La Belgique et son empreinte eau - 2011 RAPPORT
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Éditeur responsable : Damien Vincent, WWF-Belgique, Boulevard Émile Jacqmain 90, 1000 Bruxelles Rédaction : Anne-Kirstine de Caritat, Stijn Bruers, Ashok Chapagain. Contributeurs : Philippe Weiler, Aurélie Laurent. Traduction : Brantra SPRL Coordination : Anne-Kirstine de Caritat Mise en page : inextremis.be Données : sauf indication contraire, les données d’empreinte eau sont issues du Water Footprint Network et d’Ecolife.
Table des matières Résumé 5 Introduction 6 1. Pourquoi l’empreinte eau ? 8 L’empreinte eau de production 9 L’empreinte eau de consommation 10 2. L’empreinte eau de la Belgique 11 Résultats globaux 11 Une agriculture à forte empreinte eau 13 Des produits agricoles massivement importés 15 Encadré : Les données qui servent à calculer l’empreinte eau 16 3. Les impacts à l’étranger de l’empreinte eau de la Belgique 17 Exemple du coton 18 Exemple du sucre 19 Exemple du Pakistan 21 4. Des pistes vers des solutions… 22 Pour les entreprises 22 Alpro 22 Coca-Cola Company 24 SABMiller 25 Pour les autorités publiques 27 Conclusions 29 Références 30
Résumé Par ce rapport, le WWF-Belgique veut montrer que l’empreinte eau est un indicateur pertinent pour : •M ontrer l’eau cachée dans notre consommation de biens et de services ; • Mettre en évidence notre dépendance par rapport à l’étranger (empreinte eau externe) ; •R elier notre empreinte eau externe à des pays ou des zones géographiques bien déterminés ; • I dentifier et mettre en œuvre des pistes d’action pour réduire les impacts sur les ressources hydriques. Les résultats pour la Belgique montrent que l’empreinte eau moyenne du Belge est très élevée. Notre style de vie et notre consommation de biens et de services impliquent une consommation d’eau bien supérieure à nos ressources propres et donc très largement dépendante des ressources hydriques à l’étranger. Les filières commerciales d’approvisionnement peuvent être clairement retracées et les impacts extérieurs localisés dans les pays producteurs. Le WWF-Belgique encourage les acteurs publics et le monde des entreprises à prendre en compte l’empreinte eau et la gestion durable de cette ressource dans leur gestion et leurs politiques. Les exemples concrets présentés peuvent servir de sources d’inspiration à l’action. WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 5
Introduction ’analyse de l’empreinte eau de la Belgique est une L première. Le WWF veut par ce rapport attirer l’attention sur cette ressource si souvent considérée comme évidente, surtout dans un pays comme le nôtre. Pourtant, la disponibilité en eau douce n’est pas un fait qui va de soi, ni aujourd’hui, ni encore moins demain. L’eau est une ressource naturelle précieuse que nous utilisons massivement dans l’agriculture, pour notre alimentation, celle du bétail, les fibres textiles, sans parler des biocarburants. Les écosystèmes d’eau douce fournissent cette ressource et assurent des fonctions aussi essentielles que la régulation des flux d’eau, la purification de l’eau, la régulation du climat, la protection contre les tempêtes, la protection contre l’érosion, etc. La Belgique est un petit territoire, densément peuplé et économiquement développé. Un style de vie occidental, avec notamment un régime alimentaire très carné en est une autre caractéristique. Les pressions sur l’environnement y sont donc fortes et, en particulier, celles sur les ressources hydriques. La Belgique est un des pays européens qui exploite le plus ses ressources propres (voir figure 1). Malgré son climat plutôt pluvieux, il y a moins d’eau disponible par personne que dans la majorité des autres pays européens. De plus, une part importante du territoire est imperméable (bâti, routes, etc.) ce qui rend l’infiltration de l’eau très difficile. De plus, une part importante des eaux de surface et souterraines est fortement polluée, ce qui la rend moins disponible. 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% Figure 1 : Chypre bulgarie espagne Total des prélèvements belgique rép. de Macédoine annuels d’eau dans chaque italie Angleterre/Pays de galles pays, par rapport aux malte allemagne turquie ressources disponibles pologne france WEI le plus récent (dernière année disponible, roumanie République tchèque WEI-90 entre 1997 et 2005, grèce pays-bas selon les pays) (en %) lithuanie estonie hongrie suisse Source : autriche danemark Agence Européenne luxembourg pour l’Environnement slovenie finlande irlande suède portugal slovaquie Lettonie ISLANDE norvège WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 6
WEI… L’indice d’exploitation de l’eau (water exploitation index ou WEI) d’un pays est défini comme le rapport entre les prélèvements totaux annuels d’eau douce et les ressources moyennes à long terme en eau douce. Il décrit la manière dont les prélèvements totaux exercent une pression sur les ressources en eau. Le seuil d’alerte est fixé à 20 % (Alcamo et al., 2000), ce qui distingue une région ou un pays non stressé d’un autre où il y a une forte concurrence pour l’eau. Il faut noter que l’indicateur inclut l’eau de refroidissement, qui représente, dans certains pays à forte production d’électricité nucléaire, une part importante des prélèvements. Mais la pression n’est pas qu’interne. L’empreinte eau du pays, on le verra dans ce rapport, montre une forte dépendance par rapport à l’étranger. Et cette importation d’eau à partir d’autres pays, parfois éloignés, n’est pas sans conséquence (voir « L’empreinte eau de la Belgique », page 11). Le tableau qui se dessine pour les années futures n’est malheureusement guère encourageant. Au niveau mondial, l’agriculture utilise aujourd’hui 70 % des ressources en eau (UNESCO-WWAP, 2003). Elle est nécessaire pour satisfaire la majorité de nos besoins, en