La Petite école - Rapport d'activités 2018-2019 - Bonnescauses.be

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La Petite école - Rapport d'activités 2018-2019 - Bonnescauses.be
La Petite école

Rapport d’activités 2018-2019
La Petite école - Rapport d'activités 2018-2019 - Bonnescauses.be
Table des matières

A. Présentation de l’asbl RED/Laboratoire pédagogique

B. Présentation du dispositif Petite Ecole

       Contexte et objectifs
       Notre approche
                1. L’accueil et l’accompagnement vers les apprentissages

                          •    Rituels et structuration
                          •    Attention – Souplesse
                          •    Jeu et mise en scène/esthétique
                          •    La vie quotidienne comme lieu des apprentissages
                          •    En pratique

                2. La recherche
                3. La médiation culturelle
       Partenariats
C. Présentation du public et inscriptions

       Public cible
       Informations sur les familles
       Fréquentation/Présence des enfants à la Petite école
       Suivi des enfants passés par la Petite école

D. Rapport des actions menées d’ordre ponctuel

       Actions menées dans le cadre du volet recherche
       Diffusion du projet Petite école

E. Annexes

       Memento
       Photos du projet
       Revue de presse
       Remerciements

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A. Présentation de l’asbl RED/Laboratoire pédagogique

RED/Laboratoire pédagogique est une A.S.B.L crée en 2010 par un collectif d’enseignants-
chercheurs. « Laboratoire » comme lieu de recherche, d’expérimentation et de création.
« Pédagogique » car cette recherche est constamment nourrie par notre pratique enseignante.

Ce lieu comme tentative de réponse à deux questions centrales : comment transmettre le
savoir autrement et comment revendiquer le droit à la recherche en dehors de l’institution
universitaire.

Membre du Conseil d’administration de RED/Laboratoire pédagogique :

Arnaud Bozzini : Président
Axel Pleeck : Vice-Président
Marie Pierrard : Trésorière
Juliette Pirlet : Directrice
Ingrid Heyne : Secrétaire générale

Porteuses du projet Petite école

Marie Pierrard, 1980.
Licenciée et agrégée en histoire de l’art, enseignante.

Juliette Pirlet, 1970.
Licenciée et agrégée en Sciences politiques, enseignante.

Infos sur la Petite Ecole :

Adresse : 139, Blvd du Midi - 1000 Bruxelles

Blog : http://redlabopedagogique.tumblr.com/
Adresse mail : lapetiteecolebxl@gmail.com

Comptes :

KBC de RED/Laboratoire pédagogique : IBAN BE64 7350 4915 6352
Communication : La Petite Ecole

Fonds des Amis de la Petite école : Fondation Roi Baudouin IBAN : BE10.0000.0000.0404
Communication structurée : 017/0900/00065

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B. La Petite école : présentation du dispositif

La Petite école, un projet éthique, esthétique et exigeant. Une école qui se construit par et
pour l’enfant.

Contexte et objectifs

Notre projet s’inscrit dans la problématique suivante : avec ce qu’on a communément appelé
« la crise migratoire » sont arrivés en Belgique des familles de migrants analphabètes et
étrangers à toute culture scolaire. L’entrée à l’école de leurs enfants, souvent polytraumatisés,
pose de nombreux problèmes.

Le projet de la Petite école vise à accompagner la transition entre les années d’exil, d’errance
et de déscolarisation et l’entrée dans un parcours scolaire régulier pour des enfants qui, certes
pour la plupart, présentent des fragilités comportementales et cognitives liées à leur histoire
particulière, mais des enfants qui, pour leur majorité, sont capables et surtout désireux de
suivre une scolarité ordinaire.

Notre objectif n’est pas uniquement de les inscrire dans une école, mais bien de les inscrire
dans un parcours de réussite scolaire en leur permettant d’acquérir au préalable non seulement
les bases de langue française, mais surtout les codes de l’école, l’estime et la confiance en soi
nécessaires pour affronter une institution jamais fréquentée auparavant. Cela implique aussi la
force de quitter son environnement familial qui jusque-là avait été l’unique horizon de
l’enfant, son refuge dans une vie déjà marquée par de nombreux traumas.

A travers notre dispositif, nous entendons créer les conditions nécessaires pour rendre l’école
possible.

Le travail que nous menons au jour le jour se situe donc sur 3 niveaux :

                                                     Un lieu d’accueil et de médiation culturelle

Notre initiative a pour but d’accompagner ces familles dans leur approche de l’institution
scolaire, mais aussi de s’inscrire dans une perspective préventive du décrochage scolaire
précoce, appelé plus communément « l’absentéisme scolaire » quant il s’agit du fondamental.

La Petite école est un dispositif qui vise à amener ces enfants en douceur vers l’école pour
éviter qu’ils n’en sortent trop vite. Soit parce qu’ils n’iront pas à l’école de manière régulière,
soit parce que, étant donné leurs difficultés, ils seront hâtivement réorientés vers
l’enseignement spécialisé.

Par le travail de médiation et les liens que nous tissons mois après mois avec les familles,
nous misons sur l’avenir en scellant les bases d’une relation parents-école solide, clé de la
réussite scolaire.

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Un espace thérapeutique

                « L’acte de penser n’est possible que si l’imagination est disponible1 »

Les enfants que nous accueillons sont marqués par de nombreux traumas liés à l’exil :
troubles du comportement comme l’hyperactivité ou, au contraire, une extrême passivité,
perte de la mémoire, anxiété, et, avant tout, ce sont des enfants dont l’imaginaire est bloqué,
des enfants qui ne s’adonnent pas naturellement au jeu.

La Petite école entend être un espace thérapeutique au sein duquel nous créons les conditions
nécessaires pour permettre à ces enfants/adolescents d’avoir accès à leur imaginaire, de
développer leur curiosité, d’apprendre à jouer et ainsi les rendre disponibles aux
apprentissages.

La Petite école est un espace contenant au sein duquel nous travaillons la résilience, le
processus d’individuation et la confiance en soi.

