La Belgique et son empreinte eau - 2011 RAPPORT

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La Belgique et son empreinte eau - 2011 RAPPORT
RAPPORT
2011

La Belgique et
son empreinte eau
La Belgique et son empreinte eau - 2011 RAPPORT
Éditeur responsable : Damien Vincent, WWF-Belgique,
Boulevard Émile Jacqmain 90, 1000 Bruxelles

Rédaction : Anne-Kirstine de Caritat, Stijn Bruers,
Ashok Chapagain.
Contributeurs : Philippe Weiler, Aurélie Laurent.
Traduction : Brantra SPRL
Coordination : Anne-Kirstine de Caritat
Mise en page : inextremis.be
Données : sauf indication contraire, les données d’empreinte
eau sont issues du Water Footprint Network et d’Ecolife.
La Belgique et son empreinte eau - 2011 RAPPORT
Table des matières
	Résumé                                                            5

	Introduction                                                      6

1. Pourquoi l’empreinte eau ?                                      8
   L’empreinte eau de production                                   9
   L’empreinte eau de consommation                                10

2. L’empreinte eau de la Belgique                                 11
   Résultats globaux                                              11
   Une agriculture à forte empreinte eau                          13
   Des produits agricoles massivement importés                    15
   Encadré : Les données qui servent à calculer l’empreinte eau   16

3. Les impacts à l’étranger de l’empreinte eau de la Belgique     17
   Exemple du coton                                               18
   Exemple du sucre                                               19
   Exemple du Pakistan                                            21

4.	Des pistes vers des solutions…                                 22
  Pour les entreprises                                            22
		Alpro                                                           22
		 Coca-Cola Company                                              24
		SABMiller                                                       25
  Pour les autorités publiques                                    27

	Conclusions                                                      29

	Références                                                       30
La Belgique et son empreinte eau - 2011 RAPPORT
La Belgique et son empreinte eau - 2011 RAPPORT
Résumé                       Par ce rapport, le WWF-Belgique veut
                             montrer que l’empreinte eau est un
                             indicateur pertinent pour :

•M  ontrer l’eau cachée dans notre consommation de biens et de services ;
• Mettre en évidence notre dépendance par rapport à l’étranger (empreinte
   eau externe) ;
•R  elier notre empreinte eau externe à des pays ou des zones géographiques bien
   déterminés ;
• I dentifier et mettre en œuvre des pistes d’action pour réduire les impacts sur
  les ressources hydriques.

Les résultats pour la Belgique montrent que l’empreinte eau moyenne du Belge est
très élevée. Notre style de vie et notre consommation de biens et de services impliquent
une consommation d’eau bien supérieure à nos ressources propres et donc très
largement dépendante des ressources hydriques à l’étranger. Les filières commerciales
d’approvisionnement peuvent être clairement retracées et les impacts extérieurs
localisés dans les pays producteurs.

Le WWF-Belgique encourage les acteurs publics et le monde des entreprises à
prendre en compte l’empreinte eau et la gestion durable de cette ressource dans leur
gestion et leurs politiques. Les exemples concrets présentés peuvent servir de sources
d’inspiration à l’action.

                                   WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 5
La Belgique et son empreinte eau - 2011 RAPPORT
Introduction                                                             ’analyse de l’empreinte eau de la Belgique est une
                                                                             L
                                                                             première. Le WWF veut par ce rapport attirer l’attention
                                                                             sur cette ressource si souvent considérée comme évidente,
                                                                             surtout dans un pays comme le nôtre. Pourtant, la
                                                                             disponibilité en eau douce n’est pas un fait qui va de soi,
                                                                             ni aujourd’hui, ni encore moins demain.

                                      L’eau est une ressource naturelle précieuse que nous utilisons massivement dans
                                      l’agriculture, pour notre alimentation, celle du bétail, les fibres textiles, sans parler
                                      des biocarburants. Les écosystèmes d’eau douce fournissent cette ressource et assurent
                                      des fonctions aussi essentielles que la régulation des flux d’eau, la purification de l’eau, la
                                      régulation du climat, la protection contre les tempêtes, la protection contre l’érosion, etc.

                                      La Belgique est un petit territoire, densément peuplé et économiquement développé.
                                      Un style de vie occidental, avec notamment un régime alimentaire très carné en est
                                      une autre caractéristique. Les pressions sur l’environnement y sont donc fortes et, en
                                      particulier, celles sur les ressources hydriques. La Belgique est un des pays européens
                                      qui exploite le plus ses ressources propres (voir figure 1). Malgré son climat plutôt
                                      pluvieux, il y a moins d’eau disponible par personne que dans la majorité des autres pays
                                      européens. De plus, une part importante du territoire est imperméable (bâti, routes, etc.)
                                      ce qui rend l’infiltration de l’eau très difficile. De plus, une part importante des eaux de
                                      surface et souterraines est fortement polluée, ce qui la rend moins disponible.

                                                                  0%   10%   20%        30%       40%        50%          60%             70%

                   Figure 1 :
                                                       Chypre
                                                    bulgarie
                                                     espagne
   Total des prélèvements                           belgique
                                          rép. de Macédoine
annuels d’eau dans chaque                                italie
                                  Angleterre/Pays de galles

     pays, par rapport aux                              malte
                                                 allemagne
                                                     turquie
    ressources disponibles                           pologne
                                                       france
                                                                                                                     WEI le plus récent

(dernière année disponible,                        roumanie
                                        République tchèque
                                                                                                                     WEI-90

         entre 1997 et 2005,                             grèce
                                                   pays-bas

      selon les pays) (en %)
                                                   lithuanie
                                                      estonie
                                                     hongrie
                                                        suisse
                       Source :                     autriche
                                                  danemark
             Agence Européenne                  luxembourg
           pour l’Environnement                     slovenie
                                                    finlande
                                                      irlande
                                                        suède
                                                   portugal
                                                  slovaquie
                                                    Lettonie
                                                      ISLANDE
                                                     norvège

WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 6
La Belgique et son empreinte eau - 2011 RAPPORT
WEI…

  L’indice d’exploitation de l’eau (water exploitation index ou WEI) d’un pays est
  défini comme le rapport entre les prélèvements totaux annuels d’eau douce et
  les ressources moyennes à long terme en eau douce. Il décrit la manière dont les
  prélèvements totaux exercent une pression sur les ressources en eau.
  Le seuil d’alerte est fixé à 20 % (Alcamo et al., 2000), ce qui distingue une région
  ou un pays non stressé d’un autre où il y a une forte concurrence pour l’eau.
  Il faut noter que l’indicateur inclut l’eau de refroidissement, qui représente, dans
  certains pays à forte production d’électricité nucléaire, une part importante des
  prélèvements.

