L'innovation à l'ère numérique - Réinventer notre économie Débats de la conférence du 21.4.2016 Comité économique et social européen et ...

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L'innovation à l'ère numérique - Réinventer notre économie Débats de la conférence du 21.4.2016 Comité économique et social européen et ...
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                                                                TEN
L’innovation
à l’ère numérique
Réinventer notre économie
Débats de la conférence du 21.4.2016
Comité économique et social européen et Confrontations Europe

  Comité économique et social européen
L'innovation à l'ère numérique - Réinventer notre économie Débats de la conférence du 21.4.2016 Comité économique et social européen et ...
L’innovation
à l’ère numérique –
Réinventer
notre économie
                                            Débats de la conférence du 21.4.2016
                   Comité économique et social européen et Confrontations Europe

Comité économique et social européen

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L’innovation à l’ère numérique –

                 Réinventer notre économie

             Débats de la conférence du 21.4.2016

Comité économique et social européen et Confrontations Europe

        Rapporteur des débats: Confrontations Europe

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Sommaire
REMARQUES D'OUVERTURE ....................................................................................................................... 7
 Pierre-Jean Coulon, président de la section TEN du Comité économique et social européen
    Marcel Grignard, présisdent de Confrontations Europe

INTERVENTION PRINCIPALE ........................................................................................................................ 8
 Paula de Winter, représentante de M. Oscar Delnooz, responsable de l’économie numérique à la
   direction générale Entreprises et innovation du ministère néerlandais des affaires économiques

DÉBAT D'OUVERTURE ............................................................................................................................... 11
 Tobias Kollmann, président du comité consultatif allemand «Jeunes entreprises du numérique»
   (BJDW)
    Amal Taleb, vice-présidente du Conseil national du numérique français (CNNum)

Modératrice: Mme Carole Ulmer, directrice des études, Confrontations Europe

TABLE RONDE 1 | L'économie numérique au cœur de la compétitivité de l'Union: le rôle des politiques
publiques comme catalyseurs de croissance économique et de nouveaux modèles d'entreprise ..... 16

    Holger Kunze, directeur du bureau européen de l’Association allemande des constructeurs de
     machines-outils (VDMA) (DE)
    Khalil Rouhana, directeur «Composants et systèmes» à la direction générale des réseaux de
     communication, du contenu et des technologies (DG CONNECT), Commission européenne
    Jenny Taylor, responsable de la politique manufacturière, services et procédés avancés de
     fabrication, ministère britannique du commerce, de l’innovation et des compétences (UK)
    Joost Van Iersel, président de la section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion
     économique et sociale» (ECO) et rapporteur de l’avis du Comité économique et social européen
     (CESE) sur le thème «L’industrie 4.0 – Voie à suivre» (en cours d’élaboration)

Modérateur de la session: M. Antonio Longo, membre du Comité économique et social européen et
président du groupe d’étude permanent «Stratégie numérique»

TABLE RONDE 2 | La voix de la société civile: la numérisation transforme les modles économiques de
l'industrie et des services ............................................................................................................... 24

    Arnaud Chatin, directeur du bureau de représentation auprès de l’Union européenne, Michelin
    Luc Hendrickx, directeur de la politique d’entreprise et des relations extérieures, Union européenne
     de l’artisanat et des petites et moyennes entreprises (UEAPME)
    Laurence Honrarrede, responsable stratégie client et marketing, BNP Paribas Cardif

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     François Nicolas, vice-président, responsable de la division Soins de santé intégrés – Diabète et
      cardiovasculaire, Sanofi
     Marta Zoladz, conseillère politique européenne, table ronde européenne des industriels (ERT)

Modérateur de la session: M. Gundars Strautmanis, membre du Comité économique et social européen

TABLE RONDE 3 | Améliorer les compétences numériques, faciliter les reconversions professionnelles
et repenser le travail ................................................................................................................................. 34

     Gilles Babinet, «Digital Champion» («défenseur du numérique») pour la France auprès de la
      Commission européenne
     Laure Batut, rapporteure de l’avis sur le thème «Renforcer la culture numérique, les compétences
      numériques et l’insertion numérique», groupe II (travailleurs), Comité économique et social
      européen
     Benedikt Benenati, vice-président Digital Communications, Renault
     Sandrino Graceffa, directeur général, SMart (BE)
     Ala’a Shehabi, chercheuse confirmée, Fondation du Travail, Université de Lancaster (UK)

Modératrice de la session: Mme Louise Decourcelle, chargée de mission, Confrontations Europe

TABLE RONDE 4 | Perspectives: de nouveaux horizons pour l'innovation ............................................. 45

     Claire Bury, directrice générale adjointe de la DG CONNECT, Commission européenne
     Alain Schlesser, directeur général de la chambre de commerce et d’industrie des Pays de la Loire
     Aymeril Hoang, directeur de l’innovation, Société générale
     Eva Paunova, députée au Parlement européen, membre de la commission IMCO, Parlement
      européen

Modératrice de la session: Mme Carole Ulmer, directrice des études, Confrontations Europe

Observations finales: Günther Oettinger, commissaire européen chargté de l'économie et de la société
numériques ............................................................................................................................................... 55

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Conférence du 21 avril 2016 à Bruxelles

                        «Journée du numérique 2016:
       L’innovation à l’ère numérique – Réinventer notre économie»

Le Comité économique et social européen et Confrontations Europe ont organisé une conférence
relative à la stratégie numérique intitulée «L’innovation à l’ère numérique – Réinventer notre économie»
à Bruxelles, le 21 avril 2016. Ayant pu compter sur la présence de près de 300 participants, d’orateurs
renommés et de haut niveau, sur des débats interactifs avec le public présent et sur la participation de
représentants du ministère néerlandais des affaires économiques, d’un membre du Conseil national du
numérique français, de membres du CESE et du commissaire européen Günther Oettinger, cette
conférence a été un réel succès.