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La Petite école est un lieu où les enfants/adolescents vivent une première expérience de
socialisation dans un contexte autre que familial.

Nous offrons un environnement francophone et scriptuaire dans lequel l’enfant se familiarise
avec la langue française orale et écrite.

La Petite école fonctionne sur base d’une communauté de pratique au sein de laquelle les
apprentissages relèvent des pratiques quotidiennes (activités situées) plutôt que de la
transmission.

Pour atteindre ces objectifs ambitieux, nous proposons un accompagnement individuel sur
une période de temps adaptée à chaque enfant (généralement entre six mois et un an).
La Petite école, qui a d’abord fonctionné grâce à des enseignants bénévoles, est portée
aujourd’hui par 2 enseignantes-coordinatrices en congé pour mission.

La Petite école accueille au maximum 17 enfants à la fois. Elle est installée depuis janvier
2017 dans un local que l’ASBL loue et entretient grâce à des dons privés.

1
    Antoine de la Garanderie : http://ifgm.org/2016/10/13/imagination-et-apprentissage/

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Notre approche

La méthodologie mise en place au sein de la Petite École s’ancre principalement dans une
vision de l’enseignement où l’enfant est placé au centre de celui-ci ; enseignants et enfants
évoluent ensemble et le travail accompli est en permanence questionné. Il s’agit d’un
laboratoire qui a vocation à être modélisé et à produire des outils.

                 1. L’accueil et l’accompagnement vers les apprentissages

                           •      Rituels et structuration

Les journées suivent toujours la même structure, et sont ponctuées par une série de rituels.
Cette répétition permet aux enfants de se situer dans le temps et l’espace : l’accueil,
rassemblement du matin, la classe, le temps de midi, l’atelier et le rituel de fin de journée
rythment invariablement nos journées. Ce cadre prédictible, très précis n’enferme pas les
enfants, au contraire il les apaise (chacun sachant ce qui se passe après, peut se consacrer
entièrement à l’instant présent).

Notre dispositif repose sur une répartition très stricte des rôles de chacune et de l’espace.

4 enseignantes/ 4 rôles/ 4 espaces :

La responsable de l’ambiance et de l’espace jeu : personne qui veille à l’atmosphère
générale et au bien être des enfants. Elle est la personne de référence pour les moments de
transition, les rituels, elle prend en charge l’interaction entre les différents membres du
groupe. Lorsqu’un enfant n’est pas capable de participer aux activités structurées, le jeu est le
principal outil de médiation, la responsable du climat amène l’enfant en douceur vers le jeu
afin de permettre à l’enfant en crise à interagir avec elle. Elle est responsable de l’observation
des enfants au quotidien, dans un second temps, elle dégage de ses observations les thèmes
qui seront abordés lors des supervisions. Enfin elle est responsable du rituel d’au revoir de fin
de journée.

La responsable des « classes » : la classe (8 bancs d’école devant un tableau noir) est le
moment d’apprentissages formels et collectifs dont l’enjeu est bien plus l’appropriation des
codes scolaires et la socialisation plutôt que les apprentissages eux-mêmes. Il repose sur une
sorte de « mise en scène » de l’école et a pour principal objectif de répondre au « fantasme
d’école » des enfants et de les confronter à celui-ci. Ce sont trois moments de courte durée
(une fois 45 min et deux fois 30 min sur la journée) auquel les enfants participent sur base
volontaire. La classe est structurée par divers rituels (l’appel, le sablier, la distribution du
matériel, travail du regard/observation en début de classe, la gommette verte en fin d’activité).

La cuisine et l’atelier geste :

La cuisine est un lieu rassurant pour les enfants, elle est familière à tous et est hautement
fonctionnelle. Chaque enfant a une tâche : éplucher, couper, ciseler ou touiller. Chaque tâche
a son outil, chaque outil a son geste. Cet atelier est l’occasion d’une expérience multi-
sensorielle et leur permet de participer à une œuvre collective (le repas).
L’atelier geste : La technique est ici un prétexte au geste et à l’expérience ; chaque technique
nécessitant son outil et chaque outil nécessitant son geste précis. Des sillons sont creusés dans

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le lino à l’aide d’une gouge, un cachet apparait sous la pression de la main, un motif est
brodé grâce au fil passé dans l’aiguille, la terre est aplatie sous la pression du rouleau.

La responsable pédagogique et dépassement : Dans cet espace (un petit local et son étagère
débordante de matériel didactique, atlas, globe, cabinet de curiosités, balances…) l'enfant
travaille individuellement avec une institutrice expérimentée, selon son rythme. Il choisit le
domaine dans lequel il a envie de travailler (mathématique, langue française parlée ou
écrite...). On lui propose des actions comme jouer, associer, ordonner, découper, peser, plier,
dessiner. L’objectif est d’entrer dans l'action d'apprendre avec confiance. L’enfant sera le plus
souvent invité à construire son propre matériel didactique.

C’est par cette organisation rigoureuse que notre espace devient thérapeutique et rempli
entièrement son rôle d’espace contenant pour les enfants.

                          •    Attention – souplesse

L’enfant/adolescent est accueilli à la Petite école dans sa globalité et non en tant qu’élève.
Nous travaillons avec un groupe de maximum 17 enfants afin d’apporter une attention
particulière à chacun d’entre eux et favoriser une participation accrue de ceux-ci :

En plus de ces processus saillants qui distinguent les petites classes des grandes, nous avons
constaté que les élèves et les enseignants dans les petites classes possèdent un sentiment
d’appartenance ou de communauté plus fort, développent des relations plus étroites, offrent
un soutien par les pairs, reconnaissent l’expertise des autres et voient le milieu scolaire
comme un milieu plus détendu et heureux pour apprendre. Par conséquent, les élèves sont
plus engagés dans l’apprentissage2.

L’enfant/adolescent est placé au centre de notre dispositif; enseignants et enfants/adolescents
évoluent ensemble. Ces enfants nous amènent en effet à interroger toujours et encore notre
manière de les accompagner, d’être et d’agir avec eux. Le travail accompli est donc en
permanence questionné. L’apprentissage concerne aussi bien l’enseignant que
l’enfant/adolescent.