nourriture, en habits, en matériaux de construction, etc. D’ici 2050, la population mondiale aura augmenté de 6 à 9 milliards d’êtres humains mais la demande en produits agricoles aura grosso modo doublé (par personne), à cause de l’augmentation du pouvoir d’achat et de la demande en viande et produits dérivés (IWMI, 2007). La pression sur la part de l’eau utilisée pour l’agriculture va donc énormément augmenter. Une autre manière de représenter ces défis est de faire le calcul simple suivant. Aujourd’hui, les 6 milliards d’humains consomment 6 milliards d’unités de consommation (unité arbitraire) (6 x 1 = 6 milliards d’unités de consommation). D’après les projections de l’ONU et de la Banque Mondiale, il faut s’attendre en 2050 à une population mondiale de 9 milliards d’humains et une consommation qui aura, grosso modo, doublé (avec des variations locales, par exemple, un forte hausse dans les pays émergents). La même équation devient alors 9 x 2 = 18 milliards d’unités de consommation, soit un triplement de la demande. Si ces projections, se vérifient, les impacts sur l’environnement et l’agriculture ou par l’agriculture seront énormes et il devient urgent de les prendre en compte. À cela s’ajoute une urbanisation accrue ainsi que les effets du changement climatique, qui ajoutent encore aux menaces sur les ressources en eau de la planète. Par ce rapport, le WWF-Belgique vise plusieurs objectifs. D’abord comprendre comment se présente notre consommation et nos usages en eau et présenter les premiers résultats de l’empreinte eau du pays. Ensuite analyser et discuter les chiffres et leurs implications, notamment pour ce qui est des produits agricoles, leurs origines, les pays producteurs et l’impact en termes de dépendance et de responsabilité. Pour aller plus loin, le rapport présente quelques initiatives concrètes d’entreprises qui utilisent l’empreinte eau comme outil de sensibilisation et de gestion dans le but de réduire leurs impacts sur la ressource en eau, sans nuire à leur rentabilité économique. Enfin, le WWF-Belgique propose des pistes d’actions tant pour les acteurs économiques que pour les politiques, pour réduire les conséquences écologiques, économiques et sociales négatives liées à une forte empreinte eau, avec une vison globale de la problématique. WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 7
1. Pourquoi Les enjeux liés à l’eau douce sont cruciaux à l’échelle de la planète, mais ne le sont pas moins dans un pays comme la Belgique, au climat tempéré maritime. Un pays, une l’empreinte région, une entreprise ou toute autre entité, consomme et produit des biens qui ont nécessité de l’eau pour leur élaboration. La prise en compte, dans son ensemble, de l’offre et de la demande en eau justifie le développement eau ? et l’utilisation d’un indicateur spécifique : l’empreinte eau. L’empreinte eau (Hoekstra, 2003) mesure l’utilisation directe et indirecte d’eau douce et propre par un consommateur ou un producteur. Elle permet, entre autres, de mettre en évidence les pressions exercées localement sur les ressources en eau. En ce sens, c’est un indicateur géographiquement explicite : il permet d’identifier les volumes d’eau utilisés et pollués mais aussi leurs localisations. De cette manière, il rend notamment compte des impacts des importations (par exemple en produits agricoles) d’un pays. L’empreinte eau est mesurée en unités de volume et se calcule soit du point de vue du producteur (c’est l’empreinte eau de production), soit du point de vue du consommateur (c’est l’empreinte eau de consommation). WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 8
1. Pourquoi l’empreinte eau ? L’empreinte eau de production L’empreinte eau d’un bien ou d’un service est le volume total d’eau douce nécessaire à sa production, durant tout son processus de fabrication. Ce volume se décompose en trois éléments (Hoekstra, 2003), correspondant à de l’eau consommée, évaporée ou polluée (figure 2) : • L’empreinte eau verte est le volume d’eau de pluie stockée dans le sol sous forme d’humidité, et nécessaire pour la croissance des cultures (sous forme d’évaporation de l’eau) • L’empreinte eau bleue est le volume d’eau douce captée dans les ressources en « eau bleue » (eaux de surface et nappes phréatiques), pour des usages domestiques, industriels ou agricoles (dans ce dernier cas, il s’agit de l’eau d’irrigation). • L’empreinte eau grise (aussi appelée flux de retour) est le volume d’eau polluée lors des processus de production : c’est le volume d’eau requis pour diluer les polluants dans des proportions suffisantes pour que la qualité de l’eau corresponde aux normes acceptables. L’empreinte eau de production est géographiquement explicite, elle indique non seulement les volumes d’eau utilisés, mais aussi les lieux d’utilisation. agriculteur producteur détaillant consommateur Figure 2 : L’empreinte eau d’un produit usage d’eau verte eau grise usage d’eau bleue eau grise usage d’eau bleue eau grise usage d’eau bleue eau grise et bleue WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 9