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Remarques d’ouverture

M. Pierre Jean Coulon, président de la section TEN du Comité économique et social européen

Dans ses observations liminaires, M. Coulon, président de la section
«Transports, énergie, infrastructures, société de l’information» (TEN) du
CESE, souhaite la bienvenue aux participants et invite chacun à se sentir
chez soi au CESE, foyer de la société civile organisée européenne, lieu
privilégié de discussion et d’échanges en vue de réaliser les objectifs
fondamentaux de l’Union européenne et, surtout, d’assurer le bien-être de
ses citoyens. Il souligne que l’internet et les technologies numériques ainsi
que leurs incidences sur notre travail et sur la vie quotidienne des citoyens
européens constituent l’une des problématiques les plus importantes abordées par la section TEN, ces
éléments étant susceptibles de participer grandement à la relance économique et à la lutte contre le
chômage. M. Coulon ajoute que le groupe de réflexion Confrontations Europe est particulièrement
bienvenu au CESE car il s’agit d’un groupe de réflexion particulier, qui ne se concentre pas uniquement
sur la recherche mais plutôt sur les besoins des citoyens européens et sur la vie quotidienne des
individus.

M. Marcel Grignard, président de Confrontations Europe

                        M. Grignard affirme que Confrontations Europe joue un rôle de passerelle entre
                        la société civile et les institutions œuvrant au bien-être des citoyens européens.

                         La révolution numérique perturbe notre mode de vie, la manière dont nous
                         travaillons, produisons, consommons, etc. Elle s’apprête à bouleverser notre
                         manière de vivre. Des possibilités et des risques apparaîtront alors, et l’Europe
                         doit veiller à transformer les risques et les préoccupations en possibilités pour
                         chacun.
                         Les entreprises élaborent actuellement des stratégies pour répondre aux défis
                         numériques, tout comme les États membres. L’Union européenne propose
désormais une stratégie européenne. Comment être certains d’adopter une approche commune qui
inclue tous les acteurs et génère de la valeur ajoutée? Il faut pour cela une immense coopération, et une
approche transversale sera nécessaire. La révolution numérique peut contribuer au dialogue
démocratique. Tels sont les changements sociétaux auxquels nous devons faire face aujourd’hui, et
seule la participation de toutes les parties prenantes et de tous les acteurs garantira les meilleurs
résultats.

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Intervention principale

Mme Paula de Winter, représentante de M. Oscar Delnooz, responsable de l’économie
numérique à la direction générale Entreprises et innovation du ministère néerlandais des
affaires économiques

«Pourquoi l’économie numérique est-elle aussi importante? La numérisation peut changer nos vies alors
qu’il y a vingt ans, nous aurions à peine pu imaginer à quoi elle servirait. Les téléphones portables
constituent un bon exemple de cette évolution. La numérisation peut nous aider à relever les défis
sociaux, des changements climatiques aux soins de santé en passant par les systèmes de transport, et
elle peut également soutenir notre économie. Dans le domaine de l’agriculture, par exemple, aux Pays-
Bas, les trayeuses mécaniques sont associées à des systèmes d’analyse des données, de manière à ce
que les soins dispensés soient adaptés à chaque animal. Cela améliore la santé ainsi que l’espérance de
vie des animaux, et il en découle une augmentation de 30 % de la production laitière ainsi qu’une chaîne
d’approvisionnement plus durable. La numérisation aide les gouvernements à nouer un meilleur
dialogue avec leurs citoyens et leurs entreprises. Ainsi, aux Pays-Bas, lorsqu’une entreprise dépose sa
déclaration fiscale en ligne, cette démarche suffit pour accomplir plusieurs de ses obligations (suivant le
principe «une fois pour toutes»). Par ailleurs, c’est grâce à la numérisation que l’affaire des «Panama
Papers» a pu être divulguée à un très large public. La transparence est plus grande.

Tout le monde ne progresse cependant pas aussi rapidement qu’il le faudrait; dès lors, comment
pouvons-nous accélérer la numérisation de l’industrie et des services publics? Si nous voulons améliorer
la place de l’Europe, nous devons identifier ses forces et ses faiblesses. Quels sont les domaines dans
lesquels l’Europe excelle? Elle possède par exemple des universités et des centres de recherche de
calibre mondial, ce qui fait d’elle un espace privilégié pour de jeunes entreprises numériques à forte
intensité de connaissances. Disposer d’un marché unique numérique, ce qui n’est pas encore le cas,
offrirait aux Européens un grand laboratoire de terrain constitué de 500 millions de consommateurs à
même d’utiliser de nouvelles applications. En quoi l’Europe se distingue-t-elle, et comment pouvons-
nous en tirer parti? La législation de l’Union sur le respect de la vie privée peut créer un marché pour les
produits et les services en ligne sécurisés. L’environnement réglementaire européen signifie que les
consommateurs savent que les entreprises européennes fabriquent des produits de haute qualité et
sûrs. Nous aurions toutefois des choses à apprendre de nos concurrents. Que font les autres pays en vue
d’accélérer l’économie numérique? Qu’est-ce qui pousse une entreprise à développer ses activités
ailleurs qu’en Europe? Enfin, des mesures doivent être prises dans tous les domaines et à chaque fois
que les entreprises et les consommateurs font savoir à leurs autorités réglementaires ce qui doit
changer. Par exemple, il est nécessaire de renforcer l’engagement en faveur du marché unique
numérique, pour permettre aux entreprises et aux consommateurs d’acheter et de vendre leurs produits
et leurs services numériques et d’y accéder depuis l’ensemble des États membres, sans frontières.