La réalité de la famille/l’enfant est prise en compte, la fréquentation est fonction des
disponibilités de chacun.

La liberté de choix est offerte aux enfants/adolescents : les enfants/adolescents ont la liberté
de participer ou non aux activités de la communauté qui lui sont proposées (classes, atelier,
comptabilité/logistique…). Au cas où ils ne participent pas à l’activité principale il est pris en
charge par la responsable de l’ambiance. Le matin les enfants/adolescents ont le choix de
s’inscrire ou non pour l’après-midi. Si l’atelier n’est pas choisi, ils rentrent chez eux à 12H30,
après le repas de midi.

L'idée est de travailler sur l'anticipation, le désir mais aussi l'engagement. En effet, nous
voulons que les enfants soient preneurs de ce que nous leur offrons, qu’ils occupent une place
active dans ce qui leur est proposé.

2
  R. NORMAND, L’effet positif de la réduction de la taille des classes sur l’enseignement et les apprentissages :
l’exemple de classes de collège à Hong Kong (cours d’anglais), 12 juin 2019.

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•   Jeu et mise en scène/esthétique

Nous accordons une importance particulière à la mise en scène : pour toutes les classes et
ateliers : le matériel est disposé (avant le début de l’activité) sur chaque table de manière à ce
que l’enfant/adolescent se sente invité à sa table de travail.

Le travail par le jeu, le jeu comme outil de travail sont des éléments fondateurs du
fonctionnement même de la Petite École.

La qualité des outils, leur fabrication manuelle et artisanale est le témoignage de notre
attention/soin porté à l’enfant. L’aménagement et la décoration de la Petite école relève d’un
souci esthétique qui va dans le même sens.

                       •   La vie quotidienne comme lieu des apprentissages

La Petite école entend être une communauté de pratiques auxquelles les enfants/adolescents
sont invités à prendre part.

Apprendre à la Petite école c’est, à travers ces pratiques, un processus qui consiste à devenir
membre de cette communauté.
L’apprentissage devient un aspect de la pratique quotidienne (déclinées en plusieurs activités :
classe, atelier, services, gestion du temps et de l’ambiance…).

                       •   En pratique

Les enfants/adolescents sont accueillis en horaire scolaire – avec la possibilité de participer ou
non aux ateliers de l’après-midi :

Horaire

Lundi, mardi, jeudi : 8h30 – 15h
Mercredi, vendredi : 8h30 – 12h.

Planning de la journée :

8h30- 9h : accueil - petit déjeuner parents-enfants
9h - 9h45 : classe
9h45-10h : collation
10h – 10h45 : classe
10h45-11H15 : préparation du repas de midi – activités libres

11h15-12h00 : activités ludiques et sportives à l’extérieur.
12h00 – 12h30 : repas de midi

12h30-12h45 : services
12h45 – 13h15 : Classe
13h15-13h45 : activités ludiques et sportives à l’extérieur.
13h45 – 14h30 : ateliers
14H30-15H : rituel de fin de journée / services

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2. La recherche

Tandis que j’enseigne, je continue à chercher, à rechercher. J’enseigne parce que je cherche,
parce que j’ai questionné, parce que je questionne et m’interroge. Je cherche pour constater,
                constatant j’interviens, intervenant j’éduque et je m’éduque. “
                                                                                 Paulo Freire

La Petite école est un dispositif expérimental et innovant. Il est le fruit des années
d’expérience dans l’enseignement de ses promotrices mais aussi de recherche en didactique
menée dans le cadre de l’asbl RED/Laboratoire pédagogique.

Il est évident que seule l’observation des enfants et les rapports presqu’intimes que nous
pouvons lier avec eux ne permettent pas à eux seuls de comprendre ce qui les détermine, seule
la théorie permet d’en approcher le sens et c’est pour ça que le projet PE contient un volet
« recherche » très important. La bibliothèque partagée, l’intervision du vendredi, les
formations extérieures, l’organisation de séminaires théoriques, les rencontres avec d’autres
enseignants mais aussi avec des philosophes, des sociologues, des anthropologues, des artistes
ponctuent notre travail quotidien. En effet, c’est la théorie qui rend intelligible ce que nous
percevons des enfants, et, au delà, elle inspire et guide notre action éducative qui vise à
prendre en compte la spécificité de chacun. La théorie éclaire en quelque sorte les choix
pratiques, pratique, qui, en retour, questionne la pertinence des constructions théoriques. Nous
tentons de faire la démonstration, et nous ne sommes pas les premières à le faire, qu’en
matière d’éducation la rigueur de l’élaboration théorique est toujours au service de la
créativité, qu’elle soutient l’innovation, qu’elle donne à voir ce qui, sans elle, resterait aveugle
à l’éducateur.

Dispositifs

Groupe de reflexion inter-disciplinaire : un groupe de réflexion interdisciplinaire
(anthropologues, sociologues, philosophes, éthologues, linguistes …) autour des questions
que soulève le projet Petite école a été mis en place en septembre 2018. Ce groupe de
recherche dirigé par Antoine Janvier, philosophe de l’éducation de l’ULG et auquel participe
une petite dizaine de chercheurs à la fois de l’ULB et de l’ULG mais aussi de l’INALCO à
Paris, se réuni une fois par mois.

