La PLaine de PierreLaye, une histoire singuLière - Valdoise.fr

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Le Conseil départemental
soutient la culture en Val-d’Oise

    La PLaine de PierreLaye,
                 une histoire singuLière
La PLaine de PierreLaye, une histoire singuLière - Valdoise.fr
Pierrelaye. 2001 © Conseil départemental du Val-d’Oise. Photo J.Y. Lacôte.

Couverture : Méry-sur-Oise : repiquage des céleris. 1969 © Collection particulière.
Dos : Méry-sur-Oise : colonne d’équilibre de la Haute-Borne. 2001
© Conseil départemental du Val-d’Oise. Photo J.Y. Lacôte.
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Édito

“
                  Il y a dix ans, la forêt de Pierre-   La forêt qui est en train de naître devient la cin-
                  laye-Bessancourt n’était qu’un        quième forêt départementale du Val-d’Oise.
                  projet. Aujourd’hui, elle est une     Elle s’ajoute aux vingt-quatre Espaces Naturels
réalité. Le 25 novembre 2019 ses premiers arbres        Sensibles que nous protégeons, soit plus de
ont été plantés. Un million d’autres érables,           2 000 hectares de bois, forêts et zones humides
chênes et tilleuls les accompagneront bientôt.          qui profitent à tous les Valdoisiens, à l’améliora-
Cette forêt de 1 350 hectares a trois objectifs ma-     tion de leur cadre de vie et au respect de l’envi-
jeurs : préserver notre biodiversité, lutter contre     ronnement dans lequel ils vivent.
la pollution atmosphérique et enrayer le réchauf-
fement climatique.

Au tournant des années 1900, la plaine de Pierre-
laye-Bessancourt était un champ d’épandage à
ciel ouvert. Les eaux usées de Paris y étaient
                                                                                                     “
                                                        La naissance de cette forêt s’inscrit dans le temps
                                                        long. Elle est le symbole d’une prise de cons-
                                                        cience, comme un geste à l’égard des générations
                                                        qui nous succéderont et à qui nous léguerons un
                                                        trésor qu’ils auront la charge de choyer
déversées sans vergogne. Ingénieurs, élus lo-           à leur tour.
caux et habitants ont depuis remué ciel et terre
pour qu’il en soit autrement. D’un espace pollué
ils ont aidé à en faire un havre de paix où la na-                              Marie-Christine CAVECCHI,
ture reprend ses droits.                                                   Présidente du Conseil départemental
                                                                                                  du Val-d’Oise

                                                                                       Eaux usées, usages de l’eau | 3
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La zone d’épandage en 2009.                                                    Périmètre du projet d’aménagement
  © Conseil départemental du Val-d’Oise.                                         forestier. © SMAPP.

En 1900, 71 km de canalisations et 987 bouches               Durant l’été 2009, 108 hectares ont été irrigués par
d’irrigation permettaient de répartir l’eau sur les zones    7 agriculteurs. 600 bouches demeurent opérationnelles
irrigables de Bessancourt, Frépillon, Herblay,               – soit 55 km de canalisations – mais seule une centaine
Méry-sur-Oise, Pierrelaye, Saint-Ouen-l’Aumône.              fonctionne réellement.
À côté des 500 hectares de la ville de Paris – domaine de
la Haute-Borne –, les cultures libres s’étendaient sur       En 2019 les épandages sont arrêtés. Le Syndicat Mixte
1 600 hectares.                                              pour l’Aménagement de la Plaine de Pierrelaye-
                                                             Bessancourt (SMAPP) – qui regroupe des élus de la Région
Un siècle plus tard, l’urbanisation a grignoté le pourtour   Île-de-France, du Conseil départemental du Val-d’Oise,
de la plaine, dont la superficie n’est plus que de           de la communauté d’agglomération Val Parisis et des
900 hectares environ, tandis que s’accroissent les friches   communes de Méry-sur-Oise et de Saint-Ouen l’Aumône –
au centre.                                                   est chargé de la mise en œuvre du projet de forêt dont les
                                                             premiers arbres sont plantés.

