
(14) .

La possibilité pour l’Ukraine de devenir un producteur et exportateur majeur de
marché européen de l’hydrogène est donc central pour compenser ses pertes
commerciales comme pays de transit et pour limiter sa dépendance à la Russie
(15). C’est également une de ses ambitions de se rapprocher de l’Union com-
mercialement. Son statut de producteur sera également central pour arriver à
une meilleure autonomie stratégique énergétique de l’UE face à la Russie (15).
Cependant, les Etats-membres conservent une ambiguïté individuelle sur le rôle
qu’ils souhaitent voir prendre aux importations d’hydrogène, face à la tentation
d’une autosuffisance dans sa production.

Les Européens en ordre dispersé
Deux positions existent vis-à-vis de la production d’hydrogène décarboné pour
le marché européen. Si l’Allemagne assume qu’elle ne pourra pas assurer à
elle seule une production suffisante d’hydrogène, elle préconise des accords
d’importation avec des pays à fort potentiel de production. Ces pays sont pour
la plupart des pays avec un potentiel de production d’électricité décarboné
important, avec de faibles débouchées pour le marché national (16) . En no-
vembre, l’Allemagne signe un accord avec la Namibie (17) (représentant 3 GW
de capacité d’électrolyseur). Annalena Baerbock, Ministre fédérale allemande
des Affaires étrangères (Verts), a annoncé le 17 janvier, lors de sa visite dans
la capitale ukrainienne, l’ouverture par le gouvernement allemand d’un «bureau
pour la diplomatie de l’hydrogène à Kiev (18)» .

Cependant, face aux objectifs d’importations allemands, la France prend le parti
d’une production européenne indépendante, sans importation extracommunau-
taire. Le gouvernement français a, pour le moment, parié sur une production
nationale basée sur une technologie et une consommation française (19). En
juin dernier, les ministres de l’énergie français, hongrois estonien et polonais se
sont tous clairement prononcés contre les importations d’hydrogène lors d’une
réunion des 27 ministres européens.

Les Européens se sont vu rappeler l’importance de la sécurité énergétique en
2006 et 2009, lorsque Gazprom, le producteur de gaz russe, a interrompu ses
approvisionnements via l’Ukraine, ce qui a laissé plusieurs États membres de
l’UE, notamment la Roumanie et la Bulgarie, face à une grave pénurie de gaz
pendant plusieurs semaines au milieu de l’hiver et interrompant d’importantes
productions industrielles.
L’arrêt des approvisionnements a représenté 100% de la consommation en
Bulgarie, 35% en Roumanie et près de 60% dans le sud de l’Allemagne (10%
au total) (20). Dès lors, les ambitions de diversification ont été accentuées. Ces
divergences de stratégie représentent une différence d’approche au soutien à
l’Ukraine face à la Russie. La double sortie du nucléaire et du charbon a entraîné
une forte pression gazière qui intensifie la dépendance allemande au gaz russe.

De plus, la position allemande est bloquée au sein même de la coalition.
L’opposition des Verts et des libéraux à Nord Stream 2 face au soutien du SPD,
limite la marge de manœuvre politique et maintient l’Allemagne dans une am-
bivalence diplomatique. L’aide allemande passe par sa politique commerciale.
Cependant, dans le conflit actuel, sa faible réponse diplomatique, notamment le
blocage des exportations du matériel militaire (21) , a été critiquée (22).

La Russie tente de limiter les pertes commerciales
Face aux objectifs de réduction de la dépendance au gaz russe, aidé par une
consommation accrue d’hydrogène, la Russie vise à se hisser en tête de la
nouvelle catégorie des exportateurs mondiaux d’hydrogène décarboné. En Août
2021, le Premier ministre russe Mikhail Mishustin avait approuvé la production
d’un hydrogène russe précisant que “le développement de l’énergie hydrogène
réduira les risques de perte de marchés énergétiques” (23) . Son objectif est de
20 % du marché mondial de l’hydrogène d’ici 2030. Cela représente 200 000
tonnes d’hydrogène d’ici 2024 et plus de 2 millions d’ici 2030 (24) D’ici 2050, la
Russie prévoit d’exporter jusqu’à 50 millions de tonnes d’hydrogène, 50% de la
consommation actuelle de l’Europe et jusqu’à un tiers de sa future consomma-
tion (25). Cela représenterait entre 23 et 100 milliards de dollars supplémentaires
dans leur économie (26).

Ces objectifs passent notamment par l’exploitation de nouvelles ressources du
territoire russe et la conversion de projets gaziers existants. Un des nouveaux
lieux de production russe pourrait être l’Arctique. En juin 2021, Novatek a annon-
cé (27) configurer son projet Obsky de gaz naturel liquéfié pour le remplacer par
une production d‘ammoniac (dérivé de l’hydrogène, plus simple à transporter
sans réseau de pipelines) avec un objectif de 2,2 millions de tonnes d’ammoniac
par an à partir de 2027 (28).