L’intervision du vendredi : Les vendredis après-midi sont consacrés au travail en équipe et à
la réalisation des outils didactiques ; la photocopieuse est utilisée le moins possible, chaque
enfant reçoit pour ses exercices un exemplaire réalisé à la main, les imagiers sont réalisés par
les enseignantes à partir du vocabulaire engrangé, les illustrations des comptines et autres
textes utilisés lors des rituels sont réalisées par les enseignantes à la main. Nous croyons aux
vertus d’une esthétique travaillée mais aussi au temps accordé à ce travail de fourmi. Le
temps que l’enseignant prend pour réaliser son matériel didactique témoigne du soin qu’il
apporte à son travail, de la bienveillance/attention qu’il accorde aux enfants. Etant à la fois
animatrices et promotrices du projet, nous consacrons également ce mercredi aux diverses
rencontres que nécessite la mise en œuvre d’une telle initiative: recherche de partenariats,
recherche de fonds, partage de pratiques avec d’autres acteurs de terrain.
Remarques importantes : Les taches liées à la gestion administrative et financière de la Petite
école (rédaction de rapports d’activité, remplissage d’appel à projet, comptabilité,
communication autour du projet – blog et journal -, entretien du matériel et du local) sont
également prises en charge par les enseignantes-coordinatrices …mais le week-end.

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Le blog de la Petite école : Chaque semaine, les enseignantes rédigent un compte-rendu
d’observation du travail effectué avec les enfants afin de constituer une Documentation au
sens du pédagogue italien Malaguzzi. Des textes et des émissions radios sont également
partagés sur ce site.

Tiroirs à concepts : Sur l’étagère de la pièce principale, un meuble à tiroirs a été disposé.
Chaque tiroir contient la description d’une notion que nous avons tirée de nos lectures et qui
éclaire notre travail avec les enfants. Au fil de nos observations, nous glissons dans les casiers
correspondant des petites réflexions, des observations, des documents en liens tels que des
extraits de textes, des images, qui d’une manière ou d’une autre, peuvent « ouvrir » ce
concept.

Le journal de la Petite école : Deux fois par an, en moyenne, les enseignantes-coordinatrices
de la PE consignent dans un Journal papier(réalisé de manière artisanale et diffusé auprès des
donateurs et partenaires divers) les traces de leur travail : journal de la PE à partir des notes du
blog, revue de presse, textes de références, comptes-rendus de rencontres, photos.

Supervision : Une supervion à lieu une fois par mois avec la pédopsychiatre Catherine
Marneffe. Cette supervion nous permet d’avoir un regard professionnel sur le suivi
psychologique des enfants de la Petite école.

                 3. La médiation culturelle
Après l’accueil, l’accompagnement vers les apprentissages et la recherche, la médiation
culturelle avec les familles est la clé de notre dispositif.

De manière totalement intuitive, une place énorme a été faite aux parents dans le dispositif
Petite école dès ses débuts. A titre d’exemple, tous les matins, parents et enfants sont
accueillis avec un petit déjeuner, des réunions des parents sont organisées avec interprètes
tous les mois, les inscriptions se font dans le cadre d’un long entretien ou le projet est
expliqué aux parents et leur parcours attentivement pris en compte.

En cas de questions plus sensibles, nous organisons avec les familles concernées des
entretiens privés avec un médiateur culturel issu de leur communauté. Le service de
prévention de la commune d’Anderlecht est dans ces cas là un partenaire privilégié. Avec
notre public, cette médiation est indispensable.

M. KAZEMZADEH (médecin du centre de santé mentale pour migrants EXIL ) rappelle tout
d’abord que quitter son pays d’origine n’est pas donné à tout le monde et que cela implique
des ressources initiales importantes.

Une fois sur place, le premier aspect de la « crise » est définie par le besoin, pour les
membres d’une famille, de faire le deuil de qui ils étaient avant. En effet, aucune culture ne
prépare les membres d’une société à s’expatrier et vivre un tel déracinement culturel. Il
souligne le fait qu’un tel déracinement va avoir pour effet de renforcer l’attachement aux
traditions qui définissent une manière actuelle de relire le passé.
Il note que l’enfant, via l’école, est le seul membre de la famille qui continue sa vie et peut se
projeter plus facilement dans l’avenir. Toutefois, l’enfant va connaitre un phénomène de
confrontation entre les valeurs transmises dans le premier pôle de socialisation qu’est la

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famille et celles véhiculées à travers la culture scolaire, l’école étant le second pôle de
socialisation. 3

Enfin, nous accompagnons les parents lors la transition Petite école - école : décision
commune famille-PE quant au moment opportun de la transition, accompagnement dans les
démarches d’inscription (partenariat avec les antennes scolaires communales, avec les écoles
partenaires), suivi de l’enfant inscrit dans une école dans le cadre de sa prise en charge à la
Petite école des devoirs.

Partenariats
Le service de prévention de la commune d’Anderlecht. : Médiation avec certaines familles et
orientation des familles vers notre école, la mise en place de la « plate-forme de concertation
sur les Doms. ». Dans le cadre du volet Médiation de la Petite école, une permanence est
organisée chaque semaine dans nos locaux : un agent de la Prévention est au service des
familles de la PE pour tout conseil ou orientation en matière sociale.

Les antennes scolaires : Les Antennes scolaires sont un service de première ligne en ce qui
concerne la recherche d’écoles pour les familles réfugiées. Nous travaillons principalement
avec les antennes scolaires d’Anderlecht, de Molenbeek, l’asbl Bravvo et récemment avec les
antennes d’Ixelles et de Schaerbeek.

Solentra : Depuis trois ans, nous avons établi un partenariat avec le centre de santé mental
Solentra, le suivi psychologique de certaines familles de la Petite école est pris en charge par
leur service.

Le Foyer : Nous faisons appel au service de médiation rom du Foyer, pour les raisons
suivantes : Médiation culturelle, traduction, mise en place de la « plate-forme de concertation
sur les Doms. »

C. Présentation du public et inscriptions

Présentation du public cible

La Petite école accueille :

- des enfants/adolescents récemment installés en Belgique.
- des enfants et adolescents âgés de 6 à 16 ans avec prise en compte des fratries.
- des familles dont la réalité sociale permet d'envisager un projet scolaire à moyen terme
(logement, CPAS,..).

Les enfants passés par la Petite Ecole durant cette année scolaire ont entre 6 et 15 ans. Bon
nombre d'entre eux arrivent avec une histoire douloureuse, un passé affectif chargé
émotionnellement, un capital de connaissances très faible, une confiance à construire. La
majeure partie ne sait ni lire, ni écrire, ni calculer.