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La PLaine
de PierreLaye,
une histoire
singuLière

      Retracer le patient labeur des gens de la plaine qui ont façonné leur
      territoire autour d’un système imposé par la ville, c’est reconstituer la
      mise en place d’un réseau technique, emblématique du triomphe de l’ingé-
      nieur en ce XIXe siècle finissant, et le fonctionnement d’une micro société
      de cultivateurs et d’artisans vivant au rythme du « ventre de Paris ».

      Raconter la plaine, c’est évoquer des flux : saisonniers à la recherche
      de travail, charrois de légumes cheminant vers les halles de Paris au
      rythme lent des bêtes, wagons de gadoues, eaux usées. Les rapports si
      particuliers de la capitale et de sa périphérie s’inscrivent dans ces flux :
      la ville rejette, la banlieue recycle et renvoie à la ville ce qu’elle a pro-
      duit. La gestion des déchets de la capitale devient un enjeu.

      La plaine se présente aujourd'hui en une succession de visions
      contrastées, paysage modelé par l'homme en surface, ancien réseau tech-
      nique hydraulique en sous-sol. Le site, qui s'est constitué à la fin du XIXe
      siècle comme un territoire de banlieue, ne présente pas l'aspect clas-
      sique des zones vouées tôt à des fonctions résidentielles ou industrielles,
      donc densément urbanisées. Entre la ville nouvelle de Cergy-Pontoise
      et la vallée de Montmorency, cet espace fragilisé par la pression foncière,
      la pollution et la crise de l'agriculture péri-urbaine, retrouve un projet
      d’avenir structurant avec l’aménagement d’une forêt métropolitaine pour
      le Grand Paris.

                                                                             Eaux usées, usages de l’eau | 5
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L’Émissaire gÉnÉraL :
une Prouesse
technique
       epuis 1861, l’effluent des égouts parisiens

D      conçus par l’ingénieur Eugène Belgrand
       aboutit dans la Seine, en aval de la capital et
la qualité de l’eau ne cesse de se dégrader. En l’ab-
sence d’autre procédé d’épuration, les ingénieurs
du Service de l’Assainissement de la ville de Paris
préconisent l’épandage agricole*.

                                                           La Frette : passage de l’émissaire général sous la
  Les eaux usées sont canalisées et acheminées
                                                           rue de la Ville de Paris puis en aqueduc
vers les zones d’irrigation de Gennevilliers puis          au-dessus du ravin de La Frette. 2001 © Conseil
d’Achères en Seine-et-Oise. En 1899, la ville de Paris     départemental du Val-d’Oise. Photo J.Y. Lacôte.
prolonge l’émissaire général jusqu’à Carrières-Triel
et aménage en champs d’épandage les terrains               Bassins de décantation, usines de relevage des
acquis trente ans auparavant à Méry-sur-Oise et          eaux à Clichy, Colombes et Pierrelaye, aqueducs
Pierrelaye par le préfet Haussmann pour l’aména-         ou siphons traversant la Seine, l’Oise et le ravin de
gement d’une nécropole parisienne, projet finale-        la Frette, édicules et cheminées d’aération jalon-
ment abandonné.                                          nent le parcours, long de 28 km. n

                                                         * Épandage agricole :
                                                         épuration des eaux par filtration à travers un sol cultivé
                                                         appelé « champ d’épandage ».

                                                                                              © Archives SIAAP.

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une banLieue vouÉe
à recycLer Les
dÉchets de La viLLe
      a mise en place de l’épandage agricole est        Mais les rapports se durcissent entre les com-