De plus, l’allemand Uniper a signé avec Novatek un accord d’approvisionnement
à long terme de 1,2 million de tonnes d’ammoniac “bleu” (29) annuel de la pé-
ninsule de Yamal en Sibérie, à Wilhelmshaven. Enfin, la Russie, par l’Arctique, a
le potentiel de devenir un acteur central de l’extraction des matières premières
nécessaires à la production d’hydrogène (notamment pour la production d’élec-
trolyseurs, comme les terres rares, le cuivre et le nickel) (30).

Cependant, la production russe est liée à une approche différente des autres
pays avec l’ambition de devenir des exportateurs. Le futur hydrogène russe
devrait être principalement produit par des technologies à gaz couplé avec un
captage carbone. En effet, la Russie ne sera pas en mesure à court terme de
fournir massivement de l’hydrogène décarboné à l’UE, principalement en raison
de la part insuffisante des énergies renouvelables dans la production nationale
d’électricité. La possibilité d’importer en Europe de l’hydrogène “bas-carbone”
ouvre une fenêtre d’opportunité pour le secteur énergétique russe (31).
Cela marque le premier différend entre l’Ukraine et la Russie dans leur approche
du marché européen de l’hydrogène. Si l’Ukraine vise une production basée sur
les renouvelables, le futur l’hydrogène russe sera très probablement “bleu” (i.e.
vaporeformage du gaz et captage carbone diminuant jusqu’à 90% des émissions
liées). De plus, ce type de production était, jusqu’à la flambée des prix du gaz, le
mode de production bas carbone le plus compétitif (32). Plus simple à produire
et moins cher, l’hydrogène russe pourrait être un concurrent important. Pour
assurer des parts de marché russes, la Russie devra garantir une consommation
d’hydrogène fossile en Europe. L’importation de ce dernier pourrait maintenir
une dépendance au gaz russe et aux ressources fossiles.

A l’échelle européenne, c’est l’Allemagne qui a été le plus grand défenseur de la
consommation d’hydrogène fossile décarboné (bleu). L’été dernier un rapport
(33) du conseil allemand de l’hydrogène se prononce en faveur de l’hydrogène
“bleu”. C’est seulement depuis janvier 2022 avec le nouveau gouvernement de
coalition que l’Allemagne a commencé à remettre en question leur soutien et à
noter le danger pour une dépendance continue aux importations russes (34).

L’ambition de la Russie de maintenir son assise dans le marché de l’énergie
européen prend une nouvelle tournure dans la perspective d’une invasion de
l’Ukraine. Si le gaz est aujourd’hui un point de pression, financier et industriel,
une invasion affaiblit les objectifs européen d’importation d’hydrogène ukrainien.
Le site de production au plus grand potentiel en Ukraine est le réservoir de
Kakhovka (35) situé dans le cours inférieur du fleuve Dniepr, sur le territoire de
trois régions : Kherson, Zaporozhye et Dnipropetrovsk. Il a été mis en service en
1956. L’objectif est la construction de centrales électriques d’une capacité totale
de 4 GW (36) le projet prévoit de couvrir 10 % des 2 155 km2 du réservoir avec
des panneaux solaires flottants placés autour de près de 150 éoliennes. Financé
en partie par des investisseurs allemands, le parc doit produire par électrolyse
de l’hydrogène destiné à être exporté vers l’Allemagne. Ces 4 GW de capacité
potentielle représentent la moitié des objectifs de production ukrainienne en
vue d’une exportation vers l’Europe et 10% des 40 GW extracommunautaires
envisagés par la Commission. Cependant, le réservoir de Kakhovka est situé
dans l’est du pays à moins de 200 km de Donetsk la “capitale” informelle des
indépendantistes du Donbasse et 150 km de la Crimée. La stratégie européenne,
et notamment la future politique d’importation allemande, doit faire face à une
menace géopolitique nouvelle.