Les jeunes enfants réfugiés proviennent de milieux très différents. Ce qui les caractérise
cependant est qu'ils ont pratiquement tous vécu un parcours d'exode et vivaient ou vivent

3
    Compte rendu formation sur les droits des enfants dans la migration, GP_CIDE 16 décembre 2016

                                                                                                    11
encore dans des conditions de grande précarité.

Notre public varie d'une année à l'autre. Cette année, nous avons accueilli:

   -   Des enfants syriens parlant le domari, appartenant à la communauté Dom.
   -   Des enfants syriens parlant arabe, n'ayant jamais été scolarisés. Ces syriens,
       récemment arrivés ou pas en Belgique, ont généralement fui la guerre de Syrie. Ils ne
       parlent pas français.
   -   Des enfants belges gitans, parlant le romani, dont la communauté (campement à
       Anderlecht) est sédentarisée en Belgique depuis 3 générations pour certains, vivant en
       appartements (CPAS) pour d'autres. Ces enfants parlent un français rudimentaire.
   -   Trois enfants sénégalais parlant le peul, ayant rejoint leur père et une partie de leur
       fratrie en Belgique. Deux d’entre eux n'ont jamais fréquenté l'école.
   -   Un enfant burundais, parlant le kirundi et un peu le français, arrivé en Belgique avec
       sa famille pour des raisons politiques, sachant lire et écrire mais n'étant pas à niveau
       (programme scolaire), ayant fréquenté très peu l'école burundaise (présentant des
       classes surchargées/80 enfants par classe) mais ayant été en partie scolarisé à la
       maison par ses parents instruits.
   -   Un enfant marocain parlant arabe, comprenant un peu le français, scolarisé au Maroc
       dans sa petite enfance, ayant fuit le Maroc seul pour des raisons familiales, déscolarisé
       depuis un bon nombre d'années.
   -   Des enfants syriens, ayant vécu en Turquie, parlant turc, ne parlant pas du tout le
       français, n'ayant pas été scolarisés, ou alors très peu et de façon ponctuelle.
   -   Une enfant iranienne, parlant le farsi et le turc, n'ayant jamais fréquenté l'école.

Les familles

Les parents sont pour la plupart analphabètes. L’école n’est pas un lieu familier, que ce soit en
Belgique ou dans leur pays d’origine. Pourtant, majoritairement, leurs enfants fréquentent
l’école de manière régulière. Les absences sont la plupart du temps justifiées par un certificat
ou prévues à l’avance (rendez-vous au CPAS, démarches administratives,…).
Certaines familles considèrent l’école comme un levier social, ils comprennent les enjeux de
l’école, l’importance de l’apprentissage de la lecture et de l’écriture. Pour d’autres familles,
l’école n’est pas indispensable à l’éducation de leurs enfants, à leur survie. Ils ont toujours pu
se débrouiller sans l’institution scolaire et nous considèrent un peu comme une garderie.
Malgré les nombreuses barrières et codes culturels qui nous séparent, ces parents nous font
confiance. Ils déposent leurs enfants sereinement et acceptent facilement de partager un
moment avec nous. Pour certains, nous sommes les seuls occidentaux qu’ils « côtoient ».

Informations générales sur le groupe d'enfants 2018-2019

Enfant syrien                                       Jamais scolarisé/10 mois passés à la PE
Yaser. 13 ans.
Fréquentation régulière 3j./semaine.
Statut de réfugié.
Accompagné de ses parents .
Arrivé via le Service prévention d'Anderlecht.

                                                                                               12
Fratrie syrienne                                    Jamais scolarisée/5 mois passés la PE
Fréquentation très régulière
Ahmad. 7 ans.
Khaled. 7 ans.
Statuts de réfugiés.
Accompagnés de leurs parents.
Arrivés par le bouche à oreille.

Fratrie syriennne                                Jamais scolarisée/passés 6 mois à la PE
Fréquentation irrégulière.
Youssef. 10 ans.
Samira. 6 ans.
Statuts de réfugiés.
Accompagnés de leurs parents.
Arrivés via Service prévention d'Anderlecht.

Fratrie syrienne                                   Jamais scolarisée/Depuis 5 mois à la PE
Fréquentation régulière.
Khoder
Mohamed
Youssef
Statuts de réfugiés.
Accompagnés de leur maman (pas de père).
Arrivés via le Service de prévention d'Anderlecht.

Fratrie syriennne                                Jamais scolarisée/Depuis 2 mois à la PE
Fréquentation très régulière.
Judi. 15 ans.
Jana. 9 ans.
Aboudi. 7 ans.
Statuts de réfugiés.
Accompagnés de leurs parents.
Arrivés via l'Antenne scolaire d'Uccle.

Fratrie syriennne                                 Jamais scolarisée/4 mois passés à la PE
Fréquentation très régulière.
Mohamed 6ans
Zaineb 10 ans
Statuts de réfugiés.
Accompagnés de leur maman (père au Maroc).
Arrivés via le Samu social d'Uccle.

Enfant syrienne                                 Jamais scolarisée/Depuis 4 mois à la PE
Nada
Fréquentation très régulière.
Statuts de réfugiée.
Accompagnée de ses parents.
Arrivée via l'Antenne scolaire d'Anderlecht.

                                                                                        13
Enfant syrien                                   Jamais scolarisé/Depuis 3 mois à la PE
Fréquentation très régulière.
Hassan. 9 ans.
Statut de réfugié.
Accompagné de ses parents.
Arrivé via l'école Magellan.

Enfant syrienne                                 Jamais scolarisée/Depuis 4 mois à la PE
Fréquentation très régulière.
Anwar
Statut de réfugiée.
Accompagnée de sa maman.
Arrivé via l'Antenne scolaire d'Anderlecht.