1. Pourquoi l’empreinte eau ? L’empreinte eau de consommation L’empreinte eau de consommation se définit par le volume total d’eau douce utilisé pour produire les biens et services consommés par un pays, une ville, un individu ou l’ensemble des êtres humains. L’empreinte eau d’un pays additionne le volume d’eau utilisée directement dans le pays (empreinte eau interne) et l’eau virtuelle importée (empreinte eau externe, c’est-à-dire l’eau utilisée dans d’autres pays pour fabriquer les biens et services consommés dans le pays), moins l’eau virtuelle exportée (c’est-à-dire l’eau utilisée dans le pays pour fabriquer les biens et services consommés dans d’autres pays) (voir figure 3). pays A pays B Figure 3 : L’empreinte eau Empreinte eau Empreinte eau de consommation d’un pays de consommation de consommation et la relation (simplifiée) entre deux pays interne externe externe interne partenaires commerciaux Empreinte eau Exportation Exportation Empreinte eau d’un pays d’eau virtuelle d’eau virtuelle d’un pays Importation Importation d’eau virtuelle d’eau virtuelle d’après Hoekstra et al., 2009 Grâce à ce cadre général, on se rend compte que certains pays peuvent être largement dépendants de l’importation de biens et services produits à l’étranger, biens et services qui ont nécessité de l’eau pour leur production (eau virtuelle). Le calcul de l’empreinte eau d’un pays est donc une manière de rendre visible la quantité totale d’eau réellement utilisée, en même temps que de montrer son origine géographique. L’analyse de l’empreinte eau d’un pays permet, entre autres, de cibler ses efforts pour réduire son impact dans les régions en stress hydrique et aux endroits où la gestion de l’eau est défaillante. 1 litre de lait 1 kilo de poulet 1 œuf 1 tasse de thé 1 verre de bière 1 000 litres d’eau 3 000 litres d’eau 200 litres d’eau 30 litres d’eau 75 litres d’eau Ces chiffres sont basés sur des moyennes mondiales. Les données régionales peuvent varier considérablement en fonction, par exemple, du climat (Chapagain & Hoekstra, 2004). WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 10
2. L’empreinte Résultats globaux Pour calculer l’empreinte eau de la Belgique, le WWF eau de la a analysé, avec ECOLIFE (voir aussi De Clerck, 2009), les besoins en eau de tous les produits agricoles consommés, sur la base des données de production et de commerce du PC-TAS (ITC, 2006). Cela inclut Belgique 503 cultures (p. ex. coton, denrées alimentaires, fleurs) et 141 produits d’élevage. La méthodologie utilisée est expliquée dans le Water Footprint Manual (Hoekstra et al., 2009). Le calcul de l’empreinte eau des produits industriels est complexe et encore sujet à améliorations. Ces produits comprennent les produits chimiques, les machines et autres biens manufacturés, dont l’empreinte eau est basée sur la valeur industrielle ajoutée par produit par unité d’eau utilisée. Le premier constat est que l’empreinte eau totale de la Belgique est de 28 milliards de m3 (Gm3) d’eau par an, soit environ 2 700 m3 pour chaque Belge, soit encore 7 400 litres par jour et par personne, c’est-à-dire environ 90 baignoires. C’est le double de la moyenne mondiale (voir figure 4) et plus que nos voisins (Pays-Bas 2 300 m3/an/hab, Royaume-Uni 1 700 m3/an/hab). Le premier constat est donc que l’empreinte eau du Belge est très élevée. totale interne externe Figure 4 : 3000 l’empreinte eau (totale, interne et 2500 externe) pour quelques 2000 pays (en m3/personne/an) 1500 1000 500 0 Suède Pays-Bas USA (WWF-UK, 2008) (WWF 2010) (WWF 2008) (WWF-UK, 2008) Belgique Royaume-Uni (WWF 2009) (WWF-UK, 2008) Allemagne Moyenne mondiale WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 11
2. L’empreinte eau de la Belgique La décomposition de l’empreinte eau de la Belgique (tableau 1) révèle, deuxième constat, que l’empreinte eau interne est de 25 %. Autrement dit, cela représente l’autosuffisance du pays. À l’inverse, l’empreinte eau externe est de 75 %. Cela signifie que les trois-quarts de l’empreinte eau du pays sont liés à des importations d’eau (virtuelle) en provenance de l’extérieur. Il s’agit majoritairement de produits agricoles tels que coton, café et blé, qui, de plus, sont souvent cultivés dans les parties du monde où les ressources hydriques sont déjà sous forte pression. On verra plus loin (page 17) les implications de cette empreinte externe sur les pays d’importation et les responsabilités qui en découlent. Troisième constat (tableau 1), la part très dominante liée aux produits agricoles (26,09 milliards de m3/an, soit 93,6 %). Cela signifie que, des 7 400 l quotidiens du Belge moyen, 6 931 sont liés à la consommation de produits issus de plantes ou d’animaux. La consommation liée aux produits industriels est de 258 l (3,5 %), un chiffre à prendre avec précaution, car il demande encore de plus amples recherches. L’eau qui sort réellement du robinet est de 218 l par jour par habitant, en moyenne, chiffre qui inclus l’eau utilisée par les services publics. Interne Externe Total % du total Tableau 1 : Produits agricoles 5,85 20,24 26,09 93,6 % décomposition de l’empreinte eau de la Produits industriels 0,40 0,57 0,97 3,5 % Belgique (en Gm3/an) Usage domestique 0,82 - 0,82 2,9 % Total (Gm3/an) 7,07 20,81 27,88 100,0 % % du total 25 % 75 % 100,0 % WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 12
2. L’empreinte eau de la Belgique Une agriculture à forte empreinte eau Si on analyse plus en détail la partie de l’empreinte eau liée aux produits agricoles, on constate (figure 5) qu’elle résulte principalement des cultures (81 %) et, dans une moindre mesure, de l’élevage (19 %). Il est important de noter que de nombreuses cultures servent à l’alimentation animale et que cette fraction n’est pas prise en compte dans ce dernier chiffre. Le chiffre lié à l’élevage comprend donc l’herbe, l’eau de boisson et l’eau de service (comme le nettoyage des étables) et sous-estime l’impact réel de l’élevage. L’empreinte eau liée aux cultures est en grande partie externe (83 %) et donc liée aux importations. En ce qui concerne l’élevage, l’empreinte eau interne est un peu inférieure à l’empreinte eau externe (54 %). Figure 5 : 30 empreinte eau interne Décomposition de empreinte eau externe l’empreinte eau des 25 empreinte eau totale produits agricoles 20 (Gm3/an) 15 10 5 0 Cultures Élevage Total Les cultures qui contribuent à l’empreinte eau sont principalement (figure 6) le blé, le coton, le soja et le café, certaines étant d’origine tropicale ou subtropicale. À elles seules, ces quatre cultures forment plus de 50 % de notre empreinte eau externe des cultures. Les seules cultures à avoir une empreinte eau interne significative sont celles cultivées dans nos régions : blé, betterave sucrière, orge et maïs. WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 13