Mais la pression n’est pas qu’interne. L’empreinte eau du pays, on le verra dans ce
rapport, montre une forte dépendance par rapport à l’étranger. Et cette importation
d’eau à partir d’autres pays, parfois éloignés, n’est pas sans conséquence
(voir « L’empreinte eau de la Belgique », page 11).
Le tableau qui se dessine pour les années futures n’est malheureusement guère
encourageant. Au niveau mondial, l’agriculture utilise aujourd’hui 70 % des ressources
en eau (UNESCO-WWAP, 2003). Elle est nécessaire pour satisfaire la majorité de
nos besoins, en nourriture, en habits, en matériaux de construction, etc. D’ici 2050,
la population mondiale aura augmenté de 6 à 9 milliards d’êtres humains mais la
demande en produits agricoles aura grosso modo doublé (par personne), à cause de
l’augmentation du pouvoir d’achat et de la demande en viande et produits dérivés
(IWMI, 2007). La pression sur la part de l’eau utilisée pour l’agriculture va donc
énormément augmenter.

Une autre manière de représenter ces défis est de faire le calcul simple suivant.
Aujourd’hui, les 6 milliards d’humains consomment 6 milliards d’unités de
consommation (unité arbitraire) (6 x 1 = 6 milliards d’unités de consommation).
D’après les projections de l’ONU et de la Banque Mondiale, il faut s’attendre en 2050
à une population mondiale de 9 milliards d’humains et une consommation qui aura,
grosso modo, doublé (avec des variations locales, par exemple, un forte hausse dans
les pays émergents). La même équation devient alors 9 x 2 = 18 milliards d’unités de
consommation, soit un triplement de la demande. Si ces projections, se vérifient, les
impacts sur l’environnement et l’agriculture ou par l’agriculture seront énormes et il
devient urgent de les prendre en compte.

À cela s’ajoute une urbanisation accrue ainsi que les effets du changement climatique,
qui ajoutent encore aux menaces sur les ressources en eau de la planète.
Par ce rapport, le WWF-Belgique vise plusieurs objectifs. D’abord comprendre
comment se présente notre consommation et nos usages en eau et présenter les
premiers résultats de l’empreinte eau du pays. Ensuite analyser et discuter les chiffres
et leurs implications, notamment pour ce qui est des produits agricoles, leurs origines,
les pays producteurs et l’impact en termes de dépendance et de responsabilité.
Pour aller plus loin, le rapport présente quelques initiatives concrètes d’entreprises
qui utilisent l’empreinte eau comme outil de sensibilisation et de gestion dans le but de
réduire leurs impacts sur la ressource en eau, sans nuire à leur rentabilité économique.
Enfin, le WWF-Belgique propose des pistes d’actions tant pour les acteurs
économiques que pour les politiques, pour réduire les conséquences écologiques,
économiques et sociales négatives liées à une forte empreinte eau, avec une vison
globale de la problématique.

                                   WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 7
La Belgique et son empreinte eau - 2011 RAPPORT
1. Pourquoi                                       Les enjeux liés à l’eau douce sont cruciaux à l’échelle de
                                                              la planète, mais ne le sont pas moins dans un pays comme
                                                              la Belgique, au climat tempéré maritime. Un pays, une

            l’empreinte
                                                              région, une entreprise ou toute autre entité, consomme
                                                              et produit des biens qui ont nécessité de l’eau pour leur
                                                              élaboration. La prise en compte, dans son ensemble, de
                                                              l’offre et de la demande en eau justifie le développement

                  eau ?
                                                              et l’utilisation d’un indicateur spécifique : l’empreinte eau.

                                                                  L’empreinte eau (Hoekstra, 2003) mesure l’utilisation
                                                                  directe et indirecte d’eau douce et propre par un
                                                                  consommateur ou un producteur. Elle permet, entre
                                                                  autres, de mettre en évidence les pressions exercées
                               localement sur les ressources en eau. En ce sens, c’est un indicateur géographiquement
                               explicite : il permet d’identifier les volumes d’eau utilisés et pollués mais aussi leurs
                               localisations. De cette manière, il rend notamment compte des impacts des importations
                               (par exemple en produits agricoles) d’un pays.

                               L’empreinte eau est mesurée en unités de volume et se calcule soit du point de vue du
                               producteur (c’est l’empreinte eau de production), soit du point de vue du consommateur
                               (c’est l’empreinte eau de consommation).

WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 8
1. Pourquoi l’empreinte eau ?

                    L’empreinte eau de production

                    L’empreinte eau d’un bien ou d’un service est le volume total d’eau douce nécessaire
                    à sa production, durant tout son processus de fabrication.

                    Ce volume se décompose en trois éléments (Hoekstra, 2003), correspondant à de l’eau
                    consommée, évaporée ou polluée (figure 2) :

                        • L’empreinte eau verte est le volume d’eau de pluie stockée dans le sol sous forme
                           d’humidité, et nécessaire pour la croissance des cultures (sous forme d’évaporation
                           de l’eau)

                        • L’empreinte eau bleue est le volume d’eau douce captée dans les ressources en
                           « eau bleue » (eaux de surface et nappes phréatiques), pour des usages
                           domestiques, industriels ou agricoles (dans ce dernier cas, il s’agit de l’eau
                           d’irrigation).

                        • L’empreinte eau grise (aussi appelée flux de retour) est le volume d’eau polluée lors
                           des processus de production : c’est le volume d’eau requis pour diluer les polluants
                          dans des proportions suffisantes pour que la qualité de l’eau corresponde aux
                          normes acceptables.

                    L’empreinte eau de production est géographiquement explicite, elle indique non
                    seulement les volumes d’eau utilisés, mais aussi les lieux d’utilisation.

                             agriculteur                          producteur                 détaillant                  consommateur

      Figure 2 :
L’empreinte eau
   d’un produit

                   usage d’eau verte       eau grise   usage d’eau bleue eau grise   usage d’eau bleue eau grise   usage d’eau bleue eau grise
                       et bleue

                                                                       WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 9
1. Pourquoi l’empreinte eau ?

                                 L’empreinte eau de consommation

                                 L’empreinte eau de consommation se définit par le volume total d’eau douce utilisé
                                 pour produire les biens et services consommés par un pays, une ville, un individu
                                 ou l’ensemble des êtres humains.

                                 L’empreinte eau d’un pays additionne le volume d’eau utilisée directement dans le pays
                                 (empreinte eau interne) et l’eau virtuelle importée (empreinte eau externe, c’est-à-dire
                                 l’eau utilisée dans d’autres pays pour fabriquer les biens et services consommés dans le
                                 pays), moins l’eau virtuelle exportée (c’est-à-dire l’eau utilisée dans le pays pour fabriquer
                                 les biens et services consommés dans d’autres pays) (voir figure 3).