L     liée aux préoccupations de la seconde moi-
      tié du XIXe siècle : épurer les eaux usées de
la capitale et réutiliser les éléments fertilisants
                                                        munes de Seine-et-Oise et la capitale, accusée de
                                                        vouloir empoisonner sa périphérie en y rejetant ses
                                                        déchets.
qu’elles contiennent. En outre, il s’avère nécessaire
de cultiver des terrains proches de la capitale afin      Localement, les conflits se cristallisent autour de
de nourrir les citadins plus nombreux. Aux préoccu-     l’appropriation et des usages de l’eau. Ils opposent
pations hygiénistes se superposent des intérêts         les ingénieurs parisiens, soucieux d’épurer des vo-
économiques, ce qui explique la double fonction,        lumes d’eau toujours plus considérables, et les
a priori contradictoire, assignée aux champs            cultivateurs préoccupés de rentabilité. Dès la mise
d’épandage.                                             en service des champs d’épandage, les nuisances
                                                        apparaissent : infiltrations, inondations malodo-
 La plaine de Méry-Pierrelaye témoigne ainsi de la      rantes. Autour du principe d’épuration agricole, les
capacité régénératrice de certains espaces, capa-       polémiques ne cesseront plus. n
bles d’épurer et de produire pour la ville. Aupara-
vant peu fertile, la plaine devient un territoire de
banlieue dont l’aménagement se décide à Paris.

                                                                          Pierrelaye : années 1900.
                                                                          Collection particulière.

  Saint-Ouen-l’Aumône. Collection particulière.

                                                            “      La culture maraîchère,
                                                        c’étaient 3 hectares et un cheval.
                                                        Les gens travaillaient en famille.
                                                        Ils faisaient deux récoltes :
                                                        pommes de terre, haricots, choux,
                                                        artichauts, céleris, poireaux, petits
                                                        pois… L’arrivée des eaux a
                                                                                  “
                                                        permis de diversifier les cultures ;
                                                        les terrains sont devenus fertiles.
                                                        C’était rentable !

                                                                                       Eaux usées, usages de l’eau | 7
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L’usine ÉLÉvatoire
       ’usine élévatoire de Pierrelaye est mise en

L     service le 1er avril 1899 pour refouler les eaux
      usées vers les points hauts de la plaine.
Alimentées par quatre chaudières, les machines à
vapeur relèvent 10 000 m3 d’eau par jour. En 1901,
on double la capacité de refoulement et des ter-
rains irrigables sont aménagés sur Bessancourt et
Frépillon afin d’absorber les rejets parisiens tou-
jours plus importants.

  Symboliquement, la rue où se trouve l’usine élé-
vatoire est nommée rue de la Ville de Paris, et pour
baliser son territoire, la capitale appose son blason
sur le pignon de l’édifice et dans le petit jardin. Les
plans, réalisés par les ingénieurs de la Ville de Pa-
ris, font appel aux méthodes de construction de
l’époque : structure métallique et remplissage
                                                            Blason de la ville de Paris dans le jardin
de briques. L’usine est électrifiée en 1950. n
                                                            de l’usine. 2000 © Conseil départemental du
                                                            Val-d’Oise. Photo Pierre Gaudin.

                                                          canaLisations &
                                                          bouches d’irrigation
                                                                e réseau souterrain est constitué de cana-

  Bouche en fonctionnement et irrigation du maïs
                                                          L     lisations en ciment armé. Des bouches
                                                                placées le long des routes ou des chemins
                                                          permettent à l’eau de s’écouler et d’irriguer plu-
                                                          sieurs hectares.
  sur le domaine de la Ville de Paris. 2001 © Conseil
  départemental du Val-d’Oise. Photo J.Y. Lacôte.
                                                            Rattachés aux Services Techniques de la Ville de
                                                          Paris, et désormais au SIAAP, les cantonniers

“
                                                          entretiennent le réseau. Les cultivateurs ouvrent et
       Les irrigations fonctionnaient                     ferment eux-mêmes les bouches lorsqu’ils ont
jour et nuit : quand j’avais 18 ans,                      besoin d’eau. À la ferme de la Haute-Borne, les
 je passais 2 à 3 nuits par semaine                       « irrigateurs » sont chargés de réguler le débit
     pour arroser, je marchais toute                      d’eau. Ils dirigent les flux sortant des bouches vers
            la nuit dans les champs.
J’avais les jambes pleines de rosée,
             je crevais de froid.
                                                  “       les zones à « mouiller » à l’aide de pierres, de
                                                          mottes de terre et, plus récemment, de gaines en
                                                          plastique. n

8 | Eaux usées, usages de l’eau
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Les coLonnes
d’ÉquiLibre
       e réseau d’irrigation présente la particularité        Ces colonnes sont en ciment armé ; leur sommet