2. L’empreinte eau de la Belgique 6 Figure 6 : Principales cultures liée 5 Empreinte eau interne Empreinte eau externe à l’empreinte eau Empreinte eau totale des cultures en Belgique 4 (en Gm3/an) 3 2 1 0 blé coton soja café huile de palme orge sucre de canne tournesol betterave sucrière colza maïs autres L’empreinte eau des produits agricoles consommés en Belgique résulte également des produits d’élevage (figure 7). L’empreinte eau la plus importante pour ces produits revient au lait, suivi de près par la viande de bœuf, viennent ensuite la viande de porc et la volaille. Plus de la moitié (54 %) de ces produits sont importés. Les produits qui sont davantage produits dans le pays sont le bœuf et le porc, ceux qui sont le plus importés sont le lait et la volaille (viande). Figure 7 : 1,5 Principaux produits d’élevage liés à l’empreinte eau des 1,2 Empreinte eau interne produits d’élevage en Empreinte eau externe Empreinte eau totale Belgique (en Gm3/an) 0,9 0,6 0,3 0,0 lait bœuf porc volaille volaille autres (viande) (œufs) En résumé, l’empreinte eau des produits agricoles consommés en Belgique a une composante interne significative pour les produits d’élevage et des cultures telles que le blé, la betterave sucrière, le maïs et l’orge. Elle est surtout externe pour le coton, le soja et le café. WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 14
2. L’empreinte eau de la Belgique Des produits agricoles massivement importés L’analyse des données de l’empreinte eau externe permet d’identifier les pays d’origine des importations. En ce qui concerne les produits agricoles (voir figure 8), les importations à destination de la Belgique proviennent d’abord d’Europe (surtout France, Allemagne et Pays-Bas), puis d’Asie (surtout Indonésie, Inde, Pakistan) et d’Amérique latine (Brésil et Argentine). Océanie 2% Figure 8 : Afrique 9% Répartition géographique de l’empreinte eau Amérique agricole externe de la du Nord 8% Belgique (en %) Europe 44% Amérique latine 18% Asie 19% Le blé est le produit importé qui contribue le plus à l’empreinte eau externe. La France est le principal fournisseur de la Belgique, suivie par l’Allemagne et le Canada. Le deuxième produit importé est le coton, qui vient d’Inde, de Turquie, d’Ouzbékistan et du Pakistan. En troisième place, on trouve le soja qui est importé surtout du Brésil, des États-Unis et d’Argentine. Enfin, le café bu par les Belges est principalement cultivé au Brésil, en Colombie et en Ouganda. L’impact des importations dans les pays d’origine est développé plus loin (voir page 17). WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 15
2. L’empreinte eau de la Belgique Les données qui servent à calculer l’empreinte eau Que la Belgique ait une empreinte eau agricole élevée et une forte dépendance par rapport à l’étranger sont des conclusions attendues. Avec une surface réduite et un climat tempéré, la Belgique est forcément dépendante de l’extérieur et des cultures (sub)-tropicales. Seuls quelques cultures et produits d’élevages sont fabriqués et consommés localement (empreinte interne). Dans les grandes lignes, les résultats de l’empreinte eau donnent des conclusions fortes et permettent d’élaborer des recommandations générales (voir page 22) pertinentes. La science liée à l’empreinte eau est récente (la création de l’indicateur ne date que de 2003) et il faut garder à l’esprit que la méthode de calcul est en évolution. Des méthodologies différentes engendrent des résultats différents. La qualité des données est aussi un facteur qui influence les résultats et il y a certainement moyen de l’améliorer encore et d’affiner les données. WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 16
3. Les impacts L’impact de l’empreinte eau de la Belgique sur les pays étrangers dépend à la fois de la quantité d’eau utilisée à l’étranger de pour produire les biens ou services importés que de sa qualité. La quantité d’eau est mesurée par l’empreinte eau externe, qui exprime le volume d’eau utilisé. Quant l’empreinte eau à sa qualité, on l’exprime via l’indice de stress hydrique (Water Stress Indicator ou WSI, Smakhtin et al., 2004), qui mesure la rareté de l’eau disponible pour les activités humaines, tout en prenant en compte les besoins de la Belgique hydriques des écosystèmes. Ainsi, si l’indice est supérieur à 100 % pour un pays donné, cela signifie que l’on y extrait plus d’eau que ce qui est disponible pour les besoins humains. Une valeur supérieure à 60 % indique une exploitation des ressources forte, un indice entre 30 % et 60 %, une exploitation modérée, et des valeurs inférieures à 30 %, une exploitation légère. Pour évaluer les impacts à l’étranger de l’empreinte eau de la Belgique (figure 9 pour l’empreinte eau agricole externe), il faut s’intéresser surtout aux pays où, d’une part, l’empreinte eau externe de la Belgique est importante et où, d’autre part, le stress hydrique est élevé. Figure 9 : empreinte eau agricole externe (en Mm3/an) Allemagne Ukraine Ouzbekistan Espagne Pakistan inde 0 - 10 10 - 100 100 - 1 000 >1 000 Hotspots WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 17