                                                                 pays A                                                                       pays B
                   Figure 3 :
           L’empreinte eau
                                                         Empreinte eau                                                                   Empreinte eau
de consommation d’un pays                               de consommation                                                                 de consommation
 et la relation (simplifiée)
           entre deux pays                               interne
                                                                       externe                                                          externe
                                                                                                                                                    interne

 partenaires commerciaux                     Empreinte eau                       Exportation                             Exportation                        Empreinte eau
                                                 d’un pays                       d’eau virtuelle                      d’eau virtuelle                       d’un pays

                                                              Importation                                                                  Importation
                                                             d’eau virtuelle                                                              d’eau virtuelle

                                                                                                                                                  d’après Hoekstra et al., 2009

                                 Grâce à ce cadre général, on se rend compte que certains pays peuvent être largement
                                 dépendants de l’importation de biens et services produits à l’étranger, biens et services
                                 qui ont nécessité de l’eau pour leur production (eau virtuelle).

                                 Le calcul de l’empreinte eau d’un pays est donc une manière de rendre visible la
                                 quantité totale d’eau réellement utilisée, en même temps que de montrer son origine
                                 géographique.

                                 L’analyse de l’empreinte eau d’un pays permet, entre autres, de cibler ses efforts pour
                                 réduire son impact dans les régions en stress hydrique et aux endroits où la gestion de
                                 l’eau est défaillante.

                                    1 litre de lait                  1 kilo de poulet                   1 œuf                   1 tasse de thé                  1 verre de bière
                                  1 000 litres d’eau                3 000 litres d’eau             200 litres d’eau             30 litres d’eau                  75 litres d’eau

                                 Ces chiffres sont basés sur des moyennes mondiales. Les données régionales peuvent
                                 varier considérablement en fonction, par exemple, du climat (Chapagain & Hoekstra, 2004).

WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 10
2. L’empreinte                                                             Résultats globaux

                                                                           Pour calculer l’empreinte eau de la Belgique, le WWF

      eau de la
                                                                           a analysé, avec ECOLIFE (voir aussi De Clerck, 2009),
                                                                           les besoins en eau de tous les produits agricoles
                                                                           consommés, sur la base des données de production
                                                                           et de commerce du PC-TAS (ITC, 2006). Cela inclut

      Belgique
                                                                           503 cultures (p. ex. coton, denrées alimentaires, fleurs)
                                                                           et 141 produits d’élevage. La méthodologie utilisée est
                                                                           expliquée dans le Water Footprint Manual (Hoekstra
                                                                           et al., 2009).

                                                               Le calcul de l’empreinte eau des produits industriels
                               est complexe et encore sujet à améliorations. Ces produits comprennent les produits
                               chimiques, les machines et autres biens manufacturés, dont l’empreinte eau est basée
                               sur la valeur industrielle ajoutée par produit par unité d’eau utilisée.

                               Le premier constat est que l’empreinte eau totale de la Belgique est de 28 milliards
                               de m3 (Gm3) d’eau par an, soit environ 2 700 m3 pour chaque Belge, soit encore
                               7 400 litres par jour et par personne, c’est-à-dire environ 90 baignoires.

                               C’est le double de la moyenne mondiale (voir figure 4) et plus que nos voisins (Pays-Bas
                               2 300 m3/an/hab, Royaume-Uni 1 700 m3/an/hab). Le premier constat est donc que
                               l’empreinte eau du Belge est très élevée.

                                                                                                          totale
                                                                                                          interne
                                                                                                          externe
                  Figure 4 :     3000
          l’empreinte eau
       (totale, interne et       2500
 externe) pour quelques
                                 2000
pays (en m3/personne/an)
                                 1500

                                 1000

                                  500

                                   0
                                                                                                         Suède 
                                                     Pays-Bas 

                                                                                                                                                           USA
                                                                                       (WWF-UK, 2008)
                                                              (WWF 2010)

                                                                                                               (WWF 2008)

                                                                                                                                                                                (WWF-UK, 2008)
                                          Belgique

                                                                             Royaume-Uni

                                                                                                                                    (WWF 2009)

                                                                                                                                                 (WWF-UK, 2008)
                                                                                                                            Allemagne

                                                                                                                                                                  Moyenne mondiale

                                                                                WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 11
2. L’empreinte eau de la Belgique

                                 La décomposition de l’empreinte eau de la Belgique (tableau 1) révèle, deuxième constat,
                                 que l’empreinte eau interne est de 25 %. Autrement dit, cela représente l’autosuffisance
                                 du pays. À l’inverse, l’empreinte eau externe est de 75 %. Cela signifie que les trois-quarts
                                 de l’empreinte eau du pays sont liés à des importations d’eau (virtuelle) en provenance de
                                 l’extérieur. Il s’agit majoritairement de produits agricoles tels que coton, café et blé, qui,
                                 de plus, sont souvent cultivés dans les parties du monde où les ressources hydriques sont
                                 déjà sous forte pression. On verra plus loin (page 17) les implications de cette empreinte
                                 externe sur les pays d’importation et les responsabilités qui en découlent.

                                 Troisième constat (tableau 1), la part très dominante liée aux produits agricoles
                                 (26,09 milliards de m3/an, soit 93,6 %). Cela signifie que, des 7 400 l quotidiens du Belge
                                 moyen, 6 931 sont liés à la consommation de produits issus de plantes ou d’animaux. La
                                 consommation liée aux produits industriels est de 258 l (3,5 %), un chiffre à prendre avec
                                 précaution, car il demande encore de plus amples recherches. L’eau qui sort réellement
                                 du robinet est de 218 l par jour par habitant, en moyenne, chiffre qui inclus l’eau utilisée
                                 par les services publics.

                                                                      Interne        Externe         Total       % du total
                 Tableau 1 :
                                     Produits agricoles                 5,85          20,24          26,09          93,6 %
          décomposition de
      l’empreinte eau de la          Produits industriels               0,40           0,57           0,97           3,5 %
       Belgique (en Gm3/an)          Usage domestique                   0,82             -            0,82          2,9 %
                                     Total (Gm3/an)                     7,07           20,81         27,88         100,0 %
                                     % du total                         25 %           75 %         100,0 %

WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 12
2. L’empreinte eau de la Belgique

                       Une agriculture à forte empreinte eau

                       Si on analyse plus en détail la partie de l’empreinte eau liée aux produits agricoles,
                       on constate (figure 5) qu’elle résulte principalement des cultures (81 %) et, dans une
                       moindre mesure, de l’élevage (19 %). Il est important de noter que de nombreuses
                       cultures servent à l’alimentation animale et que cette fraction n’est pas prise en compte
                       dans ce dernier chiffre. Le chiffre lié à l’élevage comprend donc l’herbe, l’eau de
                       boisson et l’eau de service (comme le nettoyage des étables) et sous-estime l’impact réel
                       de l’élevage.