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L'innovation à l'ère numérique - Réinventer notre économie Débats de la conférence du 21.4.2016 Comité économique et social européen et ...
Il nous faut engager une action urgente et coordonnée pour mener à bien le chantier de la révolution
numérique. Cette révolution numérique doit être conduite par les entreprises, mais les décideurs
politiques ont un rôle clair à jouer pour poser les bases qui permettront de déployer ce potentiel. Créer
des normes ouvertes, instaurer la confiance, la sécurité et le respect de la vie privée, développer la
réglementation européenne et faire avancer le marché unique sont des priorités. Il est nécessaire
d’organiser des débats sur les aspects éthiques de ces développements. Aux Pays-Bas, il n’est pas rare de
recourir à des partenariats public-privé. L’Europe doit veiller à ce que toutes ses actions concernant la
numérisation soient élaborées et mises en place à travers des partenariats avec l’industrie, les
communautés de recherche et d’autres acteurs, par l’intermédiaire de partenariats public-privé. C’est
uniquement grâce aux partenariats que les décideurs politiques peuvent trouver le juste équilibre entre
les intérêts sociaux et les intérêts économiques et encourager la croissance et l’innovation tout en
garantissant le respect de la vie privée, la sécurité et la protection des consommateurs. Numériser
l’industrie et les services représente un défi; atteindre les petites entreprises en représente un autre. De
nombreuses jeunes entreprises ont réussi à grandir et à se développer. Une jeune entreprise
néerlandaise est par exemple capable, grâce à la nouvelle technique de chiffrement progressif, de
crypter des documents et, plus important encore, de garantir que ces documents sont distribués de
manière sélective. L’application de cette technique au secteur de la santé est très intéressante. On peut
également citer l’exemple d’un programme de mégadonnées pour la connaissance et l’innovation, lancé
en partenariat avec l’industrie, le secteur de la recherche et le gouvernement.

Les décideurs politiques ont besoin du secteur privé et de la société civile pour nous indiquer les
domaines dans lesquels les politiques font la différence en aidant l’Europe à se placer aux avant-postes
de la révolution numérique. Les compétences sont essentielles: tout le monde doit participer. L’objectif
est d’éviter de se retrouver avec une génération perdue qui ne possède pas les compétences
appropriées pour les emplois numériques, se sent laissée pour compte et ne peut pas tirer parti d’un
monde numérisé. Tous les citoyens, y compris les personnes âgées, doivent avoir un accès égal aux soins
de santé (y compris aux soins de santé à distance) et être en mesure d’acheter des produits en ligne,
comme le font les jeunes générations. À cet égard, en coopération avec le secteur des technologies de
l’information et de la communication (TIC) et à partir des besoins de l’industrie, les Pays-Bas ont lancé un
programme pour les ressources humaines («Human Capital Agenda») afin de combler le manque de
professionnels du secteur des TIC. La participation de l’industrie est primordiale à cet égard.

Par conséquent, nous devons faire sortir le dialogue des laboratoires et le faire entrer dans les conseils
de direction, dans les usines et dans nos foyers. Toutes les entreprises doivent envisager la manière dont
elles peuvent tirer profit de la numérisation, répondre aux risques émergents, comme la cybersécurité,
et saisir les opportunités de coopération et d’innovation en se plongeant dans la communauté
numérique qui les entoure. Les membres du public doivent faire de même.

Pour accélérer l’économie numérique, tous les États membres doivent agir, à la fois au niveau des
politiques nationales et au niveau européen. C’est pourquoi les Pays-Bas ont placé la numérisation de
l’industrie et la réglementation future parmi les priorités de leur présidence. Le paquet technologique de
la Commission européenne est particulièrement apprécié. Toutefois, il reste beaucoup à faire, et la

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présente conférence aborde les questions pertinentes. Les ressources humaines en font partie: en effet,
le développement des compétences appropriées, la reconversion de notre main d’œuvre actuelle et
l’adaptation de nos systèmes d’éducation afin que les compétences numériques soient perçues comme
un besoin fondamental constituent des enjeux primordiaux. Par ailleurs, nous avons besoin d’élaborer
une réglementation à l’épreuve du temps, qui puisse facilement s’adapter aux techniques en constante
évolution pour favoriser l’innovation tout en protégeant le public et l’environnement. Enfin, il convient
de créer des écosystèmes d’innovation collaboratifs afin que l’industrie puisse établir des passerelles
avec le milieu universitaire, que les entrepreneurs puissent accéder au soutien dont ils ont besoin et que
les PME puissent mettre en place des partenariats avec les grandes entreprises ainsi qu’entre-elles.

