La Lettre tue. Spectre(s) de l'écrit fantastique (review) - Project MUSE

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La Lettre tue. Spectre(s) de l'écrit fantastique (review)
   Jean Marigny

   Nouvelles Études Francophones, Volume 25, Numéro 2, Automne 2010, pp.
   241-246 (Review)

   Published by University of Nebraska Press
   DOI: https://doi.org/10.1353/nef.2010.0043

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Comptes rendus critiques   241

précieux viatique, le Cahier d’Aimé Césaire. L’Énigme du retour, métaphore du
retour du temps, boucle un cycle et laisse entrevoir pour l’auteur un authentique
recommencement.

Ouvrages cités
Leth, Asger and Milos Loncarevic, directors. Ghosts of Cité Soleil. 2006. Kbh: Nordisk
     film, 2007. DVD.
Malavoy-Racine, Tristan. “’Au nom du père,’ entrevue avec Dany Laferrière.” Montréal.
     Télé-Québec. 17–23 septembre 2009.
Sroka, Ghila. “L’énigme du retour, interview avec Dany Laferrière.” Tribune Juive août
     2009: 44–47.

                                    Isabelle Constant, University of The West Indies

Met, Philippe. La Lettre tue. Spectre(s) de l’écrit fantastique. Villeneuve d’Ascq:
Presses Universitaires du Septentrion, 2009. ISBN 9782757400791, 267 p.