                       L’empreinte eau liée aux cultures est en grande partie externe (83 %) et donc liée
                       aux importations. En ce qui concerne l’élevage, l’empreinte eau interne est un peu
                       inférieure à l’empreinte eau externe (54 %).

          Figure 5 :   30                                    empreinte eau interne
   Décomposition de                                          empreinte eau externe
l’empreinte eau des    25                                    empreinte eau totale
 produits agricoles
                       20
           (Gm3/an)
                       15

                       10

                        5

                        0
                                      Cultures                       Élevage                          Total

                       Les cultures qui contribuent à l’empreinte eau sont principalement (figure 6) le blé,
                       le coton, le soja et le café, certaines étant d’origine tropicale ou subtropicale. À elles
                       seules, ces quatre cultures forment plus de 50 % de notre empreinte eau externe des
                       cultures. Les seules cultures à avoir une empreinte eau interne significative sont celles
                       cultivées dans nos régions : blé, betterave sucrière, orge et maïs.

                                                          WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 13
2. L’empreinte eau de la Belgique

                                     6
                  Figure 6 :
  Principales cultures liée          5                                                                                                            Empreinte eau interne
                                                                                                                                                  Empreinte eau externe
         à l’empreinte eau                                                                                                                        Empreinte eau totale
  des cultures en Belgique           4
               (en Gm3/an)
                                     3

                                     2

                                     1

                                     0
                                          blé

                                                coton

                                                         soja

                                                                café

                                                                       huile de palme

                                                                                         orge

                                                                                                sucre de canne

                                                                                                                     tournesol

                                                                                                                                 betterave sucrière

                                                                                                                                                          colza

                                                                                                                                                                  maïs

                                                                                                                                                                            autres
                                 L’empreinte eau des produits agricoles consommés en Belgique résulte également des
                                 produits d’élevage (figure 7).

                                 L’empreinte eau la plus importante pour ces produits revient au lait, suivi de près par la
                                 viande de bœuf, viennent ensuite la viande de porc et la volaille. Plus de la moitié (54 %)
                                 de ces produits sont importés. Les produits qui sont davantage produits dans le pays sont
                                 le bœuf et le porc, ceux qui sont le plus importés sont le lait et la volaille (viande).

                 Figure 7 :
                                         1,5
      Principaux produits
           d’élevage liés à
       l’empreinte eau des               1,2                                                                                                      Empreinte eau interne
     produits d’élevage en                                                                                                                        Empreinte eau externe
                                                                                                                                                  Empreinte eau totale
      Belgique (en Gm3/an)
                                         0,9

                                         0,6

                                         0,3

                                         0,0
                                                  lait          bœuf                    porc                      volaille                            volaille            autres
                                                                                                                 (viande)                             (œufs)

                                 En résumé, l’empreinte eau des produits agricoles consommés en Belgique a une
                                 composante interne significative pour les produits d’élevage et des cultures telles que
                                 le blé, la betterave sucrière, le maïs et l’orge. Elle est surtout externe pour le coton, le soja
                                 et le café.

WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 14
2. L’empreinte eau de la Belgique

                              Des produits agricoles massivement importés

                              L’analyse des données de l’empreinte eau externe permet d’identifier les pays
                              d’origine des importations. En ce qui concerne les produits agricoles (voir figure 8),
                              les importations à destination de la Belgique proviennent d’abord d’Europe (surtout
                              France, Allemagne et Pays-Bas), puis d’Asie (surtout Indonésie, Inde, Pakistan)
                              et d’Amérique latine (Brésil et Argentine).

                                                                    Océanie 2%
                 Figure 8 :
                                                      Afrique 9%
Répartition géographique
       de l’empreinte eau                 Amérique
   agricole externe de la                du Nord 8%
           Belgique (en %)

                                                                                                          Europe 44%

                                        Amérique
                                       latine 18%

                                                                       Asie 19%

                              Le blé est le produit importé qui contribue le plus à l’empreinte eau externe. La France
                              est le principal fournisseur de la Belgique, suivie par l’Allemagne et le Canada.
                              Le deuxième produit importé est le coton, qui vient d’Inde, de Turquie, d’Ouzbékistan
                              et du Pakistan. En troisième place, on trouve le soja qui est importé surtout du Brésil,
                              des États-Unis et d’Argentine. Enfin, le café bu par les Belges est principalement cultivé
                              au Brésil, en Colombie et en Ouganda.

                              L’impact des importations dans les pays d’origine est développé plus loin (voir page 17).

                                                                   WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 15
2. L’empreinte eau de la Belgique

                                     Les données qui servent à calculer l’empreinte eau

                                     Que la Belgique ait une empreinte eau agricole élevée et une forte dépendance par
                                     rapport à l’étranger sont des conclusions attendues. Avec une surface réduite et un
                                     climat tempéré, la Belgique est forcément dépendante de l’extérieur et des cultures
                                     (sub)-tropicales. Seuls quelques cultures et produits d’élevages sont fabriqués et
                                     consommés localement (empreinte interne).

                                     Dans les grandes lignes, les résultats de l’empreinte eau donnent des conclusions
                                     fortes et permettent d’élaborer des recommandations générales (voir page 22)
                                     pertinentes.

                                     La science liée à l’empreinte eau est récente (la création de l’indicateur ne date
                                     que de 2003) et il faut garder à l’esprit que la méthode de calcul est en évolution.
                                     Des méthodologies différentes engendrent des résultats différents. La qualité des
                                     données est aussi un facteur qui influence les résultats et il y a certainement moyen
                                     de l’améliorer encore et d’affiner les données.

WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 16
3. Les impacts                                     L’impact de l’empreinte eau de la Belgique sur les pays
                                                           étrangers dépend à la fois de la quantité d’eau utilisée

       à l’étranger de
                                                           pour produire les biens ou services importés que de sa
                                                           qualité. La quantité d’eau est mesurée par l’empreinte
                                                           eau externe, qui exprime le volume d’eau utilisé. Quant

      l’empreinte eau
                                                           à sa qualité, on l’exprime via l’indice de stress hydrique
                                                           (Water Stress Indicator ou WSI, Smakhtin et al., 2004),
                                                           qui mesure la rareté de l’eau disponible pour les activités
                                                           humaines, tout en prenant en compte les besoins

        de la Belgique
                                                           hydriques des écosystèmes.

                                                          Ainsi, si l’indice est supérieur à 100 % pour un pays
                                                          donné, cela signifie que l’on y extrait plus d’eau que
                                                          ce qui est disponible pour les besoins humains. Une
                            valeur supérieure à 60 % indique une exploitation des ressources forte, un indice
                            entre 30 % et 60 %, une exploitation modérée, et des valeurs inférieures à 30 %, une
                            exploitation légère.