La révolution numérique est en marche, à un rythme et à une échelle qui toucheront chacun d’entre
nous. Il est urgent que L’Europe agisse pour se placer en tête de cette révolution et pour tirer parti des
avantages économiques et sociétaux de l’économie numérisée. La coopération est essentielle pour
atteindre cet objectif. Il convient d’établir un calendrier précis et de prendre rapidement des mesures
afin de déterminer les actions qu’il s’impose de mettre en place et afin de progresser ensemble, de
mettre en œuvre cette révolution et d’assurer la réussite de l’Europe.»

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Débat d’ouverture

M. Tobias Kollmann, président du comité consultatif allemand «Jeunes entreprises du numérique»
(BJDW)

                                Les vagues numériques venues des États-Unis nous frappent de plein
                                fouet, et le prochain tsunami numérique ne tardera pas à parvenir en
                                Europe. M. Kollmann illustre cette image à l’aide d’une analyse des
                                «licornes», des entreprises qui ne sont pas encore cotées mais dont la
                                valorisation atteint au moins un milliard de dollars américains (USD). Bon
                                nombre d’entre elles font partie de l’économie numérique: leur nombre
                                s’élève aujourd’hui à 161, bien qu’elles ne se trouvent malheureusement
                                pas toutes en Europe. Parmi ces licornes, 93 sont américaines,
                                38 asiatiques et seulement 15 sont européennes. Sur les quinze
                                entreprises européennes, quatre se trouvent en Allemagne (Delivery
Hero, HelloFresh, Auto1 et Home24), quatre au Royaume-Uni (comme TransferWise ou Shazam), deux
en Suède (Klarna, Spotify) et une en France (BlaBlaCar). Cela n’est pas suffisant.

M. Kollmann conclut que les Européens ne prennent pas vraiment part à la concurrence mondiale en
ligne, en particulier si l’on considère que les cinq premières entreprises numériques des États-Unis ont
une capitalisation boursière plus élevée que les trente entreprises cotées au Dax allemand réunies. Il
n’existe pas encore de numérique «made in Europe». Par conséquent, une question centrale se pose
aujourd’hui, que nous soyons présents sur le secteur B2C (entreprise à consommateur en ligne) ou sur le
secteur B2B (entreprise à entreprise en ligne): «quel processus commercial numérique innovant ou quel
modèle commercial numérique permettrait à une jeune entreprise de la Silicon Valley, dotée d’un énorme
capital-risque, de modifier radicalement l’industrie du futur?» La réponse est la suivante: «Créez vous-
même ce processus ou ce modèle!» En bref, l’essentiel est d’avoir du courage et d’essayer de construire
par soi-même la plateforme appropriée. Il nous faut agir par nous-mêmes et nous ouvrir à la concurrence
en ligne, le plus rapidement possible. Pourquoi?

La «transformation numérique» est importante dans tous les secteurs, car les modèles d’entreprises
numériques innovantes ont également pris d’assaut les industries traditionnelles. Aucun secteur ne peut
se soustraire à cette tendance, en raison de deux phénomènes:
    - d’un côté, les jeunes entreprises, petites, mais agressives, essayent de s’attaquer à certains blocs
        de la chaîne de valeur. Elles y parviennent avec des processus commerciaux numériques de
        niveau supérieur et grignotent des parts de marché. C’est par exemple ce que font les jeunes
        entreprises des technologies financières dans le secteur bancaire et que M. Kollmann appelle
        «l’effet piranha»;
    - d’un autre côté, il observe que les acteurs numériques importants utilisent leur pouvoir de
        marché pour délaisser leurs domaines d’activité initiaux et pénétrer sur de nouveaux marchés.

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Ils piétinent tout sur leur passage à l’aide de leur pouvoir de marché numérique. M. Kollmann
        qualifie ce phénomène d’«effet éléphant».

Il poursuit en donnant quelques exemples. Google a piétiné le secteur des assurances en obtenant un
permis d’assurance pour le marché européen en passant par Londres. Netflix a tenté d’anéantir les
services télévisuels linéaires. Airbnb change d’ores déjà la donne dans le secteur des loisirs et des
voyages. Amazon vient de lancer son service de livraison le jour même en Allemagne, exerçant une
pression énorme sur des entreprises comme Saturn et Media Markt et sur l’industrie alimentaire, déjà en
difficulté à cause d’Amazon Fresh et d’Amazon Pantry. Google a attaqué l’industrie automobile et tenté
d’en attirer les clients en leur proposant des services numériques à l’intérieur de leur voiture. Il faut agir,
et tout de suite.

L’ancienne règle selon laquelle le gros mange le petit n’est plus d’actualité. D’après la nouvelle règle
qui régit le monde numérique, c’est le plus rapide qui mange le plus lent.

Trois solutions pourraient inverser cette tendance extrême:
    1. Nous devons créer de jeunes entreprises innovantes susceptibles de constituer la prochaine
         génération de leaders du marché mondial en Europe.
    2. Nous devons faire passer nos industries traditionnelles et nos petites et moyennes entreprises
         à l’ère de la numérisation afin de retenir un maximum d’entreprises.
    3. Étant donné qu’aucune des deux premières propositions ne pourra se réaliser dans un avenir
         proche, nous devons réunir ces deux aspects et favoriser la coopération entre les jeunes
         entreprises et l’industrie traditionnelle ou les PME. Les jeunes entreprises représentent
         l’innovation numérique, et les entreprises traditionnelles du secteur représentent l’accès au
         marché. Leur union devrait créer une situation «gagnant-gagnant» pour l’économie numérique
         en Europe. Cela vaut particulièrement pour le secteur B2B. La coopération entre l’industrie
         européenne et les jeunes entreprises européennes permettra à notre continent de devenir un
         acteur numérique.