Fratrie belge rom                                      Jamais scolarisée/3 mois à la PE
Fréquentation régulière 3j./semaine.
Tabasco 6 ans
Berlina 10 ans
Accompagnés de leurs parents
Arrivés via CPAS Anderlecht

Enfant belgo sénégalais                         Jamais scolarisé/Depuis 8 mois à la PE
Bergal. 15 ans.
Fréquentation très régulière.
Nationalité belge.
Accompagné de son papa (maman au pays).
Arrivé via le bouche à oreille.

Enfant burundais                                       Un peu scolarisé/ 5 mois à la PE
Kelly. 11 ans.
Fréquentation très régulière.
Statut de réfugié.
Accompagné de ses parents.
Arrivé via école des devoirs de Bruxelles

Enfant marocain                                       Un peu scolarisé / 3 mois à la PE
Sad 13 ans.
Fréquentation très régulière.
Mena sous tutelle

Enfant iranienne                                 Un peu scolarisée /Depuis 2 mois la PE
Parastou. 8 ans.
Fréquentation très régulière.
Statut de réfugiée.
Accompagnée de ses parents.
Arrivée via l'Ecole des devoirs de Bruxelles.

Fratrie slovaque rom                             Jamais scolarisée /1 mois passé à la PE
Fréquentation régulière.
Slavomir 11 ans

                                                                                      14
Karol 7 ans
Maria 8 ans
Renata 7 ans
Accompagnés de leurs parents.
Arrivés via le Samu social.

Enfant roumaine rom                                Jamais scolarisée/1 mois passé à la PE
Fréquentation régulière.
Léontina. 14 ans.
Accompagnée de ses parents.
Arrivée via le Samu social.

Enfant belge d’origine roumaine                   Jamais scolarisé / 2 mois passés à la PE
Fréquentation régulière.
Ianis. 10 ans.
Vit avec sa maman.
Arrivé via l'Antenne scolaire de Schaerbeek.

Enfant syrien                                      Jamais scolarisé /2 mois passés à la PE
Fréquentation régulière.
Ryam. 8 ans.
Statut de réfugié.
Accompagné de ses parents.
Arrivé par l'Ecole 13, Ecole qui bouge.

Enfant syrien                                      Jamais scolarisé /2 mois passés à la PE
Fréquentation régulière.
Maram. 12 ans.
Statut de réfugié.
Accompagnée de ses parents.
Arrivé par l'Ecole 13, Ecole qui bouge.

Enfant syrien                                      Jamais scolarisé /2 mois passés à la PE
Fréquentation régulière.
Ayman. 12 ans.
Statut de réfugié.
Accompagné de ses parents.
Arrivé par l'Ecole 13, Ecole qui bouge.

Enfant syrienne dom           Essai de scolarisation à Serge Creuze /5 mois passée à la PE
Fréquentation régulière.
Khadra. 15 ans.
Statut de réfugiée.
Accompagnée de ses parents.
Arrivée via l'Ecole Serge Creuze.

Enfant somalien                            Essai de scolarisation / 2 mois passés à la PE
Fréquentation régulière.
Abdi, 6 ans
Statut de réfugié.

                                                                                            15
Accompagné de ses parents.
Arrivé via l'Ecole Serge Creuze.

Enfant belge d’origine roumaine                 Essai de scolarisation /2 mois passés à la PE
Fréquentation régulière.
Antonio, 6 ans
Vit avec ses parents.
Arrivé via l'Ecole Serge Creuze.

Enfant belge d’origine roumaine                 Essai de scolarisation /2 mois passés à la PE
Fréquentation régulière.
Luis, 6 ans
Vit avec sa maman.
Arrivé via l'Ecole Serge Creuze.

Le suivi des enfants

La Petite école est un lieu de transition, de liaison, un lieu qui sert de passage entre deux
réalités : celle du voyage, de l’errance en famille et celle de la vie scolaire belge.
Notre volonté est de lier ces deux réalités de façon plus fluide et plus constante.
La PE , lieu de mouvement, a pour vocation d’initier, « d’entrer dans » puis d’accompagner
les enfants dans leur parcours scolaire en prenant en charge la transition vers la « grande
école » et en suivant l’enfant dans sa première année de scolarisation.
Cet accompagnement permet de transposer le capital confiance des familles envers la PE vers
l’école partenaire.

                                                                                   L’inscription

Concrètement, nous recherchons une école en adéquation avec chaque enfant qui est prête à
l’accueillir et qui est proche de son domicile puis nous accompagnons les familles avec un
interprète lors de l’inscription.
Celles-ci s’organisent en collaboration avec les familles, chaque fois différentes, elles varient
selon les possibilités, les besoins et la réalité de ces familles.

Cette année, nous avons par exemple accompagné une famille burundaise (qui ne nécessitait
pas d’interprète). La première rencontre a eu lieu uniquement avec la maman car elle préférait
d’abord visiter l’école :

       La maman se présente à la PE à l’heure du rendez-vous, nous faisons ensemble le
       chemin vers l’école. Très attentive, elle compte le nombre d’arrêts de tram jusqu’à la
       nouvelle école, repère le nom de la rue… La directrice nous accueille dans son bureau
       assez rapidement : elle prend connaissance des noms des enfants, de leur date de
       naissance et de leur année scolaire.
       Assez vite elle nous propose de visiter l’établissement. Nous sillonnons l’école, ses
       couloirs, les nouvelles toilettes, la salle de sport,…
       Nous entrons dans les classes où seront scolarisés Kelly et ses frères et sœurs.
       Les ambiances sont différentes suivant les institutrices mais il y a une belle énergie ;
       les classes sont assez vivantes, les enfants travaillent par groupe.

                                                                                              16
En maternelle, quand nous entrons, petit rituel que nous connaissons bien : le moment
       de se dire bonjour, de voir qui est là, de se situer dans la semaine et de répéter la date.
       De retour dans son bureau, la directrice passe aux explications plus pratiques sans
       nous noyer d’informations. La maman a l’air très contente, elle est attentive à tout,
       regarde tout avec un grand sourire, veut prendre des photos pour montrer à son mari.
       C’est décidé, c’est là que ses enfants iront l’année suivante !