3. Les impacts à l’étranger de l’empreinte eau de la Belgique Dans ce groupe de pays, on retrouve, entre autres, l’Allemagne (blé, lait), l’Inde (surtout coton), l’Espagne (olives, riz, amandes), le Pakistan (coton, sucre de canne) et l’Ouzbékistan (coton). Ce sont donc des pays qui peuvent être impactés (de manière positive ou négative) par des actions sur le mode de vie des Belges et la consommation des produits qui en sont importés (voir les exemples présentés ci-après). On peut le constater dans les trois exemples présentés ci-dessous : le coton, le sucre, et le cas du Pakistan. Ces cas ont été choisis pour la part importante qu’ils représentent dans l’empreinte agricole externe de la Belgique et parce qu’ils font l’objet d’initiatives internationales et multistakeholders auxquelles le WWF participe. Exemple du coton Le coton est l’exemple emblématique d’une culture massivement importée par les pays européens et, à la fois, une culture parmi les plus grandes consommatrices d’eau tout au long de sa chaîne de production. Dans le monde, près de 73 % des cultures de coton sont irriguées (Soth et al., 1999) car situées dans des régions arides. On estime qu’il faut en moyenne 11 000 litres d’eau pour produire un kilo de coton (Chapagain et al., 2006). Un chiffre énorme dont les consommateurs occidentaux ne voient qu’une minuscule partie. Pour les pays de l’UE-25, 84 % de l’empreinte eau de production du coton se situe hors de son territoire. Les impacts liés à la culture et à la transformation du coton sont de trois types : l’évaporation de l’eau de pluie infiltrée et nécessaire pour la croissance de coton (l’eau verte), le prélèvement des eaux souterraines ou de surface pour l’irrigation (l’eau bleue) et, enfin, la pollution de l’eau pendant la croissance ou la transformation du coton (eau grise). Les impacts principaux pour l’UE-25 se situent en Inde, Ouzbékistan, Pakistan, Turquie et Chine (voir figure 10). Les ressources hydriques de deux de ces pays (Ouzbékistan et Pakistan) sont déjà largement surexploitées (WSI de 165 % et 105 % respectivement). WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 18
3. Les impacts à l’étranger de l’empreinte eau de la Belgique Figure 10 : Impact total de la consommation de produits issus du coton par l’UE-25 sur les ressources mondiales en eau (en Mm3/ an, période 1997-2001) Empreinte eau totale (Mm3/an) 0 0 - 10 10 - 50 50 - 500 500 - 2 500 2 500 - 5 000 5 000 - 7 500 d’après Chapagain et al., 2006 Le WWF est partenaire de la Better Cotton Initiative (BCI), un programme volontaire qui vise à encourager une culture du coton moins gourmande en eau et en produits chimiques, une étape importante pour rendre la production de coton plus durable. Le WWF travaille avec des agriculteurs, des organismes gouvernementaux, des acheteurs et des investisseurs à des étapes clés de la filière - du champ à la boutique de vêtements - dans un effort commun visant à promouvoir un coton durable, qui a moins d’impact sur l’environnement, est économiquement viable et socialement acceptable. www.bettercotton.org Exemple du sucre Le sucre est l’un des ingrédients les plus communs dans notre alimentation. Plus de 100 pays produisent du sucre, dont 60-70 % est fabriqué à partir de canne à sucre cultivées principalement dans les zones tropicales et subtropicales de l’hémisphère sud. Le solde provient de la betterave sucrière qui est cultivée principalement dans les zones tempérées de l’hémisphère nord (NO de l’Europe, Europe de l’est, le nord du Japon et dans certaines régions des États-Unis). Au cours de la période 2000-2004, la production mondiale de cultures sucrières a été de plus de 1,5 milliard de tonnes par an. Le Brésil est le premier producteur (24 %), suivi par l’Inde (18 %), la Chine (6 %), la Thaïlande (4 %), les États-Unis (4 %) et le Pakistan (4 %). Actuellement, 69 % du sucre dans le monde est consommé dans le pays d’origine et le solde se retrouve sur les marchés mondiaux. WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 19
3. Les impacts à l’étranger de l’empreinte eau de la Belgique La culture de la canne à sucre nécessite souvent une irrigation. À l’inverse, la betterave sucrière est cultivée principalement dans les zones pluviales avec peu ou pas d’irrigation complémentaire. L’empreinte eau de production moyenne est de 809 l/kg de sucre (non raffiné) de betterave et de 1 427 l/kg de sucre (non raffiné) de canne (Hoekstra & Chapagain, 2008). En Belgique, l’empreinte eau de consommation pour le sucre est de 1 412 Mm3/an soit 375 litres/j/hab. (sur les 7 400 totaux) (voir tableau 3). Cette empreinte est externe à 53 % et correspond aux importations de sucre de canne (en provenance surtout du Pakistan, puis de Cuba et du Swaziland). (Mm³/an) Interne Externe Empreinte eau totale Tableau 3 : Empreinte eau de Sucre de canne 0 745 745 consommation du sucre en Sucre de betterave 663 4 667 Belgique (Mm³/an) Total 663 749 1 412 On constate que ces produits, tous deux consommés par la population en Belgique, ont des impacts totalement différents en ce qui concerne leur empreinte eau : la canne à sucre est produite uniquement à l’étranger (son empreinte eau interne est égale à zéro), tandis que la betterave sucrière est produite presque exclusivement en Belgique. L’intérêt de l’indicateur empreinte eau est ici bien évident : il permet une sensibilisation sur le sujet et apporte un éclairage, parmi d’autres, sur une question complexe comme le choix d’un produit de consommation courante. Dans le cas du sucre, d’autres aspects liés à l’eau interviennent aussi, comme le stress hydrique du pays de production ou la quantité et l’origine de l’eau éventuellement nécessaire à la culture (empreinte eau de production). Concrètement, cela signifie que des 745 Mm3/an, 224 proviennent du Pakistan, 83 de Cuba et 44 du Swaziland. Le Pakistan a un indice de stress hydrique très élevé (WSI = 108 %, contre 31 % et 25 % pour les deux autres pays respectivement) ce qui veut dire que la consommation de sucre de canne des Belges a un impact négatif direct sur les ressources en eau de ce pays (voir ci-dessous, l’exemple du Pakistan). Le WWF participe à la Better Sugarcane Initiative (BONSUCRO TM), une collaboration entre des détaillants en sucre, des investisseurs, des commerçants, des producteurs et des ONG en faveur du sucre durable. La BSI a pour objectif de réduire, de manière mesurable, l’impact de la production de canne à sucre sur l’environnement, en contribuant également aux avantages sociaux et économiques pour les producteurs de sucre et tous les autres acteurs de la chaîne. Le WWF travaille avec des agriculteurs dans des projets de terrain qui visent à de meilleures pratiques agricoles, notamment au Pakistan. Dans certains pays producteurs, le WWF sensibilise les acteurs institutionnels et privés à la durabilité de ces initiatives. Il collabore ainsi avec une entreprise comme Coca-Cola Company pour une gestion plus durable des ressources naturelles (voir page 24). www.bonsucro.com WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 20