Mme Amal Taleb, vice-présidente du Conseil national du numérique français (CNNum)

Mme Taleb se félicite de la communication «Digitise EU» («Numériser
l’Union européenne») publiée par la Commission européenne. Elle
reconnaît l’importance des questions liées aux centres de données,
au nuage européen et à la 5G, ainsi qu’aux normes et aux
certifications, qui pourront nous aider à créer un avantage
concurrentiel pour l’industrie.

Citons ici le Brutus de Shakespeare: «Il y a dans les affaires humaines
une marée montante;
qu’on la saisisse au passage, elle mène à la fortune;
qu’on la manque, tout le voyage de la vie s’épuise dans les bas-fonds et dans les détresses.

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Telle est la pleine mer sur laquelle nous flottons en ce moment;
et il nous faut suivre le courant tandis qu’il nous sert,
ou ruiner notre expédition!»

Mme Taleb compare ces développements numériques à une marée. Elle souligne la nécessité immédiate
de tirer parti de cette marée, car la prochaine se prépare déjà et ciblera de nouveaux types
d’ordinateurs, de systèmes de chiffrement progressif et d’autres questions qui remettront en cause les
fondements de nos structures politiques et sociales. Elle est convaincue que les propositions de la
Commission européenne permettent garantir que l’industrie européenne est à même d’utiliser ces
nouvelles technologies.

Elle avance quelques moyens clés afin de tirer le meilleur parti de ces marées actuelles et à venir:

Elle évoque tout d’abord l’éducation et les compétences. Trop peu de personnes ont une bonne
connaissance de toutes ces questions technologiques, c’est pourquoi il nous faut veiller à mettre en
commun toutes nos connaissances en Europe. Il convient d’informer les citoyens des problématiques
dans le domaine de l’électronique. En d’autres termes, le codage est essentiel, mais il est tout aussi
fondamental de s’assurer que les personnes sont conscientes des problématiques plus larges liées aux
mathématiques et à l’histoire. Mme Taleb appelle les autorités de l’enseignement supérieur et les
universitaires de toute l’Europe à coopérer afin de contribuer au développement du secteur numérique.

Elle évoque ensuite le financement et les moyens de financer et de développer les entreprises. Elle
souligne qu’en Europe, les entreprises sont créées sur la base de la dette et non sur la base de nos
propres ressources, ce qui signifie que les entreprises européennes dépendent du secteur bancaire
traditionnel et ne sont donc pas en phase avec les évolutions techniques de notre culture.

Elle appelle enfin les autorités publiques à mettre en place un cadre juridique visant à renforcer la
confiance: un cadre clair, lisible et correctement appliqué sur l’ensemble des territoires. Pour ce faire,
elle insiste sur la nécessité de mettre en place des normes qui pourront être facilement utilisées par les
entreprises et qui leur permettront de se développer en Europe. Faisant l’éloge d’une approche juridique
européenne, elle affirme qu’il pourrait être bon de défier les acteurs non européens et de les
contraindre à se conformer aux normes européennes, en particulier vis-à-vis de la protection des
données à caractère personnel, des infrastructures, des règles d’identification et d’autres questions de
sécurité. Tout cela permettrait aux entreprises européennes de se développer dans un environnement
juridique sûr, ce qui constitue un avantage concurrentiel. Mme Taleb aborde également la question du
renforcement de la confiance envers les plateformes. En ce qui concerne les relations B2C impliquant
des plateformes, elle déclare que les consommateurs européens n’ont pas confiance envers cette
méthode, mais qu’ils doivent néanmoins utiliser des plateformes non européennes. À cet égard, elle
insiste sur la nécessité de réfléchir à la manière dont les entreprises européennes pourraient
communiquer entre elles et choisir leurs partenaires en Europe en fonction de leur seul mérite. Elle
demande également à l’Union européenne et aux États membres de réfléchir aux répercussions de la
transformation numérique sur l’emploi et le travail.

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Questions et réponses:

    -   Les connaissances sont encore trop cloisonnées. Si, par exemple, une personne effectue des
        recherches sur le diabète, elle n’entrera généralement pas en contact avec la personne chargée
        d’élaborer les menus pour les cantines scolaires. Dans un monde où la numérisation serait plus
        efficace, cette mise en contact serait peut-être facilitée. Il s’agit aussi d’un problème culturel.

M. Tobias Kollmann

«Sur la question de la plateforme, je serais d’accord si nous avions une compétence numérique générale
du côté des consommateurs, mais ce n’est pas le cas. Le délai nécessaire pour cliquer sur les conditions de
service ou d’utilisation est en moyenne de 1,2 seconde. Les consommateurs ne s’intéressent pas vraiment
à l’aspect juridique. Ils veulent la valeur ajoutée que génèrent les plateformes pour leur vie quotidienne,
et il n’existe pas d’alternative européenne. Nous ne disposons pas de la compétence, du côté des
consommateurs, pour savoir ce qui arrive aux données si nous les mettons sur la plateforme. Par ailleurs,
nous n’avons aucune plateforme européenne alternative susceptible de fournir aux consommateurs une
plus grande sécurité pour leurs données, car ils n’en expriment pas le besoin. Pour revenir à la question de
l’éducation, il est possible de sensibiliser les Européens aux compétences générales en matière de
numérisation. Cela pourrait être la réponse appropriée. Nous devons adopter une perspective plus large
vis-à-vis de l’utilisation de la technologie numérique et de ce qu’elle signifie réellement pour le quotidien
des citoyens.