L      de refouler de l’eau sous pression dans des
       conduites de distribution. C’est pourquoi les
ingénieurs ont conçu des colonnes, ou cheminées
                                                            crénelé rappelle l’architecture industrielle de l’épo-
                                                            que. Chacune est reliée au réseau par une conduite
                                                            métallique verticale et un déversoir de trop plein.
d’équilibre. Elles permettent d’éviter les coups de         En cas de surpression, l’eau monte dans la colonne
bélier, c’est à dire les effets d’une surpression dans      et un drapeau fixé sur un flotteur apparaît au som-
les conduites suite à la fermeture d’un grand nom-          met. Les cultivateurs ouvrent alors des bouches
bre de bouches d’irrigation, surpression pouvant            d’irrigation tandis que l’usine réduit le débit d’eau
provoquer la rupture des canalisations.                     refoulé.

                                                               Mais les eaux usées jaillissent parfois des cré-
                                                            neaux et détériorent les récoltes. Par la suite, l’au-
                                                            tomatisation du réseau permet de réguler pression
                                                            et débit d’eau. Aujourd’hui, quelques colonnes se
                                                            dressent encore, telles des phares ou des vigies,
                                                            dans la plaine et au cœur même du bourg de
                                                            Pierrelaye. n

                                         Colonne d’équilibre de la Haute-Borne. 2009
                                         © Conseil départemental du Val-d’Oise. Photo Armelle Maugin.

                                                              Projet pour la colonne d’équilibre des Bellevues
                                                              située en plaine. Élévation : 14m75. 1898
                                                              © Archives SIAAP.

                                                                                              Eaux usées, usages de l’eau | 9
La PLaine de PierreLaye, une histoire singuLière - Valdoise.fr
une ferme modèLe

  Méry-sur-Oise, domaine de la Haute-Borne.
                                                         ur son domaine de Méry-sur-Oise, la ville de
  Vers 1910. Collection particulière.

                                                  S      Paris aménage une construction adaptée à
                                                         l’élevage. L’agronome Paul Vincey et le fer-
                                                  mier organisent le fonctionnement de l’exploita-
                                                  tion avec un double objectif : répondre aux néces-

                           “
                                                  sités de l’épuration et être rentable. Le plan allie une
                    Les saisonniers,              division stricte des services et une distribution
            ils venaient de Paris ou              rationnelle des bâtiments. Laiterie, forge, écuries et
      des alentours. Ils sarclaient,              magasins sont regroupés sous le regard du fermier
              ils cueillaient les pois.           tandis que la salle de préparation des aliments du
       Ils balançaient un champ de                bétail et les silos à fourrages sont aménagés côté

  pommes de terre dans la journée !
     Ceux qui dormaient sur place,
     on les appelait barlatas.
                                              “   champs. Les employés, 125 en 1900, sont logés au
                                                  dessus des étables. À partir de 1910, on construit
                                                  des maisons ouvrières à proximité.

                                                     Des étables – bouveries – édifiées à proximité
                                                  de la ferme ou en plaine abritent le bétail et les
                                                  moutons. Les matériaux permettent de conserver
                                                  une température idéale de 15 à 18°. L’hygiène

             “
                                                  est facilitée par un sol pavé et par l’établissement
                   Moi j’ai travaillé étant       de couloirs séparés pour l’approvisionnement, le
                 gamin dans les champs :          transport du lait et l’enlèvement du fumier par
       cueillette, binette, tout à la main,
         c’était dur ! C’était mon argent
                            de poche.
                                              “   wagonnets.