3. Les impacts à l’étranger de l’empreinte eau de la Belgique Exemple du Pakistan Le Pakistan est un pays exemplaire pour la Belgique puisqu’il est un exportateur important à la fois pour le sucre de canne et le coton. Actuellement en stress hydrique, le Pakistan était pourtant un pays excédentaire pour cette ressource. Cependant, la variabilité de la pluviométrie et la sécheresse ont des effets dévastateurs sur l’agriculture, les pâturages, les zones humides et les populations humaines qui dépendent de ces ressources. Le WWF contribue à différents projets au Pakistan, parmi eux il y a le Pakistan Wetlands Programme qui vise à promouvoir la conservation durable des zones humides d’eau douce et marines et la biodiversité d’importance mondiale qui y est associée. Le WWF soutient également le Pakistan Sustainable Cotton Initiative qui vise à développer et promouvoir des pratiques de gestion optimales pour la production de coton durable. Cela comprend l’application de meilleures pratiques de gestion de l’eau et la réduction significative des quantités de pesticides et d’engrais dans la production de coton, sans affecter les rendements de manière significative. Ensuite, le WWF contribue à une meilleure gestion des bassins versants dans le parc national d’Ayubia et y mène des actions de sensibilisation à la conservation de l’environnement. Le parc national d’Ayubia couvre une superficie d’environ 3 312 ha et est situé dans l’Himalaya occidental. Cette région est d’importance cruciale puisqu’elle récolte 70-80 % des eaux de fonte des neiges et des glaciers qui alimentent, in fine, tout le delta de l’Indus. Enfin, le WWF-Pakistan a lancé un projet intitulé Better Management Practices for Water Thirsty Crops (« meilleures pratiques de gestion pour cultures gourmandes en eau ») afin d’assurer des sources durables d’eau douce soutenant les moyens d’existence des communautés pauvres du Pakistan. Ce projet permettra de créer un mécanisme pour accroître la disponibilité en eau et réduira la pollution en diminuant la quantité d’eau et les pesticides utilisés dans la production de canne à sucre et de coton. WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 21
4. Des pistes Les résultats et les exemples montrés plus haut illustrent l’intérêt de se pencher sur l’empreinte eau de la Belgique pour au moins trois raisons : vers des 1. La première concerne directement la viabilité à long terme des ressources en eau. solutions… 2. Un autre enjeu est la sensibilisation des entreprises et des consommateurs par rapport à leur consommation en eau et les questions importantes qu’elle soulève en termes de sécurité alimentaire et de disponibilité des ressources. 3. Enfin, les acteurs publics et politiques sont interpellés en termes de gouvernance, notamment pour leur rôle dans la politique d’aide au développement puisque l’eau est une question globale et mondialisée. Un certain nombre de solutions et de pistes d’actions sont engagées par ces acteurs, avec la collaboration du WWF. Des exemples en sont repris ci-après. Pour les entreprises Les entreprises ont un rôle clé à jouer dans l’amélioration de la gestion des ressources en eau et dans la réduction du risque de dommages environnementaux. Elles peuvent veiller à l’utilisation rationnelle de l’eau, et le calcul de l’empreinte eau leur permet de le chiffrer, non seulement dans leurs activités propres mais également, et surtout, tout au long de leur chaîne d’approvisionnement, faisant de la bonne gestion de l’eau une composante standard des contrats avec ses fournisseurs. Les entreprises ont aussi un intérêt stratégique à connaître leur empreinte totale pour pouvoir analyser les éventuels risques qu’elles courent. L’enjeu est alors de développer des stratégies pour diminuer ces impacts et, partant, les risques qui y sont associés. Le Water Footprint Network (WFN)1 et le Centre de l’Eau de l’Université de Twente (NL) développent des méthodes scientifiques pour permettre aux entreprises comme à d’autres entités de calculer leur empreinte eau. Plus de 120 entreprises et institutions font actuellement partie du WFN. Le WWF, membre du WFN, travaille avec les entreprises et leurs producteurs, de manière à réduire, dans les pays d’origine, l’utilisation d’eau pour les produits agricoles. Trois exemples illustrent cette collaboration. Alpro En Belgique, l’entreprise Alpro, en collaboration avec le WWF et le Centre de l’Eau de l’Université de Twente, a calculé l’empreinte eau de deux de ses produits phares : une boisson au soja et un burger à base de soja. Le calcul a pris en compte l’empreinte opérationnelle, c’est-à-dire l’utilisation d’eau directe dans la production de produits à base de soja, ainsi que l’empreinte de la chaîne d’approvisionnement, c’est-à-dire l’utilisation d’eau indirecte, nécessaire pour produire les matières premières, les emballages et les services consommés. 1 www.waterfootprint.org WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 22