Quant à la première question, elle illustre le fait qu’en définitive, toute tâche numérique est une tâche
européenne. Le marché numérique de chaque État membre est trop petit. Nous avons besoin d’une
perspective européenne plus large, en particulier dans le domaine de la numérisation. À cet égard, nous
nous félicitons des initiatives prises par la Commission européenne. Tous les pays de l’Union ne disposent
pas, cependant, d’une structure politique adéquate pour appuyer ces initiatives. Tous les pays ne sont pas
dotés d’un ministère en charge de la numérisation. En Allemagne, les discussions commenceront après les
élections, qui auront lieu l’année prochaine.»

Mme Amal Taleb

«En ce qui concerne la première question, les graines du changement ont été semées. Il est courant de
trouver des laboratoires interdisciplinaires qui regroupent des spécialistes de différents domaines: experts
en technologie, philosophes, économistes, nutritionnistes, etc. L’université française Paris-Saclay réunit
par exemple des experts juridiques et d’autres chercheurs ayant des compétences en matière de
technologie. Nous devons mettre en commun ces connaissances au niveau européen.

Concernant la deuxième question, lorsque vous acceptez les conditions de service, vous n’avez aucune
idée de ce qu’elles contiennent: vous ne les lisez pas. Les consommateurs ne savent pas ce qu’ils signent.
Nous avons un rôle à jouer vis-à-vis des consommateurs traditionnels. Nous devons également veiller à
considérer cet aspect du point de vue de l’économie numérique: il nous faut nous assurer que les individus

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disposent de contrats lisibles. C’est pourquoi j’ai évoqué un cadre stable et sécurisé au niveau européen.
Nous aurons alors des outils à notre disposition pour nous aider à créer des synergies entre les différentes
économies et les écosystèmes numériques.»

                         Modératrice: Mme Carole Ulmer, directrice des études, Confrontations Europe

                                                    15
TABLE RONDE 1
     L’économie numérique au cœur de la compétitivité de l’Union: le rôle
    des politiques publiques comme catalyseurs de croissance économique
                     et de nouveaux modèles d’entreprise

    Quel cadre réglementaire et quelles initiatives européennes sont nécessaires à la mise en place
     d’une nouvelle politique industrielle 4.0?
    Dans quelle mesure la numérisation de l’industrie européenne pourrait-elle renforcer le leadership
     de celle-ci?
    Quelle est la bonne approche politique pour déployer le potentiel des services innovants?
    Comment les pouvoirs publics peuvent-ils suivre le rythme de technologies numériques qui
     bouleversent secteurs et marchés et qui ont une incidence non seulement sur nos politiques et
     modèles économiques, mais aussi sur nos modes de production et de consommation?

Orateurs:
 M. Holger Kunze, directeur du bureau européen de l’Association allemande des constructeurs de
    machines-outils (VDMA) (DE)
 M. Khalil Rouhana, directeur «Composants et systèmes» à la direction générale des réseaux de
    communication, du contenu et des technologies (DG CONNECT), Commission européenne
 Mme Jenny Taylor, responsable de la politique manufacturière, services et procédés avancés de
    fabrication, ministère britannique du commerce, de l’innovation et des compétences (UK)
 M. Joost Van Iersel, président de la section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion
   économique et sociale» (ECO) et rapporteur de l’avis du Comité économique et social européen
   (CESE) sur le thème «L’industrie 4.0 – Voie à suivre» (en cours d’élaboration)

Modérateur de la session: M. Antonio Longo, membre du Comité économique et social européen et
président du groupe d’étude permanent «Stratégie numérique»

                                                  16
M. Antonio Longo, membre du Comité économique et social européen et président du groupe d’étude
permanent sur la stratégie numérique

La première table ronde analyse la stratégie de la Commission concernant l’industrie 4.0. M. Longo
déclare que tous les secteurs industriels sont concernés par la révolution numérique. Cela veut dire qu’il
y aura des gagnants et des perdants, et que cela impliquera des coûts. Il faudra donc combler les lacunes
concurrentielles cumulées.

Cette table ronde porte sur deux séries de questions: pensez-vous que les règles et la réglementation
seront suffisantes? Quelles initiatives européennes sont nécessaires à la mise en place d’une nouvelle
politique industrielle 4.0? Quelle est la bonne approche politique pour déployer le potentiel des services
innovants? Comment les pouvoirs publics peuvent-ils suivre le rythme de technologies numériques qui
bouleversent secteurs et marchés et qui ont une incidence non seulement sur nos politiques et modèles
économiques, mais aussi sur nos modes de production et de consommation?

M. Khalil Rouhana, directeur «Composants et systèmes» à la DG Connect, Commission européenne

L’industrie est l’un des piliers de l’économie européenne: le
secteur de la fabrication représente deux millions d’entreprises
et 33 millions d’emplois dans l’Union européenne. Selon certaines
études récentes, la numérisation des produits et services
apportera plus de 110 milliards d’euros par an de recettes
supplémentaires pour l’industrie en Europe au cours des cinq
prochaines années.

Dans le cadre de sa stratégie de création d’un marché unique numérique, la Commission européenne a
lancé, le 19 avril 2016, sa première initiative liée à l’industrie. Le but est de mobiliser environ 50 milliards
d’euros d’investissements publics et privés d’ici 2021 pour aider les fabricants à regagner du terrain dans
la course mondiale pour la quatrième révolution industrielle.