                            Pour évaluer les impacts à l’étranger de l’empreinte eau de la Belgique (figure 9 pour
                            l’empreinte eau agricole externe), il faut s’intéresser surtout aux pays où, d’une part,
                            l’empreinte eau externe de la Belgique est importante et où, d’autre part, le stress
                            hydrique est élevé.

             Figure 9 :
empreinte eau agricole
  externe (en Mm3/an)

  Allemagne
  Ukraine
                                                                                                               Ouzbekistan
  Espagne
                                                                                                                  Pakistan

                                                                                                                       inde

                     0 - 10
                     10 - 100
                     100 - 1 000
                     >1 000
                     Hotspots

                                                               WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 17
3. Les impacts à l’étranger de l’empreinte eau de la Belgique

                                  Dans ce groupe de pays, on retrouve, entre autres, l’Allemagne (blé, lait), l’Inde
                                  (surtout coton), l’Espagne (olives, riz, amandes), le Pakistan (coton, sucre de canne)
                                  et l’Ouzbékistan (coton). Ce sont donc des pays qui peuvent être impactés (de manière
                                  positive ou négative) par des actions sur le mode de vie des Belges et la consommation
                                  des produits qui en sont importés (voir les exemples présentés ci-après).

                                  On peut le constater dans les trois exemples présentés ci-dessous : le coton, le sucre,
                                  et le cas du Pakistan. Ces cas ont été choisis pour la part importante qu’ils représentent
                                  dans l’empreinte agricole externe de la Belgique et parce qu’ils font l’objet d’initiatives
                                  internationales et multistakeholders auxquelles le WWF participe.

                                  Exemple du coton

                                  Le coton est l’exemple emblématique d’une culture massivement importée par les pays
                                  européens et, à la fois, une culture parmi les plus grandes consommatrices d’eau tout
                                  au long de sa chaîne de production.

                                  Dans le monde, près de 73 % des cultures de coton sont irriguées (Soth et al., 1999) car
                                  situées dans des régions arides.

                                  On estime qu’il faut en moyenne 11 000 litres d’eau pour produire un kilo de coton
                                  (Chapagain et al., 2006). Un chiffre énorme dont les consommateurs occidentaux ne
                                  voient qu’une minuscule partie. Pour les pays de l’UE-25, 84 % de l’empreinte eau de
                                  production du coton se situe hors de son territoire. Les impacts liés à la culture et à la
                                  transformation du coton sont de trois types : l’évaporation de l’eau de pluie infiltrée et
                                  nécessaire pour la croissance de coton (l’eau verte), le prélèvement des eaux souterraines
                                  ou de surface pour l’irrigation (l’eau bleue) et, enfin, la pollution de l’eau pendant la
                                  croissance ou la transformation du coton (eau grise).

                                  Les impacts principaux pour l’UE-25 se situent en Inde, Ouzbékistan, Pakistan, Turquie
                                  et Chine (voir figure 10). Les ressources hydriques de deux de ces pays (Ouzbékistan
                                  et Pakistan) sont déjà largement surexploitées (WSI de 165 % et 105 % respectivement).

WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 18
3. Les impacts à l’étranger de l’empreinte eau de la Belgique

                   Figure 10 :
         Impact total de la
consommation de produits
          issus du coton par
 l’UE-25 sur les ressources
 mondiales en eau (en Mm3/
      an, période 1997-2001)

                                 Empreinte eau totale
                                 (Mm3/an)
                                     0
                                     0 - 10
                                     10 - 50
                                     50 - 500
                                     500 - 2 500
                                     2 500 - 5 000
                                     5 000 - 7 500
                                                                                                     d’après Chapagain et al., 2006

                                 Le WWF est partenaire de la Better Cotton Initiative (BCI), un programme volontaire
                                 qui vise à encourager une culture du coton moins gourmande en eau et en produits
                                 chimiques, une étape importante pour rendre la production de coton plus durable.
                                 Le WWF travaille avec des agriculteurs, des organismes gouvernementaux, des
                                 acheteurs et des investisseurs à des étapes clés de la filière - du champ à la boutique de
                                 vêtements - dans un effort commun visant à promouvoir un coton durable, qui a moins
                                 d’impact sur l’environnement, est économiquement viable et socialement acceptable.

                                 www.bettercotton.org

                                 Exemple du sucre

                                 Le sucre est l’un des ingrédients les plus communs dans notre alimentation. Plus
                                 de 100 pays produisent du sucre, dont 60-70 % est fabriqué à partir de canne à sucre
                                 cultivées principalement dans les zones tropicales et subtropicales de l’hémisphère
                                 sud. Le solde provient de la betterave sucrière qui est cultivée principalement dans
                                 les zones tempérées de l’hémisphère nord (NO de l’Europe, Europe de l’est, le nord
                                 du Japon et dans certaines régions des États-Unis).

                                 Au cours de la période 2000-2004, la production mondiale de cultures sucrières
                                 a été de plus de 1,5 milliard de tonnes par an. Le Brésil est le premier producteur
                                 (24 %), suivi par l’Inde (18 %), la Chine (6 %), la Thaïlande (4 %), les États-Unis (4 %)
                                 et le Pakistan (4 %). Actuellement, 69 % du sucre dans le monde est consommé dans
                                 le pays d’origine et le solde se retrouve sur les marchés mondiaux.

                                                                    WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 19
3. Les impacts à l’étranger de l’empreinte eau de la Belgique

                                  La culture de la canne à sucre nécessite souvent une irrigation. À l’inverse, la betterave
                                  sucrière est cultivée principalement dans les zones pluviales avec peu ou pas d’irrigation
                                  complémentaire. L’empreinte eau de production moyenne est de 809 l/kg de sucre
                                  (non raffiné) de betterave et de 1 427 l/kg de sucre (non raffiné) de canne (Hoekstra
                                  & Chapagain, 2008).

                                  En Belgique, l’empreinte eau de consommation pour le sucre est de 1 412 Mm3/an soit
                                  375 litres/j/hab. (sur les 7 400 totaux) (voir tableau 3). Cette empreinte est externe à 53 %
                                  et correspond aux importations de sucre de canne (en provenance surtout du Pakistan,
                                  puis de Cuba et du Swaziland).

                                   (Mm³/an)                             Interne       Externe       Empreinte eau totale
              Tableau 3 :
        Empreinte eau de           Sucre de canne                          0             745                   745
consommation du sucre en
                                   Sucre de betterave                     663             4                    667
       Belgique (Mm³/an)
                                   Total                                  663            749                  1 412

                                  On constate que ces produits, tous deux consommés par la population en Belgique, ont
                                  des impacts totalement différents en ce qui concerne leur empreinte eau : la canne à sucre
                                  est produite uniquement à l’étranger (son empreinte eau interne est égale à zéro), tandis
                                  que la betterave sucrière est produite presque exclusivement en Belgique.