4. Des pistes vers des solutions… Figure 11 : Boisson au soja 1 litre de boisson au soja comparés à d’autres empreinte eau 365 litres dont 99,8 % proviennent de la chaîne d’approvisionnement 1 litre de lait de vache empreinte eau 1000 litres en moyenne 2.7 fois plus 1 burger de soja de 170 gr empreinte eau 132 litres 1 burger de bœuf dont 99,9 % proviennent de la chaîne d’approvisionnement de 170 gr empreinte eau 2 635 litres en moyenne 20 fois plus Les chiffres obtenus pour ces produits végétaux sont comparés à ceux de produits similaires mais contenant des produits animaux (lait de vache, viande de bœuf) (voir figure 11). Ces chiffres montrent bien que s’il reste important pour une entreprise de se pencher sur sa propre utilisation d’eau, l’essentiel est ailleurs, dans sa chaîne d’approvisionnement. Dans ce cas-ci, l’analyse détaillée de la culture du soja est capitale pour bien comprendre les impacts de sa chaîne de fabrication sur les ressources en eau. De plus, ces chiffres montrent aussi à quel point les produits d’origine animales sont bien plus gourmands en eau que leurs alternatives végétariennes. Sur base de ces données, ALPRO et le WWF vont développer un plan d’action pour analyser, dans les prochaines années, les impacts réels des produits ALPRO sur les ressources en eau des pays fournisseurs des matières premières. Ce plan s’accompagnera d’actions de sensibilisation. www.alpro.be WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 23
4. Des pistes vers des solutions… Coca-Cola Company Le WWF et Coca-Cola Company ont signé un partenariat global dont les objectifs sont : •A ider à préserver sept bassins versants importants, dont celui du Danube ; • Au niveau des embouteilleurs, améliorer, d’ici 2012, l’efficacité de l’utilisation d’eau de 20 % (par rapport aux chiffres 2004) ; • Encourager un usage plus efficace de l’eau à travers la chaîne d’approvisionnement, en commençant par le sucre ; •R éduire les émissions de CO2 et la consommation d’énergie aux niveaux de 2004, et de 5 % supplémentaires dans les pays en développement. Ce cadre global a permis le démarrage de plusieurs collaborations locales, notamment aux Pays-Bas. Dans ce pays, l’entreprise a calculé, en collaboration avec The Water Footprint Network, l’empreinte eau d’un demi litre de Coca-Cola, fabriqué dans son unité de production locale (figure 12). Figure 12 : Empreinte eau Empreinte eau Empreinte eau chaîne d’approvisionnement opérationnelle totale L’empreinte eau d’une bouteille en PET de 0,5 litre de Coca-Cola dans le site de Dongen, Pays-Bas. Empreinte eau bleue 4% Empreinte eau verte 13% Empreinte eau grise 83% 35 LITRES Packaging + = 7 litres 12 LITRES 0,4 LITRE 15 LITRES Empreinte eau grise 20% 8 LITRES Empreinte eau bleue 28% Empreinte eau verte 52% Empreinte eau grise 34% Empreinte eau bleue 23% IngrÉdients Empreinte 28 litres eau bleue 100% Empreinte eau verte 43% WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 24
4. Des pistes vers des solutions… L’analyse a montré que la part majeure de cette empreinte eau, liée à la culture de la betterave sucrière, est déjà très compétitive, comparée aux valeurs de ces mêmes cultures dans les pays voisins. Les possibilités de réduction de l’empreinte eau semblent donc limitées mais l’expérience peut profiter aux autres sites d’embouteillage de l’entreprise, notamment en ayant une meilleure compréhension des risques liés à la chaîne d’approvisionnement. L’entreprise va travailler avec ses fournisseurs de sucre en Europe et ailleurs pour élaborer des stratégies de réduction des impacts liés à l’eau dans l’agriculture. Cependant, dans de nombreux pays, le sucre utilisé dans la boisson provient de la canne à sucre, dont la culture nécessite plus d’eau. Le produit final a donc une empreinte eau nettement plus élevée. C’est ce qui a motivé l’entreprise à s’engager dans une initiative telle que BONSUCRO (voir « Exemple du sucre », page 19). L’entreprise a également calculé l’empreinte eau de certaines de ses boissons à base d’oranges, produites pour le marché nord-américain (p. ex. Minute Maid Original). Les calculs montrent que l’empreinte eau se situe entre 518 et 651 litres pour 1 litre de boisson et est à 99 % liée à la culture des oranges (Floride, Brésil, Costa Rica). L’entreprise a pris conscience des opportunités possibles pour améliorer les rendements et minimiser les impacts liés à cette culture. Elle va notamment collaborer avec les autres parties prenantes à une gestion soutenable de la ressource commune qu’est l’eau. www.coca-cola.com SABMiller Le groupe brassicole a collaboré avec le WWF pour faire le point sur les enjeux et les risques liés à l’eau dans ses activités. Entre autres, l’empreinte eau de ses produits a été calculée pour cinq sites de production de bière, l’un en Afrique du Sud et l’autre en République Tchèque, au Pérou, en Tanzanie, en Ukraine et en Afrique du Sud. Des nombreux chiffres de cette analyse, il ressort que l’empreinte eau de la bière est surtout (90 %) liée à la culture des céréales qui entrent dans sa composition. Si on compare les deux sites de production, on voit que le litre de bière en Afrique du Sud a nécessité plus de trois fois plus d’eau que son équivalent en République Tchèque et que c’est principalement lié aux importations de céréales (dont les cultures sont majoritairement irriguées) à partir des pays voisins. Figure 13 : Afrique du Sud: République Tchèque: empreinte eau de production 155 litres 45 litres d’un litre de bière 31% des céréales sont importées 5% des céréales sont importées WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 25