Le paquet «Numériser l'EU» est composé de quatre communications détaillant les mesures. L’initiative
en faveur de la numérisation de l’industrie européenne est l’initiative cadre qui propose un ensemble de
mesures concrètes au niveau européen pour encourager et relier les initiatives nationales visant à
numériser l’industrie européenne. D’autres initiatives forment le paquet, à savoir: l’initiative européenne
sur l’informatique en nuage, qui vise à développer les services reposant sur le nuage ainsi qu’une
infrastructure de données d’envergure mondiale pour garantir que la science, les entreprises et les
services publics tirent profit de la révolution des mégadonnées; des mesures concrètes pour accélérer les
processus d’élaboration des normes en vue de stimuler l’innovation numérique; et un plan d’action pour
l’administration en ligne 2016-2020 afin de renforcer le rôle du secteur public dans la stimulation de la
demande en matière de solutions numériques.

                                                      17
Quels sont les enjeux de l’innovation numérique? Les chaînes de valeur numériques sont cruciales pour
la compétitivité de tous les secteurs. On peut souligner trois dimensions de cette création de valeur par
la numérisation: des innovations dans des produits de tous types (produits nouveaux ou plus
performants), la transformation des processus de fabrication, et des bouleversements radicaux des
modèles économiques, qui brouillent les frontières entre produits et services. Tous ces effets
restructurent profondément les chaînes de valeur dans le monde entier. C’est pourquoi il est crucial de
penser numérique lorsque sont conçus de nouveaux produits, de nouveaux procédés ou de nouveaux
plans de développement.

Les technologies sont les moteurs du changement, et l’internet des objets, (logiciels emboîtés, capteurs,
connectivité, etc.), les mégadonnées (analytique, stockage de données, nuage, etc.) et l’intelligence
artificielle (robotique, automatisation, apprentissage automatique, conduite autonome, etc.) sont au
cœur de cette révolution.

Où en est l’Europe? L’Europe a de solides atouts numériques, et notamment d’importants marchés
verticaux dans les domaines de l’automobile, de l’industrie, de la médecine, de l’aéronautique et de la
défense, ainsi que des entreprises de premier plan dans ces domaines. Tous les secteurs ne sont
cependant pas concernés.

M. Rouhana affirme que l’Europe fait aussi face à de nombreux défis. Malgré une forte numérisation
des secteurs des technologies de pointe dans certains États membres, force est de constater que
l’adoption des solutions numériques dans les PME et les secteurs autres que ceux des hautes
technologies se fait de manière lente et disparate. Moins de 2 % des PME utilisent des technologies
numériques avancées. De plus, elles n’ont pas encore recours au numérique pour innover dans leurs
propres produits. Il y a donc un fossé entre les entreprises de haute technologie qui vont de l’avant et les
autres, qui restent à la traîne. Il faut que l’économie toute entière aille de l’avant. L’Europe fait
également face à une nouvelle vague de concurrence en provenance d’industries de l’internet et du web
non européennes. Un manque d’harmonisation au niveau des normes et un manque d’interopérabilité (il
existe 30 initiatives nationales sur le thème «Industrie 4.0»), la nécessité d’une main-d’œuvre
compétente et requalifiée en matière de numérique ainsi que les problématiques législatives et
réglementaires constituent aussi des défis à relever pour l’Europe. M. Rouhana souligne en outre que
l’Europe connaît encore de fortes disparités en matière de préparation à la numérisation: si l’Allemagne
et l’Irlande sont en tête de course, l’Espagne et le Portugal se montrent plus réticents.

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Quelles sont les solutions? Trois prérequis fondamentaux doivent être mis en avant: un marché unique
du numérique (à ce sujet, la Commission a lancé sa stratégie en mai 2015, qui traite des plateformes, du
droit d’auteur et du commerce électronique), des infrastructures numériques de niveau mondial (pas
seulement celles des télécommunications, mais aussi celles du nuage et des données) et un accès facilité
au financement.

M. Rouhana souligne qu’il est nécessaire d’intensifier notre capacité à innover dans le domaine du
numérique. L’objectif principal devrait être de garantir que tous les secteurs en Europe, quelle que soit
leur envergure, puissent bénéficier pleinement des innovations numériques afin de moderniser leurs
produits, d’améliorer leurs processus et d’adapter leurs modèles économiques à la transition numérique.
Les États membres sont actifs dans le thème «Industrie 4.0», mais nous avons besoin d’un cadre qui
puisse contribuer à la coordination efficace des initiatives nationales, éviter la fragmentation et
permettre ainsi d’amplifier ces initiatives.

Une initiative politique globale encouragerait la combinaison de plusieurs instruments politiques (en
matière de financement, de législation et de coordination), l’émergence de solutions innovantes du bas
vers le haut ainsi que le soutien à des mesures ciblées. Il est fondamental de traiter l’ensemble de la
chaîne de valeur dans toute l’Europe et d’offrir de nouvelles possibilités aux jeunes entreprises et aux
PME dans un véritable marché unique du numérique. À cet égard, promouvoir les partenariats public-
privé pour un leadership dans les chaînes de valeur numériques est un outil important. De plus, le point
central d’une telle stratégie globale consiste à donner la priorité au processus de normalisation mené par

                                                   19
l’industrie et à accélérer ce processus. M. Rouhana reconnaît que la législation doit parfois s’adapter à
l’ère numérique; la Commission européenne devrait dès lors analyser avec attention ce qui doit être fait
en matière de propriété des données, de sécurité et de responsabilité. Il affirme également que les
Européens ne sont pas encore prêts à passer à l’ère numérique. Les y préparer au mieux grâce à
l’éducation, la formation et la mise à jour des compétences est d’une importance capitale et requiert
l’élaboration d’initiatives visant à repenser le lieu de travail d’une manière plus générale. Enfin, cette
stratégie globale doit répondre au problème de la mise en commun des ressources.