                                                   Bien approprié aux irrigations intensives, le maraî-
                                                  chage remplace progressivement l’élevage, mais
                                                  nécessite une main d’œuvre abondante. n

10 |   Eaux usées, usages de l’eau
Pour « Le ventre
de Paris »

A
       u prix d’un labeur acharné et d’un savoir-
       faire spécifique, les cultivateurs réussissent
       à tirer parti des eaux qui leur sont imposées.
                                                           “        Mon père a fait les
                                                          Halles. La charrette était
                                                          complètement chargée le soir ; il se
                                                          couchait dans la voiture et il dormait.
                                                          Le cheval connaissait parfaitement le
  Entre avril et octobre les saisonniers affluent, des
alentours puis de province et de l’étranger : Belges,     parcours. À 3 ou 4 heures du matin
Polonais, Italiens, Yougoslaves, Tchèques, Espa-          quand les Halles commençaient à
gnols puis Portugais, Turcs... Ils sont recrutés pour     palpiter, il se levait, il allait boire
la saison ou se louent à la journée, encadrés par         un café et il vendait sur le Carreau.
des tâcherons. À côté du domaine de la ville de           Au retour, on dormait encore dans
Paris où s’affairent plus de 500 personnes en été,
                                                          la voiture à cheval parce qu’il fallait
                                                                                         “
les petites exploitations familiales dominent.
                                                          récupérer des forces étant donné
  À Pierrelaye, dans les années 1950, l’agriculture       qu’on allait travailler toute la
reste peu mécanisée. Tous vivent des épandages :          journée aux champs.
approvisionneurs prospères assurant transport
et vente aux Halles de Paris, exploitants, ouvriers
agricoles, irrigateurs, charretiers, bouviers, vachers,
mécaniciens, charrons, selliers, bourreliers, canton-
niers de la ville de Paris… n

                                                           Paris : cultivateurs de Pierrelaye aux Halles.
                                                           Collection particulière.

  Méry-sur-Oise, la Haute-Borne : arrosage des
  jeunes plants avec les casseroles à borner.
                                                            “       C’étaient les femmes qui
                                                          bornaient, deux rangs en même
                                                          temps avec une casserole au bout d’un
                                                                        “
                                                          manche. Elles prenaient l’eau dans
                                                          la rigole pour arroser les plants
                                                          de choux.
  Collection particulière.

                                                                                         Eaux usées, usages de l’eau | 11
un miLieu artificieL
façonnÉ Par L’homme
      La plaine s’apparente aujourd’hui à une mo-

L     saïque où se côtoient des zones dégradées
      par les irrigations et des zones préservées.
L'épandage a entraîné la détérioration des boise-
ments antérieurs caractéristiques des sols pau-
vres et sableux de la plaine, constitués à l'origine
de chêne sessile, chèvrefeuille, fougère, muguet.
Les zones irriguées se sont dégradées par enri-
chissement en matières nitratées organiques
(eutrophisation). Cela a favorisé l'implantation d'es-
pèces banales comme l'ortie ou le géranium « herbe
à Robert ».                                              Saint-Ouen-l’Aumône : iris des marais au drain de
                                                         Liesse. 2001 © Conseil départemental du Val-d’Oise.
                                                         Photo J.Y. Lacôte.
   La Plaine présente toutefois un véritable poten-
tiel environnemental avec des milieux naturels
patrimoniaux et des espèces faunistiques et floris-
tiques diversifiées, comme l’a démontré l’évalua-
tion environnementale menée par Biotope en 2015-
2016. En zone sableuse, on peut remarquer des
plantes méditerranéennes rares en Île-de-France,
comme le mélampyre à crête. La drave des mu-
railles, espèce floristique protégée qui se développe
sur les rochers et les éboulis crayeux, y fleurit.

    Espace peu fréquenté et spécifique en Île-de-
France de par la présence de bassins de décanta-
tion riches en matière organique et en invertébrés,
donc en éléments nutritifs, la plaine offrait encore
il y a quelques années des opportunités pour les oi-
seaux d'eau nicheurs – vanneau huppé, petit gra-
velot –, les migrateurs et les petits échassiers tels
que les chevaliers et bécasseaux. Aujourd’hui on y
trouve des Hérissons d’Europe, des Écureuils
Roux et des chauves-souris protégées. n

                                                         Méry-sur-Oise. 2001 © Conseil départemental
                                                         du Val-d’Oise. Photo J.Y. Lacôte.