Ou une famille syrienne récemment arrivée en Belgique qui nécessitait un traducteur :

       L’interprète téléphone à la famille et leur explique que nous avons rendez-vous la
       semaine suivante pour inscrire les enfants dans une nouvelle école proche de leur
       domicile. Elle leur explique que l’inscription est pour le mois de septembre mais qu’il
       faut s’y prendre à l’avance. La veille du rendez-vous, l’interprète leur téléphone pour
       leur donner l’heure et l’endroit du rendez-vous. La maman dit qu’elle a compris, qu’ils
       seront bien présents. Le lendemain, la famille n’est pas là. L’interprète leur téléphone
       mais ceux-ci ne répondent pas. Après quelques tentatives, ils décrochent et nous disent
       ne pas avoir compris… Nous reprendrons un rendez-vous et nous irons les chercher
       chez eux la prochaine fois.

                                                               Les rencontres en début d’année

Au mois de septembre, nous rencontrons les institutrices afin de partager nos observations ;
nous leur remettons un portrait des enfants qui leur permet de faire connaissance avec eux.
C’est un moment particulier où les enseignantes sont intéressées d’entendre le vécu, le
parcours, le travail effectué avec les enfants.
Ayant rarement connaissance de la situation familiale de leurs élèves, elles écoutent
attentivement la description que nous leur en faisons. Cela leur permet de mieux appréhender
l’enfant avec ses fragilités et sa réalité.

Lors de ces entretiens, elles nous livrent aussi leurs doutes et leurs questionnements. Elles
soulèvent le double enjeux que représente l’inscription de ces enfants dans leur classe : le
travail qui devra être fait au niveau des apprentissages mais avant tout au niveau de
l’intégration et de l’accueil !

Cette année, nous avons par exemple rencontré l’institutrice de Mirna, petite fille dom de 8
ans qui n’avait jamais été scolarisée et que nous avions suivie pendant presque une année :

       L’enseignante m’accueille dans le bureau de la médiatrice pour être au calme et que
       celle-ci puisse aussi participer à la conversation.

       Elle est heureuse de me rencontrer, de connaitre un peu plus le milieu familial de
       Mirna. Elle est intéressée par le projet et pose des questions sur la communauté Dom
       (qu’elle ne connait pas).

       Elle est très attentive lors de la lecture du portrait de Mirna et la retrouve dans notre
       description. Elle la trouve épanouie , (en plus de sa cousine, elle a rencontré une
       nouvelle amie ), très scolaire, concentrée et volontaire. Ses affaires sont en ordre, ses
       devoirs sont faits, d’après elle, quelqu’un l’aide à la maison. « Hier, nous avons appris
       une récitation en classe, aujourd’hui, c’était la première à lever le doigt pour la

                                                                                               17
réciter ». Il y a eu un petit incident avec le papa lors de l’inscription, depuis, c’est la
       maman qui vient la conduire et la rechercher à l’école (habillée de manière colorée !).

L’institutrice de Tabasco, petit garçon rom belge de 7 ans qui n’avait jamais été scolarisé et
que nous avons accueilli 3 mois :

       L’institutrice me reçoit sur le temps de midi, s’excusant de manger. Je présente la
       Petite école brièvement et lui lis le portrait. Elle est à l’écoute et retrouve Tabasco
       dans nos descriptions.

       Ses réactions/interrogations :

       Fréquence : Il fréquente l’école de manière régulière. Il arrive parfois en retard mais
       vient tous les jours à l’école. Elle le trouve parfois fatigué mais souligne l’énorme
       changement de rythme que cela doit être pour lui de venir cinq jours par semaine à
       l’école.
       Observation : Elle trouve Tabasco « bien dans ses basquets ». Il pose énormément de
       questions, veut comprendre l’école, son fonctionnement, ses horaires. Il ne subit pas la
       journée ! Il a d’après elle une grande faculté à comprendre très rapidement.

       Socialisation : Très brusque avec les autres, il ne s’est pas encore véritablement lié
       d’amitié avec un enfant mais il parle à tout le monde. En récréation, il reste souvent
       avec sa sœur.

       Evolution : En quelques jours, elle trouve qu’il a fait des progrès, qu’il comprend de
       mieux en mieux les règles de vie de la classe. Les premiers jours il disait
       constamment : « je ne sais pas faire ». Petit à petit, aidé par ses camarades, par
       l’institutrice ou par la personne soutien, Tabasco tente de réaliser certains exercices.

       Questionnements : Elle se demande quel est le rapport des parents face à l’école,
       quelles sont leurs attentes ? Pensent-ils que le simple fait de fréquenter l’école suffit
       pour réussir ou ont-ils conscience des défis et des enjeux que cela représente ?

Ou encore l’institutrice de Noureddin et d’Abdelaziz, tous deux inscrits dans la même classe ,
3, 4, 5, 6ième ALE (Adaptation à la Langue de l’Enseignement) :

       L’institutrice me reçoit en fin de journée après l’étude. Elle parle beaucoup,
       m’interrompt souvent, me pose des questions sur la communauté dom. Elle "s’apaise"
       et écoute en silence quand je lis le portrait des enfants. Elle est heureuse de les
       accueillir en classe. Elle les trouve respectueux, envieux de participer et de bien faire !
       Jusqu’à présent, leurs devoirs sont faits tous les jours. Elle hésite à les inscrire à
       l’école des devoirs : aide individuelle et gratuite mais qui allongerait la journée
       d’école !
       Ils étaient les premiers à lever le doigt pour réciter une comptine apprise la veille,
       Abdelaziz est très appliqué dans l’écriture des lettres, le graphisme, il a réalisé un très
       beau dessin », Noureddin est très souriant, il a une petite amoureuse quadrilingue.

                                                                                               18
Le suivi tout au long de l’année : la Petite école des devoirs

Durant toute l’année, nous proposons un suivi au travers d’une personne « ressource» qui
rencontre une fois par semaine les enfants qui le désirent pour une médiation scolaire et
familiale.
L’objet de la médiation n’est pas de faire tous les devoirs de l’enfant mais de revenir sur la
matière vue en classe et de gérer les communications, les informations liées à la vie scolaire.
Ces rencontres sont organisées en partenariat avec l’enseignante qui peut s’appuyer sur la
personne relais pour refaire un exercice, revoir une matière, transmettre une information à la
famille.