                                  L’intérêt de l’indicateur empreinte eau est ici bien évident : il permet une sensibilisation
                                  sur le sujet et apporte un éclairage, parmi d’autres, sur une question complexe comme
                                  le choix d’un produit de consommation courante. Dans le cas du sucre, d’autres aspects
                                  liés à l’eau interviennent aussi, comme le stress hydrique du pays de production ou la
                                  quantité et l’origine de l’eau éventuellement nécessaire à la culture (empreinte eau de
                                  production).

                                  Concrètement, cela signifie que des 745 Mm3/an, 224 proviennent du Pakistan, 83 de
                                  Cuba et 44 du Swaziland. Le Pakistan a un indice de stress hydrique très élevé (WSI =
                                  108 %, contre 31 % et 25 % pour les deux autres pays respectivement) ce qui veut dire
                                  que la consommation de sucre de canne des Belges a un impact négatif direct sur les
                                  ressources en eau de ce pays (voir ci-dessous, l’exemple du Pakistan).

                                  Le WWF participe à la Better Sugarcane Initiative (BONSUCRO TM), une collaboration
                                  entre des détaillants en sucre, des investisseurs, des commerçants, des producteurs
                                  et des ONG en faveur du sucre durable. La BSI a pour objectif de réduire, de manière
                                  mesurable, l’impact de la production de canne à sucre sur l’environnement, en
                                  contribuant également aux avantages sociaux et économiques pour les producteurs
                                  de sucre et tous les autres acteurs de la chaîne.

                                  Le WWF travaille avec des agriculteurs dans des projets de terrain qui visent à de
                                  meilleures pratiques agricoles, notamment au Pakistan. Dans certains pays producteurs,
                                  le WWF sensibilise les acteurs institutionnels et privés à la durabilité de ces initiatives.
                                  Il collabore ainsi avec une entreprise comme Coca-Cola Company pour une gestion plus
                                  durable des ressources naturelles (voir page 24).

                                  www.bonsucro.com

WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 20
3. Les impacts à l’étranger de l’empreinte eau de la Belgique

Exemple du Pakistan

Le Pakistan est un pays exemplaire pour la Belgique puisqu’il est un exportateur
important à la fois pour le sucre de canne et le coton. Actuellement en stress hydrique,
le Pakistan était pourtant un pays excédentaire pour cette ressource. Cependant,
la variabilité de la pluviométrie et la sécheresse ont des effets dévastateurs sur
l’agriculture, les pâturages, les zones humides et les populations humaines qui
dépendent de ces ressources.

Le WWF contribue à différents projets au Pakistan, parmi eux il y a le Pakistan
Wetlands Programme qui vise à promouvoir la conservation durable des zones
humides d’eau douce et marines et la biodiversité d’importance mondiale qui y est
associée.

Le WWF soutient également le Pakistan Sustainable Cotton Initiative qui vise à
développer et promouvoir des pratiques de gestion optimales pour la production de
coton durable. Cela comprend l’application de meilleures pratiques de gestion de l’eau
et la réduction significative des quantités de pesticides et d’engrais dans la production
de coton, sans affecter les rendements de manière significative.

Ensuite, le WWF contribue à une meilleure gestion des bassins versants dans le
parc national d’Ayubia et y mène des actions de sensibilisation à la conservation de
l’environnement. Le parc national d’Ayubia couvre une superficie d’environ 3 312 ha et
est situé dans l’Himalaya occidental. Cette région est d’importance cruciale puisqu’elle
récolte 70-80 % des eaux de fonte des neiges et des glaciers qui alimentent, in fine, tout
le delta de l’Indus.

Enfin, le WWF-Pakistan a lancé un projet intitulé Better Management Practices for
Water Thirsty Crops (« meilleures pratiques de gestion pour cultures gourmandes en
eau ») afin d’assurer des sources durables d’eau douce soutenant les moyens d’existence
des communautés pauvres du Pakistan. Ce projet permettra de créer un mécanisme
pour accroître la disponibilité en eau et réduira la pollution en diminuant la quantité
d’eau et les pesticides utilisés dans la production de canne à sucre et de coton.

                                   WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 21
4. Des pistes                                      Les résultats et les exemples montrés plus haut illustrent
                                                              l’intérêt de se pencher sur l’empreinte eau de la Belgique
                                                              pour au moins trois raisons :

               vers des                                       1. La première concerne directement la viabilité à long
                                                                  terme des ressources en eau.

            solutions…
                                                              2. Un autre enjeu est la sensibilisation des entreprises et
                                                                  des consommateurs par rapport à leur consommation
                                                                  en eau et les questions importantes qu’elle soulève en
                                                                  termes de sécurité alimentaire et de disponibilité des
                                                                  ressources.

                               3. Enfin, les acteurs publics et politiques sont interpellés en termes de gouvernance,
                                   notamment pour leur rôle dans la politique d’aide au développement puisque l’eau est
                                   une question globale et mondialisée.

                               Un certain nombre de solutions et de pistes d’actions sont engagées par ces acteurs, avec
                               la collaboration du WWF. Des exemples en sont repris ci-après.

                               Pour les entreprises

                               Les entreprises ont un rôle clé à jouer dans l’amélioration de la gestion des ressources
                               en eau et dans la réduction du risque de dommages environnementaux. Elles peuvent
                               veiller à l’utilisation rationnelle de l’eau, et le calcul de l’empreinte eau leur permet de
                               le chiffrer, non seulement dans leurs activités propres mais également, et surtout, tout
                               au long de leur chaîne d’approvisionnement, faisant de la bonne gestion de l’eau une
                               composante standard des contrats avec ses fournisseurs. Les entreprises ont aussi un
                               intérêt stratégique à connaître leur empreinte totale pour pouvoir analyser les éventuels
                               risques qu’elles courent. L’enjeu est alors de développer des stratégies pour diminuer ces
                               impacts et, partant, les risques qui y sont associés.

                               Le Water Footprint Network (WFN)1 et le Centre de l’Eau de l’Université de Twente
                               (NL) développent des méthodes scientifiques pour permettre aux entreprises comme
                               à d’autres entités de calculer leur empreinte eau. Plus de 120 entreprises et institutions
                               font actuellement partie du WFN.

                               Le WWF, membre du WFN, travaille avec les entreprises et leurs producteurs, de
                               manière à réduire, dans les pays d’origine, l’utilisation d’eau pour les produits agricoles.
                               Trois exemples illustrent cette collaboration.

                               Alpro
                               En Belgique, l’entreprise Alpro, en collaboration avec le WWF et le Centre de l’Eau de
                               l’Université de Twente, a calculé l’empreinte eau de deux de ses produits phares : une
                               boisson au soja et un burger à base de soja.