Rédacteur en chef de French Forum, Philippe Met enseigne la littérature et le
cinéma à l’université de Pennsylvanie. Il a publié une cinquantaine d’articles,
ainsi que Formules de la poésie: Études sur Ponge, Char, Leiris et du Bouchet, aux
Presses Universitaires de France (1999), André du Bouchet et ses Autres, recueil de
textes aux Éditions Lettres Modernes-Minard (2003), et Les Aventures de Harry
Dickson. Scénario de Towarnicki, pour un film (non réalisé) par Alain Resnais, en
collaboration avec Jean-Louis Leutrat et Suzanne Liandrat-Guigues, aux Édi-
tions Capricci à Nantes (2007). Il achève actuellement un manuscrit sur l’esthé-
tique et la phénoménologie des carnets poétiques, intitulé Fausses Notes.
     Dans le présent ouvrage dont le titre, La Lettre tue. Spectre(s) de l’écrit fan-
tastique, est inspiré par une citation de Jacques Lacan, Philippe Met entend trai-
ter de “l’inscription de la lettre dans la littérature fantastique” (13) en s’attachant
particulièrement à tous les écrits et documents qui s’insèrent dans le texte fan-
tastique ou qui l’accompagnent. Dans son introduction, Philippe Met évoque les
trois grands classiques du genre: Frankenstein (1818) de Mary Shelley, L’Étrange
Cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde (1888) de Robert Louis Stevenson et Dracula
(1897) de Bram Stoker qui abondent en manuscrits de toutes sortes, récits en-
châssés, extraits de carnets intimes ou de correspondances, ou encore d’articles
de presse, de télégrammes, et de grimoires maudits qui donnent une impression
de mosaïque ou de kaléidoscope. Selon Philippe Met, dans le récit fantastique, la
lettre est par essence paradoxale puisqu’elle procède d’un trop-plein d’informa-
tions et de zones d’ombre systématiques, d’où une “paradoxale dialectique du
manque et de l’excès” (18). Le titre de l’ouvrage lui-même, La Lettre tue, est fon-
dé sur l’ambiguïté entre les verbes “taire” et “tuer” car, dans le récit fantastique,
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la lettre est tue parce qu’elle est incomplète, parce qu’elle ne parvient pas à son
destinataire, ou parce qu’elle est détruite, mais elle tue aussi parfois au sens litté-
ral du terme, comme dans Le Tour d’écrou d’Henry James. Après avoir introduit
le concept de lettralité qui recouvre selon lui “fantastique de la lettre et lettre du
fantastique” (13), Philippe Met se propose de chercher à définir ce qu’il appelle
une “poétique lettrale” (32) en étudiant non pas tant les “chefs-d’œuvre réputés
incontournables” (14) que des textes “bien moins privilégiés par les commenta-
teurs” (15) et “dont la lettre a été peu, ou moins, recouverte et gauchie par des
couches interprétatives successives” (16), comme La Guzla de Mérimée. Les prin-
cipaux auteurs qu’il retient sont Jean Ray, H. P. Lovecraft, Maupassant, Algernon
Blackwood, Michel de Ghelderode et Hanns Heinz Ewers. Le critique entend
“dégager un esprit du fantastique par une traversée des avatars de la lettre” (32).
Pour cela, il n’écarte pas des textes “dont le statut ou la teneur fantastique peut
être tenu(e) pour problématique, indécidable, ou tangentiel(le) au genre” (34).
      Le premier chapitre est consacré aux avatars de la traduction et de la mys-
tification chez Mérimée, notamment dans La Guzla (1827), texte présenté par
son auteur comme un “choix de poésies illyriques” (37). Si les ballades réunies
dans La Guzla ne relèvent pas toutes du fantastique, tel que l’ont défini Caillois
ou Todorov, on y trouve néanmoins des motifs fantastiques comme le mauvais
œil et le vampirisme. Mérimée affirme même avoir été témoin d’une affaire de
vampirisme. Selon Philippe Met, les notices sur ces deux thèmes “voient l’une
et l’autre leur propos didactique et érudit insidieusement infiltré par le nar-
ratif et l’autobiographie, l’anecdote présumée véridique tournée en fiction de
type fantastique” (75). La Guzla se situe donc “entre vécu et fiction” (68), et elle
est en cela caractéristique du fantastique de Mérimée. Philippe Met montre en
conclusion que “mystification, traduction et fantastique participent fondamen-
talement d’un genre commun, engendrant un même effet de familière étrangeté,
un même décentrement du langage, une même poétique de la lettre égarée et
égarante” (80).
      Le second chapitre aborde le statut des grimoires fictifs dans le texte fan-
tastique. Le Necronomicon, ouvrage maudit totalement inventé par Lovecraft,
est au centre de son œuvre. Philippe Met se demande s’il s’agit d’un mythe ou
d’une mystification, sachant que “Lovecraft en son temps ne se faisait pas faute,
déjà, de cultiver l’équivoque, d’entretenir la part ludique dans l’entreprise pour
mieux laisser s’épanouir la légende” (82). Dans ses contes, l’auteur évoque sans
cesse le grimoire maudit mais on ne sait ce qu’il renferme. Pour le critique, le
Necronomicon “tient lieu d’interface éloquent dans sa mutité et sa matité mêmes,
de l’identité et de l’altérité, de l’humanité et du monstrueux, de l’écriture et de
la lecture” (92), et il évoque sur ce point des textes comme “L’Abomination de
Dunwich” (1928) et “Dans l’abîme du temps” (1936) où l’horreur est scripturale.
Dans un autre récit de Lovecraft, “L’Appel de Cthulhu” (1926), “l’amplification
Comptes rendus critiques   243