                                                                  Les rencontres de fin d’année

En fin d’année, nous rencontrons les enseignantes des enfants que nous avons accueillis
l’année précédente. Lors de ces entretiens, nous faisons un retour sur le parcours de l’enfant :
son rapport à l’école, son rapport aux autres et aux apprentissages.

Nous avons par exemple rencontré l’institutrice de Shams , enseignante en 1ière et 2ième année
ainsi que la personne qui lui donne remédiation 1h par semaine :

       Shams fréquente l’école de manière très régulière, elle aime venir à l’école pour
       apprendre et a trouvé ses repères. L’institutrice a des contacts avec son papa. Celui-ci
       est très investi dans la scolarité de ses filles. Il essaye de parler le plus possible en
       français avec ses enfants.

       Au vu des difficultés de Shams, les institutrices ont décidé de la changer de classe. Ce
       changement de classe de la 3ième à la 2ième en cours d’année a été très difficile pour
       elle. Elle est plus âgée et beaucoup plus mûre que les autres enfants. Elle évolue dans
       le groupe sans se lier d’amitié avec les autres mais n’a pas l’air d’en souffrir. Elle se
       sent par contre très à l’aise dans la relation individuelle avec l’adulte.
       La semaine dernière lors d’un tour de parole, Shams a dit qu’elle n’avait pas d’ami en
       classe. Les autres enfants ont été touchés, certains un peu vexés car c’est elle qui se
       met à l’écart… Les enfants se sont alors lancé comme défi de jouer avec elle dans la
       cour de récréation.

       Shams comprend bien le déroulement de la journée, elle se situe très bien dans le
       temps et participe volontiers aux activités proposées. Elle possède toujours son
       matériel et en prend grand soin. Elle a besoin d’avoir son espace en classe, sa table
       fixe « qu’elle protège ».
       Elle se montre très disponible aux apprentissages et se concentre pendant de longues
       périodes lorsqu’elle travaille en individuel avec un adulte. En classe, elle se plonge
       dans son travail, s’enferme dans sa bulle. Elle a une très bonne maitrise des
       mathématiques mais fait un blocage avec la lecture. Elle sait mieux écrire que lire !

       Elle est perméable à l’environnement francophone, elle a une bonne compréhension du
       français, comprend de manière intuitive selon le contexte même si un mot lui échappe.

       L’institutrice regrette que ce soit la fin d’année car elle commence à s’ouvrir aux
       autres, elle commence à comprendre que l’école, ce n’est pas que les apprentissages,
       qu’elle peut y trouver autre chose.

                                                                                              19
Elle la trouve très mature dans certains domaines, faisant constamment des
       connections, des liens mais avec un gros retard dans d’autres domaines. Il lui faudra
       encore du temps pour s’ouvrir aux autres.

Ou l’institutrice de Mirna, inscrite en 2ième année avec la médiatrice de l’école et le directeur
en fin d’entretien :

       Mirna est très régulière, elle apporte toujours un justificatif si elle est absente.
       Elle a compris les enjeux de l’école et la fréquente avec envie.
       L’institutrice est en contact avec les parents, ceux-ci s’adressent à la médiatrice
       arabophone quand ils ne comprennent pas une information.
       Mirna est discrète mais évolue au sein du groupe. Si elle a quelque chose à dire, elle
       ose prendre la parole.
       Elle se repère bien dans la journée, c’est elle qui « fait le menu du jour ». Elle est
       attentive en classe et prend soin du matériel.
       Elle se montre disponible aux apprentissages :elle arrive à décoder ! Elle est très
       perméable à l’environnement francophone, elle a la volonté de s’exprimer en français,
       demande le vocabulaire qu’elle connaît pas. Elle se débrouille bien en math et dessine
       très bien (la médiatrice va essayer de l’inscrire à l’académie).
       Envie et pugnacité sont les adjectifs choisis par l’institutrice pour décrire Mirna. Elle
       passera sans problème dans l’année supérieure. Après quelques encouragements, ses
       parents ont inscrit sa petite sœur en 1ière maternelle.

Ou l’institutrice de Gouro, petite fille sénégalaise inscrite en 3 et 4ième ALE qui n’avait jamais
été scolarisée :

       Gouro est très régulière mais ne donne pas toujours de justificatif si elle est absente.
       Elle vient avec envie dans la classe ALE mais éprouve des difficultés dans sa classe
       d’âge qu’elle fréquente une fois par semaine.
       L’institutrice est en contact avec sa grande sœur et son papa. Elle ressent fort
       l’absence du père retourné au Sénégal depuis plusieurs semaines.

       Son rapport aux autres reste difficile, elle se fait petit à petit des amis mais est souvent
       en conflit avec les autres enfants.

       Elle se repère bien dans la journée et participe aux activités proposées. Elle a
       désormais un rôle d’ainée (c’est la deuxième année qu’elle passe dans cette classe ).
       Elle éprouve des difficultés à prendre soin de son matériel, elle le perd, l’oublie,
       l’abime.
       Elle n’est pas toujours disponible aux apprentissages, cependant elle est très perméable
       à l’environnement francophone. Elle s’exprime bien en français, commence à lire et à
       écrire et retient bien l’orthographe des mots. Elle est très à l’écoute de tout ce qui
       l’entoure, elle a une bonne compréhension de la vie à l’école et est fort à l’écoute de ce
       que disent les adultes.
       Elle fait preuve d’une grande débrouillardise, elle a trouvé toute seule une école des
       devoirs gratuite quand elle n’y avait plus droit dans son école actuelle.

       Son professeur se pose des questions quand à son avenir scolaire : trop grande pour
       aller en 4ième mais pas assez prête pour une 5ième, année où l’on prépare déjà le CEB !

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