4. Des pistes vers des solutions… Le groupe brassicole reconnaît l’utilité de l’empreinte eau comme outil de gestion, même si l’indicateur doit encore évoluer, car son calcul permet d’évaluer quantitativement l’utilisation d’eau, notamment dans des régions où l’eau est rare. Des données qui ne manquent pas d’intérêt pour évaluer les risques liés à cette ressource naturelle et prendre les mesures adéquates par rapport au fonctionnement de ses sites industriels, aux relations avec les autorités locales et à la soutenabilité environnementale en général. www.sabmiller.com Quelques recommandations… •R econnaître les risques pour l’entreprise : une pénurie d’eau dans la chaîne d’approvisionnement peut conduire à des perturbations de la production et générer des coûts plus élevés en transport et achats. Les risques concernent aussi les populations locales et peuvent évoluer en situations de tension. • I dentifier et réduire l’empreinte eau : commencer par calculer l’empreinte eau et situer ses éventuels impacts dans le contexte local. Un plan de réduction peut ensuite être mis sur pied. •P artager ses connaissances : les entreprises peuvent largement contribuer à l’élaboration de normes pour des cultures comme celles de la canne à sucre, du coton ou encore du riz. •Ê tre transparent, la première étape pour un développement durable. L’organisation Global Reporting Initiative2 fournit des lignes directrices à cet effet. •C ontribuer à la gestion de l’eau : plus largement, les entreprises peuvent jouer un rôle dans la gestion des ressources en eau dans les pays d’origine. En tant qu’acteurs privés, elles peuvent apporter une contribution importante aux débats locaux et aux forums sur la gestion intégrée de l’eau. 2 www.globalreporting.org WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 26
4. Des pistes vers des solutions… Pour les autorités publiques Les impacts que peut avoir l’empreinte eau de la Belgique dépendent entièrement d’où, de combien, de quand et de comment l’eau est prélevée. Une empreinte eau significative dans une région où l’eau est abondante est peu susceptible d’avoir un effet négatif sur la société ou l’environnement, mais la même empreinte eau dans une région en pénurie d’eau peut engendrer des problèmes graves, comme l’assèchement des rivières, la destruction des habitats et des moyens de subsistance ainsi que l’extinction des espèces, en plus d’avoir un impact sur les prix agricoles, les services de base et les économies locales. L’enjeu de la soutenabilité en eau est fondamentalement celui d’une action collective efficace par ceux qui utilisent l’eau et en dépendent pour leur approvisionnement. C’est un domaine d’action important pour les autorités publiques. Elles y jouent un rôle majeur dans l’élaboration des règles du jeu, le développement d’un cadre juridique ou encore d’une méthodologie parce qu’elles peuvent aborder les questions liées à l’eau de manière globale, notamment à travers les marchandises que nous importons et qui constituent une part majeure de l’empreinte eau d’un pays comme la Belgique. Le détail de l’empreinte eau dans le présent rapport montre l’intérêt qu’ont les autorités publiques à prendre en compte la ressource en eau douce dans le développement économique et les aides aux pays en développement. Ces aides pourraient, par exemple, inclure la dimension de gestion durable de l’eau dans les pays concernés. La question de l’eau est aussi intimement liée à celle du climat et les questions de pluviométrie, de volumes d’eau prélevés et de leur timing font partie des défis de la lutte contre le changement climatique. Il est dès lors capital que les autorités publiques comprennent la problématique liée à l’eau dans sa globalité et que le débat sur la gestion de l’eau porte tant sur sa dimension domestique que sur sa dimension internationale. WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 27
4. Des pistes vers des solutions… Quelques recommandations… Au niveau international •R atification par la Belgique de la Convention des Nations Unies sur les cours d’eau3 : cette convention est surtout importante pour les pays qui n’ont pas de cadre juridique pour gérer les eaux de bassins versants transnationaux. Bien que cette convention ait été développée en 1997, la Belgique ne l’a toujours pas ratifiée et cela réduit donc la possibilité de la voir entrer en vigueur ; •S outenir des instances internationales (l’UE, la Banque mondiale, etc.) pour que leurs aides soient conditionnées à la prise en compte de la dimension « eau » ; •Encourager les autres pays de l’UE à implémenter totalement la directive cadre européenne « eau » et la directive « habitats » ; • Facilitation du dialogue, aux niveaux belge et européen, entre les entreprises et les autorités à propos des impacts des sites de production sur les ressources en eau ; • Identifier les zones géographiques les plus impactées par l’empreinte eau de la Belgique ; •A ider les pays concernés à mettre en œuvre des mesures de gestion durable de leurs ressources hydriques, à réhabiliter et, si nécessaire, restaurer les écosystèmes humides dégradés ; •F aire de la gestion durable et intégrée de l’eau un élément clé de la stratégie d’aide au développement. Sur le plan national •S outenir des entités fédérées pour que leurs aides soient conditionnées à la prise en compte de la dimension « eau » ; • Faire un audit « eau » des programmes gouvernementaux pour éviter d’éventuels impacts négatifs sur les ressources hydriques, en Belgique et à l’étranger ; •M esurer les besoins en eau (internes et externes) pour assurer la sécurité alimentaire de la Belgique et prendre les mesures politiques qui en découlent ; • A méliorer le cadre légal sur l’eau en Belgique, pour une gestion plus durable de la ressource ; • Informer et sensibiliser les citoyens au concept de l’empreinte eau (par exemple en développant des instruments qui permettent au citoyen de la mesurer) ; • Réhabiliter et, si nécessaire, restaurer les écosystèmes humides dégradés dans le pays. 3 http://wwf.panda.org/what_we_do/how_we_work/policy/conventions/water_conventions/un_watercourses_convention/ WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 28
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