                               Le calcul a pris en compte l’empreinte opérationnelle, c’est-à-dire l’utilisation d’eau
                               directe dans la production de produits à base de soja, ainsi que l’empreinte de la chaîne
                               d’approvisionnement, c’est-à-dire l’utilisation d’eau indirecte, nécessaire pour produire
                               les matières premières, les emballages et les services consommés.
1
    www.waterfootprint.org

WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 22
4. Des pistes vers des solutions…

         Figure 11 :
    Boisson au soja              1 litre de boisson au soja
comparés à d’autres              empreinte eau 365 litres dont 99,8 %
                                 proviennent de la chaîne d’approvisionnement                1 litre de lait de vache
                                                                                             empreinte eau 1000 litres en moyenne

                                                                                2.7
                                                                              fois plus

                                              1 burger de soja
                                              de 170 gr
                                              empreinte eau 132 litres                                  1 burger de bœuf
                                              dont 99,9 % proviennent de la
                                              chaîne d’approvisionnement                                de 170 gr
                                                                                                        empreinte eau 2 635 litres
                                                                                                        en moyenne

                                                                                20
                                                                              fois plus

                       Les chiffres obtenus pour ces produits végétaux sont comparés à ceux de produits
                       similaires mais contenant des produits animaux (lait de vache, viande de bœuf)
                       (voir figure 11).

                       Ces chiffres montrent bien que s’il reste important pour une entreprise de se
                       pencher sur sa propre utilisation d’eau, l’essentiel est ailleurs, dans sa chaîne
                       d’approvisionnement. Dans ce cas-ci, l’analyse détaillée de la culture du soja est
                       capitale pour bien comprendre les impacts de sa chaîne de fabrication sur les
                       ressources en eau.

                       De plus, ces chiffres montrent aussi à quel point les produits d’origine animales sont
                       bien plus gourmands en eau que leurs alternatives végétariennes.

                       Sur base de ces données, ALPRO et le WWF vont développer un plan d’action
                       pour analyser, dans les prochaines années, les impacts réels des produits ALPRO
                       sur les ressources en eau des pays fournisseurs des matières premières. Ce plan
                       s’accompagnera d’actions de sensibilisation.

                       www.alpro.be

                                                                     WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 23
4. Des pistes vers des solutions…

                                  Coca-Cola Company
                                  Le WWF et Coca-Cola Company ont signé un partenariat global dont les objectifs sont :

                                  •A ider à préserver sept bassins versants importants, dont celui du Danube ;
                                  • Au niveau des embouteilleurs, améliorer, d’ici 2012, l’efficacité de l’utilisation d’eau
                                     de 20 % (par rapport aux chiffres 2004) ;
                                  • Encourager un usage plus efficace de l’eau à travers la chaîne d’approvisionnement,
                                     en commençant par le sucre ;
                                  •R  éduire les émissions de CO2 et la consommation d’énergie aux niveaux de 2004,
                                    et de 5 % supplémentaires dans les pays en développement.

                                  Ce cadre global a permis le démarrage de plusieurs collaborations locales, notamment
                                  aux Pays-Bas.

                                  Dans ce pays, l’entreprise a calculé, en collaboration avec The Water Footprint Network,
                                  l’empreinte eau d’un demi litre de Coca-Cola, fabriqué dans son unité de production
                                  locale (figure 12).

                  Figure 12 :                   Empreinte eau                             Empreinte eau                            Empreinte eau
                                         chaîne d’approvisionnement                       opérationnelle                              totale
      L’empreinte eau d’une
bouteille en PET de 0,5 litre
de Coca-Cola dans le site de
          Dongen, Pays-Bas.       Empreinte eau bleue 4%

                                  Empreinte eau verte 13%

                                  Empreinte eau grise 83%                                                                               35 LITRES

                                                                Packaging

                                                                              +                                    =
                                                                 7 litres                                                         12 LITRES
                                                                                                 0,4 LITRE                                        15 LITRES

                                  Empreinte eau grise 20%                                                                              8 LITRES

                                  Empreinte eau bleue 28%

                                  Empreinte eau verte 52%                                                    Empreinte eau grise 34%

                                                                                                             Empreinte eau bleue 23%
                                                                IngrÉdients     Empreinte
                                                                  28 litres
                                                                                eau bleue 100%               Empreinte eau verte 43%

WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 24
4. Des pistes vers des solutions…

                      L’analyse a montré que la part majeure de cette empreinte eau, liée à la culture de
                      la betterave sucrière, est déjà très compétitive, comparée aux valeurs de ces mêmes
                      cultures dans les pays voisins. Les possibilités de réduction de l’empreinte eau
                      semblent donc limitées mais l’expérience peut profiter aux autres sites d’embouteillage
                      de l’entreprise, notamment en ayant une meilleure compréhension des risques liés à la
                      chaîne d’approvisionnement. L’entreprise va travailler avec ses fournisseurs de sucre
                      en Europe et ailleurs pour élaborer des stratégies de réduction des impacts liés à l’eau
                      dans l’agriculture.

                      Cependant, dans de nombreux pays, le sucre utilisé dans la boisson provient de
                      la canne à sucre, dont la culture nécessite plus d’eau. Le produit final a donc une
                      empreinte eau nettement plus élevée. C’est ce qui a motivé l’entreprise à s’engager dans
                      une initiative telle que BONSUCRO (voir « Exemple du sucre », page 19).

                      L’entreprise a également calculé l’empreinte eau de certaines de ses boissons à base
                      d’oranges, produites pour le marché nord-américain (p. ex. Minute Maid Original).
                      Les calculs montrent que l’empreinte eau se situe entre 518 et 651 litres pour
                      1 litre de boisson et est à 99 % liée à la culture des oranges (Floride, Brésil, Costa
                      Rica). L’entreprise a pris conscience des opportunités possibles pour améliorer les
                      rendements et minimiser les impacts liés à cette culture. Elle va notamment collaborer
                      avec les autres parties prenantes à une gestion soutenable de la ressource commune
                      qu’est l’eau.

                      www.coca-cola.com

                      SABMiller

                      Le groupe brassicole a collaboré avec le WWF pour faire le point sur les enjeux et les
                      risques liés à l’eau dans ses activités. Entre autres, l’empreinte eau de ses produits
                      a été calculée pour cinq sites de production de bière, l’un en Afrique du Sud et l’autre
                      en République Tchèque, au Pérou, en Tanzanie, en Ukraine et en Afrique du Sud.
                      Des nombreux chiffres de cette analyse, il ressort que l’empreinte eau de la bière est
                      surtout (90 %) liée à la culture des céréales qui entrent dans sa composition. Si on
                      compare les deux sites de production, on voit que le litre de bière en Afrique du Sud
                      a nécessité plus de trois fois plus d’eau que son équivalent en République Tchèque
                      et que c’est principalement lié aux importations de céréales (dont les cultures sont
                      majoritairement irriguées) à partir des pays voisins.