des traces écrites engendre un flagrant effet de mise en abyme et un subtil travail
de réécriture” (107).
     Philippe Met se penche ensuite sur l’œuvre de Jean Ray dont les récits “ap-
paraissent lestés d’une inquiétante autant qu’étrange surcharge d’écrit(s).” (120).
Comme Lovecraft, Jean Ray invente des grimoires maudits comme l’Heptamé-
ron magique et le Grimoire Stein. En faisant croire qu’ils existent réellement,
l’écrivain produit un “effet de brouillage entre réel et fictif ” (124) que renforce
“le chevauchement de divers auteurs et de leurs ouvrages respectifs” (124). Jean
Ray, selon Philippe Met, est un “maître fabulateur (124).” Les traités ésotériques
imaginés par Jean Ray sont des “fantômes de livres” ou des “livres fantômes [. . .]
tantôt dérobés tantôt se dérobant, mais toujours revenants” (125). Philippe Met
analyse les interférences de ces ouvrages maudits dans “La Conjuration du lun-
di,” “Saint-Judas-de-la-nuit,” “Le Psautier de Mayence,” “Le Grand Nocturne,”
ou encore Malpertuis, et il montre que le fantastique de Jean Ray se situe entre
“manque et excès” (127). Philippe Met conclut le chapitre en montrant que dans
le fantastique de Ray “la parole est à la fois déficiente et excédentaire, le livre fai-
sant, lui, office de médiation ambiguë.” (149)
     Au chapitre III, Philippe Met s’intéresse aux journaux intimes insérés dans
les récits fantastiques, parlant d’écriture “diaire,” (151) de préférence à “diariste”
ou “diaristique” (151). Il entend limiter son champ d’investigation aux “entrées
autonomes et clairement datées qui dénotent une écriture se déroulant au fil
du temps ou du calendrier” (151) et il écarte d’emblée trois récits qui sont, selon
lui, des cas extrêmes: “Le Gardien du cimetière” (1919) de Jean Ray, “Le Journal
d’un mort” (1947) de Marcel Béalu et “Le Journal d’un fou” (1835) de Gogol. Phi-
lippe Met écarte également de son corpus “tout récit de type rétrospectif [. . .], y
compris tout récit-confession à la première personne, fût-il homodiégétique ou
autodiégétique” (154) comme La Maison au bord du monde (1908) de William
Hope Hodgson et “La Chevelure” (1884) de Maupassant.
     L’auteur analyse ensuite l’écriture “diaire” dans Le Horla (1886 et 1887) de
Maupassant. Chez Maupassant, la pulsion diaire est caractérisée par des effets
de répétition, par une dramatisation de la temporalité et par une certaine ambi-
guïté. Le narrateur y apparaît comme un “diariste dépourvu de toute motivation
intime, de toute conscience même de l’acte d’écrire” (173). Philippe Met affirme
que, dans Le Horla, le narrateur n’est “ni écrivain, ni écrivant” (174) et que son
journal n’est autre qu’un “effet d’optique, un mirage chatoyant, une brume aussi
évanescente et trouble à la fois que celle attestant, semble-t-il, l’absence présence
du sujet et de cela même qui l’abolit” (174).
     Le critique passe ensuite à une autre nouvelle, “L’Araignée” (1908) de Heinz
Hanns Ewers, qui s’inscrit dans la longue tradition du registre fantastique où le
diariste écrit son journal jusqu’à son dernier souffle de vie, comme dans “La Vé-
rité sur le cas de M. Valdemar” (1845) de Poe dont le protagoniste, plongé dans
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l’hypnose, à l’instant même de son trépas, déclare à son réveil qu’il est mort. Met
souligne qu’il y a là un glissement vers le grotesque et une visée mystificatrice.
Lors de sa parution, la nouvelle de Poe a été accueillie comme un document au-
thentique, ce qui montre “que l’outrance et l’invraisemblance, loin de saper une
duperie littéraire, tendent à la nourrir pour autant que le dosage soit adéquat et le
système des croyances, ou le Zeitgeist en place” (176). “Fils spirituel d’Edgar Poe”
(176), Lovecraft a utilisé l’écriture “diaire” dans “La Mort ailée” (1933) et “Le Jour-
nal d’Alonso Typer” (1935) qui mettent “en abyme, selon des stratégies très ironi-
quement ou malicieusement conscientes d’elles-mêmes, certaines des questions
posées par le ‘Valdemar’ de Poe: le grotesque, le ridicule, la mystification.” (176–77)
      “L’Araignée” d’Ewers se fonde en revanche sur la cristallisation. Par ce terme
Philippe Met entend à la fois le processus qui “porte à un degré d’incandescence
les tensions et les enjeux au mode du journal intime fictif ” (209), comme dans
Le Horla, mais aussi la cristallisation stendhalienne “qui nourrit l’imaginaire
transfigurant de la passion et du désir” (200). La cristallisation amoureuse ici
tient à la fois de l’initiation et de la “régression narcissique”(200). Au début, le
journal de Bracquemont se borne à consigner “sur le mode de la négation et de
l’absence la monotonie de l’attente et de la grisaille du non-événement” (200) et
ce jusqu’à la découverte de l’inconnue. Cette rencontre constitue rétrospective-
ment “un premier pas qui est déjà un irréversible pas au-delà ou pas de trop—
une ébauche de progression qui est aussi un premier symptôme de régression”
(201). Le dénouement aboutit in fine “non seulement à une expérience conjointe
de la petite mort et de la grande, mais au trépas du texte illustrant celui de l’au-
teur ou plutôt se confondant avec lui” (205–06).
      Dans le dernier chapitre, Philippe Met poursuit son étude des journaux in-
times fictifs dans l’œuvre d’Algernon Blackwood et de Michel de Ghelderode.
Chez Blackwood, il s’appuie principalement sur un récit de hantise, “L’Indiscret”
(1907). Le narrateur est un écrivain impécunieux qui rédige compulsivement des
textes de toutes sortes mais qui est envahi par d’étranges impressions qui per-
turbent son inspiration. Comme la plupart des récits fantastiques, le texte induit
chez le lecteur une hésitation entre fantastique et surnaturel expliqué. Pourtant,
il s’avérera, grâce à l’explication donnée par un certain Chapter, que la maison
est bel et bien hantée par un lépreux fantomatique. Sa présence se manifeste par
des pensées parasites qui envahissent le narrateur, avant d’apparaître visuelle-
ment puis de parler à l’auteur du journal intime. Écoutant l’histoire de ce lé-
preux, le narrateur subit une métamorphose: “D’allocutaire inattentif, et non
pas ‘indiscret,’ abîmé qu’il est dans les méandres de sa propre rêverie-écriture, il
devient en effet une sorte de double du lecteur ou un lecteur par procuration”
(215). Le véritable auditeur de l’histoire est alors le diariste en personne, atten-
tif au murmure de l’entité qui le hante. L’auteur suggère que le fantastique dans
“L’indiscret” pourrait être “de nature essentiellement acoustique” (219) par op-
Comptes rendus critiques   245