Conclusion      :     Nouvelle
géopolitique de l’hydrogène, et
son risque
Comme EuropaNova le présentait dans son étude de septembre 2021 (37), le
marché de l’hydrogène pose de nouveaux enjeux de souveraineté européenne et
d’indépendance stratégique. Il y a aujourd’hui une menace militaire aux frontières
de l’Europe pour la production d’hydrogène renouvelable pour l’importation.
L’Allemagne a misé sur cette diversification pour limiter sa dépendance et ré-
duire la place du gaz dans son mix énergétique, fortement augmenté après l’arrêt
du nucléaire allemand ces vingt dernières années (38). La stratégie européenne
d’importation d’hydrogène pourrait être mise à mal par un conflit avec la Russie
si une future source d’importation d’hydrogène retombe sous influence russe. Sa
volonté de créer une exportation d’hydrogène décarboné mais fossile pourrait
menacer les tentatives d’indépendance énergétiques européennes.
De plus, le soutien commercial à long terme à l’Ukraine en matière énergétique
ne saurait remplacer un soutien diplomatique immédiat et ne peut pas être une
distraction face aux besoins directs de l’Ukraine contre la menace russe. Le gou-
vernement allemand qui d’une main promet une coopération accrue en matière
énergétique et de l’autre bloque l’envoi de matériel militaire à l’Ukraine montre les
limites de la seule attention à la diplomatie énergétique. Les menaces militaires à
court terme pour l’Europe seront les causes des futures crises énergétiques. La
diplomatie européenne ne peut se passer d’affronter les deux.
Références
(1)      Euractiv, 2022. L’Europe ne peut remplacer que partiellement le gaz russe. [En
      ligne]                www.euractiv.com.             [Consulté     le        16      février     2022].

(2) RTL, 2021. Hausse des prix du gaz : en quoi la Russie est-elle responsable ?. [en ligne] www.rtl.fr. .

(3) EuropaNova, 2020. Analyse : Discours sur l’état de l’Union, Oruc Reis, Objectif 55% ou 60% ?
    (17/09/20). [en ligne] Europanova.eu. Disponible sur :  [consulté le 17 février 2022].

(4)    Voir l’étude d’EuropaNova: Cario, R., 2021. The New European Hydrogen Policy: beyond
      energy security, a transversal approach for Strategic Autonomy. [online] Paris: EuropaNova.
      Available          at:          

(5) Commission européenne, 2022. La Commission appelle à une Europe climatiquement neutre d’ici
    2050. [en ligne] Climate Action. Disponible sur :  [consulté le 16 février 2022].

(6) Commission européenne, 2020. Une stratégie de l’hydrogène pour une Europe climatiquement neutre).
    [en ligne] Bruxelles : Commission européenne. Disponible à l’adresse suivante :  [consulté le 16 février 2022].

(7)La politique européenne de voisinage (PEV) sont des accords privilégiés de l’Union avec ses pays
    voisins. Euromed concerne notamment l’Algérie, le Maroc, la Tunisie, l’Égypte et Israël. Le Partenariat
    oriental, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, la Géorgie, la République de Moldavie et l’Ukraine

(8) Commission économique pour l’Europe des Nations unies, 2021. Projet de feuille de route pour la production
    et l’utilisation de l’hydrogène en Ukraine. [en ligne] UNCCE. Disponible sur :  [consulté le 16 février 2022].

(9) BERD, 202A. La BERD et l’Ukraine stimulent le développement de l’hydrogène à faible teneur
    en carbone. [en ligne] Ebrd.com. Disponible sur :  [consulté le   16   février  2022].

(10) BBC News. 2014. La bataille du gaz entre la Russie et l’Ukraine. [en ligne] Disponible sur
    :   [consulté    le   16    février   2022].

(11) France 24. 2022. Projet de gazoduc TurkStream : Le nouveau coup de maître stratégique de
    Poutine. [en ligne] Disponible sur :  [consulté le 16  février   2022].

(12) Ministère fédéral des Affaires étrangères, 2022. L’engagement large et à long terme de l’Allemagne en
    faveur de l’Ukraine. [en ligne] Auswärtiges Amt. Disponible sur :  [consulté le 16 février 2022].

(13) IRENA (2022), Geopolitics of the Energy Transformation : The Hydrogen Factor, Agence internationale
    pour les énergies renouvelables, Abu Dhabi. Disponible sur :  [consulté le 16 février 2022].

(14) Creos, DESFA, Elering, Enagás, Energinet, Eustream, FGSZ, Fluxys Belgium, Gasgrid Finland,
    Gasunie, GAZ-System, GCA, GNI, GRTgaz, National Grid, NET4GAS, Nordion Energi, OGE,
    ONTRAS, Plinovodi, Snam, TAG, Teréga, 2021. Extending the European Hydrogen Backbone.
    [online]  Guidehouse.   Available   at:           [Accessed        17      February       2022].

(16) Par exemple, au Maroc, le vaste potentiel de production d’électricité par le photovoltaïque est
    limité car il est produit pendant la journée. Le pic de consommation d’électricité est de 19h à minuit
    en été, et de 17h à 22h en hiver. Le stockage de la surconsommation en journée en hydrogène et
    son exportation pourraient stimuler la demande d’électricité décarbonée, et donc sa production.

Voir: IEA, 2019. Energy Policies Beyond IEA Countries. [en ligne] Agence internationale
    de        l’énergie.   Available    at:      .

(17) Beyer, M., 2021. La Namibie va créer 2 GW d’EnR d’ici 2026 pour produire de l’hydrogène vert.
    [en ligne] pv magazine France. Disponible sur :  .