        Figure 13 :
                                           Afrique du Sud:                                   République Tchèque:
    empreinte eau
    de production                          155 litres                                        45 litres
d’un litre de bière
                                           31% des céréales sont importées                   5% des céréales sont importées

                                                             WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 25
4. Des pistes vers des solutions…

                                    Le groupe brassicole reconnaît l’utilité de l’empreinte eau comme outil de gestion, même
                                    si l’indicateur doit encore évoluer, car son calcul permet d’évaluer quantitativement
                                    l’utilisation d’eau, notamment dans des régions où l’eau est rare. Des données qui ne
                                    manquent pas d’intérêt pour évaluer les risques liés à cette ressource naturelle et prendre
                                    les mesures adéquates par rapport au fonctionnement de ses sites industriels, aux
                                    relations avec les autorités locales et à la soutenabilité environnementale en général.

                                    www.sabmiller.com

                                        Quelques recommandations…

                                        •R  econnaître les risques pour l’entreprise : une pénurie d’eau dans la chaîne
                                           d’approvisionnement peut conduire à des perturbations de la production et
                                           générer des coûts plus élevés en transport et achats. Les risques concernent aussi
                                           les populations locales et peuvent évoluer en situations de tension.
                                        • I dentifier et réduire l’empreinte eau : commencer par calculer l’empreinte eau
                                           et situer ses éventuels impacts dans le contexte local. Un plan de réduction peut
                                           ensuite être mis sur pied.
                                        •P  artager ses connaissances : les entreprises peuvent largement contribuer à
                                           l’élaboration de normes pour des cultures comme celles de la canne à sucre,
                                           du coton ou encore du riz.
                                        •Ê  tre transparent, la première étape pour un développement durable.
                                           L’organisation Global Reporting Initiative2 fournit des lignes directrices à cet
                                          effet.
                                        •C ontribuer à la gestion de l’eau : plus largement, les entreprises peuvent jouer
                                          un rôle dans la gestion des ressources en eau dans les pays d’origine. En tant
                                          qu’acteurs privés, elles peuvent apporter une contribution importante aux débats
                                          locaux et aux forums sur la gestion intégrée de l’eau.

2
    www.globalreporting.org

WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 26
4. Des pistes vers des solutions…

Pour les autorités publiques

Les impacts que peut avoir l’empreinte eau de la Belgique dépendent entièrement d’où,
de combien, de quand et de comment l’eau est prélevée. Une empreinte eau significative
dans une région où l’eau est abondante est peu susceptible d’avoir un effet négatif
sur la société ou l’environnement, mais la même empreinte eau dans une région en
pénurie d’eau peut engendrer des problèmes graves, comme l’assèchement des rivières,
la destruction des habitats et des moyens de subsistance ainsi que l’extinction des
espèces, en plus d’avoir un impact sur les prix agricoles, les services de base et les
économies locales.

L’enjeu de la soutenabilité en eau est fondamentalement celui d’une action collective
efficace par ceux qui utilisent l’eau et en dépendent pour leur approvisionnement.
C’est un domaine d’action important pour les autorités publiques. Elles y jouent un rôle
majeur dans l’élaboration des règles du jeu, le développement d’un cadre juridique ou
encore d’une méthodologie parce qu’elles peuvent aborder les questions liées à l’eau
de manière globale, notamment à travers les marchandises que nous importons et qui
constituent une part majeure de l’empreinte eau d’un pays comme la Belgique.

Le détail de l’empreinte eau dans le présent rapport montre l’intérêt qu’ont les autorités
publiques à prendre en compte la ressource en eau douce dans le développement
économique et les aides aux pays en développement. Ces aides pourraient, par
exemple, inclure la dimension de gestion durable de l’eau dans les pays concernés.

La question de l’eau est aussi intimement liée à celle du climat et les questions de
pluviométrie, de volumes d’eau prélevés et de leur timing font partie des défis de la
lutte contre le changement climatique.

Il est dès lors capital que les autorités publiques comprennent la problématique liée à
l’eau dans sa globalité et que le débat sur la gestion de l’eau porte tant sur sa dimension
domestique que sur sa dimension internationale.

                                   WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 27
4. Des pistes vers des solutions…

                                        Quelques recommandations…

                                        Au niveau international

                                        •R
                                          atification par la Belgique de la Convention des Nations Unies sur les cours
                                         d’eau3 : cette convention est surtout importante pour les pays qui n’ont pas de
                                         cadre juridique pour gérer les eaux de bassins versants transnationaux. Bien que
                                         cette convention ait été développée en 1997, la Belgique ne l’a toujours pas ratifiée
                                         et cela réduit donc la possibilité de la voir entrer en vigueur ;

                                        •S
                                          outenir des instances internationales (l’UE, la Banque mondiale, etc.) pour que
                                         leurs aides soient conditionnées à la prise en compte de la dimension « eau » ;

                                        •Encourager les autres pays de l’UE à implémenter totalement la directive cadre
                                          européenne « eau » et la directive « habitats » ;

                                        • Facilitation du dialogue, aux niveaux belge et européen, entre les entreprises et
                                           les autorités à propos des impacts des sites de production sur les ressources en
                                           eau ;

                                        • Identifier les zones géographiques les plus impactées par l’empreinte eau de la
                                           Belgique ;

                                        •A
                                          ider les pays concernés à mettre en œuvre des mesures de gestion durable
                                         de leurs ressources hydriques, à réhabiliter et, si nécessaire, restaurer les
                                         écosystèmes humides dégradés ;

                                        •F
                                          aire de la gestion durable et intégrée de l’eau un élément clé de la stratégie d’aide
                                         au développement.

                                        Sur le plan national

                                        •S
                                          outenir des entités fédérées pour que leurs aides soient conditionnées à la prise
                                         en compte de la dimension « eau » ;

                                        • Faire un audit « eau » des programmes gouvernementaux pour éviter d’éventuels
                                          impacts négatifs sur les ressources hydriques, en Belgique et à l’étranger ;

                                        •M
                                          esurer les besoins en eau (internes et externes) pour assurer la sécurité
                                         alimentaire de la Belgique et prendre les mesures politiques qui en découlent ;

                                        • A méliorer le cadre légal sur l’eau en Belgique, pour une gestion plus durable
                                           de la ressource ;

                                        • Informer et sensibiliser les citoyens au concept de l’empreinte eau (par exemple
                                           en développant des instruments qui permettent au citoyen de la mesurer) ;

                                        • Réhabiliter et, si nécessaire, restaurer les écosystèmes humides dégradés dans
                                           le pays.

3
    http://wwf.panda.org/what_we_do/how_we_work/policy/conventions/water_conventions/un_watercourses_convention/

WWF - 2011 - La Belgique et son empreinte eau - page 28
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