M. Holger Kunze, directeur du bureau européen de l’Association allemande des constructeurs de
machines-outils (VDMA)

                                        M. Holger Kunze représente l’Association allemande des
                                        constructeurs de machines-outils (VDMA), une puissante industrie
                                        allemande de fabricants de machines, qui compte des millions
                                        d’employés et des entreprises à la pointe du marché. C’est
                                        l’exemple parfait d’un secteur industriel typique et performant
                                        confronté à la révolution numérique. Cette transition est appelée
                                        «Industrie 4.0» en Allemagne. Les entreprises sont fortement
                                        engagées dans le processus d’adaptation à cette transition. Bien
       M. H. Kunze et M. J. Taylor      qu’il n’y ait pas de schéma directeur pour chaque entreprise,
chacune essaye de trouver sa voie.

La communication de la Commission est un bon point de départ, qui montre que des travaux sur un
cadre européen en faveur de l’industrie 4.0 sont en cours. M. Kunze indique que VDMA est quelque peu
déçue par le paquet relatif au marché unique numérique: la dimension industrielle dans son ensemble et
l’accent sur le point de vue des consommateurs font en effet défaut.

Il déclare toutefois que d’autres mesures doivent encore être prises.

Il appelle tout d’abord à la création d’un marché unique numérique de l’industrie 4.0, à savoir un marché
unique pour les produits numérisés, en insistant sur le risque de fragmentation compte tenu des
nombreuses stratégies différentes de chaque État membre concernant la révolution numérique. Pour lui,
il est essentiel d’organiser un débat sur le cadre juridique nécessaire au niveau européen. Il met l’accent
sur l’incertitude juridique que certaines entreprises éprouvent au sujet des données. Qui est propriétaire
des données? Qui a le droit d’utiliser quelles données? Ces questions sont posées de plus en plus
fréquemment et nous n’avons pas de réponse. Il est nécessaire d’ouvrir un débat sur ces aspects afin de
déterminer si le cadre actuel est adapté ou non.

M. Kunze exprime ensuite ses préoccupations au sujet des compétences. Il affirme que les entreprises
n’ont pas besoin d’experts en technologies de l’information (TI), mais plutôt de personnes ayant une
bonne connaissance des technologies de production, sachant dialoguer avec les consommateurs et
possédant une bonne compréhension des TI. Bien que les compétences de la Commission européenne

                                                    20
dans ce domaine soient limitées (ce sujet relève des États membres), elle encourage la bonne
communication et la bonne coordination sur ce thème clé.

Mme Jenny Taylor, responsable de la politique manufacturière, services et procédés avancés de
fabrication, ministère britannique du commerce, de l’innovation et des compétences

Le Royaume-Uni accueille favorablement la communication de la Commission et son rôle de
coordinatrice, bénéfique tant sur le plan national qu’international. Mme Taylor déclare que le Royaume-
Uni travaille et continuera de travailler à ce processus avec la Commission et que le dialogue devra
continuer d’inciter les États membres à apprendre les uns des autres tout au long de ce processus
collaboratif. Elle souligne également le rôle clé que l’industrie doit jouer dans ce processus et salue
vivement la vaste initiative menée par l’industrie.

Comment le Royaume-Uni aborde-t-il cette question? Le pays travaille actuellement à un plan national
d’innovation qui sera publié l’été prochain. L’un des principaux défis à relever et qui doit être envisagé
au niveau de l’Union européenne est le soutien aux grandes innovations actuellement développées dans
les établissements universitaires ou techniques, pour leur permettre d’arriver sur les marchés et d’être
ensuite utilisées.

Le Royaume-Uni s’engage fermement à créer les conditions propices à la croissance des entreprises
européennes. Le pays est convaincu que la coopération avec l’industrie est essentielle et que la
discussion doit avoir lieu au niveau mondial.

M. Joost Van Iersel, président de la section ECO et rapporteur de l’avis du Comité économique et social
européen sur le thème «L’industrie 4.0 – Voie à suivre» (en cours d’élaboration)

M. Van Iersel nous invite d’abord à cesser de réfléchir de manière
cloisonnée. Il faut, par exemple, que toutes les sections du CESE
engagent un débat sur la révolution numérique. Selon lui, il y a avec la
révolution numérique un changement de paradigme évident: la
diffusion horizontale des possibilités engendre une perspective
totalement différente pour l’industrie comme pour les
gouvernements. Un changement de mentalité est nécessaire dans les
entreprises, mais également au niveau de la population.

M. Van Iersel déclare que les concurrents du monde entier progressent rapidement, et en particulier les
États-Unis, grâce aux financements énormes dédiés à ce processus, à la contribution du Pentagone aux
projets civils ou à l’important marché du capital-risque. Tous ces éléments montrent que l’Union
européenne a encore un long chemin à parcourir.

Vitesse, échelle et caractère imprévisible de la production; réorientation des chaînes de valeur et risques
de fragmentation; nouvelles relations entre les instituts de recherche, l’enseignement supérieur et le

                                                    21
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