(18) Euractiv, 2022. La “diplomatie de l’hydrogène” de l’Allemagne sous le feu des critiques en Ukraine. [en ligne] Disponible
     sur : .

(19) Le Figaro. 2021. L’hydrogène vert : le grand défi de l’industrie française. [en ligne] Disponible sur :
Références
(21) Olearchyk, R. and Hall, B., 2021. Ukraine blames Germany for ‘blocking’ Nato weapons supply.
    [online] Ft.com. Available at: .

(22) Euractiv, 2022. La «diplomatie de l’hydrogène» de l’Allemagne sous le feu des critiques en Ukraine. [en ligne] Disponible
    sur : .

(23) Argos, 2021. Moscou approuve le concept de l’industrie de l’hydrogène | Argus
    Media.  [en   ligne] Argusmedia.com. Disponible  à     :  .

(24) Energynews, 2021. Projet Novatek Ob : de l’Hydrogène dans l’Arctique Russe. [en ligne] Energynews.pro.
    Disponible sur : .

(25)       9.8       millions         de       tonnes         en        2020         et      60        millions         de        tonnes        en        2050.

Voir: France Hydrogène. 2022. Rapport CFE : la moitié de la future consommation européenne d’hydrogène
    pourrait être importée – France Hydrogène. Available at: 

(26 )IA Novosti, 202A. Pas uniquement le gaz : la Russie a trouvé un nouveau moyen de tirer profit de
   l’Europe. [en ligne] RIA Novosti. Available at: .

(27) Reuters, 2021. Novatek says it reconfigures Obsky LNG project to produce hydrogen,
    ammonia.    [online]   reuters.com.    Available   at:   .

(28)      Energy            Intelligence,     2021.        COP26:         Russia         Calls      for       Sanctions-Free          Climate
    Cooperation.                30:44        [online]            Energyintel.com.             Available           at:          .

(29) Traditionnellement, l’hydrogène est étiqueté à l’aide d’un code couleur correspondant à sa méthode de
    production. L’hydrogène gris provient du gaz, le vert des énergies renouvelables, le brun du charbon, le
    rose du nucléaire et le bleu des fossiles associés à la capture du carbone. Cette méthode a été lentement
    abandonnée par les décideurs politiques en raison de son manque de clarté. La Commission européenne a
    notamment utilisé directement les qualificatifs de H2 à faible teneur en carbone ou à teneur nulle en carbone.

(30) Mered, M., 2019. The Arctic: Critical                                       Metals, Hydrogen and Wind Power for the
    Energy     Transition.   [online]   Paris:   Ifri.                            Available  at:                                  [Accessed     17        February          2022].

(31)      Zabanova,     Y.     and     Westphal,     K.,     2021.   Advancing    German-Russian                                                   Hydrogen
       Cooperation   in    a    Strained   Political     Climate.  [online]  SWP.   Available  at:                                                               [Accessed         17        February                                                        2022].

(32) IEA, 2020. Global average levelised cost of hydrogen production by energy source and
    technology, 2019 and 2050. [online] Agence internationale de l’énergie. Available at:                                       [Accessed              17      February            2022].

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Raphaël Cario

                                      L’auteur   Raphael Cario est l’animateur du groupe de travail sur l’hydrogène européen
                                                 d’EuropaNova. Il collabore avec EuropaNova depuis 2020 sur les questions de
                                                 souveraineté européenne. Ancien étudiant du Bachelor of Arts & Sciences de
                                                 l’UCL avec une majeure en sciences humaines et sociales et une mineure en
                                                 sciences et ingénierie avec une année à l’École Normale Supérieure de Paris
                                                 (Ulm), il est également titulaire d’un MSc de politique publique de l’UCL. Il est
                                                 actuellement étudiant du MiM-Grande École à l’ESSEC.

                                                 Remerciements à Elise Bernard qui a supervisé cette étude ainsi qu’Edourard
                                                 Gaudot qui ont formé son comité de relecture.
EuropaNova Academia FÉVRIER 2 0 2 2

                                                 Elise Bernard est Directrice des études d’EuropaNova, chargée d’enseignement
                                                 en droit et institutions européennes, procédures et droit des libertés fondamen-
                                                 tales (Universités Paris II, Paris III, Lyon II, Lyon III et ESSEC), membre de jury de
                                                 concours de la fonction publique française en droit européen, elle est également
                                                 auditrice civile de la 28e promotion de l’Ecole de guerre et juge assesseur à la
                                                 Cour nationale du droit d’asile.

                                                 Edouard Gaudot est Directeur des relations extérieures d’EuropaNova, histo-
                                                 rien, diplômé de Sciences-Po et de la Sorbonne, ancien professeur d’histoire à
                                                 Sydney et Grenoble et ancien conseiller politique au Parlement européen.

                                                                                          11
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