position à “la traditionnelle pulsion scopique” (219). Selon Met, il s’agit moins
en fait de “substituer à la très classique scoptophilie (staring) une pulsion audi-
tive (listening) que d’articuler l’une à l’autre pour mieux orchestrer un voyeu-
risme conjugué où la vue et l’ouïe se révèlent des sens tout à fait privilégiés”
(219). La tension “diaire” est ici confrontation de deux éléments: “d’un côté, un
état plus ou moins phobique, qui ronge de l’intérieur et à l’écoute duquel le sujet
se tient de manière obsessionnelle; de l’autre, le regard hypnotique ou inson-
dable, mais toujours vaguement inquiétant ou menaçant, tel celui d’un félin, du
destinataire projeté” (228).
     Philippe Met se propose ensuite d’étudier “l’intime de l’écriture entre
confession et allégorie” (229) dans l’œuvre de Michel de Ghelderode en s’ap-
puyant principalement sur “Le Jardin malade,” nouvelle publiée en 1939 dans
le recueil Sortilèges. Ce recueil reflète dans une certaine mesure une crise per-
sonnelle de l’auteur dont l’état de santé s’est détérioré et qui a renoncé au
théâtre. Les contes relèveraient donc selon la formule de l’auteur d’une “allé-
gorie du biographique” (229). Pour lui, la genèse du “Jardin malade” se fonde
sur un “substrat (auto)biographique putatif “ (234). L’auteur étudie donc “l’allé-
gorie de l’écriture” en comparant “Le jardin malade” à d’autres récits de Ghel-
derode, comme “L’Écrivain public” qui procède d’une série d’enchâssements et
d’un chevauchement des figures, ou comme “Nuestra Señora de la Soledad” qui
cristallise la rencontre entre deux solitudes. Il aborde ensuite “Jardin malade”
du point de vue du registre “diaire.” Récit parcellaire, dont le sous-titre est “Ex-
traits d’un journal,” “Le Jardin malade” commence comme un journal dont les
premières entrées sont datées au mois de juin 1917 mais deviennent de plus en
plus espacées. L’auteur souligne l’ambiguïté d’un texte qui n’est ni “la simple
projection d’un esprit névrosé en proie à de sombres hallucinations” (244) ni
“le compte rendu au jour le jour d’un combat âprement mené contre une entité
surnaturelle” (244). Le lecteur y est constamment ballotté “entre fantomatique et
fantasmatique” (245). Philippe Met conclut l’étude de ce texte en soulignant “ce
statut unique du récit-journal au sein des Sortilèges, à la fois cœur irradiant du
recueil, pôle aimanté attirant à lui la limaille d’autres textes alentour, et allégorie
de l’articulation de l’aveu et de l’offuscation, du je et de l’altérité” (251).
     Dans sa conclusion générale, qu’il intitule non sans humour “lettre res-
tante,” l’auteur fait le point des différents parcours qu’il a entrepris et montre
que le corpus volontairement limité qu’il a choisi dans son ouvrage n’est pas ex-
haustif. L’étude de la lettre dans le registre fantastique intéresse d’autres auteurs
comme Seignolle, Mandiargues, Thomas Owen, Maurice Renard, Borges, Um-
berto Eco, Hoffmann et bien d’autres. Mais l’essentiel, selon Philippe Met est “la
tache aveugle de la fiction “diaire” et, plus largement, de la lettre fantastique qui
est une “écriture de la mort” (259). Ce que nous lègue le sujet fantastique, selon
246   nouvelles études francophones 25.2