12 |   Eaux usées, usages de l’eau
eaux usÉes et chamPs d’ÉPandage :
des images contrastÉes
      ondé sur le caractère ambivalent de l'eau               Les nuisances relancent la notion de risque, dénon-

F     usée, élément fertilisant et déchet, le principe
      d'épuration agricole fait très vite polémique et
donne aux champs d'épandage une image con-
                                                              cé très tôt par les hygiénistes, et contribuent à ins-
                                                              taurer des principes de précaution. Des procédés
                                                              d'épuration « modernes » apparaissent tandis que
trastée, comme l’est d'ailleurs à l'époque celle de           s'affinent les sensibilités en matière de salubrité.
la banlieue parisienne, succession de jardins et              Les préoccupations environnementales s’ajoutent
d'usines. Progressivement, l’eau usée perd sa va-             aux préoccupations anciennes de santé publique. n
leur et les champs d'épandage sont stigmatisés.

queL avenir Pour La PLaine ?
      n 1996, une étude commandée par le SIAAP –              En 2011, la création d’un massif forestier d’un million

E     le Syndicat interdépartemental pour l’assai-
      nissement de l’agglomération parisienne qui
gère le traitement des eaux usées – révèle la pollu-
                                                              d’arbres sur 1350 hectares est décidée et labellisée
                                                              « Grand Paris ». Maillon de la ceinture verte régionale,
                                                              la nouvelle forêt permettra d’apporter des solutions
tion du site.                                                 durables aux problèmes sanitaires et environne-
En 1999, les cultures légumières sont interdites.             mentaux ; elle offrira un cadre de vie aux habitants et
Seul le maïs à destination animale est cultivé sur            redonnera une image valorisante à ce territoire.
cette plaine polluée, dégradée et désertée, tandis            Aux franges, prendront place des logements, des
que les réflexions se multiplient autour de son               activités et des équipements diversifiés ainsi qu’une
avenir.                                                       agriculture spécialisée sur les terres saines. n

  Pierrelaye. 2001 © Conseil départemental du Val-d’Oise. Photo J.Y. Lacôte.

                                                                                              Eaux usées, usages de l’eau | 13
chronologie
                                      1869   mise en place, à Gennevilliers, d’un jardin d’essai irrigué avec l’eau des
                                             égouts parisiens.

                                      1894   loi du 10 juillet imposant le tout à l’égout et obligeant la ville de Paris à
                                             retraiter ses eaux usées sur des champs cultivés.

                                      1895   inauguration de l’émissaire général et des champs d’épandage d’Achères.

                                      1899   arrivée des eaux usées à l’usine élévatoire de Pierrelaye ; inauguration
                                             des champs d’épandage et de la ferme de la ville de Paris.

                                      1902   interdiction de cultiver des légumes à consommer crus sur les champs
                                             d’épandage.

                                      1940   mise en place de la station d’épuration d’Achères.
  Pierrelaye : l’usine élévatoire
  des eaux. 2002                      1947   une redevance est imposée aux cultivateurs pour l’usage des eaux usées.
  © Conseil départemental du Val-     1964   arrêt des épandages à Gennevilliers dans un contexte d’urbanisation.
  d’Oise. Photo Isabelle Lhomel.
                                      1970   constitution du Syndicat Interdépartemental pour l’Assainissement
                                             de l’Agglomération Parisienne (SIAAP).

                                             expropriation d’une partie du domaine de la ville de Paris au profit
                                      1974   de l’Établissement Public d’Aménagement de la ville nouvelle de
                                             Cergy-Pontoise.

                                             règlement sanitaire départemental interdisant la culture de légumes
                                      1977   à consommer crus sur des champs irrigués avec des eaux usées
                                             non traitées.

                                             pré-traitement (clarifloculation) des eaux parisiennes acheminées vers
                                      1998   Pierrelaye ; arrêtés interdisant temporairement la commercialisation
                                             du thym cultivé sur la plaine.
  Méry-sur-Oise, récolte des
  salades chez un maraîcher           1999   création du SIECUEP, Syndicat intercommunal pour l’Étude d’une Charte
  réinstallé hors zone                       d’Urbanisme et d’Environnement de la plaine de Méry-Pierrelaye.
  d’épandage. 2001.
  © Conseil départemental du
                                      1999   arrêtés préfectoraux et interministériels interdisant les cultures légumières
                                             et aromatiques sur les parcelles où ont été épandues des eaux usées.
  Val-d’Oise. Photo J.Y. Lacôte.      2000
                                      2002   retraitement, à Achères, des eaux usées épandues sur le site de
                                             Méry-Pierrelaye.