Philippe Met, c’est “une lettre morte vivante” (260) et nous sommes libres “d’al-
ler la retirer et de nous y plonger, ou de la laisser en dépôt, en suspens.” (260)
      À la fois brillant et rigoureux, servi par un appareil critique très complet et
notamment une excellente bibliographie, l’ouvrage de Philippe Met apporte un
éclairage nouveau et extrêmement stimulant sur le fonctionnement du récit fan-
tastique. Sa démonstration qui se fonde sur un corpus très vaste témoigne à la
fois de l’érudition de l’auteur et de sa rigueur d’analyse, et elle peut s’appliquer
à d’autres textes, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives pour la recherche sur le
fantastique. C’est un essai qui, assurément, fera date dans le champ des études
sur les littératures de l’imaginaire.
                                                   Jean Marigny, Professeur émérite,
                                                    Université Stendhal-Grenoble III

Ouellette, Michel. Fractures du dimanche. Sudbury: Éditons Prise de Parole,
2010. ISBN 978289423257. 150 p.

Écrivain prolifique et professeur universitaire, Michel Ouellette a terminé son
doctorat en lettres françaises à l’université d’Ottawa. Né à Smooth Rock Falls,
dans le nord de l’Ontario, il vit maintenant à Gatineau au Québec. Se consacrant
à l’écriture dramatique depuis vingt-cinq ans, il est l’auteur d’une trentaine
de pièces de théâtre, dont une dizaine ont été publiées aux Éditions du Nor-
dir ou chez Prise de Parole. Elles ont été produites par le Théâtre la Catapulte,
le Théâtre le Nouvel Ontario, le Théâtre de la Vieille 17, le Théâtre l’Escaouette
et Vox Théâtre et ont fait des tournées en Amérique du Nord et en Europe. Il a
reçu le prix du Gouverneur général pour French Town et le prix Trillium pour
Le Testament du couturier, traduit déjà en l’anglais et en l’espagnol. Il est aussi
l’auteur d’un récit poétique, deux volumes de poésie, un conte pour enfants et
deux romans, dont Fractures du dimanche, paru en avril 2010. Le créateur a vou-
lu avec cet ouvrage essayer un nouveau tour de force en nous offrant trois his-
toires entrecroisées racontées chacune sous un point de vue distinct et une es-
thétique différente, à savoir le roman, le théâtre et la peinture; ces trois langages
s’adaptent aux destins des personnages et leur sont propres.
      Philippe Pierre, le dramaturge qui n’arrive plus à écrire depuis des années,
ressent “le vide périlleux qui le ronge de l’intérieur” (31). Il cherche les mots en
lui, il ne les trouve plus. La créativité s’est changée en désespoir. Il réfléchit sur
le processus de l’écriture, devenu si aride. “Pourquoi écrire? La question pèse
sur la tête de l’auteur” (32). Et il est si ingrat le métier de l’écrivain! C’est si pé-
nible de faire parler ses personnages alors qu’ils insistent pour se taire, alors
qu’ils n’ont rien à dire! “Parle! Dis quelque chose!” (32). Il rapporte de même ses
mauvaises expériences comme auteur de théâtre. “Écrire, ça peut tuer” (34). Un
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