                                             convention passée entre l’État, la Région, la Chambre interdépartementale
                                      2007   d’Agriculture d’Île-de-France, l’Agence de l’Eau Seine/ Normandie
                                             et le SIAAP qui contractualise l’engagement pour une durée de 9 ans.

                                             arrêté du Conseil départemental du Val-d’Oise portant classement des
                                             boisements de la plaine (427 hectares) en zone de préemption Espace
                                      2009   Naturel Sensible régional.
                                             Étude engagée par le Conseil départemental et les services de l’État
                                             sur les perspectives d’aménagement du site.
                                      2011   l’État, le Conseil départemental et les collectivités locales décident de
                                             créer sur la plaine une forêt de 1 000 hectares, labellisée « Grand Paris ».

  Méry-sur-Oise : colonne             2014   création du SMAPP (Syndicat mixte d’aménagement de la Plaine
  d’équilibre des Bellevues.                 de Pierrelaye-Bessancourt), afin de mettre en place le projet de forêt.
  2001 © Conseil départemental        2019
  du Val-d’Oise. Photo J.Y. Lacôte.          le 25 novembre, plantation des premiers arbres de la forêt de la plaine
                                             de Pierrelaye-Bessancourt.

14 |   Eaux usées, usages de l’eau
Cette brochure a été conçue en
                                                                   accompagnement de l’exposition
                                                                   « Eaux usées, usages de l’eau, épandage
                                                                   et maraîchage dans la plaine de Méry-
                                                                   Pierrelaye », réalisée par l’Atelier du
                                                                   Patrimoine et de l’Ethnologie (ARPE)
                                                                   Direction de l’Action Culturelle, Conseil
                                                                   départemental du Val-d’Oise.

                                                                   Recherches et conception :
 Pierrelaye : cabane de cantonnier. Au fond Aurore
 Environnement, filière de retraitement des déchets de la
                                                                   Béatrice Cabedoce, Isabelle Lhomel,
 Ville nouvelle. 1995                                              Catherine Crnokrak, Sandrine Robert
 © Conseil départemental du Val-d’Oise. Photo Pierre Gaudin.       Photographes :
                                                                   Armelle Maugin, Catherine Brossais,
                                                                   Isabelle Lhomel, Jean-Yves Lacôte,

                  “
                                                                   Pierre Gaudin
                     Une période, il y avait                       Suivi administratif :
        beaucoup de paysans à Pierrelaye.                          Patricia De Lisi
             Mais ça a commencé à baisser
           en 1960 ; c’est devenu plus dur.                        Nous remercions :
           C’étaient des petites exploitations                     Le Service départemental d’Archéologie,
                                                                   la Direction Grand Paris Ouest, le pôle
          de 6-7 hectares et ils n’arrivaient                      Reprographie et Impression et la Direction
        plus à vivre. Tout s’est modernisé.                        des systèmes d’Information au Conseil
              Il y a eu la concurrence de la                       départemental,
           province avec des transports plus                       le Syndicat Interdépartemental pour
         rapides. La génération d’après a
     préféré partir en usine. Il y en a qui
         sont devenus chefs d’atelier.
                                                           “       l’Assainissement de l’Agglomération
                                                                   Parisienne (SIAAP), ainsi que les structures et
                                                                   les personnes qui ont bien voulu confier
                                                                   photographies et témoignages.

                                                                   Conception graphique :
                                                                   Nathalie Ponsard-Gutknecht
                                                                   www.npg-graphic.com

                                                                   © Conseil départemental du Val-d’Oise, 2002/2020
                                                                   ISBN 978-2-36196-033-9

                                                                   Diffusion gratuite

« A la Sainte Catherine, tout arbre prend racine ».
Premières plantations pour la forêt du Grand Paris. 2019.
© Conseil départemental du Val-d’Oise. Photo Catherine Brossais.

                                                                                             Eaux usées, usages de l’eau | 15
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